Paragraphe 2 : L'évanescence de l'identité
sous-régionale: Conséquence indirecte de la faiblesse du COPAX
De l'avis de Ropivia (2001:152), « la
dialectique entre les deux phénomènes de l'intégration et
de la stabilité politique est qu'ils peuvent se réguler
mutuellement, en ce sens que la stabilité politique favorise le
processus d'intégration régionale qui est lui-même pour la
région un facteur de stabilité politique». En d'autres
termes, sécurité et intégration sont deux notions proches
qui entretiennent entre elles des rapports d'influence réciproques. De
même qu'un climat de sécurité est un facilitateur du
processus d'intégration, de même des avancées dans le
processus d'intégration permettent de créer et garantir un climat
de paix et de sécurité sous-régionale. Or, il
apparaît que l'action du COPAX devrait avoir des répercussions sur
le processus d'intégration en Afrique centrale, processus qu'il pourrait
amplifier et renforcer dans le cas d'un fonctionnement efficace ou, processus
qu'il gênerait dans l'alternative d'un mauvais fonctionnement.
La démonstration en sens inverse de cette logique nous
est fournie par la CEEAC dans la période 1992-1998. En fait, cette
période qui est marquée par l'éclatement et l'aggravation
de crises et de conflits sévères à l'intérieur de
la majorité de ses Etats-membres ainsi qu'on a pu le constater au
Burundi et au Rwanda en 1993 et en 1994, dans la République du Congo
entre 1992 et 1994, puis entre 1998 et 1999, et en République
Démocratique du Congo à partir de 1996, a aussi été
celle de l'entrée du processus d'intégration dans un état
souvent qualifié d'hibernation. (Meyer. A, 2006 : 220).
C'est cet état de chose qui a motivé la déclaration selon
laquelle « dans la conflictualité globale quasi
permanente de l'Afrique sub-saharienne post-apartheid, l'Afrique centrale se
distingue des autres grandes régions par le fait qu'elle constitue le
seul espace où le processus de construction communautaire est
miné par de nombreuses guerres civiles qui ont donné à bon
nombre d'Etats la physionomie d'une déliquescence avancée et
à l'intégration régionale celle d'une grave
paralysie.» (Ropivia, 2001:143)
Dans les faits, le COPAX a, de façon très
timide, oeuvré pour la sécurisation de la sous-région et,
comme on peut l'imaginer, son action sur le processus d'intégration
sous-régionale est restée presque imperceptible.
Dans le même ordre d'idées on note la persistance
de certaines projections d'Etats tels l'Afrique du Sud, le Nigeria, la Libye
attirés par le potentiel minier de la sous-région et mus par
l'ambition de se poser en leader de la région Afrique au sein des
instances internationales.
Au sein même de la CEEAC, on perçoit encore des
antagonismes, des querelles de leadership et de positionnement entre acteurs
politiques sous-régionaux engagés dans la quête d'une
position de leadership sous-régional, querelles portant notamment sur la
gestion des questions sécuritaires.
Enfin, on note l'extraversion de certains Etats de la
sous-région qui font preuve d'une duplicité géopolitique
préjudiciable au processus d'intégration en adhérant
à plusieurs regroupements sous-régionaux différents. Tel
est le cas de la RDC et de l'Angola qui militent en même temps au sein de
la CEEAC et de la SADC.
Dans la même logique, il ne serait pas incongru
d'expliquer le départ du Rwanda de la Communauté en 2007 comme
étant le résultat du rôle néfaste joué dans
la polémologie de l'Afrique centrale notamment dans l'instigation de la
guerre dans les Kivus en RDC. A défaut de pouvoir apporter une
réponse sans équivoque à ces préoccupations,
notons, dans la perspective d'une réponse positive, que cette
alternative, en même temps qu'elle confirmerait le lien prévention
des conflits/intégration, nous donnerait une preuve suffisante de la
faiblesse de l'apport du COPAX dans le processus d'intégration.
Après observation du tableau ainsi dépeint,
force est de convenir que la question de la prévention des conflits en
Afrique centrale, en étant un point fédérateur des
ambitions des Etats de la sous-région, constitue déjà un
motif visible d'intégration et y participe. Seulement, il demeure que
cette intégration des volontés peine à se traduire par une
implication active et actante dans le cadre d'une approche concertée de
la prévention et de la gestion des conflits. Après près de
huit années de vie gestative, l'action du COPAX dans le processus
d'intégration sous-régionale reste encore mitigée et bien
que le COPAX continue à fédérer les voeux de paix et de
sécurité en Afrique centrale CEEAC, il ne demeure pas moins vrai
qu'il ne le fait pas encore pleinement dans les actes.
Nous retiendrons donc que le COPAX, par sa création et
sa mise en place, a été un motif d'intégration des
initiatives. Seulement, étant donné sa faiblesse relative en tant
qu'instance de prévention et de gestion des conflits dans la
sous-région, le COPAX n'agit encore que très faiblement sur la
situation sécuritaire de l'Afrique centrale, et ne peut pas encore
prétendre, jusque là, avoir eu une influence décisive sur
le processus d'intégration dans la sous-région Afrique centrale.
En dernière analyse, disons que la faiblesse du COPAX
est expliquée par des facteurs de divers ordres, facteurs rendus
perceptibles par l'analyse systémique complétée par
l'approche stratégique. Ainsi, la faiblesse établie du COPAX
s'explique par la faiblesse et l'inadéquation des soutiens qu'il
reçoit de l'environnement et par le l'inadaptabilité qualitative
et quantitative des outputs du système, inadaptabilité
traduite aussi par une quasi-permanence de la courbe de rétroaction. En
y regardant plus clair, c'est-à-dire à l'intérieur
même du COPAX, on comprend, grâce à l'approche
stratégique, que la faiblesse du COPAX s'explique par les
différentes influences des Etats-membres auxquelles l'action du COPAX
est sujette. Tout comme les causes, les conséquences de la faiblesse du
COPAX sont assez déplorables et consistent en une persistance de
l'insécurité dans la sous-région et en une influence
presque imperceptible sur le processus d'intégration
sous-régionale. Mais, cette faiblesse ne nous semble-t-elle pas
être la faiblesse d'un temps ? Devrait-on pour autant occulter les
dispositions potentielles du COPAX, qui du reste, sont considérable dans
la gestion des crises sécuritaires dans la sous-région ?
Doit-on pour autant oublier tout rêve de construction et de
rentabilisation de l'identité sécuritaire de la CEEAC ?
N'existe-il pas des voies et moyens d'une rentabilisation par la
rationalisation du COPAX ?
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