![](Developpement-financier-et-causalite-entre-epargne-et-investissement-en-zone-UEMOA-Union-Economi1.png)
BURKINA FASO UNIVERSITE OUAGA II
CONFERENCE DES INSTITUTIONS D'ENSEIGNEMENT ET DE
RECHERCHE ECONOMIQUES ET DE GESTION EN AFRIQUE (CIEREA)
Unité de Formation et de Recherche en Sciences
Economiques et de Gestion (UFR/SEG)
Nouveau Programme de Troisième
Cycle Interuniversitaire (NPTCI)
MEMOIRE
Pour l'obtention du Diplôme d'Etudes Approfondies
(DEA)/ Master de recherche
Option : Macroéconomie Appliquée
THEME
Développement financier et causalité
entre épargne et
investissement en zone UEMOA
Présenté et soutenu publiquement par:
SAWADOGO Relwendé
Directeur de mémoire:
Pr. Bernadette DIA KAMGNIA,
Agrégée des Facultés de Sciences
Economiques
Codirecteur :
Dr. Pam ZAHONOGO,
Maitre -Assistant à l'UFR/SEG Université Ouaga
II
Juillet 2011
DEDICACE
9e ddie ceffe ouvre
À tous mes proches,
Plus Particulièrement
À mes Parents qui MONf eaucoup donné.
![](Developpement-financier-et-causalite-entre-epargne-et-investissement-en-zone-UEMOA-Union-Economi2.png)
i
Développement financier et causalité entre
épargne et investissement en zone UEMOA
![](Developpement-financier-et-causalite-entre-epargne-et-investissement-en-zone-UEMOA-Union-Economi3.png)
REMERCIEMENTS
Ce mémoire n'aurait pas vu le jour sans l'apport de
plusieurs personnes que je tiens à remercier.
Mes remerciements s'adressent d'abord à mon directeur
de mémoire, le Pr. Bernadette DIA KAMGNIA, pour la confiance et la
liberté qu'elle m'a accordée. Malgré ses multiples
obligations, elle n'a pas hésité d'assurer l'encadrement de ce
mémoire. Ensuite je remercie le Dr. Pam ZAHONOGO, qui a bien voulu
codiriger la rédaction de ce document. Son sens de discernement m'a
permis d'améliorer la qualité de ce document.
Ma reconnaissance va aux responsables du NPTCI. Je remercie le
Pr. Kimseyinga SAVADOGO Directeur du NPTCI, Mesdames LILIOU et SOMDA pour leurs
conseils de mère durant le parcours, ainsi que le personnel du
programme.
Ce mémoire doit également beaucoup à mon
séjour au sein de la famille NPTCI au Campus de Ouaga II, comme au
Campus Commun des Cours à Options à Dakar au
Sénégal. Je tiens en particulier à remercier le Pr.
Idrissa M. OUEDRAOGO, Directeur de l'UFR/SEG et le Pr. Taladidia THIOMBIANO,
Directeur du CEDRES ainsi qu'au Dr. Amédée DONDASSE, Pr. Clauvis
NITIEMA et Dr. Noël THIOMBIANO pour leur constante disponibilité et
les précieux conseils pour la rédaction de ce mémoire.
A tous les enseignants qui sont intervenus dans les enseignements
des cours de tronc commun et aux cours à options, recevez ici mon
satisfecit pour la qualité des cours dispensés.
Ma gratitude va également à l'endroit de tous les
étudiants de la 2e promotion et de la 3e promotion NPTCI et
ceux du CCCO pour les liens de fraternité tissés durant la
formation.
Je ne saurais terminer sans remercier mon Oncle Jean Servais
SAWADOGO et son épouse Salimata pour leurs soutiens multiples et
multiformes durant les périodes difficiles et heureuses. Je n'oublie pas
également Christian Hubert Xavier Camille EBEKE doctorant au CERDI
(France), pour son appui constant au cours de la rédaction de ce
mémoire. Egalement, merci à tous les camarades pour leurs
remarques pertinentes dans les versions antérieures du document.
Enfin, merci toutes personnes dont les noms n'ont pas pu
être cités, et qui ont contribué de toute manière
à mon éducation, depuis mon enfance jusqu'à
l'aboutissement de ce mémoire.
![](Developpement-financier-et-causalite-entre-epargne-et-investissement-en-zone-UEMOA-Union-Economi4.png)
SOMMAIRE
DEDICACE i
REMERCIEMENTS ii
SIGLES ET ABREVIATIONS iv
LISTE DES TABLEAUX v
LISTE DES GRAPHIQUES vi
RESUME vii
ABSTRACT viii
INTRODUCTION GENERALE 1
CHAPITRE I : FONDEMENTS THEORIQUES ET EMPIRIQUES DE
LA RELATION EPARGNE-INVESTISSEMENT. 7
SECTION 1 : LES DEBATS ANCIENS SUR LA RELATION ENTRE EPARGNE
ET INVESTISSEMENT 7
SECTION 2 : LA RELATION EPARGNE-INVESTISSEMENT DANS
L'OPTIQUE FINANCIERE 17
CHAPITRE II : SPECIFICITES ET NIVEAUX DE DEVELOPPEMENT
FINANCIER DES PAYS DE L'UEMOA. 24
SECTION 1 : LES SPECIFICITES DU SYSTEME FINANCIER DE L'UEMOA.
24
SECTION 2 : EVALUATION DES NIVEAUX DE DEVELOPPEMENT FINANCIER
DES PAYS DE L'UEMOA 35
CHAPITRE III: RELATION ENTRE DEVELOPPEMENT FINANCIER
ET CAUSALITE EPARGNE-INVESTISSEMENT EN ZONE UEMOA. 44
SECTION 1 : CAUSALITE ENTRE EPARGNE ET INVESTISSEMENT : UNE
ANALYSE EMPIRIQUE APPLIQUEE A LA ZONE UEMOA. 44
SECTION 2 : MISE EN EVIDENCE DE LA RELATION ENTRE
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CAUSALITE EPARGNE-INVESTISSEMENT EN ZONE UEMOA
64
CONCLUSION GENERALE ET RECOMMANDATIONS 68
BIBLIOGRAPHIE 71
ANNEXES ix
SIGLES ET ABREVIATIONS
ACP : Analyse en Composantes Principales
ADI : Africa Development Indicators
BCEAO : Banque Centrale des Etats de l'Afrique
de l'Ouest
CEMAC : Communauté Economique et
Monétaire de l'Afrique Centrale
DFID : Department For International
Development
FMI : Fonds Monétaire International
IMF : Institution de Microfinance
OCDE : Organisation de Coopération et de
Développement Economique
PARMEC : Projet d'Appui à la
Réglementation des Mutuelles d'Epargne et de Crédits
PAS : Programmes d'Ajustement Structurel
PIB : Produit Intérieur Brut
UEMOA : Union Economique et Monétaire
Ouest Africaine
VAR : Vecteur Auto Régressif
VEC : Vector Error Correction
VECM : Vector Error Correction Model
WDI : World Development Indicators
![](Developpement-financier-et-causalite-entre-epargne-et-investissement-en-zone-UEMOA-Union-Economi5.png)
iv
Développement financier et causalité entre
épargne et investissement en zone UEMOA
![](Developpement-financier-et-causalite-entre-epargne-et-investissement-en-zone-UEMOA-Union-Economi6.png)
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 :Taux moyens d'épargne en 1985,
1995,2000 et 2005(en % du PIB). 30
Tableau 2 : Evolution des Réserves
Excédentaires (RE) de l'UEMOA. 32
Tableau 3 : Ratio dépôts
/crédits accordés aux pays de l'UEMOA (en %) 32
Tableau 4 : Résultats d'analyse en
composantes principales. 41
Tableau 5 : Les différentes
catégories de développement financier de l'UEMOA. 42
Tableau 6 : Résultats des tests de
stationnarité 58
Tableau 7 : Résultats du test de
cointégration de Johansen 59
Tableau 8 : Résultats du test de
causalité de Granger basé sur des VAR. 61
Tableau 9 : Résultats des tests de
diagnostic des modèles utilisés. 61
Tableau 10: Mise en évidence de l'impact
du niveau de développement financier (2003- 2008) sur la
causalité épargne-investissement en zone UEMOA 64
LISTE DES GRAPHIQUES
Graphique 1: Crédits à
l'économie ventilés selon leur durée initiale(en milliards
de FCFA) 32 Graphique 2: Structure des dépôts
du secteur bancaire de la zone UEMOA(en milliards de
FCFA). 33
Graphique 3: Evolution des spreads en zone UEMOA
sur la période 2006-2010. 35
Graphique 4:L'évolution de l'indice de
développement financier des pays de l'UEMOA de 1977 à 2008. 42
Graphique 5: Evolution des variables épargne,
investissement intérieurs et solde courant de l'UEMOA en % du PIB de
1975 à 2005. 45 Graphique 6: Evolution des variables
épargne et investissement intérieurs du Benin en% du PIB de 1975
à 2005 47 Graphique 7 : Evolution des variables
épargne et investissement intérieurs du Burkina Faso en% du PIB
de 1975 à 2005. 47 Graphique 8: Evolution des variables
épargne et investissement intérieurs de la Côte d'Ivoire
en% du PIB de 1975 à 2005. 48 Graphique 9: Evolution
des variables épargne et investissement intérieurs du Mali en% du
PIB de 1975 à 2005. 49 Graphique 10: Evolution des
variables épargne et investissement intérieurs du Niger en% du
PIB de 1975 à 2005 49 Graphique 11: Evolution des
variables épargne et investissement intérieurs du
Sénégal en% du PIB de 1975 à 2005 50 Graphique
12: Evolution des variables épargne et investissement
intérieurs du Togo en% du PIB de 1975 à 2005 50
![](Developpement-financier-et-causalite-entre-epargne-et-investissement-en-zone-UEMOA-Union-Economi7.png)
vi
Développement financier et causalité entre
épargne et investissement en zone UEMOA
![](Developpement-financier-et-causalite-entre-epargne-et-investissement-en-zone-UEMOA-Union-Economi8.png)
RESUME
Cette étude traite de deux questions distinctes
mais proches dans la littérature sur la croissance et la finance : le
lien entre financement de l'investissement, en particulier la relation niveau
de développement financier et causalité entre épargne,
crédit et investissement. Nous nous demandons si les relations de
causalité entre épargne, crédit et investissement sont
influencées par le niveau de développement financier. D'abord,
pour évaluer les différents niveaux de développement
financier des pays de l'UEMOA, nous avons construit un indicateur composite de
développement financier à travers une Analyse en Composante
Principales (ACP). Cet indice synthétise des indicateurs de mesure de la
taille relative et absolue du système financier et de l'activité
des intermédiaires financiers. Cet indice a permis de classer les pays
par niveau de développement financier et de montrer que la zone UEMOA
est caractérisée par une dispersion des niveaux de
développement financier. Ensuite, nous avons examiné les liens de
causalité entre épargne, crédit et investissement sur la
période 1977-2008. La démarche économétrique
adoptée utilise à la fois l'estimation de cointégration de
Johansen (1988) et le test de causalité de Granger basé sur des
modèles VAR non structurels. Les estimations ont montré une
absence de cointégration et de causalité dans la plupart des pays
(sauf le Bénin et le Sénégal où la causalité
est dirigée de l'épargne vers l'investissement). Enfin, les
résultats ont montré une absence de relation entre niveau de
développement financier causalité épargne-investissement
en zone UEMOA. Nous avons attribué cette situation à une
éventuelle existence d'effets seuil ; donc une absence de relation
linéaire entre les variables.
Mots clés : Développement
financier, épargne intérieure, crédit intérieur,
investissement intérieur, ACP, cointégration, causalité,
UEMOA.
ABSTRACT
This study addresses two separate but deeply linked in
literature on growth and finance: the link between financing of investment, in
particular the impact of financial development on the causality between saving,
credit and investment. We wonder if the causal relationships between saving,
credit and investment are they influenced by the level of financial
development. To assess different levels of financial development in West Africa
Economic and Monetary Union (WAEMU) countries, we constructed a heterogeneous
indicator of financial development indicators through a Principal Components
Analysis (PCA). This index is based on indicators which measure relative and
absolute size of the financial system and activity of financial intermediate.
That allowed us to grade countries by level of financial development and to
show that the WAEMU zone is characterized by a dispersion of levels of
financial development level next, we examined the causal links between saving,
credit and investment over the period 1977-2008. The methodology uses both the
estimation of cointégration Johansen (1988) and Granger causality test
based on no structural VAR models. The estimates showed an absence of
cointegration and causality in most countries (except Benin and Senegal for
causality in the direction saving-investment). At last, the results also showed
that the level of financial development has no impact on the linking
saving-investment WAEMU zone. We attributed this situation to a possible
existence of threshold effect thus an absence of linear relationship between
variables.
Key Words: Financial development, domestic
saving, domestic credit, domestic investment, PCA, cointegration, causality,
WAEMU.
INTRODUCTION GENERALE
L'épargne est-elle un préalable à
l'investissement ou est-ce le contraire ? La réponse à cette
question n'est pas sans conséquence pour la définition d'une
politique économique. Ainsi, si l'épargne entraîne la
croissance par transformation systématique en investissement, alors la
politique économique doit favoriser l'épargne. Mais, si
l'investissement est causé par des facteurs autres que l'épargne,
et si l'épargne est générée par l'investissement,
alors la politique économique doit stimuler directement
l'investissement. Ceci est d'autant plus vrai si l'objectif assigné
à la politique économique est dicté par la croissance et
le plein emploi. Globalement, deux grandes pensées s'affrontent quant
à la relation entre épargne et investissement : la pensée
(néo)classique et celle keynésienne.
Les modèles de croissance d'inspiration
néoclassique postulent un lien étroit entre l'épargne
intérieure et l'investissement intérieur. Ils offrent une
justification du recours à la politique de stimulation du taux
d'épargne ; ce qui stimule des niveaux plus élevés de
l'investissement et par suite, la croissance économique. C'est la base
de la thèse de la libéralisation financière, à
savoir que la suppression des diverses contraintes sur le système
financier encouragera l'augmentation de l'épargne intérieure, qui
produira davantage d'investissements et, partant, augmenter la croissance. Il
en résulte que toute hausse d'épargne génère
ex-post une hausse d'investissement d'un méme montant. Pour ces auteurs,
l'épargne est véritablement vertueuse car elle est
automatiquement investie et constitue un préalable pour l'investissement
(Turgot, 1766 ; Smith, 1776 ; Hayek ,1931 ; et Solow, 1956 etc.).
Par contre, dans la pensée keynésienne,
l'ajustement se fait ex-post, de l'investissement à
l'épargne, par le biais des variations de l'emploi et du revenu
(théorie du multiplicateur) ; l'investissement d'équilibre est
déterminé indépendamment du montant d'épargne
disponible. Une hausse de la propension à épargner ne modifie ni
le niveau d'équilibre de l'investissement, ni d'ailleurs celui de
l'épargne : elle réduit le niveau de la demande effective, et
donc l'emploi et le revenu, jusqu'à ce que le montant de
l'épargne soit égale au niveau inchangé d'investissement.
Il y a donc une inversion complète : l'épargne ne
détermine pas l'investissement mais plutôt l'inverse (Keynes,
1936).
Par ailleurs, l'effet de la libéralisation des
mouvements de capitaux sur la relation entre l'épargne et
l'investissement a été soumis à de forts débats.
Feldstein et Horioka (1980) introduisent l'idée selon laquelle la
corrélation entre épargne nationale et investissement
intérieur peut servir d'indicateur de mobilité
des capitaux. Ils ont montré que les capitaux n'étaient pas
mobiles dans les pays de l'Organisation de Coopération et de
Développement Economique (OCDE). Malgré l'existence de ces
corrélations élevées, d'autres tests de mobilité
des capitaux en utilisant des approches différentes ont contesté
leurs conclusions dont entre autres, Feldstein et Bacchetta (1990), Baxter et
Crucini (1990), Frankel (1990), etc. Les recherches ultérieures ont
émis d'autres hypothèses sur la taille du pays, les facteurs
démographiques, les politiques de limitation du déficit
budgétaire, entre autres, pour expliquer la forte corrélation
entre l'épargne et l'investissement domestiques.
En s'intéressant aux facteurs explicatifs de la
causalité entre épargne et investissement, Levy (1995)
prédit une absence de causalité de l'épargne vers
l'investissement dans un contexte de politique budgétaire
endogène. Par exemple, lorsque le gouvernement réagit aux
variations du solde de la balance des paiements en ajustant ses dépenses
en conséquence du gap épargneinvestissement. Greenidge et al.
(2004) ont quant à eux, testé l'hypothèse
théorique, en stipulant que dans les pays en développement la
causalité devrait s'exercer de l'épargne intérieure vers
l'investissement intérieur lorsque le niveau de développement
financier est élevé.
Quant à
l'hétérogénéité de la relation
épargne et investissement, Tricoire (2005) a cherché à
montrer en quoi le degré
d'hétérogénéité de la relation
épargne-investissement pourrait éclairer la manière dont
la dynamique d'intégration économique se manifeste dans une zone
considérée. Il montre que, lorsque le processus
d'intégration est en cours et qu'il s'accompagne de la convergence des
économies, la relation épargne-investissement peut être
alors fortement hétérogène.
Enfin, les défenseurs de la libéralisation
financière, cherchant à justifier sa mise en oeuvre, ont abouti
à la conclusion selon laquelle le système financier doit
être libéralisé pour : i) assurer son bon fonctionnement ;
ii) accroître l'épargne financière ; iii) amorcer les
investissements productifs et rentables ; iv) pousser l'innovation
technologique et v) soutenir la croissance économique. En outre, ces
auteurs précisent que le développement des banques et des
marchés financiers a un effet positif sur la croissance
économique car il permet d'allouer une plus grande quantité
d'épargne aux investissements. Ainsi, la relation
épargne-investissement a été au centre du débat
relatif à la relation finance-croissance économique. Le
débat a traditionnellement concerné les questions suivantes :
est-ce que le développement du système
financier conduit à une croissance économique plus
forte? Et comment le développement financier affecte-t-il la croissance
?
En ce qui concerne la première question, il y a une
abondante littérature pour répondre à la causalité
entre finance et croissance. D'un côté, les défenseurs du
développement financier (Levine, 1993 ; Loayza et Beck, 1999) qui
soutiennent que la causalité s'exerce de la finance vers la croissance
économique et de l'autre côté, on a ceux qui pensent que le
développement financier résulte de la croissance (Robinson, 1952
; Stiglitz, 1991) et donc la causalité va de la croissance vers la
finance.
Concernant la deuxième question, on a également
une littérature riche aussi bien sur le plan théorique
qu'empirique. Les défenseurs de la libéralisation
financière (Schumpeter, 1911 ; Gurley et Shaw, 1955 ; Gershenkron, 1962
; Goldsmith, 1969; Mackinnon, 1973 et Shaw, 1973) soutiennent que le
développement du système financier est une condition sine qua non
de la croissance économique. Ils suggèrent la
libéralisation du système financier pour réaliser une
meilleure allocation de l'épargne, une diversification efficace des
risques et une meilleure évaluation des projets d'investissement. Ces
avantages sont autant de fonctions remplies par un système financier
développé qui peuvent expliquer cette influence positive sur la
croissance1.
Les partisans de la théorie keynésienne et
postkeynésienne mettent en doute la capacité du marché
financier dans les pays en développement à mobiliser
l'épargne nécessaire pour la transformer en investissements
productifs du fait des instabilités fréquentes des marchés
financiers. Selon ces derniers, le financement de l'investissement doit
être indépendant de la contrainte de l'épargne et les
banques doivent rendre le financement de l'investissement par création
monétaire.
La causalité entre épargne et investissement a
été aussi au coeur des débats des programmes d'ajustement
préconisés par les institutions de Breton Woods. En effet, si la
causalité s'exécute dans le sens épargne-investissement,
dans ce cas l'augmentation du taux d'investissement exige une hausse de
l'épargne intérieure. Cela peut justifier le recours à la
politique budgétaire restrictive afin de réduire la consommation
publique et privée pour encourager l'épargne par des
allègements fiscaux et autres incitations. En revanche, si c'est
l'investissement qui est le moteur, alors le problème est de savoir
comment les entreprises
1 Cité par Ebeke (2006)
peuvent augmenter leurs dépenses d'investissement. Dans ce
cas les politiques économiques devraient être orientées
vers l'accroissement du niveau et de l'efficacité de
l'investissement.
Sous l'impulsion des bailleurs de fonds (Banque Mondiale,
FMI...), plusieurs pays africains ont entrepris des programmes d'ajustement
structurel ; lesquels comprennent un volet sur la réforme du
système financier. Cette réforme financière avait pour
objectif de relancer l'épargne, l'investissement et la consommation.
Cependant, malgré toutes ces réformes financières,
l'Afrique subsaharienne a un niveau de développement financier faible et
les taux d'épargne les plus bas du monde en développement. Selon
les estimations de la Banque Mondiale (2008), l'épargne
intérieure brute de la région se situait en moyenne en 2005
à 18% du produit intérieur brut (PIB) contre 26% en Asie du Sud
et environ 43% en Asie orientale et dans les pays du pacifique. Ce faible taux
d'épargne de la région n'est pas compatible avec les besoins
d'investissement de 25% du PIB nécessaire pour atteindre les objectifs
du Millénaire pour le Développement (OMD).
Concernant les pays de la zone franc, la zone
CEMAC2 présente le taux d'épargne le plus
élevé. Mais cela n'a pas entraîné un accroissement
de l'investissement domestique. Le taux d'épargne est passé de
37% en 2000 à 44% en 2005 alors que l'investissement a chuté
passant de 21% à 18% au cours de la même période WDI
(2008). La zone UEMOA3 quant à elle se caractérise par
une dégradation de l'épargne et l'investissement domestique: le
taux d'épargne moyen est passé de 8% en 2000 à 5% en 2005.
Quant à l'investissement intérieur; il passe de 21% en 2000
à 17% en 2005. Les taux d'épargne et d'investissement varient
d'un pays à l'autre : la Côte d'Ivoire et le Sénégal
présentent les taux d'épargne les plus élevés de
l'Union (respectivement 20% et 10% en 2006). Ces deux pays disposent plus de
structures financières dans l'Union. A titre d'exemple, ils
détenaient 38 banques sur 99 banques qu'avait l'UEMOA en 2009. Cette
hétérogénéité des taux d'épargne et
d'investissement semble être due à
l'hétérogénéité des structures
financières en particulier et au développement économique
en général, lesquelles sont des facteurs réducteurs de la
mobilité intra-zone de l'épargne financière. Les
détenteurs de capitaux, éprouvant ainsi une aversion au risque,
rechigneraient à diriger leur épargne dans des pays dont les
structures économiques et financières sont rudimentaires. En
outre, les écarts d'inflation entre pays membres viendraient diminuer
2 CEMAC : Communauté Economique et
Monétaire de l'Afrique Centrale regroupe le Cameroun, le Congo, le
Gabon, la Guinée équatoriale, république Centrafricaine et
le Tchad.
3 UEMOA : Communauté Economique et
Monétaire de l'Afrique Centrale regroupe le Bénin, le Burkina
Faso, la Côte d'Ivoire, le Mali, le Niger, le Sénégal, le
Togo et la Guinée-Bissau.
fortement toute velléité de placements à
l'étranger de l'épargne dès lors que ce sont les pays
à faible besoin de financement qui sont les moins inflationnistes.
Cette situation fait que l'appartenance à la zone franc
est source de contraintes dans la mesure où des taux
d'intérêt identiques ou proches s'appliquent à un ensemble
de pays dont la situation économique et notamment les taux de croissance
et d'inflation, diffèrent parfois. Pour les moins inflationnistes, des
taux d'intérêt constituent une lourde charge pour le
système bancaire et risquent de ralentir le rythme des investissements
(Chouchane-Verdier; 2004). De plus, on note également un accroissement
de la liquidité bancaire alors que les banques n'octroient pas pour
autant de crédits. Cette situation est due, en fait à l'absence
de garantie de la part des emprunteurs, à la faiblesse de ressources
stables, au niveau élevé de risque bancaire et au faible niveau
de la concurrence bancaire.
Vu le contexte actuel de l'accumulation de la dette et le
resserrement consécutif des contraintes financières sur le
marché international, les pays de l'UEMOA doivent désormais
compter sur leurs ressources internes et la participation des acteurs
privés à la création de la richesse nationale. Il est
intéressant de montrer à travers le présent travail
à quel point l'hétérogénéité
financière dont souffrent les pays de l'UEMOA réduit l'effet
bénéfique de l'épargne sur l'investissement. La
présente étude s'inspire de la démarche adoptée par
Greenidge et al. (2004) pour montrer le niveau de développement
financier permettant à l'épargne d'être vertueuse dans la
zone UEMOA.
La question centrale de recherche qui se dégage de
cette problématique4 est la suivante : quelle est la relation
entre niveau de développement financier et causalité
épargneinvestissement en zone UEMOA? En d'autre terme, quel niveau de
développement financier permet à l'épargne de financer
l'investissement dans la zone UEMOA ? Il s'agit spécifiquement de
répondre aux questions suivantes :
i) quel est le degré de dispersion des niveaux de
développement financier dans la zone UEMOA ?
ii) quel est le sens de causalité entre épargne et
investissement dans chacun des pays de l'UEMOA ?
iii) quel lien existe-t-il entre niveau de développement
financier et causalité épargneinvestissement en zone UEMOA ?
4 Faiblesse des taux d'épargne et
d'investissement et l'hétérogénéité des
niveaux de développement financier.
Pour répondre à ces interrogations, nous nous
sommes fixés comme objectif général d'étudier le
lien qui existe entre le niveau de développement financier et la
causalité épargneinvestissement en zone UEMOA.
Plus spécifiquement, il s'est agit de :
i) déterminer les degrés de développement
financier en zone UEMOA ;
ii) évaluer la causalité entre épargne et
investissement dans la zone UEMOA ;
iii) déterminer le lien qui existe entre
développement financier et causalité épargneinvestissement
dans la zone UEMOA.
La réalisation des objectifs spécifiques se fonde
sur les hypothèses suivantes:
H1 : la zone UEMOA est
caractérisée par une faible
hétérogénéité financière.
H2 : les sens de causalité entre
épargne et investissement sont identiques en zone UEMOA.
H3 : il existe un lien entre le
développement financier et la causalité
épargne-investissement en zone UEMOA.
Sur le plan méthodologique, la vérification de
la première hypothèse s'est faite grâce à la
construction des indices de développement financier.
L'hétérogénéité financière a
été cernée à partir de la dérivation d'un
indicateur composite obtenu grace à la méthode d'Analyse en
Composantes Principales (ACP). Cette méthode permet de combiner
plusieurs indicateurs de développement financier pour obtenir un
indicateur composite. Concernant la deuxième hypothèse,
c'est-à-dire la causalité entre épargne et investissement
intérieurs, elle est testée à partir d'un modèle
VAR non structurel en intégrant la variable crédit fourni par le
système bancaire comme une variable intermittente pouvant influencer la
dite causalité. Enfin, la troisième hypothèse est
vérifiée par une confrontation des résultats de
l'évaluation des niveaux de développement financier et ceux du
test de causalité entre épargne et investissement des pays de
l'UEMOA.
La présente étude est structurée en trois
chapitres. Le premier chapitre présente les fondements théoriques
et empiriques de la relation épargne-investissement. Puis, il a
été question dans le deuxième chapitre, de montrer les
spécificités financières de la zone UEMOA. Enfin, le
troisième chapitre, présente et analyse les résultats des
estimations économétriques. Les suggestions de recommandation
sont exposées dans la conclusion générale, en se fondant
sur l'ensemble des résultats obtenus tout au long de notre
étude.
CHAPITRE I : FONDEMENTS THEORIQUES ET EMPIRIQUES DE LA
RELATION EPARGNE-INVESTISSEMENT
L'objectif de ce chapitre est de présenter les
fondements théoriques et empiriques de la relation entre épargne
et investissement. Deux sections sont traitées. La première
section présente les débats anciens à partir des auteurs
majeurs sur la relation épargne-investissement. La deuxième
section porte sur les controverses récentes sur la causalité
entre épargne et investissement dans l'optique financière en
distinguant l'analyse traditionnelle de celle postkeynésienne de la
finance.
SECTION 1 : LES DEBATS ANCIENS SUR LA RELATION ENTRE
EPARGNE ET INVESTISSEMENT
Selon la littérature macroéconomique, les
déterminants de l'épargne ne sont pas les mêmes que ceux de
l'investissement. L'épargne dépend principalement du revenu et du
patrimoine tandis que l'investissement dépend de la rentabilité
et du risque (Chouchane-Verdier, 2001). Or, bien que l'épargne et
l'investissement découlent de deux décisions
indépendantes, ils seront nécessairement égaux
ex-post en économie fermée (Solow, 1956 ; Swan, 1956).
Le mécanisme d'ajustement entre ces deux variables se fait soit par le
revenu, soit par les taux
d'intérêt, soit par les deux. Les choses sont plus
complexes dans une économie ouverte oül'introduction des
flux de capitaux ex-post suscite la distinction entre l'épargne
nationale et l'investissement intérieur.
En effet, l'épargne n'est pas forcément
utilisée pour l'investissement intérieur. Elle peut être
investie à l'étranger. Dans le cas d'une mobilité parfaite
des capitaux, l'épargne de chaque pays se dirigera vers la partie du
monde qui offre le taux de rendement le plus élevé (Lucas, 1988).
D'où, une augmentation de l'épargne nationale se traduira
principalement par un fort excédent des paiements courants (ou par une
réduction de leur déficit) plutôt que par une augmentation
de l'investissement intérieur et de la croissance.
I-L'epargne et l'investissement dans l'économie :
les débats théoriques
Le point de vue que la causalité va de l'épargne
à l'investissement est compatible avec les modèles de croissance
classique et néoclassique, tandis que l'hypothèse que
l'investissement cause l'épargne est principalement associée
à la macroéconomie keynésienne.
I-1-L'épargne comme un préalable à
l'investissement
En macroéconomie classique, la croissance de la
production dépend d'abord et avant tout de l'investissement, qui
à son tour dépend du taux d'épargne. Dans ce cas,
l'interaction entre la demande et l'offre de fonds prétables
détermine le niveau d'investissement. La demande de fonds
prêtables ou la demande d'investissement est une fonction négative
du taux d'intérêt réel. L'offre de fonds prétables
ou l'épargne est une fonction positive du taux d'intérêt
réel. En conséquence, un déplacement vers la droite de la
fonction de demande d'investissement se traduira par une hausse des taux
d'investissement et une augmentation du niveau d'équilibre de
l`investissement et de l'épargne, dont l'ampleur dépend de la
sensibilité des taux d'intérêts de l'épargne.
Toutefois, l'investissement peut aussi augmenter en raison d'un
déplacement vers la droite de la courbe de l'épargne. Si la
courbe de la demande d'investissement est parfaitement inélastique
l'investissement est indépendant de l'épargne. Ainsi, pour les
(néo)classiques, l'épargne permet de financer les investissements
supplémentaires. L'ajustement entre l'épargne et l'investissement
s'explique par les effets conjugués de la loi des
débouchés de Say et par le jeu du taux d'intérêt.
Pour Turgot (1766) comme pour Smith (1776), l'épargne est
considérée comme automatiquement consacrée au financement
de l'investissement.
Hayek (1931) montre pour sa part comment une économie
peut parvenir à une structure de production plus capitalistique. La
solution pertinente est que « les consommateurs épargnent et
investissent une somme de monnaie ». Les gens seront
récompensés de leur effort d'épargne lorsque, au terme
d'un détour de production allongé, ils
bénéficieront d'un montant supplémentaire de biens de
consommation.
Plus récemment dans les théories de croissance
exogène, Solow (1956) montre que sous les hypothèses d'une
fonction de production à facteurs substituables et de flexibilité
des prix, l'économie converge vers un état stationnaire. Mais la
question qui se pose est de savoir comment dépasser cet état
stationnaire. Les solutions possibles sont l'augmentation de la
productivité du capital et l'augmentation de l'épargne
nécessaire à l'accroissement de
l'investissement. Cette dernière solution pose le
problème du montant d'épargne nécessaire pour un niveau de
vie optimal car une trop forte épargne risque d'entraîner une sous
consommation chronique et mettre fin à l'expansion.
En résumé, tous les modèles d'inspiration
(néo)classique concluent au rôle préalable de
l'épargne pour une croissance soutenue. Mais qu'en pensent les
modèles d'inspiration keynésienne ?
I-2-L'épargne comme source d'instabilité
pour la demande
Les modèles macroéconomiques keynésiens
et néokeynésiens, contrairement à ceux
néoclassiques attribuent un rôle passif à l'épargne.
Selon ces modèles, le principal levier qui déplace
l'économie sur le chemin de la croissance économique est
l'investissement, qui est induit par l' « esprit animal des entrepreneurs
». L'épargne est plutôt un frein à la croissance, car
elle engendre un déficit de demande. L'investissement doit par
conséquent être privilégié pour résorber le
déficit et induire la croissance et plus d'épargne.
On a principalement Malthus, Marx et Keynes qui mettent en
doute le rôle préalable à l'investissement. Ils
considèrent dans ce cas que l'épargne réduit la
consommation, la demande et donc la production. Keynes (1936) met l'accent sur
les liens entre le montant des investissements et le volume d'emploi. Il
suppose ainsi que pour qu'un certain volume d'emploi soit justifié, il
faut donc qu'il existe un montant d'investissement courant suffisant pour
absorber l'excès de la production totale sur la fraction de la
production que la communauté désire consommer. L'épargne
des agents est considérée ici comme étant à
l'origine d'un déficit de la demande. En d'autres termes,
l'épargne est seulement une contrainte, et non pas une force motrice
dans les opportunités d'investissement car lorsque l'économie
devient une ressource rare, le pouvoir ne peut qu'être la demande
effective.
Les économistes keynésiens reprennent
généralement cette conception d'un investissement moteur et
à contrario d'une épargne engendrant un déficit
de demande, méme si ex-post ils sont égaux. Dans le
modèle de croissance de Domar (1947) par exemple, le maintien du plein
emploi nécessite une croissance continuelle de l'investissement à
un taux égal au rapport entre la propension à épargner et
le coefficient du capital. Il doit donc être d'autant plus
élevé que la propension à épargner l'est
également.
Ces modèles théoriques mettent tous en
évidence l'impact de l'épargne dans le processus de la croissance
économique et notamment le lien qu'elle entretient avec
l'investissement. Etant donnée l'impasse à laquelle ce
débat aboutit, les économistes ont cherché à savoir
ce qu'il en est concrètement. Après avoir présenté
les controverses théoriques entre l'épargne et l'investissement,
nous nous intéressons maintenant aux développements empiriques
sur la question.
II-Les études empiriques sur la relation
épargne-investissement
La littérature empirique a porté essentiellement
sur la corrélation entre l'épargne et l'investissement afin
d'évaluer le degré d'intégration du marché
financier international. Dans une économie ouverte, l'association entre
épargne et investissement dépend du degré de
mobilité du capital. En principe, si le capital est parfaitement mobile,
les investisseurs s'intéressent uniquement aux taux de rendement sur
leurs investissements quel que soit le pays. Ainsi, l'augmentation de
l'épargne intérieure ne se traduit pas nécessairement par
des investissements plus importants, mais par un excédent du compte
courant. De plus, si la mobilité des capitaux internationaux est
limitée, une augmentation de l'épargne intérieure aura
tendance à stimuler l'investissement intérieur. Les études
sur la corrélation sont d'abord présentées et suivent
celles de la causalité.
II-1-Les développements sur la
corrélation entre épargne et investissement
La corrélation entre l'épargne et
l'investissement a d'abord été présentée comme un
critère fondé sur la quantité d'évaluation de la
mobilité internationale des capitaux par Feldstein et Horioka (1980). En
effet, ils partent de l'hypothèse qu'en situation de parfaite
mobilité, les capitaux devraient se déplacer là où
le taux de rendement apparaît le plus élevé et qu'en
conséquence le taux d'investissement domestique d'un pays devrait
être totalement non corrélé avec son taux d'épargne.
Dans leur étude en coupe transversale sur des données relatives
à 16 des pays membres de l'OCDE entre 1960 et 1974, ils
régressent le taux d'investissement sur le taux d'épargne et
obtiennent des estimateurs très proches de l'unité pour le
coefficient du taux d'épargne. Ils analysent ce résultat comme la
preuve d'un faible degré d'intégration financière alors
méme que la libre circulation des capitaux était tenue comme
acquise dans la plupart de ces pays. Ce résultat signifie en plus que
les pays les plus développés ne bénéficient pas de,
ou en tous cas ne participent pas à l'intégration internationale,
de telle façon que leur épargne nationale contraint leur
investissement.
Feldstein (1994) a par la suite montré que même
si les obstacles réglementaires ont diminué, les
détenteurs de capitaux préfèrent conserver
l'épargne dans leur pays d'origine pour se prémunir contre le
risque de change et le risque politique, toutes choses égales par
ailleurs. L'épargne nationale reste donc dans son pays et
l'investissement intérieur s'accroît. L'interprétation que
donnent les auteurs de la corrélation en termes de mobilité
réduite des capitaux a été contestée en invoquant
diverses raisons.
Selon Obsefeld (1986), l'hypothèse proposée par
Feldstein et Horioka (1980) ne fonctionne que pour les petites économies
ouvertes. Pour une grande économie ouverte comme celle des Etats Unis,
l'épargne et l'investissement intérieurs pourraient aller
ensemble, même si le marché international des capitaux a
parfaitement fonctionné. Cela est d? au fait qu'une grande
économie pourrait influer sur le taux d'intérêt réel
mondial. Pour un pays suffisamment grand, dans les conditions d'une plus grande
intégration des marchés financiers mondiaux, une baisse de
l'épargne internationale pourrait conduire à la fois en baisse
les taux d'intérêt nationaux et internationaux et évincer
les investissements partout dans le monde. Il serait donc erroné de
tirer une conclusion qu'une forte corrélation entre épargne et
investissement implique une faible mobilité des capitaux.
Tobin (1983) et Murphy (1984) dans le même sens
qu'Obsefeld (1986) plaident aussi pour un effet de taille : les variations
exogènes de l'épargne dans les grands pays peuvent influer sur le
taux d'intérêt mondial et donc l'investissement ; conduisant
à une co-circulation de l'épargne et l'investissement. En outre,
les grands pays sont en général plus fermés et les chocs
régionaux sont plus susceptibles d'être absorbés au plan
international.
Summers et al. (1988) ont construit des modèles dans
lesquels il y a une parfaite mobilité des capitaux, mais où
l'investissement et l'épargne sont corrélés en raison des
perturbations qui affectent l'économie, par exemple la croissance
démographique et les chocs de productivité.
D'autres analyses s'appuient sur les flux internationaux des
capitaux et les politiques économiques qui entrainent une forte
corrélation entre l'épargne et l'investissement. Dooley et
al. (1987) ; Isaksson (2001) qui expliquent le
résultat de forte corrélation par l'aide étrangère
tandis que Wong (1990) montre que la taille du secteur des biens non
échangeables peut expliquer la corrélation.
Bayoumi (1990), Artis et Bayoumi (1991) et McClure (1994) ont
quant à eux montré que la corrélation positive peut
être due au ciblage des comptes courants par le gouvernement. A leur
avis, les gouvernements imposent des contraintes sur les flux
transfrontaliers des capitaux lorsque le déficit (ou excédent) du
compte courant dépasse un niveau prédéterminé. Les
gouvernements peuvent aussi influer sur le compte courant en ajustant le taux
d'épargne et d'investissement du secteur public pour compenser
l'écart entre l'épargne et l'investissement privé.
Enfin, Miller (1988) en utilisant les données en
séries chronologiques pour la période 1946 à 1987, a
constaté que dans le cas des Etats Unis que le taux d'épargne et
le taux d'investissement sont cointégrés pour les données
antérieures à 1971 (période de taux de change fixes), mais
pas pour cointégrées pour la période qui suit 1971. Baxter
et Crucini (1993) qui constatent que les petits pays de l'OCDE
ou les pays en développement présentent une mobilité de
capital plus accrue que les grands pays. Mamingi (1997) a estimé la
entre l'épargne et l'investissement pour cinquante huit pays en
développement et évalué le degré de mobilité
du capital dans le sens de Feldstein-Horioka (1980) pour ces pays en
développement. Il a constaté que la relation entre épargne
et investissement dans les pays à revenu intermédiaire a tendance
à être faible à celle des pays à revenu faible.
Levy (1998) quant à lui, a examiné la relation
à court terme et à long terme et a trouvé la preuve de la
forte corrélation en faveur du long terme et la relation cyclique entre
épargneinvestissement. Cette étude a également
révélé une forte corrélation entre l'épargne
et l'investissement dans la période post-guerre que durant la
période de l'avant guerre. Jansen (1998) estime que la
corrélation entre l'épargne et l'investissement à long
terme est déterminée par un ou plusieurs de ces facteurs :
mobilité limitée des capitaux, ciblage du compte courant par le
gouvernement, contrainte temporelle inter budgétaire à court
terme etc. En outre l'étude montre que la corrélation à
court terme semble varier d'un pays à l'autre et est
déterminée par les cycles d'affaires spécifiques du
pays.
Une autre interprétation des résultats de
Feldstein et Horioka s'est imposée récemment avec Corbin (2001).
Ce dernier, en utilisant trois différentes procédures
d'estimation des données de panel et un groupe de 10 pays de l'OCDE sur
la période 1985-1992, confirme dans son étude qu'un coefficient
élevé de l'épargne n'est pas dü à la faiblesse
de la mobilité des capitaux mais plutôt aux
spécificités individuelles des pays en question.
Ang (2009) quant à lui a examiné la dynamique de
la relation entre épargne et investissement intérieurs en Inde
au cours de la période 1950-2005 en contrôlant le niveau de
libéralisation financière a l'aide d'un modèle
Vectoriel Autorégressif (VAR). Les résultats indiquent qu'une
plus grande libéralisation financière permet de
mobiliser davantage de ressources internes pour être acheminées
vers les activités d'investissement.
Cependant la plupart de ces travaux ont été
menés dans les pays développés et ceux de l'Asie. La
majorité des investigations économétriques ont
été effectuées avec des modèles de panel et en
coupe transversale, ce qui impose une homogénéité
transversale sur les coefficients qui, en réalité, peuvent varier
en raison des différences de structures institutionnelles, sociales et
économiques. En effet, lorsque le panel est considéré dans
sa globalité, les hétérogénéités ne
sont pas suffisamment bien décrites par les effets fixes et peuvent
entrainer un biais d'estimation lorsque celle-ci porte sur la totalité
de l'échantillon Jansen (1988) et Jansen (1991). En plus, ces
études n'ont pas pris en compte la dynamique de long terme alors que la
plupart des variables macroéconomiques sont non stationnaires à
niveau Nelson et Ploser (1982). Jansen (1997) affirme que « la
cointégration détruit le contenu informatif de l'analyse de
Feldstein et Horioka ».
Enfin ces études n'ont pas pu trancher le débat
entre le rôle de l'épargne dans la croissance économique
car elles n'ont étudié que le sens de la causalité entre
épargne et investissement et ne tranche pas le débat sur le
rôle de l'épargne.
II-2-Les développements empiriques sur le sens
de causalité entre épargne et investissement
Les théories de la croissance endogène depuis le
milieu des années 1980, principalement Lucas (1988), Romer (1990) et
Barro (1990) confirment l'idée que l'accumulation du capital physique
est le facteur clé de la croissance économique à long
terme. Bacha (1990) et Jacppelli et Pagano (1994) affirment également
que l'épargne contribue à l'augmentation de l'investissement et
de la croissance du PIB dans le court terme.
On peut citer d'abord Argion et Roldan (1994) qui ont
étudié la causalité entre épargne et investissement
intérieur dans les pays européens à partir des
données annuelles pour la période 1960-1988 et ont abouti
à une causalité découlant de l'épargne à
l'investissement sans aucun effet de rotation. Gordon (1995) trouve une
explication théorique à la causalité entre épargne
et investissement en explorant la dimension temporelle de la relation. Ainsi,
pour Gordon comme pour Harcourt et Sajic (1998), la causalité dans les
faits s'exerce de l'investissement vers l'épargne et non le contraire.
Ils confirment par conséquent les pensées
de Keynes et Kalecki. Dans le méme ordre d'idées,
Skott (1989), considère quant à lui, l'investissement comme la
variable clé.
Palley (1996) a utilisé un modèle VAR dans le
cas américain pour examiner la relation épargne-investissement.
La principale conclusion est que l'investissement cause l'épargne. Selon
cet auteur les dépenses d'investissement entrainent une augmentation
à la fois de l'épargne privée et publique. En outre,
l'augmentation de l'épargne privée effective a un effet
négatif sur l'investissement et l'épargne publique.
L'augmentation de l'épargne publique n'a aucun effet sur les
dépenses d'investissement. Il a proposé que les politiques visant
à augmenter l'épargne privée et publique ne sont pas
susceptibles d'accroitre les investissements et peuvent entrainer des tensions
inflationnistes.
Apergis et Tsoulfidis (1997) ont utilisé un
modèle à correction d'erreur pour étudier la
cointégration entre épargne et investissement de quatorze pays de
l'Union Européenne. Ils ont constaté que l'épargne et
l'investissement sont cointégrés ; ce qui signifie que la
mobilité du capital n'est pas aussi élevée, méme
après que le déménagement vers l'intégration
économique en Europe ait pris de l'ampleur. L'étude conclut
également que l'épargne cause l'investissement en utilisant un
vecteur à correction d'erreur de type Granger.
Hui Boon (2000) a étudié la relation et la
causalité entre épargne et investissement dans les pays de l'Asie
du sud Est. Les résultats ne montrent aucun effet à court terme
de causalité allant de l'épargne à l'investissement pour
tous les pays, sauf pour le Singapour. L'effet causal est en cours
d'exécution de l'investissement à l'épargne pour le cas de
l'Indonésie et de la Thaïlande. Pour le cas de la Malaisie et les
Philippines, il n'y a pas de causalité entre l'épargne et
l'investissement. Il montre enfin que l'absence de causalité à
court terme ou en cours d'exécution de l'épargne à
l'investissement implique un degré élevé de
mobilité internationale des capitaux à court terme dans la
région.
Greenidge et al. (2004) aboutissent dans le cas
latino-américain et caribéen au résultat que la
causalité va dans plusieurs directions selon les pays. En outre, ils
n'arrivent pas à l'évidence empirique que le niveau de
développement financier influence ladite causalité entre
épargne et investissement intérieurs dans les régions
analysées. Kasuga (2004) analyse la causalité en utilisant des
données en coupe transversale et conclu que l'impact de l'épargne
sur l'investissement dépend des systèmes financiers et leur
niveau de développement.
Les études sur le sens de causalité entre
épargne et investissement consacrées au cas des pays africains
sont relativement rares. On a principalement celle de Elbadawi et Mwega (2000).
Ils concluent à une causalité du taux d'épargne
intérieure vers le taux d'investissement domestique dans les pays
d'Afrique Sub-saharienne en utilisant la causalité à la Granger
(1969), à la différence de Agbetsiafa (2002) qui fait recours aux
tests de causalité de Granger (1988) sur VECM dans les pays comme la
Côte d'Ivoire, le Nigeria, l'Afrique du sud, la Zambie et le Kenya. La
causalité est partout de l'épargne vers l'investissement, sauf en
Afrique du sud où prévaut une causalité bidirectionnelle
entre épargne et investissement intérieurs.
On a ensuite Ebeke (2006) qui a étudié la
causalité entre épargne et investissement en zone CEMAC en
prenant en compte le niveau de développement financier. Il montre qu'il
y a une hétérogénéité dans la
causalité entre épargne et investissement dans cette zone et cela
est dû à l'hétérogénéité du
niveau de développement financier. Il aboutit à la conclusion que
lorsque le niveau de développement financier est élevé,
l'épargne cause l'investissement (Cameroun, Congo, Gabon) à court
et à long terme et lorsque le niveau de développement financier
est faible c'est l'investissement qui cause l'épargne (Tchad et
République Centrafricaine).
Enfin Esso et Keho (2010) ont étudié la relation
épargne-investissement en zone UEMOA en utilisant le test de
cointégration proposé par Pesaran et al. (2001) et le test de
causalité de Granger de Toda et Yamamoto (1995). Les résultats
montrent que le Benin, la Côte d'Ivoire et le Niger sont
caractérisés par un degré de mobilité faible du
capital. Pour les quatre autres pays (Burkina, mali, Sénégal,
Togo), l'investissement n'est pas lié à l'épargne
intérieure. Cela implique que la majeure partie de l'investissement dans
ces pays n'est pas financé par l'épargne intérieure mais
par l'épargne étrangère. L'étude a souffert d'une
limite dans la mesure où elle ne prend pas en compte le système
financier car celui-ci est le principal canal de transmission de
l'épargne à l'investissement.
Outre la corrélation et la causalité, la
relation épargne-investissement peut être analysée dans le
cadre des unions économiques et monétaires.
L'hétérogénéité de la relation
épargneinvestissement au sein d'une union est susceptible
d'éclairer, d'après les travaux récents Tricoire (2005),
sur la manière dont l'intégration économique se manifeste
dans une zone considérée.
II-3-Hétérogénéité
de la relation au sein d'une zone
A la suite de ces travaux empiriques sur la corrélation
et la causalité entre épargne et investissement, il y a des
chercheurs qui ont utilisé des modèles
économétriques sur données de panel pour analyser les
facteurs susceptibles d'influencer la relation entre ces deux variables.
Certains ont trouvé que la corrélation épargne et
investissement dépend plus des spécificités propre
à chaque pays. Parmi les études qui se sont
intéressées à
l'hétérogénéité de la relation
épargne et investissement au sein des unions économique et
monétaire, on a essentiellement celle de Tricoire (2005) dans le cas des
pays européens. Il a cherché à déterminer en quoi
le degré d'hétérogénéité de la
relation épargne-investissement pourrait éclairer sur la
manière dont l'intégration économique se manifeste dans
une zone considérée. Pour l'auteur, il est en effet probable que
l'intégration économique induise de manière statique ou
dynamique une certaine hétérogénéité. Il
arrive aux principales conclusions que :
i) pour les pays à niveau de développement
similaire la relative homogénéité de la relation
épargne-investissement peut être associée à un
processus d'intégration économique en voie d'achèvement,
dans lequel le rattrapage n'opère plus ;
ii) pour les pays aux niveaux de développement
différents, la forte hétérogénéité de
la relation épargne-investissement pourrait être liée
à un processus d'intégration économique dynamique qui
favoriserait le rattrapage des économies les moins
développées vers les plus développées.
En résumé une relation
épargne-investissent homogène (ou faiblement
hétérogène) suggérerait un processus
d'intégration économique abouti ou en voie d'approfondissement,
qui se traduirait par une synchronisation des cycles des affaires
élevée et des structures productives proches (Franckel et Rose ;
1998). L'hétérogénéité de la relation
épargneinvestissement peut suggérer un processus
d'intégration dont la réalisation favorise la convergence des
économies.
Après avoir présenté les controverses
théoriques et empiriques sur la causalité entre épargne et
investissement, intéressons-nous à la dimension financière
de la relation entre épargne et investissement. Il s'agit
spécifiquement de présenter le rôle de la finance dans la
causalité épargne et investissement selon les modèles
d'inspiration néoclassique et ceux keynésiens.
SECTION 2 : LA RELATION EPARGNE-INVESTISSEMENT DANS
L'OPTIQUE FINANCIERE
Sur le plan théorique, la finance joue un rôle
important dans la relation entre épargne et investissement.
D'après les théories du développement financier, les
structures financières permettent la mobilisation de l'épargne et
son affectation vers l'investissement productif, tandis que les analyses
postkeynésiennes préconisent que le financement de
l'investissement soit rendu par création monétaire et
indépendamment de l'épargne des ménages.
Deux points sont traités. D'abord le premier point
traite du rôle de la finance dans la relation entre épargne et
investissement. Le second point porte sur l'analyse postkeynésienne de
la finance, épargne et investissement.
I-La finance dans la relation entre épargne et
investissement
Dans un premier temps, il sera question de présenter
les différents travaux sur le rôle de la finance dans la relation
entre épargne et investissement et dans un second temps l'impact de la
répression financière sur l'ajustement
épargne-investissement.
I-1-La finance comme instrument de canalisation de
l'épargne vers l'investissement
Les analyses traditionnelles d'inspiration néoclassique
du lien entre la sphère financière et la sphère
réelle préconisent l'épargne comme condition sine qua non
à un investissement productif et à une croissance
économique.
Gurley et Shaw (1955) insistent sur le canal du crédit
et plus particulièrement sur le rôle des banques dans l'offre de
fonds à l'activité économique. Ils énoncent que le
niveau de développement économique d'un pays est expliqué
par le niveau de développement du système financier. En effet,
lorsqu'elles sont efficaces, les banques permettent de mobiliser
l'épargne financière des agents à capacité de
financement pour l'affecter à des usages plus productifs exprimés
par les agents économiques en besoin de financement. En d'autres termes,
les banques assurent la transformation de l'épargne en investissements
productifs. Une économie où le taux d'épargne est
élevé peut avoir un taux de croissance faible si l'épargne
reste liquide ou mal allouée. Le développement financier ne doit
donc pas constituer seulement un instrument d'augmentation de l'épargne
financière, elle doit être un instrument
au service de la croissance économique. A cet
égard, les banques jouent un rôle déterminant dans
d'allocation optimale de l'épargne institutionnelle.
Pour Goldsmith (1969), ce sont la séparation des
décisions de consommation et d'investissement d'une part, et la
multiplicité des actifs financiers consécutive à la
création d'institutions financières d'autre part, qui conduisent
à un taux de croissance plus important de l'économie. Ces
conditions favorisent une amélioration de l'efficacité de
l'investissement grace à une allocation optimale de l'épargne
à l'investissement obtenue à partir du libre jeu du
marché.
Explicitement ou implicitement, on retrouve chez ces auteurs
précités l'idée qu'un système financier efficient
active la croissance économique tout en l'orientant. Pour eux, la
principale contribution du système financier à la croissance
économique repose sur le fait que ce dernier permet d'assurer le
fonctionnement d'un système de paiement efficace et évolutif, qui
mobilise l'épargne et améliore son affectation à
l'investissement grace aux taux d'intérêt réels
positifs.
L'hypothèse de l'épargne préalable est
également présentée dans les modèles de la
libéralisation financière développés par McKinnon
(1973) et Shaw (1973). Leur analyse vise donc à montrer que dans le
cadre d'une économie réprimée financièrement, la
fixation des taux d'intérêt en-dessous de leur valeur
d'équilibre réduit l'épargne (baisse des
dépôts bancaires) au profit de la consommation courante. Elle fixe
l'investissement au-dessous de son niveau optimal et détériore la
qualité de l'investissement réalisé dans la mesure
où les banques sont forcées par le gouvernement de financer des
projets à faibles rendements.
Dans ce contexte, libéraliser le secteur financier,
c'est à dire accroître le niveau des taux d'intérêt
réels servis sur les dépôts (par une augmentation des taux
nominaux ou par une baisse de l'inflation) va stimuler l'accumulation
d'encaisses monétaires (l'épargne) et donc permettre la
croissance de l'investissement. Cela devrait aussi permettre d'accroître
l'intermédiation bancaire; d'où une réduction des frais
d'intermédiation entre prêteurs et emprunteurs grâce
à la réalisation d'économies d'échelle, une
meilleure diversification du risque, un accès facilité des
emprunteurs aux fonds prêtables.
A la suite des théories de la libéralisation
financière, on a celle de l'approche fonctionnelle
de l'intermédiation financière qui considère aussi la
finance comme canalisateur de l'épargne vers l'investissement. Levine
(1997) considère que le développement financier affecte la
croissance par le biais de deux canaux :i) l'accumulation du
capital : en améliorant le taux de formation du capital et en agissant
sur le taux d'épargne ou par la réallocation de l'épargne
; ii) l'innovation technologique : par l'invention de nouveaux processus de
production, en agissant sur le taux d'innovation technologique. En
considérant le premier canal, le rôle de l'intermédiation
des banques et des marchés financiers, consiste à centraliser la
collecte et la mobilisation de l'épargne des agents à
capacité de financement pour l'allouer, de la manière la plus
optimale possible, au profit des entreprises cherchant à financer leurs
projets d'investissements.
En outre, certains auteurs de la croissance endogène
Kapur (1976), Mathieson (1979), etc. en mettant en évidence le
rôle de la finance, montrent que la répression financière
entraine la perte d'une partie de l'épargne au cours de sa
transformation en investissement.
I-2-impact de la répression financière
sur l'ajustement épargne investissement
A la suite des modèles précurseurs de
libéralisation financière McKinnon (1973), Shaw (1973), des
auteurs comme Kapur (1976), Mathieson (1979) et Pagano (1993) pour ne citer que
ceux-ci, ont repris et enrichis les modèles initiaux pour montrer
comment un système financier réprimé réduit les
possibilités de dynamisation de l'investissement à travers
l'épargne.
C'est ainsi que Pagano (1993) indique les trois canaux par
lesquels le système financier peut affecter la croissance :
1- D'abord en augmentant la proportion de l'épargne
nationale allouée à des investissements productifs. Selon Pagano,
l'augmentation de cette proportion peut être due à la baisse de
l'inefficacité de la sphère financière. Lors de la
libéralisation du secteur bancaire, l'on peut aussi penser à une
baisse des réserves obligatoires ou des taxes associées aux
transactions.
2- Ensuite en augmentant la productivité marginale,
grace à la collecte d'information et à l'incitation des
investisseurs à replacer leur argent dans les projets plus
risqués à cause d'un partage du risque plus significatif de la
part des intermédiaires.
3- Enfin, le secteur financier influence la croissance par
l'intermédiaire du taux d'épargne de l'économie.
A ce propos, Roubini et Sala-i-Martin (1992) notent que leurs
activités (intermédiaires financiers) peuvent être
importunées par une forte taxation, sous la forme de réserves
obligatoires élevées, une taxation
élevée des transactions, une régulation restrictive, etc.
Cette situation incite les intermédiaires financiers à essayer de
compenser cette perte, par l'accroissement de la marge.
Le développement financier qui se résume
à la libéralisation financière, selon ces auteurs, est de
nature à réduire ce « gaspillage » de ressources, c'est
à dire à augmenter le taux d'épargne disponible pour
l'investissement et donc le taux de croissance.
Il ressort de tous ces travaux que le développement
financier est une condition nécessaire pour une mobilisation importante
de l'épargne et l'affectation de celle-ci à l'investissement
productif. Cependant, il serait intéressant de présenter un
courant de pensée concurrente à celui déjà
présenté, c'est à dire l'analyse postkeynésienne de
la finance, de l'épargne et de l'investissement.
II-L'analyse post-keynésienne de la finance, de
l'épargne et de l'investissement
Dans cette sous section, nous allons présenter
l'analyse de Sodokin (2004) et celle de Poulon (2000) qui montrent chacun,
respectivement, comment les politiques traditionnelles de libéralisation
financière et les Programmes d'ajustement structurel (PAS) n'ont pas
suffit à stimuler l'investissement par la logique néoclassique
(traditionnelle) qui les fonde, dans laquelle l'épargne apparait comme
la principale source de financement de l'investissement et de la croissance.
Ainsi, nous présenterons la logique
post-keynésienne de la finance, de l'investissement et de
l'épargne. Par la suite, un modèle stock-flux de Godley et Cripp
(1985) fondé sur le canal finance-investissement-épargne (FIE)
sera présenté.
II-1-La création monétaire, l'origine
logique de tout investissement dans un monde keynésien.
D'après les post-keynésiens, la « finance
» précède l'« épargne » dans le processus
du financement de l'investissement productif. Dans ce cas, comme
l'épargne n'est qu'un résidu, la question est de savoir quelle
est la source de financement de l'investissement. Pour les keynésiens,
c'est la création monétaire par les banques qui permet de
financer l'investissement.
Pour Keynes, effectivement la création monétaire
est l'origine logique de tout investissement. Pour lui, cette situation fait
peser sur les investisseurs une contrainte d'un nouveau type : les entreprises
qui s'endettent pour investir, sont en effet soumises à une contrainte
de remboursement qui les oblige à réaliser des profits
suffisants. Si cette contrainte n'est pas satisfaite, il en résulte un
déséquilibre : c'est la crise. Le chômage et l'inflation
s'analysent donc comme une conséquence de cet état de crise.
Quant aux post-keynésienes, le système financier
fait plus que la simple intermédiation financière entre
l'épargne et l'investissement: il crée l'épargne à
travers la finance (financement initial de l'investissement) aussi bien que
l'allocation de l'épargne à travers le financement (financement
définitif de l'investissement). Ces différents rôles sont
importants dans une économie monétaire de production5
: la finance crée les moyens de paiements qui permettent aux entreprises
de mettre en oeuvre leurs décisions d'investissement, le financement
permet au système financier de contrôler l'encaisse
monétaire des agents économiques et de prévenir ainsi la
fragilité de l'ensemble du système financier.
Dans une dimension macroéconomique, la
fonctionnalité de la structure financière peut être
évaluée par la manière dont elle assure les fonctions de
la « finance » et du « financement » ; en d'autres termes
comment elle garantit financièrement une croissance économique
stable.
II-2-Le modèle stock-flux et le circuit finance-
investissement- épargne (FIE)6.
Pour la simplicité de l'exposé, les
hypothèses suivantes ont été supposées :
i) seuls les ménages épargnent. Par rapport au
fonctionnement du système financier des pays africains, nous faisons
l'hypothèse que l'épargne est composée de l'épargne
formelle et de l'épargne informelle. Le système financier est
dual mais non concurrentiel. On peut distinguer un secteur financier non
officiel (le système financier informel) et un secteur financier
officiel composé des banques au sens traditionnel du terme. Les deux
systèmes financiers fonctionnent de manière complémentaire
;
ii) l'incertitude n'a aucun effet sur les comportements de
demande des actifs financiers7. Le risque est mutualisé dans le
système financier du fait de la complémentarité entre les
deux
5 Nous définissons ici une économie
monétaire de production comme étant une économie dans
laquelle, la création de monnaie par les institutions qui en ont le
pouvoir est endogène à la demande de l'économie
6 Nous inspirons largement de la présentation
de Koffi Sodokin (2004)
7 Pour la simplicité nous supposons qu'il
existe un seul actif financier dans l'économie décrite qui est
l'encaisse monétaire.
secteurs financiers. Ce seul actif financier est
décomposé dans le cadre de ce modèle en portefeuilles
détenus par les ménages au sein des institutions de financement
informelles et formelles ;
iii) pour une question de simplicité il suppose que la
propension à consommer est égale à 50 % ;
iv) l'accumulation des ressources financières et la
dépense de ces ressources prennent du temps.
Le modèle considère un processus simple de
multiplication des revenus où l'investissement génère un
flux de revenu et suscite la consommation et l'épargne. Supposons qu'un
investissement de 50 000 francs CFA est entièrement financé par
un prêt bancaire par simple opération comptable ; c'est la
création de la « finance » ou le financement initial. Dans ce
sens, la « finance » est interprétée comme une avance
du système bancaire au secteur productif. Autrement dit, il se forme au
niveau des banques un flux de liquidités qui n'est pas puisé dans
l'épargne des ménages. On peut aussi interpréter ce flux
comme étant la monnaieflux au sens de Godley.
Cette offre additionnelle de la monnaie bancaire va
générer un processus séquentiel de paiements (salaires) et
de consommation et par conséquent un transfert de dépôt
entre les agents économiques. Si nous appelons épargne
désirée, la demande d'encaisse monétaire
(dépôt) générée le long du processus de
multiplication, chaque période, 50 % du revenu de la période
précédente sera utilisée pour acquérir de nouvelles
encaisses monétaires (Dépôt) et va permettre ainsi aux
entreprises de rembourser leur dette. C'est le financement au sens de Paul
Davidson ou le financement définitif ou encore la monnaie-stock au sens
de Godley et Cripps.
Cependant certains économistes à l'instar de
Robertson (1926) pense qu'une création monétaire par les banques
au-delà de la quantité qu'elle dispose peut être source
d'inflation et déstabilisée le secteur économique. En
outre, Bencivenga et smith (1991) montrent que le système bancaire
permet de réduire le risque de liquidité. En effet, en absence de
banque, les ménages se protègent des chocs de liquidité
par les investissements en actifs liquides mais peu productifs. Cette
inefficacité peut être considérablement réduite par
les intermédiaires financiers qui, ayant un grand nombre de
déposants, ont la capacité de mettre en commun les risques de
liquidité des épargnants et investir une part plus importante de
leurs fonds dans des projets non liquides mais plus productifs. Les
intermédiaires financiers réduisent donc une partie de
l'épargne maintenue sous forme liquide et improductive et
éliminent les liquidations
d'actifs productifs qui exercent un effet défavorable sur
la croissance. C'est dans ce cadre que le développement financier est un
levier à la croissance.
Ce chapitre avait pour objectif de recenser les débats
anciens aussi bien théoriques qu'empiriques sur la relation entre
épargne et investissement et ceux relatifs à la dimension
financière de la relation épargne-investissement.
La plupart des travaux ont été menés dans
les pays développés et ceux de l'Asie et se sont focalisés
sur la corrélation entre épargne et investissement et
l'implication pour la mobilité des capitaux. Cependant, quelques
études ont aussi tenté de déterminer la direction de
causalité entre épargne et investissement dans le cas particulier
africain (Elbadawi et Mwega, 2000 ; Agbetsiafa, 2002, Esso et Keho, 2010 ...).
Il ressort de ces études que le sens de causalité varie d'un pays
à l'autre.
La prise en compte du système financier dans
l'ajustement épargne-investissement nous a permis de mettre en
évidence l'impact du système financier dans la causalité
épargneinvestissement sur le plan théorique d'après les
théories d'inspiration néoclassique et keynesienne.
Le chapitre suivant analyse les spécificités
financières et détermine les niveaux de développement
financier des pays de l'UEMOA.
CHAPITRE II : SPECIFICITES ET NIVEAUX DE DEVELOPPEMENT
FINANCIER DES PAYS DE L'UEMOA
La plupart des travaux antérieurs empiriques pour
mesurer les différents niveaux de développement financier des
pays ont utilisé des indicateurs financiers de façon
individuelle. Etant donné que ces indicateurs captent différents
aspects du développement financier, il n'est pas optimal de les utiliser
séparament. A cet effet, on a fait recours à l'analyse en
composantes principales (ACP), pour construire un indice synthétique.
Le chapitre a pour objectif de déterminer les
différents niveaux de développement financier des pays de
l'UEMOA. Pour cela l'indice de développement financier de l'UEMOA a
permis de classer les pays suivant les performances de leurs structures
bancaires, d'une manière générale mais également
dans le temps.
Mais avant tout cela, on a présenté les
spécificités financières de la zone UEMOA. Les
spécificités financières de la zone UEMOA résident
dans l'inefficacité du système financier et les échecs
relatifs aux réformes financières.
SECTION 1 : LES SPECIFICITES DU SYSTEME FINANCIER DE
L'UEMOA
Les pays de l'UEMOA ont entamé les politiques de
libéralisation financière à partir de1989. Elles se
caractérisent par : le retrait du contrôle quantitatif du
crédit, la privatisation des institutions financières publiques,
l'introduction de mécanismes de marchés dans la gestion de la
politique de crédit (instauration de la concurrence), la création
d'un organisme de surveillance et la libéralisation des taux
d'intérêt. Ces réformes de libéralisation du
système financier visaient à augmenter l'efficacité dans
la mobilisation et l'allocation des ressources financières. Cependant,
malgré toutes ces mesures, le système financier de la zone
demeure « inefficace ». Dans cette section, il convient donc de
présenter les éléments qui montrent l'inefficacité
8 du système financier de l'UEMOA et les échecs
relatifs aux réformes financières de la zone.
8 Inefficacité est vue ici en termes
de contribution des banques au financement des activités
économiques et leur prédominance dans l'environnement
financier.
I-L'Inefficacité du système financier
Selon la littérature un système financier est
efficace lorsqu'il dispose des instruments de financement de l'investissement
diversifiés. L'inefficacité du système financier se
traduit par la prédominance des institutions financières
bancaires qui n'offrent pas de services de qualité alors qu'elles
perçoivent de leurs clients des commissions, agios et
intéréts excessifs. Elles ne ressemblent méme pas à
des caisses d'épargne car elles n'assurent pas bien leur rôle de
gardiennes des épargnes des populations surtout les plus
vulnérables. Ces banques sont l'expression et le lieu où se
manifeste la discrimination entre les riches et les pauvres dont l'accès
est interdit à ces derniers. Bref, elles ne contribuent pas à la
croissance économique des pays de la zone UEMOA. En plus de cela on a la
mauvaise allocation des ressources bancaires et le poids important du secteur
public et le développement du système financier informel.
I-1-La prédominance des institutions
financières bancaires
En zone UEMOA, le système bancaire y est
prédominant puisque les institutions nonbancaires sont peu nombreuses,
voire inexistantes. La bourse des valeurs mobilières de la zone est
toujours à l'état embryonnaire. Dans ces conditions, les banques
sont les principaux intermédiaires dans le financement des
activités nationales et assurent la transformation des ressources de
court terme en emplois de long terme. Par exemple au 31 décembre 2009,
la zone comptait 118 établissements de crédits dont 99 banques et
19 établissements financiers (rapport commission bancaire, 2009).
Des compagnies d'assurance existent dans la zone mais leur
représentation dans le système financier reste marginale. En
effet, la plupart du financement des investissements est assurée par les
banques. A titre illustratif, en 2009 les crédits bancaires
s'élevaient à 421,9 milliards sur un total d'environ 500
milliards de FCFA dont 387,6 milliards au secteur privé et 34,3
milliards au secteur public.
Les institutions de microfinance (IMF) ont connu
également une évolution importante dans le financement des
activités. Elles sont passées de 150 en 1994, à 400 en
2000 et à plus de 750 institutions en 2007. Les IMF ont
réalisé d'importants efforts dans la couverture des populations.
En 1993, à peine 400 milles personnes bénéficiaient des
services des IMF dans l'UEMOA. Ce nombre a véritablement
progressé pour atteindre 2,5 millions en 2000 à 5 millions en
2007. Au titre d'intermédiation financière, les crédits
accordés qui étaient de 25
milliards de FCFA en 1994 dépassaient 100 milliards en
2000 pour s'établir à près de 400 milliards en fin 2007.
Quant aux dépôts, le volume collecté reste faible, il ne
représentait que 1,5% du PIB au Benin, 0,3% en Côte d'Ivoire et
0,6% au Mali9.
En outre le réseau bancaire de l'Union demeure
oligopolistique. Dans le rapport annuel 2006, de la commission bancaire de
l'UEMOA, on notait que « les principaux groupes
(étrangers10 ) contrôlaient 34
établissements de crédits installés dans la
quasi-totalité des pays de l'Union. Ils représentent 51,5% de
part de marché, 39,4% du réseau bancaire, cumulent 47,1% des
effectifs et 40,5% des comptes ouverts à la clientèle
»11.
I-2-Un système financier qualifié de
« réprimé »
Malgré la libéralisation financière
entamée depuis les années 1990, le système financier de
l'UEMOA peut être toujours qualifié de réprimé: par
sa faible mobilisation des ressources, de fortes pertes de crédits, des
coüts d'intermédiation élevés et d'excessives
ingérences politiques. Les institutions financières de la zone
sont très peu exposées à la concurrence12 et
évoluent dans un climat d'oligopole, ce qui n'incite pas ces
dernières à rechercher l'efficacité financière. Par
exemple le spread du taux d'intérêt moyen annuel est passé
de 3,11% en 2008 à 3,18% en 2010. Somme toute, les banques financent peu
l'investissement des entreprises et collectent faiblement l'épargne.
Elles ont un rôle négligeable dans la promotion du
développement et constituent un frein à la
croissance13.
En plus de cela, on peut ajouter les différentes
barrières à l'entrée sur le marché bancaire qui
constituent aussi un phénomène non négligeable. Les
conditions d'ouvertures de banque dans l'espace UEMOA ont continuées
à s'alourdir malgré la libéralisation entamée
depuis 1989. A titre illustratif, en 1989 pour ouvrir une banque au Burkina, il
fallait disposer un montant minimum de 50 millions mais en 2011 ce montant
s'élève à 10 milliards.
Les politiques publiques (régimes des
propriétés, taux d'intérêt, orientation
sélective des crédits, lourdeurs de la fiscalité, etc.)
ont également affaibli les systèmes financiers. Tout d'abord, les
pouvoirs publics ont beaucoup intervenus dans la gestion des banques aussi
publiques que privées. Ensuite, les banques ont continué de
financer les déficits de
9 Banque de données sur les Systèmes
financiers Décentralisés 2007, UEMOA
10 Il s'agit, entre autre, de:
Société Générale, Ecobank, BNP Paribas, Bank Of
Africa, Atlantique Financial Group et Calyon
11 Rapport annuel de la Commission Bancaire de l'UEMOA
(2006), p.26
12 « Plus de 60% des actifs du système bancaires sont
détenus par quatre banques tout au plus »Popiel (1995, p39)
13Cité par Chouchane-Verdier (2001)
l'administration et des entreprises publiques. Elles sont le
prolongement du budget et la forte proportion du crédit intérieur
accordée au secteur public évince le secteur privé. Les
crédits aux entreprises privées ne sont pas
systématiquement examinés et les procédures d'allocation
des crédits laissent à désirer: il y a la question des
garanties qui, de fois dépassent le montant sollicité. Par
exemple de 2008 à 2009 les crédits bancaires accordés au
secteur public de l'UEMOA sont passés en moyenne de 21,7 milliards
à 19,5 milliards.
En somme, malgré la prédominance du
système bancaire dans l'environnement financier leur part dans le
financement des activités économiques demeure faible car elle
reste inférieure à 10% du PIB de l'Union. Ce qui amène une
plus grande partie de la population à se tourner vers la
microfinance.
I-3-Le dualisme financier
Les systèmes financiers des pays en
développement se caractérisent de façon
générale par leur dualisme, marqué par l'existence deux
secteurs financiers : formel et semi-formel ou informel.
Le système formel est celui des banques et des
intermédiaires financiers agréés. Dans la plupart des pays
en développement et notamment ceux de l'UEMOA, il y a un sous
développement évident du système financier formel. Les
pays d'Afrique subsaharienne ont un désavantage par rapport à
d'autres pays du Tiers-Monde en ce qui concerne l'état de
développement de leurs institutions financières formelles. Alors
que les économies en développement d'Amérique Latine et
d'Asie montrent des taux de densité bancaire de 8000 à 30 milles
habitants par succursale bancaire, les taux de l'Afrique subsaharienne sont de
l'ordre de 100 milles à 420 milles habitants par succursale bancaire
Soulama (2005). Cette situation favorise le développement d'un
système informel d'une part et d'un système financier
semi-formel, appelé aussi système financier
décentralisé d'autre part.
Le système informel peut être défini comme
un ensemble d'activités financières se déroulant en dehors
de toute réglementation ou supervision des autorités
monétaires et financières. Ses caractéristiques
distinctives sont : la prédominance des transactions en espèces,
l'absence d'enregistrement et de réglementation, une échelle
restreinte des opérations, la facilité
d'entrée, l'échange d'actifs hors des cadres
juridiques, un fonctionnement qui s'appuie sur des relations personnelles ou
sur des solidarités communautaires14.
Le système financier décentralisé est
constitué d'intermédiaires financiers légaux et
formalisés, parfois établis comme institutions financières
à part entière ayant pour vocation de collecter l'épargne
et/ou de faire du crédit aux micro-entreprises et aux ménages
exclus du système financier officiel, et en utilisation des techniques
inspirées de celles mises en oeuvre par la finance informelle.
Les deux dernières catégories, peuvent
être regroupées dans une catégorie plus large, celle de la
microfinance. Dans les pays de la zone Franc et en particulier de l'UEMOA, le
système financier se caractérise par le fonctionnement
parallèle des deux systèmes financiers: la finance formelle et la
microfinance. C'est ainsi que le système financier est qualifié
de dual.
Selon les théoriciens de la libéralisation
financière, la présence d'un secteur informel à
côté d'un secteur formel serait la conséquence de
l'inefficacité du secteur financier formel. Cette inefficacité
est due en grande partie à la rigidité du secteur formel et
l'omniprésence des pouvoirs publics, principalement en matière de
fixation des taux d'intérêt, au niveau des institutions du secteur
formel, empêchant celles-ci de s'adapter aux conditions
spécifiques de l'économie des pays en développement. La
finance informelle est le signe du sousdéveloppement financier de ces
pays.
Selon les structuralistes, par contre, l'une des causes du
dualisme financier est la complémentarité intrinsèque des
structures économiques et sociales et l'attachement de la population aux
valeurs et coutumes traditionnelles15. Ils ajoutent que
l'accès aux crédits bancaires, difficil pour les petites
entreprises du secteur informel qui ne possèdent pas les garanties
nécessaires, favorisent l'émergence des tontines.
Les caractéristiques des économies de l'UEMOA
permettent d'expliquer le développement important de la finance
informelle. Le secteur informel apparait comme une panacée car il est
basé sur la confiance et la solidarité. Par exemple le volume des
dépôts collectés par les institutions de microfinance a
augmenté de 175% entre 1996 et 2000 (UEMOA, 2002). Cette forte
croissance du volume des dépôts s'accompagne aussi d'une hausse
similaire du volume
14Cité par Soulama S. (2005) «
Microfinance pauvreté et développement », éditions
des archives contemporaines, Agence Université de la Francophonie.
15Rappelons que ce courant de pensée
soutient l'idée selon laquelle l'économie des pays en
développement se caractérise par la coexistence de deux secteurs
distincts : un secteur moderne capitaliste et urbain et un secteur traditionnel
non capitaliste et rural.
des crédits (168%) et du taux de
pénétration, c'est-à-dire de la proportion de la
clientèle bénéficiaire des services des institutions de
microfinance par rapport à l'ensemble des ménages, de plus de
200%. Ces résultats font des institutions de microfinance des
opérateurs économiques performants et une alternative au secteur
bancaire dans la fonction d'intermédiation Lelart (2002).
A côté de cet inventaire des causes du dualisme
financier qui caractérise le système financier de l'UEMOA, il est
tout aussi important de s'interroger sur les voies et moyens visant à sa
réduction ou à sa suppression puisque ce dualisme financier peut
avoir un impact négatif sur le développement par ses effets sur
le processus d'accumulation et de répartition des ressources des pays en
développement et donc sur le taux de croissance. En effet le dualisme
financier introduit des distorsions sectorielles et régionales entre la
collecte de l'épargne et son affectation (l'épargne rurale
drainée vers les centres urbains). Il entrave également la
poursuite par les pouvoirs publics de politiques économique
monétaire et financière cohérentes en raison de la
méconnaissance des agrégats économiques. Par nature, le
secteur financier informel échappe aux différents impôts,
tandis qu'il est difficile d'identifier les sources de création
monétaire et de fixer des objectifs monétaires dans les
structures dualistes.
En définitive, l'environnement financier de l'UEMOA est
particulier. Il est non seulement segmenté mais aussi fragmenté,
dans la mesure où le secteur formel et informel évoluent et
fonctionnent séparément et s'adressent à des
catégories particulières de clients. Les banques ne s'adressant
uniquement qu'aux secteurs formels et les institutions informelles du fait de
leur proximité financent un type particulier de clients exclus du
système formel et menant des activités dans les secteurs agricole
et informel.
La libéralisation financière entamée
depuis les années 1990 par les pays de l'UEMOA, a eu pour objectif
global la réduction du coüt d'intermédiation
financière et l'augmentation de l'épargne par la hausse des taux
d'intérêt et son allocation à l'investissement, n'a pas
été atteinte. La réussite d'une telle politique peut
être évaluée à travers ses objectifs. Ainsi quel
bilan peut-on faire de la libéralisation financière des pays de
la zone UEMOA?
II-Les échecs relatifs des politiques de
libéralisation financière
Sous l'égide des grandes institutions internationales,
les pays de l'UEMOA ont entrepris des programmes de libéralisation
financière à partir de 1989. S'appuyant sur les
thèses néolibérales de McKinnon (1973) et Shaw (1973)
selon lesquelles, dans le cadre d'une
économie financièrement réprimée,
la fixation des taux d'intérêt en dessous de leur valeur
d'équilibre : i) réduit l'épargne au profit de la
consommation courante; ii) fixe l'investissement en dessous de son niveau
optimal; iii) détériore la qualité des investissements
réalisés dans la mesure où les banques seront
obligées de financer des projets liés à des secteurs
à faibles rendements tels que le secteur agricole ou encore
l'immobilier, etc. De méme, la libéralisation du secteur
financier peut accroître l'intermédiation bancaire. Cet
accroissement de l'activité bancaire peut entraîner la
réduction des frais d'intermédiation entre prêteurs et
emprunteurs grace à la réalisation d'économies
d'échelle, la facilité de l'accès des emprunteurs aux
fonds prêtables et enfin la diversification du risque.
Après plus de deux décennies d'ajustement et de
réformes, les résultats restent en deçà des
attentes théoriques. Les échecs relatifs aux réformes
financières en zone UEMOA qui se traduisent par la faiblesse de
l'épargne mobilisée, le problème de la surliquidité
du système bancaire et la volatilité des spreads des taux
bancaires sont présentés dans ce point.
II-1- La faiblesse de l'épargne
mobilisée
Les defenseurs de la libéralisation financière
ont prévu que la déréglementation et la
libéralisation financière entraineraient une augmentation
significative de l'épargne nationale grace à l'augmentation
conséquente du nombre d'institutions financières, de la gamme des
instruments financiers et de la qualité de la réglementation et
de la supervision bancaire. Ainsi, la libéralisation financière
entamée par les gouvernements des pays de l'UEMOA depuis les
années 1989, avait pour ambition d'augmenter l'épargne.
Malgré ces réformes, le taux moyen d'épargne nationale de
la région est resté faible par rapport aux autres régions
économiques du monde en développement. Le tableau 1 illustre
l'évolution du taux d'épargne de la zone UEMOA comparativement
aux autres régions des pays en développement.
Tableau 1 Taux moyens d'épargne en
1985, 1995,2000 et 2005(en % du PIB).
Année
|
1989
|
1995
|
2000
|
2005
|
UEMOA
|
5,825
|
9,618
|
7,004
|
9,732
|
Afrique subsaharienne
|
19,810
|
16,047
|
19,398
|
18,259
|
Asie du sud
|
19,810
|
22,962
|
22,266
|
26,888
|
Asie orientale et les pays du pacifique
|
33,959
|
39,634
|
35,815
|
43,002
|
Amérique Latine et Caribéen
|
24,922
|
19,120
|
18,968
|
22,264
|
Source: WDI, 2008
|
|
|
|
|
En observant le tableau ci-dessus, on constate que la
libéralisation financière n'a pas permis une évolution
significative de l'épargne nationale de la zone UEMOA. Le taux
d'épargne
de la zone est resté en dessous de 10% et inferieur
à ceux du reste de l'Afrique subsaharienne, d'Asie du sud, d'Asie
orientale et d'Amérique Latine (tableau 1). Cette faiblesse de
l'épargne intérieure semble être à l'origine du
retard de développement économique de la zone par rapport aux
autres régions en développement. L'épargne
intérieure reste pour toute économie un élément
important au moins pour deux raisons : D'une part elle permet de réduire
la dépendance vis-à-vis de l'extérieur, et d'assurer
croissance durable au moyen d'investissements continus. En effet, la
création et le développement des entreprises nécessitent
un investissement. Toutefois, celui-ci ne pourra guère se faire sans une
mobilisation des ressources. Cette faiblesse de l'épargne
intérieure explique les faibles progrès économiques de la
zone UEMOA et la rendant davantage extravertie.
En plus la faiblesse de l'épargne est associée
à une surliquidité du système bancaire, qui est devenue
une préoccupation majeure dans l'UEMOA, à un moment où la
demande de crédits est loin d'être satisfaite.
II-2-Le problème de la surliquidité du
système bancaire
Les systèmes bancaires de l'UEMOA ont connu à
partir du milieu des années 80 deux principales réformes : l'une
liée à la restructuration des établissements bancaires, et
l'autre au changement de politique monétaire. S'inscrivant dans un
contexte de libéralisation financière, ces réformes
avaient pour objectif de restaurer la liquidité des banques
sinistrées par la crise bancaire des années 1989 et de permettre
un meilleur financement de l'économie. Si le premier objectif a
été atteint, le deuxième à l'évidence reste
loin des ambitions des réformateurs. Un des effets de la
libéralisation financière a été de produire un
excès de liquidités du système bancaire. Ce
phénomène, apparu au milieu des années 1990, souligne
l'existence d'un problème d'adéquation entre l'offre et la
demande de crédit en Afrique subsaharienne.
Dans la zone UEMOA, la surliquidité du système
bancaire peut être observée à travers le niveau de ces
réserves excédentaires 16 . Ce qui permet
d'apprécier l'importance de la surliquidité constituée par
les banques (tableau 2), même si cela connait une baisse depuis 2005,
elle demeure non négligeable. Cependant, cette mesure néglige une
partie de la surliquidité que les banques pourraient conserver
elles-mémes. Si l'on retient dans le contexte de l'UEMOA, elle montre
sans conteste la surliquidité de son système bancaire.
16 Il s'agit des réserves
constituées par les banques dans les comptes de la BCEAO hormis les
réserves obligatoires.
Tableau 2 : Evolution des Réserves
Excédentaires (RE) de l'UEMOA
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Année
R.E en milliards de FCFA
288 233 391 418 478 360 205
Source : Rapports Annuels de la Zone franc
2003-2006.
Les crédits accordés par les banques sont
effectivement inférieurs aux dépôts (131,4% en 2003) dans
l'ensemble des pays membres de l'UEMOA (tableau 3). Ce qui signifie qu'elles
ont globalement une préférence pour la liquidité.
Tableau 3 : Ratio dépôts /crédits
accordés aux pays de l'UEMOA (en %)
Année Benin Burkina Côte Mali Niger
Sénégal Togo UEMOA
Faso d'Ivoire
2002
|
172,9
|
120,1
|
100,5
|
123,4
|
125,9
|
123,8
|
139
|
109,5
|
2003
|
137,8
|
120,8
|
102,3
|
125,9
|
126,8
|
131,5
|
131,5
|
131,4
|
2004
|
138,9
|
116,7
|
102
|
122,4
|
131,3
|
135,5
|
129,4
|
109,3
|
Source : Construit par l'auteur à partir des
données de la BCEAO
Cependant, même si Éboué (1998) attribue
la surliquidité au manque d'opportunités d'investissement dans le
secteur privé et au comportement passif des banques, on peut retenir
quelques facteurs qui permettent d'expliquer cet état de fait : la
préférence pour les banques à financer le court terme et
la nature des dépôts auprès du système bancaire.
Les graphiques 1 et 2 permettent d'avoir une idée sur
la surliquidité bancaire de la zone. En effet le système bancaire
ne disposant que des dépôts majoritairement à vue, et dans
un environnement d'asymétrie information ne peut que se contenter du
financement des activités de court terme.
Graphique 1: Crédits à
l'économie ventilés selon leur durée initiale(en milliards
de FCFA)
![](Developpement-financier-et-causalite-entre-epargne-et-investissement-en-zone-UEMOA-Union-Economi9.png)
Milliards de FCFA
4000
2000
6000
8000
0
Crédit a l'economie ventilée selon leur
durée
Années
crédit
crédit à court terme
crédit à moyen et long terme
Source : Construit par l'auteur à partir des
données de la BCEAO
Ainsi, de façon générale les banques de
la zone UEMOA manquent de capitaux de long terme. Ce qui fait qu'aujourd'hui
ces institutions éprouvent des difficultés à convertir
leurs liquidités en des projets risqués,
précisément le financement des activités du secteur
informel.
Graphique 2: Structure des dépôts
du secteur bancaire de la zone UEMOA (en milliards de FCFA).
Structure des dépots du secteur bancaire de la
zone UEMOA de 2006 à 2009
Milliards de FCFA
|
5000 4000 3000 2000 1000 0
|
|
Depot à vue Depot à terme
|
![](Developpement-financier-et-causalite-entre-epargne-et-investissement-en-zone-UEMOA-Union-Economi11.png)
Années
Source : construit par l'auteur à partir des
données de la BCEAO
En plus de ces principales causes de la surliquidité
bancaire, on peut aussi noter l'afflux important des capitaux. En effet, le
système bancaire étant favorable au financement des entreprises
tournées vers l'extérieur, celles-ci se sont
développées et ont plus ou moins contribué à
l'augmentation de la liquidité d'ensemble de la zone à travers le
commerce extérieur et en fonction de l'environnement international
(cours des matières premières et cours des monnaies de cotation
de ces matières). En outre, les transferts des émigrés
constituent une part importante aussi des entrées de capitaux (environ
400 milliards en 2007 au Sénégal17).
En somme, il est évident que la surliquidité du
système bancaire de l'UEMOA constitue un obstacle important à
l'activité économique. Depuis 2003, son recyclage est
amorcé. Il est essentiellement imputable aux recours des États
à l'endettement interne à travers les émissions des bons
du trésor et d'emprunts obligataires. La question du financement des
entreprises, particulièrement les PME et du secteur agricole, reste donc
entière.
Pour les théories de la libéralisation
financière, le désengagement du gouvernement du
secteur financier permettra une concurrence accrue qui aura pour
conséquence l'harmonisation des
17 Source : UEMOA, 2009
taux d'intérêt, mais également la
réduction de la marge bancaire. Qu'en est-il de la zone UEMOA ?
II-3-La volatilité des spreads des taux
bancaires
Les théories de la libéralisation
financière prévoyaient aussi que, l'écart entre les taux
d'intérêt débiteur et créditeur augmentera
légèrement dans les premiers temps d'instauration des
réformes, de façon à ce que les banques s'adaptent aux
lois du marché. A terme, la concurrence accrue entre les banques doit
entraîner non seulement l'harmonisation des taux d'intérêt,
mais aussi la réduction de la marge bancaire. En effet, en situation de
concurrence pure et parfaite, les forces du marché conduisent à
l'égalisation des taux d'intérêt créditeur et
débiteur. Autrement dit, la marge bancaire est nulle.
Dans la zone UEMOA, la libéralisation financière
a entrainé une augmentation considérable des spreads de
taux bancaires. Ces marges demeurent encore relativement élevées
et ce contrairement aux prédictions de la théorie
économique. En effet, la politique de la libéralisation avait
pour principal objectif l'augmentation des taux d'intérêt et
l'égalisation des taux créditeur et débiteur par le biais
d'une concurrence accrue. Mais force est de constater que, la
libéralisation des taux d'intérêt n'a pas eu les effets
désirés et qu'elle a entraîné une phase
d'instabilité sur les marchés du crédit. Les marges
bancaires se sont accrues mais ont tendance à varier très
fortement.
Le graphique 3 indique l'évolution des spreads des taux
dans les pays de l'UEMOA au cours de la période 2006-2010. On remarque
sur le graphique que de façon générale les spreads des
taux ont continué à augmenter malgré la
libéralisation entamée depuis les années 1990 et que dans
les pays économiquement faibles de la zone, les spreads sont
élevés (par exemple la Guinée-Bissau) par rapport aux pays
développés de la zone (exemple : le Sénégal) et de
l'Union. Cet état de fait peut être expliqué par le fait
que la libéralisation a permis la constitution d'oligopole sur le
marché Bancaire de la zone ( quelques grandes structures bancaires
détiennent l'essentiel des parts de marché) mais aussi la
présence de l'asymétrie informationnelle qui a entrainé
une augmentation de la prime de risque.
Graphique 3: Evolution des spreads en zone
UEMOA sur la période 2006-2010.
![](Developpement-financier-et-causalite-entre-epargne-et-investissement-en-zone-UEMOA-Union-Economi12.png)
en%
15
10
0
5
Spreads dans la zone BCEAO en % 2006-2010
Pays
année 2006 2007 2008 2009 2010
Source : calcul de l'auteur à partir des
données de la BCEAO.
En résumé méme si la
libéralisation financière a entrainé l'augmentation du
nombre des structures bancaires, elle n'a pas permis la réalisation des
objectifs escomptés. Elle a plutôt entrainé un
développement inégal des structures financières de la
zone. Par exemple la Côte d'Ivoire détient
19,59%18 des banques agrées de la zone contre 4,12%
pour la Guinée-Bissau.
La section suivante a pour objectif principal l'évaluation
empirique de l'hétérogénéité
financière de la zone.
SECTION 2 : EVALUATION DES NIVEAUX DE DEVELOPPEMENT
FINANCIER DES PAYS DE L'UEMOA
Cette section a pour objectif de déterminer les
différents niveaux de développement financier des pays de
l'UEMOA. Ainsi, nous classerons les pays à travers leur niveau de
développement financier ; ce qui permettra de montrer la dispersion des
niveaux du développement financier. L'effectivité de cette
classification sera testée dans le chapitre suivant par la
causalité épargne-investissement en prenant le crédit
bancaire comme variable intermittente. Ainsi, un système financier sera
développé lorsqu'il est source de croissance c'est-à-dire
qu'il permet à l'épargne domestique de financer l'investissement
domestique.
L'indice financier de chacun des pays de l'UEMOA repose sur
trois indicateurs de développement bancaire utilisés dans la
littérature financière. On s'inspire de l'étude de
Beck,
18 Rapport Annuel de la Commission Bancaire2009
Demirgùç-Kunt et Levine (1997) et de Beck,
Demirgùç-Kunt (2009) pour le choix des indicateurs de mesure de
profondeur, d'activité et de l'efficacité financière.
L'indice du développement financier sera
généré par la méthode statistique standard de
calcul d'indice composite. Les indicateurs de développement financier
retenus sont essentiellement bancaires et ce choix s'explique aisément
par le fait que le marché financier de l'UEMOA est faiblement encore
développé.
I-Les préalables à la construction de
l'indice du développement financier
Dans cette sous partie, nous allons présenter les
préalables à la construction de l'indice financier, ensuite, les
indicateurs du développement financier qui seront utilisés dans
la construction de l'indice synthétique en s'inspirant des études
de Bandiera et al. (2000) ; Chouchane-Verdier (2001) et Greenidge et al.
(2004).
I-1-Définition d'un système financier
développé
Avant de construire l'indice du développement financier
il est important de savoir ce qu'est un système financier
développé selon la littérature financière. Ainsi,
Turunç (1999) dans son analyse dissocie le concept de
développement financier exogène et de développement
financier endogène. Pour lui, un système financier est dit
développé si et seulement s'il assure le fonctionnement d'un
système de paiement efficace et évolutif, mobilise
l'épargne et améliore son affectation à
l'investissement.
Department for International Development (2004)
révèle qu'il n'existe pas de définition admise en ce qui
concerne l'appréhension du concept de développement du secteur
financier. Toutefois, il souligne qu'un un secteur est dit
financièrement développé si l'on a les déterminants
suivants : les niveaux d'efficience et de compétitivité sont
améliorés, le taux des services financiers disponibles
s'accroît, une augmentation des institutions financières qui
oeuvrent dans le secteur, un accroissement du montant de liquidité
disponible à travers le secteur financier, une augmentation de
l'allocation des crédits privés, une amélioration de la
régulation et de la stabilité du secteur financier et un aspect
important pour la réduction de la pauvreté, et le fait qu'une
grande partie de la population peut davantage avoir accès aux services
financiers.
Pour Ang et Mckibbin (2005), un système est dit
financièrement développé s'il est en mesure d'assurer
la mobilisation de l'épargne privée, l'allocation efficiente des
ressources, le
renforcement de la liquidité, la diversification des
risques, la réduction des coûts de l'information et de
transaction, la proposition d'une alternative ou le rassemblement des fonds
à travers l'épargne individuelle des ménages et des
bénéfices non distribués des entreprises.
D'autres auteurs ont utilisé des critères tels
que le taux des réserves obligatoires, le taux d'intérêt et
le crédit rationné ou alloué pour définir un
système financier réprimé contrairement au système
financier développé McKinnon (19973) et Shaw (1973). C'est ainsi
que Demirgùç-Kunt et Levine (1996)19 ont
retenus sept indicateurs moyens en s'intéressant à 44 pays
développés ou en développement. Seuls l'Afrique du sud, le
Nigeria et le Zimbabwe du continent africain ont été pris en
compte. Toutefois, les indicateurs qu'ils utilisent ne sont
généralement pas disponibles, ni applicables au cas de l'Afrique
et de l'UEMOA en particulier, eu égard la faiblesse du système
financier.
Les critères macroéconomiques permettant de
mesurer l'efficacité du système bancaire ont souvent
été généralement classés en trois
catégories : les dépôts, les crédits et les taux
d'intérêts. La monétisation et le volume de
l'intermédiation ainsi que le développement du système
formel par rapport à l'informel sont évalués par
l'importance des dépôts bancaires. Elle donne une idée de
la confiance accordée aux banques. Dans la zone UEMOA cet indicateur est
à considérer avec prudence car la surliquidité de la zone
indique que le système bancaire accorde peu de crédits. Les
crédits bancaires sont supposés être source de croissance
économique car ils financent les investissements privés et
publics. Les effets sur la croissance, dès lors, doivent être
revisités. Les taux d'intérêts donnent une indication sur
le niveau de rentabilité du système qui, est élevé
lorsque les spreads sont élevés. Par contre, la réduction
des marges bancaires renvoie à un degré élevé de
concurrence entre les institutions bancaires20.
Nous construirons notre indicateur de développement
financier en retenant les indicateurs les plus utilisés dans la
littérature financière. Les indicateurs retenus sont
essentiellement bancaires et quantitatifs du fait que le système
financier de la zone UEMOA est dominé par les banques. Le choix de ces
indicateurs est aussi influencé par leur disponibilité en longue
période.
19 Beck T., Demirgùç-Kunt A.,et
R.Levine (1996) : « stock markets, corporate finance and economic growth
:an overview >,the World Bank Economic Review,vol.10,no2.
20 Cité dans Choucane-Verdier (2001) «
libéralisation financière et croissance économique: le cas
de l'Afrique subsaharienne >, édition Harmattan.
I-2- Les indicateurs de développement financier
retenus en zone UEMOA
Les indicateurs de développement financier retenus sont
ceux qui mesurent essentiellement la profondeur et l'efficacité de
l'activité des intermédiaires financiers. Nous pensons que ces
indicateurs sont pertinents pour les pays de l'UEMOA car les banques
commerciales assurent presque la totalité des financements externes. Par
souci d'harmonisation, les données ont toutes été
tirées de la Banque Mondiale (WDI, 2010). Ces données
couvrent la période de 1977 à 2008 pour les sept pays de
l'UEMOA21. Pour mesurer le niveau de développement des
intermédiaires financiers, trois indicateurs bancaires ont
été pris en considération22 :
i) les actifs liquides du système financier en proportion
du PIB c'est à dire le ratio de la masse monétaire M2 sur le PIB,
notée LLPIB ;
ii) le ratio des crédits domestiques fournis par le
secteur bancaire par rapport au PIB, noté LDCBS ;
iii) et le crédit accordé au secteur privé
par les banques commerciales et les autres institutions financières
rapporté au PIB, noté LDCPS.
Les trois indicateurs ont été pris sous forme
logarithme népérien.
Les actifs liquides du système financier (monnaie
fiduciaire + dettes financières des banques et autres institutions
financières) en proportion du PIB regroupent la taille de l'ensemble du
système financier relativement à la taille de l'économie.
C'est également un indicateur de profondeur financière et une
mesure de la taille du secteur financier formel d'intermédiation
financière au sens large par rapport à la taille de
l'économie (Banque centrale, banques commerciales et autres institutions
financières). Cet indicateur a été utilisé de
manière fréquente dans la littérature financière
par des auteurs comme McKinnon (1973) ; King et Levine (1993) ; Beck et al.
(1999) ; Levine et al. (2000). Ils montrent que le système financier
(mesuré par M2/PIB en fonction de sa taille moyenne ou initiale) est
lié au taux de croissance via les canaux « volume des
investissements » et « l'efficacité des investissements
». On anticipe qu'il est positivement lié à la
qualité et au niveau des services financiers offerts par les
intermédiaires financiers.
21 Sept de l'UEMOA car la Guinée Bissau n'a pas
été prise en compte dans nos analyse à cause de la non
disponibilité des données.
22 Nous insistons sur le fait que le choix
des indicateurs a été fortement contraint par la
disponibilité des données sur l'ensemble de la période et
pour l'ensemble des pays.
Ensuite, le crédit intérieur fourni par le
secteur bancaire inclut tous les crédits alloués aux
différents secteurs de l'économie sur une base brute, à
l'exception du crédit au gouvernement qui est net. Il peut donner une
indication sur le degré selon lequel le secteur bancaire formel joue un
rôle dans les pays de l'UEMOA. Toutefois, la simple mesure de la part des
crédits domestiques dans le PIB ne permet pas d'avoir une indication
complète et une idée plus claire sur le développement du
secteur financier. Il convient alors d'analyser la composition méme des
crédits domestiques.
Enfin, le dernier indicateur financier mesure
l'activité des intermédiaires financiers sous l'aspect de l'une
de leurs fonctions principales : canaliser l'épargne vers les
investisseurs. Le principal avantage de cet indicateur est qu'il exclut le
crédit accordé au secteur public. Il présente plus
précisément le rôle des intermédiaires financiers
dans la transmission des fonds vers les participants du marché. Ainsi,
c'est la définition de l'intermédiation financière qui la
rapproche le plus du niveau et de l'efficience de l'investissement, et donc de
la croissance économique. Dans les pays en développement, le
développement financier se produit à travers le système
bancaire. Par conséquent, dans ces pays, le crédit au secteur
privé est un meilleur indicateur de développement financier.
Cependant, il ne prend pas en compte les crédits obtenus en dehors du
système bancaire ou les crédits des entreprises qui se portent
directement emprunteurs à l'étranger. Il a été
utilisé pour la première fois par Levine et Zevros (1998) et la
seconde fois par Beck et al. (1999).
En résumé, ces indicateurs s'avèrent
pertinents pour mesurer la profondeur financière et l'activité
des intermédiaires financiers dans la zone UEMOA. D'abord parce que le
ratio de liquidité permet de prendre en compte les moyens de paiements
disponible dans l'économie et enfin le ratio crédits domestiques
fournis par le secteur bancaire par rapport au PIB et le ratio crédit
accordé au secteur privé sur le PIB permettent de mesurer le
rôle des banques dans le financement des activités
économiques eu égard au fait que le système financier est
dominé par les banques. Mais notre indicateur présente une
faiblesse car il ne prend pas en compte le circuit informel portant
développé dans la zone UEMOA.
II-Les niveaux de développement financier des pays
de l'UEMOA : le résultat de l'indice financier
Il s'agit ici de présenter d'abord la méthode
d'analyse en composantes principales qui a permet de générer les
indices financier et de catégoriser les pays de l'UEMOA en termes de
développement financier.
II-1-Mesure de développement financier :
l'analyse en composantes principales (ACP)
Le tableau d'analyse des corrélations (voire annexe
A-1) montre que les trois indicateurs de développement financier sont
fortement corrélés dans la plupart des pays. Ainsi, on peut donc
utiliser l'analyse en composantes principales pour les réduire en un
seul indice qui permet de capturer la plupart des informations initiales.
L'ACP est une méthode de représentation
géométrique des individus et des caractères. Les
caractères principaux doivent être complémentaires et
indépendants au sens de l'information. Elle permet donc de quantifier
l'importance relative de leurs différents déterminants. Son but
est d'obtenir une représentation des individus dans un espace de
dimension réduite. Il faut donc déterminer les axes qui prennent
mieux en compte la dispersion du nuage. Ce sont les axes factoriels qui
permettent au mieux de représenter les points du nuage. L'ACP remplace
les caractères initiaux par des caractères non
corrélés de variance maximale et d'importance
décroissante. Les axes factoriels sont les vecteurs propres de la
matrice associée aux valeurs propres. Les variances d'une composante
principale sont les valeurs propres. Ici, ce qui nous intéresse est de
savoir de combien la variance totale est expliquée par la
première composante principale. Plus elle l'expliquera, plus la
confiance en notre indicateur composite sera grande.
Le tableau 4 résume les résultats de l'ACP
effectués pour chacun des pays de l'UEMOA. La colonne valeur propre
indique les valeurs calculées. La troisième colonne donne la
proportion de la variance expliquée par la première, la
deuxième et la troisième composante principale. Enfin, la colonne
de vecteur propre1 étale le vecteur propre correspondant à la
première valeur propre. L'indice de développement financier sera
obtenu par la pondération de ces vecteurs propres.
Tableau 4 : Résultats d'analyse en
composantes principales
Pays
|
Valeurs propres
|
Proportion de la variance
|
Vecteur propre1
|
1ere
|
2e
|
3e
|
1ere
|
2e
|
3e
|
LDCBS
|
LDCPS
|
LLPIB
|
Bénin
|
2,135
|
0,709
|
0,154
|
0,711
|
0,236
|
0,051
|
-0,640
|
-0,617
|
0,456
|
Burkina Faso
|
2,145
|
0,825
|
0,029
|
0,715
|
0,275
|
0,009
|
-0,363
|
0,659
|
0,658
|
Côte d'Ivoire
|
2,629
|
0,315
|
0,055
|
0,876
|
0,105
|
0,018
|
-0,581
|
-0,601
|
-0,547
|
Mali
|
2,098
|
0,814
|
0,0873
|
0,704
|
0,271
|
0,029
|
-0,673
|
-0,537
|
0,506
|
Niger
|
2,392
|
0,379
|
0,228
|
0,797
|
0,126
|
0,076
|
-0,586
|
-0,589
|
-0,555
|
Sénégal
|
1,909
|
1,063
|
0,027
|
0,636
|
0,354
|
0,009
|
0,711
|
0,699
|
-0,063
|
Togo
|
2,714
|
0,284
|
0,001
|
0,905
|
0,095
|
0,000
|
-0,542
|
-0,594
|
-0,593
|
Source : Calculs de l'auteur à partir de WDI,
2010
Les valeurs propres indiquent (tableau 4) que la
première composante explique plus de 70% (excepté pour le
Sénégal 63,6%) la variance totale de l'indicateur composite
étudié. La première composante est calculée comme
combinaison linéaire des trois indicateurs de développement
financier avec des poids donnés par le premier vecteur propre. Ainsi, la
première composante principale traduit mieux le niveau de
développement financier, car elle est en mesure de capturer plus de 70%
de l'information de l'ensemble de données initiales. Les
éléments du vecteur propre1 pour chaque pays donnent les
contributions des indicateurs initiaux dans l'explication de la variance de la
première composante. Ces vecteurs propres sont utilisés comme
pondération dans la construction de l'indice du développement
financier (IDF).
Le graphique 4 illustre l'évolution de l'IDF des pays
de l'UEMOA de 1977 à 2008. L'évolution des indices dans le temps
n'est pas similaire suivant les pays et souvent très
irrégulière. Les expériences de libéralisation
financière n'ont donc pas donné les résultats
escomptés et dans l'ensemble, les indices de développement
financier ont plutôt eu tendance à baisser dans le temps. Par
ailleurs, l'évolution des indices montre que la libéralisation
financière semble entraîner une forte instabilité
financière en zone UEMOA puisque l'évolution de l'indice dans le
temps est irrégulière. Cette tendance à la baisse de
l'indice à partir de 2000 dans tous les pays semble s'expliquer en
partie par les effets négatifs de la crise sociopolitique ivoirienne.
Graphique 4: L'évolution de l'indice de
développement financier des pays de l'UEMOA de 1977 à
2008.
![](Developpement-financier-et-causalite-entre-epargne-et-investissement-en-zone-UEMOA-Union-Economi13.png)
IDF
-1
-2
-3
-4
4
2
0
5
3
1
EVOLUTION DE L'IDF DE 1977-2008
BEN BF CIV MALI NGER SNG TGO
Source : construit par l'auteur.
II-2- Les catégories de développement
financier en zone UEMOA
On peut donc classer les pays de la zone UEMOA suivant des
catégories de développement financier. Nous nous sommes
inspirés des travaux de Chouchane-Verdier (2004) et de Greenidge et al.
(2004) pour faire le classement. Ainsi, un pays est dit financièrement
développé dans la zone UEMOA si la moyenne de son indice est
supérieure à celle de l'UEMOA pour les périodes 1990-2002
et 2003-2008. Dans le cas contraire, il est considéré comme
faible financièrement. L'année1990 a été choisie
comme l'année de départ car la plupart des pays de l'UEMOA ont
entamé leurs réformes financières à partir de cette
année. La période 2003-2008 a été choisie aussi
pour intégrer la situation de la Côte d'Ivoire: la locomotive de
l'Union qui conna?t une crise sociopolitique depuis 2002. Les résultats
sont mentionnés dans le tableau 5.
Tableau 5 : Les différentes
catégories de développement financier de
l'UEMOA.
Pays
|
Moyennes sur les périodes
|
|
Rang et classification
|
|
1977-1989
|
1990-2002
|
2003-2008
|
1990-2002
|
2003-2008
|
Bénin
|
-1,596
|
1,271
|
0,711
|
2(élevé)
|
5(faible)
|
Burkina Faso
|
-1,443
|
1,044
|
0,88
|
3(élevé)
|
3(élevé)
|
Côte d'Ivoire
|
-0,673
|
1,477
|
2,495
|
1(élevé)
|
1(élevé)
|
Mali
|
-1,272
|
0,916
|
0,767
|
4(élevé)
|
4(faible)
|
Niger
|
-1,112
|
0,818
|
0,628
|
5(élevé)
|
6(faible)
|
Sénégal
|
1,402
|
-0,941
|
-0,983
|
7(faible)
|
7(faible)
|
Togo
|
-1,303
|
0,649
|
1,352
|
6(faible)
|
2(élevé)
|
Moyenne de l'échantillon
|
-0,857
|
0,748
|
0,835
|
|
|
Source : Compilation de l'auteur.
D'après les calculs, le Bénin, le Burkina Faso,
la Côte d'Ivoire, le Mali et le Niger sont classés dans la
catégorie de développement financier élevé, avec la
Côte d'Ivoire premier sur la période 1990-2002. Les autres pays
sont classés dans la catégorie de faible niveau de
développement financier. Sur la période 2003-2008 le Burkina, la
Côte d'Ivoire et le Togo sont financièrement
développés avec la Côte d'Ivoire toujours en tête. La
situation du Sénégal depuis les années 90 : à
être financièrement faible semble être surprenante. On
aurait d? attribuer ceci à la détermination de l'indice vue que
la première composante principale n'explique pas fortement la variance
totale de l'indice composite (63,6%). Mais fort heureusement, des études
antérieures ont trouvé des résultats semblables
(Chouchane-Verdier, 2001).
Hormis, la situation du Sénégal dont
l'explication économique nous échappe, nous pouvons donc
attribuer un degré de confiance élevé à notre
indice (2003-2008). D'une part, il reflète la réalité de
la zone UEMOA en termes de développement financier car malgré la
crise Ivoirienne, ce pays reste la locomotive de la zone. D'autre part, il
traduit la situation de dispersion des niveaux de développement
financier des pays de l'UEMOA. De ce fait, la première hypothèse
de l'étude de faible hétérogénéité
est donc rejetée.
Pour conclure, rappelons que pour construire notre indice,
nous avons repris une méthode de calcul récente dans la
littérature empirique telle que utilisée par Bandiera et al.
(2000) ; Chouchane-Verdier (2001) ; Greenidge et al (2004). L'indice composite
de développement financier des pays de la zone UEMOA est calculé
par la méthode ACP. Notre indice calculé réuni les
informations relatives à la taille et à l'efficacité de
l'activité des intermédiaires financiers par rapport à
l'économie. Plus spécifiquement l'indice déterminé
montre que les pays de l'UEMOA sont hétérogènes en termes
d'efficacité de structures financières. Partant de là,
pensons-nous qu'un système financier pourrait être
résolument perçu comme développé, si
l'efficacité de l'activité et la taille sont à la fois
élevées et donc source de croissance, c'est-à dire, un
système financier qui permet à l'épargne collectée
de financer l'investissement. C'est pour cette raison que dans le chapitre
suivant nous avons testé la causalité entre épargne et
investissement intérieurs.
CHAPITRE III : RELATION ENTRE DEVELOPPEMENT FINANCIER
ET CAUSALITE EPARGNE-INVESTISSEMENT EN ZONE UEMOA
L'objectif de ce chapitre est de déterminer le sens de
causalité d'une part entre le crédit et l'investissement
domestique et d'autre part entre épargne et investissement dans les pays
de l'UEMOA et de mettre en évidence la relation entre le niveau de
développement financier et la causalité
épargne-investissement.
Le chapitre est structuré en deux sections. La
première est consacrée à l'investigation
économétrique pour la détermination du sens de
causalité entre les variables d'intérêts. Des tests
préliminaires ont été aussi réalisés pour
éviter d'avoir des régressions fallacieuses. Dans la
deuxième section de ce chapitre, nous avons essayé de mettre en
évidence la relation entre le niveau de développement financier
et la causalité épargne-investissement dans la zone UEMOA.
SECTION 1 : CAUSALITE ENTRE EPARGNE ET INVESTISSEMENT :
UNE ANALYSE EMPIRIQUE APPLIQUEE A LA ZONE UEMOA
Pour savoir entre les idées néoclassique et
keynésienne soulevées par la revue de littérature
précédente, laquelle prévaut en zone UEMOA, on
procède à une analyse économétrique sur le sens de
causalité entre épargne, crédit à l'économie
et investissement dans chaque pays de ladite zone. Cette analyse fondée
sur des estimations économétriques (II) passe d'abord par une
analyse descriptive et économique des variables (I).
I-Tendances d'épargne et d'épargne et
d'investissement dans l'UEMOA : Une analyse descriptive et économique
des données
Il s'agit ici, à partir des graphiques, de
déceler les grandes tendances de l'épargne et de l'investissement
intérieurs dans la zone UEMOA23. On essaye de dégager
les spécificités, de niveau et d'évolution des variables
retenues dans les pays de l'UEMOA. Ensuite, montrer s'il existe une
corrélation entre les variables d'épargne et d'investissement
intérieurs. Ainsi, on
23 UEMOA signifie hors mis la
Guinée-Bissau du fait de sa récente intégration dans
l'union (2 mai 1997) et du manque de données de longue période
pour le pays.
analyse les évolutions des variables au niveau sous
régional et au niveau des pays pris individuellement.
I-1-L'UEMOA, une zone structurellement en besoin de
financement
Dans cette étude on opte de travailler avec les
données agrégées. Cette option se justifie par le fait que
les pays de l'UEMOA sont de petits pays ouverts et peuvent par
conséquent bénéficier des capitaux étrangers.
L'épargne domestique comprend aussi bien l'épargne publique que
privée et l'investissement intérieur comprend également
l'investissement public et privé. L'étude n'a pas fait la
distinction à cause du manque de données macroéconomiques
dans les pays en développement et ceux de l'Afrique en particulier.
Le graphique 5 illustre l'évolution des variables
épargne, investissement intérieurs et le solde courant de l'UEMOA
de 1975 à 2005 en zone UEMOA. L'épargne intérieure
représente la capacité de financement et l'investissement le
besoin de financement. Le solde courant peut être définie comme la
balance interne. Il décrit le gap entre épargne et investissement
intérieurs d'après l'analyse d'identité comptable. Il est
utilisé ici comme référence dans l'analyse.
Graphique 5: Evolution des variables
épargne, investissement intérieurs et solde courant de l'UEMOA en
% du PIB de 1975 à 2005.
![](Developpement-financier-et-causalite-entre-epargne-et-investissement-en-zone-UEMOA-Union-Economi14.png)
en %
-10
-20
20
30
10
0
Evolution des variables epargne,investissement
interieurs et solde courant de l'UEMOA
Taux d'investissement interieur(%PIB) Taux d'epargne
nationale(%PIB) Solde courant (%PIB)
Source : construit à partir des données
de ADI 2010.
On peut ainsi observer que la zone UEMOA est
caractérisée par un déficit structurel d'épargne
nationale par rapport à l'investissement : l'épargne étant
toujours inferieure à l'investissement. La balance intérieure
réagit également au déficit entre épargne et
investissement car depuis 1975 elle est déficitaire. Malgré la
libéralisation financière entamée depuis les années
1990, les pays de la zone n'ont pas encore pu mobiliser assez
d'épargne
pour financer l'investissement. De plus l'épargne et
l'investissement présentent une évolution presque stationnaire
depuis les années 90. Cette situation explique l'endettement trop
important des pays de l'UEMOA. L'épargne intérieure
n'étant pas suffisante pour financer l'investissement intérieur,
certains pays sont obligés de faire appel aux capitaux étrangers
pour financer leur investissement. La chute des taux d'épargne et
d'investissement au cours des années 1980 s'explique par les crises
bancaires et de la dette qu'a connu la zone au cours de ces périodes.
Enfin sur la période 1975 à 2005, on remarque que
l'évolution de l'épargne et de l'investissement est
parallèle car lorsque l'épargne baisse, l'investissement baisse
également et vice versa. L'analyse de la matrice de la
corrélation partielle entre les variables indique une relative forte
corrélation positive entre l'évolution de l'investissement et
celle de l'épargne. Cela traduit le fait que l'investissement et
l'épargne intérieurs évoluent dans le même sens en
zone UEMOA.
I-2-La tendance d'épargne et d'investissement
par pays
Cette sous partie consiste à mettre en relief les
caractéristiques des évolutions des variables épargne et
investissement domestiques pour chacun des pays de l'UEMOA : Bénin,
Burkina Faso, Côte d'Ivoire Mali, Niger, Sénégal et Togo.
Nous avons commenté les tendances de l'épargne et de
l'investissement par pays et mettre en évidence les relations de
colinéarité si cela existe.
I-2-1-Bénin
Comme l'illustre le graphique 6, le Bénin est un pays
structurellement en besoin de financement car l'épargne
intérieure est toujours inferieure à l'investissement
intérieur. De 1975 à 1990 le pays a enregistré une
évolution irrégulière de ses taux d'épargne et
d'investissement avec un taux d'épargne des fois en dessous de 0% (par
exemple en 1985 le taux d'épargne était de -12,35%). A partir des
années 1990, les deux variables connaissent une croissance stable mais
faible et déficitaire. Enfin, en calculant la matrice de
corrélation, on trouve que l'investissement et l'épargne sont
faiblement et positivement corrélés (0,498). Les deux variables
semblent être stationnaires.
Graphique 6: Evolution des variables
épargne et investissement intérieurs du Benin en% du PIB de 1975
à 2005.
![](Developpement-financier-et-causalite-entre-epargne-et-investissement-en-zone-UEMOA-Union-Economi15.png)
-20
40
20
0
taux d'investissement interieur(%PIB) taux d'epargne
nationale(%PIB)
Source : construit par l'auteur à partir de
ADI, 2010
I-2-2- Burkina Faso
Au Burkina Faso, les taux d'épargne et
d'investissement, contrairement à ceux du Benin, connaissent une
évolution très instable depuis 1975 (graphique 7). De 1975
à 1985, on observe une décroissance des taux d'épargne et
d'investissement intérieurs avec le taux d'épargne se situant en
dessous de 0% de 1977 à 1985. De 1987 à1995, le taux
d'épargne intérieure montre une amélioration alors que
l'investissement est resté presque stable. Enfin à partir de
1998, le taux d'épargne du Burkina a commencé à
décroître jusqu'à devenir négatif en 2001 (-0,103%).
L'investissement suit également cette tendance de l'épargne.
Cette situation de baisse de l'épargne semble être
justifiée par les manifestations sociales qu'a connues le pays depuis
les années 1998. La stabilité retrouvée à partir de
2004, explique la relance de l'épargne et l'investissement
intérieurs. En conclusion, l'épargne et l'investissement sont
fortement corrélés positivement (0,747) au Burkina.
Graphique 7 : Evolution des variables
épargne et investissement intérieurs du Burkina Faso en% du PIB
de 1975 à 2005.
![](Developpement-financier-et-causalite-entre-epargne-et-investissement-en-zone-UEMOA-Union-Economi16.png)
-10
30
20
10
0
taux d'investissement interieur (%PIB) Taux d'epargne
nationale(%PIB)
Source : construit par l'auteur à partir de
ADI, 2010
I-2-3-Côte d'Ivoire
La Côte d'Ivoire, première puissance
économique de l'UEMOA, présente des taux d'épargne et
d'investissement en décroissance jusqu'en 1993 avec une alternance entre
capacité de financement (de1975 à 1979 et de 1983 à 1993)
et besoin de financement (1978 à 1982). A partir de 1994
l'épargne et l'investissement intérieurs présentent une
évolution presque stationnaire avec l'épargne supérieure
à l'investissement (graphique 8). La situation de capacité de
financement du pays s'explique par la hausse des cours des matières
premières (Cacao et Café) depuis les années 1990 et les
politiques de relance économique mises en place au cours de la
même période. Enfin, avec la crise politique de 2002, on observe
une décroissance de ces variables surtout l'investissement
intérieur. Le coefficient de corrélation entre l'épargne
et l'investissement en Côte d'Ivoire est de 0,607.
Graphique 8: Evolution des variables
épargne et investissement intérieurs de la Côte d'Ivoire
en% du PIB de 1975 à 2005.
![](Developpement-financier-et-causalite-entre-epargne-et-investissement-en-zone-UEMOA-Union-Economi17.png)
taux d'investissment interieur(%PIB) taux d'epargne nationale
(%PIB)
40
30
20
10
0
Source : construit par l'auteur à partir de ADI,
2010
I-2-4-Mali
Le Mali présente une situation de besoin de financement
permanent (graphique 9). Après avoir connu son plus grand déficit
en 1986 (-11,439%), le taux d'épargne comme celui de l'investissement
connaissent depuis 1986 une tendance en hausse mais faible depuis 1990. On
remarque également que ce pays présente un taux d'épargne
moyen inférieur à 10% au cours de la période 1975 à
2005. La situation de faiblesse d'épargne et d'investissement s'explique
par le fait que c'est un pays sahélien et manque de ressources
naturelles. Enfin, l'épargne et l'investissement intérieurs
évoluent dans le méme sens (coefficient de corrélation est
0,7114).
Graphique 9 : Evolution des variables
épargne et investissement intérieurs du Mali en% du FIB de 1975
à 2005.
![](Developpement-financier-et-causalite-entre-epargne-et-investissement-en-zone-UEMOA-Union-Economi18.png)
-20
40
20
0
taux d'investissement interieur(%PIB) Taux d'epargne
nationale(%PIB)
Source : construit par l'auteur à partir de ADI,
2010
I-2-5-Niger
Le Niger présente des caractéristiques
similaires à celles de la plupart des pays de l'UEMOA,
c'est-à-dire une situation de déficit de la balance interne. Les
variables montrent des évolutions qui sont très erratiques durant
la période 1975 à 2005 (graphique 10). La faiblesse de
l'épargne (moyenne inférieure à 10%) contraint
l'investissement moyen à être en dessous de la moyenne de l'UEMOA
(inférieur à 10%). On remarque qu'à partir de 1995 les
deux variables ont commencé à croître et cela est d?
à l'exploitation de l'uranium que le pays a entamé il ya quelques
années. Au Niger, l'épargne et l'investissement sont fortement et
positivement corrélés (0,815).
Graphique 10: Evolution des variables
épargne et investissement intérieurs du Niger en% du FIB de 1975
à 2005
![](Developpement-financier-et-causalite-entre-epargne-et-investissement-en-zone-UEMOA-Union-Economi19.png)
-10
20
30
10
0
taux d'investissement interieur(%PIB) taux d'epargne
nationale(%PIB)
Source : construit par l'auteur à partir de ADI,
2010
I-2-6-Sénégal
Deuxième puissance économique de la zone
après la Côte d'Ivoire, le Sénégal montre
une situation de besoin de financement (graphique11). Depuis 1993,
année au cours de laquelle il a enregistré le plus faible taux
d'épargne (0,909%), le pays présente des taux d'épargne
et
d'investissement à la hausse, méme si cela reste
relativement faible. Quant à la corrélation, on trouve qu'elle
est positivement et moyennement forte (0,595). Les variables semblent
être stationnaires.
Graphique 11 : Evolution des variables
épargne et investissement intérieurs du Sénégal en%
du FIB de 1975 à 2005
![](Developpement-financier-et-causalite-entre-epargne-et-investissement-en-zone-UEMOA-Union-Economi20.png)
25
20
35
30
15
10
5
0
taux d'investissment interieur(%PIB) taux d'epargne
nationale(%PIB)
Source : construit par l'auteur à partir de ADI,
2010
I-2-7-Togo
Le Togo enregistre également des évolutions
erratiques des taux d'épargne et d'investissement au cours de la
période d'étude (graphique 12). Cette situation de variation
irrégulière de l'épargne et de l'investissement est
attribuable à la crise socio-politique qu'a connue le pays. Cette
situation d'instabilité a contribué au rapatriement des capitaux
vers d'autres pays. On remarque également que le taux d'épargne
chute de 7,91% en 1996 à 0,456% en 1997 et après, celui-ci a
stagné autour de moins de 1%. On évalue le coefficient de
corrélation de l'épargne nationale du Togo à 0,809.
Graphique 12: Evolution des variables
épargne et investissement intérieurs du Togo en% du FIB de 1975
à 2005
![](Developpement-financier-et-causalite-entre-epargne-et-investissement-en-zone-UEMOA-Union-Economi21.png)
-20
40
20
60
0
taux d'investissment interieur(%PIB) Taux d'epargne nationale
(%PIB)
Source : construit par l'auteur à partir de
ADI, 2010
En résumé on remarque que tous les pays de
l'UEMOA hormis la Côte d'Ivoire sont en situation de dépendance
vis à vis des capitaux étrangers car leurs épargnes
nationales ne suffisent pas pour financer leurs investissements internes.
L'UEMOA est la zone qui enregistre les plus faibles taux d'épargne et
d'investissement comparativement aux autres zones économiques africaines
(par exemple la zone CEMAC en 2002 a enregistré un taux d'épargne
supérieur à 20% alors que celui de l'UEMOA est de 8,27%).
Après avoir présenté et analysé
l'évolution de nos variables d'intérêt dans le temps au
niveau sous régional et au niveau national, il convient donc d'entamer
l'investigation économétrique de la causalité entre
épargne et investissement au niveau de chaque pays.
II-Etude de la variation du sens de causalité
entre épargne et investissement en zone UEMOA
Cette partie a pour objectif principal de déterminer le
sens de causalité entre épargne et investissement
intérieurs dans les pays de l'UEMOA. Cependant, menée
l'étude empirique entre l'épargne et l'investissement
intérieurs sans prendre en compte les canaux directs de transmission de
l'influence de l'épargne sur l'investissement parait peu objectif.
Ainsi, on considère en plus de ces deux variables, le taux de
crédit domestique fourni par le système bancaire dans chaque pays
qui est directement lié à l'investissement domestique. Il
représente en fait le rôle des banques dans le financement du
secteur productif. Ce ratio est considéré dans certaines
études comme une mesure pertinente du niveau de développement
financier qui a lieu à travers le système bancaire.
Il convient aussi de faire la différence entre
corrélation et causalité. La corrélation ne signifie pas
une relation de cause à effet. Ce qu'il serait intéressant de
faire c'est de savoir si la connaissance du passé de l'une des variables
permet d'améliorer la prévision de l'autre Granger (1969 et 1988)
ou alors si les chocs qui affectent l'une des variables peuvent modifier la
variance de l'erreur de prévision de l'autre Sims (1980). Dans ce cas,
on dit qu'il existe une relation de cause à effet (relation
causale) entre les variables qui peut aller dans un seul sens
(causalité unidirectionnelle) ou dans les deux (causalité
bidirectionnelle). L'approche de Granger étant celle qui a eu le plus
d'échos chez les économètres, sera retenue dans le cadre
de cette étude. Avant de mener les études empiriques une
synthèse des différents tests économétriques est
faite.
II-1-Synthise de la méthodologie d'analyse
économétrique
En rappel, l'objectif de l'étude est d'examiner la
relation de causalité entre l'investissement intérieur (I),
l'épargne nationale (S) et le crédit fourni par le système
bancaire (CR) dans les pays de l'UEMOA. Comme la Côte d'Ivoire est la
locomotive de l'Union et connait une crise sociopolitique depuis 2002, nous
prenons cela en compte par l'introduction d'une variable muette dans le test de
causalité.
L'analyse empirique de la causalité entre
l'investissement intérieur, l'épargne nationale et le
crédit domestique dans chaque pays de l'UEMOA exige la mise en oeuvre de
techniques économétriques rigoureuses. Pour estimer la relation
reliant les variables ci-dessus indiquées, il est important de
connaître, pour chacune d'elles, la nature du processus stochastique dont
elle est la réalisation. En effet, selon Doucouré (2008) la
plupart des propriétés statistiques des méthodes
d'estimation s'appliquent à des variables stationnaires
(c'est-à-dire non tendancielles et non saisonnières); ces
méthodes ne sont pas valables pour n'importe quel type de
données. En appliquant indifféremment ces méthodes, on
risque d'effectuer des estimations fallacieuses.
Afin d'avoir des résultats robustes, il est donc
nécessaire d'élaborer un certain nombre de tests statistiques
préliminaires. Le protocole de tests adopté comprend le test de
stationnarité, le test de cointégration et le test de
causalité.
II-1-1-Tests de stationnarité
La spécification d'un modèle nécessite le
plus souvent que les variables soient stationnaires, pour éviter le
risque de régressions fallacieuses. Il existe plusieurs tests
statistiques pour déterminer l'ordre d'intégration des
séries. Il faut néanmoins noter que tous ces tests comportent des
biais, ce qui fait penser que la détermination de l'ordre
d'intégration ne saurait etre rigoureuse à partir d'un seul test
(Keho, 2004). C'est pour cette raison que cette étude utilise plusieurs
tests : Le premier test est le test usuel de racine unitaire de Dickey-Fuller
Augmenté (ADF). Ce test prend en compte uniquement la présence
d'auto-corrélation dans les séries. Il est basé sur les
modèles :
Modèle (c) AYt = (p _ 1)Yt_1 + a + 13t +
E;)=11 chAyt_j + Et
(1)Modèle (b) AYt = (p _ 1)Yt_1 + a + AYt_j + Et (2)
Modèle (a AYt = (p _ 1)Yt_1 + AYt_j + Et
(3)
Où ?= 1 - L (L étant l'opérateur de
retard);Yt est la série considérée à la
date t, åt est un bruit blanc et p représente la
fraction des valeurs retardées de yt qui incluse afin
d'assurer la corrélation des séries des résidus. On teste
l'hypothèse nulle : H0: |ñ| = 1 de présence de racine
unitaire (la série est intégrée d'ordre 1,
c'est-à-dire non stationnaire) contre l'hypothèse alternative
d'absence de racine unitaire (la série est intégrée
d'ordre 0, c'est-à-dire stationnaire). La longueur du paramètre
du test ADF est déterminée en utilisant le critère
d'information d'Akaike (AIC) et de Schwartz (SC).
En plus du test ADF, il y a le test de Phillips-Perron (PP).
Ce test ressemble au test ADF. C'est une correction non paramétrique du
test de Dickey-Fuller afin de corriger le problème
d'autocorrélation et d'hétéroscedascité des erreurs
dans les séries. Mais, contrairement au test ADF, il n'y a pas de termes
de différences retardées. Il s'agit donc de tester
l'hypothèse nulle (processus non stationnaire) H0: |ñ| = 1 contre
l'hypothèse alternative de stationnarité
H1: |ñ| = 1 et les équations du test sont
données par :
|
|
ÄYt = á + ât +
(ñ-)Yt-1+åt
|
(4)
|
ÄYt = á + (ñ -
1)Yt-1+åt
|
(5)
|
ÄYt = (ñ - 1)Yt-1+åt
|
(6)
|
|
II-1-2-Test de cointégration
La théorie de la cointégration permet
d'étudier des séries non stationnaires mais dont une combinaison
linéaire est stationnaire. Elle permet de spécifier des relations
stables à long terme tout en analysant conjointement la dynamique de
court terme des variables considérées (Doucouré, 2008). En
d'autres termes, la cointégration signifie que des variables
évoluent ensemble au même taux.
Lorsque des séries sont cointégrées,
alors, il y a une relation de long terme qui les unit. Un vecteur (n,
1)Zt est cointégré si chaque composante Zit
est intégrée d'ordre d et il existe â un vecteur (1, n) tel
que âZtsoit intégré d'ordre inférieur,
c'est-à-dire d'ordre d - b; avec 1 = b = d.
L'analyse de la cointégration est faite suivant la
procédure de Johansen (1988) qui est efficace surtout quand on est face
à un échantillon de faible taille ce qui est le cas dans cette
étude.
La mise en oeuvre du test de cointégration selon la
procédure de Johansen requiert au préalable l'estimation d'un
modèle Vectoriel Autorégressif (VAR).
Considérons le modèle VAR(p) suivant :
Xt = A0Dt + 1 Xt-1 + ? + p Xt-p + Ut
(7)
où (Xt) est un vecteur (n, 1) des variables
; Dt un vecteur de termes déterministes ; et Utun vecteur
d'impulsions ( Ut ? iid(0, Ù) . Selon le
théorème de représentation de Engle et Granger
(1987)24 ; le modèle Vectoriel Autorégressif
précédent admet une spécification Vectorielle à
Correction d'Erreur (VEC) de la forme :
Xt = A0Dt + ÐXt-1 +
1ÄXt-1 + ? + pÄXt-p+1 (8)
où les matrices Ð et i contiennent respectivement les
coefficients de long terme et de court terme. La détermination du test
de Johansen repose sur le rang(r) de Ð.
La procédure du test de Johansen permet de
spécifier trois modèles :
(a) si le rang de ?? est égale à n ; alors ????
est stationnaire à niveau. Dans ce cas l'estimation traditionnelle de
VAR à niveau est appropriée ;
(b) si le rang de ?? est nul, alors?? = 0. Dans ce cas, il
n'existe aucune relation de cointégration entre les variables du
modèle et l'estimation appropriée est celle du VAR en
différence première ;
(c) si ?? est de rang ?? inférieur à n ; il
existe deux matrices ?? ???? ?? de dimension (??, 1) telles que ?? = ??????
où ?? représente la matrice de cointégration qui rend
stationnaire la combinaison ??????-1 ???? ?? la matrice constituée des
coefficients d'ajustement de court terme.
Le test de Johansen repose sur deux statistiques de rapport de
vraisemblance. Le premier test pose comme hypothèse H0: rang Ð) = r
contre l'hypothèseH1: rang Ð) = n.La statistique est :
Trace = -T~ ln?(1 - ë i)
n pour r = 0,1, ... , n - 1 (9)
i=r+1Où ë i ieme valeur propre
maximale, T le nombre d'observations,n le nombre de variables et r le rang de
la matrice.
Le second test pose comme hypothèse H0: rang Ð) = r
contre l'hypothèse H1: rang Ð) = r + 1. La statistique du test est
la valeur propre maximale définie par :
ë max = -Tln(1 ? ë r+1) (10)
Ces statistiques ne suivent pas une distribution de chi-deux.
Les valeurs critiques asymptotiques ont été calculées
à l'aide de simulations numériques25.Dans la pratique,
le test se fera de façon séquentielle pour r = 0,1, ... , n -
1.
24 Ce théorème stipule que tout
système intégré admet une représentation correction
d'erreur.
25 Les valeurs sont données directement par les
logiciels d'économétrie
Le test de cointégration permet de montrer l'existence
éventuelle d'une relation de long terme entre épargne,
investissement et le crédit domestiques dans les pays de l'UEMOA.
Après avoir exposé la méthode du test de
cointégration, il convient de présenter celle du test de
causalité.
II-1-3-Test de causalité
L'étude cherche à tester la relation de
causalité entre l'investissement domestique, l'épargne nationale
et le crédit domestique considéré comme variable
intermédiaire dans les pays membre de l'UEMOA. Dans cette perspective,
elle mobilise la notion de causalité au sens de Granger (1969 et 1988).
Une variable Y cause au sens de Granger une variable X si les valeurs
passées de Y contribuent à expliquer la valeur contemporaine de X
par rapport aux seules valeurs passées de cette dernière. Sur le
plan statistique, le test de causalité au sens de Granger revient
à un test de significativité globale des coefficients
associés aux valeurs passées de la variable causale dans
l'équation de la variable causée.
Le cadre statistique de ce test suppose la
stationnarité des variables en jeu. Selon Granger, une variable
stationnaire X cause une autre variable stationnaireY, si la connaissance des
valeurs passées de X rend meilleure la prédictibilité de
Y. En d'autres termes, la variable X ne cause pas Y (au sens de Granger) si
:
Pr(Yt+m /Wt) =Pr(Yt+m /LJ.t) (11)
Pr (*) désigne la probabilité conditionnelle,Wt
est l'ensemble d'informations disponibles à la date t et LJ.t
l'ensemble d'informations obtenues en excluant toute information relative
à X
deWt .
Deux grandes familles de tests de causalité au sens de
Granger sont envisageables. On distingue, en premier lieu, les
procédures de tests dites séquentielles qui imposent
d'étudier de manière précise la stationnarité des
variables et la présence éventuelle d'une relation de
cointégration avant de conduire le test de causalité. Lorsque les
séries sont intégrées d'ordre un et
cointégrées, l'estimation d'un VAR en différences
premières n'est pas appropriée ; il convient de
reparamétrer le modèle sous la forme d'un modèle vectoriel
à correction d'erreur (Engle et Granger, 1987; Johansen, 1988).
L'existence d'une relation de cointégration suggère une
causalité dans au moins une direction. Les approches
séquentielles permettent ainsi d'effectuer un test de causalité
sur la dimension de court terme et un test sur la dimension de
long terme .Ces tests s'effectuent à partir de
l'estimation du modèle sous la forme VAR, éventuellement
cointégré (VECM).
La représentation vectorielle à correction d'erreur
permet d'écrire
p-1 p-1
p-1
ÄIt = + È1j ÄIt-j + È2j
ÄSt-j + È3jÄCRt-j + á1ECTt-1 + î1t
(12)
j=1 j=1 j=1
p-1
p-1 p-1
ÄSt = ì2 + ô1jÄIt-j +
ô2j
j=1 j=1
|
ÄSt-j + ?3jÄCRt-j +
j=1
|
á2ECTt-1 + î2t 13)
|
p-1 p-1
ÄCRt = ì3 + ?1j
j=1
|
p-1
ÄIt-j + ?2j
j=1
|
ÄSt-j + ?3jÄCRt-j +
j=1
|
á3ECTt-1 + î3t 14)
|
Où les á captent la vitesse d'ajustement d'un
état de déséquilibre vers la relation de long terme et
ECTt-1 représente le terme à correction d'erreur. La
relation de cointégration rend compte de l'équilibre de long
terme et la dynamique de court terme des variables capte les fluctuations
autour de la relation de long terme. La représentation VECM offre deux
canaux par lesquels la causalité peut être détectée
Granger (1988). Ainsi ,dans l'équation (13) St cause It au sens de
Granger soit à travers les termes dynamiques retardés
ÄSt-j ,si les coefficients È2j sont
conjointement significatifs ( c'est-à-dire l'hypothèse H0:
È21 = È22 =
? = È2p-1 = 0 est rejetée), soit à
travers le terme d'erreur ECTt-1 ,si le coefficient á1 est
statistiquement significatif ( c'est-à-dire rejet de H0: á1 = 0
). La significativité conjointe des coefficients È2j
indique une causalité au sens de granger à court terme, alors que
la significativité du coefficient á1 suggère une
causalité au sens de Granger à long terme entre les deux
variables. Par ailleurs, dans l'équation (14), si l'hypothèse H0:
ô11 = ô12 = ? =
ô1p-1 = 0 est rejetée et/ou l'hypothèse H0:
á2 = 0 est rejetée, alors It cause St au sens de
Granger. De même pour tester la causalité de
l'épargne et l'investissement sur le crédit domestique, on
procède de la même manière.
Cependant, si les trois variables ne sont pas
cointégrées, le terme d'erreur ECTt-1 n'apparait pas
dans les équations ci-dessus. Dans ce cas, seule la causalité de
court terme est testée. Et la méthode conventionnelle pour tester
la causalité au sens de Granger entre les trois variables en
différence première est de spécifier une
représentation Vecteur Autorégressif d'ordre k, VAR(k), comme
suit :
Chapitre III : Relation entre développement financier et
causalité épargne-investissement en zone UEMOA.
|
ÄIt = â0 + ÄSt = ã0 +
ÄCRt = ä0 +
|
p-1
â1j ÄIt-j +
j=1
p-1
ã1jÄIt-j +
j=1 p-1
ä1j ÄIt-j +
j=1
|
p-1
p-1
â2j ÄSt-j + â3jÄCRt-j +
å1t
j=1
j=1
p-1
p-1
ã2j ÄSt-j + ã3jÄCRt-j +
ì2t
j=1
j=1
p-1
p-1
ä2j ÄSt-j + ä3jÄCRt-j + ?3t
j=1
j=1
|
(15)
16)
17)
|
Avec â, ã et, les paramètres des
modèles. En tenant compte de l'expression(15), une hausse de
l'épargne nationale ne cause pas la croissance de l'investissement
intérieur si tous les â2j sont nuls. Avec l'expression (16) une
croissance de l'investissement intérieur ne cause pas l'épargne
nationale si tous les ã2j sont nuls. De meme, pour
l'équation (17) on procède de la sorte. Ces différentes
hypothèses sont testées à l'aide de la statistique de
Fisher ou de Wald.
Enfin, si les tests de racine unitaire révèlent
que les séries sont I(0), c'est-à-dire stationnaires à
niveau, pour tester la causalité au sens de Granger entre les variables
à niveau, il faut spécifier une représentation VAR d'ordre
k, comme les équations (15), (16) et (17) avec la précision que
les variables ne seront plus différenciées.
II-2-Résultats empiriques
Le recours à l'économétrie des
séries temporelles, plus précisément à la
théorie de la représentation de Granger utilisée dans
cette étude, a permis d'analyser à la fois les effets de court et
long terme des variables explicatives sur la variable expliquée. On
présente d'abord les résultats des tests de racine unitaire,
ensuite ceux de la cointégration et enfin la causalité entre
épargne, investissement et crédit domestiques dans chaque pays de
l'UEMOA.
Les données qui sont utilisées dans cette partie
sont issues de Africa Development Indicators (ADI), 2010. Elles
couvrent la période 1977-2008. L'investissement domestique y est
représenté par Gross domestic Investment (%), Gross domestic
Saving (%) est l'épargne nationale et domestic credit (%) est le
crédit domestique fourni par le système bancaire. De plus, nous
avons intégré une variable muette (M) qui prend la valeur
zéro de 1977 à 2002 et un de 2003 à 2008 pour mettre en
évidence l'effet de la crise ivoirienne sur la causalité.
II-2-1- Résultats des tests de
stationnarité
La première étape de l'analyse a consisté
à déterminer l'ordre d'intégration des variables. Pour
ce faire, des tests de racine unitaire sur chaque variable à niveau et
en différence première ont été
réalisés, et ceci pour tous les pays de l'échantillon. Le
tableau 6 indique que
les variables investissement, épargne et crédits
intérieurs sont intégrés d'ordre 1 noté I (1) dans
trois pays á savoir le Bénin, le Burkina Faso, et le
Sénégal. En effet, les tests Dickey-Fuller Augmenté (ADF)
et Phillips-Perron (PP) effectués sur les séries á niveau
montrent qu'aucune de ces séries n'est stationnaire au seuil de 5%. Il a
fallu donc différencier une fois les différentes séries et
effectuer les mêmes tests que précédemment, pour obtenir
leur stationnarité. Dans le cas du Niger et du Togo les deux variables
épargne et investissement sont I (1), alors que le crédit
domestique est stationnaire á niveau. En Côte d'Ivoire
l'épargne et l'investissement sont stationnaires á niveau au
seuil de 5% et le crédit domestique I(1). Quant au Mali les trois
variables sont stationnaires á niveau.
Tableau 6 : Résultats des tests de
stationnarité
Pays
|
Variables
|
En niveau
|
En différence première
Conclusion
|
|
|
|
ADF
|
PP
|
ADF
|
PP
|
I ()
|
|
I
|
-2,546(b)
|
-2,260(b)
|
-4,450*(a)
|
-7,380*(a)
|
I(1)
|
Bénin
|
S
|
-5,338 (c)
|
-5,876(c)
|
-5,869*(a)
|
-11,870*(a)
|
I(1)
|
|
CR
|
-0,637(a)
|
-0,640(a)
|
-6,451*(a)
|
-6,395*(a)
|
I(1)
|
|
I
|
-2,724 (b)
|
-2,814 (b)
|
-7,139*(a)
|
-7,328*(a)
|
I(1)
|
Burkina Faso
|
S
|
-1,329(a)
|
-1,301(a)
|
-6,141*(a)
|
-6,138*(a)
|
I(1)
|
|
CR
|
-0,255(a)
|
-0,230(a)
|
-1,069*(a)
|
-5,768*(a)
|
I(1)
|
|
I
|
-2,359*(a)
|
-2,305*(a)
|
· · ·
|
· · ·
|
I(0)
|
Côte d'Ivoire
|
S
|
-3,185*(b)
|
-3,185*(b)
|
|
|
I(0)
|
|
CR
|
-2,993(c)
|
-2,276(c)
|
-4,393*(a)
|
-4,543*(c)
|
I(1)
|
|
I
|
-3,672*(c)
|
-3,628*(c)
|
· · ·
|
· · ·
|
I(0)
|
Mali
|
S
|
-3,156* (c)
|
-4,913*(c)
|
· · ·
|
· · ·
|
I(0)
|
|
CR
|
-6,382*(b)
|
2,885*(a)
|
· · ·
|
· · ·
|
I(0)
|
|
I
|
1,118 (c)
|
-0,489(a)
|
-5,417*(c)
|
-5,352*(a)
|
I(1)
|
Niger
|
S
|
-0,873(a)
|
-0,873(a)
|
-5,417*(c)
|
-6,094*(a)
|
I(1)
|
|
CR
|
-4,899*(c)
|
-4,642*(c)
|
· · ·
|
· · ·
|
I(0)
|
|
I
|
0,580(a)
|
0,580(a)
|
-6,415*(a)
|
-6,379*(a)
|
I(1)
|
Sénégal
|
S
|
-1,386(a)
|
-1,357(a)
|
-6,950*(a)
|
-7,272*(a)
|
I(1)
|
|
CR
|
-2,906(b)
|
-3,108(c)`
|
-2,936*(c)
|
-4,850*(a)
|
I(1)
|
|
I
|
-3,738*(b)
|
-1,413(a)
|
-5,137*(a)
|
-6,335*(a)
|
I(1)
|
Togo
|
S
|
-3,459(c)
|
-3,371 (c)
|
-4,038*(a)
|
-8,931*(a)
|
I(1)
|
|
CR
|
-3,653*(c)
|
-3,741*(c)
|
· · ·
|
· · ·
|
I(0)
|
|
Notes : (*) indique le rejet de
l'hypothese nulle (présence de racine unitaire) au seuil de 5%. I est
l'investissement domestique, S est l'épargne
domestique. et CR est
crédit domestique (a) désigne le modèle sans constance ni
tendance déterministe, (b) le modèle avec constance sans tendance
déterministe et (c) le modèle avec constante et tendance
déterministe.
Source : Calculs de l'auteur
II-2-3 -Test de cointégration.
Pour la plupart des pays, toutes les trois séries sont
non stationnaires. De plus, comme il est possible d'inclure dans le VAR des
variables stationnaires, il est raisonnable de penser qu'une relation de long
terme contient également des variables stationnaires Keho (2006). Il
s'agit ainsi dans cette partie de faire le test de cointégration entre
les variables pour chaque pays. Le
test de cointégration utilisé est le test
multivarié de Johansen (1988) ayant l'avantage de pouvoir prendre en
compte plusieurs spécifications pour la relation de long terme :
présence d'une constante/tendance ou non dans l'espace de cointegration.
Les résultats du test de Johansen sont résumés dans le
tableau 7.
Tableau 7 : Résultats du test de
cointégration de Johansen
Pays H0 H1
r =0vs r =1
Bénin r =1vs r =2 r=2vs r=3 r =0vs r =1
Burkina Faso r =1vs r =2 r=2vs r=3 r =0vs r =1
Côte d'Ivoire r =1vs r =2 r=2 vs r=3 r =0vs r =1
Mali r =1vs r =2 r=2 vs r=3 r=0vs r =1
Niger r =1vs r =2 r=2 vs r=3 r=0vs r =1
Sénégal r=1vs r =2 r=2vs r=3 r=0vs r =1
Togo r=1vsr=2
r=2vs r=3
ë-trace
|
valeur critique à5%
|
ë-Max
|
valeur critique à5%
|
40,177
|
42,915
|
20,503
|
21,131
|
19,674
|
25,872
|
16,329
|
21,131
|
3,344
|
12,517
|
3,444
|
12,517
|
30,407*
|
29,797
|
24,278*
|
21,131
|
6,128
|
15,494
|
3,873
|
14,264
|
2,254
|
3,841
|
2,254
|
3,841
|
42,31
|
42,915
|
20,178
|
25,823
|
22,132
|
25,872
|
11,963
|
19,387
|
10,168
|
12,517
|
10,168
|
12,517
|
40,536
|
42,915
|
20,35
|
25,823
|
20,186
|
25,872
|
14,591
|
19,387
|
5,594
|
12,517
|
5,954
|
12,517
|
60,124*
|
42,915
|
30,701*
|
25,823
|
29,422*
|
25,872
|
25,748*
|
19,387
|
3,674
|
12,517
|
3,674
|
12,517
|
32,16
|
42,915
|
17,678
|
25,823
|
14,481
|
25,872
|
7,87
|
19,387
|
6,611
|
12,517
|
6,611
|
12,517
|
43,939*
|
42,915
|
23,091
|
25,823
|
20,847
|
25,872
|
14,592
|
19,387
|
6,254
|
12,517
|
6,254
|
12,517
|
Note : r est le nombre de
vecteurs de cointégration. (*) Indique le rejet de H0 au seuil de
5%.
Source : Calculs de l'auteur
Les résultats du test de non-cointégration de
Johansen montrent que, seulement, les variables de trois pays (Burkina Faso,
Togo et Niger) sont respectivement cointégrées d'ordre 1 et
d'ordre 1 et d'ordre 2.
Pour les autres pays, l'hypothèse nulle d'absence de
relation de cointégration entre épargne, investissement et
crédit n'est pas rejetée par les statistiques trace et ë-Max
à 5%. Ainsi, le non rejet de l'hypothèse de non
cointégration pour ces pays (excepté le Burkina Faso, le Niger et
le Togo) ne signifie pas nécessairement qu'il n'existe pas une relation
stable de long terme entre les variables précitées. Ces
résultats pourraient être attribués au fait que la relation
de long terme peut exister et être sous forme non-linéaire
(Demetriades et Hussein, 1996).
Les résultats ne sont pas surprenants. Le gap
épargne-investissement pouvant être considéré comme
proxy de la balance des opérations courantes dans le cadre de l'analyse
de la contrainte de budget intertemporelle. Trouver donc qu'il n'existe pas de
relation d'équilibre de long terme entre épargne et
investissement intérieurs implique que le déficit du compte des
opérations courantes ne converge pas vers zéro ou vers une
constante dans le temps26. Autrement dit, si l'épargne et
l'investissement domestiques ne sont pas cointégrés, alors il
existe un déséquilibre persistant, même sur le long terme
du compte courant. C'est précisément le cas dans la plupart des
pays de l'UEMOA excepté le Burkina, le Niger et le Togo. Cela semble
refléter la réalité car la plupart des pays de l'UEMOA
sont plus ouverts aux capitaux extérieurs, c'est-à-dire plus
dépendants de l'Aide au développement et de l'épargne
étrangère pour le financement de l'investissement
intérieur.
Selon Toda et Yamamoto (1995), ce qui importe fondamentalement
pour l'économiste n'est pas de savoir si les variables sont
intégrées voire cointégrées, mais de tester des
restrictions matérialisant des hypothèses théoriques.
C'est en cela que les procédures de tests de causalité pouvant
soustraire des tests préliminaires de cointegration prennent tout leur
sens. Les procédures non séquentielles consistent à
effectuer des estimations corrigées du VAR. Ce faisant, comme dans la
plupart des pays il y a absence de cointegration entre les trois variables, et
pour une question d'homogénéité dans l'investigation de la
causalité, on utilise le modèle VAR à niveau pour analyser
les causalités multivariées.
II-2-3- Estimation et test de causalité par
pays
On teste maintenant la causalité entre l'investissement
intérieur, l'épargne intérieure et le crédit
domestique à partir de l'estimation d'un modèle VAR non
structurel car dans la plupart des pays les résultats montrent une
absence de cointegration.
L'hypothèse nulle est l'absence de causalité. Le
test de significativité conjointe des retards de chaque variable est
effectué par la statistique ÷2 (test de Wald). Les
résultats des tests sont présentés dans le Tableau 8. Le
nombre de retard a été déterminé par les
critères d'Akaike et Schwartz. Le retard d'ordre 1 a été
retenu pour toutes les variables et dans tous les pays. Ensuite, afin de
valider les résultats, les différents tests de diagnostic (Test
de normalité, d'hétéroscédasticité et
d'autocorrélation des erreurs) ont été effectués.
Les probabilités de ces
26 Comme le remarque bien Jansen et al.
(1996), l'une des prédictions majeures des modèles
d'équilibre général intertemporel en économie
ouverte est que le solde courant converge vers l'état stationnaire vers
une constante. Ainsi, quoique à court terme, des chocs affectant une
économie puissant faire diverger l'épargne et l'investissement de
leur relation stationnaire, les deux variables la retrouvent certainement
à long terme.
tests sont condensées dans le tableau 9. Il ressort que
les différents modèles utilisés sont biens définis
car les différentes probabilités sont supérieures à
5%. Cependant, si on considère le seuil de 10%, au Mali les
hypothèses d'absence de corrélation sérielle de
Breusch-Godfrey et d'homoscédasticité des erreurs n'ont pas
été rejetées. Ainsi, à 10% le modèle au Mali
n'est pas bien spécifié.
Tableau 8 : Résultats du test de
causalité de Granger basé sur des VAR.
Pays
|
Variable causale
|
|
Variable causée
|
|
I
|
S
|
CR
|
|
I
|
-
|
7,583* (0,005)
|
1,611 (0,204)
|
Bénin
|
S
|
21,388* (0,000)
|
|
0,454 (0,503)
|
|
CR
|
0,010 (0,919)
|
0,211 (0,645)
|
-
|
|
I
|
-
|
0,122 (0,726)
|
4,232*(0,039)
|
Burkina Faso
|
S
|
0,000 (0,991)
|
|
8,032*(0,004)
|
|
CR
|
1,407 (0,235)
|
0,785 (0,375)
|
-
|
|
I
|
-
|
0,315 (0,574)
|
2,259 (0,132)
|
Côte d'Ivoire
|
S
|
0,219 (0,639)
|
|
0,151 (0,697)
|
|
CR
|
2,472 (0,115)
|
0,728 (0,393)
|
-
|
|
I
|
-
|
2,330 (0,126)
|
0,049(0,823)
|
Mali
|
S
|
0,343 (0,558)
|
|
0,112 (0,737)
|
|
CR
|
15,943* (0,000)
|
1,565 (0,210)
|
-
|
|
I
|
-
|
2,559 (0,109 )
|
0,010 (0,917)
|
Niger
|
S
|
0,016 (0,897)
|
|
0,160 (0,689)
|
|
CR
|
2,153 (0,142)
|
0,075 (0,783)
|
-
|
|
I
|
-
|
1,348 (0,245)
|
0,146 (0,702)
|
Sénégal
|
S
|
5,847* (0,015)
|
|
0,892 (0,344)
|
|
CR
|
3,158 (0,075)
|
4,845* (0,027)
|
-
|
|
I
|
-
|
0,071 (0,789
|
0,441 (0,506)
|
Togo
|
S
|
0,732 (0,392)
|
|
0,326 (0,567)
|
|
CR
|
5,001* (0,025)
|
2,487 (0,114)
|
-
|
Note : Les statistiques reportées sont les Chi-2. Les
valeurs entre parenthèses sont les p-values.
(*), Indique le rejet de l'hypothèse nulle de
non-causalité au sens de Granger au seuil de significativité de
5%.
Source : Calculs de l'auteur
Tableau 9 : Résultats des tests de
diagnostic des modèles utilisés.
Pays
|
Test de normalitéde
Jarque-Bera (probabilité)
|
Test d'Homoscédasticitédes erreurs de
White (probabilité)
|
Test de corrélation des erreurs de
Breusch-Godfrey (probabilité)
|
Bénin
Burkina Faso Côte d'Ivoire Mali
Niger
Sénégal
Togo
|
0,519 0,690 0,707 0,270 0,699 0,141
0,802
|
0,171 0,725 0,316 0,079 0,0628 0,278
0,682
|
0,330 0,330 0,235 0,054 0,255 0,527
0,2315
|
Source : Calculs de l'auteur
Les résultats laissent apparaitre qu'il n'existe pas de
relation de causalité entre l'épargne, l'investissement et le
crédit intérieurs en Côte d'Ivoire et au Niger. Au Benin,
il y a une causalité bidirectionnelle entre épargne et
investissement mais aucune relation n'existe entre ces variables et le
crédit intérieur. L'épargne et l'investissement
intérieurs causent le crédit intérieur au Burkina Faso
mais pas de relation entre l'épargne et l'investissement. Dans ce cas,
c'est le volume d'investissement qui stimule la participation des agents sur le
marché du crédit, ce qui facilite la création et
l'expansion des institutions bancaires. Le crédit domestique est source
d'investissement au Mali et au Togo. Quant au Sénégal, la
causalité va dans le sens
crédit-épargne-investissement.
En résumé, dans la plupart des pays de l'UEMOA
(sauf au Bénin et au Sénégal) l'épargne n'est pas
vertueuse car ne précède pas l'investissement. Le cas de la
Côte d'Ivoire, où on a absence de relation linéaire entre
crédit, l'investissement et l'épargne aurait du être
attribuée à la crise politique mais cela a été pris
en compte par l'introduction de la variable muette qui se révèle
non significative. Les résultats viennent confirmer ceux trouvés
aussi par Esso et Keho (2010)27 qui, ont montré que dans la
zone UEMOA le capital est mobile ; ce qui rend l'investissement
indépendant de l'épargne dans la plupart des pays (sauf au Benin,
en Côte d'Ivoire et au Niger). En effet, le capital n'étant pas
mobile en Côte d'Ivoire (Keho, 2010), ce qui fait que les autres pays
n'ont pas profité de l'épargne venant de ce pays malgré sa
situation d'instabilité.
Plusieurs éléments peuvent être
avancés pour expliquer cette incohérence empirique.
Tout d'abord, la faiblesse du taux d'épargne
intérieure dans les pays de l'UEMOA explique peut-être que
celle-ci ne puisse pas être le moteur de l'investissement. Par ailleurs,
la faiblesse des revenus ne permet pas aux populations d'épargner le
surplus de revenus dégagé de la croissance provenant d'une hausse
du niveau d'investissement ; ce surplus servant davantage à satisfaire
les besoins élémentaires.
Ensuite, la non significativité de l'offre de
crédit dans les équations d'investissement et d'épargne
dans la zone pourrait s'expliquer par une insuffisance méme du
crédit, résultant d'un rationnement du crédit tendant
à rendre l'offre inférieure à la demande. En effet, en
présence d'un rationnement du crédit (caractéristique du
marché bancaire de l'UEMOA), il n'est pas possible de valider les
prédictions des modèles théoriques. Cependant,
l'hypothèse
27 Ils ont utilisé la méthode de bound
test de Pesaran et al (2001) et le test de causalité proposé par
Toda et Yamamoto (1995).
d'un rationnement du crédit est difficile à
vérifier car il n'existe pas de statistiques disponibles permettant de
mesurer l'écart entre le crédit demandé et le
crédit accordé.
Enfin, d'autres raisons telles que le faible
développement du système financier, le risque important
lié à l'activité d'investissement font que
l'épargne, méme si elle existe, est plutôt
thésaurisée qu'investie. De plus, comme dans une économie
ouverte, l'investissement intérieur est financé à la fois
par l'épargne domestique et l'épargne étrangère:
l'épargne des agents résidents peut aussi être investie
à l'étranger. Cela est vrai, en particulier dans le cadre d'une
mobilité parfaite du capital. Par conséquent, les
résultats illustrent bien que les pays de l'UEMOA (sauf le Benin et le
Sénégal) sont extravertis et caractérisés par un
degré de mobilité élevé, par ce que
l'investissement domestique n'est pas financé par l'épargne
domestique mais plutôt par l'épargne étrangère.
Par suite, il est important de souligner aussi que la notion
de causalité au sens de Granger, définie habituellement dans le
cadre de la modélisation VAR, repose sur une estimation linéaire
des relations de causalité entre les variables économiques. Par
construction, cette approche ne modélise que des relations
linéaires et par conséquent ne permet pas d'appréhender le
caractère asymétrique et discontinu des relations entre des
variables macroéconomiques. Or, l'absence de causalité pourrait
s'expliquer par l'existence d'effets seuil associé à un
équilibre multiple en liaison avec le développement du secteur
financier. Ces effets seuil introduisent des discontinuités qui ne sont
pas appréhendées par les modèles linéaires. Dans ce
cas, deux équilibres stables sont envisageables : un «
équilibre bas » avec des performances faibles en matière
d'investissement et de mobilisation de l'épargne intérieure et un
« équilibre haut » avec fort taux d'investissement et
d'épargne intérieurs. Entre les deux, il y a un équilibre
instable auquel on associe l'effet de seuil du taux d'épargne sur le
taux d'investissement. En présence d'effets de seuil, il n'est pas
possible également d'exprimer la contribution de l'épargne et du
crédit intérieurs à l'investissement par un modèle
linéaire qui volontairement ignore cette discontinuité.
Pour terminer, notre seconde hypothèse selon laquelle
les sens de causalité entre épargne et investissement sont
identiques en zone UEMOA a été rejetée dans le cadre d'un
modèle linéaire. Cependant peut-on mettre en évidence
l'impact du niveau de développement financier sur la causalité
épargne-investissement ?
SECTION 2 : MISE EN EVIDENCE DE LA RELATION ENTRE
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CAUSALITE EPARGNE-INVESTISSEMENT EN ZONE UEMOA
Dans cette section, il est question de mettre en
évidence la relation entre niveau de développement financier et
la causalité épargne-investissement en zone UEMOA.
C'est-à-dire de montrer que le système financier ne joue pas son
rôle dans la relation épargneinvestissement.
Spécifiquement, il s'agit d'abord de mettre en évidence par pays
la relation entre développement financier et causalité
épargne, crédit et investissement domestiques. Enfin, il a
été montré que le niveau de développement financier
ne constitue pas un facteur explicatif de l'absence de causalité
épargne-investissement en zone UEMOA.
I- Evidence par pays
Les résultats de la mise en évidence par pays
sont résumés dans le tableau 10. Ce tableau à double
entrées permet d'apprécier la relation entre niveau de
développement financier et causalité entre épargne et
investissement. Il s'agit de mettre en évidence l'influence de la
finance sur le sens de causalité entre ces variables dans la zone
UEMOA.
Tableau 10 : Mise en évidence de la
relation entre niveau de développement financier (2003-2008) et la
causalité épargne-investissement en zone UEMOA
|
|
Causalité
|
|
Développement financier
|
S.....? CR
|
CR.....? I
|
S ?. I
|
Élevé
|
|
|
|
Burkina Faso
|
?(+)
|
(+)?
|
Absence
|
Côte d'Ivoire
|
Absence
|
Absence
|
Absence
|
Togo
|
Absence
|
?(+)
|
Absence
|
Faible
|
|
|
|
Bénin
|
Absence
|
Absence
|
(+)?(+)
|
Mali
|
Absence
|
?(+)
|
Absence
|
Niger
|
Absence
|
Absence
|
Absence
|
Sénégal
|
(+)?
|
Absence
|
?(+)
|
Source : Compilation de l'auteur.
|
|
|
|
Les résultats ne confirment pas les conclusions
théoriques évoquées. En effet, il ressort que même
dans les pays à niveau de développement financier
élevé de l'UEMOA (Burkina Faso, Côte d'Ivoire et Togo),
l'épargne et le crédit domestiques ne constituent pas une source
de financement pour l'investissement sauf au Togo où le crédit
domestique précède l'investissement. Cependant, dans deux pays
à niveau de développement financier faible (Benin et le
Sénégal), il apparait une causalité dans le sens
épargne-investissement (avec une causalité bidirectionnelle au
Benin). Par suite, dans la plupart des pays de l'UEMOA,
l'épargne et le crédit domestique n'ont pas
d'effets sur l'investissement intérieur aussi bien dans les pays
à niveau financier dit développer ou faible.
L'absence de lien entre le niveau de développement
financier et la causalité épargneinvestissement dans la zone
UEMOA traduit bien l'incapacité du système financier de l'UEMOA
à transformer l'épargne domestique en crédit pour financer
l'investissement. Il est donc évident que la masse d'investissement dans
l'UEMOA ne trouve pas son origine dans le système financier et dans
l'épargne intérieure. Les investissements réalisés
à partir des capitaux étrangers ou via l'endettement
extérieur devraient représenter l'essentiel du volume de
l'investissement domestique. En outre, le climat d'incertitude
économique et sociologique (risque de crises politiques par exemple) qui
prévaut dans les pays de l'UEMOA ne favorise pas véritablement
l'essor d'un système financier développé apte à
transformer l'épargne domestique en investissements domestiques.
Notre résultat parait pertinent en ce qui concerne la
zone UEMOA car les études antérieures ont abouti aux mêmes
résultats pour la zone en ce qui concerne la causalité
épargneinvestissement Doko et al (2004). Quant à
l'évaluation du niveau de développement financier, à notre
connaissance il semble ne pas exister d'études antérieures dans
ce domaine pour le cas particulier de l'UEMOA, mais reflète la
réalité du secteur financier de la zone UEMOA.
A la lumière des résultats des différents
niveaux de développement financier, quelles explications peut-on donner
à l'absence de relation linéaire entre épargne,
crédit et investissement domestiques dans la plupart des pays de l'UEMOA
?
II- Absence de corrélation entre niveau de
développement financier et causalité épargneinvestissement
en zone UEMOA
Aujourd'hui, il est indéniable qu'un secteur financier
efficace exerce un impact positif sur l'économie, que ce soit au niveau
de la productivité des entreprises, de l'accumulation de capital, de
l'accroissement de l'épargne, d'allocation de crédit à
l'investissement, ou de la croissance. Selon des études de la Banque
mondiale, une augmentation de 10 % de la densité des circuits
financiers28 (liquidités) s'accompagne d'une
accélération de la croissance du PIB par habitant de 2,8 % ; ce
qui est considérable.
28 La densification des circuits financiers, entendue
comme un accroissement du pourcentage du PIB représenté par les
actifs financiers.
De plus, le rôle de l'épargne intérieure
dans le financement de l'investissement productif par le canal de crédit
n'est plus un fait à démontrer eu égard au
développement fulgurant des pays d'Asie du Sud Est (taux
d'épargne avoisine les 30%).
Malgré la corrélation positive entre
l'investissement intérieur et l'épargne intérieure, il y a
une absence de causalité entre les deux séries dans la plupart
des pays et en plus le crédit n'a pas d'effets sur l'investissement ; ce
constat laisse penser à l'existence d'effets seuil associé
à un équilibre multiple en liaison avec le développement
du secteur financier. Dans ces conditions, peut-on dire que l'absence de
causalité entre épargne et investissement trouve son explication
dans le domaine financier ?
Il ressort de la synthèse des résultats de
l'étude que l'épargne intérieure n'est pas vertueuse dans
tous les pays de l'UEMOA (excepté le Benin et le Sénégal)
quel que soit le niveau de développement financier. Cette situation
pourrait s'expliquer par le fait que la zone est caractérisée par
le manque d'infrastructures bancaires, qui s'ajoute à la
surliquidité bancaire et le dualisme financier liés aux
phénomènes d'asymétrie informationnelle qui font que les
secteurs informel et agricole représentant plus de 80% du secteur
économique n'ont pas accès aux financements bancaires. La
conséquence de cette situation est que le non financement des
investissements conduit les entreprises à dégager moins de
revenus et donc moins d'épargne : on est donc dans une situation de
cercle vicieux de développement. L'absence de causalité
entre épargne et investissement s'explique donc en partie par le faible
niveau de développement financier dans tous les pays de l'UEMOA.
En conclusion, la relation entre épargne, crédit
et investissement domestiques dans les pays de l'UEMOA ne dépend pas du
niveau de développement financier de ces pays. En effet, il y a une
absence de relation de causalité entre l'épargne et
l'investissement aussi bien dans les pays financièrement
développés ou pas (sauf au Benin et au Sénégal
malgré que le niveau de développement financier est faible). Ce
qui laisse présager que ce n'est pas seulement la faiblesse du niveau de
développement financier qui constitue le problème, mais aussi, la
faiblesse de l'épargne qui fait que l'épargne est insuffisante
pour être utiliser à financer l'investissement. De plus, on peut
aussi dire que ce résultat reflète la situation de
mobilité parfaite des capitaux entre les pays de l'Union si on se
réfère à l'analyse rationnelle de Feldstein et Horioka
(1980).
A la lumière de tout ce qui précède, nous
pouvons affirmer que notre dernière hypothèse n'est pas
vérifiée car la causalité entre épargne et
investissement ne dépend pas du niveau de développement
financier.
Au terme du chapitre, il ressort principalement que la
relation qu'entretiennent l'épargne, le crédit et
l'investissement dans la zone UEMOA méritait une attention
particulière vue le contexte international actuel. Ainsi, nous avons
testé la causalité entre les trois variables afin de mettre en
évidence l'impact du niveau de développement financier sur ladite
causalité. Les résultats des tests ont
révélé que le crédit intérieur cause
l'investissement au Mali et au Togo, mais au Burkina c'est plutôt
l'inverse qui s'observe. Quant à la relation entre épargne et
l'investissement, il ya une absence de causalité entre ces deux
variables dans la plupart des pays de l'UEMOA. Enfin, on n'a pas pu
déceler une évidence empirique entre le niveau de
développement financier et la relation entre épargne et
investissement. Cette absence de relation statistique est attribuée
à situation de mobilité parfaite des capitaux et à
l'existence probable d'effets de seuil du fait de la faiblesse de
l'épargne dans la zone UEMOA.
CONCLUSION GENERALE ET RECOMMANDATIONS
Cette étude avait pour objet d'analyse la relation
entre niveau de développement financier et la causalité entre
épargne, crédit et investissement domestiques en zone UEMOA. Elle
a été menée sur sept29 des huit pays de cette
zone considérés sur la période de 1977 à 2008. Il
s'agissait de tester l'hypothèse affirmant une relation positive entre
le développement financier et la causalité dans le sens
épargne-investissement.
Pour atteindre cet objectif le chapitre I a fait le contour
des fondements théoriques et empiriques de la relation
épargne-investissement. Dans ce chapitre, nous avons
présenté premièrement les différentes controverses
théoriques et empiriques des précurseurs de la pensée
macroéconomique (néoclassiques et keynésiens) du
rôle de l'épargne et de l'investissement dans le processus de
croissance. Enfin, il a été question des débats
récents sur le rôle des institutions financières dans la
mobilisation de l'épargne financière et son orientation vers
l'investissement.
Au chapitre II nous avons tenté d'évaluer les
différents nivaux de développement financier des pays de l'UEMOA
afin de les classer. Cela a nécessité au préalable
l'analyse de la notion de développement financier et par la suite son
évaluation quantitative. Mais avant l'évaluation quantitative des
niveaux de développement financier, il a été
nécessaire de présenter le contexte et le cadre dans lesquels
nous avons conduit nos recherches. L'analyse de l'environnement financier nous
a révélé qu'il est caractérisé par un
dualisme financier, une surliquidité du système bancaire et une
faible mobilisation de l'épargne domestique. La détermination de
l'indice synthétique à l'aide de la méthode ACP a permis
de montrer qu'il y a une dispersion en termes de développement financier
des pays de l'UEMOA.
Après la mise en évidence des différents
niveaux de développement financier, le chapitre III s'est
consacré à l'analyse empirique de la causalité
épargne-crédit-investissement en zone UEMOA et a permis de mettre
en relief l'impact du niveau financier sur ladite causalité. C'est ainsi
que l'analyse descriptive a fait ressortir les tendances d'épargne et
d'investissement au niveau régional et national.
29 La Guinée-Bissau n'a pas
été prise en compte pour absence de données sur longue
période.
L'investigation économétrique de la
causalité épargne-investissement montre qu'il y a une absence de
causalité entre épargne et investissement au Burkina Faso, en
Côte d'Ivoire, au Mali, au Niger et au Togo. Au Bénin par contre,
les résultats montrent une causalité bidirectionnelle dans le
sens épargne vers investissement. Quant au Sénégal, on
observe une causalité unidirectionnelle de l'épargne vers
l'investissement. Ce qui signifie qu'il y a une mobilité parfaite des
capitaux dans la zone UEMOA (sauf au Bénin et au Sénégal).
De plus, nous avons pensé à une éventuelle existence
d'effets de seuil associés à un équilibre multiple en
liaison avec le développement du secteur financier eu égard la
faiblesse des taux d'épargne intérieure des pays de l'UEMOA.
On n'a pas pu déceler une relation significative entre
niveau de développement financier et causalité
épargne-investissement en considérant le canal de crédit.
Les résultats ne confirment donc pas les conclusions théoriques
évoquées dans cette étude qui supposent que lorsque les
institutions financières sont développées, elles
mobilisent l'épargne et l'orientent vers l'investissement. Cependant,
même les pays dits financièrement développés dans la
zone UEMOA même, il n'y a aucune causalité entre les variables
d'intérêt.
Enfin sur la base des résultats issus de la
vérification des hypothèses, un certain nombre de recommandations
en termes de politique économique peuvent être
formulées.
D'abord, au niveau des pays pris individuellement, les
politiques visant à promouvoir l'épargne intérieure sont
nécessaires au Bénin et au Sénégal. Par contre pour
les cinq autres pays de l'UEMOA où l'investissement n'est pas lié
à l'épargne intérieure, les politiques économiques
doivent être axées sur l'incitation à l'investissement et
la réduction des sorties des capitaux.
Ensuite, pour une plus grande mobilisation de l'épargne
domestique au niveau communautaire les autorités doivent prendre des
mesures « obligeant » le système bancaire à exercer
efficacement ses fonctions fondamentales d'intermédiation par
l'instauration effective de la concurrence sur le marché bancaire et la
suppression de l'oligopole bancaire. En d'autres termes les mécanismes
du marché doivent être instaurés pour que les taux
d'intérêt puissent être attractifs pour l'épargne et
l'investissement. Par exemple, en instaurant la concurrence au sein du
système bancaire. Ces mesures ne seront possibles sans une plus grande
accessibilité du système financier qui constitue une condition
nécessaire.
Puis, la non significativité du crédit bancaire
dans les fonctions d'investissement et d'épargne surtout dans un
contexte de surliquidité bancaire comme celui de l'UEMOA s'explique par
la présence d'un rationnement du crédit bancaire. Dans ce cas,
les autorités doivent travailler à réduire les
asymétries informationnelles. Par exemple, mettre en place, des
structures publiques ou privées au niveau régional et/ ou
national chargées de collecter des informations concernant le
degré de solvabilité des emprunteurs potentiels, ainsi que de
l'environnement judiciaire des affaires nécessaire à la
conclusion et l'exécution des contrats financiers et de garanties.
Enfin, l'hétérogénéité
financière est éclairée à partir de l'existence des
écarts de développement financier trop important au sein
même des pays de l'UEMOA. De ce fait, les pays de l'UEMOA doivent veiller
à assurer une homogénéité financière
grâce à la conduite des politiques économiques visant la
réduction des écarts du développement de leurs
systèmes financiers puisque
l'hétérogénéité financière affaiblit
tout effet bénéfique de l'intégration sur la croissance
économique.
Cependant, cette étude comporte un certain nombre
d'insuffisances. Une limite importante concerne d'abord les indicateurs
financiers retenus qui ne sont pas exhaustifs car ils occultent le secteur de
la microfinance et les indicateurs d'instabilité financière qui
influencent l'environnement financier. Le modèle
économétrique utilisé pourrait être
amélioré en utilisant le modèle de cointégration et
de causalité non linéaires pour prendre en compte la
présence d'éventuels effets seuil.
Les prochaines études dans ce domaine devront prendre
en compte, dans la mesure du possible, ces différentes limites en
intégrant par exemple l'évaluation du degré
d'intégration financière et la question de la mobilité des
capitaux entre les pays de l'UEMOA en utilisant le modèle
amélioré de Feldstein et Horioka (1980) vue que la
mobilité des capitaux constitue l'un des objectifs assignés
à l' UEMOA.
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Annexes
ANNEXES
Tableau A 1 : Corrélation entre les indicateurs
de développement financier
Pays
|
LDCBS
|
LDCPS
|
LLPIB
|
LDCPS
|
LLPIB
|
LDCBS
|
LLPIB
|
LDCBS
|
LDCPS
|
Bénin
|
0,837
|
-0,461
|
0,837
|
-0,360
|
-0,461
|
-0,360
|
Burkina Faso
|
-0,270
|
-0,271
|
-0,270
|
0,959
|
-0,271
|
0,959
|
Côte d'Ivoire
|
0,932
|
0,707
|
0,932
|
0,799
|
0,707
|
0,779
|
Mali
|
0,736
|
-0,677
|
0,736
|
-0,186
|
-0,677
|
-0,186
|
Niger
|
0,771
|
0,651
|
0,771
|
0,663
|
0,651
|
0,663
|
Sénégal
|
0,905
|
-0,219
|
0,904
|
0,140
|
-0,219
|
0,905
|
Togo
|
0,784
|
0,780
|
0,784
|
0,999
|
0,780
|
0,140
|
Tableau A 2 : Statistiques descriptives des
indicateurs de développement financier.
Pays
|
LDCBS
|
LDCPS
|
LLPIB
|
Mean
|
S.D
|
Max
|
Min
|
Mean
|
S.D
|
Max
|
Min
|
Mean
|
S.D
|
Max
|
Min
|
Bénin
|
2,660
|
0,559
|
3,469
|
1,518
|
2,816
|
0,476
|
3,460
|
1,739
|
3,155
|
0,173
|
3,493
|
2,760
|
Burkina Faso
|
2,558
|
0,262
|
2,911
|
1,914
|
2,918
|
0,205
|
3,244
|
2,575
|
2,841
|
0,230
|
3,127
|
2,460
|
Côte d'Ivoire
|
3,443
|
0,357
|
3,936
|
2,890
|
3,207
|
0,448
|
3,743
|
2,611
|
3,261
|
0,113
|
3,442
|
3,084
|
Mali
|
2,933
|
0,437
|
3,744
|
2,329
|
2,782
|
0,244
|
3,171
|
2,183
|
3,060
|
0,191
|
3,407
|
2,717
|
Niger
|
2,479
|
0,384
|
3,019
|
1,634
|
2,230
|
0,554
|
2,871
|
1,194
|
2,591
|
0,298
|
3,007
|
1,939
|
Sénégal
|
3,386
|
0,283
|
3,835
|
3,031
|
3,171
|
0,287
|
3,625
|
2,687
|
3,176
|
0,161
|
3,129
|
2,689
|
Togo
|
3,147
|
0,195
|
3,510
|
2,768
|
3,036
|
0,228
|
3,423
|
2,520
|
1,107
|
0,076
|
1,230
|
0,924
|
ix Développement financier et
causalité entre épargne et investissement en zone UEMOA
TABLE DES MATIERES
DEDICACE i
REMERCIEMENTS ii
SIGLES ET ABREVIATIONS iv
LISTE DES TABLEAUX v
LISTE DES GRAPHIQUES vi
RESUME vii
ABSTRACT viii
INTRODUCTION GENERALE 1
CHAPITRE I : FONDEMENTS THEORIQUES ET EMPIRIQUES DE
LA RELATION EPARGNE-INVESTISSEMENT. 7
SECTION 1 : LES DEBATS ANCIENS SUR LA RELATION ENTRE EPARGNE
ET INVESTISSEMENT 7
I-L'epargne et l'investissement dans l'économie : les
débats théoriques 8
I-1-L'épargne comme un préalable à
l'investissement 8
I-2-L'épargne comme source d'instabilité pour la
demande 9
II-Les études empiriques sur la relation
épargne-investissement. 10
II-1-Les développements sur la corrélation entre
épargne et investissement. 10
II-2-Les développements empiriques sur le sens de
causalité entre épargne et investissement. 13
II-3-Hétérogénéité de la
relation au sein d'une zone 16
SECTION 2 : LA RELATION EPARGNE-INVESTISSEMENT DANS
L'OPTIQUE FINANCIERE 17
I-La finance dans la relation entre épargne et
investissement 17
I-1-La finance comme instrument de canalisation de
l'épargne vers l'investissement 17
I-2-impact de la répression financière sur
l'ajustement épargne investissement 19
II-L'analyse post-keynésienne de la finance, de
l'épargne et de l'investissement. 20
II-1-La création monétaire, l'origine logique de
tout investissement dans un monde keynésien. 20
II-2-Le modèle stock-flux et le circuit finance-
investissement- épargne (FIE). 21
CHAPITRE II : SPECIFICITES ET NIVEAUX DE DEVELOPPEMENT
FINANCIER DES PAYS DE L'UEMOA. 24
SECTION 1 : LES SPECIFICITES DU SYSTEME FINANCIER DE L'UEMOA.
24
I-L'Inefficacité du système financier. 25
I-1-La prédominance des institutions financières
bancaires. 25
I-2-Un système financier qualifié de «
réprimé ». 26
I-3-Le dualisme financier 27
II-Les échecs relatifs des politiques de
libéralisation financière 29
II-1- La faiblesse de l'épargne mobilisée 30
II-2-Le problème de la surliquidité du
système bancaire. 31
II-3-La volatilité des spreads des taux bancaires 34
SECTION 2 : EVALUATION DES NIVEAUX DE DEVELOPPEMENT FINANCIER
DES PAYS DE L'UEMOA 35
I-Les préalables à la construction de l'indice du
développement financier 36
I-1-Définition d'un système financier
développé 36
I-2- Les indicateurs de développement financier retenus en
zone UEMOA 38
II-Les niveaux de développement financier des pays de
l'UEMOA : le résultat de l'indice financier. 40
II-1-Mesure de développement financier : l'analyse en
composantes principales (ACP).
40
II-2- Les catégories de développement financier en
zone UEMOA 42
CHAPITRE III: RELATION ENTRE DEVELOPPEMENT FINANCIER
ET CAUSALITE EPARGNE-INVESTISSEMENT EN ZONE UEMOA. 44
I-Tendances d'épargne et d'épargne et
d'investissement dans l'UEMOA : Une analyse descriptive et economique des
donnees 44
I-1-L'UEMOA, une zone structurellement en besoin de financement
45
I-2-La tendance d'épargne et d'investissement par pays.
46
II-Etude de variation du sens de causalite entre epargne et
investissement en zone UEMOA 51
II-1-Synthèse de la methodologie d'analyse
économétrique 52
II-1-1-Tests de stationnarite 52
II-1-2-Test de cointegration 53
II-1-3-Test de causalite 55
II-2-Resultats empiriques 57
II-2-1- Resultats des tests de stationnarite 57
II-2-3 -Test de cointegration. 58
II-2-3- Estimation et test de causalite par pays. 60
SECTION 2 : MISE EN EVIDENCE DE LA RELATION ENTRE
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CAUSALITE EPARGNE-INVESTISSEMENT EN ZONE UEMOA
64
I- Evidence par pays. 64
II- Absence de correlation entre niveau de developpement
financier et causalite epargneinvestissement en zone UEMOA. 65
CONCLUSION GENERALE ET RECOMMANDATIONS 68
BIBLIOGRAPHIE 71
ANNEXES ix
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