3.2.3. Pathologies infectieuses et grossesse
3.2.3.1. Infections urinaires
Les infections urinaires sont relativement fréquentes
au cours de la grossesse avec une prévalence de 5 à 10 % suivant
les auteurs. Le germe le plus souvent en cause est Escherichia coli
(80 % en cas d'infection initiale).
Les infections urinaires de la femme enceinte exposent
classiquement l'enfant à quatre risques principaux : l'avortement tardif
ou l'accouchement prématuré, l'hypotrophie foetale, la souffrance
foetale voire la mort foetale in utero et l'infection
néonatale.
Le traitement efficace et précoce des infections
urinaires permet d'éviter les complications. Il fait appel à des
mesures hygiéno-diététiques telles que les boissons
abondantes, les mictions fréquentes, l'hygiène
périnéo-vaginale et à des antibiotiques notamment les
pénicillines du groupe A et les céphalosporines [88].
3.2.3.2. Infections vaginales gravidiques
- Trichomonase vaginale
Elle peut être une cause de gêne importante pour
la femme enceinte infectée mais les infections foetales à
Trichomonas vaginalis sont très rares car le parasite ne
s'étend pas au delà du col. Le traitement spécifique
utilise le métronidazole à partir du 2ème
trimestre de la grossesse par voie locale à raison d'un ovule par jour
pendant 7 à 10 jours [87].
- Candidoses vaginales
Les vulvo-vaginites fongiques constituent les plus
fréquentes des infections vaginales gravidiques. Candida
albicans est responsable de ces infections dans 80 % des cas.
L'existence d'une vulvo-vaginite fongique maternelle lors de
l'accouchement entraîne une augmentation des taux des infections
fongiques néonatales.
Le traitement utilise des médicaments comme la
nystatine ou l'amphotéricine B par voie locale (vaginale) et/ou orale.
Ces deux produits ont en effet une action locale car très faiblement
résorbés. Les traitements locaux par certains
dérivés imidazolés (éconazole, miconazole,
isoconazole) ont été utilisés mais avec un risque inconnu
pour le foetus [87].
- Autres infections
D'autres agents infectieux notamment des bactéries peuvent
également être responsables d'infections vaginales gravidiques.
C'est le cas de Gardnerella vaginalis [87].
3.2.3.3. Infections materno-foetales
- L'infection à VIH
Le risque de transmission du VIH d'une mère
infectée à son enfant varie entre 25 et 45 % dans les pays en
développement. Cette transmission est beaucoup plus marquée en
fin de grossesse, au moment de l'accouchement et au cours de l'allaitement
maternel. La prise en charge médicale et psychosociale doit tenir compte
de l'état spécifique de la femme enceinte. Toute prise
médicamenteuse doit tenir compte du risque tératogène
surtout au cours du premier trimestre de la grossesse.
Chez la femme enceinte, l'évolution de la grossesse
peut être compromise par des avortements spontanés en rapport avec
une augmentation de la virémie au cours des deux premiers mois. Le
foetus peut en outre être infecté au cours de l'évolution
de la grossesse. Au stade SIDA, on peut avoir des complications à type
de fausse couche, de travail prématuré, et de faible poids de
naissance.
Au Burkina Faso, la Névirapine est utilisée dans la
prévention de la transmission mèreenfant de l'infection par le
VIH1 d'après le schéma thérapeutique suivant :
* à la mère : dès le début du travail
ou l'expulsion : prise unique de 200mg ;
* au nouveau-né : prise unique de 2mg/Kg dans les 72
heures suivant la naissance.
En cas d'infection par le VIH2 ou mixte, l'Azidothymidine
(AZT) est utilisé à raison de 300mg deux fois par jour par voie
orale au cours des quatre dernières semaines de la grossesse [68].
- Le paludisme
La grossesse, par des mécanismes non encore
élucidés, entraîne une diminution des défenses
immunitaires humorales et cellulaires. Cela se traduit par une augmentation de
la fréquence et de la gravité des accès palustres chez les
femmes enceintes prémunies des zones impaludées. Les accès
palustres sont plus fréquents au cours du second trimestre de gestation
et chez les primigestes. Leur gravité est plus marquée au cours
du troisième trimestre, durant le travail ou dans les suites
immédiates de couches.
L'influence du paludisme sur la grossesse est plus difficile
à apprécier en zone d'endémie du fait de la coexistence
d'autres affections et des carences nutritionnelles. Le paludisme semble
responsable de mort foetale in utero, d'avortements, d'accouchements
prématurés, de mortinatalité et de souffrance foetale. Le
parasite, par son action hémolytique, aggrave l'anémie gravidique
; l'hyperthermie due à la libération de pigment malarique dans le
sang circulant peut déclencher prématurément le travail.
La séquestration des hématies dans le placenta, responsable en
partie d'anémie et d'anoxie foetales, pourrait être l'un des
mécanismes physiopathologiques à l'origine du faible poids
à la naissance d'enfants nés de mères impaludées.
Enfin, la possibilité d'un passage transplacentaire du plasmodium est
à l'origine du paludisme congénital [10 ; 36 ; 88].
Au Burkina Faso, le nouveau protocole de traitement du paludisme
adopté en 2005 préconise chez la femme enceinte [62]:
i) en prophylaxie, l'association
Sulfadoxine-Pyriméthamine remplace la chloroquine
devenue peu efficace à la suite d'apparition de souches
résistantes de Plasmodium. Le schéma thérapeutique
consiste en une prise unique per os de 3 comprimés dès
l'apparition des mouvements foetaux, à partir de 16 SA. La prise est
renouvelée avant le 8ème mois de grossesse tout en respectant un
délai d'au moins un mois avec la première prise. Au premier
trimestre, on recommande l'utilisation de moustiquaires
imprégnées d'insecticides ;
ii) en traitement curatif, les sels de quinine par voie orale
sont prescrits à la posologie de 8mg/kg de quinine base toutes les 8
heures pendant 5 à 7 jours, dans le paludisme simple. Pour le paludisme
grave il est recommandé une perfusion de sels de quinine à la
posologie de 20 mg/kg en dose de charge puis 10mg/kg toutes les 8 heures dans
du soluté glucosé à 5 %.
- La toxoplasmose
La toxoplasmose est une affection cosmopolite due à
Toxoplasma gondii. Si le plus souvent elle passe inaperçue, au
cours de la grossesse le risque majeur est le passage transplacentaire qui
expose l'enfant à la toxoplasmose congénitale avec comme
conséquences :
* hydrocéphalie ou microcéphalies dans 50 % des cas
;
* des convulsions dans 50 % des cas ;
* un retard psychomoteur ;
* des signes oculaires à types de microphtalmie, de
strabisme et de choriorétinites ;
* parfois l'avortement.
Au cours des trois premiers mois de la grossesse, l'infection
est rare, mais grave pour l'embryon et le foetus. Durant le dernier trimestre,
la transmission de la toxoplasmose à l'enfant est fréquente. Les
lésions sont moins sévères et apparaissent au cours de la
première année de vie. Le diagnostic de la toxoplasmose est
surtout immunologique. Le sérodiagnostic comprend la recherche des IgG
qui apparaissent 8 jours après l'infection et des IgM qui apparaissent
rapidement et restent présents pendant 1 à 2 mois. Chez les
femmes enceintes non immunisées, une séro-surveillance s'impose
tous les mois. Des mesures hygiéno-diététiques doivent
être prises afin d'éviter une infestation au cours de la
grossesse.
Le traitement de la toxoplasmose repose sur la spiramycine car
bien tolérée. L'association à la pyriméthamine est
plus efficace, mais dans ce cas il faut associer systématiquement
l'acide folinique du fait de la toxicité hématologique de la
pyriméthamine [21].
- La rubéole
Elle est due à un virus du genre Rubivirus et sa
transmission se fait par voie aérienne. Chez la femme enceinte la
rubéole peut provoquer :
* une embryopathie caractérisée par des
malformations atteignant le coeur, les yeux, avec une cataracte parfois
bilatérale, l'appareil auditif avec une surdité, le crâne
et l'encéphale ;
* une foetopathie avec une anomalie sanguine (purpura
thrombopénique), une atteinte du foie, de la rate et des os. La
rubéole suscite l'apparition d'anticorps et confère une
immunité définitive d'où l'intérêt de la
vaccination et du sérodiagnostic.
La vaccination contre la rubéole est
contre-indiquée au cours de la grossesse [21].
- L'infection à Herpès Simplex Virus
(HSV)
Chez la femme enceinte le problème important que pose
l'infection à HSV est celui de la transmission possible de l'agent
infectieux à son enfant.
Durant les 20 premières semaines de la grossesse, un
avortement spontané suivrait la primo-infection dans 25 % des cas. En
l'absence d'avortement le virus pourrait causer soit
une mort in utero, soit des séquelles visibles
à la naissance : choriorétinites, cataractes,
microcéphalies ou hydrocéphalies.
Après la 20ème semaine il n'y aurait
plus de risque de transmission transplacentaire [94].
- L'infection à Cytomégalovirus
(CMV)
Diverses études ont conclu à l'existence de 1
à 2 % de primo-infections durant la grossesse parmi les femmes enceintes
non immunes. Parmi ces cas, 40 % des futurs enfants seraient infectés et
entre 5 et 10 % d'entre eux seraient atteints cliniquement [77 ; 94].
- L'infection par le Virus
Zona-Varicelle
Les risques encourus par le foetus ou le nouveau-né
suite à une résurgence virale c'està-dire le zona, sont
nuls pour le futur enfant. La varicelle en début de grossesse est en
revanche préoccupante puisque le passage transplacentaire du virus peut
être responsable d'hypoplasie des extrémités, d'atrophie
corticale et de retard mental. Une varicelle congénitale est possible si
la mère contracte l'infection dans les 17 jours qui
précèdent l'accouchement.
Il n y a pas de traitement spécifique de la varicelle. Une
hygiène corporelle rigoureuse évite les complications [10 ;
94].
- La syphilis
Le tréponème pâle serait capable de
traverser la barrière placentaire à n'importe quel stade de la
grossesse. Le risque de contamination foetale est quasi nul avant le
3ème ou 4ème mois de gestation. Après cette
période le risque est fonction de la phase de syphilis maternelle. Par
exemple, au cours de la syphilis secondaire, la contamination foetale est
présente dans plus de 90 % des cas. Les conséquences possibles de
la contamination foetales sont :
* l'accouchement prématuré ou l'avortement tardif
;
* la mort foetale in utero avec macération foetale ou la
mort périnatale ; * la syphilis néonatale.
Les médicaments utilisés chez la femme enceinte
sont identiques à ceux de l'adulte en dehors de la grossesse à
savoir pénicilline G 1 million UI par jour pendant 15 jours et en cas
d'allergie, l'érythromycine à raison de 2 g par jour pendant 15
jours [30 ;87].
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