UNIVERSITE CATHOLIQUE DE LOUVAIN
ECOLE DES SCIENCES POLITIQUES ET SOCIALES
LE ROLE DE L'UNION EUROPEENNE DANS LE PROCESSUS
DE
RECONCILIATION AU RWANDA
Par HABIMANA Jacques-Abby
Promotrice: Mme Valérie ROSOUX
Rapporteur : Mlle Jana SCHILD
Mémoire présenté dans le cadre du Master
120 en sciences politiques Orientation Relations Internationales
Mots - clés
Unité
Réconciliation
Génocide
Reconstruction
Union Européenne
Commission Nationale pour l'Unité et la
Réconciliation
Déclaration de
déontologie
Je déclare sur l'honneur que ce mémoire a
été écrit de ma plume, sans avoir sollicité d'aide
extérieure illicite, qu'il n'est pas la reprise d'un travail
présenté dans une autre institution pour évaluation, et
qu'il n'a jamais été publié, en tout ou en partie.
Toutes les informations (idées, phrases, graphes,
cartes, tableaux,...) empruntées ou faisant référence
à des sources primaires ou secondaires sont
référencées adéquatement selon la méthode
universitaire en vigueur.
Je déclare avoir pris connaissance et adhérer au
Code de déontologie des étudiants en matière d'emprunts,
de citations et d'exploitation de sources diverses et savoir que le plagiat
constitue une faute grave.
Fait à Louvain-la-Neuve, le / Août / 2010
HABIMANA Jacques - Abby
Signature
Avant-propos :
Au moment où nous présentons ce mémoire,
qu'il nous soit permis, à travers ces lignes, d'exprimer notre sentiment
de profonde gratitude à toutes les personnes qui, d'une manière
ou d'une autre, ont concouru à sa réalisation.
Mes remerciements s'adressent premièrement à notre
chère épouse GWIZABERA Charlotte, à nos fils SHAMI et KAMI
et à notre famille pour leur soutien moral et spirituel.
Que Madame Valérie ROSOUX trouve ici la marque
particulière de notre profonde gratitude pour le rôle de
promotrice de ce mémoire qu'elle a accepté d'assumer
malgré ses multiples occupations.
Merci au corps professoral de l'UCL et à toutes les
personnes qui ont contribué à l'élaboration de ce travail
: Fatuma NDAGIZA, NDUSHABANDI Eric, SHYAKA Aggée, SEBERA Michel, aux
agents de la CNUR. Merci à mes collègues de promotion et à
mes amis, pour votre présence et vos encouragements.
De tout coeur je remercie les autorités des gouvernements
rwandais et belge qui nous ont offert la chance de réaliser ce master et
compléter notre formation en Belgique.
A vous, regrettées grandes soeurs Fayssa et Agathe
victimes du génocide, vous qui m'avez toujours encouragé durant
mon parcours académique, merci de m'avoir servi de symbole du courage.
C'est avec les larmes aux yeux que je vous dédie de tout mon coeur ce
travail en espérant qu'au ciel, vous êtes fières de moi.
Que la terre du Rwanda dont vous êtes victimes innocentes vous soit
légère.
Enfin, vous tous, qui vous reconnaissez pour nous avoir
assisté tant matériellement que moralement, soyez assurés
de notre reconnaissance.
« Je pense effectivement aujourd'hui que
le mal est
toujours extrême, mais jamais radical,
il n'a pas de profondeur, rien
de démoniaque.
Un champignon qui prolifère à la
surface.
Mais seul, le bien profond est radical.1 »
«My vision of Rwanda is a united country that feels
itself as an Integrated
into the sub region family of nations, a country
that is developed and has
eradicated poverty, a country that is democratic,
and above all, a stable
country at peace with itself as well as with its
neighbors»».
«We are the first of generations charged with
the
responsibility to rebuild post-genocide Rwanda.
This is our promise
to posterity and to the world2.»
- Boston, USA, 2005
1 Arendt Hannah, La philosophie n'est pas tout à fait
innocent, Payot, 2006, p.90
2 Kagame's speech at Boston, 13 November 2005
SIGLES ET ABREVIATIONS
ACP : Afrique, Caraïbes et Pacifique
ADEPR : Association des Eglises Pentecôtistes au Rwanda
AGL : Afrique de Grands Lacs
AOCM : Association des Orphelins Chefs de Ménage
AVEGA : Association des Veuves du Génocide
BEI : Banque Européenne d'Investissement
BENELUX :
Belgique, Pays-Bas, Luxembourg
CECA : Communauté Européenne du Charbon et de
l'Acier
CDR : Coalition pour la Défense de la République
(parti politique)
CEE : Communauté Economique Européenne
CEPGL : Communauté Economique des Pays des Grands Lacs
CNDH : Commission Nationale des Droits Humains
CNUR : Commission Nationale pour l'Unité et la
Réconciliation
CPC : Community Policing Committees
CTB : Coopération Technique Belge
EDPRS : Economy, Development and Poverty Reduction Strategy
Ex-FAR: Anciennes Forces Armées Rwandaises
FED : Fonds Européen de Développement
FPR : Front Patriotique Rwandais (parti politique.)
FRWS : Francs rwandais
GTZ : Agence Allemande de Coopération Technique
IDDH : Institut de la Dignité et des Droits Humains
IJR : Institute for Justice and Reconciliation
MDR : Mouvement Démocratique Rwandais (parti Politique)
MINUAR : Mission des Nations Unies pour l'Assistance au Rwanda
MINECOFIN : Ministère de la Planification Economique et
des Finances
MRND : Mouvement Révolutionnaire National pour la
Démocratie (parti Politique)
NURC : National Unity and Reconciliation Commission
ONU : Organisation des Nations Unies
ONG : Organisation Non Gouvernementale
PARMEHUTU: Parti pour l'Emancipation du Peuple Hutu PESC :
Politique Etrangère et de Sécurité Commune
PESD : Politique Européenne de la Sécurité
et de la Défense
PLP : Peace and Love Proclaimers
RDC : République Démocratique du Congo
SCUR : Student' Clubs of Unity and Reconciliation
TIG : Travaux d'Intérêt Général
TPIR : Tribunal Pénal International pour le Rwanda
UAAC : Université Adventiste d'Afrique Centrale et
Orientale
UCK : Université Catholique de Kagbwayi
UCL : Université Catholique de Louvain
UE : Union Européenne
ULK : Université Libre de Kigali
UNR : Université Nationale du Rwanda
UR : Unité et Réconciliation
Table des Matières.
Avant-propos : 4
SIGLES ET ABREVIATIONS 6
Table des Matières. 8
INTRODUCTION GENERALE 11
1. Choix, Intérêt et Objectif de la recherche
13
2. Délimitation du sujet 14
3. Objectif du travail 15
4. Méthodologie et concept 15
4.1 Méthodologie 15
4.2 Les techniques de collecte des données 16
Chap I. LA POLITIQUE DE RECONCILIATION AU RWANDA
19
1.1 Aperçu général et orientation
théorique du travail 19
1.1.1 Problématique 19
1.1.2 Hypothèse 22
1.2 Clarifications conceptuelles 22
1.2.1 Unité 22
1.2.2 Réconciliation 24
Chap. II PRINCIPAUX ACTEURS DANS LE PROCESSUS DE
RECONCILIATION AU RWANDA 30
2.1 La Commission Nationale pour l'Unité et la
Réconciliation (CNUR) 30
2.1.1 Historique et fondement de la Commission Nationale pour
l'Unité et la Réconciliation 30
2.1.2 Organes de la CNUR 31
2.1.3 Vision et Missions de la CNUR 35
2.1.4 Objectifs de la CNUR 36
2.2 L'Union Européenne (UE) 37
2.2.1 Aperçu historique 37
2.2.2 La coopération bilatérale 37
2.2.3 Cadre juridique de la coopération 38
2.2.3 L'UE au Rwanda post-génocide : le rattrapage de la
communauté 40
internationale ? 40
3.1 La Politique d'intervention et de coopération de
l'UE au Rwanda 43
3.2 Le rôle de l'UE dans le processus de
réconciliation au Rwanda 45
3.3 La problématique de l'intervention de l'Union
Européenne dans le domaine de la
réconciliation au Rwanda post-génocide
46
3.4 Projet UE-CNUR 50
3.4.1 Contribution de l'UE au budget ordinaire de la CNUR 55
3.4.2 L'intervention de l'UE dans le domaine de la
résolution des conflits 56
3.4.3 Assistance de l'UE auprès des associations et clubs
de réconciliation 57
3.4.4 Assistance de l'EU dans le domaine de la
réhabilitation et du logement 60
3.4.5 Assistance de l'EU en sensibilisation, débat public
et plaidoyer 61
OBSERVATIONS ET RECOMMANDATIONS. 70
CONCLUSION GENERALE 77
A N N E X E 86
Liste des tableaux et figures
Tableau 1 : Tableau récapitulatif des
programmes de l'UE au Rwanda par secteur d'intervention: 47
Tableau 2 : Les recettes totales et dons
alloués à l'Etat rwandais depuis 2000 48
Tableau 3 : Financement de l'UE aux programmes
de la CNUR par année 50
Tableau 4 : Liste des associations et clubs
bénéficiant de l'aide de l'UE selon la nature de leurs
activités 54 Tableau 5 : Liste des associations et
clubs de réconciliation bénéficiant de l'aide de l'UE
visités par l'auteur 57
Figure 1 : Les recettes totales et dons
alloués à de l'etat rwandais depuis 2000 49
Figure 2 : Financement de l'UE aux programmes de
la CNUR par année 51
Figure 3 : Nombre et répartition des
associations par type d'activités 55
INTRODUCTION GENERALE
Entre avril et juillet 1994, le Rwanda baigne dans le sang. Le
pouvoir, ses milices ainsi que des individus ordinaires y commettent le
génocide le plus expéditif de l'histoire : c'est le
génocide3 commis contre les Tutsi au Rwanda et dans lequel
des milliers de Hutu modérés ont péri et ce, malgré
la présence militaire d'une force de la paix de la communauté
internationale, la Mission des Nations Unies au Rwanda (MINUAR)4.
Bien entendu, le génocide est l'aboutissement d'un long processus de
désintégration sociale dont les premiers signes datent de
1959.
Déjà à cette époque, le
soulèvement d'une partie de la population contre une autre,
généralement connu sous le nom de « la révolution de
1959 », occasionne plus de 50 000 morts parmi la minorité
tutsi5. C'est ainsi que ceux qui échappent à la
violence vont s'exiler dans les pays voisins d'où ils reviendront plus
de trente ans après.
L'un des douloureux héritages de cette situation est
l'établissement et le renforcement de la méfiance entre Hutu et
Tutsi ainsi qu'une pauvreté déshumanisante qui frappe tous les
groupes sociaux.
3 Le nombre precis de victimes de ce genocide est
loin de faire l'unanimite. Selon les Nations Unies, ce nombre serait de plus de
800 000 personnes. (Voir GIEP/OAU, Rwanda : Le _genocide qu'on auraitpu
eviter, Addis Abeba : OUA, 2000, p. 121. (Le Groupe
International d'Eminentes Personnalites (GIEP) a conduit une etude fouillee sur
le genocide des Tutsi au Rwanda et affirme que, entre avril et juillet 1994, il
y a eu sans doute plus de 800 000 morts). Selon le gouvernement rwandais et a
l'IBUKA (le collectif des organisations des rescapes) ce nombre est de plus
d'un million de morts. Filip Reyntjens, lui, parle de 1.143.000 personnes tuees
pendant le genocide, « Estimation du nombre de personnes tuees au Rwanda
en 1994 », in L'A~rique des Grands Lacs, annuaire 1996-1997,
Centre d'etudes de la Region des Grands Lacs, Paris, L'Harmattan, 1997, p.12
4 La Mission des Nations Unies pour l'assistance au
Rwanda (MINUAR) etait une mission de l'ONU au Rwanda creee par la resolution
872 adoptee par le Conseil de securite en sa 3288e seance du 5 octobre 1993 et
dissoute en mars 1996 Elle etait en phase operationnelle au debut du genocide
au Rwanda. Le general canadien, Romeo Dallaire, fut nomme commandant de cette
mission constituee d'environ 2 300 hommes, essentiellement des Bangladais, des
Belges et des Ghaneens.
5 Emmanuel NKUNZUMWAMI, La tra_gedie
rwandaise. Histoire etperspectives, Paris, L'Harmattan, 1996, p.67
Cependant, malgré cette situation sociale critique les
rwandais doivent, au lendemain du génocide, revivre ensemble, cohabiter
sur les mêmes collines. Une tâche très difficile si l'on se
réfère à ce passé très tumultueux qui n'a
fait qu'enfoncer chaque groupe dans le repli sur soi et le mépris de
l'autre.
Dès son accession au pouvoir en juillet 1994, le
gouvernement dirigé par le Front Patriotique Rwandais-Inkotanyi (FPR)
affiche sa volonté de bâtir une société rwandaise
réconciliée avec elle-même. Mais comme dans tous les pays
qui sortent de conflits sanglants, il y a des priorités sur lesquelles
il faut se concentrer pour reprendre la vie normale. Au Rwanda, on a choisi de
focaliser les efforts sur la sécurité, le retour des
réfugiés, etc. . C'est seulement en 1999 que la
réconciliation devient une priorité du gouvernement avec la mise
en place de la Commission Nationale pour l'Unité et la
Réconciliation (CNUR).
La principale mission de celle-ci est de superviser le
processus de réconciliation.
Or, comme on peut s'y attendre, en 1994, le génocide
avait tout détruit, plongeant ainsi des populations entières dans
une misère indescriptible. Il est dès lors impossible pour le
Rwanda seul, en convalescence, de s'engager sur ce chemin de
réconciliation très exigeant notamment en termes de moyens, sans
répondre aux besoins urgents des populations. C'est ainsi que des
acteurs internationaux, ceux-là même qui sont accusés
d'avoir abandonné le Rwanda pendant le génocide, s'engagent dans
la reconstruction du pays, en apportant leur aide dans divers domaines de la
vie nationale.
La participation de la communauté internationale vient
donc répondre à deux impératifs majeurs : aider le Rwanda
d'une part à se relancer économiquement, d'autre part, à
redorer son blason après avoir été accusée de
fermer les yeux devant la souffrance de la population avant, pendant et
après le génocide.
C'est notamment en vue de répondre à ces objectifs
que l'Union Européenne intervient.
Ses activités sont nombreuses et variées et ne
peuvent donc être couvertes par une seule étude. Nous
tâcherons, pour ce qui est de ce mémoire, d'étudier sa
participation dans les activités destinées à promouvoir la
réconciliation.
1. Choix, Intérêt et Objectif de la
recherche
- Choix et Intérêt général
En se conformant aux exigences de la recherche telles que
définies par le canevas de l'Université Catholique de Louvain
(UCL), nous nous sommes proposé d'orienter notre recherche sur « Le
rôle de l'Union Européenne dans le processus de
réconciliation au Rwanda de 1999 à 2008. »
Il a pour but d'encourager les différents intervenants
dans le domaine de la réconciliation. Ce travail fournira des
informations concernant le processus de réconciliation et les efforts
fournis par l'Union Européenne en sa faveur.
- Intérêt personnel
Touché par la succession des conflits qui ont
déchiré la Région des Grands Lacs Africains6 en
général et le Rwanda en particulier, nous nous sommes
intéressé à ce sujet en vue de proposer des pistes de
solutions destinées à favoriser le rapprochement entre les
différentes composantes de la population rwandaise.
6 L'expression o Region des Grands Lacs Africains
» renvoie a un ensemble de lacs situes le long de la grande faille
(`rift') est-africaine, incluant les lacs Kivu, Tanganyika ,Victoria, Albert et
Edouard. Transfrontaliers, ces lacs bordent le Burundi, le Kenya, l'Ouganda, la
Republique Democratique du Congo (RDC), le Rwanda, la Tanzanie et la Zambie.
Sur le plan geopolitique, la Region des Grands Lacs englobe un nombre variable
de pays. On parle ici de l'ensemble des pays constitue par le Burundi, la RDC
et le Rwanda. Ces trois pays sont les anciennes colonies de la Belgique et
forment la sphere des pays qui ont le francais comme langue officielle. Depuis
1994, le Rwanda utilise le francais et l'anglais comme langues officielles.
- Intérêt académique et scientifique
Dans ce cadre, il convient de souligner que l'approche de la
réconciliation comme processus de transformation des conflits et de
consolidation de la paix, nécessite une attention particulière
car elle ne se limite pas à s'attaquer aux causes du conflit mais
questionne aussi le passé et exige le changement des structures pour un
futur meilleur.
Malheureusement les sources scientifiques traitant de la
réconciliation comme telle sont rares et très peu d'écrits
existent sur le rôle de la communauté internationale dans le
processus de réconciliation au Rwanda ou ailleurs.
2. Délimitation du sujet
Dans le temps, ce travail couvre une période de 10 ans
soit de 1999 à 2008. L'année 1999 coïncide avec la
création de la CNUR. En 2002, un accord de partenariat entre l'Union
européenne et la CNUR est signé et le programme nommé
`UE-NURC Projet' fait partie des programmes de la commission. Le dernier
rapport des activités de la CNUR a été publié en
2008, avant que nous ne commencions cette étude.
Dans l'espace, notre étude est limitée aux
provinces du Sud, de l'Ouest et à la ville de Kigali. Nous y avons
visité les associations et clubs d'unité et réconciliation
financés par le projet UE-NURC. Compte tenu du temps et des moyens
limités dont nous disposions, nous n'avons pas pu visiter les autres
provinces. Le choix de ces deux provinces n'est pas un hasard. A l'aide d'une
base de données sur les activités du projet UE-NURC, nous avons
constaté que l'UE se concentrait plus sur ces deux provinces. En outre,
vu les contraintes du temps et les moyens que nous disposions, nous avons
visité ces deux provinces car il y a un accès facile en terme de
moyen de transport.
3.Objectif du travail
L'objectif global de cette étude est d'examiner la
portée et les limites de l'intervention de l'Union Européenne
dans le processus de réconciliation nationale. Pratiquement, il s'agit
d'analyser le rôle de l'UE et de voir la manière dont ses
activités contribuent concrètement à la politique
rwandaise de réconciliation.
De cet objectif global découlent deux objectifs
spécifiques. Il s'agit d'évaluer l'impact des activités de
l'UE auprès de la population rwandaise à travers le projet
UE-CNUR et de connaître l'avis de l'opinion publique sur l'intervention
de l'UE dans le processus de réconciliation.
Des pistes de solutions destinées à rendre plus
dynamique l'intervention de l'UE en matière de réconciliation
seront incluses à la fin de ce travail.
4. Méthodologie et concept
4.1 Méthodologie
Afin de réaliser les objectifs que nous nous sommes
assignés, certaines techniques de collecte des données et
approches méthodologiques ont été
privilégiées.
Etant donné que la réconciliation est un
processus complexe, son analyse demande une certaine prudence. Il est d'abord
difficile de la quantifier et de la mesurer. Nous nous sommes servis des plans
d'action et des rapports d'activités de la CNUR et de l'UE, des
documents officiels de l'Etat rwandais ainsi que d'autres écrits,
ouvrages et articles.
Ensuite, nous avons mené des entretiens. En effet, il
faut d'emblée noter que les ouvrages et publications, même
lorsqu'ils sont d'une grande qualité et d'un apport certain pour la
recherche scientifique, véhiculent toujours le point de vue de leurs
auteurs. Ce qui est dangereux pour la réconciliation au Rwanda dans la
mesure où les ouvrages sur le génocide se contredisent selon la
sensibilité de chaque auteur. C'est pourquoi nous avons croisé
les sources écrites avec des entretiens même si ceux-ci sont
marqués par la subjectivité des interlocuteurs. Lors de la
collecte des données, nous avons tenu compte de tous ces
paramètres.
4.2 Les techniques de collecte des données
4.2.1 La documentation
Cette technique nous a permis d'exploiter divers documents
traitant du fonctionnement de la CNUR et de ses engagements auprès de la
population, des articles sur des questions relatives aux activités en
rapport avec la CNUR et des publications scientifiques. Tous nous ont
été d'une grande utilité.
4.2.2 Les interviews
En vue de rassembler le maximum d'informations,
d'éclaircissements et de précisions concernant le rôle de
l'UE au sein de la CNUR, nous nous sommes servis de la technique d'interview.
Nous avons contacté des personnes censées avoir les informations
nécessaires à la réalisation de cet objectif.
Nombre des personnes interviewées :
Il nous semble indispensable, comme dans tout travail
scientifique, de préciser la population qui a fourni les informations
nécessaires au chercheur dans le but d'atteindre les objectifs
préalablement fixés.
La population directement visée par le présent
travail est composée des cadres de la CNUR, bien placés pour
avoir des informations fiables sur le rôle de l'Union Européenne
dans le processus de réconciliation. Des interlocuteurs ont
été également recrutés parmi les leaders
d'associations et clubs dont les activités sont orientées dans
les domaines de la réconciliation et financées par le projet
UE-CNUR. Les autres personnes ayant pris part à nos entretiens sont
celles qui sont directement concernées par la mise en oeuvre des
activités de la CNUR. Ainsi leurs expériences professionnelles et
leurs positions nous ont permis de mieux comprendre le rôle de l'UE dans
le processus de réconciliation au Rwanda.
Les personnes ayant pris part aux entretiens
s'élèvent à 32, à savoir: - Le Secrétaire
exécutif de la CNUR
- Les commissaires de la CNUR (4)
- Les directeurs d'unités de la CNUR (3)
- Le coordinateur du projet UE-CNUR
- Le chargé de la coopération au sein de l'UE
à Kigali
- Les membres des associations et clubs de réconciliations
dont les activités sont financées par l'UE (22).
Ces entretiens ont couvert différents aspects comme la
mise en place de la CNUR, l'état actuel du processus de
réconciliation au Rwanda, la présence de l'Occident7
et ses réalisations dans le processus de réconciliation et le
rôle précis de l'Union Européenne dans le processus de
réconciliation au Rwanda.
7 Europe/Occident : dans notre texte, ces deux mots
expliquent à peu près la même chose, mis à part le
fait que l'Occident, en tant que civilisation, a, depuis quelques
siècles, largement identifié l'Europe développé, de
liberté et de droit de la personne. Ici les deux termes recouvrent la
même entité géopolitique. Géographiquement,
l'Occident représente les pays de l'Europe de l'ouest, mais
politiquement et économiquement, elle inclut aussi les pays de
l'Amérique du nord.
5 . Difficultés rencontrées
Il a été difficile pour nous de choisir l'aspect
par lequel nous traiterions le rôle de l'Occident dans la reconstruction
post génocide du Rwanda. Dans l'histoire du Rwanda, l'Occident est
souvent cité, parfois à des fins propagandistes, comme
l'élément catalyseur du mal que le pays a subi et dont les
conséquences sont encore énormes. Au fur et à mesure que
nous avancions dans nos recherches, nous nous sommes rendu compte que
malgré ces « préjugés », l'Union
Européenne8 contribuait largement à la reconstruction
du Rwanda. Nous avons finalement choisi de nous concentrer sur les
activités de l'UE au Rwanda parce que, aussi paradoxal que cela puisse
paraître, c'est l'une des questions les moins traitées dans
l'abondante littérature consacrée à ce pays. D'où
la difficulté de trouver des sources variées, qui nous
empêcheraient de tomber dans le piège de l'analyse partiale. Nous
avons également eu des difficultés en ce qui concerne
l'accès à certaines données au sein du bureau de l'UE au
Rwanda et même au sein de la CNUR. Dans le même sens et
conformément au temps qui nous était imparti et aux moyens en
notre possession, il était coûteux pour nous d'atteindre nos
interviewés éparpillés sur le territoire national.
8 Union Européenne (UE) est un
regroupement de 27 pays indépendants, pour la plupart
situés en Europe Occidentale. L'UE est régie par deux
traités fondamentaux : le traité de Rome, et le traité de
Maastricht. Les Etats membres de l'UE forment un ensemble ayant des
stratégies communes pour le développement du continent.
Chap. I. LA POLITIQUE DE RECONCILIATION AU RWANDA
1.1 Aperçu général et orientation
théorique du travail
1.1.1 Problématique
Le processus d'unité et de réconciliation au
Rwanda est un chemin où chaque pas compte. Il s'agit d'unifier les
Rwandais et leur donner la chance de revivre ensemble en toute paix et de faire
du Rwanda une nation paisible, unie et prospère, où toutes et
tous ont les mêmes droits et peuvent participer ensemble au
développement du pays. Ceci correspond à la vision de la
CNUR9.
Certes, le génocide des Tutsi ne doit pas être
perçu comme un incident de parcours mais comme l'aboutissement d'un plan
conçu par les autorités politiques rwandaises, qui a
remarquablement atteint son objectif en 1994 en emportant plus d'un million de
vies, des Tutsi pour la plupart.
Par ailleurs, le Rwanda est un pays au passé douloureux
qui, jusqu'à présent, n'est pas partagé ni compris de la
même façon par tous les Rwandais. L'idéologie
génocidaire qui a tiré sa substance dans la politique coloniale
au Rwanda n'est pas encore, malheureusement,
éradiquée10. Des milliers d'orphelins, des centaines
de veuves ont encore des plaies qui saignent, des milliers de prisonniers sont
encore détenus malgré la clémence des juridictions Gacaca
qui en ont déjà libéré de dizaines de milliers.
Selon la CNUR11, le processus de réconciliation
doit être soutenu par les piliers incontournables que sont la
vérité, la justice, ou encore le pardon.
9 IJR, The impact assessment of the National Unity
and Reconciliation Commission, Kigali, November 2007, p.3-4
10 Parlement rwandais, L'état de
l'idéologie de génocide dans le milieu éducatif,
Kigali, 2007, p. 33-41
11 CNUR, Rapport du 2eme Sommet national,
Kigali, 2002, p.26
Une justice qui doit être rendue à la
lumière de la vérité dévoilée, le pardon
découlant de l'amour qui dépasse les barrières de la haine
et qui inclut même l'adversaire, en vue de développer une
mémoire différente capable de gérer le présent pour
un lendemain radieux.
Selon GOUTEUX, le génocide de 1994, par la
radicalisation des perceptions identitaires, a rendu complexe et
compliquée la notion d'unité et réconciliation des
Rwandais12. Ainsi, le gouvernement national installé en
juillet 1994 a placé l'unité et la réconciliation des
Rwandais au coeur de sa mission.
Dès la création de la CNUR en 1999, les
divergences et les réticences quant à sa mission ont
provoqué des discussions au sein de la société rwandaise.
Pour certains, il fallait se limiter à l'unité puisqu'il
était encore trop tôt pour parler de réconciliation. Pour
d'autres, il semblait plus correct de parler d'unité et de cohabitation
puisque la notion de réconciliation leur paraissait trop ambitieuse ;
enfin, pour d'autres encore, il fallait rendre justice et la
réconciliation viendrait de soi par après13.
Toutes ces différences de perception font
apparaître une question controversée consistant à savoir
qui se réconcilie avec qui ? S'agit-il de réconcilier le Hutu
avec le Tutsi, les bourreaux avec les victimes ou les nouveaux dirigeants et
leurs opposants?
Le génocide n'est pas un accident. Il est une
conséquence des idéologies ethnicistes d'exclusion et de
discrimination institutionnalisées par les pouvoirs successifs. Pour la
CNUR, le concept d'unité et réconciliation doit cibler non
seulement le contexte du génocide, mais aussi toutes les causes du mal
rwandais en tenant compte du cadre historique et idéologique.
12 Jean Paul GOUTEUX., Un genocide secret dEtat.
La France et le Rwanda 1990-1997, Paris, Ed Sociales, 1998, p.196,
13 Anastase SHYAKA., Le conflit rwandais,
Butare, UNR, 2004, p.53-54
Il s'agit donc d'un processus visant à redonner valeur
à l'identité nationale et recréer un esprit de patriotisme
chez les Rwandais.
Parlant de l'histoire, Léonidas RUSATIRA, dans son
ouvrage Rwanda, le droit à l'espoir, dit que la
vérité historique ne sera authentique que si elle n'est
monopolisée par qui que ce soit, mais partagée en tant que
patrimoine commun et non la création de l'imagination
politique14. L'histoire étant un sujet inépuisable, au
Rwanda, on ne fait que l'effleurer tandis que le fond s'entête à
rester inaccessible, faute d'explorateurs avisés.
Dans la vie quotidienne, la réconciliation se fait
entre l'opprimé et l'oppresseur avec ou sans médiation. De toutes
les façons, la reconnaissance du tort et l'expression du regret par
celui qui l'a commis et la demande de pardon constituent des ingrédients
à la réconciliation et à l'établissement d'une
nouvelle relation.
Le cas rwandais est tel qu'aucun de ces préalables
n'existe. Et c'est bien là un des obstacles majeurs à ce
processus. Comment réconcilier les Rwandais quand le poids de la haine
est encore perceptible, les blessures du génocide non encore
cicatrisées ? Peut-on les réconcilier lorsque la justice
internationale et même nationale n'a pas fini de rendre les jugements et
que loin de demander pardon, certains criminels sont encore en liberté
et continuent leur plan de génocide? Le Rwanda devrait-t-il attendre que
ces obstacles soient levés pour commencer l'étape de la
réconciliation ? Devrait-t-il attendre la cicatrisation des blessures du
génocide pour entamer le processus de la réconciliation nationale
? Le Rwanda était-il capable de gérer seul ce lourd travail de
réconcilier un peuple déchiré par un conflit de longue
durée ? Les interventions extérieures étaientelles les
bienvenues dès l'instant où la Communauté Internationale
(CI) avait abandonné les Rwandais au moment le plus difficile ?
14 Leonard RUSATIRA., Rwanda, le droit d
l'espoir, Paris, L'Harmattan, 2005, p.152-157
Toutes ces questions constituent le pilier des arguments de
ceux qui estiment que l'intervention de l'UE et ses initiatives stimulent la
création des conditions favorables à la réconciliation de
la nation rwandaise.
1.1.2 Hypothèse
Par rapport à l'interrogation précédente,
cette étude tentera de vérifier l'hypothèse suivante:
La coopération entre le Rwanda et l'Union
Européenne dans divers secteurs d'intervention fait de l'UE un
réel acteur dans le processus de réconciliation au Rwanda.
1.2 Clarifications conceptuelles
Dans la littérature relative aux méthodes de
gestion des conflits, on évoque souvent la notion de «
réconciliation ». Il existe deux termes clés au Rwanda
concernant la résolution des conflits interethniques qui ont
ravagé le pays.
Il s'agit des mots `unité' et `réconciliation'. Une
distinction est faite entre les deux concepts.
1.2.1 Unité
Selon le dictionnaire universel, le mot « unité
» désigne un caractère, l'état de ce qui est un, de
ce qui forme un `tout' cohérent, harmonieux15.
Au Rwanda, le mot « unité » a une
signification particulière pour l'ensemble de la société.
Etymologiquement le mot « UBUMWE » renvoie non seulement
à un tout cohérent, à l'union du peuple mais est aussi un
symbole du patriotisme.16 Dans presque tous les discours politiques
au Rwanda, chaque leader prononce
15 Dictionnaire : Le Petit Larousse en couleur, Paris,
Lib. Larousse, 1998, p.1045
16 Alexis KAGAME, Un abre'ge d'ethnohistoire du
Rwanda, Butare, Ed. T.I, 1972, p.73
ce mot `unité'. Ce mot a souvent servi de publicité
polico-administrative et il a fini par perdre son vrai sens. Par contre, il a
été utilisé comme facteur de division.
Ex : `UBUMWE BWA RUBANDA NYAMWINSHI17'
c'est-à-dire l'unité de la masse. Phrase qu'on trouve dans le
discours du président Kayibanda en 1962, quand il s'adresse aux
partisans de son parti politique MDR-PARMEHUTU18.
En 1992 sont formées des milices Hutu connues sous le
nom de `INTERAHAMWE19' partisans du parti CDR, satellite du parti au
pouvoir MRND. Cette expression qui symbolisait la force de la nation a vu son
sens mystifié pour désigner les génocidaires.
Aujourd'hui, on parle de Commission Nationale pour
l'Unité et la Réconciliation. (CNUR). Le mot `unité'
retrouve son sens d'amour de la patrie, de patriotisme. L'unité est
évoquée dans la perspective de retrouver ce qui, jadis,
caractérisait tous les Rwandais. Il s'agit ainsi de rassembler les
Rwandais qui sont divisés et de réconcilier ceux qui sont
toujours en conflit20
.
Presque partout ailleurs dans le monde, le mot `unité'
symbolise l'union du peuple et est souvent utilisé pour désigner
un gouvernement de transition ou de coalition.
(Ex : gouvernement d'unité nationale, gouvernement
d'union du peuple,...). En France, surtout en cas de crise politique, on aime
parler d'union nationale. François Fillion, le premier ministre
français, qualifie ce concept d'outil pour résoudre le
problème du pays. « Le maître mot, c'est l'unité
nationale.
17 Ubumwe bw'arubanda nyamwinshi. En kinyarwanda.,
cela veut dire, l'unite de la majorite Hutu. Interprets comme discours
divisionniste excluant les autres ethnies, Tutsi et twa dans la politique
nationale.
18 NKUNZUMWAMI, E., La tragedie rivandaise.
Histoire et pers pectives, Paris, L'Harmattan, 1996, p 127
19 Interahamwe : mot kinyarwanda qui signifie, ceux qui
combattent ensemble pour defendre la cause nationale. Ce mot designe
actuellement le groupe des jeunes qui ont commis le genocide des Tutsi en 1994
au Rwanda. Il designe aussi la milice Hutue qui combat le gouvernement rwandais
a partir de la Republique Democratique du Congo.
20 T. GATWA., The churches and ethnic ideology in
the Rwandan crisis 1900-1994, UK, Regnum Books International, Milton
Keynes, 2005, p.51
On a besoin d'unité au sein de l'exécutif,
on a besoin d'unité au sein de la majorité. Mais on a surtout
besoin d'unité avec les Français pour faire face à une
crise qui est une crise comme on n'en a jamais connu et pour laquelle aucune
des solutions précédentes ne peut être appliquée
21 ».
1.2.2 Réconciliation
Il existe différentes significations du mot
`réconciliation' notamment selon le contexte de chaque pays. Jusqu'ici,
aucune n'apparaît consensuelle.
Cependant, comme le précise ASSEFA, si la
réconciliation reste un terme difficile à opérationnaliser
et aux diverses interprétations, personne ne doute de son importance
dans nos sociétés déchirées plus que jamais par des
conflits interminables. Elle reste incontournable pour une vraie reconstruction
des sociétés post-violence22.
Quant à Valérie ROSOUX, elle montre que le
concept de réconciliation demeure polysémique : la notion de
réconciliation renvoie à toute forme d'arrangement mutuel entre
les anciens ennemis23.
Plusieurs chercheurs et praticiens s'accordent à
considérer que « la réconciliation est plus une orientation
qu'un fait, un objectif ou une perspective qu'un aboutissement. C'est un agenda
infini »24.
Nous allons essayer de considérer les points de vue de
quelques uns de ces chercheurs.
21
http://www.blog-fillon.over-blog.com/article-33080375-6.html
22 Cite par SHYAKA M. Aggee, mécanismes
modernes de reglement des conflits, rapport NURC, conference atelier,
Kigali, 14-16/juillet/2006, p.06
23 Valerie ROSOUX. Réconciliation :
ambition et piege de la justice transitionnel. Le cas du Rwanda, in Revue:
Droit et Societe 73/2009, p.615
24 Martin BRAUN, Ingénierie et perception
d'une offre publique de paix: la politique d'unité et de
réconciliation au Rwanda, Abidjan, IDDH, decembre 2007, p.53
- Johan GALTUNG25 explique que la
réconciliation peut être comprise comme un processus ou un but
à atteindre. Il souligne cependant l'aspect "processural" de la
réconciliation. "Reconciliation will be interpreted as the process
of healing the traumas of both victims and perpetrators after violence,
providing a closure of the bad relation. The process prepares the parties for
relations with justice and peace. "
L'auteur résume ce concept de réconciliation par la
formule mathématique : Réconciliation= Closure
+Healing.26
Nous comprendrons donc la réconciliation comme le
processus par lequel les victimes et les bourreaux doivent être
guéris des différents traumatismes consécutifs aux
violences, afin de pouvoir progressivement fermer la porte au cycle des
hostilités pour vivre en harmonie.
- Thabo MBEKI, l'ancien président de l'Afrique du Sud
lors de son discours à Kigali à l'occasion du sommet national sur
l'unité et la réconciliation au Rwanda, soutient que la
réconciliation est un long processus et qu'il faut de la patience pour
changer le passé. Pour lui, la Commission Vérité et
Réconciliation avait comme première mission de promouvoir cette
réconciliation parmi les citoyens sud-africains27.
Dans le champ politique, le mot "réconciliation" est
entré comme une modalité de reconstruction de paix. La
réconciliation nécessite que l'on dépasse le niveau de
l'adversité ; que l'on dépasse, dans une certaine mesure, ce qui
a pourtant construit la mémoire et l'imaginaire, de telle sorte que le
passé ne soit plus un élément instigateur de nouvelles
violences.
25 Johan GALTUNG, " After Violence, Reconstruction,
Reconciliation and Resolution ", in ABU-NIMER Mohammed, (eds),
Reconciliation, Justice and Coexistence : Theory and Practice, Maryland,
Lexington books, 2001, P.
26 Idem, p.4
27 CNUR, Rapport du premier sommet national sur
l'unité et la reconciliation, Kigali, 18-20 octobre 2000, p.16
Elle demeure un processus et un effort inscrit dans la
durée, processus par lequel on cherche à panser les blessures et
créer la confiance. Elle s'inscrit dans une approche inclusive de la
résolution du conflit.
En termes de justice par exemple, elle recherchera donc la
réhabilitation et la réintégration sociale, plutôt
que l'exclusion punitive.
Cela demande une certaine volonté de coexister et de
gérer les différences de manière pacifique. Aussi, la
réconciliation contribue-t-elle à la promotion d'une culture des
droits de l'homme, ainsi qu'à la stabilité politique et à
la paix.
- J.P. LEDERACH, constate quant à lui que la
réconciliation est à la fois une orientation et un espace. «
En tant que perspective, la réconciliation vise le
rétablissement de bonnes relations entre les parties (...). En
tant qu'espace, la réconciliation représente un point de
rencontre entre le passé et le futur. Elle comprend la
vérité (reconnaissance des offenses, transparence,
révélation et clarté sur le passé), la justice
(égalité, équité, restitution), la
miséricorde (acceptation de l'autre, compassion, pardon et
guérison) et la paix (harmonie sociale, bien-être, respect
mutuel)28 ».
Dans le même ordre d'idées, J. MAÏLA,
affirme que la réconciliation est le couronnement de la paix dans le
sens où elle vise non pas au règlement du conflit mais à
son dépassement et suppose la reconnaissance des droits. Son objectif
ultime est de parvenir à une société pacifiée
où se reconnaissent des individus libres et égaux, capables
d'affronter une histoire faite de violences et, surtout, de la
surmonter29. Selon cet auteur, la réconciliation s'accompagne
du pardon sincère non pas tant pour effacer et oublier le passé,
mais pour vivre en intelligence et en convivialité le présent.
Selon les différentes conceptions que nous venons de
citer, la réconciliation s'apparente à un idéal
difficilement atteignable.
28 Cité par SHYAKA M. Aggee, Reparation et
reconciliation. Le cas du Fonds d'Assistance aux Rescapes du Genocide et des
Massacres (FARG) au Rwanda de 1998 a 2005, LLN, 2009, p.85
29 MAILA, La reconciliation, le couronnement de la
paix, Mexico, 2002
En bref, nous pouvons dire que la réconciliation vise
non le règlement du conflit mais son dépassement. Son but est de
parvenir à une société pacifiée où tous,
hommes et femmes se reconnaissent les mêmes droits, acceptent d'affronter
leur histoire et oeuvrent ensemble pour la surmonter.
Loin d'être seulement une volonté de tourner la
page, la réconciliation suppose une démarche active pour
revisiter la mémoire et permettre l'écriture d'une histoire qui
fasse vivre une société jadis déchirée en
adéquation avec elle-même et en paix avec les autres.
Se réconcilier n'est pas seulement surmonter les
raisons de se faire la guerre, c'est aussi inventer les conditions pour se
parler, c'est-à-dire, trouver le bon équilibre de la
mémoire : suffisamment oublier pour ne plus se battre, se souvenir pour
ne pas recommencer.
Sur le plan des principes, la réconciliation peut
être considérée comme un processus global incluant des
instruments clés tels que la justice, la vérité, la paix,
la cicatrisation et la réparation afin d'assurer la transition entre un
passé divisé et un avenir commun et partagé. Il ne peut
jamais y avoir de paix véritable sans réconciliation. Pour
autant, sur le terrain, les officiels rwandais présentent la
réconciliation comme un processus politique et juridique
incontournable.
La CNUR ajoute à ces instruments les faits historiques,
car ils constituent un des éléments fondamental pour faciliter le
processus de réconciliation. Ceci commence avec la période
coloniale et post-coloniale jusqu'au génocide de 1994.
La réalité du génocide suppose aussi
l'héritage et la gestion de la fracture entre communautés
rwandaises. Chaque Rwandais, à sa manière, a été
blessé par les événements dramatiques qu'a connus le
pays.
Les quatre décennies d'exclusions, de divisions et de
disqualifications politiques et communautaires, l'a profondément
marqué par la peur et la méfiance, parfois au-delà de
toute raison30.
Ainsi pour faire référence aux propos de V.
Rosoux, « les conflits meurtriers tendent à institutionnaliser
les images d'ennemi et celles-ci dominent les perceptions. Dans un contexte
pareil, chaque partie décrit fréquemment l'autre comme ayant des
intentions nuisibles, une basse moralité et des traits inferieurs.
L'identité de chaque partie se base sur la négation du sens de
l'humanité de l'autre 31».
Dans la politique interne du Rwanda, la réconciliation
est considérée comme l'outil principal pouvant aider à
ressouder le tissu d'une société déchirée par des
conflits de longue durée, comme le moyen de retrouver un mode de vie qui
permette à toutes les couches de la société d'avoir une
vision commune sur ce qui les unit et dépasser ce qui les
sépare.
Il est cependant évidente que dans une
société dynamique comme le Rwanda, la population cohabite
grâce aux intérêts communs produits par une
solidarité de complémentarité et aboutit à cet
effet à un autre type de conflit qui est socioprofessionnel. Le conflit
est en effet multidimensionnel. Ainsi, une alternative au processus de
réconciliation serait centrée sur un développement
qualitatif et quantitatif de toute la communauté.
Toutes ces idées prouvent à suffisance que la
réconciliation n'est pas un événement, mais un processus.
Un processus lent mais qui contribue à la reconstruction post conflit.
Son développement dépend de plusieurs éléments qui
ne peuvent pas émerger d'un seul coup.
30 NURC, Rwanda, Contexte analysis. Kigali,
2007, p.3
31 Cite par SHYAKA M. Aggee, op.cit. p.82
Parmi ces éléments, nous pouvons mentionner les
intérêts, la volonté, une large participation de toute la
société, y compris des offenseurs eux-mêmes,...
Pour dépasser le niveau des débats
académiques, nous choisissons de centrer notre analyse uniquement sur
l'engagement de l'UE auprès du gouvernement rwandais dans le processus
de réconciliation.
Chap. II PRINCIPAUX ACTEURS DANS LE PROCESSUS
DE
RECONCILIATION AU RWANDA
2.1 La Commission Nationale pour l'Unité et la
Réconciliation
(CNUR)
2.1.1 Historique et fondement de la Commission Nationale
pour l'Unité et
la Réconciliation
Depuis l'époque coloniale, le Rwanda a
été caractérisé par une gouvernance basée
sur une politique de discrimination et de dichotomie dans la population,
consolidant les assises d'un pouvoir dictatorial.
Cette politique ne respectant pas les droits fondamentaux de
l'homme a été à la base des massacres et exodes à
répétition, jusqu'à l'irréparable génocide
des Tutsi d'avril 1994.
L'idée de mettre en place une commission pour
promouvoir l'unité et la réconciliation au Rwanda prend racine
dans les accords de paix d'Arusha signés le 04 Août 1993 entre le
gouvernement de l'époque et le Front Patriotique Rwandais (FPR :
mouvement rebelle qui attaquait le pays depuis octobre 1990). Le
génocide des Tutsi a rendu encore plus pertinente l'existence d'une
telle structure.
Les consultations nationales de différentes
catégories de Rwandais qui ont eu lieu en 1998 et 1999 ont
dégagé des recommandations sur cinq domaines principaux de la vie
du pays : l'unité et la réconciliation, la démocratie et
la bonne gouvernance, la justice, l'économie et la
sécurité.
Une recommandation spécifique sur l'unité et la
réconciliation concernait la mise en place « au niveau national,
d'une commission qui aiderait les Rwandais à retrouver l'unité et
à se réconcilier ». Cette recommandation fut votée
par l'Assemblée nationale de transition et adoptée comme loi en
mars 199932.
La CNUR a donc été mise en place par la loi
N° 03/9 9 du 12/03/1999, qui a été modifiée et
complétée par la loi n° 35/2002 du 14/ 12/200233
promulguée par la Constitution Nationale du 03/06/2003 en son article
17834.
Le Gouvernement d'union nationale dirigé par le FPR et
la coalition est convaincu que l'unité et la réconciliation
constituent la voie unique vers la restauration de la paix, de la
sécurité, du respect des droits de l'homme et le
développement intégral et pérenne du pays et de ses
habitants.
La mise sur pied de cette commission est un grand pas vers
l'éradication des comportements mus par des réflexes
identitaires, des stéréotypes et préjugés longtemps
prêchés par des régimes répressifs.
2.1.2 Organes de la CNUR
La CNUR est un organisme étatique qui fonctionne au
sein d'un environnement multisectoriel. Elle sert d'instrument de
régulation et de coordination des trois secteurs (secteur public,
secteur privé et société civile) de la vie nationale.
32 J.0 N0 5 du 1er Mars 1999 portant
creation de la Commission Nationale pour l'Unite et la Reconciliation.
33 J.O n° 35 du 14 Decembre. 2002, portant
modification de la loi sur la creation de la CNUR
34 Republique du Rwanda, la constitution nationale,
juin 2003, p.4
La CNUR est structurée en deux grands organes :
a. Le Conseil des Membres de la Commission Nationale pour
l'unité et la Réconciliation
Le Conseil des membres de la CNUR comprend douze commissaires
dont un Président, un Vice-président, et un Secrétaire
Exécutif tous nommé par le Président de la
République. Il se réunit une fois par mois pour examiner les
activités du Secrétariat exécutif et s'assurer du bon
déroulement des programmes. Notons qu'il peut se réunir plus
d'une fois par mois et à chaque fois qu'une urgence se
présente.
b. Le Secrétariat exécutif
Géré par un Secrétaire exécutif, cet
organe a cinq attributions, à savoir :
· Superviser les activités journalières de la
CNUR,
· Administrer et gérer les ressources
financières et humaines de la CNUR,
· Consulter régulièrement les
autorités nationales, la société civile, et
les autres
opérateurs dans le domaine de l'unité et la
réconciliation,
· Mobiliser les agences internationales en faveur de
l'unité et la réconciliation,
· Rechercher des appuis nationaux et internationaux
destinés à soutenir les efforts de la CNUR.
Pour assurer la réalisation de sa tâche, cinq
services lui servent de support :
1. Assistance administrative,
2. Relations publiques,
3. Suivi et évaluation des programmes,
4. Planification,
5. Coordination des programmes,
Le Secrétariat exécutif est composé de trois
départements.
1° Le département d'éducation
civique
Ce département est considéré comme le moteur
de la Commission. Il a les attributions suivantes :
- Former et engager les autorités nationales et locales
dans le processus d'unité et réconciliation,
- Former périodiquement les Rwandais de
différents niveaux, au travers de réunions, séminaires et
via les média, dans l'intérêt de l'unité et la
réconciliation,
- Développer un programme (syllabus) destiné
à promouvoir l'unité et la
réconciliation dans les
écoles primaires, secondaires et supérieures,
- Evaluer les progrès accomplis en matière
d'unité et de réconciliation.
Pour accomplir les missions qui lui sont assignées, le
département met en oeuvre les 5 programmes suivants :
· Développement des curricula (syllabus) et
formations,
· Organisation des Ingando,
· Education de la masse et débat public,
· Volontaires locaux de l'unité et la
réconciliation,
· Education et dialogue des jeunes.
2° Le département de gestion des conflits et
paix
Le département de gestion des conflits et paix a les
attributions suivantes : - Examiner les lois se rapportant à
l'unité et à la réconciliation,
- Proposer la révision des lois touchant à
l'unité et à la réconciliation,
- Suivre, relever et dénoncer les cas importants
d'injustices et de
discrimination,
- Suivre de près le respect et l'observation de la
politique d'unité et réconciliation par les instances
gouvernementales, les partis politiques, les dirigeants et la population,
- Assurer la médiation des conflits en faveur de
l'unité et de la réconciliation.
Pour accomplir les missions qui lui sont assignées, le
département met en oeuvre les programmes suivants :
· Partenariat institutionnel et plaidoirie,
· Recherche, suivi et évaluation sur la gestion des
conflits dans le pays,
· Dialogue national et communautaire,
· Formation en gestion des conflits.
3°. Le département des finances et
administration
Le département des finances et administration a les
attributions suivantes :
- Recruter, suivre et évaluer le personnel,
- Identifier les besoins en formation et préparation de
la formation du personnel,
- Assurer la logistique,
- Effectuer différentes opérations
financières et faire des rapports périodiques sur la gestion des
fonds de la CNUR,
- Répondre aux obligations des auditeurs internes et
externes, - Trouver des fonds pour le fonctionnement de la CNUR,
- Préparer le budget.
Il comprend cinq subdivision :
· La comptabilité,
· La gestion et le développement des ressources
humaines,
· La logistique et les finances,
· Les affaires juridiques,
· L'auditorat Interne.
2.1.3 Vision et Missions de la CNUR
a. Vision
La vision de la Commission Nationale de l'Unité et la
Réconciliation est de faire du Rwanda une nation paisible, unie et
prospère, où toutes ses filles et tous ses fils ont des droits
égaux et participent au développement du pays. Dans cette
perspective, la Commission vise l'avènement d'un Rwanda plus juste et
plus humain qui soit débarrassé des
discriminations.35
b. Missions La CNUR a neuf missions principales :
1. Préparer et conduire des débats à
l'échelle nationale dont l'objet est de promouvoir l'unité et la
réconciliation du peuple rwandais,
2. User de tous les moyens susceptibles de sensibiliser les
Rwandais à leur unité et d'asseoir celle-ci sur des bases
solides,
3. Préparer et diffuser les idées et
initiatives visant à promouvoir la paix au sein du peuple rwandais et
à encourager la culture de l'unité et de la
réconciliation,
4. Dénoncer et combattre les actes, les écrits et
langages susceptibles d'encourager la discrimination,
5. Sensibiliser les Rwandais à leur droits, au respect
des droits des autres, développer la culture de lutte pour ces
droits,
35
http://www.nurc.eov.rw/index.php?option=comcontent&view=artic~e&id=55&Itemid=27
6. Préparer et coordonner les programmes nationaux
destinés à promouvoir de l'unité et la
réconciliation,
7. Emettre des opinions relatives aux projets de lois visant
à combattre tout sectarisme, xénophobie et à promouvoir
l'unité et la réconciliation,
8. Veiller au respect, par toutes les institutions
gouvernementales, de la politique d'unité et de
réconciliation,
9. Veiller au respect par les formations politiques, les
dirigeants ainsi que toute personne physique ou morale, de la politique et de
l'idéologie d'unité et réconciliation.
A ces attributions prévues par la loi s'ajoute celle de
faire le suivi de la façon dont les institutions publiques, les
autorités et la population en général respectent les
principes et politiques d'unité et réconciliation.
2.1.4 Objectifs de la CNUR
Des missions énoncés, découlent les
objectifs suivants :
· Sensibiliser les Rwandais à leurs droits et
promouvoir une culture centrée sur les droits de l'homme,
· Donner une opinion sur les projets de lois visant
à lutter contre le sectarisme,
· Vérifier que les institutions gouvernementales
respectent les objectifs d'unité et de réconciliation,
· Vérifier que les partis politiques, dirigeants,
entités légales et individus respectent les objectifs
d'unité et de réconciliation ».36
36 Repubulika y'u Rwanda, politikiy'ubumwe
n'ubwiyunge, Kanama 2007, p.10
2.2 L'Union Européenne (UE)
2.2.1 Aperçu historique
Après de longues périodes de conflits en Europe,
l'Union Européenne a été mise en place dans le but de
mettre fin aux guerres fréquentes et meurtrières entre voisins,
qui ont abouti notamment à la Seconde Guerre mondiale. C'est en avril
1951 que la Communauté Européenne du Charbon et de l'Acier
(CECA), commence à unir économiquement et politiquement les pays
européens en vue de garantir une paix durable. Les pays fondateurs sont
la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg (Benelux), la France, l'Allemagne et
l'Italie. Avec le temps, en mars 1957, la CECA devient la Communauté
Economique Européenne (CEE) et plus tard l'Union Européenne
(EU)37. L'UE est établie en 1993 après la ratification
du traité de Maastricht par les membres de la CEE et, depuis,
élargie pour inclure de nombreux pays d'Europe centrale et orientale.
La création de l'UE a élargi la portée
politique de la CEE, notamment dans le domaine de la politique
étrangère et de sécurité commune (PESC). C'est dans
ce cadre que l'UE intervient en dehors de sa sphère d'action. Au Rwanda,
elle intervient dans différents domaines.
2.2.2 La coopération bilatérale
Les relations de co-développement que l'Europe a
tissées depuis quelques décennies avec les états d'Afrique
puisent leur origine dans les responsabilités que les puissances
coloniales assumaient en Afrique avant l'accession de ces états à
l'indépendance.
37.
http://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/union-europeenne/ue-citoyennete/constructioneuropeenne/quelles-sont-erandes-dates-construction-union-europeenne.html
Rappelant les liens historiques, culturels et politiques qui
unissent l'UE et l'Afrique, plusieurs accords de coopération et de
développement ont été signés entre les deux
continents. Les objectifs de l'UE en dehors de ses frontières sont de
:
- Contribuer à la réduction de la pauvreté
grâce au développement durable,
- Contribuer à maintenir la paix et renforcer la
sécurité internationale,
- Promouvoir, développer et renforcer la
démocratie et l'Etat de droit ainsi que le respect des droits de l'homme
et des libertés fondamentales dans le monde.38
En ce qui concerne le Rwanda, les relations avec l'UE ont une
longue histoire. Dès que l'UE a entamé la conclusion d'accords
formels avec des pays tiers, le Rwanda en a fait partie. En effet, il a
été parmi les 18 pays africains à participer au premier
congrès réunissant l'UE et les pays en développement,
connu sous le nom de Convention de Yaoundé signée en 1963.
2.2.3 Cadre juridique de la coopération
À l'heure actuelle, les relations UE-Rwanda sont
régies par l'accord ACP-UE signé à Cotonou en 2000 et
révisé en 2005 à Luxembourg. L'accord de Cotonou est le
plus grand cadre financier et politique de coopération Nord-Sud.
Il comprend 78 pays ACP et les 27 États membres de
l'UE. Ce cadre juridique est accompagné par des organes qui garantissent
un dialogue politique permanent et continu entre les deux groupes: le
Secrétariat ACP, le Conseil des ministres ACP-UE, le Comité des
ambassadeurs et l'Assemblée parlementaire paritaire ACP-UE
39.
Le Rwanda est un membre actif de ces institutions et a accueilli
la récente Assemblée parlementaire paritaire qui s'est tenue
à Kigali en novembre 2007.
38
http://www.touteleurope.fr/fr/actions/relations-exterieures/politique-etranzere-et-dedefense/presentation/la-politique-etraneere-et-de-securite-commune-pesc.html#c44119
39 Romain YAKEMTCHOUK, La Politique
gtrangère de l'Union Européenne, Paris, l'Harmattan, 2005,
p.410
Après le génocide et la prise du pouvoir par le
FPR, la coopération entre l'UE et le Rwanda s'est ralentie mais depuis
fin 2000, une attention particulière a été portée
au Rwanda. Par référence 2000/558/PESC: portant position commune
du Conseil du 18 septembre 2000 concernant le Rwanda, cette coopération
montre bien cette particularité de la coopération Union
Européenne-Rwanda40. (Texte: Position commune du Conseil du
18 septembre 2000. concernant le Rwanda / 2000/558/PESC). Suite aux
déclarations du Conseil de l'UE du 18 septembre, plusieurs
décisions en faveur du Rwanda ont été prises. Certains
points peuvent se résumer comme suit : Vu le traité sur l'Union
européenne, et notamment son article 15, considérant ce qui
suit41:
- Par sa position commune 1999/452/PESC(1), le Conseil a
défini les Objectifs et les priorités de l'Union
européenne vis-à-vis du Rwanda,
- Par son action commune 96/250/PESC(2), le Conseil a
désigné un envoyé spécial pour la région des
grands lacs africains,
- Compte tenu de l'évolution de la situation au Rwanda
depuis 1999, il convient de revoir la position commune 1999/452/PESC.
La présence de la Commission européenne au
Rwanda a commencé au milieu des années 1980 et a
été officialisée en 1991 avec la signature d'un
«accord de siège » avec le gouvernement
rwandais42.
Après une courte interruption de sa présence de
la CE au moment du génocide, la Commission est revenue au Rwanda en
août 1994 et la délégation a été
entièrement rouverte en 1995 avec la mise en oeuvre de vastes programmes
de réhabilitation dans le cadre des 6ème et 7ème
FED43 (Fonds Européen de Développement).
40 Journal Officiel n° 236 du
20/09/2000 p. 1-2 (2000/558/PESC)
41 Idem.
42 Ibidem. P. 3
43www.delrwa.ec.europa.eu/en/euandrwanda/bilateralrelations.htm
L'accord juridiquement contraignant entre l'UE et le Rwanda
s'inscrit dans un cadre plus large d'accords entre l'UE et les pays ACP
(Afrique, Caraïbes, Pacifique), dont le Rwanda est signataire. Les
relations entre l'UE et les pays ACP remontent à la création de
la CEE en 1957. Le traité de Rome prévoyait en effet la
création du Fonds européen de développement (FED) visant
à fournir une aide technique et financière aux pays ACP.
La convention de Yaoundé I signée en 1963
citée supra, a accordé des avantages commerciaux et une aide
financière aux ex-colonies d'Afrique. En tant que membre du groupe ACP,
le Rwanda, par la suite, a signé les conventions de Yaoundé II
(1969), Lomé I (1975), Lomé II (1979), Lomé III (1984),
Lomé IV (1990), Lomé IV révisée (1995).
L'objectif de l'accord de Cotonou signé en 2000 est la
promotion du développement économique, social et culturel, la
promotion de la paix et la sécurité, la promotion d'un
environnement politique stable et démocratique dans les pays ACP. Cet
accord comporte trois dimensions: politique, commerce et développement.
Il repose sur 5 piliers:
1. Renforcement de la dimension politique,
2. Promotion de l'approche participative,
3. Stratégies de développement,
4. Coopération économique et sociale,
5. Réforme de la coopération financière.
Les institutions financières pour la mise en oeuvre de
l'accord de Cotonou sont le FED et la Banque européenne d'investissement
(BEI).
2.2.3 L'UE au Rwanda post-génocide : le rattrapage
de la communauté Internationale ?
Ayant dû remettre le pays sur pied à partir de
rien, en quinze ans, le gouvernement rwandais peut se vanter de
réussites dans certains domaines. Depuis 1994, le Rwanda a accompli des
progrès dans le rétablissement de l'économie, de la paix
et de la sécurité, dans le domaine de l'éducation et de la
santé, dans l'appui à la réconciliation nationale et dans
l'établissement des fondements de la démocratie et la
réforme des institutions.
Deux facteurs majeurs ont permis ce redressement, à
savoir, la volonté politique du nouveau gouvernement installé
à Kigali depuis juillet 1994 et l'aide internationale, notamment celle
de l'UE.
Les propos de l'ancien représentant de l'UE pour
l'Afrique des Grands Lacs (AGL), Monsieur Aldo Ajello, lors du 1er
sommet sur l'unité et la réconciliation au Rwanda tenu en 2000
Kigali, montrent à quel point l'Union Européenne s'est sentie
dans l'obligation d'intervenir au Rwanda post génocide: « Les
puissances Occidentales ont une responsabilité majeure dans la
reconstruction du Rwanda, selon qu'elles maintiendront ou non leur
hostilité à ce régime, « coupable » aux yeux de
certains d'avoir arrêté lui-même un génocide alors
que l'ONU a laissé faire. Si nous voulons être solidaires du
peuple rwandais, c'est sur ce terrain que nous devons concentrer nos efforts :
pour l'annulation de la dette rwandaise, pour une aide sans contrepartie en
réparation à un peuple victime d'un crime contre
l'humanité et soutenir la politique de l'unité et
réconciliation.»44
Lors des cérémonies de la
10ème commémoration du génocide au Rwanda, le
Commissaire européen au développement et à l'aide
humanitaire et ancien Ministre belge des affaires étrangères
Monsieur Louis Michel a bien montré que la réconciliation au
Rwanda n'est pas seulement l'affaire des Rwandais, mais aussi celle de toute
l'humanité. L'échec de la communauté internationale, de
l'UE et même de l'Union Africaine, montre combien toute l'humanité
a failli à ses
44 CNUR, Rapport sur le sommet national d'unite et de
reconciliation, Allocution de l'envoye special du Secretaire General de
l'Organisation des Nations Unies dans la Region des Grands Lacs. Kigali, 18-20
octobre 2000, p.18
responsabilités, malgré le très populaire
slogan du `NEVER AGAIN' lancé dès le lendemain du génocide
des juifs.
Tous ces propos des différents représentants de
l'UE, prouvent la détermination de l'UE d'aider le Rwanda à se
reconstruire.
Chap.III L'UNION EUROPEENNE : réel acteur du
processus de
réconciliation au Rwanda ?
3.1 La Politique d'intervention et de
coopération de l'UE au Rwanda
La politique européenne de développement
constitue l'un des trois éléments clés de l'action
extérieure de l'Union Européenne. Elle se manifeste dans la
coopération commerciale, le développement et les relations
politiques. En Afrique, cette politique se traduit notamment par l'accord de
coopération économique de Cotonou, révisé et
signé le 23 juin 2000.
En janvier 2000, six mois avant la rencontre de Cotonou,
différents bailleurs de fonds qui intervenaient au Rwanda se sont
réunis à Kigali pour discuter avec le gouvernement sur les
principaux secteurs qu'il fallait soutenir le plus rapidement possible. Il
était question de relancer l'économie et participer à la
résolution des conflits qui ravageaient le pays en particulier et la
Région de Grands Lacs en général depuis le
génocide.
Les représentants de l'UE étaient
présents à la réunion et avaient accepté de
soutenir la politique rwandaise surtout dans le domaine du développement
et dans plusieurs autres domaines tels que repris dans le tableau ni. La
présence de l'UE avait été moins significative durant
toute la période d'après génocide jusqu'à cette
réunion des bailleurs de janvier 2000.
Les justifications de non intervention active au Rwanda durant
cette période sont multiples même si elles relèvent de
façon globale d'une certaine réticence de la part des Etats
membres de l'Union à intervenir militairement au Rwanda pour
empêcher et arrêter le génocide ou user d'autres moyens
politiques. Pour certains d'entre eux, cela s'explique par le poids de
l'histoire, leur passé colonial
et/ou leur alliance avec les autorités rwandaises de
l'époque. Pour d'autres, c'est l'insuffisance des capacités
disponibles face à l'immensité qui ont constitué le
principal obstacle. Pour d'autres enfin, l'Afrique en général et
le Rwanda en particulier ne présentaient aucun intérêt
historique, géographique ou stratégique, et rien ne justifiait
donc objectivement que l'UE s'y investisse militairement45.
Pourtant la politique européenne de
sécurité et de défense (PESD) permet aux forces de l'UE
d'intervenir là où la paix et la sécurité mondiale
sont menacées, dans le souci de faire respecter le modèle
européen, de soutenir l'état de droit et pour affirmer les
valeurs universelles de liberté, dignité de la personne humaine,
du développement durable pour toute la planète, qui donnent une
assise à la paix du monde46. Mais il faut savoir que la
politique de l'UE en Afrique s'appuie aussi sur un équilibre entre
non-ingérence et non-indifférence. L'UE encourage
l'émergence d'une volonté commune de voir les Etats africains
jouer un rôle moteur dans la prévention et le traitement des
crises et, parallèlement soutient cette implication47.
Après la guerre et le génocide au Rwanda, l'aide
de l'Union Européenne s'est basée plus sur les refugiés
rwandais installés dans l'Est de la République
Démocratique du Congo (ex-Zaïre), action qui n'a pas plu aux
nouveaux maîtres du régime à Kigali. Plus de 80% de l'aide
humanitaire destinée au Rwanda par l'UE, était orientée
vers les camps des refugiés48. C'est après janvier
2000 que la présence de l'UE s'est manifestée dans le programme
de l'Etat rwandais.
45 Entretien avec un haut responsable de l'Union
Europeenne au Rwanda, interview du 16/02/2010 a Kigali.
46 Christian FRANCK et Genevieve DUCHENNE,
L'action extérieure de l'Union Européenne, Role global,
dimensions matérieles, aspects juridiques, valeurs.
Actes de la X3e Chaire AGC -- Glaverbel d'études
européennes, LLN, Bruyant-Academisa, 2008, p.347
47Assemblee de l'Union Europeenne, Une Politique
Européenne de Décence, Session Ordinaire, 2e Partie,
Document 1445, 17 novembre 1994. p.26-27
48 Colette BRAECKMAN, L'en jeu congolais :
L'Afrique centrale après Mobutu, Paris, Fayard, 1999.
3.2 Le rôle de l'UE dans le processus de
réconciliation au Rwanda
Dans le but de soutenir le processus de réconciliation,
l'UE intervient dans plusieurs activités cadrant avec ce processus. Tout
d'abord, elle appuie les activités de la CNUR. Comme nous venons de le
voir, l'UE est intervenue en premier lieu dans les secteurs du rapatriement et
de la réintégration des refugiés, de la
démobilisation et de la réinsertion des ex-combattants des forces
armées rwandaises (ex-FAR), puis dans les secteurs de la justice, de la
lutte contre la pauvreté, du dialogue communautaire, de la formation, et
de la plaidoyer.
La démobilisation et la réinsertion des membres
de l'ancienne armée rwandaise (ex-FAR) constituent un domaine clé
dans la stratégie de la réconciliation. En effet, loin de ce que
beaucoup de gens seraient amenés à croire, toute tentative de
réconciliation qui ignore l'intégration des ex-combattants serait
vouée à l'échec.
Depuis la fin 1997, avec l'appui financier de l'UE, le
Gouvernement d'union nationale a lancé le programme de
démobilisation et réinsertion des ex-FAR, y compris des enfants
soldats et des soldats blessés durant la guerre de 1990- 1994. Quand les
ex-FAR rentrent de la RDC où ils se sont principalement installés
au lendemain de la chute du régime génocidaire, ils sont
rassemblés dans un camp de rééducation. Après un
passage préalable dans le "camp de rééducation", dit aussi
« camp de solidarité », les Ingando, où les
bases de la vie communautaire, des principes de la réconciliation, de
l'identité rwandaise, du système électoral, etc. leur sont
expliqués, ils sont, soit démobilisés et rentrent chez
eux, soit réinsérés dans l'armée
rwandaise49.
Seuls ceux qui sont soupçonnés de participation au
génocide sont traduits en justice. Des milliers de soldats issus de
l'armée déchue ont été
réintégrés.
A ce titre, l'armée constitue aujourd'hui l'un des
exemples presque réussis de la réconciliation au Rwanda.
L'UE appuie le secteur de la justice. La justice se
caractérise par la coexistence d'une justice nationale rwandaise et
d'une justice internationale gérée par le Tribunal Pénal
International pour le Rwanda (TPIR) basé à Arusha, en Tanzanie.
L'Union Européenne soutient d'une manière remarquable les
juridictions « Gacaca », ce mécanisme traditionnel de
règlement des différends réactivé pour faire face
aux nombreux dossiers relatifs au génocide50.
Toujours dans le cadre de la promotion de la
réconciliation, l'UE intervient aussi dans le domaine de
l'éducation civique et de la résolution des conflits. C'est
à travers la mobilisation, la sensibilisation et les débats que
le soutien aux groupes particulièrement vulnérables se fait.
Les secteurs d'intervention de l'UE auprès de la CNUR
sont les suivants : les formations consacrées à la
prévention, la résolution des conflits et le maintien de la paix
(conflit management and peace keeping), l'organisation des débats, les
compétitions sur l'unité et la réconciliation et l'appui
aux activités de lutte contre la pauvreté51.
3.3 La problématique de l'intervention de
l'Union Européenne dans le domaine de la réconciliation au Rwanda
post-génocide
Conformément à l'une de ses missions majeures, l'UE
assiste le Rwanda dans différents domaines dont celui de l''unité
et réconciliation.
50 NURC review magazine, Understanding Unity and
Reconciliation, 15 years of unity and reconciliation process in Rwanda, Kigali
, October 2009, p.19
51 Entretien avec Oswald RUTIMBURANA, coordinateur du
projet EU-NURC, Février 2010 à Kigali
La Politique Extérieure et de Sécurité
Commune (PESC) stipule que « l'action de l'Union porte donc sur la
prévention des conflits en s'attaquant à leurs causes profondes,
en soutenant les initiatives locales de développement et de promotion de
la démocratie, sur la gestion de crise par une intervention lors des
phases aiguës des conflits, en appuyant les efforts déjà
déployés, en aidant à la consolidation de la paix et
à la reconstruction du pays »52. C'est cette
définition globale du maintien de la paix qui singularise l'action de
l'Union en termes de soutien aux programmes de l'Etat rwandais.
Le soutien de l'UE peut être divisé en plusieurs
programmes qui sont classés selon le secteur d'intervention choisi. Les
principaux secteurs d'intervention de l'UE au Rwanda sont la gouvernance et
l'économie, la justice, l'infrastructure et le développement
rural.
Tableau 1 : Tableau récapitulatif des programmes de l'UE
au Rwanda par secteur d'intervention :
SECTEUR D'INTERVENTION
|
ANNEE DE DEBUT D'INTERVENTION
|
PROGRAMMES
|
Gouvernance et économie
|
2000
|
Ministère du commerce et de la
coopération, Ministère de l'éducation, Ministère
de la
santé, Ministère de l'administration locale,
les districts, the Rwanda Instititutionnal support for
Economic Management (RISEM), etc....
|
Justice
|
2002
|
Ministère de la justice, Commission
Nationale pour l'Unité et la Réconciliation
(CNUR), les Juridictions traditionnelles GACACA, Commission
Nationale des Droits
|
52 Christian FRANCK et Genevieve DUCHENNE, op. cit.
p.105
|
|
Humains (CNDH), Bureau de Travail
d'Intérêt général (TIG), Office
de
l'Ombudsman, Commission Nationale de démobilisation et
réintégration, etc.
|
Infrastructure
|
2004
|
Ministered des infrastructures, Rwanda Road sector support
program (RRSSP), Support to the water sector policy (Drinking Water Supply in
rural areas), Rehabilitation of the National Assembly building and construction
of a building for the Supreme Court and Ministry of justice, ...
|
Développement
|
2000
|
Appui aux programmes de réduction de la pauvreté
(EDPR~). Eau, agriculture, construction des marchés, Ministère de
la recherche, technologie et de la communication, Ministère de
l'agriculture et élevage, ...
|
Tableau 2 : Les recettes totales et dons alloués à
l'Etat rwandais depuis 2000
Année
|
Budget total annuel de l'Etat rwandais
évalué en francs rwandais (FRWS)
|
Contribution
étrangère évaluée en francs rwandais
(FRWS)
|
Pourcentage
|
2000
|
145.214.000.000
|
76.710.000.000
|
52%
|
2001
|
150.370.000.000
|
64.164.000.000
|
42%
|
2002
|
171.978.000.000
|
70.805.000.000
|
41%
|
2003
|
198.562.000.000
|
76.203.000.000
|
38%
|
2004
|
275.694.000.000
|
128.701.000.000
|
46%
|
2005
|
344.876.000.000
|
164.477.000.000
|
47%
|
2006
|
377.270.000.000
|
169.061.000.000
|
44%
|
2007
|
465.210.000.000
|
207.293.000.000
|
44%
|
2008
|
660.747.000.000
|
279.775.000.000
|
42%
|
2009
|
729.156.000.000
|
347.397.000.000
|
47%
|
Source : MINICOFIN, Guide pratique des procédures
applicables aux devis-programmes - approche projets, Août, 2009, p.104
Budget
400.000.000.000
200.000.000.000
800.000.000.000
700.000.000.000
600.000.000.000
500.000.000.000
300.000.000.000
100.000.000.000
Recettes totales et dons de l'Etat Rwandais
depuis
2000
Budget de l'Etat Rwandais Contribution étrangère
0
Année
Figure 1 : Les recettes totales et dons alloués à
l'Etat rwandais depuis 2000
D'après le nouveau Programme Stratégique de
l'Etat rwandais pour le Développement Economique et la Réduction
de la Pauvreté (EDPRS), la CNUR se classe dans le secteur de la justice.
C'est dans ce secteur que l'UE, à travers son projet `NURC-EU,
prête main forte aux programmes de la CNUR.
En se référant au plan stratégique de
l'action extérieure de l'UE, la coopération de l'Union avec le
Rwanda se focalise sur les programmes d'appui à l'Etat de droit, de
promotion du respect des droits de l'homme, de soutien des actions de
paix et de gestion des conflits, ainsi que de lutte contre
l'impunité53.
Depuis l'arrêt du génocide, plusieurs initiatives
visant à promouvoir l'unité et la réconciliation parmi les
Rwandais ont été entreprises en vue de reconstruire le tissu
social. Certaines d'entre elles sont initiées par le gouvernement,
d'autres par les individus ou les groupements d'individus à travers les
associations, les coopératives, les clubs ou encore les
communautés religieuses. Leurs activités sont recensées
par la CNUR et reçoivent un appui de celle-ci.
Le budget de la CNUR provient pour partie de l'état et
pour partie de ses partenaires dont l'UE. Cette dernière a un bureau de
liaison au sein de la CNUR pour pouvoir coordonner les activités du
projet UE - CNUR
3.4 Projet UE-CNUR
Les premiers accords de partenariat entre la CNUR et l'UE
datent de 2002. Durant ces 8 dernières années, l'UE a
appuyé les activités de la CNUR surtout dans ses programmes
d'éducation civique, d'information et communication, de gestion et
résolution des conflits et dans le programme de renforcement des
capacités54.
A travers ces programmes, plusieurs activités ont
été menées surtout dans les cadres de la sensibilisation
sur l'éducation civique, la résolution des conflits, le
plaidoyer, la réhabilitation des victimes de la guerre et du
génocide, les débats publics sur les valeurs de
réconciliation, l'organisation des sommets nationaux sur l'unité
et la réconciliation. Pour faire connaître toutes ces
activités l'UE accorde un appui au système d'information et de
communication dans le domaine de la réconciliation et le renforcement
des capacités des agents de la Commission.
Tableau 3 : Financement de l'UE aux programmes de la CNUR par
année
53 IJR, The impact assessment of the National Unity
and Reconciliation Commission . Kigali,. November 2005, p. 38
54 CNUR, Projet UE-CNUR. Rapport des activites,
Fevrier 2008, p.6
ANNEE D'INTERVENTION
|
Budget annuel de la CNLlR
ivalui en francs rwandais
|
Intervention de l'LlE
ivaluie en franc rwandais
|
Pourcentage
|
2000
|
398.960.000
|
_
|
_
|
2001
|
512.000.000
|
_
|
_
|
2002
|
627.000.000
|
219.289.000
|
34%
|
2003
|
699.890.000
|
172.000.000
|
25%
|
2004
|
713.522.154
|
160.980.000
|
23%
|
2005
|
709.995.840
|
198.848.000
|
28%
|
2006
|
738.094.336
|
180.772.000
|
25%
|
2007
|
748.406.136
|
93.910.000
|
13%
|
2008
|
1.138.840.000
|
129.998.000
|
12%
|
2009
|
1.875.469.693
|
198.644.890
|
11%
|
Source55 : UE. Projet `Soutien à l'état
de droit', 9ACP RW 11, EU/NUR009
Budget
2.000.000.000
1.800.000.000
1.600.000.000
1.400.000.000
1.200.000.000
1.000.000.000
400.000.000
800.000.000
200.000.000
600.000.000
Financement de l'UE au budget de la CNUR
0
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008
2009
Budget annuel CNUR
Année
Intervention de l'UE
Figure 2 : Financement de l'UE aux programmes de la CNUR par
année
55 FED-RWANDA, Projet ' Soutien a l'etat de droit', 9
ACP RW 11, Guide pratique de gestion des marches en regie et des DP finances
par le FED (version 1.0), 2008
D'après le rapport d'évaluation des
activités de la CNUR depuis 10 ans, le soutien des partenaires de la
CNUR au budget global annuel s'élève en moyenne à 58% et
le budget de l'Etat couvre le reste. La part de l'UE représente en
moyenne près de 27% chaque année56.
· Activités prévues par le projet
UE-CNUR
A chaque fin d'année, la CNUR prépare son plan
d'action pour l'année à venir et fait aussi le rapport des
activités de l'année qui s'achève.
C'est à partir de ce plan d'action que l'on puise les
actions qui doivent bénéficier du budget de la coopération
européenne dans le secteur de la justice.
L'appui de l'UE à la CNUR poursuit des objectifs clairs,
à savoir :
a. Soutenir les activités de la CNUR pour la promotion
des valeurs réconciliatrices nécessaires à une paix
durable dans la société rwandaise,
b. Promouvoir les valeurs constructives de la culture
rwandaise à travers les `Ingando', la sensibilisation et la formation
à la culture de la paix et aux valeurs réconciliatrices,
c. Aider à célébrer tous les deux ans les
réalisations à travers les sommets nationaux sur l'unité
et la réconciliation,
d. Assister les familles vulnérables et faire leur
plaidoyer,
e. Appuyer la sensibilisation aux valeurs
réconciliatrices dans les communautés et dans les milieux
académiques,
f. Renforcer la capacité de la jeunesse, des femmes et
des leaders des confessions religieuses,
g. Renforcer la capacité de communication des
activités de la CNUR,
56 IRDP, Reconstruire une paix durable au Rwanda: La
Parole au peuple, Kigali 2007, p. 22
h. Mener des recherches sur divers sujets pouvant contribuer
à renforcer l'unité et la réconciliation notamment la
réécriture de l'histoire du Rwanda,
i. Renforcer la capacité des forums des partenaires,
surtout les volontaires de l'unité et la réconciliation que sont
les `Abakangura mbaga', les `Abunzi', les
`Inyangamugayo' et `community policing committees /CPC',
j. Faire le suivi (Monitoring) des capacités des
dirigeants des clubs et associations d'unité et
réconciliation.
Ces 8 dernières années, l'UE a
réalisé différents projets pour appuyer les programmes de
la CNUR. Parmi les réalisations, il y a un don de 12 véhicules
destinés à faciliter les activités de la CNUR, la
construction d'un grand centre de formation à Nkumba
«Académie de la Paix / Ingando», l'achat de divers
matériels de bureau et des formations et la production de documents de
sensibilisation (livrets de formation, pièces de théâtre,
émissions de radio et télévision, multiplication des
différents documents de la CNUR).
Plusieurs autres activités dans lesquelles intervient
l'UE au sein de la CNUR se font dans tous les districts. Une assistance
importante est réservée aux associations et clubs d'unité
et réconciliation à travers le pays.
Tableau 4 : Liste des associations et clubs
bénéficiant de l'aide de l'UE selon la nature de leurs
activités
NATURE DES ACTIVITES
|
NOMBRE D'ASSOCIATIONS
|
Assistance aux personnes vulnérables
|
52
|
Assistance aux rescapés du génocide
|
43
|
Culture de la paix, repentance, pardon, concorde sociale
|
53
|
Danses traditionnelles, chansons et poèmes sur l'UR
|
40
|
Encadrement de la jeunesse à la culture de la paix
|
48
|
Enseignements sur la restauration
|
6
|
Formation de la population à la réconciliation
|
16
|
Mutualités et entraide
|
8
|
Organisation des conférences, débats et
pièces de théâtre sur l'unité et la
réconciliation
|
82
|
Réunion des membres des familles séparées
suite au génocide
|
2
|
Sensibilisation de la jeunesse à l'UR
|
145
|
Sensibilisation aux juridictions Gacaca
|
60
|
Source : Elaboré sur base des données de la CNUR.
Voir : NURC, Social Cohésion in Rwanda. An Opinion Survey Résulta
2005-2008, p. 42
La diversité de ces associations montre que l'UE est
réellement impliquée dans la recherche de la
réconciliation entre les différentes composantes de la
société rwandaise. En outre, il est important de remarquer que
cette aide concerne spécialement les groupes vulnérables et les
rescapés.
160
140
120
100
40
80
20
60
0
NOMBRE D'ASSOCIATIONS
Figure 3 : Nombre er répartition des associations par type
d'activités
La sensibilisation de la population à l'unité et
la réconciliation reste l'activité la plus importante de
l'intervention de l'Union Européenne. L'organisation des
conférences, débats publics, dialogue et pièces de
théâtre sur l'unité et réconciliation occupe la
deuxième place et en troisième position figure la sensibilisation
de la population dans le processus des juridictions Gacaca.
3.4.1 Contribution de l'UE au budget ordinaire de la
CNUR
La contribution de l'UE aux activités de la CNUR existe
dans le cadre du projet
`Soutien à l'Etat de droit'. Le tableau
n° 3 montr e bien qu'à partir de 2002, la
CNUR reçoit un
soutien remarquable de la part de l'UE pour financer ses
activités. Depuis ces 8 dernières années,
un montant total de 1.185.350 Euros luia été versé.
A part le tableau n°3 qui concerne uniquement le fi
nancement de l'UE à la CNUR, le tableau précédent
(n°2), résume bien en ch iffres le soutien financier que le Rwanda
reçoit des bailleurs de fonds. Ce qui explique que l'UE finance
plusieurs secteurs. C'est le cas de la Commission Nationale des Droits Humains
(CNDH), le service national des juridictions `Gacaca', le service des Travaux
d'Intérêt Général (TIG), l'Office de l'Ombudsman,
les différentes ONG oeuvrant dans le secteur de la justice et bien
d'autres. (Confer tableau n° 1)
3.4.2 L'intervention de l'UE dans le domaine de la
résolution des conflits
Suite à notre enquête, nous considérons
que les techniques utilisées par le projet UE-CNUR dans le domaine de la
résolution des conflits étaient efficaces. D'après nos
interviewés, les débats publics, les compétitions
interscolaires, la participation aux Ingando permettent aux gens de discuter de
leurs différends. Ces déclarations coïncident avec celles
que nous avons pu recueillir auprès des commissaires de la CNUR et des
agents de l'UE au Rwanda en février dernier.
Ces techniques sont souvent utilisées au niveau des
districts, provinces et dans les milieux scolaires. Les débats sont
orientés vers les causes et la nature du conflit qui existe dans chaque
région, selon son contexte précis et ses particularités.
Une fois le débat ouvert, les participants contribuent à trouver
les stratégies de prévention et/ou de gestion des
problèmes identifiés.
Pour participer à ce genre de séminaire,
débat, compétition, la CNUR procède au choix des
participants dont l'activité professionnelle offre la possibilité
de disposer des connaissances spécifiques liées au conflit
rwandais57.
Souvent, les participants sont des représentants de la
société civile, des responsables d'associations et clubs
d'unité et de réconciliation, des élus locaux, des leaders
d'opinion, des représentants d'organisations de femmes ou de jeunes,
...
57 Entretien avec le secretaire executif de la CNUR,
Fevrier 2010.
Beaucoup de personnes font des demandes auprès de la CNUR
pour pouvoir participer à ces formations.
L'entretien que nous avons eu avec les dirigeants des
associations oeuvrant avec le projet UE-CNUR nous a permis de recueillir des
informations complémentaires et équilibrées sur la nature
du conflit rwandais et les stratégies de sa prévention et de sa
gestion.
3.4.3 Assistance de l'UE auprès des associations et
clubs de réconciliation
Grâce à l'appui de l'UE, la CNUR a soutenu les
initiatives des associations et clubs destinés à promouvoir la
réconciliation. Selon le rapport des activités de la CNUR de
2008, plus de 400 SCUR (Students Clubs for Unity and Réconciliation),
ont été créés grâce au soutien financier de
l'UE.
Lors de notre enquête, nous avons visité certains de
ces clubs et associations. Tableau 5 Liste des associations et clubs de
réconciliation bénéficiant de
l'aide de l'Union Européenne visités par
l'auteur
ASSOCIATIONS
|
DISTRICT /PROVINCE
|
MEMBRES
|
Descriptions (Activités/initiatives
principales)
|
ADP-WORD VISION
|
NYAMAGABE/ Province du SUD
|
52
|
Compétition socioculturelle, formation
sur la tolérance et la résolution des
conflits + activités génératrices
de revenus.
|
AMI (Association
Modeste et
Innocent)
|
NGOMA / Prov.SUD
|
41
|
Faire le plaidoyer pour les victimes du génocide.
Sensibilisation sur l'UR. Assister les familles vulnérables.
|
SCUR - UCK
|
MUHANGA/ Prov. SUD
|
98
|
Student Club for Unity and
Reconciliation. Sensibilisation comme activité
principale.
|
CLUB UMUHUZA
|
RUHANGO / Prov. SUD
|
86
|
Animateurs d'unité et réconciliation +
agriculture comme activité communautaire.
|
ADEPR /Humura
(Ass. des églises protestantes)
|
NGOMA / Prov. SUD
|
150
|
Prêcher l'unité et la réconciliation
à
travers l'évangile, la tolérance, le pardon, la
paix et l'amour du prochain.
|
SCUR - UNR
|
NGOMA / Prov. SUD
|
248
|
Student Club for Unity and
Reconciliation. Sensibilisation comme activité
principale.
|
TURWANYAMACA KUBIRI
|
GISAGARA / Prov. SUD
|
40
|
Rassemble les veuves du génocide et les
présumés génocidaires provisoirement en liberté +
agriculture comme activité communautaire.
|
ASS. VISION
JEUNESSE POUR LA PAIX
|
RUBAVU / Prov. OUEST
|
42
|
Activités artisanales. Diffuser les
messages d'unité et réconciliation à
travers les objets d'art (
activités génératrices de revenus )
|
SCUR - ULK
GISENYI
|
RUBAVU / Prov. OUEST
|
102
|
Diffuser les messages d'unité et
réconciliation ( débats publics,
colloques, mémoires de fin d'études, journaux,
compétitions sportives, ...
|
YOUTH FOR
CHANGE
|
NYABIHU/ Prov. OUEST
|
88
|
les Orphelins rescapés du génocide et jeunes
dont les parents sont en prison à cause du génocide +
activités génératrices de revenus
|
CLUB. GIRUMUCO
|
RUBAVU / Prov. OUEST
|
33
|
Diffusion de messages sous forme de chansons, poèmes,
danses folkloriques incitant la population à la culture de la paix, la
tolérance, l'unité et la réconciliation
|
Famille URUSHUNDURA / EPPR
|
NYABIHU
|
-
|
Diffuser les messages de paix, d'unité, d'amour,...
à l'exemple de Saint Paul. Jeunes des églises protestantes pour
la paix.
|
RESTORE HOPE
|
KIGALI
|
198
|
Diffuser les messages de paix, d'amour par des chansons,
conférences, débats. Sensibiliser et participer à diverses
activités collectives de l'Etat
|
PLP. / Peace and Love Proclaimers Walk to Remember
|
KIGALI
|
408
|
Faire le plaidoyer pour les enfants
vulnérables ( orphelins et enfants de la rue),
Sensibilisation contre les conflits et
guerres.
Aider la jeunesse à se sentir responsable de changer le
passé du Rwanda au moyen de débats, conférences, voyages
d'études, Sensibilisation sur la culture de la paix, la repentance, le
pardon, la concorde sociale,
|
Source : Elaboré sur base des données
d'enquête, Février 2010
Les dirigeants et membres de ces associations et clubs nous
ont révélé qu'ils recevaient un soutien financier de la
CNUR. Ils bénéficient aussi de formations sur la création
et la gestion de projets, la gestion des conflits, l'éducation civique,
etc.
Le coordinateur de ce projet nous a déclaré que
la CNUR intervenait dans plusieurs activités de ces associations et
surtout pour les aider à la préparation de leur plan d'action,
à faire le bilan des activités communautaires déjà
réalisées, à préparer des formations sur les
activités génératrices de revenus dans le but de
promouvoir l'unité et la réconciliation.
Ces initiatives existent dans les 30 districts du pays.
Souvent une équipe composée des agents de la CNUR et quelquefois
des envoyés de l'UE visitent ces associations et clubs. Ces visites se
font en étroite collaboration avec les dirigeants de base et les
animateurs au sein des provinces, districts et secteurs à travers le
pays.
En décembre 2007, la CNUR a octroyé des prix aux
initiatives exemplaires en matière d'unité et
réconciliation. Certaines de ces associations ont reçu des prix
qui allaient jusqu'à une somme de 2.000 dollars américains.
Dans le cadre de la bonne coordination de toutes les actions
visant la promotion de l'unité et de la réconciliation, un des
commissaires de la CNUR nous a déclaré ce qui suit: « En
vue d'éviter la dispersion de l'énergie, de temps et de moyens,
la CNUR sert de plate forme à tous les acteurs en matière
d'unité et de réconciliation. Cette façon de travailler
nous permet d'amener ces acteurs à faire connaissance et à
échanger leur expérience ».
3.4.4 Assistance de l'EU dans le domaine de la
réhabilitation et du logement
A la suite de la première intervention de
l'armée rwandaise en R.D.Congo (exZaïre) fin 1996, des milliers de
refugiés rwandais ont été obligés de rentrer au
Rwanda. Des milliers d'autres refugiés installés en Tanzanie et
au Burundi ont été expulsés vers leur pays d'origine entre
mi-1997 et 1998. Ce retour forcé a déclenché de
sérieux problèmes de logement au sein de la population. Le
gouvernement rwandais a alors intimé l'ordre à tous les occupants
illégaux des biens d'autrui, spécialement les maisons, de les
libérer le plus tôt possible.
Cette mesure a mécontenté de milliers des Rwandais,
dont les anciens réfugiés qui venaient à peine de rentrer
au pays après plus de trois décennies d'exil.
Chez les rescapés dont les maisons avaient
été détruites pendant le génocide, l'angoisse et le
désespoir étaient profonds. Il était alors urgent de
réhabiliter tous ces gens qui venaient d'être relogés par
le gouvernement58. Le gouvernement n'a pas pu gérer cette
situation, des actes de vengeance et des tueries ont été
signalés dans certains coins du pays.
Ce retour massif des refugiés de 1994, dont certains
étaient soupçonnés d'avoir participé au
génocide n'a fait qu'accroitre une tension déjà bien
réelle entre anciens et nouveaux réfugiés, et surtout
entre rescapés d'une part, leurs bourreaux et leurs familles d'autre
part. Il fallait une solution rapide pour installer tous les rescapés et
les anciens refugiés qui n'avaient plus de quoi s'abriter.
Un projet d'habitat en agglomération a
été initié par le gouvernement comme réponse
provisoire. Plusieurs bailleurs de fonds sont intervenus pour aider le
gouvernement à héberger ceux qui étaient dans le besoin.
L'UE a pris part à ce projet via les ONG sur place. Entre 2002 et 2004,
l'UE, à travers son projet UECNUR, a contribué à la
construction de plus de 360 maisons pour les sans abri et à la
réparation d'habitations dans les 12 préfectures de
l'époque.59
3.4.5 Assistance de l'EU en sensibilisation, débat
public et plaidoyer
a. Le Centre de NKUMBA, «Peace and Leadership
Academy»
Avec l'appui financier de l'UE, un grand centre de formation a
été construit à Nkumba dans le district de Burera, au Nord
du pays. Ce centre communément appelé « Peace and Leadership
Academy » est destiné à la formation spéciale de
différents groupes de gens. Cette formation est connue au Rwanda sous le
nom d'Ingando'.
En kinyarwanda, le mot Ingando vient du verbe «
Kuganda » qui correspond à l'action de suspendre toutes
les activités et se retirer du milieu de travail afin de
réfléchir aux défis auxquels est confrontée la
nation et de leur trouver des solutions60. Au Rwanda, les
Ingando ont d'abord été développés par
l'armée, il y a bien longtemps. Lorsque le Rwanda était
confronté à des désastres (guerres, catastrophes
naturelles, etc.), le Mwami (roi) mobilisait et préparait la
population grâce à des Ingando. Cette pratique
était bien ancrée dans les moeurs à l'arrivée des
premiers colons. À l'époque coloniale et postcoloniale, les
Ingando, jugés dépassés, disparurent peu à
peu.
Dans le contexte de l'après-génocide,
l'armée fit renaître les Ingando. Celle-ci avait la
tâche difficile d'incorporer des combattants de l'ancienne force
armée rwandaise (ex-FAR) dans ses rangs. Alors, des Ingando ont
été utilisées pour intégrer les ex-FAR dans la
nouvelle armée, pour contribuer au processus de paix et de
reconstruction de la nation. Au niveau politique, les réunions de
réflexion qui se sont tenues entre 1998 et 1999 ont également
été inspirées par les Ingando. Lors de sa
création, la CNUR a développé les Ingando, en
guise d'outil principal servant à construire la coexistence entre
communautés. Rappelons ici que les premiers bénéficiaires
en furent d'anciens combattants réfugiés en RDC au lendemain du
génocide. Le programme a, par la suite, été étendu
aux étudiants des universités et instituts supérieurs et
ce, à partir de 1999.
Lors de l'inauguration officielle du centre de Nkumba `Peace
and Leadership Academy', Monsieur Jeremy LESTER, représentant de l'Union
Européenne au Rwanda s'est réjoui de ce grand acte accompli par
l'UE. S'adressant aux personnes qui suivaient la formation dans ce centre et
aux invités, il leur a dit que ce centre est un lieu où on doit
apprendre à transcender le passé conflictuel du pays et penser
à faire du Rwanda un Etat de droit, de paix et de
développement.
60 CNUR, Ingando Syllabus and other training., `isomo ku
ngando' 2006, p 214
A l'exemple de l'Europe, la jeunesse pourrait contribuer
à la transformation des conflits. « C'est durant les formations
pareilles que les jeunes prennent conscience des vrais problèmes de leur
pays. C'est aussi l'occasion de discuter, de faire connaissance et d'
échanger les expériences les uns les autres et se dire la
vérité sur ce qui s'est passé dans votre pays. L'avenir du
Rwanda, c'est vous et non vos enfants. Tous ceux qui vont passer par ce centre,
vont apprendre à s'estimer mutuellement et avoir une même vision
des problèmes du pays et qui sont les leurs. C'est également au
cours des débats que chacun pourra apporter sa contribution dans la
recherche des voies et moyens d'asseoir l'unité et la
réconciliation ainsi que proposer des solutions durables aux
problèmes du pays »61.
« La jeunesse rwandaise peut s'inspirer de l'Europe
pour transformer le passé du pays et en faire une grande nation dans la
sous région, dépasser les divisions ethniques, et penser à
ce qui est grand. Pensez à la nation, à l'Afrique et allez plus
loin dans l'intérêt de toute l'humanité
»62, conclu-t-il.
Du 14 au 16 février 2010, nous nous sommes rendus au
centre de Nkumba où plus de 700 étudiants de l'Université
Adventiste d'Afrique Centrale et Orientale (UAAC) participaient aux
Ingando qui allaient durer 3 semaines. Ils suivaient suivre les cours
sur différents thèmes, dont:
- l'analyse des conflits du Rwanda,
- l'introduction à l'histoire du Rwanda, le patrimoine
rwandais et son utilisation,
- l'unité et la réconciliation au Rwanda :
réalisation, obstacles et stratégies, - les questions politiques
et socio-économiques au Rwanda et ailleurs,
- les droits, obligations et devoirs des Rwandais.
En plus de ces cours, des leçons de morale
`Igitamaduni' (animation culturelle), du sport, des
débats, etc. Étaient proposés durant cette
période.
61 BRAUN M. op. Cit. p. 46
62 Idem, p. 51
De l'entretien que nous avons eu avec le chef du programme des
`Ingando' au sein du département de l'éducation civique, il est
apparu qu'environ 3500 étudiants participaient aux Ingando
chaque année; c'est-à-dire entre 750 et 900 personnes par
session, d'une durée de quatre à six semaines.
Normalement, ce centre accueille les élèves du
secondaire admis dans des universités et instituts supérieurs de
l'Etat. Quelquefois, on y admet aussi les agents de l'Etat ou d'autres
personnes sélectionnées par la CNUR pour des formations
jugées politiquement nécessaires.
Il est rare de voir des particuliers faire une demande pour
participer aux Ingando dans ce centre. Tel est le cas de l'UAAC. Le
vice-recteur académique de cette université nous a
déclaré que vu l'importance des Ingando, l'UAAC avait
fait une demande particulière pour ses étudiants. Il nous a
affirmé qu'il y avait une grande différence entre une personne
qui a suivi une formation des Ingando et celle qui ne l'a pas fait. Leur
conception sur la politique générale du pays et la façon
de concevoir et d'analyser les attitudes et les comportements des Rwandais face
à certaines situations sont différentes.
Un des membres de l'association « PLP. / Peace and Love
Proclaimers Walk to Remember » et qui a participé aux Ingando en
2008, lors de notre entrevue témoigne. « Ceux qui veulent
libérer leur conscience, qu'ils aillent participer aux Ingando. Ceux qui
aiment le Rwanda et qui veulent la paix pour ce pays, qu'ils participent aux
Ingando. Mon passage dans le centre de formation a changé ma vie.
Aujourd'hui, j'ai eu une connaissance élargie sur le passé de mon
pays. C'est pourquoi je suis membre de cette association et j'ai
décidé d'être ambassadeur de l'unité et la
réconciliation pour mon pays. Voilà l'importance des
Ingando.63»
63 Entretien avec HABINEZA Michel, membre et président de
l'association PLP à Kigali. Février 2010
b. La sensibilisation,
Parmi les méthodes adéquates utilisées
par la CNUR pour diffuser les messages de réconciliation et sensibiliser
le peuple rwandais à la culture de la tolérance et de la paix,
les débats publics constituent un outil incontournable.
Différentes méthodes sont utilisées pour parvenir à
atteindre le plus grand nombre possible de personnes. Certaines d'entre eux
sont :
· Les sommets nationaux,
Le sommet national est une grande réunion qui regroupe
des centaines de gens venant de tous les coins du pays (notamment, les
autorités administratives des différents échelons, les
représentants des confessions religieuses et de la société
civile), ainsi que de la diaspora rwandaise et des invités venant de
diverses parties du monde. Le but est de discuter sur l'état
d'avancement du processus d'unité et de réconciliation.
Sur la question concernant les grandes réalisations de
la CNUR en matière de réconciliation, le secrétaire
exécutif, le coordinateur du projet UE-CNUR et les agents de l'UE au
Rwanda, tous ont mis au premier plan le sommet national.
Le but principal du sommet est d'examiner l'état
d'avancement du processus d'unité et réconciliation.
Le sommet se fait tous les deux ans. Quatre sommets ont
été déjà organisés par la CNUR et le premier
a eu lieu en 2000 nous a dit le secrétaire exécutif de la
CNUR64.
64 Entretien avec le secrétaire exécutif de la
CNUR, Février 2010
Vu l'importance du sommet et les résultats attendus,
plusieurs bailleurs de fonds sont prêts à contribuer à la
bonne réalisation des activités prévues pendant ce mois de
concertation populaire.
Le chargé des programmes au sein de l'UE au Rwanda nous
a déclaré que l'UE soutenait ce genre de débat
communautaire et y intervenait d'une façon remarquable.
Les activités du sommet commencent avec un mini-sommet
au niveau de chaque district. Des consultations sont menées par les
agents de la CNUR en collaboration avec les Ministères de
l'administration locale, de l'intérieur et des affaires
étrangères. Le Parlement ainsi que le Sénat sont
mobilisés pour veiller au bon déroulement du sommet.
Les concertations au niveau des districts et des secteurs ont
pour but de collecter les idées, les souhaits, les questions, les
observations et les recommandations de la population sur l'état
d'avancement du processus de réconciliation dans leurs villages et sur
la vie politique du pays en général. Cette phase dure 3
semaines.
C'est au niveau national que se déroule le sommet
proprement dit. Ici sont présents tous les représentants de la
population au niveau des districts, provinces et hautes autorités du
pays.
Il y a aussi la représentation de la diaspora rwandaise
en provenance de tous les coins du monde, les ambassadeurs, les
représentants des organismes internationaux au Rwanda et des
invités de marque en provenance des pays étrangers.
C'est là que toutes les idées collectées
lors du mini-sommet et les observations de la population sont
débattues.
Lors du premier sommet sur l'unité et la
réconciliation de décembre 2000 le président Kagame avait
dit que « la première raison du sommet est en rapport avec la
loi fondamentale régissant notre pays, spécialement dans sa
partie relative aux accords de paix d'Arusha où il est stipulé
que la commission nationale pour l'unité et la réconciliation
doit organiser des consultations et conférences-débats sur
l'unité et la réconciliation, lesquelles devront aboutir à
un sommet national dans lequel les Rwandais de toutes les strates apporteraient
leurs idées et adopteraient des stratégies susceptibles de les
aider à atteindre leur objectif en l'occurrence, l'unité et la
réconciliation »65.
A ce stade, peu de recherches sont menées sur
l'état d'avancement du processus de réconciliation au Rwanda. Il
est par ailleurs difficile d'évaluer l' impact de ce processus. Dans ces
conditions, ces débats permettent au moins de connaitre les grands
tourments auxquels le pays fait face.
Selon les différents rapports de la CNUR, les
écrits consultés et entretiens menés, le sommet national
sur l'unité et la réconciliation prend toujours le devant parmi
les activités de la CNUR, probablement à cause de la très
grande médiatisation dont il bénéficie. Le sommet sert de
cadre privilégié d'évaluation des efforts fournis dans le
processus de réconciliation et d'identification des obstacles
réels ou potentiels au processus. La composition des participants permet
à toutes les couches d'être représentées et à
tous les acteurs nationaux et étrangers d'exprimer leurs points de
vue.
Le message du représentant de l'UE au Rwanda, Monsieur
Jeremy LESTER lors du 2ème sommet national sur l'unité
et la réconciliation, montre bien que l'UE accorde un soutien
particulier aux activités de la CNUR.
65 CNUR, Rapport du premier sommet national sur
l'unite et la reconciliation, Kigali 18-20 octobre 2000, p.13
Il souligne l'importance de collaborer avec une institution
comme la CNUR et l'intérêt que le monde en général
et le Rwanda en particulier pourraient trouver si la commission parvenait
à réaliser ses missions. Selon lui, ces missions ne sont pas
faciles à réaliser mais pas impossibles non plus. Durant son
allocution Monsieur LESTER a insisté sur le respect du droit de la
personne. Dépasser l'idiotie de la guerre et de la division et penser
à l'intérêt de tous les Rwandais, « comme Hutu et
Tutsi doivent se sentir Rwandais avant toute autre chose, l'Allemand et le
Français doivent se sentir Européens avant tout, l'Africain et
l'Européen doivent se considérer comme créatures humaines,
avant toute autre chose.». Le représentant de l'UE a aussi
rappelé que la voie du succès dans le domaine de l'unité
et de la réconciliation était encore longue au Rwanda et que, si
la demande et l'octroi du pardon n'était pas respecté tant
à l'intérieur que parmi les Rwandais de la diaspora, le pays
pourrait encore aller à la dérive. Il a stipulé que le
premier ennemi de l'unité et de la réconciliation est la peur et
le manque de confiance de soi66. Monsieur LESTER a beaucoup
insisté sur la contribution de chacun pour reconstruire le Rwanda et
surtout sur le respect du droit de la personne et la sécurité
dans la sous région.
Pour lui, pour que les objectifs de la CNUR puissent
être atteints, le Rwanda doit collaborer avec d'autres institutions
notamment dans les domaines du désarmement et du rapatriement des
refugiés, de la construction d'une démocratie et du processus de
décentralisation, ainsi que dans le domaine de la bonne gouvernance et
de la lutte contre la pauvreté.
Concluant son intervention, le représentant de l'UE a
affirmé que le soutien de l'UE à l'Etat rwandais pour lui
permettre de réaliser sa politique d'unité nationale et son
développement en général sera toujours disponible.
66 CNUR, Rapport du second sommet national sur l'unite
et la reconciliation, Kigali 26-28 octobre 2002, p. 78-79
· Les activités socioculturelles,
Chaque année, la CNUR organise dans les écoles
secondaires des compétitions sportives et culturelles dans le but de
sensibiliser et diffuser les messages sur l'unité et la
réconciliation. Un prix est attribué à chacun des trois
premiers dans chaque discipline. La semaine baptisée
`réconciliation week' contient diverses activités à savoir
: le sport (football, basketball, volleyball), les débats publics sur
des thèmes politiques (démocratie, tolérance, pardon,
Gacaca, TIG, pauvreté, gouvernance,...), les danses culturelles,
chansons, poèmes, dessins, etc. avec un thème incluant
l'unité et la réconciliation. Presque toutes ces activités
sont organisées par le projet UE-CNUR.
· Les medias et la communication
Toujours dans le cadre de la sensibilisation et de la
publicité des activités de la CNUR, une stratégie de
communication a été mise en place, notamment par la diffusion des
activités de la CNUR via les radios et la télévision
rwandaises. Grâce à l'appui de l'UE, un contrat avec les
différents medias a été signé.
Nous avons constaté à travers les archives de la
CNUR et les propos de nos interviewés, qu'un thème était
donné chaque année aux activités de la CNUR durant la
période de la semaine de réconciliation (the
réconciliation week).
OBSERVATIONS ET RECOMMANDATIONS.
L'appui de l'UE auprès de la CNUR en tant que
mécanisme de réconciliation et de gestion des conflits au Rwanda
nécessite une attention particulière, en vue de donner plus de
valeur et d'efficacité à ses activités. Il en est de
même du soutien accordé aux autres secteurs d'intervention dans le
cadre de la reconstruction du Rwanda post-génocide.
Lors de notre enquête, nous avons constaté qu'il
reste beaucoup à faire pour rendre plus efficaces l'intervention de l'UE
auprès de la CNUR. Par exemple, le manque d'un programme
spécifique dans les activités prévues, l' absence de suivi
et d'évaluation des activités par l'UE, l'abandon des
activités déjà en cours, etc., sont des remarques que nous
pouvons faire à la CNUR et à l'UE. Nos observations et
suggestions sont résumées dans ce qui suit.
Pour rappel, dans le cadre de la reconstruction du Rwanda
post-génocide, les activités de l'UE se sont d'abord
concentrées dans des actions de rapatriement des refugiés de
1994, d'aide à leur réhabilitation, dans la réinsertion et
démobilisation des ex-FAR, etc. L'aide de l'UE au Rwanda a
été souvent conditionnée par la conduite du gouvernement.
Pour chaque intervention il y avait des conditions que le gouvernement rwandais
était censé d'abord remplir, telles que le rétablissement
de la sécurité sur tout le territoire du pays et même la
sécurité des pays limitrophes67.
Le rétablissement de la sécurité dans un
pays comme le Rwanda qui a connu le génocide, n'était qu'une
étape vers le règlement définitif et durable des conflits.
Par ailleurs, tout conflit armé s'accompagne de dégâts, de
destructions, voire de ruines, bref, de plaies qu'il est difficile de
panser.
67 Voir le rapport des experts l'ONU S/2008/773, et
la resolution 1533 (2004) du Conseil de securite de l'ONU rendu public le 12
decembre 2008. (Certains pays membres de l'UE ont pris des sanctions contre le
Rwanda. Confer : La suspension en decembre 2008, par les Pays-Bas et la Suede
de leur aide financiere destine au gouvernement rwandais).
Le génocide qui a duré 100 jours et la prolongation
de la guerre pendant presque 10 ans, ont entraîné des ravages qui
ont retardé le développement harmonieux et durable du pays et
font qu'il a eu du mal à prendre son envol économique.
Après le génocide des Tutsi au Rwanda, il fallait un plan bien
structuré pour venir en aide au pays. Le fait que l'UE a focalisé
son aide sur la question des refugiés à l'Est de l'ex-Zaïre
et donné peu d'importance aux émergences du nouveau gouvernement
et à l'assistance dont les victimes du génocide à
l'intérieur du pays avaient besoin. Ceci n'a pas facilité le
dialogue sur la coopération entre le Rwanda et l'UE68.
Un exemple historique nous permet de penser qu'un programme ou
des plans bien conçus et bien gérés auraient pu amener
à la reconstruction du Rwanda dévasté par la guerre et le
génocide. Il s'agit du célèbre « Plan Marshall
» auquel beaucoup de gens continuent de faire
référence, mais semblent réticents quant à sa
reproduction sous d'autres cieux.
La reconstruction de l'Europe, après la deuxième
guerre mondiale, est l'exemple d'une bonne gestion des conflits, d'une
stratégie de relance économique et de réconciliation
inter-états.
Pour le Rwanda, jusqu'à présent, rien n'a
été conçu comme plan de reconstruction du pays. La
communauté internationale, l'UE inclus, aurait pu s'y investir un peu
plus.
Une tentative de soutien à la reconstruction du Rwanda
a été sujet de discussion au sénat en Belgique avec comme
objectif, un plaidoyer auprès de la Communauté
Internationale.69
« Le Rwanda avait besoin d'un soutien et d'un programme
comme celui du ` Plan Marshal' pour pouvoir mieux faire face aux
conséquences du génocide.
68 Jean Hatzfeld, Dans le nu de la vie :
Récits des marais rwandais, Paris, Seuil, 2000, pp.221
@1Senat de Belgique, Annales, discussion des
amendements sur la proposition de resolution sur le genocide de 1994 au Rwanda
et sur l'assassinat des citoyens belges, jeudi 1er avril
2004.
http://www.senate.be/www/?MIval=/index_senate&MENUID=12000&LANG=fr.
Le cas de la reconstruction de la Thaïlande,
l'Indonésie,... après le tsunami de décembre 2004, et la
récente mobilisation pour venir en aide aux catastrophes de Haïti
laissent chez certains Rwandais d'affirmer que l'Occident avait
abandonné le Rwanda pendant et après le génocide.
Même si les cas cités sont différents du
phénomène qu'a subi le Rwanda, tous ont mis en cause des vies
humaines. ». Ce texte est le propos de l'un des responsables des
associations qui travaillent avec le projet CNUR-UE lors de notre interview sur
leur perception des activités de l'UE dans la reconstruction du Rwanda
post génocide.
Si le tsunami, la situation au Moyen Orient, la catastrophe
naturelle d'Haïti, ... font l'objet d'un intérêt
marqué de la part de la communauté internationale, d'autres
désastres notamment en Afrique, sont vraiment laissés pour
compte. C'est le cas du Rwanda, du Liberia, de la Sierra-Léone, du
Burundi et actuellement du Soudan, de la RDC, etc. Tout montre que si rien
n'est fait pour aider ces Etats à se reconstruire, ils retomberont
toujours dans le chaos.
Malgré l'intervention tardive de l'UE au Rwanda, ses
activités dans le domaine de la reconstruction du pays sont
remarquables. Le soutien reste tout de même minime par rapport aux
besoins du pays.
Par exemple, dans le cadre de l'assistance aux personnes
vulnérables, nous avons constaté que, parmi les secteurs
d'intervention de l'UE et même parmi les activités du projet
CNUR-UE, peu d'activités sont destinées aux rescapés du
génocide. Les associations comme AVEGA (Association des Veuves
rescapées du génocide), l'AOCM (Association des Orphelins Chefs
de Ménage), IBUKA70
, etc., ne figurent pas parmi les associations qui
bénéficient du soutien de l'UE (Voir la figure N°3).
70 Ibuka qui signifie en kinyarwanda o souvenir
», ou o souviens-toi ». C'est une association sans but lucratif
fondee en aoilt 1994, regroupant les survivants du genocide perpetre contre les
Tutsi au Rwanda en 1994. Plusieurs autres petites associations comme AVEGA,
AOCM,... font partie du collectif des rescapes du genocide dont Ibuka assure la
plaidoirie.
Pour accompagner le processus de reconstruction et
d'approfondissement de l'Etat de droit, il est nécessaire d'associer les
diverses composantes de la nation au travers de leurs représentants.
La reconstruction demande l'intervention de tout un chacun
sans exclusion : les protagonistes, les victimes et les bailleurs de fonds.
Tous doivent s'unir pour que l'action de la réconciliation soit la
pierre angulaire de la reconstruction du Rwanda.
Comme signalé dans les pages précédentes,
l'UE contribue financièrement au budget annuel de la CNUR. (Voir tableau
N°3). Les a ctivités menées par la CNUR sont vraiment
remarquables aux yeux de tout Rwandais ou étranger qui suit de
près ou de loin le processus de réconciliation au Rwanda. Le
soutien aux associations oeuvrant dans le domaine de la réconciliation,
l'appui au dialogue inter-rwandais, les formations, la facilité
accordée à la CNUR pour bien mener ses activités
quotidiennes, ... tous sont des éléments palpables qui montrent
bien le rôle de l'UE pour accompagner le processus de
réconciliation au Rwanda.
Signalons ici qu'en dehors du soutien de l'UE, certains pays
membres de l'UE, ont un accord particulier avec le gouvernement rwandais. C'est
le cas de l'Allemagne (via la GTZ), de la Belgique (via la CTB) ou encore la
Grande Bretagne.
Toujours dans le cadre de la reconstruction du Rwanda,
aujourd'hui l'UE contribue beaucoup à relance de la Communauté
Economique des Pays des Grands lacs (CEPGL).
Normalement, les organisations sous-régionales, et,
dans une moindre mesure, régionales, sont des cadres dans lesquels les
conflits latents avortent grâce aux mécanismes créés
pour maintenir un climat de paix entre les divers Etats qui les composent.
C'est ainsi que l'UE continue à encourager l'établissement de
traités d'amitié et de bon voisinage entre les pays membres de la
CEPGL. La création
ou la promotion d'organismes sous-régionaux contribuent au
maintien de la paix par l'entretien et la consolidation d'un climat de
réconciliation internationale.
Tout au long de notre travail, nous avons souligné que
la place de l'UE dans le processus de reconstruction du Rwanda était
centrale.
En effet, quelle que soit l'ampleur de l'assistance, l'UE peut
être considérée comme un acteur majeur dans le processus de
réconciliation au Rwanda. Le soutien de l'UE se manifeste
vis-à-vis de la CNUR, des juridictions Gacaca, du Tribunal Pénal
International pour le Rwanda (TPIR), de la CNDH, du secteur de la justice d'une
manière générale. Ceci confirme notre hypothèse qui
considère l'UE comme un réel acteur dans le processus de
réconciliation au Rwanda. L'action de l'UE est donc à
encourager.
L'Etat rwandais, pour sa part, est appelé à
encourager le développement de la diplomatie avec l'UE, de la
coopération bilatérale d'assistance technique et de la
coopération multilatérale sous l'égide de l'UE.
A l'exemple de certains pays membres de l'UE, le gouvernement
rwandais peut également faciliter la liberté d'expression car,
grâce aux médias, les citoyens peuvent s'informer, exprimer leur
idées et contribuer ainsi au processus d'unité et
réconciliation. Il est bon et dans l'intérêt de tous,
d'encourager l'esprit de débat sur le passé du pays, de permettre
aux citoyens de discuter sur l'origine des conflits dont ils sont tous
victimes. Ceci permettrait en outre d'éviter que certaines personnes
soient considérées comme des idéologistes
génocidaires ou qualifiées de négationnistes et/ou
d'opposants politiques.
Le fait qu'au Rwanda chacun a souffert à sa
façon des divisions ethniques, politiques et du génocide, le
dialogue peut servir comme moyen de soigner les plaies encore ouvertes.
discussions, il faut voir qu'il existe une souffrance mal ou
non exprimée, des blessures encore cachées. Les débats
peuvent contribuer à chercher les solutions ensemble. « Je ne
sais pas à quel point ton problème te blesse. Quelqu'un qui a
perdu son bras et se croit le plus malheureux du monde. Et l'autre un doigt,
sont-ils le même? ca dépend,.... C'est la personne elle-même
qui sait combien elle souffre71 ».
Pour assister chacun dans sa souffrance, la meilleur technique
à utiliser est d'écouter, respecter, compatir avec la victime, ne
pas peser sa souffrance, éviter d'accorder plus ou moins de valeur aux
doléances. Ce sont les petites choses qui ne sont pas discutées,
partagées, exprimées, etc., qui grandissent, gonflent et
explosent.
La CNUR fait de son mieux pour remplir ses missions. Mais nous
avons constaté qu'elle était toujours confrontée à
un certain nombre de contraintes que l'UE et les autres donateurs pourraient
l'aider à surmonter:
- Avoir un programme bien structuré
d'évaluation et de suivi des activités de la CNUR pour aider
à rétablir la confiance et reconstituer le tissu social afin
d'éviter toute détérioration de la situation politique ou
sociale,
- Aider le processus démocratique au Rwanda, car une
confusion existe toujours entre la démocratie et les appartenances
ethniques, religieuses, régionales, provenances,... Le fait de
considérer son opposant comme un ennemi et chercher à le faire
taire par divers moyens non démocratiques handicape aussi la
réconciliation,
- Faire un effort pour sensibiliser tous le rwandais sur la
valeur de la nation et du patriotisme. Le fait que certains opposants pensent
que celui qui appartient à la minorité ethnique ne doit pas
diriger le pays, menace la réconciliation et c'est la source de
division, d'idéologie génocidaire et des
71 Temoignage d'un membre de l'une des associations
d'unite et de reconciliation que nous avons rencontre lors de notre enquete de
fevrier 2010. NB : pour une raison de securite et aussi a cause de la peur,
certaines personnes ne desirent pas qu'on les identifie. C'est pourquoi le nom
de notre interlocuteur n'est pas cite.
conflits. L'appartenance ethnique ne doit pas être un
passeport pour accéder au pouvoir ou opprimer son voisin,
- Soutenir le programme de l'Etat pour lutter contre la
pauvreté et appuyer toutes les activités d'auto suffisance
alimentaire,
- Appuyer les programmes de relance de la CEPGL qui peuvent
contribuer au rétablissement de la sécurité dans la
région,
- Etc....
En ce qui concerne les activités de l'UE au sein de la
CNUR, certaines critiques peuvent être portées. L'UE finance
certaines activités de la CNUR, mais malheureusement, il n'est pas
toujours évident d'identifier les réalisations de l'UE en termes
de réconciliation suite à diverses lacunes.
Il y a une certaine négligence dans la surveillance du
bon fonctionnement des activités financées par l'UE,
Il n'y a pas de garantie que la population rwandaise profite
réellement des effets positifs de l'aide de l'UE au développement
suite à l'absence de suivi et d'évaluation des actions sur le
terrain,
Il n'y a pas non plus de programme spécifique, bien
élaboré et durable destiné au processus de
réconciliation au sein de l'UE. Les activités de la CNUR sont
entremêlées avec celles prévues dans le secteur de la
justice en général.
Nous pouvons dire que le rôle de l'UE dans le processus
de reconstruction nécessite un appui plus grand qu'il n'apparaît
pour faire face aux problèmes relatés ici dessus. Il convient de
rappeler que le développement est à la base de la paix et de la
sécurité.
La CNUR et l'UE, à travers leur cadre de
coopération, ont donc un rôle important à jouer pour
veiller à ce que les engagements pris dans le but de réconcilier
la communauté rwandaise soient respectés et que les moyens
budgétaires adéquats prévus soient toujours disponibles et
alloués à temps.
CONCLUSION GENERALE
Au terme de notre travail qui porte sur « Le rôle
de l'Union Européenne dans le processus de réconciliation au
Rwanda », nous allons conclure tout en rappelant les grands points qui en
ont constitué la charpente.
Depuis le début, nous avons essayé
d'expérimenter la logique et la rationalité propre du
système politique conçu par les autorités rwandaises en
réponse à l'état de la société et au
déficit de cohésion post-génocide. La mise en place d'une
nouvelle architecture constitutionnelle et de différentes commissions,
telle que la CNUR, a contribué à bien gérer la
période post-conflit.
Ensuite, nous avons voulu comprendre l'implication des
différents acteurs qui ont contribué et accompagnent toujours le
processus de réconciliation au Rwanda. Nous avons loué leur
effort et leur courage. C'est en fonction de cet objectif que nous avons
conçu la démarche des entretiens, afin que nos interlocuteurs
s'expriment et nous donnent des informations à partir desquelles nous
avons pu relever les défis de la paix et suggérer des
recommandations.
Pour bien gérer les conflits, la patience est un outil
indispensable, car la reconstruction exige du temps. L'évaluation du
processus de réconciliation reste toujours et partout difficile vu que
ce concept repose plus sur les ressentis et les perceptions. En se basant sur
l'évolution des événements au Rwanda depuis le
génocide et les différents étapes franchies pour
gérer les conséquences du génocide et des guerres qui
l'ont suivi, nous pouvons cependant affirmer que la situation s'améliore
progressivement. Cette amélioration n'est pas le fruit de la seule
volonté politique existante, mais le résultat des efforts
conjugués de plusieurs partenaires parmi lesquels figure l'Union
Européenne.
La détermination de l'UE à soutenir le processus
de réconciliation est réel: un projet UE-CNUR a été
établi au sein de la CNUR pour faciliter ses engagements.
Il est clair que l'UE doit être considérée
comme un acteur réel de la réconciliation au Rwanda. A ce titre,
notre hypothèse de départ est vérifiée. Nul ne peut
nier l'importance de cette organisation qui, non seulement appuie
financièrement la CNUR, mais aussi vient de la doter d'un centre
ultramoderne de formation à la paix et à la
réconciliation. Une telle infrastructure est d'une importance capitale
dans un pays où toutes les couches de la population ont besoin
d'être initiées à l'éducation civique et à la
gestion des conflits.
Grâce à l'appui de l'UE, la CNUR prévoit
aussi des activités génératrices de revenus pour les
personnes vulnérables, principalement les veuves et orphelins. Dans la
mesure où l'aide financière de l'UE permet à ces groupes
d'améliorer leurs conditions de vie et de nouer des contacts autour de
projets d'intérêt commun, l'UE participe à la
reconstruction du tissu social rwandais meurtri par les guerres et le
génocide depuis une décennie.
.
BIBLIOGRAPHIE
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III. Documents officiels
1. Constitution du 04 juin 2003 de la République du
Rwanda
2. J.O n° 5 du 1 er mars 1999 portant
création et fonctionnement de la commission Nationale pour
l'Unité et la Réconciliation
3. J.O n° 236 DU 20/09/2000 modifiant la structure et le
fonctionnement de la Commission Nationale pour l'Unité et la
Réconciliation telle qu'elle a été modifiée et
complétée jusqu'à ce jour (loi n° 35/20 02 du 14
décembre 2002
4. Loi n° 03/99 du 12 mars portant organisation, structure
et fonctionnement de la Commission Nationale pour l'Unité et la
Réconciliation
5. Loi n° 40/2000 du 26 janvier 2001 portant créati
on et fonctionnement des tribunaux traditionnel Gacaca
6. Loi n° 31/2007 du 25 juillet 2007 abolissant la peine de
mort au Rwanda
7. Résolution 995 du Conseil de Sécurité de
l'ONU portant création du Tribunal Pénal International pour le
Rwanda (TPIR)
III. THESE ET MEMOIRES
13. BRAUN Martin, Ingénierie et perception d'une
offre publique de paix: la politique d'unité et de réconciliation
au Rwanda, Abidjan, IDDH, décembre 2007
14. SHYAKA M. Aggée, Réparation et
réconciliation. Le cas du Fonds d'Assistance aux Rescapés du
Génocide et des Massacres (FARG) au Rwanda de 1998 à 2005,
Louvain-la-Neuve, UCL, 2009
15. SIMBA Kaï Jonathan, La reconnaissance des
rescapés du génocide des Tutsi comme condition à la
réconciliation au Rwanda. Louvain-la-Neuve, UCL, Septembre 2009
IV. INTERNET
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http://www.blog-fillon.over-blog.com/article-33080375-6.html
2.
http://www.nurc.gov.rw/index.php?option=comcontent&view=article&id=5
5&Itemid=27,
3.
http://www.touteleurope.fr/fr/actions/relations-exterieures/politique-etrangere-et-de-defense/presentation/la-politique-etrangere-et-de-securite-commune-pesc.html#c44119
4.
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5.
http://www.orinfor.gov.rw/printmedia/topstrory.php?id=194
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10-04-2010
6. CNN: Christiane Amanpour Interview Paul Kagame 19 march
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http://www.youtube.com/watch?v=jsVJmrQFJgw&feature=playerembedd
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7.
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http://www.lalibre.be/actu/international/article/456906/michel-convainckagame-et-kabila-de-participer-a-un-sommet.html
9.
http://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/union-europeenne/ue-citoyennete/construction-europeenne/quelles-sont-grandes-dates-construction-union-europeenne.html
A N N E X E
Annexe n° 1
Les entretiens
I. ENTRETIEN AVEC LE SECRÉTAIRE EXÉCUTIF ET
LES
COMMISSAIRES DE LA CNUR
1. Niveau interne :
Selon différents observateurs, ces derniers temps, le
Rwanda est très apprécié pour son effort dans le processus
de réconciliation et de résolution des conflits. Quels sont les
outils majeurs que vous avez utilisé pour amener la population
déchirée par le génocide à accepter de revivre
ensemble ?
2. Niveau externe :
Ici au Rwanda, il est généralement admis que
l'Occident a participé d'une manière indirecte au
génocide. Que pensez-vous du soutien des pays Occidentaux à la
réconciliation alors qu'ils sont parmi les suspects de ce mal qui a
frappé le Rwanda ?
3. Niveau interne :
La réalisation de vos projets nécessite non
seulement l'appui du gouvernement mais aussi d'autres intervenants tels que les
organismes internationaux. L'Union Européenne fait-elle partie de ces
intervenants ? Si oui, qu'en est-il de son rôle exact dans le processus
de réconciliation ?
4. Niveau externe :
L'appui de l'UE dans les projets contribuant au processus de
réconciliation nationale a-t-elle un impact sur la normalisation des
relations entre l'Europe et le Rwanda ? (rappelons que les Occidentaux sont vus
par la population rwandaise comme des traîtres dans le génocide
des Tutsi de 1994)
5. Niveau interne:
Quels sont les problèmes majeurs auxquels la
réconciliation fait face aujourd'hui ? Et quels sont les grands atouts
que vous avez engrangés depuis ces 10 ans d'existence de la CNUR ?
6. Avez-vous des commentaires ou une recommandation à
ajouter à cet
entretien ?
II. ENTRETIEN AVEC LES RESPONSABLES DES
ASSOCIATIONS ET CLUBS DE L'UNITÉ ET
RÉCONCILIATION
1. Le gouvernement rwandais a mis en avant la
réconciliation comme pilier de développement. Comment
ressentez-vous cette appréciation ?
2. Pour vous, le processus de réconciliation a-t-il un
impact positif dans la vie quotidienne des citoyens de votre région ?
quels en sont les signes ?
3. La CNUR appuie-t-elle vos initiatives concernant
l'unité et la réconciliation ? Comment ?
4. Ici au Rwanda, il est généralement admis que
l'Occident a participé d'une manière indirecte au
génocide. Que pensez-vous du soutien des pays Occidentaux à la
réconciliation alors qu'ils sont parmi les suspects de ce mal qui a
frappé le Rwanda ?
5. Quel est votre point de vue sur la participation des
organismes internationaux et surtout de l'Union Européenne dans le
processus de réconciliation au Rwanda ?.
6. avez-vous des commentaires à ajouter à cet
entretien ?
III. ENTRETIEN AVEC LES RESPONSABLES DE L'UE A
KIGALI.
1. Le gouvernement rwandais met en avant le processus de
réconciliation comme la pierre angulaire du développement de leur
pays. Comment appréciez-vous cet engagement ?
2. Vous avez plusieurs projets au Rwanda, quel est votre part
dans le processus de réconciliation?
3. Ici au Rwanda, il est généralement admis que
l'Occident a participé d'une manière indirecte au génocide
par le fait de n'avoir pas agi pour empêcher les massacres. Que
pensez-vous de votre soutien à la réconciliation alors que vous
êtes considérés comme suspects dans le génocide qui
a frappé le Rwanda ?
4. L'appui de l'UE dans les projets contribuant au processus
de réconciliation nationale, a-t-il un impact sur la normalisation des
relations entre l'Europe et le Rwanda ? (rappelons que les Occidentaux sont vus
par la population rwandaise comme des traîtres dans le génocide
des Tutsi de 1994)
5. Avez-vous des commentaires à ajouter à cet
entretien ?
Annexe n° ... Carte du Rwanda
Source :
http://www.uck.ac.rw/images/uckcarteemplacementbybniz.jpg