I.3.2.Type de participation
Le type de participation désigne la façon ou la
manière dont un individu participe à des actions de
développement.
A ce propos, GOUSSAUT (1960) cité par BOUAZZAOUI (1994)
puis par EL AJJANI (1996) distingue trois types de participation en fonction de
l'engagement du paysan :
- La participation formelle où le paysan participe de
peur d'être sanctionné ;
- L'effet d'imitation où le paysan est
entraîné dans un courant d'habitude ;
- La participation responsable ou le paysan s'engage de
façon consciente et volontaire.
SCHAWRZ (1993) quant à lui estime qu'il y a cinq types
de participation :
- La participation par contribution ;
- La participation par intégration ;
- La participation par insertion ;
- La participation par engagement ;
- La participation par prise en charge.
I.3.3.Les niveaux de participation
On entend par niveau de participation, les différents
moments pendant lesquels la participation des bénéficiaires est
nécessaire. C'est-à-dire les étapes de la vie du projet
pendant lesquelles la population doit nécessairement être
impliquée.
Le tableau suivant essaie de résumer en quoi consiste
la participation des populations à chacun des niveaux de la vie des
projets.
TABLEAU: Participation de la population à
travers tout le cycle de projet
PHASES
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PARTICIPATION DE LA POPULATION POUR :
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IDENTIFICATION
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- Identifier les problèmes à résoudre
- Identifier le problème central à
résoudre
- Décrire l'idée centrale
- Réfléchir sur les solutions, envisager et
proposer des solutions
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INSTRUCTION
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- Analyser de façon détaillée l'idée
du projet (objectifs, résultats, moyens, activités)
- Analyser les problèmes et les options de traitement
- Prendre des décisions sur la nécessité de
poursuivre
- Elaborer un projet de proposition de financement
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FINANCEMENT
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- Estimer les apports de la population cible (ressources
locales)
- Estimer les coûts et moyens nécessaires
- Elaborer une proposition de financement
- Signer la convention de financement
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EXECUTION
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- Respecter le planning établi pendant l'instruction
- S'acquitter de sa part de responsabilité
- Identifier et réfléchir sur les problèmes
qui se posent au déroulement normal des activités
- Modifier si nécessaire certains objectifs
- Evaluer l'évolution générale des
travaux
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EVALUATION
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- Dresser le bilan des réalisations
- Tirer des leçons pour les projets futures
- Analyser l'impact du projet pendant l'évaluation
rétrospective.
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· Les outils de participation
Il est certes important de recommander la participation et
d'étaler ses avantages en faveur du développement, mais, il est
également capital de savoir comment susciter la participation des
populations et quels sont les outils disponibles à cet effet.
· Les atouts de la participation
Nul ne pourra donner de façon exhaustive l'importance
capitale que revêt l'approche participative dans le cycle de vie du
projet, tellement elle est immense.
Les points suivants ne constituent qu'une tentative
d'élaboration de quelques éléments exprimant au maximum la
place de la participation dans la préparation, la mise en oeuvre et le
suivi-évaluation des projets de développement.
Le FIDA (2001) en voulant accroître l'impact de ses
projets au moyen des approches participatives, résume les atouts de la
participation en notant qu'elle permet de :
- S'assurer que la conception du projet traduise bien les
priorités réelles des bénéficiaires et soit
pertinente et réaliste de leur point de vue ;
- S'assurer que le projet atteint la population qu'il vise et
écoute son opinion ;
- Renforcer la prise en charge, la motivation et en fin de
compte la durabilité ;
- Rendre le projet transparent pour les
bénéficiaires ;
- Produire des savoirs ;
- Faciliter la sensibilisation au sommet (partenariats) et
à la base (en demandant des droits sur le plan politique) ;
- Avertir rapidement des problèmes qui surgissent.
La participation devrait aussi être
considérée comme un acte politique car elle permet aux voix de se
faire entendre et modifie ainsi les rapports de force. Elle encourage la
responsabilité et la transparence. BOUKHARI (1995) affirme dans le
même sens que « La participation, c'est la démocratie, c'est
les droits de l'homme ».
Le FIDA (2001) poursuit en précisant que « La
participation est un investissement ; elle exige plus de temps et d'argent mais
à la longue, elle renforce l'impact. Les projets qui reposent sur les
savoirs locaux et les priorités ont plus de chances d'être
durables parce qu'ils sont pertinents et acceptables pour les
bénéficiaires.
La banque mondiale (2004) quant à elle ajoute que la
participation permet aux gouvernements :
- d'avoir des informations représentatives sur les
besoins, les priorités et les compétences des populations
locales, ainsi que l'impact des programmes et des initiatives du gouvernement
;
- d'adapter les programmes aux conditions locales ;
- de délivrer des services de qualité ;
- de mobiliser les ressources locales ;
- d'améliorer l'utilisation et la maintenance des
facilités et service du gouvernement ;
La participation accroît en outre la prise en charge et
la motivation à l'égard des projets, condition nécessaire
mais non suffisante de sa durabilité des projets.
Enfin, la participation est un droit humain car elle
reconnaît aux personnes, aux communautés locales et aux
gouvernements nationaux le droit fondamental d'être associés
à la prise de décisions qui influent sur leur avenir.
· Les contraintes de la participation
L'expérience des approches participatives a
révélé quelques contraintes liées à son
application, aux coûts qu'elles engendrent et à
l'appréhension divergente que les gens ont du concept.
Elle est de plus en plus exigée par les bailleurs de
fond comme un garant de leurs investissements. Elle fait à
présent partie de toute conception de projets de qualité.
Pourtant elle est loin d'être systématiquement
intégrée aux techniques d'indentification et de gestion des
projets de développement.
Même si la notoriété dont jouissent les
approches participatives ne cesse de grandir, il reste cependant difficile de
nier qu'elles sont exigeantes en temps et en argent. Pour mieux étudier
les limites de la participation, il s'est avéré
préférable de l'analyser en deux points distincts :
- Les faiblesses méthodologiques :
L'introduction de la participation dans la planification
présente parfois d'importants points faibles. Cela s'explique d'une part
par le fait qu'on aboutit souvent après diagnostic à des masses
de données ne traduisant que les besoins immédiats de la
situation présente ayant l'aspect de revendications
stéréotypées et d'autre part par le fait que le diagnostic
qui se résume en une liste de recensement de problèmes
entraînent souvent des lenteurs et des blocages à cause des
intérêts parfois divergents des différents groupes
sociaux.
Pour expliquer ce fait, MEISTER (1973) cité par
HAMMANI (1997) pense que « les limites de la participation peuvent
être sous forme de difficultés sociales car elles impliquent des
changements d'une démarche très lente et des blocages dus
à des intérêts de groupes sociaux ». En plus des
difficultés sociales, MEISTER pense que la participation présente
également des difficultés d'ordre structurel et
économique.
Il faut également souligner que l'utilisation des
approches participatives nécessite une grande compétence et de
l'expérience surtout qu'une mauvaise utilisation peut entraîner,
par inadvertance, un obstacle à la communication. ALLISTER (1999)
justifie nos propos en affirmant que « Les approches participatives
peuvent causer de façon non intentionnelle des préjudices
à la communauté ».
- Les faiblesses liées au coût : En
plus des problèmes Méthodologiques que connaît la
participation, il faut ajouter les problèmes de coût que l'on peut
étudier comme suit :
~ Le coût en temps : CLAYTON et al.
(1996) affirme que les approches participatives exigent plus de temps que les
autres méthodes conventionnelles, aussi bien pour les populations
rurales cibles que pour les bailleurs de fonds.
~ Le coût financier : Comme le
coût de temps qu'elles engendrent, les méthodes participatives
peuvent engendrer des coûts financiers plus importants pour les bailleurs
et pour les bénéficiaires, en particulier ceux qui sont les plus
démunis comme les femmes. Ce coût financier élevé
s'explique par les différentes formations à tous les niveaux
qu'exige la participation. Cette formation peut aller des agents de
développement à la masse paysanne sans oublier les femmes ou
certains groupes socioprofessionnels ciblés.
· La participation pendant la vie des
projets
A la lumière de cette modeste analyse effectuée
sur le concept de la participation, il parait évident que la
participation, pour être vraiment efficace, doit toucher tous les
pôles importants du cycle du projet. Nous avons dégagé
à cet effet trois pôles clés interdépendants du
cycle du projet où la participation consistera en une série
d'actions résumées comme suit :
o Un pôle macroscopique ou « Macro
participation »
A ce niveau, donateurs et demandeurs doivent travailler de
pair pour analyser la situation nationale, régionale, locale ou
sectorielle en vue d'identifier les problèmes, les contraintes et les
potentialités. La participation est nécessaire parce que d'une
part les donateurs n'ont pas forcement une connaissance approfondie du
demandeur et de ses préoccupations et d'autre part elle permettrait aux
donateurs de rendre plus flexibles leurs critères
d'éligibilité en faveur des priorités des pays
demandeurs.
A ce propos, L'OCDE (1989) affirme que « l'orientation
pour le développement devrait être déterminée dans
le cadre d'un dialogue constructif entre pays développés et pays
en développement, car, ce sont les pays en développement
eux-mêmes qui ont en dernier ressort la responsabilité de leur
développement. L'aide extérieure ne peut venir qu'en appoint de
leur propres efforts de développement ».
o Un pôle intermédiaire ou « Méso
participation »
Cette participation engage l'organisme ou l'institution
chargée de l'exécution du projet et toutes les structures
administratives et autres institutions présentes sur place ou
concernées par le projet. En effet, ce problème
d'intégration et de coordination des différentes structures a
longtemps été complice de la défaillance des interventions
en milieu rural.
BOUKHARI (1994) affirmait à ce sujet que « dans le
cas marocain il existe généralement beaucoup d'intervenants
administratifs et des organismes internationaux et de plus en plus actuellement
des ONG, d'où le problème de coordination des procédures
du système intervenant ».
o Un pôle microscopique ou « Micro
participation »
La participation au niveau de ce pôle engage le projet
c'est-à-dire les agents du projet et la population
bénéficiaire. C'est la participation proprement dite de la
population locale à l'identification des idées de projet, de
leurs analyses, leur planification, leur exécution et leur
évaluation.
Les agents de développement doivent s'assurer de la
participation des différents groupes socioprofessionnels (genre,
âge, association, religion, ethnie,...) ou trouver des mesures
incitatives à la participation.
Cette participation est la plus importante car la
réussite d'un projet est beaucoup plus liée à la
participation des populations concernées. On peut même affirmer
que les deux autres pôles précédents concourent à la
préparation du pôle microscopique qui est l'aboutissement
souhaité.
En dépit des limites qui viennent entacher son
importance, la participation des populations à leur propre
destinée reste et demeure incontournable dans l'élaboration et le
succès des projets de développement en général et
des projets de développement agricole et rural en particulier. Parmi les
témoignages qui fusent à ce sujet, nous pouvons citer l'exemple
des grandes institutions comme la banque mondiale, cité par ZANA (2003),
qui estime que la moitié des projets de développement rural
qu'elle a financés en Afrique se sont soldés par des
échecs. Parmi les causes, figurent le manque de participation effective
des populations cibles à la définition des idées et des
interventions.
MENHATMA GHANDI cité par le même ZANA (2003)
s'employait à dire que « ce que vous faites pour moi mais sans moi,
vous le faites contre moi ».
Nous achevons ce chapitre avec MULLER cité par EL
AJJANI (2003) qui précise que : « Le seul moyen de réussir
une politique, c'est d'en confier la réalisation à ceux qui ont
intérêt qu'elle réussisse ».
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