REPUBLIQUE DU BURUNDI
UNIVERSITE MARTIN LUTHER KING
FACULTE DE GESTION ET
ADMINISTRATION DES AFFAIRES
ESSAI D'ANALYSE DU FONCTIONNEMENT DU SECTEUR INFORMEL
DANS LA DIMINUTION DU CHOMAGE AU BURUNDI : CAS DES ACTIVITES
INFORMELLES A BUJUMBURA MAIRIE
Par:
MULINDAHABI Faustin
et
GISAHO Mussa
Mémoire présenté et défendu
publiquement en vue de l'obtention
du grade de licencié en Gestion et
Administration des Affaires
Membres du Jury:
- Président : NIYUNGEKO Paul
- Directeur : Docteur NDAYEGAMIYE Adrien
- Secrétaire : NIMPAYE Emery
Bujumbura,
Novembre 2010
DEDICACE
A mon regretté père,
A toute ma famille,
A mes chers amis et connaissances,
Je dédie ce mémoire.
MULINDAHABI Faustin.
A mon regretté père,
A ma très chère mère pour tous les
sacrifices consentis, son amour et soutien
A mes frères et soeur
A mes cousins et cousines
A mes regrettés oncles et tantes
A mes amis et camarades de classe
A toutes mes connaissances.
Je dédie ce mémoire.
GISAHO Mussa
REMERCIEMENTS
Au terme de ce travail, qu'il nous soit permis d'exprimer
notre gratitude à l'endroit de ceux qui nous ont prêté
main-forte pour la réalisation de ce mémoire.
Nous tenons à remercier et à exprimer notre
reconnaissance à notre directeur de mémoire, Docteur Adrien
NDAYEGAMIYE pour avoir accepté de nous encadrer. Sa démarche
méthodique, sa disponibilité et surtout sa rigueur scientifique
nous ont permis d'apprendre énormément pendant ce travail.
Grâce à vous, nous avons pu réaliser ce travail
consciencieusement. Nous vous en sommes profondément reconnaissants. Que
le Seigneur vous accorde ses abondantes bénédictions!
Notre remerciement s'adresse également à tous
les professeurs de l'U.M.L.K., pour les connaissances qu'ils nous ont
dispensées tout au long de nos études à l'UMLK.
Enfin, qu'il nous soit permis d'exprimer globalement nos
remerciements à toutes les personnes physiques et morales, qui de
près ou de loin , ont manifesté leur appui et ont
contribué à la réalisation de ce mémoire.
GISAHO Mussa
MULINDAHABI Faustin
LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS
AFRISTAT : Observatoire Economique et Statistique
d'Afrique Subsaharienne
ASBL : Association Sans But Lucratif
BIT : Bureau International du Travail
BM : Banque Mondiale
BNDE : Banque Nationale pour le Développement
Economique
BTE : Bureau Technique d'Etudes
CIST : Conférence Internationale des
Statisticiens du Travail
CSLP : Cadres Stratégiques nationaux de
Lutte contre la Pauvreté
CURDES : Centre Universitaire de Recherche pour le
Développement Economique
et Social
DSRP : Documents Stratégiques de
Réduction de la Pauvreté
EAC : East African Community
FAO : Organisation des Nations Unies pour
l'Alimentation et l'Agriculture
FIDA : Fonds International de Développement
Agricole
FMI : Fonds Monétaire International
IDEC : Institut de Développement
Economique
IDH : Indice du Développement Humain
IMF : Institution de Microfinance
IRD : Institut de Recherche pour le
Développement
ISTEEBU : Institut de statistique et d'étude
économique du Burundi
OBR : Office Burundais des Recettes
OCDE : Organisation de Coopération et de
Développement Economique
ONG : Organisation Non Gouvernementale
ONU : Organisation des Nations Unies
Op.Cit : Opere citato
PAM : Programme Alimentaire Mondial
PAS : Programmes d'Ajustement Structurel
PIB : Produit Intérieur Brut
PIP : Programme d'Investissement Public
PME : Petites et Moyennes Entreprises
PMRSE : Projet
Multisectoriel de Réinsertion Socioéconomique
PNB : Produit National Brut
PNUD : Programme des Nations Unies pour le
Développement
PQDES : Plan Quinquennal de Développement
Economique et Social
PTPCE : Projet de Travaux Publics et de
Création d'Emplois
PVD : Pays en Voie de Développement
QUIBB : Questionnaire Unifié des
Indicateurs de Base du Bien-être
RDC : République Démocratique
du Congo
SF : Secteur Formel
SI : Secteur Informel
SNDD : Stratégies Nationales de
Développement Durable
SOGEMAC : Société de Gestion du
Marché Central
TVA : Taxes sur Valeur Ajoutée
UEMOA : Union Economique et Monétaire
Ouest Africaine
UMLK : Université Martin Luther King
UPI : Unité de Production
Informelle
UPRONA : Union pour le Progrès National
Liste des tableaux
Tableau no1 : Evolution des offres et demande
d'emploi sur le marché burundais
de 1988 à
2000...................................................... 38
Tableau n°2 : Offre d'une vue synthétique des
différentes interventions....... 43
Tableau n°3 : Répartition des emplois
supprimés suite à l'embargo............. 42
Tableau no4 : Evolution de la
pauvreté, 1990-2000................................. 44
Tableau no5 : Circulation de l'information sur le
marché du travail informel
au
Burundi............................................................... 53
Tableau no6 : Questionnaires posés
répondus et non répondus .................. 69
Tableau no7 : La composition du secteur
informel du point de vue genre...... 70
Tableau no8 : Structure des
emplois par secteur institutionnel.................... 71
Tableau no9 : Création
d'emploi...................................................... 72
Tableau no10 : Affectation des
bénéfices dans le SI ............................... 73
Tableau no 11: Embauche dans le SI
selon catégorie............................... 74
Tableau no12 : Mécanisme de
communication pendant le recrutement.......... 76
Tableau no13 : Supplément de revenu
............................................... 78
Tableau no14 : Accueil des différentes
opinions des différentes personnes
en rapport avec la pérennité des
activités informelles........... 83
Liste des Graphiques
Graphique 01 : Circulation de l'information sur le
marché du travail informel au
Burundi...................................................................
54
Graphique02 : Structure des emplois par secteur
institutionnel..................... 72
Liste des figures, photos
Annexe no1 : Couture, un metier
rémunérateut: Il fait vivre beaucoup de menages.. A
Annexe no2 : Le commerce ambulant et les
marchés informels........................ B
Annexe no3 : Vendeuse des fruits
......................................................... C
Annexe no4 : Commerce des fruits et légumes
autours du marché central de
Bujumbura.....................................................................
D
Annexe no5 : Aménagement
de nouveaux stands du coté nord du marché central de
Bujumbura
......................................................................E
Annexe no6 : Restaurants-alimentation
préparée....................................... F
Annexe no7 : Interdiction de l'élevage
urbain ........................................... G
Annexe no8 : Menaces de
l'environnement................................................ H
Annexe no9 :
Questionnaire....................................................................
I
TABLE DES MATIERES
Dédicace..................................................................................
i
Remerciements.........................................................................
ii
Liste des sigles et
abréviations.......................................................
iii
Liste des
tableaux.......................................................................
v
Liste des figures,
photos...............................................................
v
Table des
matières......................................................................
vi
INTRODUCTION
GENERALE................................................... 1
1. Choix et intérêt du
sujet.............................................................. 1
2. Contexte et justification du
choix................................................... 1
3. Problématique et Objectif de
l'étude................................................ 2
4.
Hypothèses..............................................................................
4
5. Méthodologie
.......................................................................... 5
6. Articulation du
travail.................................................................. 5
CHAPITRE I. CADRE CONCEPTUEL ET
THEORIQUE................... 7
Introduction.................................................................................
7
I.1. Définition des
concepts............................................................... 7
I.1.1. Secteur Informel
.....................................................................
7
I.1.2.
Chômage .............................................................................
10
I.1.3. Le marché du travail
............................................................... 12
I.1.4.La main-d'oeuvre
..................................................................... 12
I.1.5. Pluriactivité
..........................................................................
12
I.1.6. Supplément du
revenu.............................................................. 13
I.1.7. Pérennité
............................................................................
13
I.1.8. Développement
.....................................................................
13
I.2. Cadre
théorique........................................................................
14
I.2.1. Dynamiques du changement social vues sous l'angle du
processus de
désencastrement de K.
Polanyi.................................................... 14
I.2.1.1. Accumulation et fragilisation des masses populaires
......................... 16
I.2.1.2. Désencastrement de l'économie dans les
analyses de K. Polanyi............ 17
I.2.2. Le débrouillardisme et les réseaux
informels.................................... 19
I.2.3. Mouvements de résistance des acteurs
populaires............................... 26
Conclusion
..................................................................................
26
CHAPITRE II. LE DEVELOPPEMENT DU SECTEUR INFORMEL ET
SON
IMPORTANCE
...................................................... 27
Introduction
.................................................................................
27
II.1. Emergence du secteur informel dans le temps et dans
l'espace................. 27
II.1.1. Dans le
temps.........................................................................
27
II.1.2. Dans
l'espace.........................................................................
32
II.2. Emergence et évolution du S.I. au
Burundi....................................... 34
II.2.1. Dans le
temps.......................................................................
34
II.2.2. Dans l'espace
........................................................................
40
Conclusion..................................................................................
45
CHAPITRE III. DYNAMISME DU SECTEUR INFORMEL DANS LE
CONTEXTE SOCIOECONOMIQUE AU
BURUNDI...... 46
Introduction
.................................................................................
46
III.1. Impact de la croissance démographique sur
l'emploi ........................... 47
III.1.1. Généralités sur les effets de la
croissance démographique en PVD
(Afrique sub-saharienne)
........................................................... 47
III.1.1.1. Explosion démographique
...................................................... 47
III.1.1.2. Urbanisation rapide
............................................................ 48
III.1.2. Phénomène migratoire :
éviction du marché de travail ....................... 50
III.2. Modes d'accès à l'emploi et au revenu
complémentaire......................... 51
III.2.1. Regards sur les pratiques des activités
informelles dans les PVD......... 51
III.2.2. Accès à l'emploi informel et le
rôle des réseaux sociaux ..................... 52
III.2.3. Modes d'acquisition de revenu complémentaire
............................... 54
III.2.3.1. Accéder au « petit
crédit » (tontines) et échange de service
............... 54
III.2.3.2. Mobilité vers la pluriactivité
.................................................. 55
III.3. Chômage et insuffisance de revenus sur le
marché du travail burundais..... 57
III.3.1. Population active et emploi
...................................................... 57
III.3.2. Une croissance économique incapable de
répondre aux besoins d'emplois
et d'accroissement du revenu
................................................... 59
Conclusion..................................................................................
61
CHAP IV. DEMARCHE
EMPIRIQUE............................................ 62
Introduction..................................................................................
62
IV.1. Délimitation spatio-temporelles du champ
d'observation...................... 63
IV.1.1. La recherche
documentaire....................................................... 63
IV.1.2. Collecte des informations de
terrain............................................. 64
IV.1.3. Procédure d'échantillonnage et souplesse
méthodologique.................. 64
IV.1.4. Techniques de collecte des données de
terrain................................ 66
IV.1.5. Difficultés
rencontrées............................................................
67
IV.2. Analyse et interprétation des informations
obtenues............................ 68
IV.2.1. Résultats obtenus lors de la
vérification de la première hypothèse......... 68
IV.2.1.1. Recherche
documentaire...................................................... 68
IV.2.1.2. La description des unités d'observation et la
méthode des proportions.. 69
IV.2.1.3. Création
d'emplois.............................................................. 71
Conclusion
partielle........................................................................
79
IV.2.2. Résultats obtenus lors de la
vérification de la deuxième hypothèse......... 80
IV.2.2.1. Recherche
documentaire...................................................... 80
IV.2.2.2. Réponses obtenues après le travail de
terrain ........ ...................... 82
Conclusion partielle
........................................................................ 90
CONCLUSION GENERALE ET
RECOMMANDATIONS...................... 91
BIBLIOGRAPHIE
......................................................................
97
ANNEXES
INTRODUCTION GENERALE
1. Choix et intérêt du sujet
La situation du chômage fait du secteur informel un
thème majeur d'investigation et d'analyse. L'informel dont d'aucuns
doutent jusqu'à nos jours des capacités ou qualités
développantes justifiera à travers cette étude, sa vraie
place et son vrai rôle dans la résorption du chômage.
L'ampleur prise par l'économie informelle au Burundi en
général et dans la mairie de Bujumbura en particulier ne nous a
pas laissé indifférents. Cette étude présente
modeste contribution à l'explication et à la compréhension
actuelle de ce phénomène peut être socioéconomique
d'une part; et de mettre à la disposition de tout intellectuel
désireux de cogiter sur l'économie informelle un outil de travail
judicieux d'autre part.
2. Contexte et justification du choix
« Les jeunes - hommes et femmes - sont
notre plus précieux atout pour le présent et l'avenir mais ils
forment un groupe de population qui est très vulnérable. Durement
touchés par la montée générale du chômage
(....). Le lien entre le chômage des jeunes et l'exclusion sociale a
été clairement démontré, l'impossibilité de
trouver du travail créant chez eux un sentiment de fragilité et
d'inutilité tout en les exposant à la tentation de se livrer a
des activités illégales... (BIT, Août 2004,
p.1) ».
Comme dans bien d'autres pays d'Afrique, le secteur informel
occupe une place très importante dans l'économie du Burundi. Le
taux de chômage atteint 21% au Burundi en milieu urbain, en 2007, contre
19% en 2006 (ISTEEBU, 2008, p.35). Selon une étude récente de
l'ISTEEBU, ce secteur représente 77% du PIB nominal et 90% des emplois
au Burundi chaque année sont créés dans ce secteur
(ISTEEBU, op. Cit, p.36).
Environ 57.000 unités de production informelles
comptaient dans Bujumbura Mairie représentant près de 80% des
emplois de la capitale (ISTEEBU, 2007, p.9).
Partant de l'observation et constats réalisés
dans certaines communes de Bujumbura mairie, sa population est entrain de
connaître une situation de survie due aux insuffisances ou encore aux
défaillances de l'économie formelle. En effet, celle-ci
n'étant pas en mesure de faire face au chômage et aux sous
emplois, voit la population recourir à une source d'espoir (SI) afin
d'améliorer leurs conditions de vie.
Le développement du secteur informel au Burundi devient
de plus en plus dynamique et élargit ses activités. Son existence
remet en question la légitimité et l'autorité
gouvernementale puisqu'il fait prendre conscience à l'État de son
incapacité à générer suffisamment d'emplois et
à répondre aux besoins de la population demandeurs d'emplois.
3. Problématique et Objectif de
l'étude
La littérature développée sur le secteur
informel au Burundi se limite davantage aux aspects
économiques, notamment à l'élargissement de l'assiette
fiscale (ISTEEBU, op.Cit., p.4), d'une part, et son mal encadrement (CSLP,
2006, p.24; Rutake P. et Ranguza I., 1991 p.19) d'autre part.
Aussi à travers la lecture des
différents plans quinquennaux, ainsi que les
stratégies globales du développement du Burundi, il y a lieu de
remarquer que le gouvernement burundais n'a pas encore défini clairement
le rôle que joue le SI. Celui-ci n'a jamais été pris en
considération comme un domaine pouvant relever le niveau de
développement économique, social et technique du pays (KWIZERA
Bénita, 2009, p.17) alors qu'il peut être considéré
comme un moyen de diminuer le problème du chômage et de la
pauvreté grandissant (COREKE Jeanne, 2004, p.2). L'importance
accordée au S.I actuellement s'explique par le fort taux de croissance
de la population urbaine.
La population nouvellement installée doit trouver ses
propres moyens de survie, car ni la fonction publique, ni l'industrie ne sont
en mesure de l'accueillir (CURDES, 1987, p.16).
De plus, l'accroissement de l'emploi urbain, en attirant la
population rurale entraînerait une augmentation du chômage. Plus le
taux de création d'emplois urbain sera élevé, plus le taux
de chômage et de migration augmenteront (TODARO M., 1969, pp.138-148).
En nous appuyant sur les idées de K. Polanyi sur les
dynamiques de changement social ainsi que les mouvements de résistance
des acteurs populaires, notre approche du SI propose de mettre en
évidence son effort potentiel de créer des emplois, de
suppléer au revenu contribuant ainsi aux efforts de développement
endogène et autocentré.
En effet, les activités sur le marché du travail
sont profondément encastrées dans les relations sociales, la
majorité des individus trouvant leur emploi par relations (K. POLANYI,
1983, pp.77-79). Le développement par la modernisation, n'a pas
réussi à désencastrer l'économie de la
sphère sociale. La structure du lien social implique que les
interactions individuelles s'inscrivent dans des structures plus vastes,
créées par des normes et des institutions. Les individus ou les
ménages s'adonnent à des pratiques d'économie populaire
comme activités économiques d'appoint.
C'est donc par l'impossibilité pour l'Etat de
satisfaire une demande sociale forte en matière d'emploi au Burundi, que
le SI de par sa capacité réelle ou supposée à
générer des emplois et des revenus pour une frange importante de
la population, peut constituer aujourd'hui une solution au problème
récurrent du chômage et de la pauvreté.
Objectif de l'étude
Notre recherche vise à mieux approfondir la
connaissance du secteur informel, à comprendre leur contribution
réelle à l'économie en terme de création d'emplois
et de revenus pour pouvoir résorber le chômage et lutter contre la
pauvreté d'une part, à suggérer aux autorités de
maintenir le potentiel de création d'emplois du secteur informel d'autre
part.
Comme, on le dit le plus souvent, on ne peut espérer
faire reculer la pauvreté et le chômage sans créer des
opportunités économiques pour ceux qui se trouvent au bas de
l'échelle socio-économique et qui sont les plus nombreux.
Ce travail nous permettra en outre de
répondre aux questions suivantes :
§ Le SI permet-il la résorption du chômage
et le supplément de revenu à ses membres?
§ Est-il possible de le faire disparaître dans la
mesure où ceux qui y vivent ne peuvent aller ailleurs ?
La réponse à ces questions viendra comme une
conséquence et une réponse populaire aux réalités
du milieu, une adaptation aux réalités de l'environnement social,
économique et politique et l'importance de ce secteur dans ce milieu
où le chômage et le sous-développement sont
considérés comme étant endémiques.
4. Hypothèses
Pour répondre aux questions de départ, nous
avons émis deux hypothèses à savoir :
- le secteur informel fonctionne comme un secteur d`absorption
du chômage et contribue au supplément de revenu.
- La pérennité tient au fait que les
activités non structurées font partie des réalités
de la vie quotidienne.
5. Méthodologie
L'approche méthodologique est appuyée par le
long travail de documentation (ouvrages, rapports, revues, articles,
internet,...). Afin d'obtenir les informations complémentaires pour
notre étude, l'observation directe ou l'interview de face à face,
plus la collecte des données de terrain au moyen du questionnaire, de
l'observation indirecte seront privilégiées.
Les différentes informations recueillies auprès
des répondants seront traitées à l'aide des
méthodes statistiques, analytique, en l'occurrence les méthodes
des proportions. L'analyse et l'interprétation des résultats
nous permettront de confirmer ou d'infirmer nos hypothèses.
6. Articulation du travail
Hormis l'introduction et la conclusion générale,
notre travail est subdivisé en quatre chapitres.
Dans le premier chapitre, nous passons en revue du cadre
conceptuel et théorique sur le secteur informel. Dans la première
section définition de différents concepts, dans la
seconde, nous allons parler le cadre théorique. Dans le
premier point, nous empruntons à la pensée de Polanyi, les
analyses faites sur les dynamiques du changement social face à
l'accumulation capitaliste et les processus de développement. Dans le
second, nous nous attelons à présenter, le
débrouillardisme et les réseaux informels par rapport aux
changements de rapport capital/travail et enfin l'existence des mouvements de
résistance des acteurs populaires.
Dans le deuxième chapitre, nous essayerons
de décrire le développement du S.I. et son importance dans le
temps et dans l'espace dans la première section; et la deuxième
section concerne l'émergence et l'évolution du secteur informel
burundais.
Dans le troisième chapitre, sont
développés tendances de l'expansion du secteur informel dans le
contexte socioéconomique au Burundi. Ce chapitre comprend trois
sections, l'impact de la croissance démographique sur l'emploi dans la
première section; les modes d'accès à l'emploi et au
revenu complémentaire au sein du secteur informel dans la seconde
section et enfin, le chômage et l'insuffisance de revenu sur le
marché du travail burundais dans la troisième section.
Enfin le quatrième chapitre porte sur la
démarche empirique.
CHAPITRE I. CADRE CONCEPTUEL ET THEORIQUE
Introduction
Cette analyse va se faire en décrivant les
définitions des concepts du S.I. (section 1) et le cadre
théorique (section 2).
Dans la première section, nous tenterons de clarifier
au mieux les concepts-clés de la recherche afin que l'on sache ce dont
il est question. Il s'agit de concepts de : secteur informel et ses
synonymes, chômage, marché du travail, mains d'oeuvre,
pluriactivité, absorption de mains d'oeuvre, pérennité et
développement. Tandis que dans la deuxième section, nous allons
parler le cadre théorique dans laquelle la manifestation de la crise de
modernisation dans les pays en développement, les dynamiques de
changement social par rapport à la crise de modernisation, les rapports
des individus créent et inventent une régulation en fonction du
rôle et de la place qu'occupent ces individus dans la
société et dans le jeu social. Karl POLANYI est notre
référence dans l'élaboration de notre cadre
théorique à travers son ouvrage, "La grande transformation" qui
traite des origines politiques et économiques de l'effondrement de la
civilisation du 19e siècle, ainsi que le changement qu'il a
provoquée.
I.1. Définition des concepts
I.1.1. Secteur
Informel
Une très abondante littérature existe, de nos
jours, au sujet du secteur informel. Soit dit en passant, la majorité
des grandes théories touchant l'informel ont été
élaborées en Amérique latine tandis que la plupart des
études de terrain ont eu lieu en Afrique. Du radical
« forme » et du préfixe
« in », le secteur informel peut être
traduit mot à mot comme le secteur « dénué
de forme». Cette absence de forme pourrait être imputable
à une difficulté d'appréhension de ce monde marqué
par une grande hétérogénéité tant des
acteurs, des activités que des relations avec les différentes
institutions.
Les définitions proposées évoluent dans
le temps mais aussi varient de théorie en théorie ou d'auteur en
auteur. En 1972, le Rapport du Kenya (BIT, 1972) proposait sept critères
que sont : « facilité
d'accès à l'activité ; utilisation de ressources
locales ; propriété familiale de l'entreprise ;
échelle d'activité réduite ; usage de techniques qui
privilégient le recours à la main-d'oeuvre ; qualifications
acquises hors du système officiel de formation ; marchés
concurrentiels et sans réglementation (Bruno LAUTIER, 1994, p.13)».
Le secteur informel est une représentation
d'activités économiques difficile à définir. Il se
définit davantage par ses manifestations et ses causes que par un
concept précis donc dans ce contexte.
Ainsi, le secteur informel au Burundi selon l'ISTEEBU
(ISTEEBU, op. Cit, p.36), se définit par opposition au secteur formel.
Il rassemble toutes les activités économiques de production et/ou
de vente qui ne sont pas officielles. Certaines peuvent nécessiter un
local (garage, restaurant, salon de coiffure, etc.) mais d'autres peuvent se
dérouler sur la voie publique (vente des cartes
téléphoniques, des beignets, etc.)
Pour définir si une activité économique est
informelle, différents critères peuvent être
utilisés :
- y a- t-il un enregistrement dans les registres administratives ?
-
une comptabilité est-elle tenue ?
- des impôts sont-ils payés ?
- les salariés sont- ils
déclarés ?
L'enquête réalisée au Burundi sur le
secteur informel « appelée enquête 123 »
(ISTEEBU, op. Cit, p.4) retient uniquement les deux premiers critères
pour définir ce secteur.
Du point de vue de la branche de l'activité, on
distingue entre les activités de production et les activités de
service. A ce niveau, plusieurs classifications des activités
informelles ont été fournies par différents auteurs.
Ainsi, par exemple, Anne de Lattre distingue trois
catégories principales: les artisans ruraux, les artisans urbains, et
les prestataires de services de toute nature (Anne de LATTRE, 1990, p.31-35).
Marc Penouil parle quant à lui d' « informel de
subsistance » correspondant à l'ensemble des petits
métiers n'impliquant pas ou peu de capital, d' « artisanat
traditionnel rural » où les volumes de production sont faibles
et la technologie peu capitalistique et enfin d' « informel
concurrentiel » offrant des biens ou des services se voulant
concurrents de ceux produits par le secteur moderne (Marc PENOUIL,1990, pp.1-6
et 24).
Il nous parait important de souligner qu'aucune
définition n'a rencontré l'unanimité des auteurs sur
l'informalité de ces activités économiques
hétérogènes. De même, eu égard à la
multiplicité des caractéristiques de ce secteur informel, il est
peu probable qu'une activité les collectionne toutes à la
fois.
Quant au degré d'officialité de
l'activité, il existe des activités pratiquées au grand
jour (le secteur informel localisé selon J. CHARMES comme par ex :
garage, ateliers, bistrots, etc.) et les activités clandestines ou
nuisibles (le secteur informel non localisé : prostitution, vente
des produits interdits, comme par ex : kanyanga, urumogi, etc.).
Dans la littérature : le « secteur informel
», est aussi identifié sous plusieurs appellations ou synonymes
soit de «l'économie informelle», « activités
informelles» ou « secteur non structuré » selon les
différents auteurs, et ces différents concepts
représentent sensiblement la même réalité.
Malgré ces synonymes, dans le but de faciliter l'écriture, nous
avons utilisé les termes « économie informelle » et
« secteur informel ».
Le terme « économie
informelle » est le plus imposé (LAUTIER B., 1995,
p.26) parmi les diverses appellations utilisées notamment par MacGaffey,
économie non formelle, souterraine, secteur informel, secteur marginal,
économie informelle, secteur non réglé de
l'économie, économie au noir, économie occulte,
invisible,... ( MACGAFFEY J., 1993, p.144).
D'autres auteurs, H. Jospin, Lubell et J. Mouly l'appellent
secteur non structuré; A.N. Bose, K. Hart1(*), D. Mazumbar et S.V. Sethuraman
préfèrent parler de secteur informel. M. Penouil par contre
propose l'appellation de secteur en transition (MILANDU M., 1990, p.94).
Pour J.P. Peemans, l'économie informelle en Afrique,
c'est l'économie populaire séculaire qui appartient à un
tissu de production existant avant la colonisation, mais qui a
été à la fois marginalisée et diversifiée
par cette dernière et pendant une bonne partie de la post colonie (J.P.
PEEMANS, 1997, p.109).
I.1.2. Chômage
Le chômage est la situation d'une
personne qui, souhaitant travailler et ayant
la capacité de le faire (âge notamment), se trouve sans emploi
malgré ses recherches. L'absence d'emploi peut résulter d'une
entrée dans la vie active, du désir de retrouver un emploi
après une période d'inactivité, d'un licenciement, d'une
démission volontaire ou d'un désir de changer
d'activité2(*).
Le chômage et le sous emploi consistent en l'utilisation
d'un facteur de production en dessous de sa pleine capacité.
Généralement, le terme sous emploi est utilisé au sens de
chômage.
Le chômeur au sens du BIT «actifs
inoccupés» comprennent toutes les personnes ayant
atteint l'âge de 15 ans, qui au cours de la période de
référence étaient à la fois :
· « sans travail », c'est-à-dire,
n'étaient pourvues ni d'un emploi salarié ni d'un emploi
non-salarié,
· « disponibles pour travailler » dans un
emploi salarié ou non salarié durant la période de
référence ;
· « à la recherche d'un emploi »,
c'est-à-dire, qui avaient pris des dispositions spécifiques au
cours d'une période récente spécifiée pour chercher
un emploi salarié ou un emploi non salarié, tandis que
Le taux de chômage est le
rapport entre le nombre de chômeurs et la population active. Quant
à la résorption du chômage, elle est la disparition
progressive, totale ou partielle d'une anomalie
« chômage » (Petit Larousse, 1995, p.882).
Le concept de chômage se présente sous diverses
formes au regard de ses facteurs producteurs, nous citerons :
§ Le chômage naturel (ou
frictionnel) :Selon Paul Antony Samuelson définit le chômage
frictionnel comme celui qui résulte des mouvements incessants des
personnes entre les régions et les emplois passant souvent d'un emploi
à un autre, soit pour trouver mieux soit après avoir obtenu un
diplôme, soit encore pour avoir changer de ville (SAMUELSON P.A., 1987,
p.11).
Ce chômage est lié au délai d'ajustement
de la main d'oeuvre d'un emploi à un autre. Ce type de chômage est
considéré comme le chômage involontaire, a dit monsieur
DITEND YAV (DITEND, Y., 2001, p.38).
§ Le chômage conjoncturel :
Certains auteurs l'appellent chômage cyclique ou encore
Keynésien. Il correspond à un ralentissement de l'activité
économique provoquant une réduction temporaire des besoins de
main d'oeuvre dans l'économie.
§ Le chômage structurel : C'est le
chômage qui est lié aux déséquilibres des
changements de structures économiques dans un pays, provoquant une
inadéquation qualitative entre l'offre et la demande de travail.
L'évolution des qualifications dues aux évolutions techniques
conduit à rendre inemployable une partie de la
population active qui ne trouve plus d'emplois correspondant à ses
qualifications3(*).
§ I.1.3. Le marché du travail
Le marché du travail est différemment
défini selon les courants économiques. Selon l'économie
néoclassique, le marché du travail est le cadre
(ou plutôt une série de cadres spécifiques) où les
offreurs de travail (les actifs) se confrontent à des demandeurs
(entreprises, administrations,...) qui leur proposent un salaire en
contrepartie de leur travail, cette confrontation déterminera un niveau
de salaire à l'équilibre4(*).
I.1.4.La main-d'oeuvre
La main-d'oeuvre désigne la part du
travail dans le prix de revient d'un objet fabriqué.
Par extension, ce mot composé désigne l'ensemble
des ouvriers et travailleurs qui fabriquent et construisent dans le cadre d'une
usine, d'une entreprise ou d'une région donnée (voir population
active)5(*).
L'Absorption de mains d'oeuvre
signifie le fait de donner du travail à une multitude de
personnes sans emploi (diplômés, chômeurs,
laissés-pour-compte).
I.1.5. Pluriactivité
La pluriactivité désigne la combinaison, par une
même personne, de plusieurs activités professionnelles sur
l'année. Cette définition est très large. Elle couvre en
fait toutes les situations dans lesquelles une personne sort du schéma
classique d'un emploi ou d'un statut professionnel unique, sur la
durée6(*).
La pluriactivité peut être traduite par le mot
de « magendo », une sorte
d'économie plurielle qui comporte généralement une part
prédominante d'échange social informel et qui s'exprime en termes
de structure de l'allocation de temps en fonction des besoins réels des
individus ou des familles, non nécessairement pauvres (NDAYEGAMIYE
Adrien, 2007, p.10).
Les activités cumulées peuvent être
exercées soit alternativement ou simultanément (par
exemple lorsqu'une personne cumule plusieurs emplois à temps partiel).
I.1.6. Supplément du
revenu
Il correspond aux revenus complémentaires en provenance
des activités diverses du secteur informel :
- pour satisfaire les besoins fondamentaux et
- joindre les deux bouts du mois pour ceux qui travaillent
dans l'informel.
I.1.7. Pérennité
Elle désigne un caractère de ce
qui dure toujours ou très longtemps (Petit Larousse, 1995, p.765).
I.1.8. Développement
Le développement est l'acte de faire croître, de
progresser, de donner de l'ampleur, de se complexifier au cours du temps. Le
développement économique désigne les évolutions
positives dans les changements structurels d'une zone géographique et
d'une population : démographiques, techniques, industriels,
sanitaires, culturels, sociaux,... De tels changements engendrent
l'enrichissement de la population et l'amélioration des conditions de
vie. C'est la raison pour laquelle le développement économique
est associé au progrès7(*).
I.2. Cadre théorique
Dans cette section, nous empruntons à la pensée
polanyienne, les analyses faites sur l'accumulation capitaliste et les
processus de développement. Nous nous attelons à présenter
les changements de rapport capital/travail ainsi que les mouvements de
résistance des acteurs populaires.
Cette section comprend 3 points :
- le dynamisme du changement social par rapport aux
changements structurels en cours qui accorde un primat aux relations des choses
par rapport aux relations entre les hommes;
- le débrouillardisme et les réseaux sociaux
dans l'exercice des activités au sein du secteur informel ;
- La résistance des acteurs populaires face au
processus insécurisant du modèle de
modernisation-accumulation.
I.2.1. Dynamiques du changement social vues sous
l'angle du processus de
désencastrement de K.
Polanyi
Cette section, nous permet d'élaborer notre grille de
lecture avec l'analyse de l'évolution des dynamiques de changement
social par rapport aux modes d'exploitation capitaliste. Pour cette fin, nous
allons nous servir des réflexions de Karl POLANYI à travers ses
lectures des pratiques populaires à partir d'une perspective dynamique
par rapport aux changements structurels en cours.
Polanyi défendait la thèse
selon laquelle jusqu'à la révolution industrielle
l'économie était encastrée dans la sphère sociale,
et qu'elle s'en serait par la suite largement détachée pour
constituer un champ beaucoup plus autonome. C'est dans cette perspective que se
situent les réflexions sur la nouvelle économie sociale, le tiers
ou troisième secteur ou l'économie solidaire.
Le terme « Nouvelle sociologie
économique » est apparu dans les années 1980 pour
qualifier un nombre important de travaux, majoritairement américains,
participant à un renouveau des recherches sociologiques sur les
activités économiques. Depuis, la Nouvelle sociologie
économique a pu être assimilée à des ensembles plus
ou moins homogènes et plus ou moins vastes. Pour autant, une convention
demeure quant à ce qu'il est convenu de rassembler derrière ce
terme. Historiquement, elle renvoie à des dynamiques de champs
disciplinaires, impliquant pour les partisans de la Nouvelle sociologie
économique de gagner en visibilité et de se distinguer d'autres
courants comme la Socio-économie.
A partir de 1970, certains changements profonds affectent la
vie économique dans les pays industrialisés. On définit
les sociétés contemporaines comme post-fordistes ou
post-modernes. De plus en plus, les gens ne veulent plus entendre parler ni de
la bureaucratie, ni des interventions de l'État dans l'économie,
ni des grandes organisations hiérarchiques. On parle aujourd'hui de
globalisation et de flexibilité, des perspectives offertes par les
comportements ouvertement utilitaires dans des contextes où la
régulation, libérée du poids de l'État-providence,
est censée produire innovation et efficacité.
Selon cette perspective, nous passons en ce moment d'un
capitalisme « providentialiste » à un capitalisme global. Il
s'agit d'un système moins structuré, dominé par les flux
financiers et les flux d'informations où le travail des gens, la vie des
familles sont instables et où la capacité de contrôle des
États-nations sur leurs économies est faible.
Selon Polanyi « si l'existence de formes
d'organisation repose sur des principes de coopération, le concept pur
d'interaction du marché construit sur l'idée de
compétition utilitariste atomisée ne correspond pas à des
formes d'organisation, mais au contraire présuppose l'absence
d'organisation (Karl POLANYI, op.cit, p.22).
I.2.1.1. Accumulation et fragilisation des masses
populaires
Au début des années 1970, le capitalisme va
réagir face au ralentissement de la productivité en substituant
le travail par la robotisation et en délocalisant la production. Au
courant de cette même décennie, on observe en plus
l'éclatement de ce compromis capital-travail. Face à cette
montée des conflits, le capital va tenter de se libérer des
contraintes sociales. Dans les années 1980, on voit apparaitre un
"régime d'accumulation flexible", régime d'accumulation qui tient
de temps en temps compte de la critique du système dans la progression
de l'accumulation. Devant la montée de la vulnérabilité
des masses liée à la mondialisation, les rapports de force
capital/travail seront affectés. C'est pendant cette décennie
qu'il y aura une nouvelle réflexion sur la reconnaissance de la nouvelle
pauvreté comme résultat de la restructuration globale du
capitalisme. Le débat sur l'exclusion sociale se développe vers
les années 1990 et derrière ce concept, il y a la question
sociale qui s'était déjà posée en terme de
paupérisation au 19ème siècle, dans la
période pure du capitalisme sauvage et qui ressurgit au début des
années 1980.
De ce fait, le développement conçu dans la
logique des processus d'accumulation peut se lire en termes de rapports de
force, en termes de conflits puisque les dynamiques complexes se construisent
et se déconstruisent autour d'acteurs et d'enjeux de pouvoir et de
domination.
Pour J.P. PEEMANS, "l'accumulation apparait comme ce type de
logique que certains acteurs viennent surimposer à la logique de
l'économie populaire et à la logique du marché, soit en
essayant de les marginaliser, soit la plupart du temps en essayant de les
soumettre ou de les utiliser."(J.P. PEEMANS, 0p.Cit, p 430).
Un grand enjeu de la pensée sur le
développement, souligne Peemans, c'est de savoir renverser la
perspective traditionnelle sur le rapport entre l'économie populaire et
l'accumulation de type capitaliste.
Permettre au mécanisme du marché de diriger seul
le sort des êtres humains et de leur milieu naturel, reconnait Polanyi,
cela aurait pour résultat de détruire la société.
Nous retrouvons à travers cette réflexion de Polanyi l'analyse de
Wallerstein concernant la marchandisation des processus sociaux (WALLERSTEIN
I., 2002, p. 16.). L'économie devenant désencastrée du
reste de la société, le mobile de gain et de productivité
dicte l'organisation de la société.
Le pouvoir capitaliste va développer le marché
intérieur (autorégulateur) autour de la politique mercantiliste
ayant pour objectif la mobilisation des ressources. Comme stratégie pour
faire aboutir ce projet d'accumulation, les marchands vont se liguer avec les
Etats. Comme le fait aussi remarquer M. Beaud, "l'histoire montre que, lorsque
le capitalisme prend racine dans un pays, il est fragile; il a besoin de l'Etat
et de couches actives et entreprenantes de la société [...] Mais,
au fur et à mesure qu'il prend force et ampleur, il fait preuve
d'autonomie; il s'intéresse à d'autres marchés, recherche
d'autres alliances, parfois d'autres soutiens; sa reproduction tend à
s'autonomiser par rapport à celle de la société où
il s'est formé." (BEAUD M., 2000, p.54)
I.2.1.2. Désencastrement de l'économie
dans les analyses de K. Polanyi
Le désencastrement dont parle Polanyi dans
« La Grande Transformation », insiste
longuement sur les changements institutionnels (mouvement des enclosures, fin
des poor laws, développement de machines spécialisées...)
qui ont permis l'établissement de l'économie libérale du
XIXe siècle. C'est alors le marché qui
détermine comment la société doit fonctionner, et non plus
l'inverse, quand l'économie était encore
« encastrée » dans les
relations sociales. Livrée à la seule loi de l'offre et de la
demande, la société est alors menée à
l'autodestruction. Le marché, dès lors, a imposé sa
logique à l'économie et, progressivement, à toute la
société.
A partir du 19ème siècle, on observe
des formes de misère, des formes de pauvreté liées
à la concentration du prolétariat dans les villes. C'est une
forme de paradoxe par rapport à l'idéologie du libéralisme
qui prônait l'amélioration des conditions d'existence à
travers la croissance économique. Déjà à cette
époque, les nouveaux pauvres sont au coeur même du système.
"Les capitalistes ont cherché à marchandiser, dans leur recherche
d'une accumulation toujours plus grande, des processus sociaux de plus en plus
nombreux, dans toutes les sphères de la vie économique."
(WALLERSTEIN I., 2002, p. 16.). Polanyi va essayer de déconstruire le
paradigme dominant. Il soutient, pour justifier sa position, que l'essentiel
pour ces sociétés "traditionnelles", c'est le maintien des liens
sociaux et communautaires essentiels. Bien que la société humaine
soit naturellement conditionnée par des facteurs économiques, les
mobiles des individus ne sont qu'exceptionnellement déterminés
par la nécessité de satisfaire aux besoins matériels. Pour
la survie de l'organisation dans ces sociétés, les membres de la
communauté se doivent d'assurer les obligations de
réciprocité qui permettent de consolider les liens sociaux
à travers les principes de don et contre-don, de redistribution et de
subsistance (Éric Bidet, 2001). A ce propos, M. Davis arrive, pour sa
part, à affirmer dans son analyse sur l'histoire du 19ème
siècle que "la marchandisation de l'agriculture élimine la
réciprocité villageoise traditionnelle qui permettait aux pauvres
de subsister en temps de crise" (DAVIS Mike, 2003, p.38).
L'analyse critique du libéralisme économique
faite par K. Polanyi montre le risque de cette idéologie du
libéralisme qui pèse sur la société toute
entière. Le projet de cette idéologie, c'est de
désencastrer la sphère économique du reste de la
société et d'en faire un sous-système principal qui va
subordonner tous les autres et accorder un primat aux relations des choses par
rapport aux relations entre les hommes. Pour Polanyi, l'économie de
marché est un système commandé et réglé par
le seul marché.
La thèse de Polanyi, c'est que l'idée d'un
marché s'ajustant lui-même ne pouvait exister de façon
suivie sans anéantir la substance humaine et naturelle de la
société, sans détruire l'homme et sans transformer son
milieu en désert (POLANYI, op. Cit, p.22.). Au lieu que
l'économie soit encastrée dans les relations sociales, c'est
plutôt ces dernières qui deviennent encastrées au
système des marchés à travers le mobile du gain, le mobile
de productivité, et le mobile de profit (Idem, p.88)
Le marché autorégulateur a permis le
« désencastrement » de l'économie et de la
technique, leur séparation d'avec la société : les
sphères de la production et de la distribution des biens ne sont plus
sous le contrôle de la population, ni sous un contrôle politique et
social comme dans les sociétés traditionnelles, mais apparaissent
aux mains d'intérêts privés en concurrence pour le gain
maximum.
Le désencastrement de l'économie fait au
« marché autorégulateur» dans les
analyses de Karl POLANYI, ne vise alors pas à présenter une
économie fonctionnant dans un vide social (RONAN Le Velly, 2006, p.6).
L'apport anthropologique de Polanyi, est d'avoir affirmé le rôle
social de l'homme dans les processus de développement des
sociétés. Dans sa tentative d'explications de l'effondrement de
la civilisation du 19ème siècle, Polanyi n'a pas
cherché une séquence convaincante d'événements
saillants, mais une explication de leur tendance en fonction des institutions
humaines. Pour la consolidation de la durabilité de ces
sociétés détruites par le marché, il faudrait que
l'économie soit englobée dans le social. Le problème de
développement surgit dans la société dès que
l'économie devient désencastrée de la sphère
sociale. Là encore, c'est tout le contraire, puisque pour lui, le
marché autorégulateur est une institution culturelle qui a nourri
le projet politique de la libéralisation économique.
I.2.2. Le débrouillardisme et les
réseaux informels.
En comparant cette économie populaire aux autres
systèmes économiques, Polanyi (1983) signale d'abord le poids
exceptionnel qu'y prennent les échanges marchands dans la satisfaction
des besoins humains. Une économie de marché est alors une
économie où se généralise la recherche du gain
individuel et « une économie gouvernée par les prix du
marché et par eux seuls » (POLANYI, op.cit, p.71). Polanyi
décrit ensuite les conséquences dramatiques de ce mouvement :
pollution, désorganisation sociale, vice, perversion sont des mots qu'il
lui associe. Enfin, souligne Polanyi, l'Etat et sa politique ne doivent rien
permettre qui empêche la formation et l'organisation de ces
marchés (régulé et autorégulé).
Pourtant, argumente-t-il, le principe de la
société pré-moderne est fondé sur l'accumulation
pour la subsistance. Les différents acteurs vendent le surplus au
marché dans lequel ils interviennent de manière
complémentaire, sans détruire le système de base. Le
marché autorégulateur constitue un renversement du système
de ces sociétés, c'est une chose nouvelle.
L'encastrement social de l'économie fait fonctionner
certaines organisations micro-économiques. Ce n'est pas seulement la
recherche du profit ou la performance économique; mais aussi et surtout
l'entretien permanent d'un réseau de relations sociales capables
d'assurer la "sécurité sociale" des individus membres,
particulièrement en temps de crise. Et plus on est connecté
à ce réseau, plus les conditions minimales de survie
sont garanties par le mécanisme de redistribution non formelle.
En plus des formes de redistribution socioéconomique
inspirées de la macroéconomie keynésienne8(*), K. Polanyi fait remarquer qu'il
existe une autre forme "cachée" d'échanges, marchands
et non, qu'il nomme "mécanismes de redistribution par
réciprocité", faits de dons et de contre-dons (ex: les tontines,
crédits de confiance, arrangements mutuels); qui permettent aux
membres de la société de survivre ou de progresser sans
nécessairement compter sur la redistribution de l'Etat.
La manifestation du dynamisme et ingéniosité
dans l'exploitation des petites unités de productions est
fréquente, surtout dans les activités commerciales au sein du S.I
encastrées dans des réseaux sociaux
(liens de parenté, de voisinage, camaraderies, relations
professionnelles, affinités religieuses, etc.). Il permet de
répondre aux besoins des populations urbaines, d'abord les plus pauvres,
à travers la petite production marchande, le commerce de
micro-détail ou des services de proximité.
La raison d'être de ces réseaux dans ces
activités est de satisfaire de façon durable les besoins
fondamentaux des personnes à charge (social) et non pas tellement faire
des profits ou investir. Le financement de ces initiatives reste par ailleurs
souvent très lié au réseau familial, et de ce fait, assez
durable.
Parmi les facteurs d'émergences de l'économie
informelle, figure notamment la recherche d'un complément de revenu au
travers d'activités parallèles menées par les
catégories socioprofessionnelles du secteur tant public que
privé. L'exploitation de ces petites unités de productions
conduit ainsi à l'économie informelle. La meilleure façon
d'améliorer ses revenus face aux difficultés d'améliorer
sa productivité, c'est la pratique des activités informelles,
soit en tant que source d'obtention des revenus complémentaires.
Signalons enfin que pour Polanyi, si la "Révolution
industrielle" a apporté une amélioration "presque miraculeuse"
des instruments de production, elle a par contre induit un bouleversement
social et technique, accompagné d'une "dislocation catastrophique" de la
vie du peuple. Pendant un siècle, la dynamique de la
société moderne a été gouvernée par un
double mouvement: le marché s'est continuellement étendu, mais ce
mouvement a rencontré un "contremouvement" contrôlant cette
expansion dans des directions déterminées. Ainsi donc, le
"contremouvement" consista à contrôler l'action du marché
en ce qui concerne les facteurs de production que sont le travail et la terre.
Au dix-neuvième siècle, l'extension du
marché a entraîné des réactions de la part de la
société, parmi lesquelles la constitution d'associations, puis la
construction d'un État social protecteur. C'est ce processus historique
que Salamon a rappelé en soulignant que les associations
étaient effectivement « la première ligne de défense
»( SALAMON L.M., 1990, p.41). Les activités d'économie
populaire vont de la survie à une reconstruction des liens sociaux
à travers les réseaux.
Ces acteurs populaires s'inscrivent dans des stratégies
innovantes tant dans les initiatives individuelles que dans des organisations
d'économie populaire de type associatif et aussi de type
coopératif.
Vers la fin des années 1960, les mouvements
contestataires sont apparus, lorsque la « face noire » du
développement commençait à se manifester, mettant ainsi en
cause non seulement la pensée unique, mais aussi le modèle
d'accumulation et de consommation (de masse) occidentale pour leur impact
négatif sur la qualité de vie des individus (NDAYEGAMIYE A.,
op.cit, p.34).
I.2.3. Mouvements de résistance des acteurs
populaires
Le renouveau de la sociologie économique s'est produit
en réponse a une double crise dans le domaine des savoirs sur
l'économie et la société (crise des paradigmes
néoclassique, keynésien et marxiste) et dans le monde réel
de l'économie (crise du fordisme et de l'Etat providence et
émergence de la mondialisation).
Confrontées à une pareille déchirure du
tissu social, la société réagit en protégeant ses
membres, ce qui entre en contradiction avec les exigences du marché
autorégulé. Les populations ont été poussées
à s'organiser en petits groupes plus ou moins institutionnalisés.
Elles se sont davantage associées pour s'apporter mutuellement secours.
Ce sont des mouvements critiques qui constituent des réponses à
la crise d'accumulation et de régulation.
La préoccupation de Peemans notamment à travers
ses analyses sur le développement réel des peuples, c'est de
savoir comment les acteurs redéveloppent des stratégies
séculaires d'organisation sociale face à la dégradation de
leurs conditions de vie et à l'insécurisation de leur avenir.
Les populations ne sont pas restées passives durant la
période de la crise de modernisation. Dans leur ouvrage
« L'empire », Negri et Hardt présentent les modes de
résistance mis en place par la société face à la
modernisation néo-libérale (Michael HARDT et Antonio NEGRI, 2000,
pp. 319-328.). Pour eux, il s'est établi un nouvel ordre mondial sous la
dénomination de « L'empire » à travers
lequel, des logiques et de structures nouvelles du pouvoir au niveau des
élites globales sont liées à une nouvelle forme de
souveraineté.
Contre ce nouvel ordre mondial, s'érigent des
résistances des populations. Ils font certes allusion dans leurs
analyses à des résistances observables à travers des
mouvements antimondialisations de la dernière décennie. Faisons
toutefois observer avec Peemans, que la résistance des peuples et des
gens à l'imposition de l' « ordre des choses » est
une très longue histoire. Malheureusement, l'approche de l'histoire du
développement en termes de modernisation-rattrapage a
complètement négligé l'histoire persistante des myriades
de petits producteurs, ruraux et urbains, dont les prouesses quotidiennes pour
survivre et se maintenir, n'ont guère pesé lourd en termes
d'économie de la puissance et en termes de comptabilité de la
croissance (J.P. PEEMANS, 2002, p.429). Cette exclusion sociale a
créé les mouvements de résistance des acteurs populaires
de tout le temps, les peuples ont toujours résisté soit sous
forme d'une poussée collective allant au-delà d'une simple
agitation momentanée, soit sous forme des mouvements ouvriers ou de
mouvements nationalistes. C'est autant dire que ces mouvements de
résistance des masses populaires sont séculaires. Ils ont
été quelques fois étouffés, mais ont toujours
survécu sous plusieurs formes.
De ce fait, le développement conçu dans la
logique des processus d'accumulation peut se lire en termes de rapports de
force, en termes de conflits puisque les dynamiques complexes se construisent
et se déconstruisent autour d'acteurs et d'enjeux de pouvoir et de
domination. Pour J.P. Peemans, "l'accumulation apparait comme ce type de
logique que certains acteurs viennent surimposer à la logique de
l'économie populaire et à la logique du marché, soit en
essayant de les marginaliser, soit la plupart du temps en essayant de les
soumettre ou de les utiliser."(J.P. PEEMANS, 2002, P.430). Un grand enjeu de la
pensée sur le développement, souligne Peemans, c'est de savoir
renverser la perspective traditionnelle sur le rapport entre l'économie
populaire et l'accumulation de type capitaliste.
La lecture de l'histoire nous rappelle certes qu'au
XIXème siècle au Nord, la détérioration des
conditions de vie des classes populaires a bien été
endogène à une poussée de la sphère de
l'accumulation et à une modification des rapports de force entre
secteurs capitalistes et secteurs d'économie populaire. Mais il permet
aussi de montrer que cette évolution a pu être contrée
lorsque des mécanismes de sécurisation et de résistance
collective ont pu être mis en place dans des contextes locaux
particuliers. Il y a toujours eu des formes de gouvernance locale et
domestique, attestées par des pratiques populaires séculaires,
mais celles-ci se trouvent de plus en plus marginalisées. Dans les pays
en développement, les masses populaires ont dû incorporer de
nouvelles règles de comportement socio-économique sous
l'influence de la modernisation. Elles ont su en même temps, conserver
des formes de solidarité et d'organisation communautaire, dans la
logique de réciprocité et de redistribution (K. POLANYI,
op.cit, pp. 77-79; J.P. PEEMANS, op.cit, pp. 439-442 et p. 459).
Cette gouvernance historique des masses populaires rejoint la réflexion
de Braudel concernant la dynamique des acteurs de premier niveau dans
l'organisation des structures de leurs quotidiens (BRAUDEL F. 1985, p.38).
Polanyi l'a désignée par "Gouvernement populaire". Dans son
entendement, le "Gouvernement populaire" constitue les corps populaires qui
répondirent à l'échec du système international
pendant les années 1920.
Dans le Sud, il s'agit des groupements associatifs et des
réseaux d'association parallèlement aux instances
instituées par l'Etat et les autres organes de pouvoir (Partis
politiques et/ou syndicats). Ces réseaux d'acteurs sociaux
représentent une réalité locale, moitié
souterraine, moitié officielle, assurant la reproduction sociale
à la satisfaction d'innombrables individus ou catégories
d'individus.
Les réseaux d'acteurs sociaux se mobilisent à
l'échelle locale ou communautaire pour répondre aux multiples
formes de demandes des populations concernées (NDAYEGAMIYE A.,
op.cit, p11). Au niveau micro, ce sont plutôt les familles, les
clans, les voisins, les alliés, les camaraderies, les amicales, etc.,
qui s'engagent. Au niveau méso, ce sont les mesures de concertation et
de coordination des groupements associatifs qui, de par leur pluralité,
leur spécificité et la multidimensionnalité de leurs
apports potentiels (de ressources), qui permettent la reconstruction du lien
social d'ensemble. (Idem, p 15).
Il apparait donc que la spécificité de la
résistance des masses populaires est qu'elle se situe dans l'action et
légitime, au regard de la désarticulation du processus
d'accumulation et de régulation, l'économie populaire comme une
démarche de reproduction sociétale. La résistance exprime
le fait des réponses des masses populaires au processus
insécurisant du modèle de modernisation-accumulation.
L'économie populaire est donc actuellement au cours du processus de
développement des pays en développement.
Pour notre part, nous convenons avec Penouil pour adopter la
considération suivante: « Les activités informelles
sont avant tout une forme particulière de la dynamique sociale dans les
sociétés en développement. Elles sont une réponse
de la société aux besoins nouveaux, aux mutations structurelles,
aux contraintes sociales résultant de l'influence du
développement transféré sur toutes les catégories
sociales. » (M. PENOUIL, 1992, p.74).
Les fonctions que nous attribuons au secteur informel sont
celles sociale et économique. En remplissant ces fonctions, il peut
ainsi contribuer à la résorption du chômage au Burundi.
Donc, il joue des rôles divers allant de la
réduction du chômage à la contribution du revenu en passant
par la création de richesses et le pourvoi de biens et de services aux
populations ,en créant aussi des conditions de sécularisations
de la population à bas revenus.
Conclusion
L'objet de ce chapitre a été donc de faire
comprendre la signification des concepts et de tous les éléments
que nous avons considérés comme constitutifs du SI, objet de
notre travail dans la première section. Dans la deuxième section,
il a été question de construire la grille d'analyse du dynamique
changement social par rapport à la crise de la régulation
capitaliste. Pour ce faire, nous avons emprunté aux réflexions de
K. Polanyi les axes d'analyses théoriques qui nous permettent de faire
la lecture de la dynamique sociale dans le contexte des changements en cours.
Nous retenons de lui que les mouvements de résistances des masses
populaires expriment leurs réponses au processus insécurisant du
modèle de modernisation-accumulation. La spécificité de la
résistance des masses populaires est qu'elle légitime
l'économie populaire comme une démarche de reproduction
sociétale.
Cette théorie met en relief le développement de
l'économie informelle d'une part et la fonction que joue
l'économie informelle dans la société d'autre part.
Après le cadre conceptuel et théorique, nous
allons développer le 2eme chapitre dans lequel nous allons
parler l'émergence du secteur informel dans le temps et
dans l'espace.
CHAPITRE II. LE DEVELOPPEMENT DU SECTEUR INFORMEL ET
SON
IMPORTANCE
Introduction
Le secteur informel a été et est,
de nos jours, l'objet d'une multitude de théories, d'approches et
d'analyses différentes voire divergentes. Au fait,
phénomène historique décelable à l'ère
coloniale à travers la dérogation de certains indigènes
à l'imposition coloniale, le secteur informel ne cesse, aujourd'hui, de
prendre des proportions sérieuses. Vu à ses premiers jours sous
l'angle d'une anomalie temporaire au Ghana puis au Kenya, sa
légitimité sociale n'est presque plus contestable à
l'ère actuelle où le désengagement de l'Etat est au su et
au vu de tous. Quoique frauduleux, dérogatoire en tout ou partie
à la législation, il se positionne comme secteur à part
entière auquel on reconnaît le mérite dans la
réduction du chômage, la promotion de l'esprit d'entreprise et de
solidarité, la création de richesses, etc., pour ne citer que ces
avantages. Les raisons de l'émergence du phénomène sont la
croissance démographique qui a une implication importante en
matière d'emploi, de pauvreté et la diminution de l'offre
d'emploi dans le secteur formel.
II.1. Emergence du secteur informel dans le temps et
dans l'espace
II.1.1. Dans le temps
Sur le plan temporel, cette délimitation s'inscrit sur
une période allant de 1970 à nos jours.
Ø 1960-1970s: Période marquée par le
rôle prépondérant de l'appareil étatique.
Cette période a été littéralement
marquée par une forte croissance de l'emploi dans le secteur public. La
présence de l'Etat providence était quasi permanente dans tous
les secteurs, soit en tant qu'acteur économique ordinaire, soit en tant
que régulateur. L'essentiel de la régulation du chômage des
diplômés avait été assurée après les
indépendances, par le développement du secteur public et
parapublic. Il y a eu alors nationalisation des postes occupés et
création d'emploi9(*).
La plupart des Etats sortant de la colonisation ont
entamé des politiques ambitieuses de construction d'une économie
nationale en mettant en place les politiques et les stratégies
d'industrialisation rapide afin de substituer aux importations. Mais ces
politiques ne sont pas élevés à la hauteur des effets
escomptés, du fait d'une allocation inefficiente des ressources.
Au cours de cette période (dans les années 70),
l'Afrique s'est distinguée par une croissance démographique
inversement proportionnel à la croissance économique. Les
activités modernes créatrices d'emplois salariés
connaissent souvent une stagnation face à une explosion urbaine et
à une montée des jeunes à la recherche d'activités.
La détérioration des conditions de vie des
populations, surtout en zone rurale, et l'espoir d'un destin meilleur, motivent
une migration ininterrompue vers le milieu urbain. Mal préparées
à recevoir cet afflux de populations souvent démunies, les villes
leur réservent un avenir incertain, en particulier s'agissant de leur
insertion professionnelle. Très vite, la demande d'emplois est apparue
supérieure à l'offre.
Le secteur informel urbain joue alors un rôle
d'absorption de cette main-d'oeuvre excédentaire mais pleine
d'initiatives.
Ø 1970s-1980s: Période
marquée par le processus de désétatisation au profit du
« marchand »
Durant les premières décennies du
développement, les interventions de l'acteur étatique ont
été conçues et exécutées dans les limites
territoriales ; c'est-à-dire dans les cadres de références
des économies essentiellement nationales. Tel n'a pas été
le cas pour la conception des politiques de développement dans les
années septante et quatre-vingt (jusqu'au milieu des années
quatre-vingt).
Au cours de cette période, les difficultés qui
ont découlé de mauvaises gestions ont été le
justificatif des divers programmes d'ajustement qui ont préconisé
un rôle plus important du secteur privé.
La Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International
ont imposé les PAS, ceux-ci étaient censés restaurer les
grands équilibres macroéconomiques, et relancer la croissance
économique par l'allocation optimale des ressources et l'augmentation de
l'efficacité (BANQUE MONDIALE, 1988, p.11). Fondé sur
une logique entrepreneuriale de la gestion de l'économie, l'ajustement
devrait ramener les économies du Sud aux normes du marché
international (PEEMANS, J.P., 2002, pp.141-177). Certes, ces politiques ont
permis certains équilibres macroéconomiques, mais leurs
évaluations révèlent un échec et même une
détérioration profonde des conditions socio- économiques
dans les pays concernés (BANQUE MONDIALE, 1997, p.76).
La réduction des dépenses publiques,
imposée par les mesures de stabilisation en vue d'atténuer les
déficits budgétaires, a conduit les Etats à diminuer la
part des budgets nationaux consacrés aux services sociaux de base. La
liquidation des entreprises publiques déficitaires et la
réduction des effectifs de la fonction publique ont
entraîné des licenciements massifs, provoquant la baisse des
revenus réels des populations.
Pour l'Afrique Subsaharienne, le pourcentage de revenu
touché par les 20% les plus pauvres était de 6,8% et celui
touché par les 20% les plus riches était de 44,1 en 198810(*).
En conséquence, l'augmentation du chômage, la
nécessité de mobiliser toutes les ressources en travail familial
pour survivre, ont entraîné une croissance
accélérée des activités dites informelles tant
à la ville qu'à la campagne.
Ø A partir des
années 90 : pour un « autre développement »
centré sur le Développement Humain
L'autre développement défend l'idée selon
laquelle, chaque société doit baser ses projets de
développement sur ses dotations propres en ressources et sur son
environnement naturel. On ne peut y avoir une voie unique et universelle de
développement. Chaque société doit en effet définir
son chemin de développement en fonction de ses valeurs, de ses besoins
propres et de sa vision de l'avenir eu égard à sa façon de
comprendre le monde. Dans les milieux de vie concrets, la redistribution
sociale ne concerne pas seulement les biens et services marchands
(élargissement de la palette des choix des individus), elle concerne
aussi les charges et contributions communautaires.
Selon le rapport de la Banque Mondiale (Banque Mondiale,
op.Cit, p.183), la « mauvaise gouvernance» vers la fin des
années 80, affirmait le caractère inquiétant du
déclin politique de l'Afrique en générale. La corruption,
le détournement, le népotisme sont les principaux maux qui
gangrènent des sociétés africaines et qui perturbent le
système de production et de redistribution équitable.
Pour atteindre le niveau de bonne gouvernance acceptable par
les bailleurs, des reformes étatique sont nécessaires. Ces
reformes peuvent se résumer par la remise en cause du monopole du
pouvoir de l'Etat et de ses institutions.
La bonne gouvernance implique que d'autres organisations,
issues avant tout du secteur privé et des « acteurs non
étatiques11(*) » (la société civile),
s'engagent parallèlement à l'Etat, dans les activités
économiques et sociales.
Depuis que le Sommet du Millénaire12(*) a érigé la
question de la pauvreté en enjeu global pour l'humanité et comme
premier objectif du millénaire pour le développement, les Etats
se sont fermement engagés en faveur de la lutte contre la
pauvreté, sa réduction et voire son éradication. Il s'en
est suivi l'élaboration de Documents stratégiques de
réduction de la pauvreté (DSRP)13(*) ou de Cadres stratégiques nationaux de lutte
contre la pauvreté (CSLP), élaborés avec l'appui
d'organismes des Nations Unies, notamment du Programme des Nations Unies pour
le Développement (PNUD), et financés par divers bailleurs de
fonds étrangers. Il s'agit de processus multi-acteurs qui mobilisent
l'administration, le secteur public, le secteur privé, ainsi que les
organisations de la société civile à divers stades et
à divers degrés.
Malgré ces politiques, la dégradation continue
des économies africaines a entraîné un accroissement
considérable du niveau de pauvreté sur le continent. Selon
l'édition 1997 du Rapport sur le développement humain du PNUD,
près de 40% des 590 millions d'habitants de l'Afrique subsaharienne,
soit 220 millions de personnes, sont en-dessous du seuil de pauvreté
absolue. Selon les données fournies par « Abolissons la
pauvreté» le portrait mondial de la pauvreté en 2007 est
accablant. Non seulement la pauvreté décime-t-elle toujours des
populations entières, mais les organismes internationaux notent une
aggravation généralisée du phénomène.
Chaque année, neuf millions de personnes meurent de
faim ou de malnutrition, 1 milliard n'a pas accès à l'eau potable
et plus d'un milliard de personnes vivent dans la misère extrême
avec moins d'un dollar par jour14(*).
II.1.2. Dans l'espace
Presque partout dans les économies des pays, le secteur
informel a existé sous une forme ou une autre à une certaine
étape du développement. Sans nul doute, ce secteur existe aussi
dans les pays industrialisés, mais l'échelle du
phénomène et le contexte dans lequel il se produit sont tout
à fait autres. On constate que lorsque les gens vivent dans une
extrême pauvreté, ils se livrent à des activités en
marge de la légalité ou complètement illicite. Ces
tendances ont été remarquées dans des pays
différents comme l'inde, le Pérou et plusieurs pays africains.
Braudel mentionne quelques exemples de ce phénomène (F.
GOOSSENS., 1997, p.37).
Par exemple:
§ La France, affamée de 1940 à 1945, a
connu, avec le marché noir, une poussée de colportage anormale.
§ En Russie, la période de 1917 à 1922,
avec ses troubles, sa circulation imparfaite, a vu réapparaître
les intermédiaires ambulants.
La théorie économique du développement
à laquelle nous faisions allusion a pourtant bien fonctionné
sous d'autres cieux. Par exemple, il est rapporté qu'aux Etats Unis
d'Amérique, le secteur informel a fait l'objet d'une absorption
progressive et complète dans le secteur structuré. Au Japon
semble-t-il, il a été le pivot de l'industrialisation. Des pays
d'Asie comme la république de Corée, Singapour et Hong Kong ont
réussi à élaborer des stratégies qui ont
débouché sur une transformation efficace du secteur informel en
secteur structuré.
Autre exemple, le secteur informel latino-américain se
caractérise par sa
colonisation,
par sa
pauvreté,
par son
développement
économique et technologique et par son importante
urbanisation.
Les 2/3 des habitants de l'Amérique Latine vivent et travaillent dans le
secteur informel (HERNANDO de Soto, 2001, p.24).
Le secteur informel, en Afrique, a pris une importance telle
que la Banque Mondiale et le FMI ont pris la bonne résolution de
l'encourager (fait rare de la part de ces institutions qui veulent faire
fonctionner les sociétés africaines à l'image de
l'Occident) et dorénavant d'insérer ses activités dans les
stratégies de développement du continent. Se basant sur la
définition de la 15eme conférence des statisticiens du
travail et dans une étude concernant une quinzaine de pays africains
toutes régions confondues (Afrique du Nord, Afrique Sahélienne,
Afrique côtière, Afrique centrale) J. CHARMES
donne les estimations suivantes : Le S.I. représentait selon les
pays 29 à 75% de la population active non agricole dans les
années 1980. Dans les années 1990, ces taux sont passés
à 25 voire 90% (CHARMES,J., 1995, p.27). Ainsi, entre 1975 et 1993, le
poids du S.I. s'est considérablement accru dans tous les pays, il a
effectivement joué un rôle d'absorption de la main
d'oeuvre excédentaire sur le marché du travail tandis que le
secteur moderne public et privé a vu ses capacités
réduites sous l'effet de la crise puis de l'ajustement.
Du point de vue de l'emploi, le secteur informel tend à
devenir le plus grand pourvoyeur d'emplois. A défaut de statistiques
complètes, les estimations suivantes témoignent son ampleur au
plan de l'emploi : l'OIT fait état de 500 millions de personnes, soit le
quart de la population mondiale économiquement active en dehors de
l'agriculture, qui tiennent leur survie du secteur informel. Par exemple,
- En Inde, en 1998, 93% de la population active en dehors de
l'agriculture était dans le secteur informel.
- En Afrique, le secteur informel, plus pesant en milieu
urbain, compte entre 45 % et 50%, voir même 95% du volume total de
l'emploi dans certaines villes africaines selon les estimations de la Banque
Mondiale.
Du point de vue de la création de revenu, le secteur
informel constitue un facteur principal de création de revenus dans les
pays en développement. Toutefois, selon Jacques CHARMES, la contribution
au P.I.B. du secteur informel est inférieure à sa part dans
l'emploi.
En Afrique subsaharienne (hors Afrique du Sud), la
contribution du secteur informel dans le PIB non agricole en 1990 était
de 39,4% et de 25,9% dans le PIB total. En Asie, la contribution est de 28%
dans le PIB total et de 37% dans le PIB non agricole.
II.2. Emergence et évolution du S.I. au
Burundi
Dans ce point, nous allons montrer comment le S.I. a pu
émerger au Burundi en fonction des changements apportés dans les
politiques et stratégies nationales de développement. Les raisons
de son émergence sont comme celles évoquées
précédemment ailleurs.
II.2.1. Dans le temps
Le Burundi a accumulé déjà une
expérience de plus 30 ans en matière de planification du
développement, depuis son indépendance. Il s'agit de :
§ 1968 - 1972 : premier plan quinquennal
§ 1973 - 1977 : deuxième plan quinquennal
§ 1978 - 1982 : troisième plan quinquennal
§ 1983 - 1987 : quatrième plan quinquennal
§ 1988- 1992 : cinquième plan quinquennal
Ces plans de développement de l'économie
burundaise n'ont pas pris en compte, de manière spécifique le
secteur informel. Une distinction fut faite entre industrie et artisanat, sans
utilisation de critères pour délimiter leurs champs respectifs.
L'appartenance d'une activité artisanale ou
commerciale quelconque au secteur informel est généralement
définie en référence à des situations
irrégulières au regard des critères officiels
d'enregistrement des comptables nationaux.
Période 1970s- 1980s : Economie
burundaise a été marquée par trois plans de
développement. Ces plans mettent l'accent sur la coordination de tous
les efforts de développement, par l'Acteur Etatique fort et
entreprenant dans le cadre d'accélérer la croissance
économique du pays. L'Etat était alors le premier employeur,
celui qui a créé et développé le plus
d'opportunités pour une certaine catégorie de salarié leur
permettant ainsi d'élever leur position dans la hiérarchie
sociale en étant plus instruits voire plus aisés
financièrement.
Les deuxième et troisième plans ont
commencé à mettre un accent particulier sur l'industrialisation
(import- substitution) par la valorisation des produits agricoles et la
promotion des produits d'exportation (le café en l'occurrence).
Le IIIème Plan Quinquennal vise
explicitement la promotion de l'emploi particulièrement dans le monde
rural. Il a mis le doigt sur les véritables dimensions de l'artisanat,
l'accès généralement plus facile, l'artisanat devra
participer à la croissance de l'économie du pays. Il aura pour
effet d'indirect la création de l'esprit d'entreprise dans les masses
rurales et offrira une base solide au secteur industriel. L'exploitation de
cette possibilité offerte de diversifier les ressources du pays
consistera à faire de l'artisanat une branche professionnelle
organisée et productive.
Dans cette optique, les objectifs à atteindre sont les
suivants :
- Augmentation de production et de diversification des
produits artisanaux ;
- Création d'emploi, de préférence en
milieu rural et formation professionnelle;
- Réalisation d'un développement
équilibré du milieu rural par rapport aux centres urbains.
Depuis 1982 s'est affirmé une
volonté politique de décentralisation au niveau des provinces et
des communes, accordant un plus grand rôle aux collectivités
locales et à la population dans le développement et créant
un réseau de centres secondaires appelé à multiplier les
activités informelles, à faire évoluer les structures
rurales et à ouvrir la voie à l'aménagement du territoire.
Cette politique de regroupement de la population devait
s'accompagner de la création de coopératives en milieu rural pour
la commercialisation des récoltes ainsi que la création des
formes d'instituts bancaires pour favoriser l'épargne en milieu rural.
Elle fut validée par le congrès national du parti UPRONA, tenu du
26 au 29 décembre 197915(*).
Le quatrième plan quinquennal, bénéficie
de ce système avec l'amélioration du système de
planification, le taux de réalisation s'est également
amélioré. Il s'est proposé d'investir 107 milliards de
francs contre 64,5 au cours du troisième plan. La volonté de
création de zones artisanales n'a reposé sur aucune étude
préalable, les capacités industrielles restent sous
utilisées et certains projets industriels ont été mis sur
pied sans études préalables, ce qui a conduit à un
ralentissement de la croissance industrielle ne permettant pas la
résorption du chômage. Problème de l'accès au
crédit n'a jamais été l'objet d'une quelconque
attention.
Au Burundi, l'artisan effectue des petits boulots du secteur
informel avant de s'installer à son compte. Jusqu'à
présent, la non application d'une politique nationale de l'artisanat
suite à l'insuffisance des moyens financiers s'est traduite par
l'intervention dispersée, voire contradictoire, de multiples structures,
étatiques ou non, qui ont mené dans ce domaine leurs propres
politiques. Le gouvernement est accaparé par la promotion de l'industrie
moderne.
Le secteur informel n'a jamais fait l'objet d'enquête
statistique d'envergure nationale avant celle de l'ISTEEBU parue en 2007 mais
il y a eu deux recensements, celui de 1979 et celui de 1990 qui l'ont confondu
avec le secteur agricole.
Des enquêtes sur terrain se sont
intéressées à des périodes différentes, au
secteur informel urbain :
- enquête menée par le Ministère du
travail et de la sécurité sociale en 1989 à Bujumbura,
Gitega, Rumonge et Ngozi.
- enquête du même Ministère effectué
en 1998 (Bujumbura, Muramvya, Ruyigi, Cankuzo, Muyinga, Kirundo, Ngozi,
Kayanza).
Ces enquêtes ont donné lieu à des
études fragmentaires qui permettent de connaître certaines
caractéristiques du secteur. Elles ne permettent pas de faire des bonnes
estimations globales et régionales du nombre d'emploi de ce secteur.
Vers les années 1986, devant la montée de
l'endettement et des déséquilibres du budget et de la balance de
paiement, le gouvernement en collaboration avec la Banque Mondiale et le Fond
monétaire international; a adopté et a mis en oeuvre des
politiques d'ajustement structurel (PAS). Avec ses effets pervers comme par
exemple : la réduction des salaires, diminution des effectifs de la
fonction publique, privatisation des entreprises d'Etat, etc., ont
contribué à la dévalorisation du secteur public et donc au
gonflement du nombre d'agents opérant dans le secteur informel.
Ce programme se poursuivra jusqu'au début des années 1990.
Tableau no1 : Evolution des offres et
demandes d'emploi sur le marché burundais
de 1988 à 2000
Années
|
Offres
|
Demandes
|
Ecarts demandes non satisfaites
|
Taux d'insatisfaction
en %
|
1988
|
2 035
|
9 304
|
6 999
|
75
|
1989
|
2 015
|
11 096
|
9 081
|
82
|
1990
|
3 005
|
13 090
|
10 085
|
77
|
1991
|
1 640
|
10 490
|
8 850
|
84
|
1992
|
885
|
7 313
|
6 428
|
88
|
1993
|
120
|
5 108
|
4 988
|
97
|
1994
|
367
|
2 001
|
1 634
|
81
|
1995
|
240
|
1 347
|
1 107
|
82
|
1996
|
214
|
491
|
277
|
56
|
1997
|
228
|
1 379
|
1151
|
83
|
1998
|
398
|
895
|
497
|
55
|
1999
|
647
|
666
|
19
|
2
|
2000
|
730
|
1 133
|
403
|
35
|
Total global
|
12 524
|
64 313
|
51789
|
80%
|
Source : Fait par
nous-mêmes à partir du document du Ministère du travail et
de la sécurité sociale, documents d'archives, de 1985 à
2005
- De 1988 à 1992, les données sur les offres et
les demandes d'emploi ont suivi une évolution qui n'est pas
linéaire mais en dent de scie.
- De 1988 à 2000, la demande a été
toujours supérieure à l'offre pour toute la période.
- Dans l'ensemble, de 1988 à 2000, on peut conclure que
les demandes cumulées sont loin supérieures aux offres
cumulées soit avec taux de 20% de satisfaction contre 80%
d'insatisfaction. Demandes 64 313, Offres 12 524. Toutes ces demandes
51789 non couvertes par des offres constituent parfois des rangs de
chômeurs désoeuvrés complètement ou encore
sous-employés quelque part.
A la veille du Vème plan, ces obstacles subsistent
malgré les progrès réalisés ces dernières
années ; les efforts devront donc se poursuivre en vue de surmonter
les obstacles relevés surtout le long de la filière du produit
artisanal (Gouvernement du Burundi, Vème PQDES 1988-1992,
p.70).
Le Vème plan 1988-1992 a été
élaboré en tenant compte des impératifs
macroéconomiques découlant du PAS adopté en 1986. Il
s'exécute par tranches annuelles (le programme d'investissement public,
PIP) selon la technique de « programmation glissante16(*)» qui permet d'assurer une
adaptation souple aux changements de la conjoncture.
Entre 1989-1990, la tendance négative de la courbe de
l'emploi débute légèrement au niveau du secteur
structuré moderne, les emplois, chiffrés à 94291, accusant
une diminution de 5,6% par rapport à l'année 198917(*) .
Ø Période des années 1990 à nos
jours : Participation de la société Civile dans la
conception et la gestion des projets communautaires.
Depuis la fin des années 1980, grâce à
l'instauration de la liberté d'association, plusieurs associations de
citoyens se sont créées avec comme objectifs de promouvoir
l'entraide et le développement communautaire. Une fois encadrées
et soumises à des règles d'éthique de gestion et de
transparence, ces associations peuvent être des partenaires efficaces
dans le cadre d'une politique d'approche participative qui sera soutenue par la
communauté des bailleurs des fonds.
Avec l'appui des Bailleurs de fonds, dont le chef de file est
la Banque Mondiale, le Gouvernement prépare un cadre national de
croissance et de lutte contre la pauvreté (CSLP), qui définira
les actions spécifiques à mener en vue de réduire
sensiblement la pauvreté, ainsi que le rôle de ses partenaires au
développement dans ce projet ambitieux.
Le Programme de lutte contre la pauvreté est
multidimensionnel et multisectoriel. Il est multidimensionnel parce qu'il cible
des objectifs d'amélioration des indicateurs économiques et
sociaux; multisectoriel parce qu'il implique des projets couvrant tous les
secteurs de l'économie nationale.
Le Gouvernement visera en priorité la création
d'emplois à travers les projets générateurs d'emplois tels
que l'entretien des routes et pistes, les adductions d'eau, les reboisements,
les programmes de pavage des rues et les projets d'électrification
rurale. En ce qui concerne ces derniers, ils seront liés au programme de
création des centres urbains, foyers de développement des petites
et moyennes entreprises également génératrices de nombreux
emplois non agricoles.
II.2.2. Dans l'espace
Les activités de production et de service qui
génèrent des revenus sont concentrées en milieu urbain
plus spécialement à Bujumbura. D'après l'enquête
123 réalisée dans 4 villes (Bujumbura, Gitega, Kirundo, Makamba)
du pays, l'emploi en milieu urbain est marqué par la
prépondérance des services (52,5%), suivis du commerce (20,2%),
du secteur primaire (14,1%) et enfin des emplois dans le secteur industriel
(10,5%). Tandis que le monde rural constitué par les autres provinces
s'occupe de l'agriculture de subsistance (CSLP, Seconde revue, 2009, p.77). La
proportion de la population occupée en Mairie de Bujumbura est moins
importante que celle des autres régions (81,4 % contre 87,2%). De plus,
on remarque que le sous-emploi est moins important en Mairie de Bujumbura que
dans le Reste du pays (9,2 % contre 12,4 %)18(*). En milieu rural, l'emploi
d'après l'enquête réalisée par le PAM en
2008, l'agriculture est toujours la principale activité pour 77,2% des
ménages ruraux, et est pratiquée pour l'autoconsommation par
92,7% d'entre eux. Seuls 21,2% des ménages pratiquent une agriculture
commerciale, et la moitié des ménages ont recours à du
travail manuel journalier comme complément de revenus.
Le nombre d'emploi créé par les
différents métiers du secteur non structuré en milieu
rural et urbain a augmenté entre 1982 et 1987, de 27435 en milieu urbain
et 127263 en milieu rural soit 154703 au total en 1982 et 32692 en milieu
urbain et 147176 en milieu rural soit 179068 au total en 1987, ce qui
représente une différence de 25 665 emplois au total soit un
accroissement total de 14% et un accroissement annuel moyen de 2,8%.(SIRIBA
Philippe, 2003, p.27).
Le gouvernement burundais a lancé certaines actions
pour la promotion de l'emploi dont les principales sont les actions d'ordre
institutionnel et les reformes du PAS en matière d'emploi.
Avec les moyens financiers apportés par des partenaires
extérieurs (PNUD, FIDA, FAO, ...), et avec les programmes initiés
et appuyés par des organisations non gouvernementales, nationales ou
internationales des projets de développement qui accordent des
microcrédits en faveur des groupes constitués d'agriculteurs,
d'éleveurs, d'artisans ou en faveur de ménages ruraux à
faibles revenus, etc., ont été mis en place. Elles interviennent
en appui aux populations pauvres et marginalisées sous forme de
crédits, soit directement ou en interface avec d'autres institutions de
micro-finance. Les multiples organisations peuvent être
classées de la manière suivante : banques commerciales et
établissements financiers, organisations de type coopératif,
organisations non gouvernementales, projets et sociétés de
développement, groupes auto-organisés : Tontines et Fonds
d'entraide et de solidarité, Les ASBL, etc. (NIYONGABO Ephrem, UCL,
2007, p.57)
Tableau n°2 : Offre d'une vue
synthétique des différentes interventions.
Type d'organisation
|
IMF
|
Couverture géographique
|
Démarrage du système d'épargne et de
crédit
|
1. Banques et établissements financiers
|
BNDE
|
Couverture nationale
|
1967
|
FMCR
|
Bujumbura Mairie
|
1998
|
COFIDE
|
Ngozi, Kayanza et Kirundo
|
2000
|
SBF
|
Bujumbura Mairie
|
-
|
FPHU
|
Bujumbura Mairie
|
-
|
FDC
|
Nationale
|
2000
|
2. organisations de type coopératif
|
FENACOBU
|
Nationale
|
1984
|
CECM
|
Bujumbura Mairie et ses environs
|
1995
|
COSPEC
|
Cibitoke
|
2001
|
COPED
|
Bururi, Rutana, Makamba, Mwaro
|
1992
|
CODEC
|
Bujumbura Mairie
|
-
|
3. Organisations non gouvernementales
|
JAMII BORA
|
Bujumbura Mairie et ses environs
|
2002
|
OAP
|
Bujumbura Rural
|
1994
|
4. Groupes autoorganisés
4. Projets, ONG et ASBL à volet crédit et/ou
épargne
|
FSTE
|
Nationale
|
1995
|
FSCJ
|
Nationale
|
1998
|
FSCS
|
Nationale
|
1998
|
TONTINE ROHERO
|
Bujumbura Mairie
|
1990
|
TWITEZIMBERE
|
Nationale
|
1993
|
UCODE
|
Ngozi, Kayanza, Kirundo
|
2001
|
5. Projets et sociétés de
développement
|
PNUD
|
|
|
FIDA
|
|
|
FAO
|
|
|
COGERCO
|
|
|
BTC
|
|
|
OTB
|
|
|
Source : BIT (2001)
Dans le cadre d'une approche participative, les partenaires
pourront fixer les objectifs et les actions prioritaires, en
privilégiant la réalisation des projets à haute
intensité de main d'oeuvre susceptibles d'injecter des revenus
monétaires dans la population, et de lui redonner ainsi un pouvoir
d'achat qui a été sérieusement érodé par la
crise.
Dans le cadre de la Promotion de l'emploi, et avec l'appui des
partenaires, deux chantiers importants ont été lancés par
le gouvernement à savoir le PTPCE (Projet de Travaux Publics et de
Création d'Emplois) pour l'exécution de plusieurs projets
communautaires axés sur la promotion de l'emploi (pavage,
marchés, abattoirs), et PMRSE (Projet Multisectoriel de
Réinsertion Socioéconomique) pour une bonne
réinsertion socio-économique des groupes
défavorisés.
Les résultats atteints sont mitigés, car ces
services n'orientent pas leurs actions dans la recherche de stratégie de
création d'emplois. A partir de 1993, les crises socioéconomiques
et politiques ont été accompagnées
d'événements exceptionnels (comme l'embargo, les
déplacements massifs des populations et le gel de la coopération
internationale). De plus, la restructuration du secteur public a
entraîné des licenciements massifs et l'arrêt des
recrutements à la fonction publique, et a renforcé par
conséquent le processus d'appauvrissement et d'exclusion
économique et sociale.
Tableau n°3: Répartition des emplois
supprimés suite à l'embargo
Catégories de travailleurs
|
EFFECTIF D'EMPLOIS SUPPRIMES
|
Chiffres absolus
|
Parts relatives
|
Hauts cadres
|
40
|
1,53%
|
Agents de maitrise
|
85
|
3,26%
|
Hautement qualifiés
|
229
|
8,77%
|
Qualifiés
|
528
|
20,23%
|
Semi qualifiés
|
379
|
14,52%
|
Manoeuvres
|
1349
|
51,69%
|
Source : Ministère du Travail, de
l'Artisanat et de la Formation Professionnelle, 1998
L'ampleur de l'éloignement du niveau de vie du seuil de
pauvreté plus marquée en milieu rural qu'en milieu urbain
reflète la situation d'extrême pauvreté que vivent de
nombreux ménages en milieu rural. L'évolution récente de
la proportion du nombre de personnes vivant en dessous du seuil de la
pauvreté monétaire montre qu'elle atteint la barre de 60% sur les
10 dernières années (1990- 2000).
Les résultats de l'enquête QUIBB, menée en
2006, révèlent un taux de pauvreté de 67% sur le plan
national, dont 69% en milieu rural et 34% en milieu urbain (Seconde revue CSLP,
op.Cit, pp.34-36).
Tableau no4: Evolution de la
pauvreté, 1990-2000
Population vivant en dessous du seuil de pauvreté
relative
|
1990
|
1991
|
1992
|
1993
|
1994
|
1995
|
1996
|
1997
|
1998
|
1999
|
2000
|
Milieu rural
|
35.1
|
35.5
|
34.8
|
39.6
|
48.4
|
53.3
|
57.4
|
58.1
|
56.4
|
57.1
|
57.8
|
Milieu urbain
|
32.4
|
32.0
|
32.9
|
40.9
|
47.2
|
51.2
|
64.0
|
66.0
|
66.5
|
67.4
|
68.2
|
Niveau national
|
34.8
|
35.3
|
34.7
|
39.7
|
48.3
|
53.2
|
57.8
|
58.6
|
57.0
|
57.7
|
58.4
|
Source : Enquête Budget et
consommation des ménages 1986-1990
Enquête prioritaire 1998-2000
Des estimations de la pauvreté réalisées
récemment en 2008 (PNUD, 2010, p.10), dégageaient de seuil de
pauvreté respectif d'environ 820 Fbu/jour en milieu urbain et 525
Fbu/jour en milieu rural. Avec ces seuils, environ 67% de la population
burundaise est pauvre. Cette pauvreté se repartit inégalement
à raison de 69% de la population en zones rurales contre 34% en zone
urbaines. Il en est de même de sa répartition au niveau des
provinces. Aussi, il ressort que la proportion des ménages vivant en
dessous du seuil de pauvreté a presque doublé car elle
était 67% en 2006 contre 35% en 1990.
Conclusion
L'objet de ce chapitre a été donc de faire
comprendre la signification des concepts et de tous les éléments
que nous avons considérés comme constitutifs du SI, objet de
notre travail. L'évolution du secteur informel dans le temps et
dans l'espace est liée à une forte croissance
démographique et de l'urbanisation rendant difficile l'absorption des
nouveaux actifs sur le marché du travail.
Le S.I. est un phénomène
résultant de l'exode rural et de l'incapacité du secteur formel
à absorber le surplus de main-d'oeuvre, celle-ci, en surnombre, ne
pouvant trouver d'emploi dans le secteur moderne et luttant pour sa survie,
doit se trouver une occupation qui lui assure un revenu.
Le SI par ses diverses activités de production de
biens et services fournit une contribution essentielle à l'emploi
où chacun s'affaire selon son courage, son ingéniosité,
son esprit de créativité et d'entreprise à
développer des pratiques innovatrices desquelles l'individu tire emploi
et revenu.
CHAPITRE III. DYNAMISME DU SECTEUR INFORMEL DANS LE
CONTEXTE SOCIOECONOMIQUE AU BURUNDI
Introduction
Comme souligné ci-haut, face à
la croissance démographique et à l'incapacité du pouvoir
public à offrir une alternative de développement, le taux
d'augmentation de la population active dépasse la création
d'emplois. Ceci implique de sérieuses répercussions sur les
possibilités d'emploi, ce qui se traduit par une augmentation rapide du
taux de chômage. Autrement dit, le nombre de demandeur d'emplois
s'accroit plus rapide que le nombre d'emplois existants. En outre, l'exode
rural ininterrompu qui se poursuit depuis plus de trente ans dans les pays en
développement a provoqué un phénomène de
surpeuplement urbain. L'explosion urbaine est due à l'exode des
campagnes vers les villes, surtout dans les petits centres urbains, mais aussi
à la croissance démographique naturelle. Ces tendances
démographiques ont une implication importante en matière d'emploi
et de pauvreté.
Ce chapitre comprend trois sections :
- La croissance démographique et son impact sur
l'emploi
- Mode d'accès à l'emploi et à
l'accroissement de revenus
- Chômage et insuffisance de revenus sur le
marché du travail Burundais
III.1. Impact de la croissance démographique sur
l'emploi
III.1.1. Généralités sur les
effets de la croissance démographique en PVD
(Afrique sub-saharienne)
La région de l'Afrique sub-saharienne se distingue des
autres pays en développement par sa très forte démographie
qui connait un rythme de croissance très rapide, ce qui pousse à
une urbanisation rapide. Ce sont là quelques exemples d'explications de
l'accroissement de la population active qui est très variée sur
le marché du travail en Afrique sub-saharienne.
III.1.1.1. L'explosion démographique
Elle est l'un des facteurs d'explicatif et
regard sur les comportements des chercheurs d'emploi. Durant l'année
2009, l'Afrique aura franchi le cap symbolique d'un milliard d'habitants. La
croissance démographique est d'ors et déjà impressionnante
: de cent trente trois (133) millions d'habitants en 1900 (8% de la population
mondiale), elle atteint deux cent vingt cinq (225) millions en 1950 (8,8%),
sept cent soixante sept (767) millions en 1999 (12,8%) et enfin un milliard en
2009 (14%). Cette expansion démographique est loin d'être finie
car l'Afrique connait encore la plus forte fécondité au monde
avec 4,6 enfants par femme contre 2,5 au niveau mondial19(*). Selon les projections
à long terme des Nations Unies, le poids démographique de
l'Afrique ne cessera de croître. Sa population devrait atteindre 2,3
milliards en 2050, soit 22,6 % des habitants de la planète.
Cette croissance pour la seule région de l'Afrique
sub-saharienne s'élevait à un taux annuel moyen de 2,5% sur la
période de 1997 à 2006, ce qui la classe comme une des parties du
monde les plus densément peuplée. Cela n'est qu'un aspect du
problème pour tenter de justifier la croissance de l'offre de travail.
Les chiffres de l'accroissement de la population active
varient selon les différentes régions d'Afrique. Dans certaines
régions, cet accroissement est constamment en pleine progression.
L'enquête 1-2-3, méthode d'analyse réalisée par les
chercheurs de l'Institut de Recherche pour le Développement (IRD)
à la demande de l'Union Economique et Monétaire Ouest Africaine
(UEMOA) apporte quelques éléments précis sur les
caractéristiques du marché de l'emploi en Afrique de l'Ouest.
« Sur l'ensemble des sept villes de la zone de l'UEMOA, près
de 60% de la population de 10 ans et plus est active, ce qui signifie que 6
personnes sur 10 exercent un emploi ou sont au chômage, à la
recherche d'une activité. Au sein de la population active, 13 %
sont des enfants âgés de 10 à 14 ans et en majorité
des filles20(*)».
Globalement, en 2006, la population active de l'Afrique
sub-saharienne concernait 317 millions de personnes pour 770 millions
d'habitants21(*) .
III.1.1.2. Urbanisation rapide
Une autre conséquence majeure de la croissance
démographique rapide de l'Afrique est le taux de croissance rapide des
populations urbaines. La croissance de l'exode rurale est une des causes de
l'expansion urbaine. Selon les Nations Unies, en Afrique sub-saharienne, sur la
période des années 1950 aux années 2000, la population
urbaine22(*) a
été multipliée par 10. Ainsi, la proportion de personne
habitant dans les villes atteignait 33% en 2000 contre 10% en 1950. A l'horizon
2025, le taux d'urbanisation en Afrique sub-saharienne devrait osciller entre
41,2 % et 66,6 %. Ainsi, d'ici un peu moins de 30 ans, les urbains devraient
être plus nombreux que les ruraux en Afrique, comme dans le reste du
monde (Fanny Chauveau, 1998, pp.23-27).
Compte tenu de l'accroissement de la population totale du
continent, la population urbaine de l'Afrique a atteint 377 millions en 2000,
Ce nombre passera à 1271 millions en 2025. Il paraît clair que
cette croissance démographique rapide de nombre d'habitants en ville va
contribuer à la multiplication des villes en un rythme
accéléré, ce qui entrainera d'autres problèmes
sociaux. Cette croissance urbaine serait due à plusieurs facteurs comme
la recherche d'un emploi, un meilleur accès à l'éducation
et aux soins médicaux et aussi par l'attrait de la vie urbaine23(*) ».
Outre le problème de l'augmentation des besoins des
villes, en matière d'infrastructures, d'emploi, de santé et
d'éducation, l'émergence de l'urbanité en Afrique est
potentiellement source de déséquilibres sociaux.
Déjà l'exclusion du plus grand nombre de
l'accès au sol et au logement caractérise la plupart des grandes
villes africaines. L'extrême diversité des niveaux de revenu et
des conditions de vie, entre catégories sociales, groupes ethniques et
quartiers, révèle une fragmentation sociale accrue. Dans un
contexte de raréfaction de l'emploi et de baisse des revenus, les
solidarités intergénérationnelles entre les
aînés et les plus jeunes sont mises à rude épreuve.
Les réseaux de voisinages, politiques, religieux ou les
confréries prennent alors parfois en partie le relais, renouvelant ainsi
les modes de socialisation.
Dans le cadre d'une urbanisation rapide, la grande
vulnérabilité de la situation économique des urbains donne
naissance à de nouveaux rapports sociaux et alimente de nombreux foyers
de tension. Alors même que les fonctionnaires sont contraints de
rechercher des compléments de revenu, la précarité et
l'incertitude rendent les classes moyennes réticentes envers les
mécanismes de redistribution au bénéfice des
défavorisés. Ce sont donc les bases de l'édifice
institutionnel de solidarité qui se trouvent menacées.
Les taux continuellement élevés d'urbanisation
et de croissance démographique ont conduit à une expansion sans
précédent du secteur informel dans de nombreux pays. L'existence
de ce secteur informel, répond davantage à une
nécessité qu'à un choix.
L'urbanisation de l'Afrique sub-saharienne est devenue
indispensable, elle justifie les nombreux déplacements de la population,
notamment celle des jeunes vers les villes, ce qui bouleverse le marché
du travail.
III.1.2. Phénomène migratoire :
éviction du marché de travail
Le poids démographique comme nous l'avons vu
précédemment, pousse les jeunes à fuir leurs campagnes
pour s'installer dans les villes et rechercher un emploi.
De nombreux migrants vont en
« ville » pour exercer un emploi
salarié dans le secteur moderne ou s'insérer dans des petites
entreprises. Néanmoins, ces migrants ne concernent pas une
catégorie spécifique de la population.
En effet, les jeunes sont principalement concernés par
ces départs massifs vers les villes, ils ne sont pas les seuls mais ils
constituent la majeure partie de la population, la plus active, la plus
entreprenante. En Afrique, le processus migratoire comprend essentiellement
deux étapes : des campagnes aux petites villes puis, des petites
villes aux plus grandes.
Outre ce mouvement de forte croissance, la dynamique
migratoire des pays d'Afrique sub-saharienne se distingue par une
émigration des campagnes vers les villes qui opère une formidable
redistribution spatiale des populations. L'expansion démographique est
donc surtout sensible en milieu urbain, lieu de la croissance économique
et de la modernité.
Les migrations massives de régions rurales
vers les grandes villes ont largement contribué à
l'étalement et à l'accroissement des principales zones
métropolitaines des pays en développement.
Il se produit un transfert net de pauvreté entre zones
rurales et urbaines car les nombreux migrants (notamment les jeunes) cherchent
à travailler, à améliorer leur niveau de vie. On a
rapidement associé cette tendance à l'émergence du secteur
informel urbain puisque les migrants ont souvent de la difficulté
à se trouver un emploi dans les firmes du secteur formel. La croissance
du secteur informel est souvent associée à la migration de
population rurale sans terre en quête d'un emploi à la ville
(FELDMAN, S. et FERRETTI, E., 1998, p.295)24(*).
III.2. Modes d'accès à l'emploi et au revenu
complémentaire
III.2.1. Regards sur les pratiques des activités
informelles dans les PVD
Selon le « Bureau International du Travail
(BIT) », « l'économie
informelle fait référence à toutes les activités
économiques de travailleurs et d'unités économiques qui ne
sont pas couverts en vertu de la législation ou de la
pratique par des dispositions formelles ». L'économie
informelle absorberait le plus souvent des travailleurs qui, sans elle,
seraient sans travail ou sans revenu.
L'acquisition du ticket d'entrée dans l'économie
informelle serait ainsi dictée par la nécessité de
survivre face aux affres du chômage, du sous-emploi et de la
pauvreté qui sévissent lourdement dans les pays en voie de
développement25(*).
« L'économie informelle dans le monde
d'aujourd'hui représenterait 52,2 pour cent du total de l'emploi en
Amérique latine, 78,2 pour cent en Asie et 55,7 pour
cent en Afrique26(*)
». En Afrique de l'Ouest, le secteur informel utilise la majorité
des bras actifs de l'économie en général. En terme
de réservoir d'emploi, le secteur informel occupe 80% de l'emploi
non agricole, plus de 60% de l'emploi urbain et plus de 90% des nouveaux
emplois. En Algérie l'économie informelle constitue le talon
d'Achille de l'économie nationale et représente 40% du
« PIB ». Au Nigeria l'économie
informelle représente 77% du « PIB27(*) ».
En dépit de l'augmentation
généralisée des taux de chômage, la croissance de
l'emploi informel s'observe pratiquement partout et a été
particulièrement rapide dans toutes les régions.
Le secteur informel emploie plus de la moitié de la
population active mondiale, soit 1,8 milliard de personnes, se hissant à
un niveau jamais atteint indique une étude de l'OCDE28(*).
III.2.2. Accès à l'emploi
informel et le rôle des réseaux sociaux
Les activités du secteur informel sont exercées
essentiellement par des individus travaillant pour leur propre compte à
la tête de leur propre affaire, soit seuls, soit avec l'aide de membres
de la famille non rémunérés, bien que quelques-uns soient
des micro-entrepreneurs employant quelques travailleurs
rémunérés ou apprentis.
Les relations d'emploi, lorsqu'elles existent, sont surtout
fondées sur l'emploi occasionnel, les liens de parenté ou les
relations personnelles et sociales plutôt que sur des accords
contractuels comportant des garanties en bonne et due forme. Dans le contexte
d'activités informelles, les réseaux sociaux et les liens de
parenté et de voisinage sont identifiés comme des ressources
fortement utilisées pour organiser la production et la distribution de
biens et services.
Les réseaux sociaux et le secteur économique non
enregistré ont ceci de commun qu'ils tiennent leur efficience de leur
informalité. Le caractère informel de leur dynamique est
même un trait majeur de leur identité propre. Or, tous les deux
sont importants dans l'analyse des mécanismes de construction sociale en
général et des stratégies de survie et d'insertion urbaine
en particulier. (ABDOU SALAM Fall et Alioune MBOUP, 2007, p.9). Les
réseaux sociaux sont des instruments de satisfaction des besoins
spécifiques quand les institutions sociales se révèlent
impuissantes et un instrument qui facilite l'insertion de l'individu,
entreprise dans son milieu.
En reprenant la terminologie du sociologue Mitchell (1973), et
Szarka (1990) définit trois types de réseaux de relations
sociales dans lesquelles l'entrepreneur est encastré : Le
réseau personnel comprend les contacts avec la famille, les amis et les
connaissances ; le réseau commercial comprend les organisations
avec lesquelles l'entrepreneur effectue des transactions commerciales et le
réseau de communication comprend quant à lui les organisations et
individus par lesquels l'entrepreneur obtient des informations concernant son
activité : consultants, institutions locales, etc. (SALEILLE S.,
2007, pp.72-73).
Au Burundi la majorité des chômeurs, la recherche
d'emploi s'effectue sur une base individuelle, soit à travers la
mobilisation du réseau des solidarités familiales (58,6%), soit
en prospectant directement auprès des employeurs (17,7% des cas). Moins
de 15% des chômeurs (13,4%) ont recours aux annonces des médias
(journaux, radio, etc..), et le recours aux agences de placement est marginal
(1,6%). Les modes de prospection sont presque identiques suivant que l'on ait
déjà travaillé ou non (ISTEEBU, 2007, p.18).
Les réseaux (relations familiales ou amis) sont
stratégiques dans la circulation de l'information sur le marché
du travail.
Tableau no5. Circulation de l'information
sur le marché du travail informel au
Burundi
Réseau
|
Propriété
étrangère
|
Propriété burundaise
|
Total
|
Amis/ Familles
|
66,7%
|
85,1%
|
82,8%
|
Bureau de placement privé
|
26,7%
|
1,0%
|
4,3%
|
Par voie de presse et d'affichage
|
-
|
4,0%
|
3,4%
|
Réseau scolaire
|
-
|
2,0%
|
1,7%
|
Autres
|
6,7%
|
7,9%
|
7,8%
|
Total
|
100%
|
100%
|
100%
|
Source : Enquête Entreprises
Burundi 2006, Banque Mondiale
Graphique 01 : Circulation de l'information sur
le marché du travail informel au
Burundi
III.2.3. Modes d'acquisition de revenu
complémentaire
La baisse sans cesse croissante du pouvoir des salariés
exerçant dans le secteur moderne incite les ménages à
rechercher des revenus complémentaires dans le secteur informel. Ces
ménages ou individus font de petits travaux (comme par exemple le
commerce informel, artisanat, etc.) en cherchant simultanément un revenu
complémentaire pour joindre les deux bouts du mois.
III.2.3.1. Accéder au « petit
crédit » (tontines) et échange de service
Le financement des activités de l'économie
sociale est assuré par la finance traditionnelle. L'une des
activités qu'adoptent les populations comme stratégie de survie
est la pratique des tontines et associations. Ces dernières sont de
diverses natures : les tontines et associations des collègues, des
ressortissants des mêmes villages, du même sexe, etc. Une grande
partie de la population, aussi bien urbaine que rurale, se tourne vers le
secteur financier informel car elle est exclue des réseaux
institutionnels classiques. Au sein des réseaux de solidarité ont
émergé les initiatives individuelles et collectives qui
expliquent la survie de populations, en particulier urbaines, dans des
conditions matérielles souvent très précaires.
En dehors des banques et
institutions de crédit, les sociétés locales inventent les
organisations et les pratiques nécessaires à la résolution
de leurs problèmes financiers spécifiques.
Les populations constituent des réseaux de financement
particulièrement efficaces dont les prêts personnels, les tontines
et autres associations d'épargne et de prêt rotatifs sont un
exemple.
La forme la plus connue et la plus répandue de finance
informelle est l'association rotative d'épargne et de crédit. Les
participants versent régulièrement des cotisations de montant
fixe à un fonds commun qui est distribué tour à tour
à chacun des membres. Quand chaque membre a reçu le fonds une
fois, le cycle doit recommencer. Ce système d'épargne est au
départ conçu pour résoudre à tour de rôle
divers problèmes personnels des membres qui forment la tontine.
Les revenus monétaires d'un certain nombre d'individus
sont collectés régulièrement et attribués à
l'un d'eux pour qu'il utilise ces fonds à son profit personnel. Les
raisons qui incitent les individus à s'adresser à ce type de
financement sont de trouver des revenus additionnels qui sont
nécessaires pour subvenir aux besoins des familles et contrer
l'augmentation du coût de la vie.
Celui qui travaille dans le secteur informel n'est pas
forcément pauvre, et celui qui travaille dans le secteur formel
n'échappe pas nécessairement à la pauvreté.
III.2.3.2. Mobilité vers la pluriactivité
La pluri-activité, est l'exercice d'activités
secondaires, à l'insuffisance de revenus tirés de
l'activité principale. La divisibilité des produits, et leur
demande évolutive en raison de la faiblesse de leur pouvoir d'achat des
salariés, incite les individus ou les ménages à rechercher
des revenus complémentaires dans le secteur informel en créant
des activités diverses pour augmenter leur pouvoir d'achat. Les
fonctionnaires, parallèlement à leurs activités
professionnelles, exercent dans l'informel des activités similaires.
L'importance de ce phénomène s'explique en grande partie par la
faiblesse des revenus qui ne permettent pas une satisfaction correcte des
besoins de base.
Le secteur informel comprend plusieurs branches
d'activités, étant peu structuré, les ménages ou
individus développent au sein des quartiers le petit commerce de
détail, à domicile, ambulant ou flottant et beaucoup
d'activités dans l'artisanat telles que, la boulangerie, la cordonnerie,
les ateliers de couture, des menuiseries, des soudures, des kiosques, garage,
etc.
Ainsi, près des trois-quarts des chefs d'unités
de production au Burundi considèrent le secteur informel comme un mode
privilégié d'insertion dans le marché de travail. 31%
invoquent la possibilité d'obtenir un meilleur revenu que le salaire
auquel ils pourraient prétendre et 12% refusent le statut de travailleur
dépendant et mettent en avant le désir d'être leur propre
patron (ISTEEBU, 2007, pp.5-7).
Face à la pauvreté, les agents augmentent leur
pluriactivité. C'est-a-dire en plus de l'activité principale
développent une seconde activité; même une troisième
activité si possible. Cette pluriactivité est à mettre en
relation avec la crise économique (arriéré des salaires,
hausse des impôts, chômage...). Cette forme d'association entre
travail formel et informel est très répandue au Burundi. Elle
permet aux travailleurs de garder leur système de sécurité
sociale.
Une telle stratégie prend des formes
diverses, elle montre que dans nombre de cas il existe une
complémentarité entre emploi formel et activités
informelles (exemple : utilisation du capital ou des inputs de l'entreprise
formelle pour une activité informelle). Les individus qui se
déplacent vers la pluriactivité travaillent souvent à
temps partiel dans leur emploi formel. Réfugiés dans le
secteur informel, ils développent un langage, caractérisé
par divers néologismes, traduisant leur lutte pour la survie et le
progrès; en témoignent des expressions comme, par exemple :
kwiyungunganya29(*).
Souvent mise en avant par les fonctionnaires au Burundi, la
pluri-activité est considérée comme une stratégie
des ménages et des individus pour accroître leur revenu.
Sur 128 975 actifs occupés à Bujumbura, 9 544
déclarent exercer une activité secondaire au cours de la semaine
de référence, ce qui porte le taux de pluri-activité
à 7,4%. Les emplois secondaires ont le même profil que les emplois
principaux. Le commerce et les services sont encore plus présents ici
avec respectivement 25,2% et 32,6% des emplois secondaires. Ils s'exercent
presque exclusivement dans le secteur informel qui en accueille 89% à
lui seul, tandis que le privé formel n'en accueille que 1,8% (Idem,
p.23).
III.3. Chômage et insuffisance de revenu sur le
marché du travail burundais
III.3.1. Population active et emploi
Le premier recensement général de la population
au Burundi date de 1979. Les résultats de ce recensement ont
donné un effectif de 4.028.420 habitants. Un 2ème
recensement a été effectué 11 ans après en 1990 et
les résultats indiquaient un effectif de 5.292.793 habitants avec une
densité moyenne de 296 habitats/ km², elle a atteint en 2000
environ 6,7 millions d'habitants. En 2005, cette population devrait avoisiner
les 7,7 millions d'habitants, selon les estimations faites par le Projet Appui
à la Prise en compte des questions de Population. La population du
Burundi est estimée à 10,3 millions vers 2015. Le taux de
croissance de la population du Burundi avoisine 2,8% en 2005. C'est une
population jeune avec une proportion de population de plus de 44% de personnes
de moins de 15 ans en 2005.
Les données brutes indiquent qu'au Burundi, la
population en âge d'activités, c'est à dire entre 15 et 64
ans, s'élève à 3,5 millions. Avec une population active
occupée estimée à 3 321 036 par l'enquête
prioritaire de 1998, le secteur structuré prend seulement 119 294
employés soit 3,5%. En cette même année, le secteur public
compte 35 060 emplois permanents, tandis que le parapublic et le
privé ensemble comptent 84 234 emplois permanents (Ministère
de la planification du Développement et de la Reconstruction, 2003,
p.118). Le secteur structuré est le secteur le plus connu.
En 2000, les emplois permanents des sous secteurs qui le
composent s'élevaient à environ 97 287 repartis comme suit
(CSLP-Intérimaire 2000):
- Administration publique : 35 904
- Parapublic : 27 405
- Privé : 33 978
Alors que le taux de croissance annuelle de l'emploi
était estimé à 4% avant 1993, il n'a été que
d'environ 2,3% ces 5 dernières années. Ce taux de croissance est
sans doute inférieur à celui de la demande de l'emploi dans le
secteur à considérer. Il suffit de considérer uniquement
que le taux de croissance moyen des effectifs de l'enseignement secondaire sur
la même période est de 3,7% et celui de l'enseignement
supérieur de 3,1% (CSLP-Intérimaire 2000).
S'agissant de la population inactive, elle représente
au niveau national environ 12,1% de la population en âge
d'activité (population de 15 à 64 ans). En Mairie de Bujumbura,
elle est estimée à 31,5% et à 10,9% dans le Reste du pays.
Parmi la population au chômage, 90,0 % évoquent comme raison
majeure du chômage le manque de travail. Cette raison reste importante
aussi bien à Bujumbura-Mairie que dans les autres régions (94,6 %
en Mairie de Bujumbura contre 85,1% dans le Reste du pays). Quant à la
proportion de la population économiquement inactive observée,
elle est surtout liée à une très forte proportion
d'étudiants/élèves que ce soit en Mairie de Bujumbura ou
dans le Reste du pays. En effet, au niveau national, 66,8% de la population
économiquement inactive est constituée de cette dernière
catégorie. En Mairie de Bujumbura, elle représente 64,3 % et est
de 67,2% dans les autres régions (Idem, p.36).
Il ressort de toutes ces données qu'il n'existe pas
actuellement au Burundi une croissance suffisamment dynamique pour absorber les
nouveaux arrivants sur le marché du travail. Si l'on considère
par ailleurs qu'il existe un stock de chômeurs qui est estimé en
2002 à 21% (PNUD-Burundi-AFRISTAT, 2005, p.36) de la population active,
on se rend compte du défi qui est posé à l'économie
burundaise pour résoudre le problème de l'emploi.
III.3.2. Une croissance économique
incapable de répondre aux besoins d'emplois
et d'accroissement du revenu
De façon générale, le marché du
travail burundais se caractérise par la prédominance du travail
indépendant et du travail informel ; peu d'emplois salariés
formels, une faible productivité du travail et donc par des salaires
relativement bas. Les emplois du secteur formel sont plus décents par
rapport à ceux du secteur informel.
En réalité, cette déduction demeure
incertaine puisqu'en théorie un individu qui n'a pas réussi
à obtenir un emploi dans le secteur formel (public ou privé) a le
choix entre trois stratégies : soit se retirer du marché du
travail et devenir inactif; soit rester chômeur en attendant qu'un poste
se libère; ou bien trouver un emploi dans le secteur informel.
Le marché du travail connait une forte croissance
démographique et de l'urbanisation rendant difficile l'absorption des
nouveaux actifs. On observe des taux élevés de sous-emplois, ce
qui traduit aussi par des niveaux de revenu relativement bas (MUZANEZA V.,
2007, pp.12-13). Faute de demande en provenance des employés du secteur
moderne, le secteur informel grossi par de nouveaux entrants peut être
amené à se développer de façon autocentrée,
ce qui se traduirait par une forte baisse de sa productivité et un
retour à un dualisme plus traditionnel, où le secteur
traditionnel reste séparer du secteur moderne.
Le taux de chômage est sensiblement plus
élevé à Bujumbura 14% que dans les villes de
l'intérieur du pays : Gitega 9%, Kirundo 7%, Makamba 5%. Sur une
population potentiellement active (individus de 10 ans et plus) de 272 662
personnes, la ville de Bujumbura compte 159 877 actifs, soit un taux
d'activité (au sens large) de 58,6%. Ce taux d'activité est de
54,7% si l'on restreint la population active aux critères du BIT
(ISTEEBU, op.cit, p.11). Les femmes sont plus touchées que les hommes
avec 17,8% contre 10,8% au niveau des hommes. Suivant le groupe d'âges,
le chômage est plus concentré entre 10 et 29 ans (17,2%) qu'aux
autres groupes d'âges.
Au Burundi, en milieu urbain le taux de chômage atteint
en moyenne 13,3% (stable entre 2006-2007). Il est probable que ce taux soit
sous estimé car il ne tient pas compte des « chômeurs
découragés », c'est-a-dire des personnes qui
souhaiteraient exercer un emploi mais qui ont cessé d'en chercher un,
faute d'espoir d'en trouver. Si on tient compte de ces personnes, le taux de
chômage atteint 21% au Burundi en milieu urbain, en 2007, contre 19 en
2006. Ce taux élevé s'explique sans doute par la faible
propension des jeunes à créer leur unité de production
informelle(UPI)30(*).
La libéralisation du marché de l' emploi
intervenu en 1992, accompagné d'une mesure législative non
contraignante, a fait baisser quantitativement les formulaires de
déclaration annuelle de la main d'oeuvre, paralysant du coup les
services chargés de l'évaluation du marché du travail dans
le secteur structuré et renforçant les difficultés
d'information au niveau du secteur non structuré, déjà
difficilement contrôlable par lesdits services (Ministère de la
planification du développement et de la reconstruction, 2003, p.181).
La création des emplois se diffèrent selon le
secteur. D'abord, dans le secteur public, les emplois sont
concentrés dans les branches non marchandes. Cependant l'emploi
industriel représente environ 25% des emplois dans les entreprises
para-publiques, soit le double du poids que sur l'ensemble du marché du
travail. Le secteur parapublic n'est pas très dynamique: de 1990
à 2004 ; il n'a créé que 7587 emplois.
Et enfin, la main-d'oeuvre du secteur informel, se concentre
dans des établissements de petite taille ; 80% des emplois proviennent
d'unités de production de moins de 6 personnes et 31,6% sont des autos
emplois.
La précarité des établissements se mesure
par le fait que moins d'un quart seulement des emplois sont
réalisés dans de véritables établissements. Tandis
que six emplois sur dix sont exercés sur la voie publique, un poste
improvisé ou à domicile. Enfin 35% des emplois informels sont des
travailleurs indépendants.
Conclusion
Dans ce chapitre, nous avons essayé d'analyser et
d'étudier les particularités réelles du marché du
travail dans les Pays en voie de développement d'abord et celui du
Burundi en particulier. Même si on constate actuellement des
hétérogénéités suivant les différents
pays, il existe néanmoins de grandes similitudes concernant les
caractéristiques de ces marchés. Le secteur informel constitue le
mode d'insertion privilégié sur le marché du travail
compte tenu du blocage de recrutement de la fonction publique et d'une offre de
travail insuffisante de la part du marché du travail des firmes
privées.
Conséquemment, de nombreux demandeurs d'emploi sont
contraints d'exercer diverses activités, même dans
l'illégalité, pour se procurer un revenu afin de survivre en
opérant à travers divers réseaux sociaux. En quelque
sorte, le secteur informel apporte aux pauvres et aux marginalisés un
moyen de survivre, faute d'aides publiques telle que l'assurance chômage
puisque l'État est incapable de remplir adéquatement son
rôle en répondant aux besoins de sa population.
Le travail salarié qui était tout l'espoir et la
raison de vivre de la population active s'est substitué à la
culture de la "débrouillardise", de la survie. La population
concernée recourt à d'autres moyens de subsistance pour pouvoir
assurer une meilleure destinée à leur famille et lutter contre la
pauvreté. Les unités informelles constituent un réservoir
potentiel des petits entrepreneurs susceptibles de fonder un modèle de
développement autocentré du pays.
Après l'expansion et l'évolution du SI, dans le
4eme chapitre nous allons décrire le SI, sa vraie place et
son vrai rôle dans la vie socio-économique des gens oeuvrant dans
ce secteur, sa manifestation et son fonctionnement dans la
mairie de Bujumbura.
CHAPITRE IV. DEMARCHE EMPIRIQUE
Introduction
La démarche empirique fait pratiquement appel aux
méthodes de collecte et d'analyse des données en vue de soumettre
les hypothèses de travail à l'épreuve des faits. Deux
approches méthodologiques sont possibles : la méthode
hypothético-déductive et la méthode
hypothético-inductive. Alors que la deuxième procède par
induction ; c'est-à-dire une
généralisation/théorisation à partir des cas ou des
faits préalablement observés sur terrain, la première part
des questionnements théoriques, assortis d'une ou plusieurs
hypothèses, pour arriver à la vérification de celles-ci au
moyen des données concrètes de terrain. Nous avons opté
pour cette dernière.
Dans le cas d'espèce, deux hypothèses sont
respectivement avancées, quitte à les confronter aux
réalités du terrain en ce qui concerne les mécanismes de
fonctionnement, les stratégies de développement, ou à
défaut, de survie du secteur informel.
- Le secteur informel fonctionne comme un secteur d`absorption
de la main d'oeuvre et contribue au supplément de revenu ;
- La pérennité tient au fait que les
activités non structurées font partie des réalités
de la vie quotidienne.
Pour confirmer ou infirmer ces hypothèses, notre
premier pas consiste en élucidation des concepts clés et en leur
traduction sous forme d'indicateurs mésurables, au mieux pertinents. La
deuxième étape consiste en la délimitation
spatio-temporelle du champ d'observation ainsi qu'au choix conséquent
des unités d'observation. Troisièmement, la démarche
empirique nous oblige à recourir aux différents instruments de
collecte de données, ainsi bien quantitatives que qualitatives. En
dernière instance, la collecte et le dépouillement des
réponses devraient nous conduire à l'analyse ou au traitement des
données ainsi recueillies ainsi qu'à leur interprétation;
en veillant chaque fois à mettre en évidence les
difficultés rencontrées lors des différentes
étapes.
IV.1.
Délimitation spatio-temporelles du champ d'observation
IV.1.1. La recherche documentaire
Pour obtenir les informations jugées nécessaires
à la vérification des hypothèses, nous avons dans un
premier temps reparti le travail de conceptualisation et d'illustration
empirique en deux phases.
Dans un premier temps, il s'agit d'un travail purement
documentaire qui consiste à consulter non seulement les
différents plans quinquennaux de développement, mais aussi les
différents rapports annuels produits par l'ISTEEBU ainsi que ceux
produits par les Organismes internationaux préoccupés par les
situations de chômage dans le monde et dans les PVD (BIT, BM).
Ce qui est recherché à travers ce parcours
documentaire, c'est la découverte d'une quelconque relation
déjà établie entre l'existence ou la multiplication des
secteurs d'activités informelles d'un côté, et des
contextes avérés de résorption de chômage,
d'accroissement de revenus ou tout simplement de lutte contre la
pauvreté, de l'autre côté (H1). Ce qui est également
recherché, c'est la tendance générale du secteur informel,
d'ici comme d'ailleurs, de subsister ou à perdurer à travers le
temps, malgré les multiples tentatives tantôt de
récupération, tantôt d'éviction par le secteur
structuré à haute intensité du facteur
« capital » (H2).
Pour y arriver, une relecture synthétique des
études cas (espace) sur le secteur informel dans certains PVD d'une
part, et une lecture de longue période (temps) du contenu des plans de
développement socio-économique du Burundi d'autre part,
s'avèrent nécessaires. A toutes fins utiles, rappelons que les
premiers plans quinquennaux datent du milieu des années 70,
période durant laquelle l'on assiste à une impulsion de la
machine économique selon les schémas keynésiens.
IV.1.2. Collecte des informations de terrain
Dans un deuxième temps, notre démarche vise
à obtenir des informations de « première
main » à partir d'un matériau concret :
l'état actuel du secteur informel dans certaines communes de la mairie
de Bujumbura. Les observations sont particulièrement portées sur
certaines unités informelles opérationnelles entre
Décembre 2009 et Mars 2010. Notre travail consiste ainsi à
confronter H1 et H2 aux observations concrètes du terrain
indiqué.
Deux arguments principaux militent en faveur du choix de cette
partie du terrain. Primo, c'est dans la ville-capitale où se
produisent les changements, après le passage des moments de crise, dans
le sens d'une demande de réinsertion sociale, socioprofessionnelle.
Secundo, en tant qu'habitants des quartiers urbains, nous estimons
avoir davantage d'accès facile à nos interlocuteurs potentiels,
ne serait-ce que par la maîtrise de la langue de communication. Bref, le
terrain est relativement propice à notre étude, même si du
reste, il est difficile voire impossible de le contenir entièrement.
IV.1.3. Procédure d'échantillonnage et souplesse
méthodologique
L'échantillon représente une partie de la
population totale. Dans le cas d'espèce, où l'ensemble des
communes et zones de la mairie de Bujumbura est considéré comme
totalité, l'échantillon est alors constitué par quelques
communes, zones ou quartiers de la mairie, choisis en essayant de respecter le
critère de représentativité. En ce qui concerne le mode de
choix de l'échantillon, nous avons recouru à autre mode qui nous
permet de trouver l'échantillon reflétant les
caractéristiques de la population étudiée:
échantillonnage par choix raisonné. En effet, contrairement
à l'échantillonnage par choix au hasard, il s'agit plutôt
de repérer et de viser des unités d'observations
présentant au mieux les caractéristiques voulues par les
chercheurs.
Dans ce sens, trois communes urbaines constituent donc notre
première sélection, à savoir : Rohero, Bwiza et Buyenzi.
Dans l'ensemble, nous avons focalisé notre attention sur 92
unités d'observation, elles-mêmes constituées de 21
unités de production de biens, 27 unités d'échanges de
service et 44 unités de commerces informels. Trois catégories
d'interlocuteurs composent notre univers de répondants. Il s'agit
essentiellement de :
1. « opérateurs » ou
propriétaires des unités informelles,
autant créatrices d'emplois que génératrices de
revenus;
2. autorités administratives représentées
ici par les agents du ministère de la fonction publique, du travail et
de la sécurité sociale, de la mairie de Bujumbura et de la
SOGEMAC;
3. demandeurs ou bénéficiaires des biens et
services offerts par la première catégorie d'interlocuteurs.
Alors que la procédure d'échantillonnage des
unités composantes de la première et de la deuxième
catégorie procède du choix raisonné, celle de la
troisième catégorie procèdent quelque du choix par hasard
puisque les personnes répondantes sont rencontrées aux lieux
même d'approvisionnement. Il en est de même pour les
commerçants ambulants.
Néanmoins, les difficultés se manifestent
déjà à ce niveau. La première difficulté se
trouve au niveau de la sélection des opérateurs et
bénéficiaires répondants. En effet, les intervenants dans
le secteur informel ne se prêtent pas facilement à l'observation
empirique, et encore moins à l'enquête. Ceci est notamment
dû à l'incompréhension des objectifs de l'enquête,
à la suspicion d'un éventuel espionnage du service des
impôts et domaines. Il y a la réticence ou même le refus de
certaines personnes cibles de répondre au questionnaire; car craignant
d'être menacées dans leur situation au regard de leur état
d'informalité. Souvent, nous avons été obligés de
décliner notre identité complète, notamment en
présentation de notre carte d'étudiant. Cela nous a permis, et
nous le croyons fermement, d'obtenir des informations fiables. Aussi,
avons-nous parfois introduit soit une plaisanterie, soit une taquinerie afin de
regagner la confiance des interlocuteurs.
Dans ce même ordre méthodologique, il nous a paru
nécessaire d'utiliser une langue vernaculaire en vigueur au sein des
différents lieux d'investigation, en l'occurrence le swahili,
étant donné que la majorité des répondants sont, si
pas analphabètes, au moins ne parlent et ne comprennent pas la langue
française, et des fois même le kirundi. Enfin, dans le but de ne
pas laisser de suspicion après notre passage, nous avons chaque fois
promis de garder l'anonymat en ce qui concerne les personnes ayant livré
des informations.
IV.1.4. Techniques de collecte des données de
terrain
Compte tenu de la qualité et de la diversité des
informations recherchées, la méthode d'observation directe a
été privilégiée. Ce type d'observation permet en
effet de rencontrer et d'échanger directement avec la personne
répondante, surtout lorsque celle-ci n`a pas assez de temps pour
répondre par écrit ou ne sait pas lire ou écrire. Au
moment de l'entretien, nous avons suivi les phases suivantes :
- observation directe de ce qui se passe
réellement et entretien de face-à-face avec le répondant
dans chaque catégorie d'atelier (menuiserie, soudure, mécanicien,
stands d'exposition des produits, lieu de vente, ...). Ce type d'observation
permet de découvrir la présence des travailleurs, leur nombre,
leurs caractéristiques apparentes, leurs mouvements, leurs
habilités, etc. ;
- recueil des informations par prise superficielle de
notes ; ce qui nous permet de garder la trace de ce qui est dit, de
distinguer l'important de l'accessoire et sur lesquels nous pourrons rebondir
tout en conservant une reproduction fidèle des paroles obtenues.
- confection et utilisation d'un
questionnaire afin de recueillir le maximum d'informations et
aussi de tester la stabilité des réponses obtenues au moment de
l'interview.
Le questionnaire, dont un exemplaire sera annexé au
document final, est exclusivement destiné à la catégorie
d'opérateurs, présumés « créateurs
d'emplois » pour autant qu'ils savent lire ou écrire. Il
contient des questions aussi bien ouvertes que fermées, des questions
à réponse unique et des questions à choix multiples. Dans
l'ensemble, quinze questions avec des sous-questions ont été
posées à la catégorie des opérateurs ;
c'est-à-dire les propriétaires des unités
observées. A notre appréciation, toutes les questions ont
été formulées de façon compréhensible. Mais
cela n'empêche qu'un bon nombre de questions posées n'ont pas
trouvé des réponses satisfaisantes.
IV.1.5. Difficultés rencontrées
La procédure de collecte de données de terrain a
été jonchée d'obstacles. D'où la faible
quantité de réponses obtenues. Nous l'attribuons au
caractère souterrain du secteur informel en général, et
à une culture moins réceptive aux sondages d'opinion et un manque
d'ouverture des répondants en particulier. En effet, quel que soit le
type d'observation utilisé, la procédure de collecte des
données s'est heurtée à des attitudes réticentes.
La plupart de nos interlocuteurs répondaient comme quoi ils
étaient très occupés à gagner leur pain quotidien.
D'autres avaient plutôt des difficultés à nous
répondre visiblement, de peur d'être attrapés par les
agents policiers31(*).
Dans d'autres cas, les bénéficiaires n'acceptent
pas de donner les informations sur les factures payées ou non (garage,
ateliers,...) par peur de se compromettre eux-mêmes en montrant qu'ils
achètent au moindre prix et « dans l'ombre ». Aussi,
les autorités administratives ne disposent pas assez d'informations
pertinentes sur les activités commerciales réalisées au
sein du secteur informel. Il n'y a pas des données statistiques sur
lesquelles on peut s'appuyer pour, non seulement décrire le secteur
informel, mais aussi et surtout comprendre les mécanismes de
fonctionnement dudit secteur. C'est en définitive ce manque des
informations quantitatives fiables, qui nous a poussés à chercher
d'autres sortes d'informations, notamment celles de type qualitatif.
IV.2. Analyse et
interprétation des informations obtenues
IV.2.1. Résultats obtenus lors de la
vérification de la première hypothèse
IV.2.1.1. Recherche documentaire
Les facteurs explicatifs du lien entre l'expansion du secteur
informel et la lutte contre le chômage sont d'une part, la
croissance de la population active suite à des facteurs
démographiques et, d'autre part, l'incapacité du secteur
d'économie moderne de fournir du travail à une population active
en plein essor. Les possibilités d'emploi offertes par le secteur formel
étant très faibles, la population se retrouve donc par contrainte
dans le secteur informel.
En effet, le S.I. n'a cessé d'enregistrer de nouvelles
recrues appartenant à toutes les tranches d'âge et provenant des
villes comme des campagnes. De plus, la part de l'emploi informel est plus
élevée dans les régions les plus pauvres des pays en
développement, notamment l'Asie du Sud, l'Afrique subsaharienne et
l'Asie du Sud-Est. En Inde par exemple, en 1999-2000, la part de l'emploi
informel était de 76,7 pour cent en région urbaine et de 94,8
pour cent en zone rurale (SAKTHIVEL S.; JODDAR Pinaki, 2006, pp.2107-2114). En
RDC, en 2000, les statistiques ont fait état de 98% de la population
active qui était directement frappée par le chômage, le
S.I. a réussi pour sa part à prendre en charge 72% de la
population active en lui offrant un emploi ou auto-emploi précaire
soit-il (P. LUWANSANGU, 2006, p.12). Au Cameroun en 2006, les emplois sont tous
autant prépondérants dans ce secteur, plus de 90% des actifs
occupés y étaient employés.
Au Burundi, la population active était estimée
à 2 765 945 en 2000. Elle est probablement près de
3 000 000 en 2007 (BIHUTE D., 2007, p.8). Le marché de
l'emploi au Burundi est caractéristique d'une forte pression
démographique où le secteur parapublic aussi n'est pas
très dynamique: de 1990 à 2004; il n'a créé que
7587 emplois ne représentant que 0,89% de la population active (MUZANEZA
V., 2007, p.8).
Les 47.785 unités de production informelles des
activités marchandes non agricoles de Bujumbura emploient 83.332
personnes (ISTEEBU, op.cit, p.4). Ainsi,
l'enquête sur l'emploi a permis de dénombrer qu'au début de
2006, Bujumbura Mairie comptait environ 57.000 unités de production
informelles représentant près de 80% des emplois de la capitale
(ISTEEBU, ibidem, p.22).
IV.2.1.2. La description
des unités d'observation et la méthode des proportions
a) selon l'origine des répondants
Au total, 92 questionnaires ont été posés
aux opérateurs, 40 aux bénéficiaires et 10 aux
autorités administratives. Toutes les questions n'ont pas
été répondues. Chez les opérateurs, seuls 84 sur 92
répondants ont donnés leurs feed-back (soit un taux de 91,3%). 3
sur 10 soit 30% côté administratifs et 22 sur 40 soit 55%
coté bénéficiaires.
Tableau no 6:
Questionnaires posés répondus et non répondus
Catégories d'interlocuteurs
|
Taux de réponses
|
Facteurs explicatifs de faible/ forte taux de
réponses
|
Rép.
|
Non Rép.
|
Tot.
|
« Opérateurs » ou
propriétaires des unités de production
|
84
|
8
|
92
|
- Suspicion,
- Manque d'ouverture,
- Manque de temps,
- Peur d'être attrapés par les agents
policiers,
- La persécution par la loi,
- L'instabilité
|
Autorités administratives
|
3
|
7
|
10
|
- Ne disposent pas assez d'informations
pertinentes ou fiables sur les activités
informelles,
- Indisponibilité quasi-permanente des
informateurs (occupation constante).
|
Bénéficiaires
|
22
|
18
|
40
|
- N'acceptent pas de donner les informations
sur les factures payées;
- La peur d'être attrapé par leurs patrons;
- Fréquentation des lieux
soir (marché), ou
en cachète pour les uns.
- Problème d'emplacement,
|
Toutes catégories
|
109
|
33
|
142
|
|
TAUX MOYEN:
|
58,8%
|
41,2%
|
100%
|
|
Source: Les auteurs
Légende : Rép:
Répondants, Non Rép : Non Répondants, Tot :
Total
Le tableau no7 montre que le total de 142
questionnaires qui ont été distribués, 109
représentant 58,8% ont été récupérés,
ce qui nous a encouragé à continuer notre travail et à
analyser les données. Pour analyser correctement les données
recueillies, nous avons chiffré les réponses obtenues dans les
tableaux, la fréquence des répondants étant retranscrits
en colonnes et leurs réponses en lignes. Les réponses sont
analysées et interprétées statistiquement en termes de
pourcentage.
En tout état de cause, l'échantillon
observé présente les caractéristiques principales
suivantes :
b) selon le genre
Concernant les opérateurs interviewés (92
unités), le premier constat est que le monde informel dans le domaine
production, commerce et service présente une prédominance
masculine à hauteur de 57,61% contre 42,39% du sexe féminin
(où elles font de la coiffure, de la couture, transformation
alimentaire, etc.). La présence féminine est plus manifeste dans
le domaine commercial avec 70,45% où les femmes s'activent le plus dans
les activités de la restauration, de la gestion de tables de
petit-déjeuner, beignets, dans la vente de légumes et de
condiments, de produits maraîchers, etc.
L'enquête, comme en témoigne le tableau qui suit,
fait ressortir le caractère hétérogène du secteur
informel. La diversité se manifeste à tout point de vue.
Tableau no7 : La
composition du secteur informel du point de vue genre.
Sexe
|
Effectif
|
Total
|
%
|
Opérateurs
|
Bénéficiaires
|
Aut. adm.
|
Prod.
|
Comm.
|
Serv.
|
Prod.
|
Comm.
|
Serv.
|
Féminin
|
4
|
31
|
4
|
4
|
17
|
3
|
2
|
65
|
45,8
|
Masculin
|
17
|
13
|
23
|
5
|
3
|
8
|
8
|
77
|
54,2
|
Total
|
21
|
44
|
27
|
9
|
20
|
11
|
10
|
142
|
100
|
Source : Les auteurs
Légende: Prod.: production ;
Comm.: commerce ; Serv.: service ; Aut. adm.: Autorités
administratives
En ce qui concerne les bénéficiaires, les femmes
sont demandeuses des biens et services du S.I. à l'échelle de 24
sur 40 soit 60% que les hommes avec 16 sur 40 soit 40%. La prédominance
féminine est très remarquable dans le domaine commercial alors
que les hommes dominent dans le domaine « production et
services». Des revenus additionnels sont nécessaires
pour subvenir aux besoins des familles et contrer l'augmentation du coût
de la vie et ce sont eux qui s'occupent de sa gestion. Le marchandage est un
rite qui joue sur la mouvance des prix. L'utilité du secteur est
observable aussi bien au niveau des populations de la mairie que des familles
des acteurs.
IV.2.1.3. Création d'emplois
a) Tendance
générale
Le secteur privé informel est le principal pourvoyeur
d'emploi, avec une part contributive de plus 79,5%, suivi par les entreprises
privées formelles qui interviennent à hauteur de 13,7%,
l'administration publique pour 3,5% et entreprises publiques pour 3.2%. La
régulation sur le marché du travail tend à se faire par le
secteur informel qui représente une part toujours plus importante de
l'emploi.
Tableau no8 : Structure des emplois par
secteur institutionnel
Secteur institutionnel
|
Effectif
|
Répartition en %
|
Administration publique
Entreprises publiques
Entreprises privées formelles
Entreprises privées informelles
|
4 576
4 152
17 747
102 727
|
3,5
3.2
13.7
79.5
|
Total
|
129 202
|
100
|
Source : ISTEEBU, Enquête phase 1,
Bujumbura 2006
Graphique 02 : Structure des emplois par secteur
institutionnel
Comme en témoigne notre enquête, le tableau qui
suit, montre les fréquences et les pourcentages des emplois de courte
durée créés dans des différentes activités
informelles cette année.
Tableau no9: Création
d'emploi
Réponses
|
Fréquence
|
Pourcentage
|
En fonction de la demande de nos produits
|
76
|
42,3
|
Oui (assez)
|
62
|
34,4
|
Pas assez
|
42
|
23.3
|
Total
|
180
|
100
|
Source : Les auteurs
A la question de savoir si les emplois sont
créés, la réponse est positive. En effet, sur le total de
92 enquêtés, la majorité d'entre eux 76 sur 180 soit
42,3% déclarent qu'ils ont créé beaucoup d'emplois en
fonction de la demande de leurs produits, 62 sur 180 soit 34,4% ont
augmenté le nombre de personnes engagées tandis que 42 soit 23,3%
disent qu'ils n'ont pas créé assez d'emplois.
Les données fournies par les interviewés
démontrent que, la majorité des personnes
interrogées propriétaire ou représentant des unités
différentes ont créé d'emplois, par rapport au nombre des
personnes qu'ils ont engagé la période précédente.
Ils soutiennent l'idée de poursuite de création d'emplois si
l'Etat ou les banques acceptaient de les octroyer des crédits.
En rapport avec les emplois créés, les
informations que nous trouvons sur terrain, l'offre et l'accès à
l'emploi dans ce secteur sont considérés d'une part, comme une
stratégie de survie pour les plus vulnérables et les non
qualifiés en l'absence d'autres choix. Et d'autre part, le secteur est
considéré comme un absorbant de l'excédent de population
active, en fournissant des biens et des services aux groupes à faible
revenu ou aux populations qualifiées en chômage.
« Nous sommes pauvres et nous ne pouvons nous
permettre de rester inactifs car nous devons gagner de quoi vivre. Beaucoup
entre nous, faute de possibilités de trouver un bon emploi, nous restons
ici. Pas de choix » déclarent-ils.
L'observation directe montre que les emplois sont
réguliers et les phénomènes saisonniers très
marqués. La mesure de l'emploi informel durant notre enquête est
basée sur la demande de travail, dans la mesure où celle-ci est
totalement déterminée par l'offre de travail.
De façon général, s'il n'ya pas de
demande accrue de biens et services, il n'y aurait pas création
d'emplois. Car la création d'emplois est en fonction du nombre des
commandes reçues, qui leur permettent d'augmenter le nombre de
personnes engagées.
b) Mode d'affectation
des bénéfices comme indicateur 1 de
création d'emplois
A la question de savoir comment les
bénéfices provenant des activités informelles sont
affectés, le tableau suivant livre les informations suivantes:
Tableau no10: Affectation des
bénéfices dans le SI
Réponses
|
Fréquence
|
Pourcentage
|
Embauche de nouveaux ouvriers ou jobistes
|
74
|
46,25
|
Redistribution aux membres, travailleurs déjà
engagés
|
54
|
33,75
|
Achat de l'outillage et machines
|
32
|
20
|
Total
|
160
|
100
|
Source : Les auteurs
La grande part des bénéfices des
opérateurs du SI observés sont affectés dans l'embauche
de nouveaux ouvriers ou jobistes.
En effet, 74 sur 160, soit un taux de 46,25% ou presque la
moitié des répondants le déclarent ainsi, pendant que la
redistribution aux membres, travailleurs déjà engagés
n'est signalée que par 54 répondants sur 160, soit 33,75% et
l'achat de l'outillage et machines; pour une fréquence de 32 sur 160,
soit 20 % des opérateurs répondants.
Selon le degré de détail au niveau des
informations collectées, la plupart des activités informelles
sont réalisées à l'aide d'un faible capital investi quasi
quotidiennement et dont le renouvellement dépend des affaires du jour.
Dans un contexte de survie, il est impossible d'envisager des perspectives
à moyen ou long terme.
Comme le recrutement est fait en fonction des commandes
reçues, plus le bénéfice est élevé, plus le
recrutement se fait davantage.
c) Origine des
demandeurs d'emplois comme indicateur 2 de la création
d'emploi.
Pour trouver un candidat correspondant aux besoins d'une
organisation dans un poste donné, on fait recours au recrutement
où le postulat se présente et fait état de ses
capacités à bien mener la tache qu'il sollicite. Quelle est la
catégorie des personnes le plus souvent embauchée dans le
S.I.?
Tableau no 11: Embauche dans le SI
selon catégorie
Réponses
|
Fréquence
|
Pourcentage
|
Toute personne qui se présente
|
86
|
70
|
Etudiants (en mécanique, écoles techniques)
|
32
|
26
|
Diplômés
|
5
|
4
|
Total
|
123
|
100
|
Source : Les auteurs
Ce tableau analyse la catégorie des personnes le plus
souvent embauchée dans le secteur informel d'où la
majorité 86 sur 123 = 0,699187; soit presque 70% déclarent
engager toute personne qui se présente à la recherche d'un
emploi. Les propriétaires soutiennent l'idée selon laquelle
l'embauche consiste à engager dans des liens professionnels des
personnes issues de la famille comme nous l'avons constaté dans certains
garages, des amis ou des personnes recommandées par des proches32(*). 32 sur 123 soit 26% sont des
étudiants fréquentant la section mécanique ou les
écoles techniques étant vacanciers ou stagiaires. 5 sur 123 soit
4% seulement sont des diplômés.
Les informations analysées dans ce tableau nous
montrent qu'en plus de toute personne à la recherche d'emploi, des gens
instruits en attente d'un emploi trouvent refuge dans le secteur informel.
K.S. vendeur de téléphones d'occasion sans
emplacement fixe nous déclare :
« je suis diplômé universitaire,
ce manque d'emploi montre que l'Etat a échoué, s'il faisait bien
son travail en donnant l'emploi aux jeunes, je ne serais pas en train de faire
ce travail ». L'incapacité des
économies à créer le nombre d'emplois nécessaires
pour absorber la main-d'oeuvre existante, constitue l'une des causes de
l'expansion de l'économie non-formelle comme on nous a expliqué
les menuisiers interviewés, « nous avons peur de rester
inactifs alors que nous avons des familles, il faut trouver des moyens pour
survivre ».
Le S.I. apparaît donc ici comme une réponse
à la crise de l'emploi dans le secteur moderne car il permet aux
chômeurs d'avoir un emploi. « Ce que je fais me permet de me
sentir utile, de travailler véritablement », a-t-il nous
déclaré un réparateur de téléphone
rencontré au Bata.
Pour être recruté, il suffit tout simplement
avoir la capacité de travailler et/ou la volonté d'accepter des
postes désirés.
d) Mode de
communication à l'embauche comme indicateur 3 de la création
d'emploi
La circulation de
l'information sur le marché du travail informel lors de recrutement se
fait par quels mécanismes de communication? Le tableau ci-après
montre certains modes de recrutement de la main-d'oeuvre dans le SI.
Tableau no12: Mécanisme de
communication pendant le recrutement
Réponses
|
Fréquence
|
Pourcentage
|
Bouche à oreille entre le recruté et le
recrutant
|
60
|
43,48
|
Bouche à oreille entre amis et connaissances
|
53
|
38,40
|
Réseau d'affinités parentales, familiales
|
25
|
18,12
|
Annonce publicitaire
|
0
|
0
|
Total
|
138
|
100
|
Source : Les auteurs
La majorité des propriétaires recrutent à
partir de la communication de bouche à oreille entre le recruté
et le recrutant à raison de 60 sur 138 soit 43,48%. Le recrutement
de l'employé peut ne pas correspondre à un besoin particulier du
garage ou atelier, ni tenir compte des qualifications de l'employé comme
la majorité des propriétaires nous le déclarent. Il s'agit
d'une forme de solidarité qui consiste à offrir à
l'employé un travail et les moyens de survie par le biais du travail,
au-delà des actes caritatifs ponctuels conformément aux
traditions de solidarité, et au dicton qui veut qu'au lieu de donner du
poisson à quelqu'un on lui apprenne plutôt à pêcher.
On supplée ainsi à la charité par le travail. 53 sur 138
soit 38,4% se caractérisent par la communication de bouche à
oreille entre amis et connaissances.
25 sur 138 soit 18,12% montre la présence de
réseau d'affinités parentales, familiales entre employeurs et
employés. Il faut noter que parmi les interviewés, personne n'a
trouvé son emploi par l'intermédiaire des services de l'annonce
publicitaire (une offre diffusée dans les médias).
Comme nous l'avons constaté, le recrutement est
différent de ce qui se fait dans l'entreprise formelle. Il ne
répond pas au schéma classique du processus de recrutement. Ce
processus va de la détection des besoins jusqu'à
l'intégration en passant par la recherche de candidat, la
sélection. Les relations d'emploi, lorsqu'elles existent, sont surtout
fondées sur l'emploi occasionnel, les liens de parenté ou les
relations personnelles et sociales plutôt que sur des accords
contractuels comportant des garanties en bonne et due forme.
Le recrutement dans les ateliers et garages visités
répond à une toute autre logique. Il est fortement empreint d'une
dimension d'interaction sociale et revêt les caractéristiques
suivantes:
v il se fait par recommandation et passe par le canal des
relations à travers l'intermédiation. Cette recommandation peut
se faire par le billet d'un parent proche, d'un ami ou une connaissance;
Par exemple K.U, chef d'un garage nous dit ceci:
«je recrute parce que les
parents ou les amis me confient leurs enfants
pour que je leur apprenne le métier»
· I. (Chef d'atelier de menuiserie) « je fais le
recrutement par recommandation des amis ou des parents»
v le recrutement a une valeur d'insertion du fait que les
apprentis sont intégrés après intermédiation et
grâce à un parent proche et après leur échec
à l'école le plus souvent.
· B. (apprenti menuisier)
«après avoir raté mon examen d'entrée
en septième, ma mère m'a amené dans l'atelier, je n'avais
pas le choix»
v le recrutement est effectué en tenant compte de la
sauvegarde de la bonne relation avec les autres opérateurs. Cela passe
par un consensus de ne pas débaucher l'apprenti d'un autre. Cette
relation obéit donc à une certaine éthique.
· J.M. (chef d'atelier soudure) «on
ne prend pas les apprentis des autres car cela peut gâcher nos relations
avec les autres».
· C. (Cheftaine d'un atelier de couture)
«il n'est pas bon de prendre les apprentis des autres car
ce sont eux qui les ont formés».
Les observations faites sur terrain nous ont montré que
le travail (la recherche de main d'oeuvre) dans le S.I. est indissociable du
rapport paternaliste qu'il entretient avec les gens du même secteur
d'activité. La solidarité s'inscrit dans une logique de
consolidation des liens sociaux entre les partis contractants. Catherine
Coquery V. écrit à ce sujet que « le travail est
toujours organisé de façon paternaliste reposant sur des
relations de parentèle ou de clientèle » (Coquery V.C.,
1991, p.184).
e) le revenu
procuré dans les activités informelles exercées
parallèlement aux activités professionnelles formelles
Pendant l'enquête, nous avons pu identifier 20
unités appartenant aux fonctionnaires du public ou du privé.
Parmi ces unités, 17 sur 26 boutiques ou kiosques de quartier
appartiennent aux fonctionnaires. 3 sur 9 restaurants implantés tout
prêt des grands services sont des propriétés de chef de
service ou travaillent dans ce service.
A la question de savoir
l'importance du revenu procuré par des
activités exercées par les fonctionnaires, parallèlement
à leurs activités professionnelles dans l'informel
pour eux et/ou pour leur famille. Les réponses suivantes ont
été données.
Tableau no 13 : Supplément de
revenu
Réponses
|
Fréquence
|
Pourcentage
|
Profitable (gain ou supplément de revenu)
|
14
|
70
|
Occupation (après les heures de service)
|
05
|
25
|
Non profitable
|
01
|
5
|
Total
|
20
|
100
|
Source : Les auteurs
La majorité de propriétaires c'est-à-dire
14 sur 20 soit 70%, nous a déclaré que la pluriactivité
est profitable car elle leur aide de suppléer à l'insuffisance de
leur revenu formel. En bref, ils sont guidés par le souci
d'accroître leurs revenus. 5 sur 20 soit 25% déclarent qu'il
s'agit d'une occupation et 1 sur 20 soutiennent l'idée selon laquelle
le revenu qu'ils en tirent est non seulement minime et même l'argent
gagné ne peut pas satisfaire leurs besoins fondamentaux.
Conclusion partielle
Tout au long de cette vérification du H1, la recherche
nous a d'abord montré que le secteur informel est très
hétérogène. Dans les unités commerciales
enquêtées, les femmes sont représentées soit 70,45%.
Du point de vue social, l'informel dans la mairie de Bujumbura
contribue à la réduction de la crise sociale. La majorité
des opérateurs propriétaires de différentes unités
informelles 76 sur 180 soit 42,3% déclarent avoir créé
d'emplois en fonction de la demande de leurs produits, et 62 sur 180 soit 34,4%
ont augmenté le nombre de personnes engagées. Il est à
noter que des unités comme celles de menuiserie, de soudure, de
restaurant, de garage comptent un personnel de plus de cinq (5) individus.
Par rapport au niveau d'accroissement de revenus, la
pluriactivité est fréquente et permet l'autofinancement des
acteurs qui restent trop méfiants vis-à-vis des structures
financières formelles.
Les 20 unités identifiées appartenant aux
fonctionnaires du public ou du privé, la majorité
c'est-à-dire 14 sur 20 soit 70% nous a déclaré que des
activités informelles sont profitables, car contribuent-elles à
l'insuffisance du revenu formel.
Pareils résultats corroborent entièrement notre
hypothèse émise. Et c'est la l'une de mérites de notre
étude.
L'existence des activités du SI et des petits
métiers se trouve menacée de disparition ou souvent soumises aux
tracasseries les plus diverses (administratives, policières et
personnelles). Suite à ces diverses tracasseries en question, les
acteurs du SI parviennent à adopter des stratégies pour inscrire
leurs actions dans la durée. En vue de remédier à cet
état de fait, des apparences clandestines, illicites, corruptions,
métamorphoses etc., se manifestent dans le but de perdurer leurs
activités.
IV.2.2. Résultats obtenus lors de la
vérification de la deuxième hypothèse.
L'analyse de résultats précédents
réfère à la méthode quantitative. Elle va du
dépouillement des réponses reçues, du traitement de ces
dernières jusqu'à l'interprétation des résultats
obtenus en passant par la transcription des données dans les tableaux.
Elle fait donc appel aux statistiques simples, en l'occurrence les
méthodes des proportions. La méthode qualitative, quant à
elle, réfère à l'analyse de contenu ; soit
du discours, soit des opinions en ce qui concerne la survivance du S.I. dans le
contexte typiquement burundais. Nous allons, dans cette section, mettre en
évidence la pérennité des activités informelles,
malgré les multiples tentatives d'éviction par le secteur
structuré. Pour évaluer cette pérennité, nous nous
sommes basés sur la notion de durée d'une part, et sur
celle de métamorphose (c'est-à-dire le fait de changer
le lieu et/ou la façon de travailler plutôt que disparaître)
d'autre part.
IV.2.2.1. Sur la recherche documentaire
Contrairement à ce qu'on a longtemps supposé, le
secteur informel n'est pas un phénomène passager, ni marginal et
voué à disparaître à moyen terme. Son ampleur et sa
complexité grandissantes dans la vie économique, sociale et
politique des pays en développement, en général, et
d'Afrique, en particulier, sont une réalité incontestée et
de plus en plus reconnue.
Le constat qui ressort depuis une vingtaine d'années
est que le secteur informel grossit de jour en jour là où le
développement économique se fait attendre. Les estimations
indiquent qu'en Afrique, au cours de ces quelques dix dernières
années, le travail informel a représenté près de 80
pour cent de l'emploi non agricole, plus de 60 pour cent de l'emploi urbain et
plus de 90 pour cent des emplois nouveaux en Afrique. En Amérique
latine, la proportion de l'emploi informel urbain par rapport à l'emploi
urbain total est passée de 52 pour cent en 1990 à 58 pour cent en
1997, et en Asie, la proportion des travailleurs informels est comprise entre
45 et 85 pour cent de l'emploi non agricole, et entre 40 et 60 pour cent de
l'emploi urbain (Carlos MALDONADO et al., 2004, p.1).
L'individu qui recherche un emploi, c'est la lutte contre la
pauvreté. Le principal facteur, ou la porte centrale d'insertion sociale
et de la réduction de la pauvreté est l'accès à
l'emploi (VERSTRAETE T., SAPORTA B., 2006, pp.183-196). Dans les pays en
développement, les masses populaires ont dû incorporer de
nouvelles règles de comportement socio-économique sous
l'influence de la modernisation. Elles ont su en même temps, conserver
des formes de solidarité et d'organisation communautaire, capables
d'assurer la "sécurité sociale" des individus membres,
particulièrement en temps de crise.
Toutefois, l'échec de la plupart des programmes de
développement et de lutte contre la pauvreté
présentés comme des outils décisifs de promotion des
activités génératrices de revenu et de lutte contre la
pauvreté, est censé permettre au S.I. de pérenniser leurs
activités.
Les stratégies pour la promotion de l'emploi au Burundi
ont déjà été faites maintes fois (CSLP-
Intérimaire, 2002). Elles figurent notamment dans le rapport national de
développement du Burundi et dans le CSLP-Intérimaire de Juillet
2002. D'autres stratégies sont connues depuis longtemps de services
concernés. Mais le financement de la Banque Mondiale en 1990 pour la
conception d'une politique national de l'emploi. Les fonds se sont
épuisés avant que la politique ne soit conçue
(Ministère de la planification du développement et de la
reconstruction: 2006, pp 119-124).
Le secteur informel, au Burundi depuis une vingtaine
d'années, a fait la preuve de son dynamisme. Il s'est
développé sans l'aide et l'appui des pouvoirs publics
malgré les mesures et actions prises en sa faveur dans la lutte contre
la pauvreté qui n'ont pas été mis en application.
IV.2.2.2. Réponses obtenues après le
travail de terrain
a) Analyse des réponses obtenues à travers
le contenu du tableau ci-dessous
Dans les tableaux ci-dessous, nous mettons en évidence
quelques cas illustratifs qui, à notre avis, prouvent que les
activités informelles ont continué à marquer leur
présence, en dépit des contraintes et faiblesses liées
à leur fonctionnement. Non seulement ont-elles participé à
la résorption du chômage, mais aussi et, au cas
échéant, ont-elles supplée à la carence de revenu
des familles pauvres.
Pour mettre clairement en évidence cette
pérennité ou survivance, nous mettrons en parallèle quatre
colonnes de contenus sous la forme
« conflictuelle »: de gauche vers
à droite, identification des sous-unités observées,
expression de la volonté politique, formes de résistances des
acteurs, et enfin nos propres observations : avec description du conflit
et solutions trouvées.
Tableau no 14 : Accueil des
différentes opinions des différentes personnes en
rapport avec la pérennité des
activités informelles33(*).
1. Commerce ambulant
Sous-unités
|
Expression de la volonté politique
|
Formes de résistances des acteurs
|
Observations : Description du conflit et
solutions trouvées
|
Commerce ambulant (carton, panier sur la
tête, vendre au bord de la route et couturiers etc.)
|
- Revendication du droit à l'espace public par
l'administration municipale de Bujumbura. (kugabanya akajagari mu gisagara)
|
-Nous ne pouvons pas quitter cet endroit parce que c'est
là où nous gagnons notre pain quotidien, pour nous et pour notre
famille.
-Il y a moyen de gagner la vie grâce à ce
métier car il fait vivre de nombreuses familles.
(Annexe no1).
|
Confrontation incessante entre la police et les vendeurs
ambulants dans les rues se trouvant aux alentours de marché central de
Bujumbura et dans des quartiers. Etre chassé pour revenir, il s'agit
donc d'un conflit entre le droit à l'espace public et
le droit de survie. (Annexe no2)
Pour que cette activité perdure, les acteurs du SI
adoptent les stratégies de : mobilité, pots de vin aux
agents policiers.
|
Source : Les auteurs
2. Commerce des fruits et légumes
(Tableau 15 : suite)
Sous-unités
|
Expression de la volonté politique
|
Formes de résistances des acteurs
|
Observations : Description du conflit et
solutions trouvées
|
Commerce des fruits et légumes.
(vendeuses à la sauvette autour du marché central de
Bujumbura)
|
-Selon l'Administrateur de la commune urbaine de Rohero,
l'effectif de ces femmes vendeuses est allé croissant et de
préciser qu'avant, elles étaient évaluées entre 13
et 14 et que aujourd'hui elles arrivent à 800 femmes vendeuses.
(MISIGARO Déo, 2010, p.17). Il continue en disant que,
«Si elles refusent de quitter les trottoirs, nous allons
utiliser la force ». (NKURUNZIZA Lyse, 2010, p.13)
(Annexe no3)
|
- « Nous sommes traquées
continuellement par la police et nous travaillons la peur au ventre, mais je ne
suis pas prête à quitter cet endroit ».
La décision de nous envoyer dans les marchés
périphériques de la municipalité de Bujumbura ne peut pas
nous permettre de survivre ; donc la clientèle de fruit se trouve
plus au centre-ville qu'à la périphérie de la capitale.
|
-Aménagement de nouveaux stands du
coté nord du marché central de Bujumbura « Le grenier
du Burundi» mais une grande partie se voit inoccupé.
(Annexe no4)
-Elles ne sont pas inquiétées par
l'administration municipale. (Annexe no5)
Remarquons que ce n'est pas la première fois que la
mairie accorde une trêve à ces vendeuses. La mesure de les chasser
aux alentours de ce marché a toujours évolué en dents de
scie. Tantôt, elles bénéficient de la compréhension
de la mairie, tantôt elles souhaitent que les conditions dans lesquelles
elles travaillent aujourd'hui soient perçues comme une approbation
définitive de la mairie. Ainsi, elles auront fini d'être des
acrobates.
Dans le cadre de pérenniser leurs activités, les
commerçants, restent chaque fois prêts à fuir à
l'arrivée des agents policiers de peur de confisquer leurs biens
(marchandises).
|
3. Transport : vélos et de taxis-motos
(Tableau 15 : suite)
Sous-unités
|
Expression de la volonté politique
|
Formes de résistances des acteurs
|
Observations : Description du conflit et
solutions trouvées
|
Transport : vélos et de
taxis-motos
|
- En 2006, le Ministre des Transports a tenté
d'interdire leurs activités mais cette mesure a suscité une vague
de colère ainsi que des troubles sociaux au point que le
Président du Burundi a été contraint de l'annuler
(TRANS-AFRICA, 2009, p.18). En réalité, cette activité
génère des revenus significatifs pour de nombreux Burundais dans
un pays qui tente de se remettre de plusieurs années de guerre
civile.
|
Nous sommes des chômeurs, nous n'avons pas d'autres
moyens pour vivre. On nous a envoyé dans les banlieues de la ville,
mais pas de clientèle. «Privés de moyens de subsistance,
nous préférons travailler le matin avant que la police envahisse
les routes » ont-ils déclaré.
|
Depuis des mois, les anciens conducteurs de taxi-vélo,
accusés par les autorités, comme ses collègues,
d'être la cause de trop nombreux accidents. Il leur interdit de circuler
en ville. Malgré la décision prise, en sillonnant les routes de
la ville, on remarque que ces transporteurs continuent à fonctionner.
|
4. Petits Restaurants (Tableau 15 :
suite)
Sous-unités
|
Expression de la volonté politique
|
Formes de résistances des acteurs
|
Observations : Description du conflit et
solutions trouvées
|
Petits Restaurants
|
Les commerçants alimentaires ignorent les règles
élémentaires d'hygiène et de salubrité.
(Annexe no6)
|
La vie n'est pas du tout facile pour certaine famille vivant
en mairie de Bujumbura. Ainsi pour pouvoir vivre et faire vivre nos familles,
nous nous débrouillons en plantant des petits restaurants sur des lieux
où passent et travaillent beaucoup de gens même si ce n'est pas
permis par le service d'hygiène. Bien que cela soit fatiguant, nous
parvenons à assurer la vie de nos familles.
|
Dans des quartiers comme au côté de marché
central de Bujumbura et celui de Ruvumera, des restaurants poussent comme des
champignons. Condition d'hygiène précaire: utilisation de
récipients très impropres comme nous l'avons constaté dans
certains restaurants et cabarets. Les propriétaires travaillent dans la
clandestinité, en mettant les repas dans des petits sceaux avant de les
acheminent vers le lieu de travail de leurs clients.
|
5. Droit d'auteur (audiovisuel)
(Tableau 15 : suite)
Sous-unités
|
Expression de la volonté politique
|
Formes de résistances des acteurs
|
Observations : Description du conflit et
solutions trouvés
|
Droit d'auteur (La lutte contre la
contrefaçon et la piraterie34(*): cas des oeuvres musicales et films)
|
La législation relative au droit d'auteur est la Loi
N°1 / 021 du 30 décembre 2005 portant protection du Droit d'auteur
et des droits voisins au Burundi.
|
- « Depuis deux ans, j'étais sans
emploi. Aujourd'hui Dieu merci, je travaille et je ne peux pas arrêter
cette activité. Pour moi, c'est une passion et ça donne beaucoup
d'argent sans que je ne sois obligé de faire beaucoup d'effort. et je
sens que ça va continuer à bien
marcher ».
|
Les vendeurs des produits sur le marché illégal
des oeuvres musicales ou films sont observés dans les rues de la ville
de Bujumbura, d'autres sont installés dans le marché central,
d'autres dans les kiosques.
La majorité des « vendeurs »35(*) sont en
général les plus jeunes. Ils n'exercent que cette activité
au quotidien et sont des vendeurs ambulants. Un sac au dos et des CD, DVD,VCD
en main, ils écument tous les milieux à la recherche des clients
(bars, restaurants, domiciles, marchés, etc). De temps en temps, ils
sont interpellés par quelque passant intéressé. A
l'interpellation, ils s'arrêtent et vont vers le passant. Celui-ci leur
demande s'ils ont le produit qu'il souhaiterait acheter, ou encore il parcourt
les différents produits disponibles, et s'il est
intéressé, il en achète. Au cas contraire, il passe la
commande ou laisse le vendeur s'en aller, attendant un prochain vendeur qui
passerait par là. Ils font des déplacements incessants pour
échapper aux agents de la police tout en gardant leur produit dans des
petits sacs.
|
6. Les changeurs de monnaie (Tableau
15 : suite)
Sous-unités
|
Expression de la volonté politique
|
Formes de résistances des acteurs
|
Observations : Description du conflit et
solutions trouvées
|
Les changeurs de devises de la zone
dite "d'échange préférentiel", située au
centre-ville de Bujumbura, sur le boulevard du Prince Louis Rwagasore et autour
du marché central.
|
La loi de 2006 de la BRB oblige les changeurs à
opérer dans des bureaux officiels« Bureaux de change :
FOREX » et à verser des redevances à l'État.
«L'économie informelle est principale cause des
fuites fiscales, ses mouvements monétaires sont invisibles, ces
opérations ne laissent aucune trace. La majorité de leurs
opérations ne sont pas enregistrées et donc non imposables.
L'Etat y perd beaucoup car les bureaux de change ne déclarent que les
devises qu'ils retirent de la BRB ».( MADIRISHA Edouard, 2009,
p.7)
|
Il nous est difficile de louer un bureau de change faute de
moyens, et nous préférons rencontrer nos clients à leurs
lieux de travail, par exemple au parking des agences de transport international
des biens et des personnes.
|
Chaque jour, du matin au soir, on rencontre un grand nombre
des changeurs de monnaie en tenant des sachets noirs pleins de devises guettant
en tous sens, en quête d'un client potentiel. Et pour surveiller
l'arrivée des éléments de la police nationale qui
ramassent les liasses de billets et emprisonnent les changeurs.
Certains de ces bureaux sont vides. On n'y voit que des
chaises et un tableau noir où s'affiche le cours de change du jour de la
Banque centrale qui sert de référence. Ils travaillent en
clandestinité, en se métamorphosant en commerçants
ordinaires ou en se déguisant comme s'ils sont des simples passants. La
coopération avec ceux des banques leur permet de trouver facilement du
capital.
|
7. Eleveurs (Tableau 15 : suite)
Sous-unités
|
Expression de la volonté politique
|
Formes de résistances des acteurs
|
Observations : Description du conflit et
solutions trouvés
|
Eleveurs
Les Propriétaires des vaches en situation de «
déplacées de guerre » dans la Municipalité de
Bujumbura.
|
L'Ordonnance ministérielle n°
730/710/770/307/CAB/2006 du 11/04/2006 portant « Mesures
d'évacuation du bétail dans les Communes urbaines de la
Municipalité de Bujumbura » à compter du premier mai
2006 ; elle donne ordre aux éleveurs d'acheminer leur bétail
(près de 15 000 bêtes selon le gouvernement)36(*)au site aménagé
entre les transversales 13 et 16 à Maramvya, Commune Mutimbuzi, avec
double motif que la présence de leurs bovins constituerait un facteur de
pollution du Lac Tanganyika et détruirait en même temps
l'environnement.
(Annexe no7)
|
De leur avis, les éleveurs disent que, rien ne justifie
l'acharnement contre les vaches qui viennent de passer plus de 12 ans dans la
Capitale, et cela, par les autorités qui devraient normalement
s'investir pour protéger le peu de vaches ayant survécu à
la guerre.
Nous devons absolument le dire, cette attitude contredit le
programme annoncé par le Gouvernement actuel qui place le repeuplement
du Cheptel parmi les priorités des priorités, déclarent
les éleveurs.
|
Malgré l'interdiction d'installation du Cheptel bovin
dans la zone de la Rukoko historiquement réservée à cette
activité et la demande à l'Administration et au Commandant de la
police de l'Environnement, tous les deux en charge de la gestion de cette zone
d'agir pour faire respecter cette loi(remise en état des espaces
naturels et de la biodiversité).
Les éleveurs tiennent à rappeler qu'avant la
crise, leur Cheptel occupait, pour la plupart, la partie de la réserve
RUKOKO aménagée, depuis l'époque de la Monarchie, pour
l'élevage.
Les éleveurs sont convaincus que rien ne justifie le
déplacement systématique des vaches en stabulation permanente.
Certains éleveurs n'ont pas acheminé leurs bétails vers
Maramvya en préférant de les garder dans leur clôture dans
la Capitale qui semblait plus rassurante.
|
8. Exploitations de gravier et moellon.
(les extracteurs de gravier et de moellon dans les
rivières) (Tableau 15 : suite)
Sous-unités
|
Expression de la volonté politique
|
Formes de résistances des acteurs
|
Observations : Description du conflit et
solutions trouvés
|
Extraction du gravier, du moellon de rivière et du
sable
|
Au Burundi, l'Etat est préoccupé par la
protection et l'amélioration de l'Environnement, d'où la
promulgation de la Loi n°1/010 du 30/06/2000 portant Code l'Environnement
de la République du BURUNDI.
La prévention en vue de la protection de
l'Environnement s'observe aussi, dans le domaine de la recherche minière
et d'exploitation des carrières ou des mines. C'est ainsi que le Code
pénal de l'Environnement prévoit, En outre, les travaux, ouvrages
et aménagements le long des cours d'eau et des lacs doivent être
conçus de manière à ne pas porter atteinte aux ressources
naturelles situées dans les eaux sous juridiction burundaise.
|
Ce travail nous procure un revenu non négligeable afin
de subvenir à nos besoins .Nous risquons de mourir de faim une fois
arrêter ce travail malgré les conséquences.
Annexe no 8
|
Constatation des activités d'exploitations de
gravier et moellon d'une manière
désordonnée dans la rivière Ntahangwa devenue un
véritable chantier. Arriver là, on est accueilli par des camions
entrain de charger du moellon et du sable extraits sur place, malgré la
destruction du lit de cette rivière causant d'érosion. Or,
l'article 35, qui dit que les travaux de recherche minière et
d'exploitation des carrières ou des mines, entrepris conformément
à la législation minière, doivent être
organisés dans le strict respect de l'équilibre environnemental
et que les permis, autorisations ou concessions de recherche ou d'exploitation
des carrières ou des substances concessibles ne peuvent être
octroyés que dans le respect des exigences imposées par la
procédure d'étude d'impact.
Les stratégies prises pour pérenniser cette
activité malgré son interdiction, ils collaborent avec les
autorités en place, en leur offrant de pot de vins.
|
Conclusion partielle
A la lumière de l'analyse de ces opinions et en tenant
compte des réalités de la vie quotidienne des opérateurs
du SI, la recherche de sources nouvelles d'emplois et de revenus permettant
d'assurer le minimum pour vivre s'avère comme un outil pour garantir la
pérennité. Les résultats obtenus confortent notre
deuxième hypothèse de recherche. L'analyse de l'ensemble des
données recueillies nous montre que, sans que les défis
(pauvreté et chômage) soient relevés, l'économie
informelle continuera à prendre l'allure d'un tranquillisant, des
activités économiques comme d'un mal nécessaire dans un
contexte de survie, comme aussi d'un cache-misère des masses populaires.
L'économie informelle calme les tensions, nourrit des espoirs et aide
à survivre. Survivre mal, mais survivre en attendant mieux.
Les principales stratégies mises en oeuvre pour faire
perdurer leurs activités sont :
- Clandestinité
- Pot de vins ou corruption
- Mobilité
- Métamorphose
- Déguisement
C'est la mise en évidence de ces différentes
stratégies qui nous auront permis de confirmer notre deuxième
hypothèse de recherche, 2eme mérite du présent
travail.
CONCLUSION GENERALE ET RECOMMANDATIONS
Arrivés au terme de notre travail de recherche
« essai d'analyse du fonctionnement du secteur informel au
Burundi », il nous revient de résumer les faits saillants
ainsi que les principaux résultats auxquels notre étude a
abouti.
Comme nous l'avions mentionné dans les premiers
chapitres, le Burundi s'est engagé depuis quelques années dans
l'adoption des programmes et stratégies économiques à
haute intensité de main d'oeuvre, en l'occurrence les stratégies
de croissance économique et de lutte contre la pauvreté (CSLP)
ainsi que les Objectifs du Millénaire pour le Développement
(OMD). Ces stratégies favorisent pour la plupart la création
d'activités génératrices de revenus, avec l'assistance des
institutions financières nationales et internationales :
réseaux microfinance, Banque mondiale, Bureau International du Travail,
...
L'implication de ces derniers intervenants se fonde notamment
sur l'idée qu'ailleurs dans les pays en voie de développement, le
secteur informel, appelé également « secteur non
structuré » participe de façon significative à
la lutte contre la pauvreté de manière générale.
Les exemples du Kenya, de la Colombie, de la Corée du Sud, du Chili, ...
ont été évoqués en guise d'illustration. Dans les
différents pays, il permet notamment aux populations laissées
pour compte par le système de fonctionnariat et de
sécurité sociale du secteur public ou par les pôles
performants du secteur privé, de ne pas subir les effets néfastes
de l'exclusion et de la marginalisation.
Au Burundi, le secteur informel existe et demeure même
prépondérant étant donné les structures et les
lourdes tendances démographiques et, en particulier, le fort
degré d'inadéquation « Formation - Emplois »
dans le secteur structuré. De là, nous nous sommes posés
la question de savoir si le secteur informel, tout en demeurant
méconnu voire même combattu, jouerait un rôle
considérable au Burundi, du moins sur le plan microéconomique
comme cela a été observé dans d'autres pays
ayant connu des situations similaires : sous-développement,
rareté du facteur « capital », situations de guerre,
pauvreté de masse, une intensification du chômage, etc.
Certes, au niveau macro, le secteur informel contribue
l'économie nationale (PIB) à concurrence de 77%, selon les
statistiques de l'ISTEEBU 2006 mai 2008. Par hypothèse, cette
contribution si considérable, mais « souterraine »
se traduit par la création d'emplois ou d'absorption de la main d'oeuvre
abondante, et par l'accroissement de suppléments de revenus aux
ménages et ce, de manière chaque fois résurgente. Toujours
par hypothèse, nous avons stipulé que cette persistance des
activités informelles tient au fait qu'elles s'inscrivent dans les
réalités quotidiennes de la vie des populations.
Afin de vérifier ces hypothèses, le travail de
collecte et d'analyse des informations a débuté par la
détermination et la délimitation spatio-temporelle de notre champ
d'observation. Dans le premier temps, la phase exploratoire nous a conduit
à la consultation plus ou moins étendue des documents, des
revues, des ouvrages, des thèses et mémoires se rapportant
à l'étude du secteur informel. Dans le même ordre, la
lecture des rapports du BIT, de la Banque Mondiale, des visites
répétées sur des sites internet,... nous auront permis de
connaître quelques réalités sur le fonctionnement des
secteurs informels d'ailleurs (1 & 2ème chapitre).
Les informations issues de ce travail documentaire nous
auront, quant à elles, permis non seulement de faire une comparaison
desdites réalités, dans le temps et dans l'espace, mais aussi de
repérer le cadre théorique susceptible d'appuyer le processus de
vérification de nos hypothèses, en particulier la seconde. Dans
ce sens, nous nous sommes servis dune grille d'analyse interdisciplinaire que
nous avons exploitée dans une perspective historico-systémique
(3ème chapitre). Concrètement, nous avons
emprunté à K. Polanyi, les éléments d'analyse des
processus de développement en longue période. Nous avons en plus
adopté l'approche en termes d'économie populaire pour la lecture
des activités économiques informelles entreprises par les
différents individus ou ménages. Cette approche a consisté
à cerner ce que les individus font pour survivre et comment ils
réinventent les stratégies par rapport à la dynamique
sociale.
De ses analyses, nous retenons que toutes les
sociétés ont créé des règles pour
contrôler et réglementer les marchés. C'est ce que K.
Polanyi appelle le marché encastré dans le lien social.
Le processus de vérification des hypothèses nous
a également suggéré de choisir des unités
d'observation en fonction des variables à prendre en ligne de compte. Le
choix des échantillons s'est opéré sur la base du principe
de représentativité des unités informelles de production,
de service et du commerce qui ont été notre champ de
l'investigation. Nous nous sommes donc focalisés sur 92 unités
informelles, avec 21 unités de production, 27 unités de service
et 44 de commerces informelles supposés créer de l'emploi,
existantes entre Décembre 2009 et Mars 2010 dont 35 unités se
trouvant à Buyenzi, 34 à Rohero et 23 à Bwiza.
Quant aux méthodes d'observation proprement dite, nous
avons privilégié la méthode du questionnaire et dans une
moindre mesure, l'observation directe ou l'interview de face à face. Les
différentes informations recueillies auprès des répondants
ont été traitées à l'aide des méthodes
statistiques simples, en l'occurrence la méthode des proportions
(4ème chapitre).
A l'issue de nos analyses, il s'est
dégagé les principaux résultats suivants :
- La création de l'emploi au sein du secteur informel
est incontestable. Indéniablement, elle s'observe au niveau de petites
unités de production et d'échanges de biens et services dans
certains quartiers de la mairie de Bujumbura. Mais, dans une large mesure,
cette création reste conditionnée par le niveau de demande des
produits qui en sont issus. En effet, les calculs effectués sur notre
petit échantillon laissent voir que 34,4% des opérateurs
observés déclarent avoir augmenté le nombre de
travailleurs engagés durant la période indiquée. Plus, la
majorité des opérateurs propriétaires de
différentes unités informelles ; soit 42,3% déclarent
avoir offert temporairement ou occasionnellement du travail ; en fonction
de la demande de leurs produits. Autrement dit, plus il y a des commandes de
biens et services, adressée au S.I., plus l'emploi augmente ou le
chômage diminue.
- Par rapport au niveau de revenus, la pluriactivité
est fréquente. 70% des fonctionnaires du public ou du privé
exerçants la pluriactivité déclarent que ces
activités informelles sont profitables car elles pallient à
l'insuffisance du revenu formel.
- Bon nombres d'activités nouvelles survivent d'une
période à l'autre en dépit de multiples tentatives
tantôt d'interdiction, tantôt d'éviction, etc. par le
secteur structuré en général et par l'autorité
publique en particulier. Dès lors, il y a lieu d'affirmer qu'elles
réussissent à faire admettre dans leur environnement le registre
qu'elles proposent soit par arrangements, négociation, corruption,
travail dans la clandestinité, métamorphose, etc. Le tableau
n°15 du quatrième chapitre en a clairement montré les formes
de leur reproduction ou de leur résurgence dans le temps. Pareils
résultats corroborent entièrement nos hypothèses de
travail. Et c'est là l'une de mérites de notre étude.
Quand bien même nous aurons réussi à
cadrer notre recherche, et à vérifier nos hypothèses,
notre démarche présente néanmoins des limites tant sur le
plan méthodologique que théorique. La première, la
principale concerne l'impossibilité de procéder à une
généralisation statistique à partir des informations
obtenues sur notre échantillon. Les raisons majeures ont
été évoquées au long du chapitre sur la
démarche empirique.
Au niveau de l'implication théorique, certains de nos
résultats soulèvent des questionnements qui mettent en
évidence autant les forces que les faiblesses de notre étude sur
le fonctionnement du secteur informel. En effet, si le rôle
socioéconomique du secteur en question est reconnu tant au niveau macro
qu'à celui micro, il y a cependant lieu de s'interroger sur le sens de
l'interprétation suivante : plus il y a de commandes de
biens et services auprès du S.I.; plus il y a création davantage
d'emplois.
Que signifierait finalement le fait de sauver l'emploi en
augmentant les commandes « informelles » au moment
où les politiques budgétaires du moment visent justement
l'augmentation significative des recettes fiscales et du PIB via
l'accroissement des TVA par l'OBR, la transparence dans la gestion commerciale,
la convergence des critères d'évaluation de la performance
économique au sein de l'East African Community? Autrement dit,
faudrait-il développer le SI en tant que tel ou alors le transformer
progressivement en secteur structurés ?
Cette interrogation pousse in fine à
reconsidérer les modes d'action respectifs et les rapports entre les
différents intervenants dans la lutte contre la pauvreté de
masse, contre l'intensification du chômage. En nous appuyant sur les
appréciations des répondants à nos questions, il nous
revient de formuler les recommandations ci-après :
- Aux opérateurs économiques du secteur
informel : user davantage du flair afin de capter et de canaliser
les demandes en provenance des ménages ordinaires ou/et des
ménages collectifs (centres de santé, écoles,
établissements carcéraux, administrations publiques, etc.).
L'avantage comparatif possédé par le S.I réside dans le
fait que, sans considérer les aspects de normalisation de la
qualité des produits, il offre ces derniers à des niveaux de prix
relativement moins élevés que les opérateurs du secteur
structuré, et ce dans des délais relativement plus
raccourcis ;
- Aux structures de microfinances : permettre
l'accès au crédit à ceux qui voudraient s'installer pour
leur propre compte ; alors même qu'ils ne disposent que d'un faible
capital investi quasi quotidiennement et dont le renouvellement dépend
des affaires du jour. Donner les facilités de financement pour la
construction du «grenier alimentaire» du
Burundi en vue de récupérer les commerçants ambulants (de
fruits ou autres) serait un des cas d'illustration ;
- A la Mairie de Bujumbura :
adopter une politique de concertation, de dialogue et de communication non
violente avec les opérateurs économiques du secteur informel. En
effet, semble-t-il que l'usage immodéré de la contrainte ou de la
force crée plus de problèmes qu'il n'en résout. C'est
à travers ce climat de dialogue et de communication que les questions de
réaménagement du milieu urbain et, en général,
d'accès à l'espace public pourraient être repensées
au profit des catégories sociales les plus démunies.
- Au Gouvernement, et à travers lui,
l'ISTEEBU : accroître les efforts visant à
connaître les caractéristiques du SI au Burundi dans la
perspective de mieux maîtriser les enjeux économiques liés
à l'appartenance à l'espace économique
sous-régional et en particulier à l'intégration au
marché commun de l'EAC. Les chercheurs individuels ou en association,
privés ou commandités, pourraient être encouragés
à y prendre part.
Comme toute oeuvre humaine, le présent travail renferme
certainement de lacunes, surtout au niveau des méthodes de collecte et
d'analyse des informations. Néanmoins, celles restent susceptibles
d'être comblées par des recherches ultérieures, plus
outillées et plus soutenues financièrement. Nous restons ouverts
à toute analyse critique constructive pour autant qu'elle nous aide
à perfectionner la rédaction et la présentation des
résultats de nos investigations sur le secteur informel au Burundi.
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13/04/2010
Annexe no9. QUESTIONNAIRES
Ceci est un questionnaire répondant
à un travail d'ordre scientifique. Nous n'avons pas le pouvoir de
changer directement votre situation mais indirectement ceux qui liront ce
travail vous comprendront mieux et pourront agir en votre faveur. Nous comptons
sur votre sincérité. Le travail respecte, toutefois, l'anonymat
de façon stricte. (Nous allons utiliser le questionnaire avec questions
directes ou les réponses nous permettent de recueillir directement les
renseignements dont nous avons besoin).
I. Les opérateurs du SI
1."créiez-vous suffisamment d'emplois de courte
durée" cette année? |__|
?oui (assez) |__| pas assez
|__| en fonction de la demande de nos produits
2. Les bénéfices que vous dégagez (si c'est
le cas); comment les affectez-vous? |__| ?redistribution aux membres,
travailleurs déjà engagés |__| achat de l'outillage et
machines |__|? embauche de nouveaux ouvriers ou jobistes
3. Quelle est la catégorie des personnes le plus souvent
embauchée? |__| toute personne qui se présente |__|
étudiants (en mécanique, écoles techniques) |__|
diplômés
4. Par quel mécanisme de communication faites-vous le
recrutement ? |__|? bouche à oreille entre le recruté et le
recrutant
|__| bouche à oreille entre amis et connaissances
|__| réseau d'affinités parentales, familiales
|__| annonce publicitaire
5. Le revenu procuré dans cette activité, sont
pour vous, votre famille
|__|? profitable (gain ou supplément de revenu)
|__| non profitable
|__|? occupation (après les heures de service)
6. Comment vous comportez-vous avec vos clients ?
|__|
vous attendez qu'ils viennent
|__| vous cherchez à vous faire connaître (dans la famille,
dans le quartier, parmi les amis)
|__| vous prospectez vos clients
|__| autre (précisez)......
7. Comment es-tu arrivé à faire ce
travail ?
|__|? chômage
|__|? salaire insuffisant
|__|? facile à entreprendre
8. Quels sont les problèmes auxquels vous êtes
confrontés dans le cadre du travail ?
|__|? manque de clients
|__|? revenus faibles
|__|? manque de financement
|__| problèmes de locaux, de place
9. Quelle est la raison principale de la perte de votre
emploi?
|__| manque de clientèle
|__| manque de liquidités
|__| problèmes de locaux, de place
10. Quelles sont vos sources de financement ?
|__| tontines ?
|__| mutuelles ?
|__| banques ?
|__| capital personnel ?
11. Quel type de relation avez-vous avec la Mairie?
|__| neutre
|__| coopération
|__| conflit
12. Etes-vous satisfait (e) de la façon dont la mairie
tranche vos problèmes s'il y en a?
|__| tout à fait
|__| relativement
?|__| pas du tout
13. Quelles sont vos attentes vis-à-vis de la
Mairie ?
II. Les bénéficiaires de biens et services
du SI
14. Quelle appréciation faites-vous de vos tarifs?
|__| Dérisoires
|__| Abordables
|__| Chers
III. Les Autorités Administratives
15. Y'a-t-il des politiques municipales visant le secteur
informel ?
16. Quel est l'apport du secteur informel dans l'économie
de la mairie de Bujumbura?
* 1. Il est le premier
à prononcer le terme secteur informel en 1971 avant que celui-ci ne soit
vulgarisé par le rapport du BIT sur le Kenya en 1972. Cf. TURNHAM D.,
SALOME B., SCHWARZ A., Nouvelles approches du secteur informel, OCDE,
Paris, 1990, p.13.
* 2. Un article de
Wikipédia, l'encyclopédie libre consulté le 21/8/2009
* 3. Un article de
Wikipédia, l'encyclopédie libre consulté le 3/9/2009
* 4.
http://www.jobintree.com/dictionnaire/definition
de marché du travail consulté le8/2/2010
* 5
http://www.jobintree.com/dictionnaire/definitionmain-oeuvre-277.html
consulté le8/2/2010
* 6
http://www.pluriactivite.org/spip.php?article391-23k
consulté le11/09/2009
* 7 http://
www.toupie.org/Dictionnaire/Developpement.htm consulté le17/09/2010
* 8 Politiques des grands
chantiers pour résorber le chômage: "creuser les trous pour les
reboucher", pourvu qu'il y ait redistribution du revenu aux ménages et
aux individus.
* 9
http://www.ilo.org/public/french/employment/strat/publ/etp28.htm
consulté 13/04/2002
* 10
http://www.ilo.org/public/french/employment/strat/publ/etp28.htm
consulté 13/04/2002
* 11 Le terme» Acteurs
Non Etatiques» désignent les organisations qui regroupent des
structures de la société civile, en dehors des gouvernements et
de l'administration publique. Ces organisations sont indépendantes et
sans but lucratif. Ainsi on entend par « ANEs» notamment :
les ONG, les organisations communautaires de base et leurs associations
représentatives sociaux (syndicats, associations, d'entrepreneurs), les
associations du secteur privé, les mouvements confessionnels, les
universités, etc.
* 12. Il s'est tenu à
New York au siège des Nations Unies du 6 au 8 septembre 2000
* 13. Le DSRP est
établi à travers un processus participatif qui mobilise diverses
parties prenantes internes et externes, notamment les bailleurs de fonds et les
IFI. Il décrit les politiques, projets et programmes
macroéconomiques sur une période de 3 ans ou plus. GOHY Gilles,
dans son article Pauvreté : les mots et les faits au Bénin
dénonce « leur ton paternaliste, condescendant et au demeurant
dogmatique », La pauvreté, une fatalité ? (ouvrage
collectif)
* 14 Les objectifs du
Millénaire pour le
Développement :http://www.un.org/french/milleniumgoals/
* 15. Nations Unies :
Deuxième conférence des Nations Unies sur les pays les moins
avancés : Mémoire du Burundi, Paris, 3-14 septembre 1990
* 16 Un plan glissant
«c'est celui que l'on révise à la fin de chaque année
et des estimations des objectifs
et des projets pour douze nouveaux mois ajoutés
à la suite de ceux qui s'appliquent à l'année terminale
* 17 Ministère de la
planification, du développement et de la reconstruction, Forum des
états généraux
de l'économie Burundaise, Recueil des communications,
IDEC, Bujumbura, 2003, p.180
* 18
http://www.burundistats.org consulte
le 03/10/2010
* 19 http://
www.populationmondiale.com ,
consulté le 8/10/2010
* 20
http://www.ird.fr/fr/actualites/fiches/2005/fiche218.htm consulté le
6/3/2010
* 21
http://siteresources.worldbank.org/NEWSFRENCH/Resources/migration08-AFR.pdf
consulté
le6/3/2010
* 22. Selon le projet du
programme Futurs Africains des Nations Unies pour le développement.
Afrique
2025, quels futurs possibles pour l'Afrique au sud du
Sahara ?, Futurs Africains, Edition Karthala et
Futurs Africains, 2003, 191 pages
* 23 http://
www.populationmondiale.com
consulté le 13/06/2010
* 24 FELDMAN, S. et FERRETTI,
E. Informal Work and Social Change, Cornell University Press,
London, 1998, 295 p
* 25
« Mondialisation et emploi informel dans les pays en
développement », étude conjointe du
« BIT »
et du secrétariat de
l'« Organisation mondiale du Commerce
(OMC) », Genève, 2009, p.27.
* 26 Ibidem
* 27 Mohamed,
Sadeg. (2009). « Comment interpréter
l'économie informelle ? » Revue des Sciences
commerciales et de gestion. Éditions Laboratoire
Études Pratiques en Sciences Commerciales et en
Sciences de Gestion de l'École Supérieur de
Commerce d'Alger, N°5, pp 99-108).
* 28
http://www.oecd.org/document/32/0,3343,fr_2649_34487_41209120_1_1_1_1,00.html
du
08/04/2009
* 29 Kwiyungunganya, en langue
kirundi, l'expression signifie littéralement : s'occuper utilement.
* 30. On appelle «
unités de production informelle » toute organisation
destinée à la production et/ou à la
vente de biens et de prestations de services et ne
disposant pas de comptabilité complète décrivant
son activité.»
* 31. Dans les
différents quartiers de la mairie, ceux-ci traquent principalement les
vendeurs des produits
volés, piratés ou contrefaits.
* 32. On inclut dans le
cercle familial toutes les personnes qui entretiennent des liens de
parenté proche ou
lointaine. On parle très souvent de grande famille.
Mais la famille ne se limite pas seulement au lien
de sang. Elle peut aussi résulter d'une relation
d'affectivité et d'amitié transcendant le lien de sang.
* 33 Cas des activités
informelles différentes existant depuis son interdiction dès 2000
jusqu'au mois de
Mars 2010.
* 34 · La
piraterie : c'est la reproduction non autorisée
d'enregistrements originaux, pour le gain commercial, sans le consentement du
propriétaire des droits. La présentation des copies pirates
diffère des albums originaux. Les copies pirates sont souvent des
compilations, par exemple les «meilleurs tubes » d'un
artiste spécifique, ou une collection d'un genre spécifique,
comme les compilations « danse ».
Les contrefaçons : les
contrefaçons sont copiées et présentées de
façon à ressembler d'aussi près que possible à
l'original. Les marques et logos du producteur original sont souvent reproduits
pour abuser le consommateur et lui faire croire qu'il achète un produit
légitime.
* 35. Le
développement exponentiel des activités informelles et/ou
illégales dans la mairie de Bujumbura, comme nous l'avons
constaté, peut être appréhendé comme un indicateur
de l'exode rural au profit de cette ville, et surtout comme une manifestation
du dynamisme des jeunes qui s'y trouvent. Dans cette chaine de distribution et
de vente, les distributeurs s'occupent du recrutement des vendeurs. Ils
gèrent ces vendeurs suivant des contrats verbaux qui stipulent que le
vendeur doit à la fin de chaque soirée, verser une certaine somme
d'argent. Le recrutement de ces vendeurs est un recrutement basé sur des
critères subjectifs de lien d'amitié, de lien de famille. En
quelques mots, pour être recruté par un distributeur, il faut
« passer par quelqu'un ». Selon E.
(distributeur), «nous prenons ces précautions parce qu'il
faut travailler avec des personnes de confiance. Si vous prenez n'importe qui,
il peut vous faire foirer le business». Le lien social apparaît
dans ce cadre comme un déterminant prégnant dans le marché
illégal des oeuvres musicales et films.
* 36.
http://www.syfia-grands-lacs.info,
consulté le 25/5/2010
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