CONCLUSION GENERALE
Ce travail a mis en évidence l'existence de deux grands
types de formations végétales constituées
d'espèces anthropisées et naturelles. Le premier
type a été introduit par l'Homme pour ses besoins ; par contre,
le second pousse à l'état sauvage. La végétation
anthropisée regroupe les espèces cultivées sur la digue de
protection et les cultures. Les formations naturelles rencontrées dans
la zone étudiée sont les galeries forestières à
Tamarindus indica, les forêts denses sèches à
Commiphora, les forêts denses sclérophylles de moyenne
altitude, les forêts sèches à Didierea
dégradées et/ou secondaires, les fourrés à
Euphorbes, les savanes à Andropogon, les formations
marécageuses à Typha angustifolia, à
Phragmites mauritianus et les mangroves.
Ce milieu est dominé par le groupe ethnique
Masikoro (85 à 90 %). L'agriculture emploie 82 % de la
population. Les principales cultures adaptées au milieu sont le manioc,
le maïs, la patate douce et le pois du cap. Ces cultures sont
pratiquées dans des conditions archaïques et rudimentaires par un
petit paysannat dans un milieu écologique fragile. Il s'agit
d'exploitations sur « hatsake » et sur « baiboho ». La
filière commerciale n'est pas organisée. Les produits agricoles
sont acheminés vers les marchés de la ville de Toliara.
L'étude floristique a recensé 211 espèces
pour environ 60 familles réparties dans différents sites et a
permis de constater :
) que les familles les plus représentées sont
EUPHORBIACEAE, FABACEAE, ACANTHACEAE et TILIACEAE.
) que sur des altitudes allant de 130 à 327 m, la
densité floristique globale est de 20545 tiges/ha. La
surface terrière et le potentiel en
bois s'estiment respectivement à 22,87 m2/ha et
à 38 m3/ha pour une densité de 4545 tiges /ha. La
hauteur exploitable est de 2, 6 à 4,51 m.
) que la répartition spatiale de la
végétation laisse voir un gradient floristique
du SW vers le NE, la hauteur moyenne de la flore passe de 2 m (rebords du
plateau à Miary : 52 m d'altitude) à 3,7 m (Behompy : 145 m
d'altitude) pour arriver à 7,6 m à Ankorotsely : 326 m
d'altitude). Les caractères xérophytiques
diminuent suivant ce gradient. La faille de Toliara joue un
rôle dans la phytogéographie.
) que sur les dunes paraboliques et sur les sables roux,
une aire de 100 m2 renferme 17 à 19
espèces pour 10 à 13 familles.
) que l'aire minimale sur jachère
à Andropogon est atteinte à 8 m2 avec 11
à 12 espèces.
) l'existence d'une trilogie de la
recolonisation floristique : après la suppression du
climax, l'exploitation agricole traverse une phase
pionnière qui se traduit par un abandon de la terre au bout de
4 à 5 ans. L'évolution se poursuit d'une façon
sélective pour arriver à un stade subclimacique
si l'intervention humaine est absente.
) que lorsqu'un climax est détruit par
défrichement, sa reconstitution prend une composition
floristique différente de l'ancienne.
) qu'après coupe, certaine
régénération se fait par rejet de souche.
Seulement, ces plantes ont besoin de beaucoup d'années pour atteindre
une taille acceptable pour l'abattage. Les statistiques fournissent une moyenne
diamétrale de 7 à 10 cm, ce qui montre que dans nos sites
beaucoup d'espèces n'ont pas encore atteint le seuil
d'exploitabilité de 20 cm de diamètre fixé
par la DGEF/IEFN (1996) pour les formations xérophiles
du Sud.
) que les feux de pâturages
répétitifs dégradent les sols, appauvrissent la couverture
végétale et font reculer les lisières.
) que la sécheresse et les
inondations menacent les formations marécageuses et les
cultures.
) que la conservation des sols pour l'agriculture et la
régulation des écoulements dépendent étroitement de
la flore. Cette dernière constitue l'habitat principal de la faune. Ses
intérêts ethnobotaniques et
socio-économiques sont indéniables.
Toutefois, les besoins familiaux se sont accrus et le
coût de vie a augmenté ces dernières années. Avec
les migrations suivies d'occupations illicites, la nature n'a
pas cessé de se détériorer. Poussés par la
pauvreté, beaucoup de paysans pénètrent chaque
année dans les milieux naturels pour défricher de nouvelles
terres. Ce type de développement ne peut être en aucun cas
durable. Ces avantages ne seront qu'à court terme. En effet, les
bois sont transformés en savane par
l'action de la hache et les savanes en pseudosteppe par les
feux répétitifs. Jusqu'ici aucune mesure n'est prise pour la
gestion de cet espace naturel.
La disparition de la flore dans ce milieu déclencherait
de nouvelles dynamiques migratoires qui menaceraient les Aires
Protégées et les sites sacrés. Une raréfaction du
charbon, une surpopulation dans le centre urbain de Toliara et une <<
érosion coutumière » sont à craindre. Le milieu est
exposé aux crues du Fiherenana et à la montée du niveau de
la mer due à la variabilité interannuelle des
éléments météorologiques traduisant
l'hypothèse plausible d'un changement climatique. Mais
le plus grand danger est la désertification. La
pratique de cultures itinérantes sur brûlis a
désertifié plusieurs hectares du sol. Les dunes sont en
perpétuel mouvement. La hausse des températures et
l'assèchement du Fiherenana sont déjà confirmés. La
flore qui devait faire face à ces situations est menacée par
l'Homme qui restera la principale victime.
Nous ne saurons pas clore cet exposé sans tirer la
sonnette d'alarme car sous nos yeux, beaucoup d'espèces ont
déjà disparu et d'autres sont en voie de disparition. Nous nous
inquiétons également sur le sort de <<
HOMPY », un ligneux qui a donné son nom au village
de Behompy et actuellement devenu très rare. La probabilité de le
voir disparaître un jour est forte. Jean-Marie Pelt, dans une
réunion liée à la conférence internationale sur la
biodiversité de janvier 2005 tenue à Paris, tente d'alerter
l'opinion publique en expliquant : << certaines espèces
risquent de disparaître totalement avant d'avoir été
découvertes. C'est une perte de savoir incontestable ».
Déjà, des espèces ciblées par la population et
figurant dans la liste rouge de l'UICN ne sont plus
observées dans nos sites d'inventaire.
Sortir de ce cercle vicieux revient à améliorer
les conditions de vie des paysans, à procéder à des
aménagements par la construction des digues de protection agricole pour
faire face aux crues, des bassins hydroagricoles pour compenser le
déficit pluviométrique, par des reboisements annuels pour
stabiliser le régime hydrique et par la création des
réserves d'exploitation pour assurer la pérennisations de la
couverture végétale... A l'heure actuelle, la meilleure
façon de préserver la nature est de la monnayer par
l'écotourisme. Nous espérons qu'en suivant la voie du DHD, nos
dirigeants, nos chercheurs, nos ONG,... parviendront à
réconcilier l'Homme avec son milieu naturel.
Ce travail n'est qu'une goutte d'eau dans l'océan,
mais nous espérons qu'il contribuera au développement et à
la gestion rationnelle du patrimoine naturel de la région. La nature est
une bibliothèque dont plusieurs livres n'ont pas pu être
consultés, il nous reste un long chemin à parcourir.
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