Après la période révolutionnaire de 1972
à 1989, le Bénin s'est engagé sur la voie de la
démocratie suite à la conférence nationale des forces
vives de la nation.
Au lendemain de cette conférence qui a duré du
19 au 28 Février 1990, le Bénin a tourné dos à la
dictature. On ne parle donc que de la démocratie et du
développement. Deux notions qui n'étaient pas trop prises en
compte pendant la période révolutionnaire. Il a fallu alors la
conférence des forces vives de la nation de Février 1990 pour
que les dirigeants béninois commencent par parler du
développement et de la démocratie et surtout de la
démocratie à la base.
L'une des grandes décisions qui a donc
été retenue lors de cette conférence est de permettre aux
populations rurales de gérer elles-mêmes les affaires locales.
L'article 21 de la loi N°97-028 du 15 Janvier 1999
portant organisation de l'administration territoriale de la République
du Bénin précise : « qu'il est
institué dans la structure de l'administration territoriale de la
République du Bénin, des collectivités territoriales
décentralisées dotées de la personnalité juridique
et de l'autonomie financière. »
Quant à l'article 22 de la même loi, elle dispose
que : « les collectivités territoriales
décentralisées visées à l'article 21 prennent la
dénomination de commune. »
La commune est donc comme le dispose l'article 2 de la loi
N°97-029 du 15 Janvier 1999 portant organisation des communes en
République du Bénin, « le cadre institutionnel
pour l'exercice de la démocratie à la base. Elle est l'expression
de la décentralisation et le lieu privilégié de la
participation des citoyens à la gestion des affaires publiques
locales. »
Ainsi, la démocratie à la base ou la
décentralisation doit permettre aux dirigeants de ne plus pratiquer la
politique centralisatrice mais de transmettre certains pouvoirs aux communes et
donc amener les populations à mieux s'impliquer dans le
développement de leur commune.
Marco ROSSI, chef de la section politique et recherche de la
Direction du Développement et de la Coopération(DDC) affirme dans
l'ouvrage intitulé : Décentralisation et
Développement, Berne 1999 p.19 que : « Une
proximité accrue des instances de décision permet à la
population d'influer plus directement sur les autorités locales et les
responsables politiques. ».
Mais le constat qui se fait est que cette population n'est pas
encore consciente des responsabilités qui lui incombent. Il revient
alors tant aux élus locaux qu'aux radios communautaires de permettre aux
populations de mieux cerner cette responsabilité qui est la leur.
Cependant, on note que ces derniers surtout les radios rurales
n'ont pas encore de leur côté compris comment il faut amener ces
populations à se mobiliser pour le développement de leur commune.
La radio rurale qui est un moyen de communication plus proche
de ses citoyens constitue un vecteur de communication et un instrument
incontournable à l'enracinement de ce processus qu'est la
décentralisation. Malheureusement, les radios rurales ne jouent pas
encore pleinement ce rôle.
Quelles sont les raisons qui empêchent les radios
communautaires surtout la radio Ilèma de contribuer à
l'enracinement de la décentralisation ?
Quelles sont les actions qu'elles doivent poser pour permettre
aux populations rurales de mieux s'impliquer dans les affaires
locales ?
Quel intérêt les populations rurales ont à
s'intéresser aux affaires locales ?
Quelles sont les approches de solution pour amener les radios
rurales à contribuer au développement local ?
C'est pour répondre à ces différentes
interrogations que nous avons choisi de réfléchir sur le
thème « CONTRIBUTION DES RADIOS
COMMUNAUTAIRES A L'ENRACINEMENT DE LA DECENTRALISATION AU BENIN : CAS DE
LA RADIO ILEMA. »
Pour mieux apprécier les différents contours de
ce thème, nous aborderons le sujet à travers deux chapitres
précédés d'un chapitre préliminaire :
- Le chapitre préliminaire portera sur le cadre
institutionnel de l'étude, les observations de stage, l'approche
méthodologique.
- Le premier chapitre sera consacré au ciblage de la
problématique, aux objectifs et hypothèses de l'étude.
- Le deuxième chapitre fera enfin état des
approches de solutions et de leurs conditions de mise en application.
Il sera question dans le chapitre préliminaire, de la
présentation du cadre institutionnel de l'étude, du choix du
cadre, à l'observation de stage et de l'approche
méthodologique.
Section I : Cadre institutionnel de l'étude,
état des lieux.
Dans cette partie, nous parlerons de la
structure qui nous a accueillies et nous ferons l'état des lieux.
PARAGRAPHE 1 : Présentation de la
structure
I-Historique
La radio Ilèma est une radio communautaire
créée le 30 Avril 1998. Elle est installée à
Lèma un village de Dassa - Zoumè dans le département des
collines situé à près de 200 km de la capitale
économique du Bénin, Cotonou.
Autrefois nommée Radio Communautaire
Dassa-Glazoué (RCDG), la radio a, avec le temps changé de
dénomination pour devenir depuis onze ans radio Ilèma qui
signifie en langue locale idatcha : `'il fait
jour''. Ce qui veut dire que la radio Ilèma est venue pour
éclairer la communauté locale en la faisant sortir des
ténèbres.
Elle est surtout l'oeuvre de l'Association Culture
Communication et Développement(ACCD) créée en 1973 par
Monsieur François Sourou OKIOH. Elle est basée dans la ville de
Dassa - Zoumè. Elle a pour mission de promouvoir la culture à
travers la communication pour le développement.
La radio Ilèma, c'est aussi une idée
de Monsieur François Sourou OKIOH, cinéaste collecteur de
mémoires. C'est au cours d'une mission effectuée par
l'organisation non gouvernementale belge Vredeseilenden Coopibo(VECO), au
Bénin que le promoteur de l'ACCD a fait part de son ambition d'installer
une radio communautaire dans la ville de Dassa - Zoumè. Veco partageant
cette même ambition a accepté apporter son appui pour la mise en
place de ce médium. Le processus pour l'implantation de la radio
communautaire a alors débuté.
Huit enquêteurs du Centre de
Développement Communautaire(CDC) ont été envoyés
sur le terrain. Ils avaient pour but de connaitre les communautés, leurs
traditions locales, leurs richesses naturelles et culturelles ainsi que leurs
attentes.
Ces études ont été suivies d'une
étude de faisabilité technique. Elle a
révélé que pour un meilleur rayonnement de la radio, il
est souhaitable que les installations pour la diffusion de la radio soient
posées sur la quinzième (15ème) colline, une
colline située à égale distance des deux chefs lieux des
communes de Dassa et de Glazoué.
Dès lors, un comité de préparation de la
radio (CDP) a été mis en place. Composé des
représentants des principaux acteurs de développement des
communes de Dassa et de Glazoué, et de certaines ONG telles que le
Centre International de Développement et de Recherche(CIDR), le Centre
de Recherche et d'Action pour le Développement des Infrastructures de
Base(CRADIB), les groupements féminins et les chefs traditionnels
idatcha et mahi, il a pour but de préparer la
naissance dans de bonnes conditions de celle qui deviendra plus tard la
première radio communautaire dans le département des Collines.
Comme il est dit dans le cahier de charge de ce comité, l'objectif
premier est : « d'expliquer aux communautés les motifs
réels de création de cette radio afin d'obtenir leur
adhésion massive et de les amener à s'approprier ce puissant
instrument de communication. ». Plusieurs tournées
d'informations et de sensibilisation des communautés à la base
ont été effectuées.
Après toutes ces études, un contrat
de partenariat d'une durée de cinq ans a été signé
avec l'ONG Veco. Dans ce contrat, il est stipulé que « Veco
doit appuyer techniquement et financièrement la création de la
radio. ». Dès lors, les travaux de construction des
bâtiments de la radio ont démarré. Les communautés
déjà averties de l'importance de cet outil de
développement se sont impliquées personnellement pour sa
construction. A titre d'exemple, les pierres qui ont servi pour la construction
des locaux étaient concassées et transportées par les
communautés rurales. Elles ont même fait des dons en nature et en
espèce avec une somme de trois millions (3 000 000) de francs
CFA au comité qui a été mis en place. Ainsi le 30 Avril
1998, la radio Ilèma a été inaugurée devant un
parterre d'invités dont les autorités nationales et locales et
les populations.
Elle est régie par la loi 1901 et reconnue
officiellement par le ministère de l'intérieur, de la
sécurité et de l'administration territoriale sous le
n°91-105-MISAT-DAI-S1-ASSOC du 13 Août 1991.
La radio Ilèma est créée suite
à la mise en application de la loi n°97-010 du 20 Août 1997
portant libération de l'espace audiovisuel et dispositions
pénales spéciales relatives aux délits en matière
de presse et de communications audiovisuelle en République du
Bénin.
Elle émettait alors du lundi au vendredi de
12H à 22H et les week-ends de 10H à 23H sur la fréquence
104.5MHZ avec une fréquence relais qui est 98.6 MHZ. Elle est
captée dans les communes de Dassa - Zoumè, Glazoué,
Savè, Savalou, Bantè et dans quelques localités des
départements du Zou et du plateau. Avec le temps, elle a commencé
par émettre tous les jours de six (06) heures à vingt trois (23)
heures sauf les samedis où elle émet jusqu'à minuit pour
la joie de ses auditeurs.
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