Institut Supérieur de Philosophie et de
Théologie
De Kolwezi
(ISPTK)
SCOLASTICAT Bx JEAN XXIII
B.P. 470 Kolwezi-Katanga
République Démocratique du Congo
*******************************
LE FONDEMENT DE L'ORDRE SOCIAL ET POLITIQUE CHEZ
JEAN-JACQUES ROUSSEAU.
Une lecture de « DU CONTRAT
SOCIAL »
Par
OMARI NGABO Oscar, ofm
Travail présenté en vue de l'obtention du
titre
de gradué en PHILOSOPHIE
Année Académique 2007 - 2008
Institut Supérieur de Philosophie et de
Théologie
De Kolwezi
(ISPTK)
SCOLASTICAT Bx JEAN XXIII
B.P. 470 Kolwezi-Katanga
République Démocratique du Congo
*******************************
LE FONDEMENT DE L'ORDRE SOCIAL ET POLITIQUE CHEZ
JEAN-JACQUES ROUSSEAU.
Une lecture de « DU CONTRAT
SOCIAL »
Par
OMARI NGABO Oscar, ofm
Travail
présenté en vue de l'obtention du
titre de gradué en
PHILOSOPHIE
Directeur : Prof. Dr Pascal KOBA BASHIBIRIRA
Année Académique 2007 - 2008
EPIGRAPHES
« On ne peut comprendre la nature de l'homme si
l'on ne comprend pas la nature de la société »
STRAUSS, L. et CROPSEY, J.
« La nécessité de rechercher le
véritable bonheur est le fondement de notre
liberté »
LOCKE, J.
« Renoncer à sa liberté, c'est
renoncer à sa qualité d'homme »
ROUSSEAU, J.-J.
« L'homme est né libre, et partout il est
dans les fers. Tel se croit le maître des autres, qui ne laisse pas
d'être plus esclave qu'eux »
ROUSSEAU, J.-J.
« La liberté est la balance des droits et
des devoirs : rendre un homme libre, c'est le balancer avec les autres,
c'est-à-dire le mettre à leur niveau »
PROUDHON
« Dans une institution sociale ou politique,
l'ordre ne peut régner, je le pense, que si toutes les diversités
de pensées ou d'avoir concourent non pas à l'intérêt
privé mais à la promotion communautaire où chacun des
membres, en retour, retrouve sa souveraineté primaire : c'est
l'essence même du contrat ».
Fr. OMARI NGABO Oscar, ofm.
DEDICACE
A vous chers parents : papa NGABO KYANYEMA Jean et maman
MATUNDA TALUKENGWE KIKUNI Stéphanie qui, dans la simplicité et la
sagesse incomparables, n'avez jamais cessé de nous éduquer
à l'amour si fort de la vie afin que nous devenions pleinement Homme
dans la connaissance de la Vérité ultime.
A toute notre famille NGABO avec laquelle nous sommes uni par
un contrat indestructible, sauf le cas échéant de la mort, une
énigme. Hommage soit rendu aux frères et soeurs ITENGYA NGABO,
SHABANI NGABO, YAFARI NGABO, NKENYE NGABO et CRISTINE NGABO qui nous ont
déjà précédé dans l'au-delà.
A vous frères franciscains avec qui, par un même
contrat, nous cheminons vers la connaissance de la pleine Vérité,
la "Cause incausée" de notre existence.
A vous tous et à chacun,
Nous dédions ce travail, nos
prémices dans l'univers académique !
AVANT-PROPOS
Par sa nature, l'homme est, dès sa naissance,
ancré dans une société. Celle-ci le porte jusqu'à
la maturité existentielle. C'est justement par le "contrat social" que
cet homme peut retrouver sa liberté et parvenir à la
félicité.
Dès lors, il est impérieux à
l'être humain, que nous sommes, de reconnaître qu'au-dessus de
nous, il y a un Etre transcendant qui, alors, serait l'auteur de notre
existence. En dehors de tout attribut analogique, cet Etre serait appelé
tout simplement "Dieu". C'est à Lui donc, en premier lieu, que nous
adressons nos remerciements pour le si grand "amour-créateur" dont nous
sommes bénéficiaire dès le sein maternel jusqu'en ce
jour.
Nos plus profonds remerciements s'adressent, en second lieu,
à nos chers parents, papa NGABO KYANYEMA Jean et maman MATUNDA
TALUKENGWE KIKUNI Stéphanie, de qui nous tenons l'être et par qui
nous existons. Ils ont su répondre efficacement à leur
tâche de Père et de Mère de la famille dans la crainte de
Dieu.
Nous remercions également le professeur Pascal KOBA
BASHIBIRIRA qui, malgré ses multiples occupations et charges, a
accepté sans peine de diriger ce travail dans un dévouement sans
pareil mais surtout avec une attention soutenue d'une part, et pour ses
conseils édifiants d'autre part; et plus encore pour avoir concouru
efficacement à la réalisation de ce travail.
Etant donné que, par notre nature, nous sommes
liés les uns aux autres par contrat, quoique implicitement ou
explicitement, il nous est conditionnel d'adresser nos plus passionnées
gratitudes aux êtres qui sont chers: à nos frères LUTALA
NGABO, MUSEME NGABO, SAKUNGU NGABO, IBANGO NGABO, MUNYANGI NGABO, JEAN, Pius,
Adolphe, Gamaliel, P. Barthélemy BULAMBO, Floribert, KYATENGA, BILEMBO,
Joachim BILEMBO, MUKOKO Jeanbos, papa KUBALI, papa Léon, papa MUKESI,
papa KILINDA, SAIDO, AMURI, WAMENYA J.C, Abbé Pièce ,
Deogratias etc., qui nous ont soutenu et nous soutiennent encore de loin ou de
près. A nos soeurs VUANAZOBE NGABO, MONIQUE NGABO, TCHEUSI NGABO, FAIDA
NGABO, THIDA, Letitia, Lyllia, Sandra, Sonia, Mireille, FATUMA, NYOTA, etc.,
qui nous aiment tant; et de manière exceptionnelle à nos
chères soeurs: Sr. Marie AKSANTI pour ses conseils virtuels et
encourageants, Sr. Anne NYAMAYAO,fmm et à la Sr. KAVIRA Christine.
Celle-ci, pour ses conseils qui ressortent de ses deux pensées: "l'homme
est ce qu'il a reçu et choisi d'être" et "la décision prise
en toute liberté n'est jamais regrettée"; mais surtout pour sa
subtilité communicationnelle. A nos amis ABELI LUTALA, BUZABWANDOZI,
MONGA YONGONGE, KABUKA KYAKWIDO, KAMANGA WASSO, KYAMUSOKE NDAYALI, LONGOLONGO
MUSSIWA, Alfred, etc. A nos frères et collègues KAMBALE Modeste,
ILUNGA Odon, MUTUTA Clément, MUTOMBW J.C, LUKOJI Félicien, ZUJI
Prosper, KONGOLO Charles, KAHILU J.P., MWANDWE Pierre, ZENG A ZENG
Dieudonné, MWAMBA Théophile, KAZADI Edouard, KISALA Rodriguez,
TSHIBAND Hyacinthe, KAYEU Benjamin, KAKULE Vincent de Paul, KABULO Lucien, MBON
Joachim, BADI Armel, IRENGE Dieudonné, BAZIBUHE Jean de Dieu, MULEKYA
J.C., SAMBU Armand, KANGU Aaron, MIJI Ghislain, KIBALABALA Onésime,
CHIROY Dieudonné, CIRIMWAMI Thaddée, NGAZI J.P, KASONGO Miki,
KABILA Bernard, MUSANGU Dieudonné, NGOY Emmanuel, etc. A nos mamans,
Pétronie et Françoise et leurs époux. A notre homonyme
OMARI et son épouse Hélène, et toute leur famille.
"Les pères sèment dans l'affliction, les fils
moissonnent dans l'allégresse", dit-on. Ainsi, il serait une ingratitude
notoire, de notre part, de passer outre nos formateurs, P. Marie-Pascal, dit
Guru, P. Adélard, P. Pierre MATABARO, P. Manassé, P. Marcel, P.
Gustave et P. Georges, sans leur adresser ce moindre des mots mais compact de
sens qu'est "merci".
A tous ceux qui ne sont pas nommés explicitement mais
qui nous portent quotidiennement dans leur coeur et que nous portons en
retour, qu'ils trouvent ici notre sincère gratitude!
Fr. OMARI NGABO Oscar, ofm.
INTRODUCTION GENERALE
1.
Explication du sujet
Une lecture minutieuse de l'histoire de la philosophie nous
montre qu'à travers les siècles, le 18ème
siècle, notamment appelé siècle des Lumières, est
dialectiquement marqué par le triomphe et les limites
de la raison. Triomphe de la raison dans le champ scientifique, philosophique
et technique, dans ce sens que seuls les faits scientifiques, sociaux... - par
le fait qu'ils sont expérimentables et démontrables-, deviennent
pertinents. Mais aussi limites de cette même raison, car toute
métaphysique est rejetée au profit de la science en raison de
laquelle seul le phénomène est connaissable, tandis que le
noumène est inconnaissable, comme l'affirmera Kant dans La critique
de la raison pure.
En effet, dans tous les domaines, l'esprit de liberté
et d'autonomie fermente. Les nantis veulent accaparer la suprématie
politique en réaction contre les privilèges traditionnels. Tout
finira par le superbe "lever du soleil", une expression
hégélienne, de la révolution française. Ainsi, Kant
proposera une définition des Lumières:
« Qu'est-ce que les Lumières? La sortie de
l'homme de sa Minorité, dont il est lui-même responsable.
Minorité, c'est-à-dire incapacité de se servir de son
entendement sans la direction d'autrui [...]. Sapere aude! Aie le courage de te
servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières
».1(*)
Il va aussi, pendant ce siècle, se constituer une
théorie politique, une nouvelle conception du droit politique, qui
prendra son plein essor chez Rousseau. C'est dans le contexte
d'inégalité où chaque homme déploie ses
énergies pour son auto affirmation et la conquête de sa
liberté, le règne du désordre social et politique, que
Rousseau va surgir avec son «Contrat social» qui, selon lui, est le
fondement de l'ordre social et politique. Par celui-ci, Rousseau cherche
à transformer la société de son temps en substituant la
volonté particulière à la volonté
générale. Il le stipule ainsi : « chacun de nous
met en commun toute sa personne et toute sa puissance sous la suprême
direction de la volonté générale; et nous recevons encore
chaque membre comme partie »2(*) .
2.
Choix et intérêt du sujet
Etant donné que l'homme n'est pas sociable par nature,
mais qu'il est appelé à le devenir, c'est seulement dans la
société qu'il peut développer sa raison et atteindre la
perfection de sa nature.
Notre choix et notre intérêt pour ce sujet
résident dans la compréhension des structures sociales et
politiques actuelles. En effet, nous avons été interpellé
par les intempéries politiques et sociales qui secouent l'Afrique en
général, et en particulier la République
Démocratique du Congo, notre beau pays, eu égards aux
défis que lance « Du contrat social » qui, pour
Rousseau, est le soubassement de tout ordre social et politique. Loin de
constituer une recherche historique, "Du contrat social" établit des
normes qui énoncent le droit. En sus, cela permettra à notre
société de comprendre que seul le contrat pourvoirait à sa
misère en exaltant le primat de l'intérêt
général sur l'intérêt particulier.
3.
Problématique
Dans leur vision moderne, les philosophes définissent
la philosophie comme étant un effort de réflexion
systématique, rationnelle, critique et autocritique basée sur la
totalité du réel. La société étant un des
secteurs de cette totalité, une réflexion philosophique doit
l'affecter. La diversité d'orientations de la réflexion
philosophique étant admise, elle le sera également en ce qui
concerne les problèmes sociaux et politiques. Elle montre que l'on peut
entrevoir les rapports entre philosophie et société d'une double
manière3(*). D'abord
le philosophe s'interroge sur les problèmes de la société,
au sens le plus général du terme. Ensuite, de façon
médiate, la pensée philosophique est confrontée au
développement des sciences sociales ou humaines et la prétention
propre à ces sciences d'être aussi des savoirs scientifiques.
Ainsi, les inégalités dues à
l'injustice, aux guerres, à l'individualisme et à tant d'autres
maux de la société du 18ème siècle,
dénoncées et combattues alors par Rousseau toute sa vie durant,
sont présentes aussi dans la société moderne sous une
autre forme : mondialisation, nouvel ordre international, terrorisme,
droit des minorités, haine tribale et j'en passe. A cet effet, la
problématique du contrat social trouve un écho retentissant dans
la mesure où, en voulant réformer la société, il
fixe des règles qui énoncent le droit. Mais, le contrat social
a-t-il vraiment les moyens de ses ambitions pour gommer la tare de
l'individualisme, source de désordres, afin de créer une
société juste, souveraine et fraternelle ? En fait, qu'est-ce que
le contrat social ? Et, en quoi est-il fondement de l'ordre social et politique
dans l'intellection de Rousseau ? Quelles sont ses implications ? Voilà
en quelque sorte les piliers sur lesquels nous allons bâtir le
présent travail.
4. Etat
de la question
Nous tenons à faire remarquer, ici, que nous ne sommes
pas le premier à orienter les recherches sur la pensée
rousseauiste. Certainement, il y a, avant nous celui qui a basé ses
recherches sur ce même auteur, mais avec une orientation
particulière. Il s'agit notamment d'Alfred Roland MATINGOU qui avait
focalisé son attention sur la notion de l'Etat chez Rousseau. Son
travail4(*) se veut une
réflexion sur le concept de l'Etat dans le but d'en orienter ses fins
rationnelles. Nous signalons qu'en dehors de MATINGOU, personne n'a pu encore
entreprendre, avant nous, un travail sur la pensée de Rousseau dans
notre institution, le Scolasticat Bx. Jean XXIII.
C'est pourquoi, vu la pertinence de la pensée
rousseauiste en ce qui concerne la réforme de la société,
pour notre part, nous avons voulu nous atteler exclusivement au contrat social
et son apport dans la vie sociale et politique. Surtout que pour le moment, le
contrat peut être lancé comme un défi pour la
société moderne.
C'est essentiellement l'ouvrage "Du contrat social. Les
rêveries d'un promeneur solitaire" de Jean-Jacques Rousseau qui nous
servira de support de base.
5. Hypothèses
Parce que le contrat social fixe des règles qui
énoncent le droit, il est nécessaire qu'il soit adopté par
toute société qui se veut juste, souveraine et fraternelle dans
la mesure où il substituerait les volontés particulières
à la seule volonté générale dans laquelle tous les
associés s'y retrouveraient. Ce qui démontrerait et prouverait
son efficacité dans la lutte contre l'individualisme, principe des
désordres social et politique, en instituant la trilogie justice,
souveraineté et fraternité. Le contrat serait ainsi cette
soumission de la volonté particulière, forme d'anarchisme,
à la volonté générale qui n'aurait pour objet que
le bien et l'intérêt commun, et s'exprimerait par un vote auquel
prendraient part tous les citoyens. Dès lors, étant donné
que le contrat substitue les volontés particulières à la
volonté générale, il fonderait donc, selon Rousseau,
l'ordre social et politique par le fait que chaque citoyen participe à
l'exercice de la volonté générale; par conséquent,
à la souveraineté.
Par ailleurs, la philosophie étant cet effort
permanent et discursif, elle est une pensée ouverte si bien que le
philosophe n'est pas celui qui donne des réponses brutes à son
objet d'étude mais il est celui qui pose des questions, qui fait
réfléchir, qui lance le cri d'alarme et propose des pistes de
solution au problème survenu. C'est dans cette optique que Rousseau dans
la peau duquel nous entrons a proposé le contrat social comme la piste
principale qui pourrait transformer la société bien que ce
dernier n'ait pas résolu et ne résout pas les problèmes
sociaux qui se posaient et qui se posent encore aujourd'hui moins encore
à rétablir l'ordre social et politique parce que contesté
par les autorités en place. Sinon, il reste un idéal.
6.
Méthodes utilisées
La méthode est la démarche mentale, la voie
qu'emprunte le chercheur en vue d'atteindre l'objet de sa recherche ou les
résultats escomptés.
Pour ce qui concerne notre travail, la méthode
herméneutique [à l'intérieur de laquelle sont inscrites
les méthodes analytique, compréhensive et critique], semble la
mieux indiquée en tant qu'elle nous permettra d'analyser, de comprendre
et d'interpréter la pensée de Rousseau.
7.
Division du travail
Hormis l'introduction générale et la conclusion
générale, ce travail est réparti en trois
chapitres :
- le premier chapitre analyse le passage de l'état de
nature au contrat social.
- Le deuxième expose l'entendement du contrat dans la
vision de Jean-Jacques Rousseau.
- Quant au troisième, enfin, il fait état de
quelques conséquences issues du contrat social.
CHAPITRE PREMIER: DE L'ETAT DE NATURE AU CONTRAT SOCIAL
INTRODUCTION
La philosophie politique moderne, du début du
17ème siècle jusqu'au 18ème
siècle, a reposé sur deux concepts, à savoir :
l'état de nature et le contrat social. Des théoriciens, tels que
Grotius, Hobbes puis Rousseau, ayant imaginé d'abord les hommes tels
qu'ils vivent dans la condition où la nature les a placés,
affirment que les institutions politiques sont absentes dans un Etat où
règne la parfaite égalité du fait qu'il n'y aura pas de
subordination naturelle et l'homme, par conséquent, ne sera pas un
animal naturellement politique- tel que l'avait affirmé Aristote.
Ensuite, ils ont cherché à établir à la fois les
raisons qui ont poussé les hommes à se procurer de telles
institutions et ce qui peut les rendre légitimes. Enfin, ils vont
s'appuyer sur la thèse de l'égalité naturelle pour
affirmer que l'assujettissement politique ne peut venir que d'une convention :
c'est la thèse du contrat social, laquelle thèse sera l'objet de
notre deuxième chapitre.
Néanmoins, l'expression d'"état de nature" pose
beaucoup de questionnements en ce qui concerne sa véracité
existentielle. Du moins, nous ne prétendons pas nous introduire
largement dans cette polémique de vérité existentielle du
terme- que nous laissons aux théoriciens politiques- mais, au cours de
ce chapitre, nous veillerons à analyser cet état- en donnant
notre point de vue sur l'état en question- moyennant quelques questions
autour desquelles va s'asseoir notre propos : Quel est l'état des hommes
hors de la société civile ? Est-il une fiction ou une
réalité de fait ? N'est-ce pas une similitude de l'anarchisme ?
Pourquoi, alors, ce passage de l'état de nature à la
société civile, et de la société civile au contrat
social ? Voilà, au moins, les questions auxquelles nous tenterons de
répondre par la suite.
I.1 DE
L'ETAT DES HOMMES HORS DE LA SOCIETE CIVILE
Il est important, pour comprendre l'homme moderne et le
situer comme tel, de viser au préalable l'homme de la nature. Une telle
rétrospective permettrait une bonne compréhension du dynamisme de
l'homme en tant qu'être politique.
Pour comprendre la portée de cette reconstruction qui
est l'"état de nature", il vaut mieux, dès lors, passer outre
l'affirmation aristotélicienne selon laquelle « pour l'age
moderne, l'humanité de l'homme ne dépend pas essentiellement de
son rapport à autrui dans la construction d'un ordre juste
»5(*);
antérieure à la construction de ce rapport et indépendante
de lui, cette humanité est donnée dans cet homme isolé,
solitaire qu'étudie le concept d'état de nature.
Néanmoins, cette conception d'Aristote rejoint celle de l'époque
des "Lumières" où l'individualisme, l'égoïsme, l'auto
affirmation, l'honneur, la conquête du pouvoir, etc., étaient au
centre de toute recherche au mépris de l'autrui. Mais alors, la
réflexion politique aura, pour ce faire, comme objet de montrer la
façon dont la création des sociétés civiles peut
restituer cette humanité sans l'affecter essentiellement.
Cependant, autant d'attitudes, selon Rousseau,
caractérisent l'homme de la nature : il est un animal solitaire
mais organisé, au tempérament robuste et vivant paisiblement dans
sa solitude. En réaction farouche contre l'objection de Hobbes selon
laquelle l'homme est naturellement intrépide, et ne cherche qu'à
attaquer, et à combattre- dans la logique de l'homme est un loup pour un
autre-, Rousseau pense au contraire en disant que « rien n'est si
timide que l'homme dans l'état de nature, et [qu']il est toujours
tremblant, et prêt à fuir au moindre bruit qui le frappe, au
moindre mouvement qu'il aperçoit »6(*). Ce faisant, à la
différence de l'animal, l'homme est libre et est doué d'une
faculté de se perfectionner, perfectibilité qui le
caractérise. L'homme est toujours en devenir. C'est un être
temporel et historique.
« Lorsque Rousseau fait recours à la notion de
perfectibilité, c'est bien pour rendre compte du devenir dans l'histoire
et dans les sociétés. Pour maintenir l'historique comme dimension
essentielle de la réalité humaine : l'homme est un être
historique, c'est-à-dire qu'il se fait et qu'il est fait [...].
Perfectible, l'homme l'est, ce qui veut dire qu'il n'est pas encore, dans le
temps de sa venue dans le monde des vivants, un être intégralement
déterminé [...] Ce qui sera demeure comme une tâche
»7(*)
pour réaliser l'intégrité de son
être. Ici, Rousseau se sépare clairement de toutes les
théories philosophiques anciennes qui voyaient dans l'homme un "animal
raisonnable". Pour lui, la raison est une virtualité qui ne se
développera, chez l'homme, que plus tard.
L'isolément de l'homme et l'abondance des richesses
autour de lui, pour satisfaire ses besoins naturels, garantissent la
stabilité de son existence. Il n'est lié à rien,
même pas à sa femme et à ses enfants. Pas de
véritable langage qui répondrait à un besoin de
communication, pas de possibilité de progrès par accumulation de
connaissances nouvelles.
Les passions de l'homme, dans cet état, se
ramènent à l'amour de soi et à la pitié qui est la
seule vertu naturelle reconnue à l'homme de nature et par laquelle
découlent d'autres qualités. Cet homme connaît un amour de
soi immédiat, exempt de véritable égoïsme. Cet amour
de soi naturel, en vue de sa conservation, se transformera en amour-propre dans
l'état de la civilité où l'homme perfectionnera sa raison.
L'homme ne connaît, alors, ni le bien ni le mal; il n'est ni bon ni
méchant et n'a ni vice, car il n'a pas de relations morales, de lois qui
l'unissent à ses semblables. C'est donc une forme de sociabilité
fondamentale. Contrairement à Hobbes, Rousseau affirme que l'homme
naturel n'est pas féroce envers les autres.
Ainsi, dans l'état de nature,
l'inégalité est aperçue comme une réalité
étrangère et nulle, étant donné que chacun
s'auto-suffit et est équilibré. Elle est donc à peine
sensible.
I. 2
NAISSANCE DE L'INEGALITE ET GENESE DE LA SOCIETE
CIVILE
Les différentes caractéristiques de l'homme de
la nature montrent pratiquement que ce dernier n'avait pas de liens sociaux
à proprement parler. Ce faisant, seuls comptaient ses besoins
immédiats. En effet, toutes ses potentialités naturelles
resteraient à l'état virtuel si des circonstances fortuites les
amenaient à en faire des capacités réellement
utilisées. Car, plus l'esprit s'éclaire, plus l'humanité
se transforme. L'homme naturel va donc entrer dans l'histoire pour des raisons
contingentes.
Cependant, contrairement à Hobbes8(*) qui lie la naissance de la
société civile à la crainte réciproque que les
hommes affichaient l'un à l'égard de l'autre, Rousseau la situe
pratiquement à la propriété privée, laquelle, selon
lui, n'est pas naturelle. Car, dit-il, « le premier qui, ayant enclos
un terrain, s'avisa de dire : ceci est à moi, et trouva des gens assez
simples pour le croire, fut le vrai fondateur de la société
civile »9(*).
Néanmoins, Proudhon10(*) en défendant la propriété
privée pour qui c'est un droit naturel, condamne formellement la
propriété foncière qui s'avère perpétuelle
et empêche l'autre de devenir aussi propriétaire.
L'acquisition du sens de la propriété se fait,
en effet, au terme d'un long cheminement. Les difficultés pratiques,
l'expansion démographique, conduisent les hommes à se
côtoyer pour traiter des problèmes d'intérêt commun.
Ainsi, apparaissent un noyau d'organisation, des langages primitifs, des
habitations sommaires, des liens familiaux. Tous ces éléments, en
raison de la perfectibilité humaine, vont s'améliorer sans cesse
et les relations humaines se renforcer. Ainsi surgissent le besoin de
considération et les maux qui lui sont associés (haine,
vengeance, cruauté, ...). Malgré cela, pour Rousseau, il s'agit
d'un véritable "âge d'or", une sorte de nouvel état de
nature dans lequel l'homme a déjà commencé à se
transformer: «Ils vécurent libres, sains, bons et heureux
autant qu'ils pouvaient l'être par leur nature, ...»11(*). Il revient à noter,
dès lors, que ces communautés sont dépourvues de lois, et
ce sont les passions et non les besoins qui les cimentent. Ce sont donc les
premiers progrès qui feront naître une sorte de
société civile.
C'est ainsi que la division du travail, la métallurgie
et l'agriculture viendront mettre fin à cet état de "vie
égale et équilibrée"; un état de vie heureuse. Ce
sont, en effet, le fer et le blé qui, pour Rousseau, sont à la
base de la civilisation des hommes et la perte du genre humain. Alors
disparaîtra l'égalité et naîtra la
propriété qui ouvre la porte à la misère et
à l'esclavage : inégalité, propriété,
misère, esclavage ont une origine sociale, et non pas naturelle, comme
le soutiendraient la plupart des philosophes.
La propriété conduit à créer des
règles de justice destinées à la protéger. Mais
elle donne aussi naissance à une inégalité croissante, due
aux différences de talents. L'homme a profondément
évolué. Et Rousseau de le dire: « Voilà donc nos
facultés développées, la mémoire et l'imagination
en jeu, l'amour-propre intéressé, la raison rendue active et
l'esprit arrivé presque au terme de la perfection, dont il est
susceptible »12(*). Se créent, par le développement des
sciences et des arts, une multitude de besoins qui avilissent l'homme à
la fois à la nature et à ses semblables quel que soit le rang
social. Progressivement, le règne d'une violence
généralisée, avec les usurpations des riches, mais aussi
les révoltes des pauvres, va dégénérer.
Dès lors, avec un contrat social,
l'inégalité va s'institutionnaliser. Par la ruse des puissants,
il s'établit une société pourvue d'institutions stables,
avec un pouvoir suprême gouvernant selon les lois. Les riches
créent des lois, qui constituent un contrat des dupes, et vont devoir
imposer celles-ci, instituant la société civile, lois qui leur
sont entièrement favorables. Par ailleurs, cette société
civile, constituée d'abord par un pacte simple entre tous les partisans,
dégénère rapidement en violences, car les conventions sont
trop faciles à tourner; elle conduit à la possession du pouvoir
par quelques magistrats : ainsi, la recherche de la sécurité va
mener directement le peuple à l'esclavage. Les magistrats se
transformeront donc progressivement en despotes.
De ce qui précède, il faut affirmer que
l'égalité naturelle n'est pas seulement une expression
prônée autrefois, mais qu'elle est actuelle. C'est un "slogan" qui
parcourt non pas seulement les siècles, mais qui, aujourd'hui dans
toutes les constitutions presque, traduit la volonté des hommes, quoique
idéale, à promouvoir la vie sociale. En République
Démocratique du Congo (RDC), par exemple, dans sa constitution au Titre
II concernant les droits humains, les libertés fondamentales et les
devoirs du citoyen et de l'Etat; le chapitre Ier, en ses articles 11 et 12
stipule que « tous les êtres humains naissent libres et
égaux en droits »13(*). Et par la suite, « tous sont égaux
devant la loi et ont droit à une égale protection des lois
»14(*). Cette
égalité prônée, donnerait la chance à tous
les hommes, et aux congolais en particulier, de jouir des mêmes droits et
privilèges; ce qui est paradoxal quand nous la confrontons avec les
réalités de nos sociétés. C'est dire que les hommes
ne s'aiment pas naturellement en tant qu'hommes. Ce manque d'amour
amène, en effet, aux choix et à la préférence dans
les relations humaines. En fait, aimer l'autre serait non pas parce qu'il
partage mes sentiments ou adhère à mes convictions, mais parce
qu'il est homme comme moi. Ainsi donc, l'honneur et l'utilité ne
seraient plus les principes de base pour un certain choix d'un compagnon, d'un
ami, car, tous, nous sommes conditionnés à nous aimer
naturellement.
Cependant, diverses activités font réunir les
hommes, non pas parce qu'ils veulent rester ensemble et poursuivre un but
commun afin de construire une société solide et fraternelle, mais
parce que chacun cherche à promouvoir ses intérêts
privés. D'ailleurs
« la vie de grandes nations se caractérise par
le commerce, et par conséquent par la distinction entre riches et
pauvres. Tout homme peut rechercher le profit dans le cadre établi par
l'Etat. L'argent est le critère de la valeur humaine et la vertu est
oubliée. Le calcul de son propre avantage privé est le fondement
des relations humaines; il se peut que cela n'aboutisse pas à la guerre
perpétuelle, mais néanmoins, cela anéantit les fondements
de la confiance et d'une socialité aisée, et cela conduit
à l'égoïsme et à une concitoyenneté
médiocre »15(*).
Pareille assemblée où chacun cherche
à conquérir et à posséder conduit souvent à
des luttes entre les hommes. Cela est même l'une des causes primordiales
des guerres entre les personnes, les communautés, les nations et
même les continents à travers les siècles.
De tout ce qui précède, on peut, par extension,
établir une analogie entre l'état de nature et l'anarchisme
d'autant plus que ce dernier, du point de vue politique se définit comme
une doctrine politique reposant sur le postulat selon lequel les hommes sont
par nature bons et sociables et que l'organisation des masses en
communautés est spontanée. L'anarchisme rejette en
conséquence toute intervention de l'Etat et de son autorité en se
donnant pour but la destruction de celui-ci pour le remplacer par la libre
association toujours réversible entre les individus.
I.3
ETAT DE NATURE, UN ETAT FICTIF
L'état de nature, en soi, n'a jamais existé. Il
n'est pas à prendre pour une vérité historique car,
l'homme est naturellement social et politique. Il a toujours besoin de l'autre
par le fait qu'aucun homme ne se suffise16(*). D'ailleurs, les recherches scientifiques nous
éclairent là-dessus dans la mesure où elles construisent
des raisonnements hypothétiques et conditionnels; plus propres à
éclaircir la nature des choses, qu'à en montrer la
véritable origine. Ainsi,
« L'imaginaire ne renvoie pas aux choses du monde,
chez Rousseau, mais d'abord à l'existence [...], l'imaginaire est
ouverture de l'existence et de la pensée à la tâche
primordiale qui est de vivre selon la destination naturelle. Ouverture, en
elles, de la dimension la plus essentielle : la dimension morale. Un imaginaire
donc, ou plutôt une idée, au sens que ce terme va prendre chez
Kant : un élément régulateur de l'action et de l'existence
»17(*).
CONCLUSION
Dès lors que l'homme a quitté l'état de
nature, dans lequel il vivait libre, oisif et paisible, l'homme tombe de
façon irréversible dans l'histoire, avec son cortège de
maux : le développement des sciences et des lettres, façade
brillante qui cache la corruption profonde des moeurs, induit
inégalité et par conséquent, servitude et malheur dans une
civilisation dépravée. En effet, faute d'un retour impossible
à l'âge d'or, Rousseau va maintenant tenter de retrouver, dans le
domaine collectif, une nouvelle liberté. Ce sera le dessein de
Contrat social.
L'état de nature, loin d'être une
réalité, devient le moment où chaque homme cherche
à se conserver à tout prix au nom d'une prétendue
égalité sociale. C'est la période de la guerre de tous
contre tous. Mais vu que l'être humain est intelligent et rationnel, il
doit assumer sa condition présente, en la transcendant, en vue de se
réaliser. Cet homme devra passer, en effet, par trois stades : le
premier est celui de la prise de conscience qu'il doit être en contact
avec ses semblables; le deuxième est celui de la vie communautaire qui,
à force de se côtoyer, a créé des luttes permanentes
et des vengeances entre les hommes- c'est la période pendant laquelle
chacun cherche à se conserver. Le troisième, enfin, c'est
l'avènement du contrat social où chaque homme adhère
volontiers à la volonté générale qui le rend libre
et assure l'ordre social et politique, et lutte contre la guerre
perpétuelle, la guerre civile.
CHAPITRE DEUXIEME : DE L'INTELLIGIBILITE DU CONTRAT SOCIAL
DANS LA PERSPECTIVE ROUSSEAUISTE
INTRODUCTION
La conjoncture sociale et politique vécue au
17ème siècle où l'homme était devenu un
loup pour l'autre, par des révoltes, des guerres civiles et autres
anarchismes; cette conjoncture sera plus expérimentée au
18ème siècle par la révolution industrielle et
la robotisation. Cette mutation sociale va susciter un bon nombre de
philosophes à penser à constituer un "état civil"
où chaque homme serait libre et où tous seraient égaux, en
référence à un état hypothétique ou
mythique, l'"état de nature". Ce nouvel état va naître d'un
contrat social où tous les hommes remettront leurs volontés
particulières à une volonté générale.
En effet, le contrat suffit-il pour garantir la paix, la
sécurité et la justice dans une société ? Qu'est-ce
qu'en fait un contrat social selon que l'entendrait Rousseau ? Y a-t-il
intérêt à contracter ? Ce sont autant de questions sur
lesquelles va s'articuler le présent chapitre. Mais avant tout
commentaire, signalons que la pensée politique de Rousseau s'oriente
à partir du présent dans deux directions dont l'heureuse
liberté de l'homme dans le passé et l'établissement d'un
régime futur qui pourra invoquer la volonté de ceux qui vivent
sous son autorité. C'est la tâche même du philosophe que
d'éclairer ce qu'est véritablement la nature humaine et, à
partir de là, de définir les conditions d'un bon ordre
politique.
II.1
ROUSSEAU ET LA POLITIQUE
Au milieu des tumultes sociopolitiques susmentionnés,
Rousseau opère deux réformes capitales : celle de
l'éducation qui est un plan de réforme pour l'individu et celle
de la politique qui est un plan de réforme pour la
société. Dans cette seconde réforme- objet de notre
propos-, Rousseau cherche à appliquer à la société
un principe fondamental qui va susciter un débat difficile et dont la
solution constitue sa politique. Mais, la politique quid ?
Etymologiquement, la politique est l'art de diriger une
cité, un Etat. Mais, alors que les aristocrates définiraient la
politique comme l'"art de conduire les peuples en le trompant" pourvu qu'ils
les écrasent davantage, et les démocrates comme l'art de guider
ces mêmes peuples en les éclairant sur leur propre avantage,
Rousseau, pour sa part, effectue une réponse qui renferme la
définition démocratique en la dépassant. Il ne suffit donc
pas, pour lui, d'éclairer les peuples mais, surtout, il s'agit de les
transformer.
Ainsi dit-il:
« la définition aristocratique de la politique
réduit, en effet, cet art à son niveau le plus bas: celui des
faits et des institutions établies. Il en résulte que la
pseudo-science de la politique n'est, dans cette perspective, que la
justification ou la tolérance du fait accompli [...]. La vraie
politique, donc, est celle qui transforme la cité pour rendre les hommes
le moins malheureux possible et pour tenter de leur procurer un bonheur durable
qu'eux-mêmes auront mérité: cette lourde tâche
suppose qu'on sache allier la connaissance du possible à la prescience
ou la conscience des ressources encore inexplorées de la
générosité humaine »18(*).
Ayant appliqué à la société le
principe fondamental selon lequel l'unique forme d'association légitime
est le contrat social, Rousseau dans son traité Du contrat social ou
principes du droit politique pose donc, dès le départ, le
problème en ces termes : « je veux chercher si, dans l'ordre
civil, il peut y avoir quelque règle d'administration légitime et
sûre, en prenant les hommes tels qu'ils sont, et les lois telles qu'elles
peuvent être. Je tacherai d'allier toujours dans cette recherche ce que
le droit permet avec ce que l'intérêt prescrit, afin que la
justice et l'utilité ne se trouvent point
divisées»19(*). Par là, il veut considérer les
conditions de possibilité d'une autorité légitime en
élaborant des "principes du droit politique". Du contrat social
ne constitue donc pas une recherche historique, mais il établit des
normes qui énoncent le droit.
Une question se pose, à savoir celle de celui qui est
habilité à faire de la politique ou à écrire sur la
politique. La lecture du Du contrat social montre que ce traité
ne résout pas tous les problèmes, puisque par définition
la politique, dit-on, est l'art du concret. Ce qui fait que Rousseau se
contente de définir les règles du jugement politique, en prenant
soin que celles-ci soient applicables à toutes situations
données. Il ne confond pas non plus son travail de théoricien et
celui de l'homme d'action ou du législateur, même s'il rêve
de devenir lui aussi législateur d'un peuple. C'est dans cette tension
du fait et du droit, dans cette dialectique de la théorie et de la
pratique, que réside l'essentiel de son message quand il dit : «
on me demandera si je suis prince ou législateur pour écrire
sur la politique. Je réponds que non, et que c'est pour cela que
j'écris sur la politique. Si j'étais prince ou
législateur, je ne perdrais pas mon temps à dire ce qu'il faut
faire; je le ferais, ou je me tairais »20(*).
II.1.1
L'ESSENCE DE L'ORDRE SOCIAL
L'être humain, selon Aristote, est un être
naturellement social. Il naît, grandit et meurt dans la
société. C'est pourquoi il est si difficile de s'imaginer un
être isolé de la société. Car, ce dernier ne se
réalise que dans un cadre social donné- L'état de
nature21(*) est à
comprendre, donc, non point d'une manière historique, mais comme
état de l'homme quand on en retranche, de manière purement
hypothétique, ce que la société lui a fourni et
apporté. C'est ainsi que de toutes les premières
sociétés, Rousseau envisage la famille comme la plus ancienne et
la seule naturelle. Naturelle car, elle n'est pas obtenue par convention. Et
les enfants qui y sont nés ne choisissent pas d'y naître, c'est un
fait du "hasard", ou mieux, naturel.
Par contre, « les enfants ne restent-ils liés
au père qu'aussi longtemps qu'ils ont besoin de lui pour se conserver.
Sitôt que ce besoin cesse, le lien naturel se dissout. Les enfants,
exempts de l'obéissance qu'ils devaient au père, le père,
exempt des soins qu'il devait aux enfants, rentrent tous également dans
l'indépendance »22(*). Cette indépendance n'est pas une scission
définitive des relations entre père et enfant mais c'est le temps
où, déjà adultes, les enfants deviennent capables de
s'auto-conserver; une obligation naturelle à tout être humain.
Pour que règne l'ordre, il est donc de nature à
toute société d'être structurée en suivant une
certaine hiérarchie. « La famille est donc, si l'on veut, le
premier modèle des sociétés politiques: le chef est
l'image du père, le peuple est l'image des enfants; et tous,
étant nés égaux et libres, n'aliènent leur
liberté que pour leur utilité. Toute la différence est
que, dans la famille, l'amour du père pour les enfants le paie des soins
qu'il leur rend; et que, dans l'Etat, le plaisir de commander supplée
à cet amour que le chef n'a pas pour ses peuples »23(*). Grotius, quant à lui,
refuse que le pouvoir humain soit établi au profit des gouvernés
en illustrant, comme appui de sa conviction, l'esclavage. Aristote, lui aussi,
va réfuter l'affirmation selon laquelle tous les hommes naissent
égaux et libres car, dit-il, « nous ne prétendons, quant
à présent, établir rien de plus, sinon que, par les lois
de la nature, il y a des hommes faits pour la liberté et d'autres pour
la servitude, auxquels, et par justice et par intérêt, il convient
de servir »24(*). D'une part, cette conviction d'Aristote tient debout
dans la mesure où nous sommes égaux "de jure",
c'est-à-dire de nature mais inégaux "de facto". Au fait,
l'expérience montre qu'il y a d'énormes imperfections parmi les
hommes : inégalité physique, intellectuelle, ....
De nos jours, du moins,
« quel que soit le niveau sectorial, local,
régional, national ou international auquel nous pouvons nous situer pour
le décrire, le monde dans lequel nous vivons aujourd'hui se
présente, fondamentalement comme un monde d'inégalités et
d'injustices, [...], où les uns sont toujours plus heureux et les
autres toujours plus malheureux! Cela, à tous points de vue, cela dans
tous les domaines : justice, santé, alimentation, éducation, ...
En effet, nous y trouvons, d'un côté, ceux à qui tout est
permis, qui sont au-dessus de la loi et, de l'autre, ceux à
l'égard de qui la même loi se montre particulièrement
cruelle et inhumaine »25(*).
D'autre part, en niant l'égalité naturelle des
hommes et ayant affirmé que les uns naissent pour l'esclavage et les
autres pour la domination, Aristote semble prendre l'effet pour la cause. Car,
« tout homme né dans l'esclavage naît pour l'esclavage,
rien n'est certain. Les esclaves perdent tout dans leurs fers, jusqu'au
désir d'en sortir; ils aiment leur servitude [...]. S'il y a donc des
esclaves par nature, c'est parce qu'il y a eu des esclaves contre nature. La
force a fait les premiers esclaves, leur lâcheté les a
perpétués »26(*).
En revanche, aucun pouvoir légitime ne peut survenir
de la force car, celle-ci est une puissance physique de laquelle rien de
moralité ne résulte de ses effets. Par conséquent, elle
devient un acte de nécessité et non point de volonté du
fait que la volonté est toujours positive. C'est seulement par prudence
qu'on fait recours à la force, laquelle force n'engendre donc aucun
droit. Le droit est légitime et suppose n'être pas
conditionné par la force dans la mesure où une fois la force
anéantie par une autre supérieure, le droit cesse à
l'instant même. Dès lors, on n'est obligé d'obéir
qu'aux puissances légitimes27(*).
La liberté de l'homme étant naturelle, son
obligation d'obéir à la puissance légitime n'est pas un
esclavage. L'homme demeure libre dans ses actions et, contrairement à
d'autres penseurs (Aristote, Spinoza, Diderot, ...), Rousseau affirme que la
liberté28(*) est la
caractéristique essentielle de l'homme. Mais, il arrive que cet homme,
libre par nature, ne s'appartienne plus : il devient donc
aliéné. Aliéner, selon Rousseau, signifie donner ou
vendre. Ainsi donc, un être aliéné est celui qui ne
s'appartient pas. Un individu, un peuple peut se vendre ou se donner sous
plusieurs motifs : soit pour s'assurer la subsistance, soit pour sa
sécurité ou encore pour sa tranquillité.
Ceci s'expérimente à travers le monde
aujourd'hui où beaucoup d'hommes et de femmes sont
aliénés si pas au niveau individuel (par le sexe, le travail, et
autres maux ou abus commis sur eux à cause de la pauvreté),
régional, national (par la crise économique), culturel (par la
mode, ...); etc. En Afrique, et en particulier en République
Démocratique du Congo, à cause de la disette issue des guerres
calamiteuses, certains souhaiteraient le rétablissement des pouvoirs
déchus en guise d'une référence périodique de
tranquillité, de stabilité, dite de "paix". D'autres encore,
souhaiteraient le retour de la colonisation. En Irak, de même, vu la
multiplicité des hostilités, certaines opinions
réclameraient le retour de Saddam au pouvoir. Tout ceci, ce sont de
sortes d'aliénations. En effet, Rousseau récuse le pacte de
soumission car « renoncer à sa liberté, c'est renoncer
à sa qualité d'homme »29(*).
Ainsi, ayant rejeté la famille comme modèle de
la société politique, ainsi que les théories de Grotius et
de Hobbes selon lesquelles le droit, issu des faits donne le pouvoir à
un petit nombre de chefs de nature supérieure, c'est-à-dire,
à une minorité d'individus; ayant rejeté l'autorité
naturelle et la force comme sources du droit et de légitimité;
ayant établi que la doctrine selon laquelle l'autorité peut
être fondée sur une convention d'aliénation est
inacceptable, Rousseau souligne qu'une convention "unanime" d'association,
antérieure aux institutions, est indispensable. En effet, «
puisque aucun homme n'a une autorité naturelle sur son semblable, et
puisque la force ne produit aucun droit, restent donc les conventions pour base
de toute autorité légitime parmi les hommes »30(*).
II.1.2
LE VRAI CONTRAT
Dans la société civile, plusieurs contrats
sociaux sont conclus, mais, loin d'être bénéfiques pour
tous les peuples, ils deviennent uniquement l'apanage des puissants et des
riches. Ces derniers concluent des engagements, signent des paternariats en
brandissant l'intérêt commun mais, en vérité,
derrière lequel sont cachés uniquement leurs appétits. Les
constitutions auxquelles la population est soumise, ne sont que des
intérêts masqués des gouvernants et des riches. Ceux-ci
créent donc un contrat social qui n'est que celui des dupes, et imposent
par le fait même des lois fondant la société civile, lois
qui leur sont entièrement favorables et légalisent
l'inégalité des biens. « Telle fut, ou dut être,
l'origine de la société civile et des lois, qui donnèrent
de nouvelles entraves au faible et de nouvelles forces au
riche»31(*).
Certains contrats, pour ce faire, peuvent être
déclarés illégitimes par la manière dont ils ont
été conclus; soit par l'application de la force, soit par la
conquête, soit par la soumission en faisant ou se faisant esclave. De
tels contrats sont appelés "pseudo contrats" qui ne sont pas issus de la
liberté mais sont fruits de la force. Et, étant nés de
force, une autre force supérieure peut les rompre de sorte que «
si je ne considérais que la force, et l'effet qui en dérive,
je dirais: tant qu'un peuple est contraint d'obéir et qu'il
obéit, il fait bien; sitôt qu'il peut secouer le joug et qu'il le
secoue, il fait encore mieux: car, recouvrant sa liberté par le
même droit qui la lui a ravie, ou il est fondé à la
reprendre, ou l'on ne l'était point à la lui ôter
...»32(*).
Evidemment, l'origine des désordres sociaux et
politiques (guerres, famines, tribalismes, racismes, etc.), qui secouent la
paix dans le monde, aujourd'hui, c'est ce manque d'un "vrai contrat" parmi les
individus, les sociétés, les nations, ... D'aucuns nous
demanderaient la place des accords nationaux et internationaux qui sont
signés, les lois qui sont votées, les constitutions, etc. Nous
leur dirons seulement que tout cela, ce sont les différentes
manifestations des contrats, lesquelles manifestations ne sont pas de
véritables contrats car, elles sont teintées de
particularité; c'est-à-dire, un petit groupe seulement en profite
en dépit d'une multitude.
Ainsi donc, les conditions suivantes permettent d'aboutir
à un véritable contrat: « trouver une forme
d'association qui défende et protège de toute la force commune la
personne et les biens de chaque associé, et par laquelle chacun,
s'unissant à tous, n'obéisse pourtant qu'à lui-même,
et reste aussi libre qu'auparavant »33(*).
II.1.2.1 Définitions du contrat
Le concept contrat est familier et courant tant dans
le langage "vulgaire" qu'académique. Dans le langage vulgaire, les
résolutions, les rendez-vous pris- quels qu'ils soient, individuels ou
collectifs- sont exprimés en termes de "contrat". Certains disent, par
exemple, "j'ai signé le contrat de ne pas manger le porc" ou encore "de
ne pas poser tel ou tel acte"; ... Tout ceci pour dire : j'ai pris l'engagement
ou la résolution de manger ou de ne pas manger, de faire et de ne pas
faire ceci ou cela.
Néanmoins, quoique social, le terme contrat est
générique ou mieux encore équivoque du fait qu'il est
manipulé dans plusieurs domaines scientifiques; et, surtout en sciences
humaines. En général, le contrat se veut une convention par
laquelle une ou plusieurs personnes s'obligent envers une ou plusieurs
personnes, à donner, à faire ou à ne pas faire quelque
chose34(*). On parle, en
effet, de contrat synallagmatique ou bilatéral quand il y a une
obligation réciproque pour les contractants, et du contrat
unilatéral quand l'obligation n'est que pour l'une des parties
contractantes. Ainsi, le contrat devient une action de s'engager ou d'engager
une affaire. Généralement, il peut se définir comme un
engagement pris ou un accord conclus entre individus ou entre individu et
société, à entreprendre une activité.
Vu cette équivocité conceptuelle du contrat,
nous, nous l'abordons dans le sens où Rousseau l'a
appréhendé. Rousseau, en effet, définit le contrat (ou
pacte social), en ces termes: « chacun de nous met en commun toute sa
personne et toute sa puissance sous la suprême direction de la
volonté générale; et nous recevons encore chaque membre
comme partie indivisible du tout »35(*). Pour lui, c'est le début même de
l'organe de l'Etat. Hobbes, par contre, estime que le contrat soit seulement un
acte qui se conclut entre deux ou plusieurs personnes qui transigent
mutuellement de leurs droits36(*). Ainsi donc, une déduction selon laquelle le
contrat est un ensemble de conventions par lesquelles les citoyens, librement
et volontairement, en échangeant leur liberté naturelle contre la
paix et la sécurité constituent le pouvoir commun, est valable.
C'est ainsi qu'il est possible de parler, en dehors de la liberté et de
la volonté, du contrat comme acte artificiel relevant seul de
l'humain.
II.2 LES EFFETS BENEFIQUES DU
PACTE SOCIAL
Après nous être appesanti sur la
définition du pacte social légitime où chaque homme se
remet à l'autorité de la loi et à la volonté
générale, nous voulons épingler, ici, quelques
répercutions qui émanent du pacte social dont: l'état
civil et la possession des biens.
II.2.1
DE L'ETAT CIVIL
L'état civil, fruit de la volonté
générale, est une nouvelle naissance de l'homme. Ce bond de
l'état naturel à l'état civil effectué par celui-ci
marque des signes de changement où, désormais, il substitue
l'instinct à la justice- cette faculté rationnelle ou
intelligible de rendre à chacun son dû-, et d'autant plus que
toutes ses actions, toute sa conduite seront couronnées par une
moralité qui lui manquait à l'état de nature. Les hommes
dans l'état de nature
« n'ayant entre eux aucune sorte de relation morale,
ni de devoirs connus, ne pouvaient être ni bons ni méchants, et
n'avaient ni vices ni vertus, à moins que, prenant ces mots dans un sens
physique, on appelle vices dans l'individu les qualités qui peuvent
nuire à sa propre conservation, et vertus celles qui peuvent y
contribuer ; auquel cas, il faudrait appeler le plus vertueux celui qui
résisterait le moins aux simples impulsions de la nature
»37(*).
De même que le passage de l'état de nature
à l'état civil opère un changement important dans
l'être humain, de même, la constitution38(*) transforme la vie politique et
sociale. A l'état civil, l'homme conquiert sa vraie liberté et sa
sécurité, résultant de l'obéissance aux lois car,
« l'obéissance à la loi qu'on s'est prescrite est
liberté »39(*). D'ailleurs, le principe "qui perd gagne" se
vérifie nettement dans la mesure où
« ce que l'homme perd par le contrat social, c'est sa
liberté naturelle et un droit illimité à tout ce qu'il
tente et qu'il peut atteindre; ce qu'il gagne, c'est la liberté civile
et la propriété de tout ce qu'il possède [...], il faut
bien distinguer la liberté naturelle, qui est limitée par la
volonté générale, espèce d'adhésion: et la
possession, qui n'est que l'effet de la force ou le droit du premier occupant,
de la propriété, qui ne peut être fondée que sur un
titre positif »40(*).
II.2.2
LA POSSESSION DES BIENS
Les franciscains de l'Ordre des Frères Mineurs, le
jour de leur consécration, promettent une donation totale à la
"Fraternité", cette personne abstraite mais qui se réalise ou qui
est vue dans chaque frère la constituant. "Se donner à " signifie
donc, se déposséder, se vendre, devenir autre que soi-même,
qui, enfin, signifie s'aliéner ou vendre sa liberté primitive.
Loin de penser qu'en "se donnant" à une institution,
quelle qu'elle soit, on "se dénature", nous, nous pensons que l'acte
d'adhésion dans une quelconque institution ou association, ou mieux
encore dans une société, est libre et volontaire; et,
étant "acte libre", l'homme qui obéit à la loi, aux
institutions, à l'autorité qu'il s'est lui-même
données demeure libre comme avant. Car, c'est à lui-même
qu'il obéit. Il en est de même pour la politique où
« chaque membre de la communauté se donne à elle au
moment qu'elle se forme, [...], lui et toutes ses forces, dont les biens qu'il
possède font partie »41(*).
En définitive, quelle que soit la forme ou la
manière par laquelle les hommes, individuellement, ont acquis les biens
et se sont réunis, l'Etat42(*) reste à l'égard de ses membres,
maître et garant de tous les biens en raison du contrat social, et cette
mise en communauté crée, pour ainsi dire, un véritable
droit assurant la légitime possession personnelle. Autrement dit, c'est
l'Etat, en tant que coordonnateur qui distribue à chaque particulier en
partant de ses nécessités. Mais il est à noter que dans la
plupart des pays où la mauvaise gouvernance règne, le concept
"inégalité" devient apparent et illusoire, de sorte que, on le
voit, le pauvre s'appauvrit davantage et le riche s'enrichit de plus. Alors
qu'au lieu de briser l'égalité naturelle, le pacte fondamental
devrait, par contre, substituer « une égalité morale et
légitime à ce que la nature avait pu mettre
d'inégalité physique entre les hommes, et que, pouvant être
inégaux en force ou en génie, ils deviennent tous égaux
par convention et de droit »43(*). Ce pacte ne peut être rompu qu'en cas de
l'unanimité de l'assemblée.
CONCLUSION
L'inégalité naît parmi les hommes quand
les uns commencent à s'estimer supérieurs aux autres, soit par
leur science ou raison, soit par leur richesse. Ceux-ci, dès lors,
s'éloignent de l'ensemble et forment un groupe à part des
"évolués". Effectivement, c'est cet esprit qui a prévalu
au 18ème siècle. Les rationalistes et les
scientifiques, riches par la possession cognitive et matérielle, se sont
écartés de la masse sociale, l'ont assujettie à leurs
appétits et ont formé une classe à part. Désormais,
c'est sur des volontés individuelles (honneurs, gloire, richesses,...)
que seront fondées les valeurs sociales et politiques des nouvelles
sociétés industrielles.
Il faudrait le surgissement de Rousseau pour contester cette
forme de vie et d'en proposer le contrat ou principes du droit
politique en vue de réhabiliter l'ordre et la
légitimité dans la société : c'est la thèse
du contrat social où la volonté générale sera mise
exergue. Cette dernière lui a valu le mérite d'avoir entrepris la
clarification de la signification de la théorie et de la pratique
modernes, et ce faisant, il a mis en lumière les conséquences
radicales de la modernité dont les hommes n'avaient pas conscience avant
lui.
Certes, cette thèse centrale de la politique de
Rousseau, la volonté générale, n'est qu'une utopie,
étant donné que l'expérience nous montre qu'il n'existe
que des volontés particulières. Ce qui en reste, même
aujourd'hui, est un respect exagéré de la majorité -avec
l'avènement de la démocratie- où la minorité semble
être étouffée comme si le nombre pouvait être source
légitime de gouvernement, de loi et de justice. Elle répond
d'ailleurs à un problème insoluble : on ne peut garder la
liberté trop exigée par Rousseau, tout en entrant dans la vie
sociale; celle-ci suppose au contraire dans l'homme une dépendance
naturelle qui, sans nier la liberté, en manifeste les limites.
CHAPITRE TROISIEME : QUELQUES CONSEQUENCES ISSUES DU CONTRAT
SOCIAL ET LEURS ANALYSES
INTRODUCTION
Parler des conséquences nées du contrat social,
c'est vouloir démontrer quelques faits pratiques de l'exercice du
pouvoir dans l'état civil, fruit de la volonté
générale. Cette volonté émanant du peuple ne peut
atteindre sa finalité que si ce dernier organise et sépare,
à son sein, l'exercice des pouvoirs et définit, par la suite, les
compétences de chacun d'eux.
Ce chapitre voudrait donc analyser, d'une manière
succincte mais brève, trois pouvoirs pressentis comme foncteurs de toute
organisation de l'état civil. Il s'agit de la
souveraineté, du législatif et de
l'exécutif (ou gouvernement). Mais alors, qu'entend-on
par souveraineté, loi et gouvernement ? La souveraineté, est-elle
plurielle, divisible ou inviolable ? Y a-t-il une concomitance entre ces trois
pouvoirs ?
C'est en rapport avec ces différentes
thématiques que nous allons orienter la pensée
véhiculée dans ce chapitre.
III.1
DE LA SOUVERAINETE
La souveraineté, selon le Dictionnaire Lalande, est un
pouvoir politique originaire d'où procèdent tous les autres, et
dans lequel ils trouvent leur source légitime44(*). Ainsi, toute
souveraineté trouve son essence dans la nation qui est identifiée
au peuple et est détentrice comme telle de l'autorité politique.
C'est ainsi que « le principe de toute souveraineté
réside essentiellement dans la nation. Nul corps, nul individu ne peut
exercer d'autorité qui n'en émane expressément
»45(*). Le
peuple46(*), membres du
corps politique de la nation et masse amorphe des citoyens fondus dans l'Etat
par son identité avec la volonté générale, est ou
reste le souverain primaire, seul dépositaire de la souveraineté.
Il est, en effet, source et agent du pouvoir. Dès lors,
« la souveraineté, n'étant que l'exercice de la
volonté générale, ne peut jamais s'aliéner, et
[que] le souverain, qui n'est qu'un être collectif, ne peut être
représenté que par lui-même: le pouvoir peut bien se
transmettre, mais non pas la volonté »47(*).
L'objet de la souveraineté est donc l'exercice de la
volonté générale laquelle se caractérise par
l'unicité, l'indivisibilité, l'imprescriptibilité et
l'inaliénabilité; et donc sa résidence est dans le peuple.
Ce peuple, personne n'a le droit de lui ôter ses droits en faveur des
autorités politiques car, la volonté générale est
toujours droite et tend vers l'intérêt public et non individuel.
Il est incorruptible. Mais il arrive qu'il soit trompé par des
dirigeants rusés à cause de son ignorance. Pour échapper
à cette ruse, le peuple doit être guidé, formé et
informé « pour que la volonté générale
soit toujours éclairée, et que le peuple ne se trompe point
»48(*).
Notons, par ailleurs, qu'il n'est pas aisé de
confondre la volonté générale, intransmissible, avec un
vote majoritaire. Ce qui l'aurait définie, c'est l'utilité
publique sur laquelle tous ont pu s'exprimer. La souveraineté est
inclusive. En revanche, cette vision inclusive nous semble être
tronquée du fait qu'elle ne permet pas la diversité d'opinions
qui est la base de l'évolution dans une société,
étant donné que du choc des idées jaillit la
lumière.
Il arrive aussi qu'un individu ou un groupe d'individus- tel
qu'en Angola, au Soudan, au Mali, en République Démocratique du
Congo, etc.- s'insurge contre le droit social, les lois, le gouvernement ou le
souverain, celui-ci
« devient par ses forfaits rebelle et traître
à la patrie; il cesse d'en être membre en violant ses lois; et
même il lui fait la guerre. Alors la conservation de l'Etat est
incompatible avec la sienne; il faut qu'un des deux périsse; et quand on
fait mourir le coupable, c'est moins comme citoyen que comme ennemi. Les
procédures, le jugement, sont les preuves et la déclaration qu'il
a rompu le traité social, et par conséquent qu'il n'est plus
membre de l'Etat »49(*).
Mais aussi, quand les supplices deviennent habituels, il
dénote l'inefficacité du régime en place.
Les caractéristiques de la souveraineté ci-haut
relevées (l'unicité, l'indivisibilité,
l'inviolabilité, l'inaliénabilité), nous envoient à
déduire que celle-ci revient au peuple seul qui l'exerce par voie de ses
représentants, les parlementaires. A ce sujet, la Constitution de la
République Démocratique du Congo nous dit ce qui suit :
« la souveraineté nationale appartient au peuple. Tout
pouvoir émane du peuple qui l'exerce directement par voie de
référendum ou d'élections et indirectement par ses
représentants. Aucune fraction du peuple ni aucun individu ne peut s'en
attribuer l'exercice »50(*).
Ainsi, si le pouvoir souverain apparaît absolu et
illimité, il agit par des lois s'exerçant sur tous de
façon égale et n'opprime donc personne.
« Qu'est-ce donc proprement qu'un acte de
souveraineté? Ce n'est pas une convention du supérieur avec
l'inférieur, mais une convention du corps avec chacun de ses membres :
convention légitime, parce qu'elle a pour base le contrat social;
équitable, parce qu'elle est commune à tous; utile, parce qu'elle
ne peut avoir d'autre objet que le bien général; et solide parce
qu'elle a pour garant la force publique et le pouvoir suprême
»51(*).
III.2
DE LA LOI
Le pacte social confère au corps politique l'existence
et la vie, lesquelles ne suffisent pas, du fait que ce dernier est encore
inerte. Il faudra alors la législation qui est cette énergie
permettant de mouvoir le corps politique. « Car l'acte primitif par
lequel ce corps se forme et s'unit ne détermine rien encore de ce qu'il
doit faire pour se conserver »52(*).
Les conventions, ou mieux les lois, ont comme l'un des
objectifs primaires, d'associer les droits53(*) aux devoirs- deux concepts corrélatifs- et de
ramener la justice à son objet. Tout citoyen donc, en dehors de ses
droits politiques, est soumis à des obligations définies envers
la nation et l'Etat. Et, l'objet de la justice n'est que rendre à chacun
son dû dans l'égalité et selon qu'il est défini par
la loi.
« Ceci garantit que personne n'est avantagé ou
désavantagé dans le choix des principes par le hasard naturel ou
par la contingence des circonstances sociales. Comme tous ont une situation
comparable et qu'aucun ne peut formuler des principes favorisant sa condition
particulière, les principes de la justice sont le résultat d'un
accord ou d'une négociation équitables »54(*).
La justice comme la loi mettent ensemble une adéquation
entre les gens en fixant les droits de chacun.
Dans la société civile, il y a un aspect qu'il
faut promouvoir dans l'esprit des contractants, c'est le "travail". Le travail
joue un grand rôle dans la maintenance de l'égalité. Car,
« quiconque, sans travailler, s'emparait par force ou par adresse de
la subsistance d'autrui, rompait l'égalité, et se plaçait
en dessus et au dehors de la loi [...]. L'égalité étant
alors l'expression du droit, quiconque attentait à
l'égalité était injuste ».55(*)
Dans un objet particulier, il n'y a pas de volonté
générale. De même dans une partie, il n'y a pas de tout.
Ceci veut dire que si une partie du peuple se retire de l'ensemble, là
il n'y a plus de volonté générale, mais deux camps de
volontés différentes. Ainsi, « quand tout le peuple
statue sur tout le peuple, il ne considère que lui-même; et s'il
se forme alors un rapport, c'est de l'objet entier sous un autre point de vue,
sans aucune division du tout. Alors la matière sur laquelle on statue
est générale comme la volonté qui statue. C'est cet acte
que j'appelle une loi »56(*). En effet, la loi est l'apanage du peuple qui ne peut
concerner que l'universel et jamais le particulier. Dans le cas
échéant, elle devient une oppression et non plus fruit d'une
volonté générale. Dès lors, il y a danger d'une
révolution naissante. La loi est souveraine. Et nul ne peut
prétendre être au-dessus d'elle.
Cette considération absolutiste de la loi nous
paraît trop dure, au risque même d'écraser la personne
humaine. Néanmoins, la loi vise l'homme, sa liberté, son
épanouissement, sa félicité. Ainsi, elle vient transformer
l'être humain dans sa dignité. Elle est au service de celui-ci. En
effet, il serait absurde d'affirmer que la loi est au-dessus de l'homme
étant donné que c'est cet homme qui fait la loi pour son
bien-être, y compris pour ceux qui l'entourent. C'est ce même homme
qui peut, du jour au jour, la changer ou la modifier s'il voit qu'elle ne
répond plus favorablement à ses finalités. Il est donc
important de tenir compte de la personne sans porter atteinte à la loi.
Le "respect de la loi" et le "respect de la personne"57(*) cohabitent et sont donc deux
réalités connexes.
Cependant, le législateur est convié à
utiliser sa subtilité pour élaborer des règles qui
conviennent aux hommes en vue d'assurer leur bonheur. Mais alors, qui est
habilité à la législation ? Pour découvrir les
meilleures règles de société convenables aux nations, il
faudrait que le législateur soit d'une intelligence qui serait la
synthèse de toutes les passions humaines mais n'en éprouvant
aucune d'elles. C'est un homme extraordinaire dans l'Etat. Cette ossature du
législateur nous paraît "métaphysique", et par
conséquent idéale pour le fait qu'il est difficile et même
impossible de trouver un homme pareil, exempt de tout sentiment et en qui on
retrouve toutes les qualités divines. C'est pour ainsi dire que Rousseau
est à la recherche des lois parfaites qu'il ne trouve dans aucune
société. C'est pourquoi, il dit qu' « il faudrait
des dieux pour donner des lois aux hommes »58(*). Cette vision de la loi
semble être "erronée" du fait que celle-ci jaillit de la
volonté des hommes, créateurs de l'état civil, de vivre
ensemble. Et étant une oeuvre humaine, la loi est donc teintée
d'imperfection. Mais, vu que l'homme est perfectible, il peut changer la loi
qui le régit au temps opportun si et seulement si elle ne répond
plus aux exigences du "vivre-ensemble".
Le législateur s'assigne, pour ce faire, l'objectif de
contraindre les particuliers à accepter le bien commun qu'ils refusent
afin qu'ils ne troublent l'ordre social et politique, et montrer au peuple le
bien fondé de la loi qu'il semble ignorer. Il revient au
législateur la tâche de changer la nature humaine non pas par la
force, moins encore par le langage savant. Afin que la loi soit comprise de
tous, il doit être un homme de paix et modéré dans le
style.
Le devoir du législateur ou de quiconque aura
constitué (ou formé) une association, un gouvernement, issu de la
volonté générale, est de veiller à sa promotion de
peur que l'association ne s'amoindrisse. « Il faut donc [...] essayer
d'en assurer l'existence, en évitant tout ce qui lui est pernicieux et
en prenant, par des lois écrites ou non écrites, toutes les
mesures nécessaires à sa conservation »59(*). Cette conservation
n'est possible que si sont assurées la vulgarisation de la loi
après sa rédaction, la sensibilisation et l'explication de
celle-ci au peuple. Ainsi, dans un Etat bien constitué, on doit veiller
pour que rien ne se fasse contre les lois, et surtout prendre garde, dès
le départ, aux abus, moindres soient-ils. De même, l'ignorance de
la loi est un danger pour la société. Il s'ensuit donc que nul
n'est sensé l'ignorer. Car, c'est la loi qui coordonne la vie dans la
société. Elle harmonise les relations interpersonnelles en
montrant à chaque associé ses obligations et ses droits, et en
traçant la conduite morale à suivre. « Mais de
même que l'homme civilisé est le meilleur de tous les animaux,
celui qui ne connaît ni justice ni lois est le pire de tous
»60(*).
Comme l'ignorance de la loi est dangereuse et est à la
base des abus et du désordre social, parlons maintenant du peuple en
épinglant certaines conditions pour qu'il soit propre à la
législation.
III.2.1 LE PEUPLE
Pour que le peuple- membres du corps politique et
détenteur de la souveraineté- soit propre à la
législation, quelques conditions requises sont inévitables :
- Il doit atteindre l'âge de la maturité,
c'est-à-dire, il doit être capable de supporter les obligations de
la loi qu'il s'est prescrite par le biais du législateur de peur qu'il
ne se rebelle pas contre sa propre volonté. Car la liberté peut
être acquise mais jamais recouverte.
- Il faut tenir compte de la superficie nationale, ou mieux la
dimension des peuples. Car, « eu égard à la meilleure
constitution d'un Etat, des bornes à l'étendue qu'il peut avoir,
afin qu'il ne soit ni trop grand pour pouvoir être bien gouverné,
ni trop petit pour pouvoir se maintenir par lui-même. Il y a dans tout
corps politique un maximum de force qu'il ne saurait passer, et duquel souvent
il s'éloigne à force de s'agrandir. Plus le lien social
s'étend, plus il se relâche; et en général un petit
Etat est proportionnellement plus fort qu'un grand »61(*). Ceci justifie la
nécessité de la plupart des grands Etats à opter pour le
régime fédéral ou entités
décentralisées. C'est pour reconstituer à partir des
bases, entre gouvernants et gouvernés, un rapport étroit et une
force solide et susciter l'amour mutuel entre les concitoyens et à
l'égard de la patrie. Ainsi, dans un Etat qui se veut fort et
prospère, une meilleure constitution doit être la priorité
des priorités qu'il faut rechercher, et surtout mettre en tête que
ni l'étendue d'un territoire ni les ressources que fournit ce grand
territoire ne traduit pas l'excellence d'un meilleur gouvernement. Par contre,
un bon gouvernement se reconnaît par sa vigueur, la défense et la
conservation de l'intégrité de son territoire.
- Il faut une adéquation relationnelle entre la
production et la démographie.
Eu égard, aux conditions ci-devant établies,
quel peuple est alors propre à la législation ? C'est celui
qui, répond Rousseau,
« se trouvant déjà lié par
quelque union d'origine, d'intérêt ou de convention, n'a ni
coutumes, ni superstitutions bien enracinées; celui qui ne
craint pas d'être accablé par une invasion subite, qui sans entrer
dans les querelles de ses voisins, peut résister seul à chacun
d'eux, ou s'aider de l'un pour repousser l'autre; celui dont chaque membre peut
être connu de tous, et où l'on n'est point de charger un homme
d'un plus grand fardeau qu'un homme ne peut porter; celui qui peut se passer
des autres peuples, et dont tout autre peuple peut se passer; celui qui n'est
ni riche ni pauvre, et ne peut se suffire à lui-même; enfin qui
réunit la consistance d'un ancien peuple avec la docilité d'un
peuple nouveau »62(*).
Ainsi, il convient de noter que la finalité de tout
système de législation est la recherche du plus grand bonheur de
tous, à savoir la liberté et l'égalité.
Il importe de souligner que la souveraineté et la loi
ne trouvent leur champ d'application que dans un gouvernement donné. Et,
c'est là seulement que les lois sont ou peuvent être
subdivisées selon les catégories qui sont assimilées aux
différentes parties du droit : la première concerne le
rapport du souverain à l'Etat, c'est le droit politique; la
deuxième établit la relation des membres du souverain entre eux
ou avec le corps entier, c'est le droit civil; quant à la
troisième, enfin, elle analyse la relation du citoyen à la loi,
c'est le droit criminel.
III.3
DU GOUVERNEMENT
La puissance législative est une force et n'appartient
qu'au peuple. Mais pour que la force soit en exercice, il lui faut la
volonté qui est la puissance exécutive ou le gouvernement. Cette
dernière n'appartient pas à la généralité
comme l'est la puissance législative; c'est parce qu'elle « ne
consiste qu'en des actes particuliers qui ne sont point du ressort de la loi,
ni par conséquent de celui du souverain, dont tous les actes ne peuvent
être que des lois »63(*). En effet, la loi devient une théorie qui se
concrétise dans le gouvernement. Les deux puissances (législative
et exécutive), sont deux mobiles du corps politique par lesquels rien ne
peut se faire sans leur concours.
Vu que le gouvernement ne concerne qu'une
représentativité et que le peuple y participe indirectement, il
importe d'appréhender la quiddité même de cet organe :
étant l'une des conséquences du pacte social, le gouvernement est
une personne morale en tant que détenteur du pouvoir politique. C'est
l'ensemble des organes par lesquels, dans l'Etat, le souverain exerce son
autorité, et plus spécialement le pouvoir exécutif et
l'ensemble de ses détenteurs (le Chef de l'Etat et les ministres). Il
est l'intermédiaire entre les sujets et le souverain pour leur mutuelle
correspondance en veillant sur l'application des lois et le maintien de la
liberté, tant civile que politique64(*). Son rôle est donc d'assurer la réussite
de la loi, et surtout de sa mise en oeuvre selon la volonté
générale.
CONCLUSION
En définitive, toute analyse sémantique et
fonctionnelle de différents pouvoirs (souverain, législatif et
exécutif), nous amène à l'affirmation selon laquelle, ces
pouvoirs susmentionnés sont interactifs dans la mesure où ils
sont tous au service du peuple. C'est le peuple qui est le souverain primaire
par lequel tous les autres pouvoirs se légitiment. Il est le
législateur et l'exécutif par le biais de ses
représentants.
CONCLUSION GENERALE
La philosophie reste à jamais question pour
elle-même, parce qu'elle est "philosopher", activité d'hommes
vivants, possibilité toujours ouverte, éternelle jeunesse et
perpétuel recommencement d'une interrogation sur le sens toujours
renouvelé, toujours à renouveler et à actualiser, parce
qu'elle questionne tout et toutes les réponses historiques
données, y compris celles de la tradition philosophique. Or, c'est
précisément à partir de et face aux
événements vécus que ce questionnement inlassable ne cesse
de surgir, de se conquérir et de se formuler. D'où l'intention
qui nous a animé au fil de ce travail : tenter d'éclairer nos
lecteurs sur la cause des désordres sociaux et politiques qui
sévissent le monde, c'est-à-dire, l'Afrique en
général, et la République Démocratique du Congo, en
particulier. En faisant un cursus sur l'état de l'homme à son
stade naturel, nous avons si vite découvert qu'il vivait dans une forme
de "sociabilité" fondamentale où les biens naturels
étaient à la portée de tous, chacun selon ses
nécessités. Mais étant donné que l'homme est
perfectible, il a perdu cette "sociabilité" naturelle par le
développement intellectuel, scientifique et technique qui a introduit
l'inégalité au sein de la société. Ainsi, faute
d'un retour impossible à l'état naturel où l'homme serait
libre, c'est-à-dire non aliéné, le contrat social, par son
idée normative énonçant le droit, s'efforce de restaurer
cette liberté et cette égalité perdues.
Certes, le dogme de l'égalité, en relation avec
le principe de la liberté, a été de la même
façon nécessaire pour nier tout classement social
préexistant. Cependant, la pure observation prouve que les hommes ne
sont ni égaux entre eux ni même équivalents ; cette
différence de fait entraîne aussi une différence de droit.
Néanmoins, en matière politique le progrès doit consolider
l'ordre, de même l'ordre ne peut s'établir s'il ne s'accorde pas
avec le progrès.
En somme, dans toute société, la
réalité sociale apparente à la dialectique de l'un et du
multiple, c'est-à-dire la complexité, dans la mesure où
seules les oppositions (que ça soit dans le domaine scientifique, social
ou politique), permettent l'évolution de la personne et tout ce qui
l'entoure. Mais alors, le contrat social, c'est-à-dire la volonté
générale,devient cette théorie novatrice qui permet de
passer outre la face du désordre, malgré sa présence
permanente, en vue de promouvoir la face de l'ordre par quoi les valeurs
sociales et politiques (l'égalité, la paix, la justice, etc.),
sont certaines.
BIBLIOGRAPHIE
I. OUVRAGES DE L'AUTEUR
1. ROUSSEAU, J.-J., Du contrat social. Les rêveries
d'un promeneur solitaire, Paris, La renaissance du livre, s.d, 232p.
2. IDEM, Discours sur l'origine et les fondements de
l'inégalité parmi les hommes, Ed. Électronique,
Cf. http://dx.doi.org/doi:10.1522/cla.roj.dis3.
II. AUTRES OUVRAGES
3. ARISTOTE, La république, Paris,
Gonthier/PUF, 1983, 293p.
4. CHIRPAZ, F., L'homme dans son histoire. Essai
sur Jean-Jacques Rousseau, Genève, Labor et Fides, 1984, 166p.
5. HOBBES, T., Le citoyen ou les fondements de la
politique, Paris, Flammarion, 1982, 408p.
6. LAUNAY, M., Rousseau, Paris, PUF, 1968, 126p.
7. PROUDHON, P. J., Qu'est-ce que la
propriété ou recherches sur le principe du droit et du
gouvernement. (Introduction et chronologie par Emile James), Paris,
Garnier-Flammarion, 1966, 315p.
8. RAWLS, J., Théorie de la justice, Paris,
1987, 666p.
9. STRAUSS, L. et CROPSEY, J., Histoire de la philosophie
politique (Traduit de l'américain par Olivier Sedeyn), Paris,
Quadrige/PUF, 1999, 1076p.
III. ARTICLES de Revues
10. BERTEN, A., « Philosophie et société
(exposé)», in Revue Philosophique de Louvain (4è
série), n°78, Louvain-La-Neuve, Mai 1990, pp.272-291.
11. Constitution de la République Démocratique
du Congo, Kinshasa, le 18 Février 2006.
12. KALELE Ka-Bila, «Comment changer l'ordre social
actuel?», in Revue de Recherches Philosophiques Africaines,
n°11, Kinshasa, 1985, pp.315-334.
13. THEIS, R., «Respect de la loi, respect de la personne
: Kant», in Revue Philosophique de Louvain, n°3,
Louvain-La-Neuve, Août 2005, pp.331-346.
IV. OUTILS DE TRAVAIL
14. LALANDE, A., Vocabulaire technique et critique de la
philosophie (vol. I et II), Paris, Quadrige/PUF, 1926.
15. MORFAUX, L.-M., Vocabulaire de la philosophie et des
sciences humaines, Paris, Armand Colin, 1999, 400p.
16. RAYNAUD, P. et RIALS, S., Dictionnaire de philosophie
politique, Paris, Quadrige/PUF, 1996, 892p.
17. RUSS, J., Philosophie, les auteurs, les oeuvres
(Mémo références), Paris, Bordas, 2003, 511p.
TABLE DES MATIERES
EPIGRAPHES.............................................................................................I
DEDICACE................................................................................................II
AVANT-PROPOS.......................................................................................III
INTRODUCTION GENERALE
1
1. Explication du sujet
1
2. Choix et intérêt du sujet
2
3. Problématique
2
4. Etat de la question
3
5. Hypothèses
3
6. Méthodes utilisées
4
7. Division du travail
4
CHAPITRE PREMIER: DE L'ETAT DE NATURE AU
CONTRAT SOCIAL
5
INTRODUCTION
5
I.1 DE L'ETAT DES HOMMES HORS DE LA SOCIETE
CIVILE
5
I. 2 NAISSANCE DE L'INEGALITE ET GENESE DE LA
SOCIETE
7
CIVILE
7
I.3 ETAT DE NATURE, UN ETAT FICTIF
10
CONCLUSION
11
CHAPITRE DEUXIEME : DE L'INTELLIGIBILITE
DU CONTRAT SOCIAL DANS LA PERSPECTIVE ROUSSEAUISTE
12
INTRODUCTION
12
II.1 ROUSSEAU ET LA POLITIQUE
12
II.1.1 L'ESSENCE DE L'ORDRE SOCIAL
14
II.1.2 LE VRAI CONTRAT
17
II.1.2.1 Définitions du contrat
18
II.2 LES EFFETS BENEFIQUES DU PACTE SOCIAL
19
II.2.1 DE L'ETAT CIVIL
19
II.2.2 LA POSSESSION DES BIENS
20
CONCLUSION
21
CHAPITRE TROISIEME : QUELQUES CONSEQUENCES
ISSUES DU CONTRAT SOCIAL ET LEURS ANALYSES
22
INTRODUCTION
22
III.1 DE LA SOUVERAINETE
22
III.2 DE LA LOI
24
III.2.1 LE PEUPLE
27
III.3 DU GOUVERNEMENT
28
CONCLUSION
29
CONCLUSION GENERALE
30
BIBLIOGRAPHIE
31
TABLE DES MATIERES
33
* 1 KANT, E., cité par
RUSS, J., Philosophie. Les auteurs, les oeuvres (Mémo
références), Paris, Bordas, 2003, p.188.
* 2 ROUSSEAU, J.-J, Du
contrat social. Les rêveries d'un promeneur solitaire, Paris, La
renaissance du livre, s.d, p19.
* 3 BERTEN, A., «
Philosophie et société » (exposé), in Revue
Philosophique de Louvain, (4è série), n°78,
Louvain-La-Neuve, 1990, p.275.
* 4 MATINGOU, A. R., De la
notion de l'Etat chez Jean-Jacques Rousseau : Essai de
compréhension du «contrat social», Kolwezi, Scolasticat
Bx. Jean XXIII, 2000-2001, 35p.
* 5 ARISTOTE cité par
RANAUD P. et RIALS S., Dictionnaire de philosophie politique, Paris,
Quadrige/PUF, 1995, p.255.
* 6 ROUSSEAU, J.-J.,
Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi
les hommes, Ed. Electronique, Cf.
http://dx.doi.org/doi:10.1522/cla.roj.dis3.
* 7 CHIRPAZ, F., L'homme
dans son histoire. Essai sur Jean -Jacques Rousseau, Genève, Labor
et Fides, 1984, pp.44-45.
* 8 HOBBES, Le citoyen ou
les fondements de la politique, Paris, Flammarion, 1982, p.90.
* 9 ROUSSEAU, J.-J., Op.
Cit., Cf. http://dx.doi.org/doi:10.1522/cla.roj.dis3.
* 10 «Pour Proudhon, la
propriété est bien moins le droit pour un homme de jouir d'une
chose que celui d'empêcher les autres d'en jouir. Elle est le droit de
priver les autres; son caractère principal, c'est qu'elle est exclusive
de toute prétention des tiers». Cf. PROUDHON, P.-J., Qu'est-ce
que la propriété ou recherches sur le principe du droit et du
gouvernement. (Introduction et chronologie par Emile James), Paris,
Garnier-Flammarion, 1966, p.28.
* 11 ROUSSEAU, J.-J., Op.
Cit., Cf. http://dx.doi.org/doi:10.1522/cla.roj.dis3.
* 12 Ibid.
* 13 Constitution de la
République Démocratique du Congo, Article 11, Kinshasa, 18
Février 2006.
* 14 Ibid., Article
12, Kinshasa, 18 Février 2006.
* 15 STRAUSS, L. et CROPSEY,
J., Histoire de la philosophie politique (traduit de
l'américain par Olivier Sedeyn), Paris, Quadrige/PUF, 1994, p.616.
* 16 ARISTOTE, La
politique, Paris, Gonthier/PUF, 1983, pp.16-17.
* 17 CHIRPAZ, F., Op.
Cit., pp.28-30.
* 18LAUNAY, M.,
Rousseau, Paris, PUF, 1966, pp.41-43.
* 19 ROUSSEAU, J.-J., Du
contrat social. Les rêveries d'un promeneur solitaire, Paris, La
renaissance du livre, s.d, p. 9.
* 20 Ibid, p.9.
* 21 «Pour comprendre
l'homme civil, et le situer comme tel, il faut viser l'homme de la
nature».Cf. CHIRPAZ, F., L'homme dans son histoire. Essai sur
Jean-Jacques Rousseau, Genève, Labor et Fides, 1984, p.26.
* 22 ROUSSEAU, J.-J., Op.
Cit., p.10.
* 23 Ibid, p.11.
* 24 ARISTOTE, La
politique, Paris, Gonthier/PUF, 1983, p.23.
* 25 KALELE Ka-Bila,
«Comment changer l'ordre social actuel?», in Revue de Recherches
Philosophiques Africaines, n°11, Kinshasa, 1985, pp.315-316.
* 26 ROUSSEAU, J.-J.,
Op.Cit., pp.11-12.
* 27 Ibid, p.13.
* 28 «Précision
capitale, car si, pour Rousseau, l'homme est libre, ce n'est pas parce qu'il
serait considéré comme cause prochaine et seule efficace d'une
action, c'est parce qu'il est un sujet moral [...]. En plus, l'homme est libre
parce qu'il est créature de Dieu et parce qu'il est sujet
moral». Cf. CHIRPAZ, F., Op. Cit., pp.38-39.
* 29 ROUSSEAU, J.-J., Op.
Cit., p.14.
* 30 Ibid, p.13.
* 31ROUSSEAU, J.-J.,
Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les
hommes, Ed. Electronique, Cf.
http://dx.doi.org/doi:10.1522/cla.roj.dis3.
* 32 ROUSSEAU, J.-J., Du
contrat social. Les rêveries d'un promeneur solitaire. Paris, la
renaissance du livre, s.d, p.10.
* 33 Ibid, p.18.
* 34 Code Civil 1101
cité par MORFAUX, L.-M., Vocabulaire de la philosophie et des
sciences humaines, Paris, Armand Colin, 1980, p.65.
* 35 ROUSSEAU, J.-J, Op.
Cit., p.19.
* 36 HOBBES, Le citoyen ou
les fondements de la politique, Paris, Flammarion, 1982, p.106.
* 37ROUSSEAU, J.-J.,
Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi
les hommes, Ed. Electronique, Cf.
http://dx.doi.org/doi:10.1522/cla.roj.dis3.
* 38 La constitution est un
ensemble de règles qui organisent les structures gouvernementales d'un
Etat et leur mécanisme de fonctionnement. Autrement dit, c'est la loi
suprême comprenant les principes de base qui régissent un pays.
* 39 ROUSSEAU, J.-J., Du
contrat social. Les rêveries d'un promeneur solitaire, Paris, La
renaissance du livre, s.d, p.23.
* 40 Ibid,
pp.22-23.
* 41 Ibid., p.23.
* 42 C'est un ensemble
organisé des institutions politiques, judiciaires, militaires,
administratives et économiques sous un gouvernement autonome et sur un
territoire propre et indépendant; c'est le peuple ainsi pratiquement
organisé et constituant une nation. Généralement, l'Etat
est une personne morale et juridique constituée par l'organisme
politique et juridique d'une nation.
* 43 ROUSSEAU, J.-J., Op.
Cit., p.25.
* 44 LALANDE, A.,
Vocabulaire technique et critique de la philosophie (vol I et II),
Paris, Quadrige/PUF, 1926, p.1016.
* 45 Déclaration des
droits de l'Homme et du citoyen, article 3 de 1789 cité par MORFAUX,
L.-M, Vocabulaire de la philosophie et des sciences humaines, Paris,
Armand Colin, 1999, p.232.
* 46 «Le peuple est la
substance même [...] du corps politique. Le peuple est au-dessus de
l'Etat, le peuple n'est pas pour l'Etat, l'Etat est pour le peuple».
MARITAIN, J. cité par ibid., p.269.
* 47 ROUSSEAU, J.-J., Du
contrat social. Les rêveries d'un promeneur solitaire, Paris, La
renaissance du livre, s.d, p.26.
* 48Ibid., p.30.
* 49 Ibid., p.34.
* 50Constitution de la
République Démocratique du Congo, Art. 5 du 18 février
2006, Kinshasa, p.3.
* 51 ROUSSEAU, J.-J., Op.
Cit., p.32.
* 52 Ibid., p.35.
* 53 « Le droit est
donc, dit Kant dans une définition célèbre, l'ensemble des
conditions sous lesquelles la libre faculté d'agir de chacun peut
s'accorder avec la libre faculté d'agir des autres, conformément
à une loi universelle de liberté ». Kant cité
par MORFAUX, L.-M., Op. Cit., p.91.
* 54 RAWLS, J.,
Théorie de la justice, Paris, Seuil, 1987, p.38.
* 55 PROUDHON, P.-J.,
Qu'est-ce que la propriété ou recherches sur le principe du
droit et du gouvernement. (Introduction et chronologie par Emile James),
Paris, Garnier-flammarion, 1966, p.111.
* 56 ROUSSEAU, J.-J., Op.
Cit., p.36.
* 57 THEIS, R.,
« Respect de la loi, respect de la personne : Kant »,
in Revue Philosophique de Louvain, n°3, Louvain-La-Neuve,
Août 2005, p.331.
* 58 ROUSSEAU, J.-J., Op.
Cit., p.38.
* 59 ARISTOTE, La
république, Paris, Gonthier/PUF, 1983, p.206.
* 60 Ibid., p.17.
* 61 ROUSSEAU, J.-J., Op.
Cit., p.44.
* 62 Ibid., p.48.
* 63 Ibid., p.52.
* 64 Ibid, p.52.
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