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L'assurance sociale et le droit à  la santé

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par Lheb TRABELSI
Faculté de droit de Sfax Tunisie - Master en droit social 2008
  

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B. Les assurés sociaux des régimes particuliers

Afin d'éliminer toute exclusion sociale, l'Etat, par le mécanisme des assurances sociales, intervient pour garantir à certaines catégories socioprofessionnelles un droit à la santé et à la sécurité sociale. Ces catégories, ne remplissant pas les conditions d'assujettissement sous un régime légal de sécurité sociale, bénéficient d'une protection légale par l'aménagement des conditions d'assujettissement en appartenant à des régimes spéciaux.

Toutefois, la précarité de la situation des bénéficiaires risque de les priver de la protection à tout moment, il s'agit du régime des étudiants (1), du régime des artistes créateurs et intellectuel (2) et du régime particulier à certaines catégories de travailleurs (3).

1 Il est utile de rappeler que la loi n° 94-114, du 31 octobre 1994 relative à la protection des personnes âgées dans son Art. 2, et dans un souci de maintenir les personnes âgées à domicile et particulièrement dans le milieu familiale, fait peser sur la famille « la responsabilité de la protection de ses membres âgées et la satisfaction de leurs besoins »

2 En proposant de créer une nouvelle branche « handicap-dépendance » de la sécurité sociale, Arnaud LECHEVALIER voit qu'à l'image de la réforme allemande, la France doit « se donner les moyens, en termes d'organisation comme de financement, pour que le grand âge ne soit plus synonyme de naufrage ». (Alternatives économiques, n° Hors-Serie, La protection sociale, n° 55, 1er trimestre 2003, p43).

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1. Le régime des étudiants

La jouissance des prestations des assurances sociales pour les étudiants qui, à un certain âge, perdent la qualité d'ayant droit d'un assuré social, s'est faite par la loi n° 88-40 du 6 mai 1988 qui vient de modifier la loi n° 65-17 du 28 juin 1965 étendant les régimes de sécurité sociale aux étudiants1.

Ainsi, sont assujettis obligatoirement aux régimes de sécurité sociale, aux termes de l'article 2 de cette loi, « les étudiants tunisiens inscrits régulièrement dans les établissements d'enseignement supérieur de Tunisie et qui ne sont ni assurés sociaux eux même, ni ayants droit d'assuré social »2. C'est donc pour protéger une importante couche sociale dont le nombre ne cesse d'augmenter que le législateur tunisien a, en une première étape, assujetti les étudiants à ce régime pour l'étendre, en une deuxième étape, en faveur des « stagiaires admis au bénéfice du système de stage d'initiation à la vie professionnelle pour les diplômés de l'enseignement supérieur et du système de stage d'initiation à la vie professionnelle pour les diplômés de l'enseignement secondaire et de la formation professionnelle et spécialisée de même niveau ».3

Ce régime est étendu une deuxième fois au profit des stagiaires munis de contrats emplois formation par la loi n° 89-67 du 21 juillet 1989.

En vertu de ce régime, l'étudiant ne peut bénéficier de l'octroi des soins en cas de consultation ou d'hospitalisation, tel que prévu par l'article 4 de la loi n° 65-17, au delà de l'âge de 28 ans révolus4. Ceci va exclure normalement du champ de la protection un bon nombre d'étudiants notamment ceux poursuivant leurs études en mastère et en doctorat et qui pour être encouragés davantage doivent être en sécurité

1 Le décret n° 92-631 du 23 mars 1992 fixant les conditions de bénéfice du régime de sécurité sociale des étudiants et modifié par le décret n°2003-1544 du 2 juillet 2003.

2 L'étudiant et ses ayants droits (conjoint et enfant à charge) ont droit aux soins médicaux gratuits c'est à dire aux prestations en nature des assurances maladie et maternité et ceci sur présentation du carnet de soins familial " étudiant "

3 Art. unique, Al 1er de la loi n°88-6 du 8 février 1988 relative à la couverture des stagiaires en matière de sécurité sociale.

4 Art. 3 Al. 2ème de la loi n° 65-17 dispose que : « L'age limite au bénéfice des régimes des prestations est fixé à 28 ans révolus. Toutefois, il pourra être reculé d'un temps égal à celui passé sous les drapeaux, celui passé dans la fonction publique ou celui pendant lequel l'étudiant a dû interrompre ses études par suite de longue maladie ou de maternité »

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notamment face aux risques pouvant toucher leur santé pour qu'ils puissent participer au progrès des recherches scientifiques en Tunisie1.

De ce qui précède, on peut admettre qu'il serait plus équitable d'étendre la couverture par le régime de sécurité sociale aux étudiants sans aucune limite d'âge surtout que la demande du savoir n'est pas limitée par l'âge.

De toutes les façons, sincère à son caractère évolutif, le droit de la sécurité sociale apporte les remèdes aux insuffisances constatées. Ainsi, la loi n° 2006-51 du 24 juillet 2006 vient d'étendre la couverture sociale au titre des prestations de soins en faveur des diplômés de l'enseignement supérieur et de la formation professionnelle.

Toutefois, cette couverture est limitée dans le temps (pour une seule année) et paraît être même trop courte pour certains diplômés dont les opportunités d'embauchage sont trop minimes, elle aurait dû être renouvelable sous conditions.

Le bénéfice de la protection par ce régime se fait en contre partie d'une cotisation forfaitaire dont le montant actuel est de cinq dinars par an2.

2. Le régime des artistes, créateurs et intellectuels

Toute récente, la protection sociale des artistes, créateurs et intellectuels créée par la loi n° 2002-104 du 30 décembre 2002, semble, à première vue, être attractive. Mais l'examen du nombre des affiliés à ce régime montre qu'il est sous-affilié3, ceci s'explique par :

? Une certaine rigueur qui caractérise les travaux de la commission consultative chargée de l'examen des dossiers des candidats à l'affiliation.

? Le droit d'option entre l'adhésion au régime de la loi n° 2002-104 et le régime de sécurité sociale des travailleurs non salariés des secteurs agricole et non agricole prévu par le décret n° 95-1166 du 3 juillet 1995.

1 « Les étudiants dans tous les pays constituent un élément digne d'intérêt, car ils représentent les cadres futurs de la nation », par Noé LADHARI, Traité de sécurité sociale, Op. cit., p195.

2 Par le décret n° 2003-1544 du 2 juillet 2003.

3 Jusqu'à la fin du mois de juin 2004 l'examen par la commission consultative de 976 dossiers de candidature à l'affiliation a permit d'accepter 210 dossiers contre 191 dossiers refusés et 557 dossiers en instance (source : une note de la direction générale de la sécurité sociale).

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? L'exercice occasionnel et saisonnier de l'activité culturelle par certains artistes folkloristes représentant la majorité des candidats à l'affiliation et qui sont d'un âge un peu avancé.

De surcroît, les conditions du bénéfice de régime telles que énumérées par l'article 2 de la loi du 30 décembre 2002 semblent être difficiles à remplir, le candidat à l'affiliation doit :

? Prouver son appartenance au secteur culturel ou l'exercice d'une activité artistique ou culturelle d'une manière permanente, sur la base d'une pièce délivrée par les services du ministère chargé de la culture.

? Ne pas être assujettis à un régime légal de sécurité sociale.

? Ne pas bénéficier d'une indemnité permanente attribuée par l'Etat ou d'un revenu lié à une autre activité.

Quand à la couverture du droit à la santé, la loi précitée a, à la fois, des mérites et des insuffisances :

Pour les mérites, un droit au bénéfice des prestations de soins est reconnu

pour :

? Les personnes visées ayant dépassé l'âge de 55 ans et bénéficiant d'indemnités permanentes attribuées par l'Etat.

? Les personnes assujetties qui ont dépassé l'âge de 55 ans et qui ne sont pas titulaires d'autre indemnité permanente de l'Etat et ceci sans obligation de payer les cotisations sociales.

? Les personnes âgées de moins de 55 ans et bénéficiant d'une indemnité accordée par l'Etat, et ceci sans condition de paiement des cotisations.1

Pour les insuffisances, le législateur aurait dû reconnaître un droit à la santé pour ceux qui ne répondent pas aux conditions exigées, en leur permettant l'accès aux établissements sanitaires et hospitaliers publics en cas de consultation ou d'hospitalisation. Cet accès aux prestations de soins pourrait être ouvert sur

1 Les dispositions de l'Art. 33 sont prévues à titre transitoire.

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présentation d'un carnet de soins familial délivré en contre partie des cotisations que paye l'intéressé.

3. Le régime particulier à certaines catégories de travailleurs

Pour assurer une couverture sociale au profit de certaines catégories de travailleurs ne répondant pas aux conditions d'affiliation sous un autre régime de sécurité sociale, le législateur, par la loi n° 2002-32 du 12 mars 2002 a institué un régime spécifique à leur profit afin de leur assurer un droit aux prestations de soins ainsi qu'un droit aux pensions de vieillesse, d'invalidité et de survivant.

Ce régime, en vertu de l'article 1er de la loi précitée, s'applique aux personnes suivantes :

? Les employés de maisons attachés au service de la maison, quels que soient le mode et la périodicité de leur rétribution et occupés aux travaux domestiques d'une façon habituelle par un ou plusieurs employeurs, ne poursuivant pas, au moyen de ces travaux, des fins lucratives.

? Les personnes employées par l'Etat, les collectivités locales et les établissements publics à caractère administratif qui ne sont pas couverts par un régime légal de sécurité sociale.

? Les pêcheurs travaillant sur des bateaux dont la jauge brute ne dépasse pas 5 tonneaux, ainsi que les pêcheurs indépendants et les petits armateurs.

? Les agriculteurs travaillant pour leur propre compte et exploitant des superficies ne dépassant pas 5 hectares en sec ou 1 hectare en irrigué.

? Les artisans travaillant à la pièce dans des activités et selon des conditions fixées par arrêté des ministres des affaires sociales et de l'artisanat.

Il y a lieu de noter que le point de rencontre entre tous les intéressés par ce régime est la précarité de leurs emplois, et l'instabilité de leurs revenus. C'est pour cela que le législateur les a spécifiés par un régime particulier afin de les encourager davantage pour adhérer à la sécurité sociale.1

En effet, la protection du droit à la santé pour ces catégories de travailleurs aurait pu être faite sur la base du régime des travailleurs non salariés des secteurs

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agricole et non agricole par l'aménagement des conditions d'affiliation selon les spécificités de chaque catégorie, surtout que la prévision d'un régime spécifique et autonome à leur faveur a connu une sous affiliation dont le taux est de 9.63%.2

La faible adhésion des travailleurs couverts par la loi de 2002 est dûe au changement fréquent d'une activité à une autre ou d'un employeur à un autre du jour au lendemain, ainsi qu'à la faiblesse de leur capacité contributive et l'absence de cultures et de traditions de couverture sociale chez eux.

Ce sont d'ailleurs les mêmes raisons qui vont priver certaines catégories sociales vulnérables d'un droit à la santé.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote