De la MONUC à la MONUSCO, rupture ou continuité?( Télécharger le fichier original )par Francis MOLAMOYI MASIMWA Université de Kinshasa RDC - Licence 2011 |
IIème PARTIE :LA CONVERSION MONUC/MONUSCO : LA CONTINUITE DE LA MISSIONC'est au regard de l'évolution de la situation que le Conseil de sécurité a estimé qu'il était nécessaire de donner au mandat de la mission des Nations Unies dans le pays une nouvelle orientation, accordant une importance particulière à la consolidation de la paix pour raffermir et faire avancer la stabilisation du pays. Y a-t-il eu des raisons particulières pour voir la Mission changer d'appellation tant l'on se rappelle que non seulement sous la même MONUC ce mandat a à maintes reprises été fondamentalement changé, mais aussi et surtout que celle-ci s'est aussi, quoiqu'implicitement, occupée de la stabilisation du pays ?Avec la MONUSCO, il est question d'achever les opérations militaires en cours dans les Kivus et la Province Orientale et réduire ainsi le plus possible la menace que constituent les groupes armés et rétablir la stabilité dans les zones sensibles51. Le concept achever prouve à suffisance la continuité de cette action amorcée par la MONUC. C'est ainsi Notre deuxième parti comprend deux chapitres, dont le premier traitera : la demande congolaise du retrait de la MONUC, à la problématique du changement et le second abordera : la continuité de la mission de MONUC par la MONUSCO. CHAPITRE I : DE LA DEMANDE CONGOLAISE DU RETRAIT DE LA MONUC A LA PROBLEMATIQUE DU CHANGEMENTLes hauts responsables des Nations-Unies ont été informés de la volonté du Gouvernement qui, tout en souhaitant voir le retrait total de la MONUC de la RDC être constaté courant 2011. Cette position de notre pays se fonde sur la nécessité impérieuse de nous démarquer d'un état d'exception qui dure depuis 1999. Certains esprits chagrins, au paroxysme de la suspicion, ont cru voir dans cette échéance de 2011 un " stratagème " du pouvoir pour " se débarrasser de la MONUC (et) pouvoir truquer les élections générales de 2011. C'est une manière désinvolte, simpliste et caricaturale de présenter l'exercice légitime par la RDC de sa souveraineté. La proximité des élections n'a jamais exonéré un peuple à prendre en charge son destin, au contraire. Les détracteurs oublient un peu vite que nos dirigeants ont été élus en 2006 en plein mandat de la MONUC qui a du reste apporté un concours apprécié au scrutin. On ne voit pas en quoi le retrait de la MONUC leur serait particulièrement bénéfique. Cette mission de l'organisation mondiale n'ayant jamais exercé de mandat d'observation électorale, est-ce à dire que des " hommes d'influence " l'auraient infiltré pour interférer dans le processus électoral contre la majorité au pouvoir ? D'autres, excipent d'une prétendue incapacité de la RDC à se prendre en charge pour accuser le Gouvernement de faire preuve d'irréalisme et d'aveuglement. Ce raisonnement est identique à celui des renégats qui tentaient en 1960 de déstabiliser le mouvement d'émancipation nationale emmené par le leader indépendantiste Patrice-Emery Lumumba d'heureuse mémoire. Après le départ de la MONUC, la RDC ne se transformera probablement pas en un paradis terrestre. Il y aura comme dans tout autre pays, et comme en RDC avant et après l'arrivée de la MONUC, des problèmes socio-économiques ou de sécurité et des abus de droits. Force est cependant d'admettre que la situation aujourd'hui n'a rien de comparable avec le chaos provoqué par la présence inédite dans notre pays d'une dizaine d'armées belligérantes à la fin des années '90, lequel poussa précisément la RDC à solliciter l'assistance des Nations-Unies. Le réalisme commande que soient pris en compte, d'une part la survivance des résidus des bandes criminelles nationales et étrangères dans les territoires du Nord-Kivu et du Sud-Kivu et, d'autre part, les résultats actuels des efforts de reconstitution des forces armées et de sécurité du pays dans la nouvelle, et dernière configuration de la MONUC. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a décidé que le désengagement des forces de la MONUC commence par celles d'entre elles qui étaient déployées dans les zones non perturbées du pays. C'est dans ce sens qu'il a été demandé que d'ici la fin de l'année 2010 le transfert de toutes les unités de la MONUC encore présentes en RDC vers les deux provinces du Nord et du Sud-Kivu qui font encore l'objet d'incursions des groupes armés dans cinq de leurs territoires ruraux. Pour le Gouvernement, les nouvelles attributions de la mission onusienne doivent être exclusivement orientées vers le soutien aux efforts de renforcement des capacités organisationnelles, opérationnelles et d'encadrement des Forces armées de la RDC, de la Police et des forces de sécurité ainsi que l'appui à la réforme de l'appareil judiciaire. Le Gouvernement congolais ayant pris la décision de se faire assister par des partenaires bi ou multilatéraux pour cette réforme globale du Système de la sécurité, l'implication de la MONUC dans ce projet pendant le reste du temps qu'elle aura encore à effectuer dans notre pays a été souhaitée.45(*) Section 1 : La demande congolaise du retrait de la MONUCLe gouvernement congolais a demandé aux Nations unies un plan de retrait progressif de la MONUC. Nous aborderons les accusations formulées contre la MONUC (§1) et la demande formelle du gouvernement congolais du retrait de la MONUC (§2) §1. Les accusations contre la MONUCLe Gouvernement congolais et la MONUC ne semblaient plus entretenir de bonnes relations depuis octobre 2008. Les causes de cette méfiance sont à trouver dans le comportement imputé aux agents de la MONUC, notamment leur attitude complaisante et complice à l'égard des rebelles du CNDP. Des faits saillants ont ainsi fait asseoir dans le chef de l'opinion congolaise l'inquiétude de voir en cette opération non pas un ange gardien de la paix, mais une couverture de distribution de la mort aux Congolais par les Rwandais D'abord, au début de la transition, l'affaire d'un certain major Kasongo qui s'était rebellé contre le Gouvernement au point de voir le RCD violer les accords issus du dialogue inter congolais. On a noté en conséquence des tueries à grandes échelles à Bukavu imputées à Jules Mutebusi et Laurent Nkunda, sans la moindre intervention de la MONUC. Ce qui avait occasionné des émeutes sanglantes à Kinshasa Capitale Kinshasa contre ses installations. Mais ce qui a choqué l'opinion mondiale est le fait que les casques bleus de l'ONU aient laissé la population civile être massacrée par les soldats du CNDP sans la moindre réaction de leur part. Un tel manquement contrastait avec leur mandat de protection de la population civile. Le Professeur Noël Obotela Rashidi résumait les critiques à l'endroit de la MONUC en ces termes : « La détérioration de la situation place la MONUC dans une position inconfortable. Le Nord-Kivu, l'Ituri, le Sud-Kivu et le Nord Katanga baignent dans l'insécurité. Que fait alors la MONUC ? De nombreuses critiques ont été émises à son endroit ». Ensuite, certains agents de la MONUC étaient déjà accusés de scandales et d'abus sexuels depuis 2008. En décembre 2007, par exemple, après des histoires de pédophilie et de trafic d'armes contre minerais attribués au personnel de la MONUC, les Congolais étaient convaincus des soupçons envers celle-ci d'avoir en plus des missions officielles de maintien de la paix, d'autres missions obscures. En prenant la précaution de ne pas perdre des troupes au Congo, les Etats fournisseurs demandaient à leurs militaires de ne pas intervenir, même lorsqu'il s'agirait de protéger les populations civiles. L'engagement intéressé et mercantiliste a engendré un goût affairiste dans le chef des Casques bleus qui n'ont pas pour certains hésité à s'adonner à l'extraction minière. Cet affairisme a engendré une solidarité avec les groupes armés. Pris dans cet angle, l'embrassade chaleureuse de Laurent Nkunda par le colonel indien Sahora Chand en fin de mission ne pouvait pas constituée une surprise scandaleuse. Mais ce qui aurait le plus offensé les autorités gouvernementales ce sont certains attributs de souveraineté bafoués par certains agents de la MONUC. Beaucoup d'autres allégations sont mises à charge de la MONUC allant de la complicité dans le pillage illégal de ressources naturelles au trafic des armes avec les milices congolaises. Cette attitude de la part de la MONUC ne pouvait pas laisser indifférent le Président de la République12. C'est dans ce contexte que nait la demande de désengagement de la MONUC car elle commençait à desservir les intérêts de la paix au Congo. Bref, on avait constaté avec regret qu'en dépit d'énormes services que rend l'ONU en RDC, ces quelques faits et gestes posés par le personnel de la MONUC confortaient la thèse de la nécessité d'encadrer les activités de ce personnel tant civil que militaire. Mais cette demande n'ignorait pas l'importance de la présence de la MONUC sur le territoire congolais.46(*) * 45 SAMBA MUKIRAMFI : « le mandat de la MONUSCO : le consensualisme à l'épreuve de l'unitarisme », Librairie Africaine d'Etudes Juridiques. Vol 11 juillet 2012, pp 3-6. * 46 MUKIRAMFI SAMBA : « le mandat de la MONUSCO : le consensualisme à l'épreuve de l'unitarisme ». Librairie Africaine d'Etudes Juridiques, Vol, 11, juillet 2012, pp 3-6. Op cit |
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