5.2.3 La communication politique : une éducation au
niveau des institutions
Cette communication semble la plus difficile de toutes.
Difficile dans le sens qu'elle s'adresse à ceux qui détiennent le
pouvoir de changer, de décision etc. Elle touche en effet, toutes les
instances du pouvoir ayant de l'influence sur le fonctionnement de
l'administration. Il s'agit de la conscientisation au niveau des institutions
de l'Etat, comme, le parlement, le gouvernement et les institutions
juridictionnelles ; et à la limite des choses, le «Bureau
Indépendant Anti-Corruption» (BIANCO). Si, en apparence, on dit que
le contrôle des actes de l'Exécutif relève de la
compétence du Parlement, celui-ci devra, en tant que représentant
du peuple, le premier à intervenir face à ce fléau au
niveau de la gestion publique. Mais, pourquoi aucune manifestation n'a
été signalée de sa part? En fait, la situation est
totalement inverse. Ceux ne sont pas des représentants du peuple,
ils représentent leurs partis respectifs. Ils sont
élus et/ou désignés par
l'exécutif. Elus par l'exécutif, dans la mesure où le chef
de l'exécutif lui-même, à la fois chef du parti, qui
propose et fait élire les candidats. Aussi, il est difficile de faire
confiance à nos parlementaires. Comment changer cette pratique ? Depuis
notre indépendance, aucun parti n'est arrivé au pouvoir par leur
propre conviction, c'est le pouvoir qui a créé leur conviction.
Ainsi, faire changer les hommes politiques et les politiciens, avec leur force,
est presque une mission impossible. Pourtant, il ne faut pas garder les bras
croisés. Comme il a été évoqué un peu plus
haut, la meilleure méthode d'éduquer les membres des
institutions, c'est d'éduquer les citoyens. Le grand secret de
l'éducation, disait J. Life et G. Rustin, c'est de ne pas
éduquer. Tous les éducateurs nationaux, ayant le sens du
patriotisme, et qui sont convaincus que les lacunes au niveau de la gestion
publique constituent, en une et en grande partie, les causes de notre sous
développement stagnant, pour ne pas dire décroissant, devront se
consacrer à la conscientisation citoyenne. Dans son chapitre XI, article
11.12, le rapport de la Conférence Internationale sur la Population et
le Développement qui s'est tenu au Caire - Egypte (1994), a bien
stipulé que « Des activités efficaces d'information,
d'éducation et de communication sont une condition préalable
à un développement humain durable et préparent la voie
à une modification des mentalités et des comportements... Dans un
contexte démocratique, une connaissance accrue et un engagement plus
affirmé créent dans l'opinion un climat favorable à
l'adoption de décisions et de comportements informés et
responsables. Fait plus important encore, ils préparent aussi la voie
à l'ouverture d'un débat public démocratique et permettent
ainsi la mobilisation d'une ferme volonté politique et d'un solide
soutien populaire en faveur de l'action nécessaire aux échelons
local, national et international ». Aussi, il est toujours aux Life
et Rustin de continuer que « L'éducation est donc
véritablement une mission, l'éducateur représente plus que
la Société ; il représente l'Humanité ; il est le
principal artisan du progrès humain dans le sens que l'histoire des
hommes a dégagé et qu'elle précise de plus en plus. Nous
n'avons plus à nous poser de question de la légitimité de
notre intervention : intervenir n'est pas seulement pour nous un droit ; c'est
un devoir. » L'éducation et la communication au niveau des
institutions ne seront possible que par des citoyens instruits et bien
éduqués. C'est ainsi que la
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fonction éducative et délibérative de la
presse devrait être respecté, en favorisant les débats
objectifs et éducatifs. Ceux-ci, ne devront pas uniquement se concentrer
au niveau central, mais, surtout au niveau des provinces et des régions.
Le développement part toujours du local au global, d'une petite
échelle à la grande. Si, au niveau central (dans la capitale),
les débats sont plus ou moins ouverts, surtout dans les stations
privées (comme l'exemple de l' « invité de zomà
» au TV plus), les stations publiques (TVM et RNM) devront accorder
une large autonomie pour leurs antennes provinciales ou régionales afin
de permettre aux « provinciaux et régionaux » de
comprendre les réalités locales. Il est vrai que certaines
émissions comme le « vaovaom-paritra » se tendent
actuellement vers cette vision, mais, celui-ci n'est qu'une séance
d'information. Le décodage de cette information devrait se faire dans un
cercle de débat, car à peu près la moitié de la
population malgache, en général, et de la province de Tamatave,
en particulier, sont analphabètes (plus de 54% en 1993). Sans ce
débat éducatif, seront-elles capables de réaliser
convenablement leurs devoirs de citoyens ? Aussi, cette « ferme
volonté politique et d'un solide soutien populaire »,
prévu par le rapport de la conférence internationale sur la
population et le développement, ne sera effective, tant que la politique
d'éducation citoyenne n'est pas définie. Or, imposé le
test d'analphabétisme comme accès à certains droits
civiques (vote...), comme c'était le cas de quelques pays, n'est qu'une
sorte de discrimination pure et simple, et ne fait que maintenir la distance
entre les nationaux.
La campagne d'alphabétisation fonctionnelle intensive
pour le développement (AFI-D), menée par le gouvernement malgache
(par le biais du ministère de la population, puis de l'éducation
nationale), en collaboration avec le programme des nations unies pour le
développement (PNUD) et celle des autres organismes oeuvrant dans ce
domaine, comme le cas du programme de promotion des revenu rural (PPRR)
constituaient, certes, un espoir ; mais pour de différentes raisons,
elles sont actuellement interrompues. Parmi ces raisons, on peut citer la crise
politique qui a entrainé la suspension des aides financières, la
fin du projet, (en ce qui concerne le cas du PPRR...), mais, aussi,
l'insuffisance de mesure d'accompagnement permettant à ces néo
alphabètes, l'utilisation d'une manière
permanente de leurs acquis. A coté, de ces raisons,
s'ajoutent les problèmes de rendements par rapport aux résultats
attendus. Selon le rapport de l'Antilin'i Madagasikara (ECAR Sacré-Coeur
Toamasina), en juin 2008, après onze (11) mois de campagne dans la
commune rurale de Tanananifololahy (District d'Andilamena- Région
Alaotra Mangoro), il n'y que onze (11) personnes, qui sont
alphabétisés. Pourtant, on est entièrement conscient, que
celle-ci (campagne d'alphabétisation), est à la base de cette
prise de responsabilité citoyenne. Parmi les explications qu'on peut
avancer, c'est toujours l'incompatibilité des acquis
(économiques...) par rapport au processus de changement ou aux approches
adoptées. Ainsi, par exemple, le District d'Andilamena (CR
Tanananifololahy), considéré comme «zone rouge
» à l'époque, en matière de
sécurité, est l'un des districts riche en bovidés et en
« or ». Au lieu d'assister au cours d'alphabétisation, les
analphabètes continuent à profiter de cette opportunité.
D'autant plus que l'indemnité, accordée aux alphabétiseurs
varie entre 30 000 à 40 000 Ariary par phase pédagogique (environ
deux semaines, le minimum). Alors que dans d'autres secteurs d'activités
(local), ils peuvent gagner cette somme, en une ou deux journées
seulement. Cette question de compatibilité entre activités
économiques, et l'alphabétisation devra être prise en
considération, pour que la campagne d'alphabétisation deviennent
efficace et motivante, aussi bien pour les analphabètes que pour les
alphabétiseurs. Et ceci, pour devenir de bons acteurs de changement afin
de pouvoir participer objectivement à la modification et à
l'amélioration de notre système.
En plus, toutes les communes ne sont pas couvertes par des
radios ou stations locales, et encore moins par les projets
d'alphabétisation. Ainsi, il est nécessaire que les organisations
paysannes soient devenues un véritable cercle d'échanges,
d'éducation et de débat, en milieu rural.
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