UNIVERSITE DE YAOUNDE II -
SOA
THE UNIVERSITY OF
YAOUNDE II - SOA
FACULTÉ DES SCIENCES JURIDIQUES ET
POLITIQUES
|
|
FACULTY OF LAW
AND POLITICAL SCIENCE
|
![](La-prevention-des-conflits-dans-la-dynamique-de-lintegration-sous-regionale-en-Afrique-central1.png)
ECOLE DOCTORALE DISCIPLINAIRE DE SCIENCE POLITIQUE,
RELATIONS INTERNATIONALES ET COMMUNICATIONS
UNITE DE FORMATION DEA
|
|
DISCIPLINARY POSTGRADUATE SCHOOL OF POLITICAL SCIENCE,
INTERNATIONAL RELATIONS AND COMMUNICATIONS
DEA TRAINING UNIT
|
LA PREVENTION DES CONFLITS
DANS LA DYNAMIQUE DE L'INTEGRATION SOUS-REGIONALE EN
AFRIQUE CENTRALE
Mémoire
présenté et soutenu en vue de l'obtention du DEA/Master II en
Science Politique
A dissertation submitted in fulfilment of the class
requirements for the award of DEA/Master II in political science
Par:
By:
Abel Hubert MBACK
WARA
Sous la direction de :
Supervised by:
Fabien NKOT
Ph.D.
Chargé de cours
Année Académique 2006 - 2007
« La promotion de la paix et d'un
développement équitable exige non seulement des institutions
efficaces mais aussi une plus grande compréhension et un plus grand
respect des différences à l'intérieur et à
l'extérieur des frontières. »
Commission Carnegie sur la Prévention des
Conflits Meurtriers (1997) La prévention
des conflits meurtriers : Résumé du rapport final,
Carnegie Corporation, New York, x.
DEDICACE
A mes enfants
Rick Stève Moïse Messomo Mback et
Raphaël Marie Casimir Nkeng Mback.
Puisse cette oeuvre susciter et entretenir en eux
l'amour de la science et la passion des lettres
REMERCIEMENTS
En prélude à notre ouvrage nous souhaitons
rendre un hommage à toutes les personnes qui d'une façon ou d'une
autre ont contribué à la réalisation de cet oeuvre
exaltante.
Tout d'abord, nous voulons exprimer notre profonde gratitude
à monsieur Fabien Nkot, dont la perspicacité, la
profondeur d'esprit et la finesse de l'analyse ont savamment
éludés nos hésitations et fermement guidés nos
pas.
A Michel Kounou Ph.D dont la
disponibilité et la pertinence des remarques ont efficacement concouru
à conforter la qualité de notre analyse.
A tous les autres Enseignants du
Département de Science Politique, pour leur bienveillant encadrement et
leur disponibilité.
A notre mère Akong Mback Agathe Epouse
Wara, notre véritable refuge, pour tous les sacrifices qu'elle
a consenti et pour l'affection qu'elle a sans cesse renouvelé à
notre égard.
A notre père, Wara Sanga Gabriel, dont
les paroles encourageantes nous ont donné la force et la volonté
suffisante pour aller plus loin et toujours faire mieux.
Plus que je ne puis le dire, ma reconnaissance va à
monsieur Abega Théophile, le Maire de la Commune
d'Arrondissement de Yaoundé IV, dont la riche expérience
politique et l'ouverture d'esprit tout autant que le soutien psychologique et
matériel ont été d'un grand apport dans la conclusion
heureuse de notre travail.
Et a tous ces amis, camarades et bienfaiteurs que je ne puis
citer de façon exhaustive, afin qu'ils trouvent ici le
témoignage de mon estime et de ma profonde gratitude
LISTE DES ANNEXES
Cartographie des indices de paix dans le
monde ......................................................113
Table de Répartition de l'implication dans les OMP en
Afrique entre 1990-2004................114
Cartographie des sous-régions
africaines...............................................................115
Cartographie de la
CEEAC...........................................................................
...116
Cartographie des conflits en
Afrique....................................................................
117
LISTE DES ACRONYMES
ADF :
Allied
Democratic Forces
AFDL :
Alliance
des Forces Démocratiques pour la Libération du
Congo
ALiR : Armée de Libération du Rwanda
ALPC : Armes Légères et de
Petit Calibre
ANC: Armée Nationale Congolaise
APC : Armée du Peuple Congolais.
APRD : Armée populaire pour la restauration
de la démocratie
CCE : Conférence des Chefs
d'Etats
CCI : Contribution Communautaire
d'Intégration
CDS : Commission de Défense et de
Sécurité
CEEAC : Communauté Economique des Etats de
l'Afrique Centrale
CEMAC : Communauté Economique et
Monétaire d'Afrique Centrale
CEPGL : Communauté Economique des Pays
des Grands Lacs
CM : Conseil des Ministres
CNDD-FDD:
Conseil
National pour la Défense de la Démocratie-Forces pour la
Défense de la Démocratie
CNR : Conseil National de la
Résistance
COPAX : Conseil de Paix et de sécurité
de l'Afrique centrale
FAB: Forces Armées Burundaises
FAC :
Forces
Armées Congolaises
FDLR :
Forces
Démocratiques de Libération du Rwanda
FDLR :
Forces
démocratiques de libération du Rwanda
FDPC : Front démocratique du peuple
centrafricain
FDR :
Forces
de Défense du Rwanda armée nationale
rwandaise,
FLC: Front de Libération du Congo
FLN ou FROLINA : Front de Libération
Nationale
FOMAC : Force Multinationale de l'Afrique
Centrale
FPR:
Front
Patriotique Rwandais
FUC : Front Uni pour le Changement
LRA :
Lord's
Resistance Army
MARAC : Mécanisme d'Alerte Rapide en Afrique
Centrale
MLCJ : Mouvement des Libérateurs
Centrafricains pour la Justice
MPLA : Movimento Popular de Liberação
de Angola
MPS : Mouvement Patriotique du Salut
RCA : République Centrafricaine
RCD : Rassemblement Congolais pour la
Démocratie
RCD:
Rassemblement
Congolais pour la Démocratie
RDC : République Démocratique du
Congo
RDR : Rassemblement Démocratique pour le
Rwanda
RECAMP : Renforcement des capacités
africaines de maintien de la paix
RFC : Rassemblement des Forces pour le Changement
SIPRI : Stockholm International Peace Research
Institute
UDEAC : Union Douanière et Economique
des Etats de l'Afrique Centrale
UFD : Union des Forces pour la Démocratie et
le développement
UFDR : Union des Forces Démocratiques pour
le Rassemblement
UNITA : União Nacional para a Independencia
Total de Angola
UNITA : União Nacional para a Independencia
Total de Angola
UNRF:
Uganda
National Rescue Front II
UPC :
Union
des patriotes congolais
UPDF :
Uganda
Peoples Defense Force, armée nationale de l'Ouganda
ZLE : Zone de libre Echange
TABLE DES
MATIERES
DEDICACE
III
REMERCIEMENTS
IV
LISTE DES ANNEXES
V
TABLE DES MATIERES
IX
INTRODUCTION GENERALE
1
DE LA PROBLEMATIQUE
2
DES HYPOTHESES
5
DE LA METHODE : L'ANALYSE
SYSTEMIQUE
5
§ Les
inputs
6
§ Le traitement
dans la boite Noire
6
§ Les
outputs
7
§ Le feedback ou
courbe de rétroaction
7
DES CHAMPS D'OBSERVATION ET DES NIVEAUX
D'EXPLICATION
10
o Champ
d'observation
10
o Niveaux
d'explication
11
DES INTERETS ET LIMITES
11
o
Intérêts
11
o
Limites
12
CHAPITRE I : ETAT DE LA THEORIE ET DES
CONCEPTS
15
SECTION A : ECONOMIE DES THEORIES EN
PRESENCE
16
Paragraphe 1 : La prévention des
conflits en Afrique centrale
16
Paragraphe 2 : L'intégration
20
SECTION B : ANALYSE CRITIQUE DES
THEORIES EN PRESENCE
24
Paragraphe 1 : La prévention des
Conflits
24
Paragraphe 2 : L'intégration
26
SECTION C : BALISAGE CONCEPTUEL
28
Paragraphe 1 : Le conflit
28
Paragraphe 2 : La prévention des
conflits
30
Paragraphe 3 : L'intégration
34
Paragraphe 4 : De la Sécurité
vers l'intégration politique
36
CHAPITRE II : PRESENTATION DE L'AFRIQUE
CENTRALE CEEAC, CADRE D'ACTION DU SYSTEME DE PREVENTION DES CONFLITS
38
SECTION A : PRESENTATION DE L'AFRIQUE
CENTRALE : CADRE D'INTEGRATION ET DE PREVENTION DES CONFLITS.
39
Paragraphe 1 : La CEEAC, cadre
d'intégration de l'Afrique centrale
41
Paragraphe 2 : Le COPAX, instrument de la
prévention des conflits en Afrique centrale.
43
SECTION B : PRESENTATION SOMMAIRE DES
CONFLITS EN AFRIQUE CENTRALE
45
Paragraphe 1 : Le conflit Démo-Congolais
à partir de 1998 (De la 2ème Guerre de RDC à la
guerre du Kivu)
46
Paragraphe 2 : Le conflit Burundais
53
Paragraphe 3 : Le conflit Angolais
55
Paragraphe 4 : La crise centrafricaine de 1996
à 2003
56
Paragraphe 5 : La rébellion
centrafricaine de 2003 à 2008
58
Paragraphe 6 : Le conflit du Pool au Congo
60
Paragraphe 7 : La rébellion
Tchadienne
61
Paragraphe 8 : La crise Santoméenne de
Juillet 2003
62
SECTION C : ANALYSE DE LA STRUCTURE
DES CONFLITS EN AFRIQUE CENTRALE
63
Paragraphe 1 : Les considérations
endogènes des conflits en Afrique centrale
64
Paragraphe 2 : Les facteurs exogènes des
conflits en Afrique centrale
69
SECTION D : APERCU DES ACTIONS ET
INTERVENTIONS DU COPAX
72
Paragraphe 1 : Au plan institutionnel : La
mise en place des institutions.
72
Paragraphe 2 : Au plan
opérationnel : Les actions menées
74
CHAPITRE III : ENDOSCOPIE DU RENDEMENT
INSUFFISANT DE L'INSTRUMENT DE PREVENTION DES CONFLITS
77
SECTION A : EVALUATION DE L'EFFICACITE
DU COPAX : UN RENDEMENT ENCORE INSUFFISANT
78
Paragraphe 1 : Evaluation au plan
quantitatif
78
Paragraphe 2 : Evaluation au plan
qualitatif
79
SECTION B : LES RAISONS DE LA FAIBLESSE
DU SYSTEME : ENTRE CAPACITES POTENTIELLES ET ABSENTEISME OPERATIONNEL
81
Paragraphe 1 : Les raisons fournies par
l'approche systémique
81
Paragraphe 2 : Les raisons fournies par
l'approche stratégique
89
SECTION C : LES CONSEQUENCES DANS LA
SOUS-REGION
93
Paragraphe 1 : La persistance de
l'insécurité dans la sous-région: Conséquence
immédiate de la faiblesse du COPAX
93
Paragraphe 2 : L'évanescence de
l'identité sous-régionale: Conséquence indirecte de la
faiblesse du COPAX
95
CHAPITRE IV :
PERSPECTIVES DE LA RATIONALISATION DU SYSTEME DE PREVENTION DES CONFLITS :
POUR UN MEILEUR APPORT SUR LE PROCESSUS D'INTEGRATION
98
SECTION A : LA RATIONALISATION :
POUR UN RENFORCEMENT DES CAPACITES DU COPAX
99
Paragraphe 1 : La rationalisation au plan
structurel
100
Paragraphe 2 : Au plan
géopolitique : l'avènement d'une puissance motrice
103
SECTION B : ANALYSE PROSPECTIVE :
LES GAINS ATTENDUS DE LA RATIONALISATION DU COPAX SUR LE PROCESSUS
D'INTEGRATION
106
Paragraphe 1 : Au plan
sécuritaire : La pacification de toute la sous-région
107
Paragraphe 2 : Au plan économique et
fonctionnel : une meilleure gestion des ressources de la
sous-région
108
Paragraphe 3 : Au plan culturel : la
consolidation de la paix
109
CONCLUSION
111
REFERENCES
117
I/ OUVRAGES
117
II/ ARTICLES
118
III/ RAPPORTS ET AUTRES DOCUMENTS
CONSULTÉS
120
IV/ SITES ET MOTEURS DE RECHERCHE
CONSULTÉS
121
ANNEXES
122
INTRODUCTION GENERALE
![]()
DE LA
PROBLEMATIQUE
La fin de la guerre froide et la chute du mur de Berlin ont
marqué des mutations dans l'univers des relations internationales. Pour
l'Afrique, ces mutations se sont résumées à la perte par
le continent de son importance géopolitique pour les grandes puissances.
En effet, la fin de la bipolarité a sonné le glas de l'aide et de
l'assistance apportées par chacune des puissances idéologiques au
Etats Africains afin de leur permettre de résister à la
poussée du camp idéologique adverse. Or, les puissances
occidentales qui ont cessé de s'affronter en Afrique par africains
interposés, n'ont pas jugé utile, du fait que cette Afrique ne
leur était plus d'aucun intérêt, d'apporter leur
contribution à la résolution des conflits en Afrique. Il en a
donc résulté une réduction considérable des
implications des puissances occidentales dans la résolution des
problèmes de l'Afrique, précisément dans la période
allant de 1992 à 1998. Un des terrains particulièrement
abandonné ainsi que nous le démontre l'annexe N° 2, a
été celui des missions de maintien de la paix et de
sécurité en Afrique. Deux facteurs majeurs ont conforté
l'occident dans cette position. Premièrement le génocide Rwandais
de 1994 dont la survenue est tributaire de la détermination des
génocidaires d'en découdre avec leurs concitoyens. Ensuite,
l'échec de l'intervention américaine en Somalie en 1996,
résultat d'une méconnaissance coupable des moyens et de la
détermination de la rébellion de Farah Aïdid, mais surtout
de l'application d'une stratégie alignée sur des
considérants étrangers à la réalité de la
zone en crise. Après ces échecs, les puissances occidentales ont
conclu de la nécessité de promouvoir une politique locale de
prévention et de gestion des conflits qui tienne compte des
réalités socio-économiques et mêmes culturelles du
continent et ont envisagé une africanisation des Offices de
Maintien de la Paix (OMP) en afrique. Les puissances occidentales ont donc
prétexté que la meilleure des façons de garantir le
succès des OMP en Afrique est de les confier aux propres africains, ce
qui revenait tout simplement à dire que les Africains devaient eux
même trouver les solutions à leurs problèmes.
A partir de ce moment, l'essentiel des interventions de
l'occident s'est réduit à un appui aux initiatives locales de
prévention et de gestion des conflits. C'est ainsi que l'OUA puis l'UA a
hérité de la responsabilité de la prévention et de
la gestion des conflits sur le continent. En Afrique centrale, c'est la CEEAC
qui, sous les auspices du Comité Consultatif Permanent des Nations Unies
pour les Questions de sécurité en Afrique Centrale et dans le
cadre du Conseil de Paix et de Sécurité en Afrique Centrale
(COPAX) est, à partir du 24 Février 2000, responsable de la
prévention et de la gestion des conflits.
Originellement confinées à la mission
d'intégration économique, les organisations
sous-régionales ont progressivement pris en compte le lien étroit
existant entre la paix et le développement et se sont en
conséquent investies dans les domaines de prévention des conflits
et du maintien de la paix (Mutoy Mubiala, 2003 :04). L'Afrique
centrale n'est pas restée étrangère à cet
ajustement. Il faut dire que cette adaptation, en même temps qu'elle
résulte d'un souci de décentralisation des capacités en
matière de prévention des conflits, fait suite au constat, au
sein de la CEEAC, de la prépondérance de l'apport d'un climat de
paix dans le processus d'intégration sous-régionale. En effet,
l'objectif originel de la CEEAC est de promouvoir une intégration
politique et économique visant à terme l'établissement
d'une union douanière et de politiques sectorielles communes. Seulement,
il est très vite apparu aux yeux des dirigeants de la CEEAC, ainsi que
précisé dans les alinéas (h) et (o) du Préambule du
Protocole relatif au COPAX, qu'une intégration véritable n'est
pas possible tant que prévaut un climat d'insécurité et
de crise et, que l'établissement de mécanismes visant à
garantir et à préserver un climat de paix dans la
sous-région inciterait et soutiendrait l'intégration
sous-régionale. Ropivia (1998: 178) pense même que les
problèmes d'instabilité et d'insécurité en Afrique
centrale semblent si importants qu'ils convient de se demander s'ils ne
constituent pas aujourd'hui l'une des plus graves entraves à
l'intégration de la sous-région.
Il faut dire, parlant d'intégration, que le bilan dans
cette sous-région reste très mitigé : la
Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale (CEMAC)
n'est pas compétente pour traiter des problématiques de toute la
sous-région Afrique centrale. La Communauté Economique des Pays
des Grands Lacs (CEPGL) qui, dès sa création portait dans sa
structure la marque d'un déséquilibre géopolitique au
profit du géant zaïrois ne lui a pas survécu. . La CEEAC qui
regroupe les deux sous-ensembles que dessus et est l'instance
d'intégration de l'Afrique centrale, est restée inactive pendant
une trop longue période1(*), et ne donne pas de grande preuves de son activisme.
Un autre problème qui se manifeste et qui affecte
considérablement la construction identitaire de l'Afrique centrale est
celui de savoir quelles sont ses frontières réelles si tant est
qu'il est aujourd'hui difficile de délimiter objectivement cette
sous-région. Originellement matérialisée par la CEEAC, il
apparaît aujourd'hui que, à la faveur de l'inactivité
mentionnée plus haut, plusieurs de ses entités (Etats) font
scission au profit d'autres sous-régions. Tel est le cas de Sao Tome et
Principe aspiré par le Nigeria vers l'Afrique de l'ouest, du Rwanda et
du Burundi assimilés à des pays de la sous région
orientale, et de la République Démocratique du Congo
attirée par l'Afrique du Sud vers la SADEC. Même les Organisations
Internationales telles l'Organisation des Nations Unies, l'Union
Européenne et l'Union Africaine, perçoivent les limites de cette
sous région suivant une cartographie qui ne fait pas l'unanimité.
(Ntuda Ebode, 2004 : 38-45).
Au plan sécuritaire, la situation n'est pas plus
reluisante car, l'Afrique centrale est traversée par une conflictologie
largement au dessus de la moyenne. Entre 1974 et 2002 l'Afrique a connu 29
crises majeures et l'Afrique centrale vient en tête avec 9 crises contre
8 en Afrique de l'Ouest, 7 en Afrique orientale, 4 en Afrique du Nord et 1en
Afrique australe2(*). Dans
la même veine, les pays de la sous-région restent classés
jusqu'en 2008 parmi ceux ayant les indices de paix les moins
élevés d'Afrique et même du monde3(*).
De plus, bien que la nécessité et le souci de
construction d'une paix durable fassent l'unanimité entre les pays
d'Afrique centrale, plusieurs controverses restent perceptibles quant à
ce qui est des voies, des moyens et des mécanismes à mettre en
oeuvre pour y parvenir. L'on peut ainsi constater, d'une part, la
multiplicité et la récurrence des conflits et des situations
conflictogènes et belligènes et qui divisent d'avantage les pays
de la sous-région et, d'autre part, une diversité de projets
(FOMUC, FOMAC) pilotés par des initiatives différentes et
concurrentes (CEMAC, CEEAC), poursuivant certes le même objectif mais
évoluant dans des logiques différentes et parfois
contradictoires.
Au bout de cette observation panoramique, nous arrivons sur un
cliché assez désolant. L'Afrique centrale souffre de
l'évanescence de son identité ; elle est traversée
par une conflictologie pathologique; la problématique de la
prévention des conflits est abordée de façon
dispersée et le système investi de la gestion de cette
problématique ne donne pas de signe de son aptitude à
gérer la question.
Or, face à un tel tableau, la question pertinente est
celle de savoir si le système intégré de prévention
et de gestion des conflits en Afrique centrale peut influencer le processus
d'intégration de cette sous région. En effet, sachant que la
notion d'intégration s'entend non pas en termes d'état mais
plutôt dans une optique processuelle, peut-on penser que la
présence et les actions du système de prévention des
conflits de l'Afrique Afrique centrale ont eu une incidence en termes
d'avancée sur le processus d'intégration
sous-régionale ?
DES HYPOTHESES
Comme réponses provisoires aux questions
suscitées plus haut nous nous proposons de démontrer, dans un
premier temps que le système de prévention des conflits de la
CEEAC est plus théorique que pratique et ne peut pas encore influencer
positivement le processus d'intégration.
Ensuite nous avons l'intention de démontrer que la
persistance de ces conflits est un obstacle au processus d'intégration
de la sous-région.
DE LA METHODE : L'ANALYSE SYSTEMIQUE
Le travail portant sur l'étude et l'explication de
l'impact d'un système à savoir, le système de
prévention des conflits sur son environnement qui est la CEEAC,
l'approche systémique telle qu'élaborée par David Easton
nous semble, au premier abord, assez pertinente pour parvenir à nos
fins.
Dans cette optique, nous posons la conception eastonnienne
selon laquelle « un système politique peut être
défini comme l'ensemble des interactions par lesquelles les objets de
valeurs sont répartis par voie d'autorité dans une
société » (Easton, 1974:23). Dans le cadre de
cette approche, nous partirons d'une société qui est la
sous-région Afrique centrale CEEAC au sein de laquelle évolue un
système politique qui est à l'origine des processus de
décision qui concernent l'ensemble de la société. Ce
système est matérialisé par l'ensemble des organes
institutionnels de la CEEAC et, c'est au sein de ce système politique
global que ce se trouve le COPAX, système de prévention des
conflits objet de notre analyse. Le système de prévention des
conflits est structuré par une communauté c'est-à-dire
l'ensemble des instances constitutives du COPAX et intervenant dans la
prévention des conflits. Cette communauté fonde ses comportements
sur des valeurs qui, ici, sont les résolutions, protocoles et
déclarations censées orienter les décisions et les
actions en matière de prévention des conflits en Afrique
centrale. A la tête de la communauté se trouve la
Conférence des Chefs d'Etats, autorité collégiale
détentrice du pouvoir décisionnel. L'environnement
extérieur du système est composé, pour sa part, par les
organismes de la société civile, les organisations
internationales et non gouvernementales, les partis politiques et les peuples
intéressés par la situation sécuritaire de l'Afrique
centrale.
Comme les autres systèmes présents dans son
entourage, le système de prévention des conflits communique avec
son environnement au moyen d'inputs et d'outputs.
§ Les inputs
Les inputs sont constitués par toutes les
données qui entrent dans le système. Ces données peuvent
provenir de l'environnement ou alors, être des With-input
c'est-à-dire être issues de l'initiative du système
lui-même. David Easton a réparti les inputs en deux
grandes catégories à savoir les demandes et les soutiens.
Les soutiens consistent en tout ce qui contribue à
conférer des capacités de décision et d'action au
système. Il s'agit concrètement des ressources humaines et
matérielles nécessaires au déploiement du système
de prévention et de gestion des conflits mises à sa disposition
par les Etats, les organisations Internationales, les organisations de la
société civile et tous les acteurs qui constituent
l'environnement extérieur du système.
Les demandes quant à elles consistent en l'ensemble
des attentes, des sollicitations et des besoins en matière de
sécurité exprimés par les interlocuteurs du système
de prévention des conflits. Elles peuvent aussi être, pour les
with-input, le fait du système lui-même qui inscrirait
dans son agenda politique des problèmes non soulevés par ses
interlocuteurs mais qu'il identifie comme suffisamment importants. Pour
l'essentiel, les demandes consistent en des informations sur la nature et
l'intensité de toute situation menaçant la sécurité
de la sous-région et pouvant aboutir à un conflit. Le
gate-keeper chargé de filtrer les demandes c'est le
Mécanisme d'Alerte Rapide en Afrique Centrale (MARAC) car c'est cette
instance qui est chargée de collecter, d'analyser, transmettre et de
classer les informations sur la situation sécuritaire de la sous
région4(*).
§ Le traitement dans la boite Noire
Une fois collectées par le MARAC, les informations sur
la situation sécuritaire sont mises en forme, classées et
transmises à la Commission de Défense et de
Sécurité (CDS). Le rôle de la CDS est de se baser sur les
informations transmises par le MARAC pour planifier, organiser et donner des
conseils aux entités prenant des décisions dans la
communauté, en l'occurrence le Conseil des Ministres pour
présentation à l'approbation de la Conférence des Chefs
d'Etats. Il convient cependant de préciser que lorsque les circonstances
l'exigent la CDS, peut transmettre directement ses rapports à la
Conférence des Chefs d'Etats. Les décisions et les actions
menées sur la base des propositions du CDS constituent les
outputs.
§ Les outputs
Considérant, à la suite d'Easton que les
outputs sont constitués par les décisions
effectivement prises et les actions par lesquelles elles sont menées,
nous rangerons sous cette rubrique tous les Actes, Résolutions,
Conventions et Décisions pris par la CCE. Les outputs du
système revêtent deux principales formes. Premièrement, ils
peuvent consister en des mesures de diplomatie préventive visant
à inhiber, auprès des acteurs de premier plan, les causes de
conflits dans la sous région et à restaurer un cadre propice
à la paix.
Selon les textes statutaires du COPAX, La CCE peut confier
une telle mission au Conseil des Ministres ou alors à un comité
Ad hoc créé et mis en place par ses soins mais, actuellement, ce
volet est géré par la Direction des Actions Politiques et
Diplomatiques (DAPD) du COPAX5(*).
Deuxièmement, les décisions de la CCE peuvent
viser la prévention par les faits et dans ce cas de figures elles
portent, soit sur un déploiement de la FOMAC, soit sur des actions
visant à annihiler les causes structurelles de conflits.
§ Le feedback ou courbe de rétroaction
Les décisions et les actions émanant du
système se répercutent sur l'environnement qu'elles modifient et
dont elles suscitent soit le soutien en terme d'approbation, soit
l'insatisfaction manifestée par de nouvelles demandes. La boucle ainsi
formée constitue le feedback ou courbe de rétroaction.
Ces outputs affectent et influencent l'environnement dans lequel le
système de prévention baigne et particulièrement les
autres systèmes qui en font partie. Ainsi, les actions efficaces de
prévention et de gestion des conflits, parce qu'elles promeuvent la
paix, suscitent un cadre propice au développement économique et
culturel et, à terme favorisent une plus grande intégration de la
sous-région.
De la même façon le système de
prévention des conflits est affecté par les systèmes
économiques et culturels en ce sens que ses interventions sont fonction
de la puissance économique et culturelle établies par ceux-la.
La pertinence et l'efficacité du système de
prévention des conflits, dans le cadre de notre analyse, seront
déduites de la qualité et de la quantité des
inputs, des outputs et de la fréquence de la courbe de
rétroaction c'est-à-dire de l'équilibre entre les
inputs et les outputs du système. En clair, des
soutiens insuffisants en qualité et en quantité conduiraient
évidement à un fonctionnement inadéquat du COPAX. De
même, un grand nombre de demandes opposées à un nombre
réduit de réponses du système signifierait un mauvais
fonctionnement de celui-ci dû à son incapacité à
traiter les demandes ou à leur apporter des réponses opportunes
ou, pour le moins, satisfaisantes. Dans le même ordre d'idées, un
trop-plein d'inputs en termes de soutien devrait résulter en
une augmentation de la quantité et de la qualité des
interventions du système, le contraire signifiant encore
l'inadéquation du système par rapport à son environnement.
En somme, l'application de l'analyse systémique à l'étude
de l'impact du COPAX sur le processus d'intégration nous donne
d'envisager ce dernier selon le schéma ci-après. .
LA PREVENTION DES CONFLITS EN AFRIQUE CENTRALE
SUIVANT UNE APPROCHE SYSTEMIQUE
COPAX
INPUTS
SOUTIENS
FOMAC
COMITE
AD HOC/
DAPD
MARAC
CDS
CONFERENCE DES PRESIDENTS
CONSEIL DES MINISTRES
ORGANISATIONS INTERNATIONALES
ORGANISMES DE LA SOCIETE CIVILE,
ORGANISATIONS NON GOUVERNEMENTALES
PARTIS POLITIQUES
PEUPLES
ENVIRONNEMENT
OUTPUTS
DEMANDES
![]()
DES CHAMPS D'OBSERVATION ET DES NIVEAUX
D'EXPLICATION
o
Champ d'observation
La science politique est cette discipline particulière
qui traite des phénomènes de pouvoir au sein des entités
organisées. Elle résulte de la spécialisation de
disciplines anciennes telles la philosophie et l'histoire, et de disciplines
plus récentes telle la sociologie et l'anthropologie. La science
politique est une science composite qui regroupe en son sein plusieurs branches
telle la sociologie politique, la politique comparée, l'anthropologie
politique, les relations internationales , l'économie politique, la
théorie politique, la sciences administrative et, dans une certaine
mesure, le droit constitutionnel.
Dans l'optique de garantir la pertinence de notre tentative
d'analyse, et de participer plus efficacement au débat scientifique, il
nous a semblé de bonne facture de nous éloigner de toute
explication globale en précisant, dans cette section, le champs
précis du domaine politique dans le lequel se déploiera notre
analyse.
De prime abord et, considérant le fait que notre
questionnement porte sur la nature et le fonctionnement d'une instance
constituée par des Etats, instance qui elle-même est devenue
acteur des relations internationales, nous situerons notre travail dans le
champ de la théorie des relations internationales. Ici encore les
spécialisations restent pléthore et une précision
s'avère nécessaire, qui nous permet d'indiquer que nos
investigations intéresseront beaucoup plus le secteur de l'analyse des
conflits, précisément celui de lrénologie6(*), entendue comme la
réflexion sur la prévention des conflits et la paix. Nous
opèrerons certes quelques incursions dans les autres domaines voisins
que sont la géopolitique, les politiques publiques, l'économie
politique et la sociologie des organisations mais ce sera, dans la logique de
la pluridisciplinarité caractéristique de la science politique,
dans le but de conforter nos affirmation par des conclusion issues des branches
soeurs.
o
Niveaux d'explication
La capacité du système de prévention des
conflits étant déduite de son aptitude à réagir
activement dans le processus de prévention des conflits, les principales
étapes de ce processus constitueront les niveaux d'explication de notre
étude. Ainsi, nous aurons deux principaux niveaux d'explication, l'un
qui porte sur la phase préparatoire de la réponse du
système et l'autre qui porte sur la phase exécutoire, à
savoir le déploiement effectif sur le terrain.
La préférence pour la modalité de
l'Alerte rapide au lieu de la réponse rapide privilégiée
par d'autres sous-régions d'Afrique résulte du fait que c'est
cette modalité qui a été choisie par la CEEAC dans le
cadre de la mise en oeuvre de son système de prévention des
conflits. Nous-nous attarderons donc sur les trois principaux niveaux de
l'alerte rapide que sont : la collecte d'information, l'analyse des
données collectées et les options de réponses
proposées aux décideurs.
La deuxième étape de la prévention des
conflits, à savoir le déploiement des instances du COPAX, que ce
soit dans l'optique d'une réaction immédiate ou alors dans le
long terme, constituera le second niveau d'explication de notre analyse. En
effet, tout déploiement, qu'il s'agisse de l'intervention de la FOMAC ou
d'une action de diplomatie préventive de la DAPD est un
élément structurant du niveau de sensibilité et du
dynamisme du système de prévention des conflits et se prête
donc aisément à l'explication dans le cadre de nos études.
DES INTERETS ET LIMITES
o
Intérêts
Notre étude présente plusieurs
intérêts dont nous ne citerons ici que les plus
significatifs :
§ Intérêt heuristique
Démontrer l'intérêt heuristique de notre
étude revient à mettre en exergue le capital scientifique et
intellectuel dont elle est porteuse, tant en ce qui est des méthodes
d'analyse mises à contribution, qu'en ce qui est du substrat
scientifique résultat de cette recherche.
Le substrat résultat de notre entreprise intellectuelle
est intéressant en ceci qu'il est le fruit d'une analyse scientifique
du potentiel réel d'intégration de l'Afrique centrale dans le
domaine particulier qui est celui de la prévention des conflits. Nos
travaux s'éloignent ainsi de tout enthousiasme patriotique ou
panafricaniste qui en biaiserait les résultats pour s'aligner dans la
pure tradition des sciences sociales faite d'une quête sans complaisance
de la vérité scientifique. Traitant, à la suite de
Durkheim, les fait sociaux comme des choses, notre étude vise à
mettre en exergue la réalité scientifique de ce qui est fait, de
ce qui n'a pas été fait et de ce qui est à faire pour que
l'Afrique centrale puisse, en se basant sur son système de
prévention des conflits, être un véritable pôle
d'intégration. En fait, nous-nous proposons, dans une perspective
casuistique encrée sur le contexte particulier de l'Afrique centrale, de
contribuer par nos travaux à la construction d'une théorie
opératoire de la prévention des conflits.
§ Intérêt
stratégique
L'intérêt stratégique est déduit de
la possibilité offerte par ces travaux de fournir une meilleure
visibilité du potentiel de la sous région en matière de
prévention et de gestion des conflits, notamment en identifiant et en
mettant en exergue les entraves et les dysfonctionnements du système de
prévention des conflits afin d'en susciter une meilleure viabilisation.
o
Limites
Par souci de précision, il est de bon ton de
présenter le cadre spatio-temporel de notre analyse.
§ Limites spatiales : Afrique centrale CEEAC
Le référent « Afrique
centrale » véhicule une ambiguïté certaine
due au fait que, dans cette sous-région, l'on retrouve deux instances
différentes qui prétendent représenter l'identité
sous-régionale. Il s'agit en l'occurrence, de la Communauté
Economique et Monétaire d'Afrique Centrale (CEMAC) et de la
Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale (CEEAC).
Au-delà de la synonymie dans les appellations, on note
une confusion des missions que s'assignent ces structures. Ainsi, la mission
essentielle de la CEMAC est de promouvoir un développement harmonieux
des Etats membres dans le cadre d'une Union Economique et d'une Union
Monétaire7(*), tandis
que la CEEAC a pour objectif ultime d'établir un marché commun
aux Etats de l'Afrique centrale8(*). On voit à l'évidence que toutes les
deux, ces organisations recherchent le développement économique
de la sous-région et poursuivent des objectifs certes, différents
dans l'énonciation, mais identiques dans le fond.
Or, l'exigence de précision qui guide nos travaux nous
oblige à faire un choix, et à concentrer nos efforts sur une des
structures, non sans avoir énoncé les raisons ayant motivé
notre préférence. Aussi, pour des raisons qui résultent de
l'analyse de la politogenèse, de l'étude de la structuration
institutionnelle et, en considérant la compétence rationae
loci de ces organisations, notre préference est
allée à la CEEAC.
La candidature de la CEMAC semble, dès sa
genèse, viciée par une extraversion préjudiciable au
processus de construction d'une identité locale. En effet, c'est en
conservant les liens qui les unissaient sous l'Administration coloniale, que la
Centrafrique, le Congo, le Gabon et le Tchad, ont crée en juin 1959,
l'Union Douanière Equatoriale (UDE) à laquelle adhérera en
1961 l'Etat du Cameroun. Le 8 décembre 1964, l'UDE devient UDEAC et, 10
ans après l'adhésion de la Guinée Equatoriale en 1983,
l'UDEAC devient CEMAC9(*).
Ropivia (1998 :177) analysant la philosophie qui à sous tendu ce
processus d'intégration, établit que le projet
d'intégration dans cette sous-région « est la
manifestation du paternalisme institutionnel qui repose sur une idée
fondamentale, celle du lien indissoluble entre l'Europe dominante et l'Afrique
dominée, ôtant à cette dernière toute
capacité d'autonomie en matière de stratégie
d'intégration ». L'idée de mettre sur pied une
institution devant porter le processus de construction identitaire de
l'Afrique centrale CEMAC ne résulterait donc pas de la volonté
des habitants de cette sous-région mais serait un moyen, pour la
métropole, de rassembler sous un même label les Etats composant
son pré carré. L'on constate en effet que tous les Etats
fondateurs de la CEMAC sont des anciennes colonies de l'Afrique Equatoriale
Française (AEF). En terme plus clair, la CEMAC ne seraient qu'une
organisation succursale dont le processus d'intégration
défendrait plus des intérêts de la métropole que
ceux des Africains eux-mêmes.
Dans un second moment, nous avons considéré le
facteur juridique qui, sous les auspices du comité Consultatif Permanent
sur les Questions de Sécurité en Afrique Centrale, confère
à la CEEAC une légitimité indiscutable en matière
de prévention et de gestion des conflits en Afrique centrale.
Ensuite, nous avons considéré le facteur de la
représentativité qui va lui aussi à la faveur de la CEEAC,
étant donné qu'elle est une instance dont la compétence
territoriale englobe non seulement la totalité des Etats de la CEMAC
mais aussi les Etats de la CEPGL à l'exception du Rwanda, et qu'au
surplus la CEEAC reste le seul regroupement de la sous-région ayant
envisagé au plan institutionnel, un système de prévention
des conflits qui puisse se déployer dans toute la sous-région.
Enfin, et pour clore ce débat, nous avons
subordonné notre choix aux conclusions du programme de rationalisation
des Communautés Economiques Régionales en Afrique mis en oeuvre
par la Commission Economique pour l'Afrique, programme qui ne reconnaît
que la CEEAC comme pilier de l'intégration économique
sous-régionale en Afrique centrale, et attribue à la CEMAC le
statut de sous-organe d'intégration10(*). Dans notre approche donc, nous envisagerons la CEEAC
comme étant le résultat d'un fédéralisme par
agrégation ayant rassemblé sous une même identité
les pays de la CEMAC et ceux de la CEPGL.
§ Limites temporelles
Dans le temps nous étalerons nos prospections à
partir du 24 Février 2000, date de la signature du protocole relatif au
COPAX. En effet, cette date est importante en ceci qu'elle marque la naissance,
au sein de la sous-région, du système objet de notre
étude.
La limite à posteriori de notre étude se situera
quant à elle au 31 Décembre 2008. Le choix de cette
deuxième limite est justifié par des exigences d'ordre
pragmatique. En effet, bien que mû par le souci de produire une analyse
scientifique qui ait, autant que possible, prise sur l'actualité et qui
prête à des projections dans l'avenir, il nous a semblé
raisonnable de nous arrêter à une analyse de fait vécus et
constatés en deçà de l'année de clôture de
nos recherches.
La présente étude s'appuie sur quatre grandes
articulations qui en constituent l'armature. Tout d'abord nous passerons en
revue les concepts et théories fondamentaux qui orienteront notre
démarche. Dans un deuxième moment, nous procèderons
à une prospection du terrain afin d'identifier, de répertorier et
de confronter les éléments objets de notre analyse. Dans une
troisième étape, nous procéderons à une analyse
explicative des configurations et des situations constatées
précédemment et, dans un dernier moment, nous allons nous appuyer
sur les résultats de notre analyse explicative pour faire une tentative
d'anticipations sur les adaptations à opérer dans l'optique du
renforcement de la capacité de l'Afrique centrale en matière de
prévention des conflits et d'intégration.
CHAPITRE I : ETAT DE LA THEORIE ET DES
CONCEPTS
![]()
« La tache primordiale
de la science c'est-à-dire sa tache permanente, est de trouver les
concepts convenables pour mener l'analyse ».
Easton David (1974), Analyse du
système politique, Armand Colin, Paris, p. 13
Le but de ce chapitre est de fixer les fondements
théoriques sur la base desquels procèdera notre étude.
Dans cette optique nous procéderons par une trilogie comprenant, dans un
premier temps la présentation des différentes théories en
présence, ensuite nous procéderons à une analyse critique
de ces théories, pour dans un troisième temps, ne retenir que les
substrats théoriques ayant survécu à l'analyse critique et
qui de ce fait orientera notre étude.
SECTION A : ECONOMIE DES
THEORIES EN PRESENCE
Etant donné que les concepts d'intégration et de
prévention des conflits à eux seuls semblent suffisamment
complexes et de sens assez éclatés, nous appuierons nos
recherches sur une étude distincte de ces deux champs théoriques.
Cette étude constituera le point de départ de notre état
de la question théorique. Nous envisagerons donc
séparément les travaux portant sur la prévention des
conflits en Afrique centrale et ceux portant sur l'intégration de la
sous-région avant d'établir plus loin le lien théorique
existant entre ces deux concepts.
Paragraphe 1 : La prévention des conflits en Afrique
centrale
La littérature sur la prévention des conflits
est assez récente comparée à celle sur la théorie
du conflit. Elle est le fait, autant des hommes politiques que des hommes de
science. Les traités de Westphalie constituent une première
rationalisation de la prévention des conflits. En effet, ils
apparaissent comme le premier exemple de résolution des conflits par la
voie de la conciliation, conciliation qui à permis de mettre un terme
à la guerre de 30 ans opposant les empires européens.
Bien après cet exemple isolé, la
réflexion sur la prévention des conflits prendra une plus grande
consistance après la première guerre mondiale. En effet, le
spectacle affreux des atrocités et les nombreuses séquelles de la
guerre ont suscité chez les penseurs et les décideurs le souci de
créer des mécanismes qui empêchent la survenue, à
l'avenir, de telles horreurs. Cette littérature reste cependant
tributaire de la conception et de la culture de guerre prévalant
à l'époque à savoir, les guerres classiques opposant des
Etats par l'entremise de leurs armées identifiées comme telles.
Les actions en prévention des conflits à cette époque
revêtirent donc pour la plupart la forme de la diplomatie
préventive exercée sur les chefs d'Etats afin de les amener
à choisir un mode de résolution de leurs antagonismes qui soit
autre que la guerre. C'est dans cette logique que s'inscrit le discours sur
les 14 points du Président Wilson et, c'est aussi dans ce contexte
qu'il faut situer les nombreux succès de la SDN en matière de
prévention et de gestion des conflits (Bertrand.1997 :112)
La période allant de la fin de la deuxième
guerre mondiale à la fin de la guerre froide sera marquée certes
par quelques productions tant dans la littérature que dans la pratique
même de la prévention, mais ces productions resteront toutes
influencées par la bipolarité mondiale qui prévalait
à l'époque. De fait, les opérations menées dans les
années 50 étaient relativement simples. Relevant du Chapitre VI
de la Charte des Nations Unies, elles rentraient dans une logique du
consentement des parties au conflit, à une médiation et à
sa résolution (Tardy T.2000 :390).
La période post guerre froide pour sa part fera
intervenir une mutation sans précédant dans la polémologie
de l'époque. En effet, « l'un des aspects les plus
remarquable de l'après-guerre froide, conclut la Commission Carnegie,
est que le nombre de conflits se déroulant à l'intérieur
d'un état dépasse largement celui des conflits entre
états » (Commission Carnegie,1998 :4). Un tel
contexte mènera évidement à une révision des
conceptions en présence en ce qui est de la prévention des
conflits. Aussi, la littérature sur la prévention des conflits
mettra, à partir de cette époque, un accent particulier sur les
causes intra-étatiques et sociologiques ou encore structurelles de la
guerre telles les extrémismes culturels, politiques et religieux afin
d'y apporter une solution adéquate.
En première analyse, il semble opportun de rechercher
une compréhension suffisante de la conflictualité de l'Afrique
centrale. Michel Kounou dans son article « Les conflits armés
post-guerre froide en Afrique au sud du Sahara : Un essai de
caractérisation » in Revue Africaine d'Etudes Politiques
et Stratégiques, N°1, 2001, pp 223-245, en se penchant sur
les traits principaux faisant la particularité de la
conflictualité en Afrique subsaharienne, apporte une contribution
décisive dans cette optique. L'auteur part d'une relecture des
principales théories de la guerre pour ensuite les appliquer à la
réalité de la zone étudiée. Il constate que les
facteurs conflictogènes de cette zone sont plus à chercher sur le
terrain politique qu'ethnique. En d'autres termes, même si la composante
ethnique peut parfois être un facteur détonateur d'une crise
profonde mais latente, d'autres facteurs moins proclamés, moins
apparents et moins déterminés seraient susceptibles d'offrir un
autre éclairage à la tourmente qui s'est installée en
permanence depuis 1960, au sud du Sahara (Kounou, 2001 :237). Il pense que
la conflictualité subsaharienne est le fait non seulement de facteurs
interne à l'Afrique et aux Etats en conflit mais résulte aussi
des implications et des projections externes aux Etats africains. Ainsi il
établit que le tracé frontalier inadéquat et la
manipulation des sensibilités qui en découlent sont presque
toujours à l'origine de ces guerres, que ces guerres connaissent une
grande implication et même une participation de mercenaires guidés
par l'ambition de faire main basse sur les richesses du sous-sol, et qu'elles
portent aussi la marque de la confrontation des ambitions
hégémoniques post guerre froide des grandes puissances
occidentales. Compte tenu de cette critériologie particulière, il
pense que la prévention des conflits ne devrait pas être
abandonnée à l'OUA qui est une institution faible, mais devrait
revenir à un Etat central Africain fort et doté des moyens
suffisants pour cette fin.
Les travaux de la Commission Carnegie sur la prévention
des conflits meurtriers publiés en 1998 occupent une place de choix dans
notre sélection de la littérature sur la prévention des
conflits, en ceci qu'ils constituent un premier balisage scientifique de la
réflexion moderne sur la prévention des conflits intégrant
les types et les modalités nouveaux de guerre, telles les guerres
asymétriques, les conflits intra-étatiques, ethniques,
identitaires et les guerres religieuses. Les Commissionnaires partent du
postulat que les conflits meurtriers ne sont pas inévitables (Commission
Carnegie. 1997 : 03) et qu'il est moins coûteux de prévenir
les guerres que de supporter le coût des pertes qu'elles causent
(Idem : 46). Les membres de cette commission adoptent une approche
très générique de la prévention des conflits faite
d'observations et de propositions assez générales. Dans une
vision très idéaliste empreinte de conceptions chères
à l'approche libérale des relations internationales, les
commissionnaires traitent des différents cas de figures, des
différentes opportunités et des différents modèles
d'action mais ne le font qu'à titre de proposition.
On doit à cette Commission la conceptualisation d'une
approche de la prévention qui établit une distinction entre la
prévention immédiate entendue comme l'ensemble des mesures
applicables pour faire face à une crise immédiate, et la
prévention structurelle comprise comme l'ensemble des mesures qui
permettent d'éviter les crises ou d'empêcher qu'elles ne se
reproduisent. Ainsi, la prévention immédiate implique une
réaction rapide faite d'un ensemble de mesures politiques
économiques et militaires permettant de créer les conditions dans
lesquelles des leaders responsables seront capables de régler le
différend à l'origine de la crise. Par contre, la
prévention structurelle s'appuie sur des stratégies juridiques,
économiques et socioculturelles oeuvrant pour la consolidation de la
paix par l'instauration et la conservation d'un dialogue social inclusif et la
satisfaction des besoins essentiels des populations en matière
politique, économique, sociale et culturelle.
Il convient aussi, dans cette présentation, de
situer La prévention des conflits en Afrique
centrale : prospective pour une culture de la paix, une compilation
des Actes du colloque sur la prévention des conflits en Afrique centrale
tenu à Yaoundé et publiée sous la direction de Paul Ango
Ela chez Karthala en 2001.
Dans cet ouvrage, l'auteur part d'une présentation des
causes et des facteurs qui sont à l'origine de la conflictualité
dans la sous-région Afrique centrale. Et, en bonne place de ces causes
figurent non pas le facteur ethnique apparent, mais des considérations
politiques qui poussent les acteurs politiques locaux dans leur plan de
conquête ou de préservation du pouvoir, à jouer sur la
fibre ethnique et identitaire. Ainsi, la cause principale de la
conflictualité de l'Afrique médiane serait le monopole politique
entendu comme le refus du partage du pouvoir et de l'alternance au pouvoir.
A coté des considérations politiques, les
auteurs recensent aussi les projections géostratégiques de
certaines grandes puissances, la militarisation de la société
civile et la pauvreté.
Après les causes, les auteurs se penchent sur quelques
cas de prévention et de gestion régionales des conflits
réussies et envisagent les moyens de s'en inspirer pour adapter ces
succès au contexte de l'Afrique centrale.
Dans une ultime partie, les auteurs envisagent les
différentes pistes pouvant mener à la mise en place d'un
système effectif de prévention et de gestion des conflits en
Afrique centrale. Sont ainsi abordés comme catalyseur du dialogue
social, l'émergence d'une société civile viable, la mise
en place d'une protection sociale effective et la naissance d'une culture de
paix en Afrique centrale. Un autre axe cité est celui de l'instauration
d'un contexte de participation et de coopération entre la
communauté internationale et la sous région dans son projet de
construction d'un système de prévention des conflits efficace.
Car, si la responsabilité première du maintien de la paix et de
la sécurité en Afrique relève d'abord et avant tout des
africains, le monde - la communauté internationale- est également
responsable de cette paix et de cette sécurité, au même
titre que l'Afrique, bien qu'à une échelle différente
(Ayissi A, 2001 : 181).
Mwayila Tshiyembe dans Géopolitique de paix en
Afrique médiane, son oeuvre publiée en 2003 part du constat
que « dans la région de l'Afrique médiane autant
que dans d'autres régions de l'Afrique noire, l'ethnie est une
« notion sociologique » précoloniale dont
l'existence est réelle par opposition à l'irréalité
de l'Etat-Nation. » (Mwayila, 2003 :27). Pour l'auteur, la
cause principale de la conflictualité dans cette zone est à
rechercher dans l'inadéquation du modèle occidental de
l'Etat-nation avec la culture ethnique de l'Afrique. Ainsi, la violence en
Afrique médiane est une violence politique et non ethnique parce que
découlant de l'inadaptation du modèle d'administration et de
gestion en vigueur d'avec les réalités locales. De plus, ces
guerres n'opposent pas des leaders ethniques mais plutôt des leaders
politiques usant politiquement de l'élément ethnique pour
accéder au pouvoir ou y rester. En sommes, « la violence
politique est la variable structurelle de la conflictualité interne qui
ensanglante la région de l'Afrique médiane »
(Mwayila, 2003 :10).
Fort de ce constat, il préconise comme palliatif
à la conflictualité, la création d'un nouvel ordre
politique basé sur la perspective d'une triple fondation du nouveau
pacte républicain, du nouveau pacte démocratique et du nouveau
pacte constitutionnel.
Le nouveau pacte consiste, selon le rédacteur, à
partir de la réalité ethnique comme fait national pour parvenir
à une fédération des peuples libres dits ethnies et des
hommes libres dits citoyens, dont le double consentement constitue
désormais le mode de légitimation et de légitimité
du pouvoir. Il convient de noter ici que cette oeuvre a le mérite de
mettre l'accent sur un point essentiel de la prévention structurelle
à savoir la participation des ethnies et des citoyens à la
construction du projet de société comme exutoire des tensions et
des clivages au sein de la nation.
Paragraphe 2 :
L'intégration
Contrairement à la réflexion sur la
prévention des conflits, celle sur l'intégration a fait l'objet
d'une théorisation assez structurée. Elle laisse entrevoir quatre
grandes théories de l'intégration à savoir les
théories fonctionnaliste, néo-fonctionnaliste,
transactionnaliste, et systémique.
a ) La théorie
transactionnaliste
Karl Deutsch, l'un des pionniers de cette école, se
référant au modèle européen, définit
l'intégration comme étant un « sens de la
communauté accompagné d'institutions et de pratiques- formelles
ou non - suffisamment fort et répandu pour donner la certitude
raisonnable que l'évolution des relation entre le membres du groupes se
produira pacifiquement pendant une longue période de
temps » (Deutsch et al, 1957:5). L'approche transactionnaliste
accorde une attention particulière aux conditions nécessaires
à la naissance (take off) et au développement du
processus d'intégration en s'appuyant plus sur la pratique réelle
que sur une base formelle. Les tenants de cette école, qui est du reste
fortement influencée par la science des communications sociales
chère à Deutsch, appréhendent l'intégration comme
un processus d'intensification du réseau de communication sociales
(Bussy (de) M-E et Al, 1971 :621). Ainsi on part d'une intensification des
communications sociales qui fait naître par apprentissage (learning
process), au sein de la population transnationale, une communauté
d'expérience de préférences, ensuite on en arrive à
l'adoption de comportements et d'attitudes conçues comme
communément bénéfiques, pour aboutir à un stade
d'intégration politique matérialisé par la création
d'instituions nationales qui elles mêmes suscitent un déplacement
de l'attention et de la préférence des acteurs sociaux tels les
partis, les groupes d'intérêt et les élites, du plan
national vers le plan communautaire. En définitive,
l'intégration selon l'école transactionnaliste est un processus
qui part d'une assimilation sociale régionale à une
intégration politique résultant de la naissance d'un sentiment de
communauté et de la préférence de l'identité
communautaire au dépends des appartenances nationales. Qu'en est-il de
la théorie fonctionnaliste ?
b ) La théorie
fonctionnaliste
La théorie fonctionnaliste apparaît comme
étant l'une des premières approches à se pencher sur la
question de l'intégration. En effet, a working peace system,
l'oeuvre phare de David Mitrany sur la question parait en 1944, avant
même que le premier cas d'intégration, à savoir
l'intégration européenne, ne soit réalisé.
Dans son ouvrage, Mitrany part de l'observation d'un paradoxe
perceptible avec plus d'intensité de nos jours. Il constate que, du fait
des évolutions technologiques notamment dans les domaines du transport,
des communication et des armements, les Etats sont de moins en moins à
même d'assurer tout seuls la sécurité et le bien-être
de leurs concitoyens, d'où la perte de leur fonction fondamentale qui
est de garantir le bien-être et la sécurité de tous. Face
à ce constat, Mitrany envisage des functional arrangements
c'est à dire des cadres de coopération qui se
caractériseraient par des structures et un fondement institutionnel
assez solides et durables (Mitrany, 1966 : 149). En d'autres termes,
comme palliatif à la perte croissante de l'aptitude des Etats à
répondre aux problématiques nouvelles issues des
évolutions technologiques, les chefs d'Etats choisiraient volontairement
de rechercher la gestion de ces problématiques dans un cadre commun et
concerté qui garantirait une meilleure gestion de ces
problématiques en même temps qu'il susciterait des gains que
l'unilatéralisme ne pourrait permettre.
Pour Mitrany, le point de départ de
l'intégration se trouve dans la coopération technique au niveau
des low politics, c'est à dire dans des matières moins
souveraines et moins susceptibles de controverses telles l'économie ou
la culture, et s'étendrait par ramification. Par le concept de
ramification, Mitrany voudrait rendre compte du fait que les
succès obtenus par la coopération dans les low politics
suscitent le besoin d'étendre le champ de coopération à
des domaines plus délicats et plus complexes. Au finir, le processus
d'intégration aboutit à la création d'institutions
communautaires chargées de coordonner des actions devenues de plus en
plus complexes et de guider l'évolution du processus
d'intégration. Ainsi, les compétences des institutions
communautaires iraient sans cesse croissantes alors que celles des Etats
s'amenuiseraient progressivement au fur et à mesure de
l'évolution du processus de ramification.
En sommes, l'intégration fonctionnaliste est un
processus qui part du besoin de créer un cadre commun de gestion et de
résolution de certaines matières subsidiaires, puis à
l'instauration de ce cadre de gestion pour aboutir à l'étendue
et à l'amplification des compétences des institutions
régionales au détriment des institutions étatiques qui ne
conservent plus qu'une portion congrue de leur compétence
matérialisée par leur pouvoir législatif.
c ) La théorie
néo-fonctionnaliste
La théorie néo-fonctionnaliste apparaît
comme un réaménagement de la théorie fonctionnaliste. Elle
s'oppose à la vision trop idéaliste de la théorie
fonctionnaliste qui postule que les leaders politiques se démuniraient
volontairement et béatement de leurs matières de
souveraineté, nonobstant la quête d'intérêt et de
puissance qui les anime. En d'autres termes le néo-fonctionnalisme
reproche à l'approche fonctionnaliste de méconsidérer
l'ambition des acteurs étatiques de maximiser leurs pouvoirs.
Angela Meyer pense à cet effet, dans sa thèse de
Doctorat, que la théorie néo-fonctionnaliste, en réfutant
cet excès d'idéalisme, opère un important revirement dans
la théorie.
La théorie néo-fonctionnaliste procède en
fait à un réajustement à trois niveaux
différents :
Tout d'abord, elle propose une définition plus claire
des rôles des différents acteurs impliqués dans le
processus d'intégration. Ainsi, bien que les chefs d'Etat soient les
principaux acteurs du processus d'intégration, Ernst Haas, la figure de
proue de cette école, pense que ceux-ci agissent aussi sous la pression
d'une élite nationale motivée par l'assurance que leurs
intérêts et leurs aspirations seraient mieux garanties dans le
cadre d'une coopération internationale. En d'autres termes, les chefs
d'Etat sont certes à l'origine du processus d'intégration mais ne
le font pas toujours spontanément car ils agissent parfois sous la
pression de l'élite qui entrevoit dans l'intégration
l'opportunité d'une meilleure satisfaction de leurs ambitions.
Deuxièmement, l'approche néo-fonctionnaliste
remet en cause la séparation supposée par le fonctionnalisme
entre le secteur politique et le secteur non-politique. En effet, bien que le
processus d'intégration naisse dans des cadres moins politiques tels le
cadre économique ou culturel, les néo-fonctionnalistes pensent
que cette naissance ne saurait être le fait d'un processus autre que la
politisation. Ils pensent en l'occurrence que tout processus d'association
internationale touche automatiquement le domaine du politique et ne peut avoir
lieu que dans un cadre exclusivement politique.
Troisièmement, Ernst Haas procède à une
révision du processus d'intégration. Il envisage le processus
d'extension du champ de l'intégration qu'il appelle Spill
over11(*) non par la
progression de l'intégration du domaine économique vers le
domaine politique mais par sa complexification qui aboutit à l'inclusion
de nouveau domaines plus délicats et plus souverains. Ainsi, les
évolutions technologiques conduisent les élites
socio-économiques à entrevoir dans l'intégration le
meilleur gage de l'atteinte de leurs intérêts. Ils exercent donc
sur les dirigeants étatiques des pressions qui amènent ces
derniers à rechercher avec leurs homologues un cadre de
coopération. La coopération originellement limitée au
cadre économique s'étend du fait des succès
remportés dans les niveaux inférieurs mais aussi sous la pression
des élites socio-économiques à des domaines politiques,
plus complexes et plus délicats. La complexification croissante des
matières oblige l'instauration d'institutions communes chargées
de coordonner les actions et de faire progresser le processus
d'intégration. Ces institutions communautaires dont la compétence
s'est élargie et intensifiée gagneront la
préférence des acteurs socio-économiques au
détriment des institutions étatiques.
d ) La
théorie systémique
Cette théorie résulte d'une adaptation du
paradigme systémique à l'explication du phénomène d'intégration. Cette
théorie a pour point départ la définition du
système politique faite par David Easton selon laquelle
« un système politique peut être défini comme
l'ensemble des interactions par lesquelles les objets de valeurs sont
répartis par voie d'autorité dans une
société » (Easton, 1974:23). En transposant
cette définition au niveau de la communauté internationale ou
régionale, Lindberg met sur pied un cadre nouveau d'analyse de
l'intégration sous régionale. La particularité de
l'approche systémique de l'intégration réside en ceci
qu'elle se penche moins sur les causes et les conditions de son
avènement que sur les conditions de sa stabilité et de sa
conservation. Il est de ce fait en parfait accord avec Easton (1974 :16)
qui affirme : « les perspectives d'une analyse de la vie
politique en terme de système nous obligent à nous interroger sur
une question du type suivant : Comment un système politique
quelconque peut-il persister dan un monde soit stable soit en
changement ? ». Ici, l'opérationnalisation du
concept d'intégration est fonction du degré de division du
travail politique (functional scope) et des capacités
institutionnelles dont le système fait preuve. En d'autres termes, la
pérennité du système intégré dépend
non seulement du niveau et de la diversité de ses processus de
décision mais aussi de la capacité du système à
faire émerger un nouveau régime fait d'un ensemble de
règles et de normes auxquelles se soumettent ses différents
protagonistes.
SECTION B : ANALYSE CRITIQUE
DES THEORIES EN PRESENCE
Paragraphe 1 : La
prévention des Conflits
Au sortir de cette présentation panoramique des
thèses sur la prévention des conflits en Afrique centrale, il
convient de retenir tout d'abord que les travaux cités dans le cadre de
cette économie des théories sont certes porteurs, chacun à
son niveau, d'une importante marge de vérité et de
crédibilité mais ils restent, sur certains, points assez
critiquables.
Ainsi, s'il est vrai que les travaux de la Commission Carnegie
ont le mérite d'avoir presque fait le tour de la question de la
prévention des conflits, il ne demeure pas moins vrai qu'ils souffrent
d'un manque de pragmatisme marqué par la trop grande
généralité des propositions faites. En effet, comme le
pense David Easton faisant allusion au théories trop
générales, « si nous nous trouvons à une
trop grande distance, nous ne pouvons voir que les grandes lignes et cela n'a
que peu d'intérêt pour une recherche utile »
(Easton D, 1974 :2). Ainsi, bien que résultant d'une analyse
très englobante, les conclusions de la Commission Carnegie
souffrent d'une très grande généralité qui ne
permet pas d'assurer le succès de l'application de ses recommandations
dans certains cas particulier et, notamment au contexte de l'Afrique centrale
qui reste assez exceptionnel. En fait, le modèle conçu par la
Commission tient compte de considérants certes fondamentaux, mais qui
restent assez éloignés de la réalité politique
socio-économique et culturelle de l'Afrique centrale contemporaine.
Ainsi, les conceptions de la démocratie, de la nation, de l'ethnie, de
la justice, de la sécurité, du bien-être, de l'Etat,
facteurs fondamentaux de l'approche de la Commission, n'ont pas la même
connotation à Washington qu'à Yaoundé ou à Luanda
et doivent, pour devenir opératoires, être ajustés aux
schèmes de pensée prévalents dans ces zones. C'est dire
que les conclusions de la Commission ne peuvent s'appliquer au contexte de
l'Afrique centrale sans une adaptation préalable au contexte socio-
économique, politique et même culturel de l'Afrique centrale.
Nos travaux viseront à procéder à une
adaptation des conclusions de la commission au contexte particulier de
l'Afrique centrale afin d'aboutir à une lecture efficace de la
prévention des conflits, lecture efficace parce qu'en parfait accord
avec la réalité locale.
L'oeuvre de Michel Kounou Ph.D ne souffre pas moins de
lacunes. En effet, l'auteur parvient certes à une très belle
lecture des traits caractéristiques de la conflictualité en
Afrique centrale, mais reste assez évasif quant à ce qui est des
voies et moyens de prévenir cette conflictualité. En fait, ces
travaux laissent un arrière-goût d'inachevé en ce sens
qu'ayant procédé à la phase primaire de toute oeuvre
scientifique qui est le déblayage conceptuel de la théorie de la
guerre en Afrique centrale, il n'aboutit pas à la phase utilitaire de
l'usage de ces théories dans la résolution du problème,
ici, dans la résolution de cette conflictualité. Nos travaux se
proposent de remédier à cette situation en partant de cette
caractérisation de la conflictualité en Afrique centrale pour
envisager les moyens les meilleurs permettant de la juguler efficacement.
En ce qui est des travaux de Mwayila Tshiyembe et de Paul Ango
Ela, nous pensons qu'ils s'inscrivent certes avec succès dans une
approche de prévention structurelle, mais qu'ils pêchent aussi par
un excès de structuralisme. En effet, ces travaux envisagent la
prévention des conflits dans le long terme et à travers la mise
en place ou la refondation d'institutions dont le fonctionnement effectif ne
peut s'inscrire que dans le long terme. Qu'il s'agisse du nouveau pacte
républicain de Mwayila ou de l'émergence de la culture de
paix d'Ango Ela, le dénouement reste inscrit dans un avenir assez
lointain. La conséquence en est que ces approches ne permettent pas de
répondre au problème de la conflictualité contemporaine
qui devrait pourtant trouver lui aussi une solution tout aussi
immédiate. Le fait est que ces solutions, qui ne perdent pas de leur
pertinence, ne peuvent être appliquées que dans un contexte
déjà pacifié afin d'assurer la pérennité et
le renforcement de cette paix déjà acquise. Notre apport
consistera, en ce sens, à nous référer au contexte de
l'Afrique centrale dans une approche qui envisage en même temps
prévention à court et à long terme, prévention
immédiate et prévention structurelle.
Paragraphe 2 : L'intégration
a ) La théorie transactionnaliste
démontre certes de l'importance de l'établissement et du
renforcement des relations dans tout processus d'intégration. Mais, il
demeure que cette approche accorde une trop grande place au processus
d'intensification des relations comme seul vecteur de l'intégration.
Stanley Hoffmann pense à cet effet que l'étude du processus
d'intégration devrait inclure d'autres variables telles
l'idéologie, les institutions, les processus de décisions qui ne
sont pas facilement analysables seulement en terme de réseaux de
communication (Bussy (De) M-E et Al, 1971 :625).
Une autre limite de l'approche de Deutsch réside dans
le fait qu'elle établit, dans le processus d'intégration, une
préséance obligatoire entre la naissance d'une communauté
et la création d'institutions d'intégration politiques. En effet,
et ainsi que nous le démontre l'histoire de l'intégration
européenne et même celle de l'Afrique centrale, il est possible
qu'une instance et des structures institutionnelles d'intégration
naissent d'abord et qu'ensuite apparaisse l'esprit de communauté. Que
dire de la théorie fonctionnaliste ?
b ) Les théories fonctionnaliste et
néo-fonctionnaliste
Les développements nouveaux de l'intégration
régionale ont fait apparaître des lacunes dans l'approche
fonctionnaliste et dans sa reformulation néo-fonctionnaliste. Aussi
adresse-t-on à ces approches deux principales critiques.
La première est le fait des économistes tels
Bela Balassa (1961) qui démontre dans son ouvrage the theory
of economic integration que les avantages procurés par un
grand marché peuvent être obtenus sans qu'il soit
nécessaire de créer des institutions nouvelles. Ainsi, le
marché régional affranchi de toute emprise des institutions
régionales se régule mieux grâce à l'action d'une
« main cachée » qui assure la coordination des
politiques et est dirigée par le mécanisme du marché.
Cette critique relève en fait de l'adaptation au niveau régional
du concept de l' « invisible hand » cher aux
adeptes de l'économie libérale. Dans cette approche, le
processus d'intégration est perçu comme se limitant à la
convention d'une libre circulation des biens et services entre certains Etats,
ces derniers gardant cependant leur souveraineté pour ce qui est de la
politique douanière. Ainsi, selon cette approche, une meilleure
intégration signifie une absence d'institutions régionales
communautaires et envisage juste une approche intergouvernementale.
Le deuxième reproche fait aux méthodes
réalistes autant que néo-réaliste est le fait
d'internationalistes qui récusent l'assimilation faite par Mitrany et
Haas entre les questions économiques et politiques. En effet, Stanley
Hoffmann par exemple établit une distinction radicale entre les
questions d'ordre économique et sectoriel qu'il juge calculables et les
questions politiques qui relèvent de la souveraineté de l'Etat et
qui sont ainsi moins évidentes, moins prévisibles et moins
calculables. L'auteur préconise donc de réduire l'application de
la logique de l'intégration fonctionnelle aux questions
économiques et sectorielles seulement. Ainsi, sans remettre en cause la
valeur de l'approche fonctionnaliste et de sa reformulation ces critiques
amènent à envisager le passage automatique, dans ces
écoles, de l'intégration fonctionnelle à
l'intégration politique avec plus de précautions et de
prudence.
c ) La théorie systémique
comme les autres n'est pas exempte de critiques. Ainsi, la principale
limite décelée dans cette approche est le fait qu'elle ne
permette aucune lisibilité des différentes contraintes internes
à la structure organisée et qui orientent son action dans un
domaine plutôt que dans l'autre. Ainsi que nous le préconise
l'approche stratégique conceptualisée par Crozier et Friedberg
dans l'acteur et le système, l'action organisée est
soumise à des contraintes résultant de l'interférence des
stratégies des différents acteurs qui recherchent parfois la
maximisation de leur propre intérêt personnel au détriment
l'atteinte des objectifs de l'organisation. Relativement à la
théorie de l'intégration, la limite découle du fait que
les acteurs du processus d'intégration peuvent, selon leurs
quêtes, agir dans des logiques qui compromettent le processus
d'intégration. Il en est ainsi, par exemple, du rôle des Chefs
d'Etat qui, en même temps qu'ils escomptent des avantages de
l'intégration, recherchent néanmoins et avant tout à
maximiser les intérêts nationaux. Ainsi, le reproche fait à
la théorie fonctionnaliste de pêcher parfois par trop
d'idéalisme peut aussi être dans une certaine mesure
adressé à l'approche systémique. Peut-on pour autant
conclure à l'inefficience de ces méthodes ?
SECTION C : BALISAGE CONCEPTUEL
Après avoir fait le tour des théories en
présence et de leurs différentes limites, il convient de
procéder à la précision du substrat conceptuel ayant
survécu au crible de l'analyse critique et qui doit, de ce fait,
orienter nos travaux. Or, il nous semble objectivement impossible de situer
notre conception de la prévention des conflits sans, au préalable
arrêter une définition basique de la notion de conflit. Ensuite,
nous entreprendrons de préciser et de clarifier les concepts de
prévention des conflits et d'intégration sous régionale
avant de souligner, au plan conceptuel, quels sont les liens qui, dans le
cadre de notre analyse, devraient exister entre ces deux notions.
Paragraphe 1 : Le
conflit
Carl Von Clausewitz en définissant la guerre met en
exergue deux principaux considérants :
§ Premièrement, il pense que « La guerre
n'est rien d'autre qu'un combat singulier à grande
échelle ». (Clausewitz (Von), 1832 : 37) signifiant
ainsi l'importance du facteur numérique dans la définition de
l'état de guerre. La guerre suppose donc à son sens une
confrontation violente entre au moins deux groupes assez largement
constitués.
§ Deuxièmement, il définit la guerre comme
étant « un acte de violence dont l'objet est de
contraindre l'adversaire à se plier à notre
volonté » (Idem), faisant ainsi de la guerre la
confrontation de deux ou plusieurs volontés dans le souci
réciproque de phagocyter l'autre, de lui imposer notre ligne de
conception. Cette définition met l'accent sur le recours à la
force comme mode d'imposition du consensus.
Nous retiendrons donc, dans le cadre de notre étude,
que la guerre est un conflit de grande échelle entre au moins deux
groupes sociaux d'effectifs considérables, caractérisé par
le recours à l'usage de la force dans le but d'amener la faction
antagoniste à se plier à sa propre volonté. Cette
définition Clausewitzienne de la guerre a en plus le mérite de
s'adapter particulièrement aux évolutions polémologiques
actuelles qui font de la guerre non plus une confrontation ouverte entre deux
Etats clairement distingués comme tels, mais épouse la pratique
contemporaine des guerres dites asymétriques, ethniques, religieuses et
culturelles qui, à grand renfort de média et de technologies de
pointe, opposent des factions souvent diffuses, des nébuleuses, suivant
des canaux non-conventionnels et avec des moyens tout aussi non conventionnels.
Au-delà de cette définition sommaire et, tout en
nous abstenant de prendre position dans le débat qui oppose
libéraux et réalistes sur l'ontologie du conflit, débat
qui du reste nous éloignerait de notre quête, nous-nous
contenterons de penser, avec les auteurs des deux mouvances d'ailleurs, que la
guerre ne peut être la seule forme des rapports entre Etats ou même
à l'intérieur des Etats. Nous pensons ainsi à la suite de
Hugo Grotius dans De jure belli ac pacis, que la puissance des Etats
ne repose pas uniquement sur la sauvegarde et l'agrandissement de leurs
territoires; elle dépend également de leur
prospérité économique, elle-même liée au
dynamisme de leur commerce avec les autres Etats. Nous pensons notamment que la
guerre est, à cause de ses différentes conséquences, une
entrave au développement sous régional en particulier et au
développement humain en général.
Une remarque reste cependant constante dans la plupart de nos
ouvrages étudiés qui porte sur la particularité des
conflits dits « identitaires » en Afrique centrale. En
effet, il ressort de la majorité des travaux cités plus haut que
le qualificatif d'ethnique assigné aux guerres dans cette zone n'est
qu'apparent. Bien plus, le facteur ethnique apparaît comme un instrument
entre les mains des acteurs politiques qui poursuivent un objectif politique
à savoir la quête ou la conservation du pouvoir en suractivant la
fibre identitaire au sein des populations. En sommes, la conflictualité
en Afrique centrale n'est ethnique ni dans ses fins ni dans ses moyens ni
même par ses principaux acteurs qui se trouvent être des leaders
politiques et militaires plutôt que tribaux ou ethniques.
Paragraphe 2 : La
prévention des conflits
a ) Ontologie de
la prévention des conflits
De prime abord, relevons qu'il n'existe pas à
proprement parler, une théorie de la prévention des conflits. Non
seulement le concept de prévention des conflits n'est pas
rattaché à une terminologie unique mais encore le concept renvoie
à une diversité de significations. En effet, l'opération
de maintien de la paix répond aujourd'hui à un concept
éclaté perçu différemment selon les pays, les
organisations internationales et les théâtres d'intervention
(Tardy T, 2000 :397). Ce flou conceptuel est déjà
perceptible dans la terminologie utilisée pour se référer
aux opérations de prévention des conflits. On parle selon les cas
d'Opérations de maintien de la paix à l'ONU, de
Peace support operations à l'OTAN, Peace
operations aux Etats-Unis, d'opérations de soutien de la
paix en France (Op. Cit. : 398). Nous retiendrons donc dans le
cadre de nos travaux une seule terminologie à savoir
prévention des conflits dont nous allons au
préalable préciser le contenu en la confrontant aux autres
terminologies recensées.
L'expression peace operations usitée aux
Etats-Unis semble certes pertinente en ceci qu'elle réfère
à des initiatives menées dans le cadre de la pacification
seulement nous pensons que cette expression, dans un autre sens nous semble
tellement éclatée qu'il devient difficile d'en préciser le
contenu exact. Il serait ainsi difficile de ne pas retrouver sous le label
peace operations tout un ensemble d'actions telles les guerre
préemptive qui, bien qu'elles aient pour objectif la pax et la
sécurité internationale, vont à l'encontre des principes
de la prévention des conflits. Nous pensons à propos que l'on
peut recourir à la force pour prévenir le conflit mais que l'on
ne peut faire la guerre pour prévenir la guerre.
Les concepts Opérations de maintien de la paix,
Peace support operations, opérations de soutien de la paix dont les
significations sont voisines, nous semblent plus proche de notre entendement
car ils supposent des actions visant à conforter la paix et la
sécurité au sein d'une communauté. Seulement, le maintien
ou le soutien à la paix supposent l'existence préalable d'un
minimum de paix et ne concordent pas avec les contextes de guerres ouvertes qui
ne sont pourtant pas hors de notre cadre de réflexion et qui, pour nous,
appellent plutôt des initiatives en vue de la restauration de la paix
préalablement à son maintien.
A notre sens donc, la prévention des conflits n'inclut
pas seulement les mesures visant à empêcher la survenue des
conflits mais intègrent aussi toutes les initiatives visant à en
limiter l'extension ou à en permettre la résolution. (Commission
Carnegie, Op. Cit. : ix). La prévention des conflits englobe donc
pour nous, l'ensemble des questions inclues dans le triptyque peacekeeping,
peacebuilding et peace enforcement. Nous retiendrons, à la suite de
Tardy qu' « action préventive, maintien de la paix
stricto sensu (peacekeeping), assistance humanitaire, imposition de la paix
(peace enforcement), supervision électorale, consolidation de la paix
(peacebuilding) sont autant d'activités qui, mises en oeuvre
simultanément ou séparément appartiennent
dorénavant au maintien de la paix pris au sens large »
(Tardy T, 2000 : 390) En d'autres termes, notre acception de la
prévention des conflit englobera le large spectre qui part des mesures
prises et actions menées avant, pendant et après le conflit afin
d'en prévenir l'éclatement, de limiter son évolution ou
alors d'en conforter la résolution. Ce spectre inclura donc les actions
de diplomatie préventive entendue comme la prévention par
l'action ou l'influence sur les acteurs d'un conflit potentiel (Bertrand,
1997 : 111) et les mesures de prévention factuelle
c'est-à-dire celles envisageant la prévention par l'action sur
les faits, les circonstances et les contextes propices à la survenue de
la violence et de l'insécurité.
b ) Synopsis de la
prévention des conflits
1- La diplomatie préventive ou la
prévention par l'action sur les personnes
L'approche par la diplomatie préventive est la plus
ancienne et la plus traditionnelle. En effet, les mariages de convenance, les
alliances et les traités conclus depuis l'antiquité entre les
chefs de clans, de tribus ou des rois voisins rentraient déjà
dans la perspective de maintenir et de et de préserver la paix entre les
nations. Seulement, le concept de diplomatie préventive a connu de nos
jours une évolution considérable marquée dans ses
méthodes et ses logiques. Bedjaoui (2000 :56) distingue dans ce
sens la diplomatie préventive traditionnelle
caractérisée par la proximité et la perception claire de
l'intérêt direct de la nation, de la diplomatie
préventive contemporaine marquée par la distance et le
volontarisme. En effet pour l'auteur, la diplomatie préventive
contemporaine est structurée par deux caractères principaux.
Tout d'abord elle est une diplomatie de distance en ce sens
que les acteurs de ce type de diplomatie ne s'impliquent plus seulement dans
leur voisinage immédiat comme ce fut le cas dans les tentatives
anciennes mais se projettent parfois même hors de leur continent.
Ensuite la diplomatie préventive actuelle est
marquée par le volontarisme en ce sens que les Etats ou alors les
principaux acteurs de cette diplomatie ne s'engagent pas parce qu'ils
perçoivent un quelconque intérêt direct, mais parce qu'ils
sont portés par des considérations humanitaires ou obligés
par les engagements contractés au sein des organisations et institutions
internationales. Avant le conflit, l'intervention prend la forme de la
diplomatie préventive et si nécessaire, d'un déploiement
préventif des troupes.
2- La prévention factuelle ou la
prévention par l'action sur les faits
Quant à l'approche par la prévention factuelle,
elle se subdivise, selon une classification chère à la
Commission Carnegie, en deux à savoir : la
prévention structurelle qui aborde les causes profondes et lointaines
des conflits et la prévention immédiate qui, elle, intègre
les moyens d'alerte et de réponse rapide face aux crises (Commission
Carnegie Op. Cit. :7)
La prévention structurelle a pour point départ
l'identification des causes potentielles de conflits au sein de la
société telles les injustices, l'insécurité, et
l'exclusion dans le processus de prise de décisions. La
stratégie dans ce cas consiste, après l'identification de ces
causes potentielles, à promouvoir un contexte qui soit propice au
dialogue, à l'intégration et à une gestion participative
de la chose publique. Ceci implique une pratique démocratique saine, la
lutte contre les discriminations et les marginalisations de tous ordres,
l'instauration de mécanismes de gestion pacifique de différents
et d'un dialogue social véritable.
La prévention immédiate ou opérationnelle
résulte, pour nous, du dépassement du clivage
libéraux/réalistes sur la question du recours à la force.
Nous pensons dans cette logique que l'idéal de paix
perpétuelle est certes possible mais ne repose pas seulement sur la
force des conventions ou du droit international. Elle devrait, le cas
échéant, pouvoir s'appuyer sur une logique de puissance. Nous
nous inscrivons donc dans la perspective d'une réappropriation
libérale du concept de base de l'approche réaliste. Le recours
à la force constitue donc pour nous un moyen certes extrême mais
efficace dans la prévention et la gestion des conflits. Nous partageons
à ce titre le propos d'Yves Alexandre Chouala12(*) lorsqu'il
affirme : « Pour sortir des affrontements armés
qui caractérisent les conflits, l'Union africaine, à travers son
conseil de paix et de sécurité, devra mener une véritable
politique de puissance sous sa forme dure qui pourra, selon les conjonctures,
s'exprimer à travers soit des frappes militaires soit le recours
à des sanctions coercitives contre les belligérants
récalcitrants ». En d'autres termes et, pour le cas
d'espèce, la CEEAC devrait, lorsque le besoin est, recourir aux moyens
et aux méthodes de la puissance pour restaurer la paix dans la
sous-région. Le seul usage légitime et pertinent de la force est
ainsi celui de la prévention des conflits dans l'optique d'une paix
durable. Pour nous, la prévention opérationnelle consiste en un
ensemble de mesures directes visant la limitation de l'extension d'un conflit.
De façon concrète, la prévention opérationnelle
commence par l'activation du mécanisme d'alerte rapide du fait de
l'identification d'un conflit imminent ou déclaré. Ensuite, elle
prend la forme d'un déploiement d'une force d'interposition entre les
factions en conflits afin de limiter l'extension du conflit.
En Afrique centrale et dans la déclinaison des Forces
Africaines en Attente (FAA) assuré dans cette zone par le COPAX, ces
interventions peuvent se faire selon six scénarii différents. A
savoir :
Scénario 1 : Aide militaire pour une mission
politique.
Scénario 2 : Mission d'observation
déployée conjointement avec une mission des Nations Unies.
Scénario 3 : Mission d'observation sans appui de
l'ONU.
Scénario 4 : Déploiement d'une force de
maintien de la paix conformément au Chapitre VI de la Charte des nations
Unies et missions de déploiement préventif.
Scénario 5 : Force de maintien de la paix pour des
missions complexes et multidimensionnelles (humanitaire, désarmement,
administration, etc.) avec présence de groupes hostiles.
Scénario 6 : Intervention d'urgence - par exemple
dans le cas d'un génocide - lorsque la communauté internationale
ne réagit pas suffisamment rapidement.
Ainsi qu'on peut le deviner, l'optique de garantir le
succès de ce genre d'opération impose de les faire conduire par
des forces stratégiquement et techniquement supérieures aux
factions en conflit. En effet, cette option qui est caractérisée
par le recours à l'usage de la force pour amener les belligérants
à de meilleures considérations repose sur l'efficacité
des moyens et des approches utilisées. Le risque dans cette approche est
celui d'une analyse erronée de la situation qui mène à
surestimer ses forces ou à sous-estimer les capacités des forces
en présence. Le cas échéant, on assiste, comme ce fut le
cas de l'intervention américaine en Somalie, à une parodie
d'opération qui n'aura d'autre conséquence que de
décrédibiliser et de ridiculiser les initiatives de
prévention des conflits.
c ) Entre alerte rapide et réponse rapide : Les
principaux systèmes de prévention des conflits
La table typologique des systèmes de prévention
des conflits présente deux grands types de systèmes à
savoir les systèmes d'alerte précoce et d'alerte rapide. Awoumou
C. (2007: 04) précise à cet effet que l'alerte
précoce fait référence à une anticipation qui a
pour effet de prévenir, c'est-à-dire, d'empêcher la
réalisation d'une crise. En revanche, l'alerte rapide se rapporte au
facteur temps d'intervention entre la collecte et l'analyse de l'information
par rapport à la réponse qui est donnée en vue de
contribuer à la résolution d'un conflit donné C'est
dire que la différence fondamentale entre ces deux approches
réside dans la temporalité, c'est-à-dire la situation
temporelle de l'intervention vis-à-vis des évènements
à prévenir. En d'autres termes, alors que l'alerte précoce
à une visée purement préventive consistant à
éviter l'éclosion des conflits, l'alerte rapide elle à
une visée curative car elle recherche la résolution certes
après son éclosion mais avant qu'il ne se développe et se
répande. Un autre aspect de l'alerte rapide est qu'il envisage une
réponse adaptée à chaque circonstance conflictuelle
particulière.
Le COPAX a opté pour le modèle de l'alerte
rapide. Il compte pour ce faire s'appuyer sur le MARAC dont la raison
d'être est de donner l'Alerte en apportant au moment approprié la
bonne information aux décideurs politiques et, d'éviter toute
possibilité d'accumulation non détectée de causes
structurelles et conjoncturelles de conflits dans la sous-région (
Awoumou, idem)
Paragraphe 3 :
L'intégration
Ainsi que nous l'avons vu un peu plus haut, le
phénomène d'intégration a fait l'objet d'une abondante
théorisation. Aussi, au moment d'arrêter une conception commune,
nous procèderons non par opposition mais plutôt par
dépassement des clivages entre les différentes approches alors
dénuées de leurs limites respectives pour aboutir à un
concept nouveau qui puisse, selon nous, mieux rendre compte de la
réalité que nous envisageons. Pour ce faire, nous nous appuierons
sur Madeleine Grawitz qui, dans son Lexique des sciences sociales,
attribue deux sens au terme intégration :
D'une part, elle décrit l'intégration comme
étant un état du système social. Une société
sera considérée comme intégrée si elle est
caractérisée par un degré élevé de
cohésion sociale. A l'intégration, on oppose donc l'anomie ou la
désorganisation sociale.
D'autre part, elle pense que l'intégration
désigne la situation d'un individu ou d'un groupe qui est en interaction
avec les autres groupes ou individus (sociabilité), qui partage les
valeurs et les normes de la société à laquelle il
appartient. A l'intégration, on oppose donc la marginalité, la
déviance, l'exclusion.
En rapportant cette définition, qui, pour nous,
à le mérite de tenir compte de la convergence des théories
à laquelle nous aspirons, à la réalité
sous-régionale, l'intégration apparaît pour nous comme un
processus de fédération d'entités nationales ou
étatiques distinctes passant par la création ou l'instauration
d'institutions politiques communes et aboutissant à la naissance d'une
identité culturelle, politique et sociale nouvelle. Nous pensons
particulièrement que le processus d'intégration apparaît
ainsi comme résultant de la concomitance de plusieurs courants dont les
plus significatifs sont les courants culturel, fonctionnel, et
sécuritaire.
a) Le courant culturel
Le courant culturel est constitué par l'ensemble des
représentations des symboles et des intentions qui permettent et qu'ils
soutiennent l'existence d'une identité culturelle. A la suite de Karl
Deutsch, nous pensons que ce courant se crée et est entretenu par la
fréquence des échanges de tous ordres entre les
sociétés nationales. Ce courant à pour aboutissement une
culture commune faite de représentations et de conceptions communes
à toutes les populations de la sous-région.
b) Le courant fonctionnel
Ce courant constitue un autre axe majeur du processus
d'intégration. Il consiste, pour nous, en la mise en commun par les
chefs d'Etat et de Gouvernement de certaines matières dont une meilleure
gestion est garantie par des initiatives communes. Nous nous inscrivons dans ce
sens à la suite des théories fonctionnalistes et
néo-fonctionnalistes en posant que certaines matières telles la
gestion des espaces et des ressources naturels communs, le marché
sous-régional, ne peuvent être efficacement administrées
que par des instances concertées ou communautaires. Ainsi, la
collaboration dans des matières techniques rapproche les acteurs par
l'adoption de normes et de règles de gestion communes et contribue
à l'instauration d'une culture commune.
c) Le courant sécuritaire
Ce courant résulte des évolutions
énoncées dans l'oeuvre de David Mitrany. En effet, les
évolutions dans les technologies de la communication, de la
défense, des transports ont facilité les déplacements et
les flux de tous genres en même temps qu'ils ont marqué une
délocalisation des menaces à la sécurité. Ces
évolutions créent le lit de menaces telles le terrorisme
international, le blanchiment d'argent, la criminalité
transfrontalière et la cybercriminalité. Dans la
sous-région de l'Afrique centrale, ces menaces prennent la forme de la
circulation incontrôlée des armes légères et de
petit calibre (ALPC) qui sont de sérieux vecteurs d'instabilité,
de la criminalité transfrontalière à l'instar du
phénomène des coupeurs de route opérant dans les zones
frontalières de la sous-région, et des rebellions
transfrontalières. Or, ces matières ne peuvent être
efficacement envisagées que par le biais d'une initiative communautaire.
Bien plus, nous pensons que la gestion concertée de ces questions, en
même temps qu'elle en garantit une meilleure résolution, porte et
renforce le processus d'intégration sous-régionale.
En rapportant ces conclusions à la problématique
de l'intégration en Afrique centrale il apparait que cette
dernière est plus la question de son maintien, de son effectivité
et de son renforcement que celle de sa naissance. A notre sens, le maintien du
système dépend de l'activation et de l'entretien de ces trois
courants par l'instance intégrationniste et par les décideurs
politiques.
Paragraphe 4 : De la Sécurité vers
l'intégration politique
En considération des théories recensées
plus haut, nous pensons que l'intégration politique entendue comme la
mise en place d'institutions communautaires dotées de moyens, de
ressources et d'une compétence suffisante pour gérer les grandes
problématiques de la sous-région est le résultat de la
congruence de trois principaux courants à savoir, le courant culturel,
le courant fonctionnel et le courant sécuritaire. Ainsi, les trois
courants de l'intégration recensés peuvent évoluer
séparément, mais une évolution séparée reste
assez incomplète. Par contre, c'est la convergence de ces
différents courants qui, à terme, ouvre l'opportunité
d'une intégration politique efficace marquée par la
création d'institutions politiques communautaires. En fait, le processus
d'intégration peut naître et exister valablement sous l'action
d'un seul de ces courants, mais nous pensons que la concomitance de ces trois
courants nous semble être la meilleure configuration qui puisse mener
vers une intégration politique efficace et stable.
Dans cette lancée, nous pensons que le volet
sécuritaire qui est au centre de notre analyse, serait d'une
contribution déterminante dans le processus de socialisation de
l'Afrique centrale. Ainsi, l'effectivité du système de
prévention des conflits dépendent la naissance et le
développement des autres courants d'intégration. En termes plus
clairs, il paraît évident qu'un climat d'insécurité
compromettrait non seulement les communications sociales mais aussi le
développement socio-économique de la sous région. Notre
idée est confortée par Ropivia (2001) qui, dans son article, met
en exergue l'impact négatif considérable de la
conflictualité sur le processus de construction communautaire en Afrique
CEEAC. Bien plus, le Dr Fogue pose qu' « au regard de la
déliquescence actuelle de nombreux Etats africains, et plus
particulièrement de ceux que traversent de manière cyclique les
conflits, il est incontestable que la première bataille que doit
impérativement gagner l'Afrique pour sortir de son
sous-développement économique et social c'est bien celle de la
sécurité » (Fogue, 2007 : 31). Ainsi et, en
termes plus simples, la guerre est un écueil majeur d'abord au processus
de construction nationale préalable à toute intégration,
mais aussi au processus d'intégration sous-régionale
lui-même dont elle bloque l'avancée et peut même inhiber les
acquis. Le lien entre prévention des conflits et intégration
régionale ou mieux, l'apport du système de prévention des
conflits dans l'intégration de la sous-région n'apparaît
alors que plus évident. Pour nous, l'effectivité du COPAX en tant
que système sécuritaire de la sous-région serait un
catalyseur du processus d'intégration de l'Afrique centrale CEEAC. Pour
y parvenir, nous pensons à la suite de Lindberg que la stabilité
et le succès du COPAX dépendent non seulement de la bonne
division du travail qui sera institués par les textes organiques du
COPAX mais aussi de l'aptitude du COPAX à agir sur l'environnement en
suscitant en son sein des normes et des valeurs nouvelles.
CHAPITRE II : PRESENTATION DE
L'AFRIQUE CENTRALE CEEAC, CADRE D'ACTION DU SYSTEME DE PREVENTION DES
CONFLITS
![]()
Toute entreprise scientifique qui se veut utile doit rester en
prise avec les faits. Elle doit pouvoir partir de l'observation des faits pour
déduire des lois et des théories générales, en
même temps qu'elle doit être en mesure de retourner aux faits pour
leur appliquer le fruit de ses élaborations.
Le présent Chapitre a pour objectif de répondre
autant que faire se peut au premier volet de ce souci d'utilité. Ainsi,
dans cette partie nous commencerons par présenter la sous-région
Afrique centrale, son cadre d'intégration qui est la CEEAC et son cadre
de prévention des conflits, en l'occurrence le COPAX. Ensuite, nous
allons procéder à une sociologie de la polémologie en
Afrique centrale. Dans cette optique nous recenserons les situations
conflictuelles qui rentrent dans le cadre de nos limites spatio-temporelles et
qui appelleraient une intervention du COPAX, ceci dans la perspective de
jauger, dans un Chapitre ultérieur, la réactivité du
COPAX. Ensuite nous-nous livrerons, sur la base des situations conflictuelles
recensées, à un recensement des réactions du COPAX face
à la conflictualité ambiante, non sans avoir mis en exergue les
éléments structurateurs des conflits recensés. Selon une
terminologie systémologique, nous comptons dans ce second moment mesurer
le degré d'adaptabilité du système COPAX dans son
environnement en mettant en exergue la nature et le contenu des inputs
et des outputs qui constituent les liens du système d'avec son
environnement. En sommes, nous comptons dans ce chapitre, replacer le
système de prévention des conflits dans son environnement et
mettre en exergue les interactions qui existent entre le COPAX et son
environnement. En fait, nous espérons au terme de cette partie,
rassembler le matériau suffisant qui nous permette de procéder,
dans le chapitre suivant à une lecture transversale du fonctionnement
du système de prévention des conflits de l'Afrique centrale et
qui nous autorise à envisager les raisons et les conséquences
d'un tel état de choses.
SECTION A : PRESENTATION DE L'AFRIQUE CENTRALE : CADRE
D'INTEGRATION ET DE PREVENTION DES CONFLITS13(*).
Ainsi que nous l'avons précisé dans notre
introduction, nos travaux se focaliseront sur l'Afrique centrale CEEAC. Ainsi,
par Afrique centrale, il faudra entendre la région médiane de ce
continent qui part du Tchad au nord à l'Angola au sud, de la RDC et du
Burundi à l'Est au Sao Tomé et principe à l'Ouest. A
l'intérieur de cet espace on recense 10 Etats différents à
savoir le Cameroun, le Gabon, le Congo, la République
Démocratique du Congo, Sao Tomé, le Burundi, le Tchad, la
République Centrafricaine, la Guinée Equatoriale. Ces Etats
réunis couvrent une superficie de 6 640 600 Km2 pour une
population de 123 933 000 habitants14(*).
L'Afrique centrale dispose d'immenses potentialités,
notamment de terres agricoles abondantes soit 200 millions d'hectares de terres
arables, dont seulement moins de 1% sont exploitées. En outre, le bassin
du Congo (3.700.000 km²) concentre la plus importante ressource en eau du
continent. Le potentiel hydroélectrique du fleuve Congo, deuxième
fleuve du monde par son débit (40 000 m/seconde en moyenne
rejetés dans l'Atlantique), est considérable avec un potentiel de
100.000 MW dont 44 000 MW pour le seul site d'Inga. Les pays situés dans
la cuvette centrale bénéficient de la forêt dense
équatoriale qui à elle seule comprend les 4/5 de la forêt
dense africaine, soit près de 2,5 millions de km² riches d'essences
diverses, régulièrement arrosée et pourvue d'une
hydrographie très abondante.
Un autre atout important que possède la sous
région en matière de communication est l'importance de ses voies
fluviales. En effet, l'Afrique centrale recèle également
d'importantes potentialités en voies d'eau intérieures
navigables, tant nationales qu'internationales qui pourraient contribuer
à la facilitation des échanges régionaux. Il s'agit
notamment du fleuve Congo et ses principaux affluents (Kasaï, Oubangui,
Sangha et Alima), du fleuve Ogoué et des Lacs Kivu et Tanganyika. Le
système des voies d'eau intérieures qui comprend le fleuve Congo
et ses affluents en rive droite (Oubangui et Sangha), communément
appelé la trans-équatoriale, a toujours été une
voie d'intégration physique et d'échanges pour la RCA, le Congo,
le Cameroun, la RDC et le Tchad (pays non riverain). Il en est de même
pour le Lac Tanganyika entre la RDC et le Burundi. La longueur des voies
navigables contribuant à l'intégration dans la sous-région
(voies internationales), avec des conditions variables de navigabilité,
est actuellement évaluée à plus de 3100 km.
En outre, l'Afrique centrale compte en son sein les plus
importants pays producteurs de ressources pétrolières d'Afrique
subsaharienne (hors mis le Nigeria), à savoir l'Angola, le Congo, le
Gabon, la Guinée Equatoriale, le Tchad et Sao Tome et Principe. La RDC
dispose de réserves de gaz naturel dans le Lac Kivu, tandis que
l'Angola, la RCA et la RDC regorgent de minerais précieux divers (or,
diamant, cuivre et coltan.).
La prise en compte et le souci d'une gestion adéquate
de tous ces atouts a suscité au sein de la sous-région le projet
de construire un cadre de gestion commune de toutes ces ressources qui est en
l'occurrence la Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale
(CEEAC).
Paragraphe 1 : La CEEAC, cadre d'intégration de l'Afrique
centrale
La CEEAC a été créée le 18
octobre 1983 par les membres de l'UDEAC et les membres de la Communauté
Économique des Pays des Grands Lacs (CEPGL) (le Burundi, le Rwanda et le
Zaïre ainsi nommé à l'époque), ainsi que Sao
Tomé et Principe. L'Angola à conservé un rôle
d'observateur jusqu'en 1999, époque à laquelle le pays est devenu
membre, tandis que le Rwanda a définitivement quitté la
communauté en 2007 après plusieurs hésitations.
Au sein de la CEEAC, on retrouve la Communauté
Economique et Monétaire d'Afrique Centrale (CEMAC) qui fut
institutionnalisée par un Traité signé en juillet 1996.
Elle comprend le Gabon, le Cameroun, le Tchad, la Guinée Equatoriale, la
République Centrafricaine et le Congo. Toujours au sein de la CEEAC se
trouve la Communauté Economique des Pays des Grands Lacs (CEPGL). Elle
regroupe le Rwanda, le Burundi et le Zaïre. Elle est le sous-ensemble
où le processus d'intégration a été le moins fort
et est traversé par une conflictualité presque endémique.
La CEEAC qui regroupe les deux sous-ensembles que dessus est l'instance
institutionnellement reconnue comme étant le pilier de
l'intégration en Afrique centrale notamment dans le cadre du
programme de rationalisation des Communauté Economiques
Régionales de la Commission Economique pour l'Afrique (CEA), mais elle
est restée inactive pendant une trop longue période15(*).
Lors de sa création, la CEEAC s'est fixée pour
but de promouvoir et renforcer une coopération harmonieuse et un
développement équilibré et autonome entretenu dans les
domaines de l'activité économique et sociale. Le Traité de
la CEEAC, entré en vigueur le 18 Décembre 1984 et fonctionnel
depuis 1985, a d'abord constitué pour les Etats membres un cadre
approprié pour promouvoir l'intégration économique et le
renforcement de la confiance entre eux. C'est bien plus tard que la CEEAC a
élargi sa vision de l'intégration pour y inclure la promotion de
la paix, de la sécurité et de la stabilité dans la
sous-région.
Au plan structurel la CEEAC comprend:
§ La Conférence des Chefs d'Etats et de
Gouvernement : Elle définit la politique générale
et les grandes orientations de la Communauté.
§ Le Conseil des Ministres : Le Conseil
des Ministres formule des recommandations à l'attention de la
Conférence sur toute action tendant à la réalisation des
objectifs de la Communauté.
§ La Cour de justice : La Cour de
justice assure le respect du droit par l'interprétation et l'application
du traité et statue sur les litiges dont elle peut être saisie.
§ Le Secrétariat
Général: Le Secrétariat Général
exécute les décisions et directives de la Conférence et
les règlements du Conseil des ministres. Il comprend un
Secrétaire Général assisté de trois
Secrétaires Généraux Adjoints chargés des
départements suivants :
§ Intégration Humaine, Paix,
Sécurité et Stabilité (IHPSS) ;
§ Intégration Physique Economique et
Monétaire (IPEM) ;
§ Programme, Budget, Administration et Ressources
Humaines.
Le Secrétaire Général est assisté
dans l'accomplissement de ses fonctions par un cabinet et des cellules
spécialisées. Les Secrétaires Généraux
Adjoints sont aidés dans l'accomplissement de leurs tâches par des
Directions techniques
§ La Commission Consultative : La
Commission Consultative étudie ou instruit les questions et projets que
lui soumettent les autres institutions.
§ Les Comités techniques
spécialisés : Les Comités techniques
spécialisés sont créés dans les domaines
spécifiques et agissent dans le cadre des missions confiées
à chaque domaine16(*) .
La CEEAC comprend actuellement un organisme
spécialisé en matière énergétique. Il s'agit
du Pool Energétique de l'Afrique centrale (PEAC) créé le
02 Avril 2003 à Brazzaville;
Paragraphe 2 : Le COPAX, instrument de la prévention des
conflits en Afrique centrale.
Dans son optique de développement des capacités
sous-régionales de paix et de sécurité, la
Conférence des chefs d'État et de gouvernement, réunie
à Yaoundé au Cameroun le 25 février 1999, a
décidé de créer un mécanisme de promotion de la
paix, de la sécurité et de la stabilité en Afrique
Centrale.
Plusieurs motifs militent pour une approche participative de
la prévention des conflits en Afrique centrale. On peut citer entre
autres dans cette rubrique :
o la faiblesse institutionnelle de certains Etats qui
n'arrivent pas à être présents sur toute l'étendue
de leur territoire et qui doivent faire face à des problématiques
socio-économique de lutte contre la pauvreté, le chômage,
la corruption et autres clanismes
o les énormes richesses minières de cette zone
car, « sous-région éclatée, tous ceux
qui le peuvent s'en servent comme zone de projection pour influencer la
définition de son identité et sa reconfiguration
géostratégique afin de s'approprier des ressources naturelles
qu'on y retrouve. » (Awoumou, 2005 : 03)
o l'existence de problématique et de menaces
transfrontalières telles les coupeurs de routes, la circulation des ALPC
dont la résolution efficace exige l'adoption d'un approche
communautaire.
Le 24 février 2000, la Conférence a
effectivement adopté le Protocole relatif à
l'établissement du Conseil de Paix et de Sécurité de
l'Afrique Centrale, le COPAX.
Le COPAX vise à :
· développer et intensifier la coopération
sous-régionale en matière de sécurité et de
défense ;
· mettre en oeuvre les dispositions pertinentes relatives
à la non-agression et à l'assistance mutuelle en matière
de défense ;
· définir les grandes orientations dans les
domaines de l'établissement, du maintien et de la consolidation de la
paix à l'échelon sous-régional.
Dans la poursuite de ces objectifs, il a pour mission de
veiller au maintien, à la consolidation et à la promotion de la
paix et de la sécurité en Afrique Centrale, en y intégrant
la question de l'aide humanitaire. Le Conseil peut constituer et
déployer des missions civiles et militaires d'observation et de
vérification en vue de prévenir, de maintenir ou de
rétablir la paix dans la sous-région, chaque fois que le besoin
se fait sentir. Le COPAX est par ailleurs le cadre de préparation et
d'exécution des décisions des chefs d'État en
matière de prévention, de gestion et de règlement des
conflits.
Pour la réalisation de ses objectifs, le COPAX a,
à sa disposition, quatre instruments opérationnels que
sont :
· la Commission de défense et de
sécurité : son rôle est de planifier,
d'organiser et de donner des conseils aux entités prenant des
décisions dans la communauté afin de mettre en oeuvre, en cas de
besoin, des opérations militaires.
· le Mécanisme d'Alerte Rapide de
l'Afrique Centrale (MARAC) : il met en oeuvre le système
d'alerte de la sous-région en rassemblant et en analysant les
informations pour une alerte et une réaction rapide et
appropriée
· la Force Multinationale de l'Afrique Centrale
(FOMAC) : il s'agit d'une force non permanente constituée
de contingents militaires des Etats membres dont le but est de mettre en place
et d'assurer les missions de paix, de sécurité et d'aide
humanitaire. La FOMAC est appelée à intervenir en cas d'agression
ou de conflit dans tout État membre ou en cas de menace contre celui-ci,
en cas de conflit entre deux ou plusieurs États membres, en cas de
conflit interne ou en cas de renversement ou tentative de reversement des
institutions constitutionnelles d'un Etat-membre.
· La Direction des Affaires Politiques et
Diplomatiques (DAPD) : dont le rôle est de mettre en oeuvre
toutes mesures de diplomatie préventive décidée par les
instances dirigeantes du COPAX
En même temps que le Protocole relatif au COPAX, les
États de la CEEAC ont adopté en février 2000 un Pacte
d'assistance mutuelle entre les Etats membres de la Communauté. La
10ème Conférence, réunie à Malabo le 17 juin 2002,
a adopté les règlements relatifs au COPAX, à la
Commission de défense et de sécurité, à la Force
multinationale et au Mécanisme d'alerte rapide. Le COPAX est
entré en vigueur en janvier 2004.
SECTION B : PRESENTATION SOMMAIRE DES CONFLITS EN AFRIQUE
CENTRALE
En prélude à cet ouvrage essentiel et,
conformément au balisage conceptuel effectué dans le chapitre
précédent, nous retiendrons dans le cadre de notre recherche, une
définition minimaliste du conflit selon laquelle le conflit n'est rien
d'autre qu'un combat singulier à grande échelle dont l'objet
est de contraindre l'adversaire à se plier à notre
volonté, (Clausewitz (Von), 1832 : 37). C'est dire que les
critères du recours à la violence et du nombre
élevé des acteurs de la violence suffiront pour nous permettre de
qualifier une situation de conflictuelle ou non. Cette définition
à de plus l'avantage de cadrer avec notre conception de la
prévention des conflits qui survient certes après
l'éclosion du conflit mais avant qu'il n'atteigne des proportions
incontrôlables et s'appuie sur un système d'alerte à
même d'identifier, de localiser et de traiter efficacement les menaces
à la paix et à la stabilité sous régionale.
Nous-nous intéresserons donc à toutes les situations mettant en
scène des forces militaro-politiques plus ou moins constituées
qui s'affrontent dans une zone précise. C'est à ce titre que
notre attention sera portée tout autant sur les cas de rebellions
armée locales que sur les cas de guerres civiles embrasant l'ensemble du
territoire national ou sous régional.
Un autre rappel important à faire de prime abord est
celui de la temporalité des évènements objet de notre
analyse. En effet, nos travaux s'étalant sur la période
2000-2008, nous ne nous limiterons pas à analyser seulement les conflits
ayant éclaté dans cette fourchette temporelle mais nous
intègrerons tous les conflits ayant éclaté avant cette
période mais s'étant poursuivis au-delà de l'année
2000. En effet, notre avis est que, dans ces cas aussi, l'intervention du
COPAX serait fondée et adéquate, car, non seulement, la
caractéristique fondamentale des mécanismes d'alerte rapide est
qu'il réagissent tout aussi efficacement avant et même pendant les
conflits, mais encore, les textes directeurs du COPAX lui confèrent non
seulement le droit mais le devoir d'oeuvrer à la prévention et
à la gestion de toute crise sécuritaire survenant dans la
sous-région.
En nous basant donc sur cette critériologie, nous avons
recensé 08 conflits en Afrique centrale CEEAC dans la période
allant de 2000 à 2008 à savoir : Le conflit
Démo-congolais de 1998 à 2008, le conflit Burundais de 1994
à 2005, le conflit Angolais de 1998 à 2002, les rebellions
centrafricains de 1996 à 2003 et de 2003 à 2008, le conflit du
POOL au Congo, Le putsch santoméen de 2003 et enfin, la rébellion
Tchadienne jusqu'en 2008.
Pour corroborer notre recension nous pouvons nous appuyer sur
ces recommandations de Monsieur Antipas MBUSA NYAMWISI, Ministre des affaires
étrangères et de la coopération internationale de la
République Démocratique du Congo, alors Président du
Conseil des Ministres du COPAX lors de la réunion de cette instance
tenue du 25 au 26 février 2008 à Libreville, République
Gabonaise. Il exhorte, dans son propos, les Etats membres à s'engager de
manière déterminante sur six dossiers prioritaires : la
restauration de la paix en République du Tchad ; le transfert
d'autorité de la CEMAC à la CEEAC en République
Centrafricaine ; la consolidation de la paix en République
Démocratique du Congo ; le bon déroulement des élections
en République d'Angola ; la sécurisation du Golfe de
Guinée et la sécurité dans le triangle Cameroun - Tchad -
République Centrafricaine. Les crises Burundaise, congolaise et
santoméenne ne sont pas mentionnées pour une raison très
simple. Etant en phase de résolution ou même complètement
résolues notamment pour le cas Burundais et santoméen, il aurait
été inapproprié de continuer à en faire des
dossiers prioritaires. Nous nous délierons cependant de cette limite et
considérerons aussi ces cas comme des objets de notre analyse, pour la
simple raison qu'ils sont compris dans la fourche temporelle au sein de
laquelle se situe notre analyse et devraient appeler une intervention du COPAX.
Paragraphe 1 : Le conflit Démo-Congolais à partir de
1998 (De la 2ème Guerre de RDC à la guerre du Kivu)
La deuxième guerre du Congo est un conflit armé
qui s'est déroulé au sein du territoire de la
République
Démocratique du Congo (RDC, anciennement Zaïre) entre les
année
1998 et
2008, avec certes une fin
formelle le
30
juin
2003 mais une persistance des
affrontements jusqu'en 2008. Elle impliqua neuf pays
africains, et une trentaine
de groupes armés, ce qui en fait la plus grande guerre entre
États dans l'
Histoire de
l'Afrique contemporaine.
Le deuxième conflit Démo-Congolais trouve son
origine dans la trop grande allégeance du président Laurent
Désiré Kabila vis-à-vis des alliés Rwandais et
Ougandais qui lui ont donné les moyens de renverser le Président
Mobutu17(*). Or, ces
alliés de fortune n'ont pas fait qu'apporter une aide
désintéressée. Non seulement la guerre a été
pour eux un moyen d'en découdre avec le Président Mobutu qu'ils
accusaient d'accueillir certains ténors du Hutu power et de
cautionner les raids meurtriers lancés par ces derniers en direction du
Rwanda, mais elle a aussi été l'occasion pour bien des
protagonistes de cette guerre de faire main basse sur les nombreuses richesses
du sous-sol Démo-congolais détenues par Mobutu.
En fait, quand Laurent-Désiré Kabila prit le
contrôle de la
capitale en mai
1997, il dut faire face
à de nombreux obstacles pour gouverner le pays qu'il renomma
« République Démocratique du Congo » (RDC).
En coulisse, de nombreux groupes tentaient de s'accaparer des parcelles de
pouvoir, notamment les débiteurs étrangers, désireux de
garder leur influence. Par ailleurs, la présence ostensible des Rwandais
dans la capitale irrita les Congolais, qui commençaient à voir en
Kabila la marionnette des Etats voisins18(*). Cet état de choses suscita des
appréhensions non-seulement du coté des populations
Démo-Congolaises qui s'estimaient envahies par des étrangers mais
aussi du coté du Président Kabila lui-même qui voulut
s'affranchir de la trop grande dépendance vis-à-vis de ses
créanciers.
S'étant assuré une assise confortable au sein
des milieux politiques de son pays et de la communauté internationale,
il entrepris une procédure dont le but ultime était de
s'affranchir de ses anciens alliés. Ainsi, le
14
juillet
1998 Kabila fit
démissionner son chef de cabinet Rwandais,
James Kabarebe, et le
remplaça par un Congolais. Deux semaines plus tard, il remercia le
Rwanda pour son aide, et demanda le retrait du pays des forces militaires
rwandaises et ougandaises : Les conseillers militaires Rwandais furent
évacués de
Kinshasa avec peu de
ménagement dans les 24 heures. Dans le même temps, et en guise de
réplique, le gouvernement rwandais réclamait une part
significative de l'est du Congo, considérée comme
« historiquement Rwandais » tout en accusant
Kabila de planifier un génocide contre les Tutsis dans la
région du Kivu.
A la mi-Août 1998, les troupes Banyamulenge
inféodées au Rwanda se mutinèrent et constituèrent
un nouveau groupe armé, le
Rassemblement
Congolais pour la Démocratie (RCD), immédiatement soutenu et
appuyé par le Rwanda et l'Ouganda avec l'onction du Burundi. Ce groupe
prit rapidement le contrôle de l'Est du pays, faisant tomber dans son
escarcelle les villes de Goma puis Bukavu et Uvira dans le Kivu et toutes les
richesses minières des zones en question.
En guise de contre-offensive, le Président Kabila en
appela à l'aide des
Hutus militant dans le Congo
oriental et commença à monter les populations contre les Tutsis,
ce qui occasionna de nombreux
lynchages dans les rues de
Kinshasa, le plus souvent par le
supplice du
pneu19(*). Il
rechercha aussi le soutien et l'appui d'autres alliés régionaux,
soutien qu'il obtint de la Namibie, du Zimbabwe, de l'Angola et du Tchad.
L'état des lieux laisse donc apparaître deux principaux groupes
antagonistes comprenant d'une part, la République Démocratique du
Congo et ses alliés la Namibie, le Zimbabwe, l'Angola et le Tchad
auxquels il faut ajouter les milices Maï-Maï et toutes les milices
hutus, et d'autre part le Rwanda, l'Ouganda et le Burundi instrumentalisant le
RCD, le MLC et les milices Tutsies. Le territoire national fut dès lors
fractionné en trois grandes zones d'influences dont l'ouest resté
sous la maîtrise du gouvernement et de ses alliés, le nord
dominé par le MLC pro-ougandais et l'Est contrôlé par le
RCD pro-Rwandais.
L'assassinat de Laurent-Désiré Kabila par un de
ses gardes du corps ne mit pas un terme à la guerre mais resserra les
liens au sein des alliés du gouvernement excédés par la
duplicité de Kabila et ses lenteurs dans l'instauration d'un processus
démocratique conduisant à des élections libres. Pour les
mêmes raisons, la transition d'avec Joseph Kabila, son fils, élu
à l'unanimité par le parlement congolais se fit presque
naturellement.
A peine au pouvoir, Kabila Fils hérite de la gestion de
la question épineuse de la pacification du pays. Sa stratégie
dans ce sens consistera tout d'abord à raffermir la suprématie du
gouvernement et de l'Etat sur les groupes rebelles qui prétendaient
traiter d'égale à égale avec le pouvoir en place.
Sous la pression de la communauté internationale et
notamment des Etats-Unis20(*), une paix relative sera obtenue à la suite des
Accords de Luanda et Pretoria en 2002, paix confortée par la formation
d'un
Gouvernement
de transition le 17 Décembre 2002 (Braeckman, 2003 :295-299).
Mais au-delà de la constitution d'un gouvernement de
transition, le problème de fond qui est celui de la fusion des
différents groupes armés en une seule armée unifiée
continue à se poser. En effet, en l'absence d'une véritable
unification des forces armées et de véritables avancées
politiques, chaque groupe veut préserver sa zone de contrôle et
son accès aux ressources naturelles qui le financent (Fouche V. et
Jézéquel J-H, 2004 :159)
Les plus grandes inquiétudes viennent de l'Ituri et des
Kivus. En effet, à la suite des massacres de Gatumba dans le sud-Kivu,
le Rassemblement Congolais pour la Démocratie faction Goma (RCD-Goma)
s'est retiré des institutions de la transition.
Dans le même temps, le troisième rapport des
experts de l'ONU rappela fort à propos que chacun des pays intervenants
a veillé à mettre en place un réseau d'élites, des
relais, permettant même après le retrait des troupes, de
poursuivre l'exploitation des ressources et d'influencer les règlements
politiques. Bien plus, certains pays comme le Rwanda et l'Ouganda ont
appliqué une stratégie emprunte de nihilisme, voulant
établir par l'absurde, c'est-à-dire par le désordre et la
violence dans les régions qu'ils sont censés abandonner, que leur
présence était un élément d'ordre, voire de
pacification. (Braeckman Op Cit.: 296) C'est dans cette logique que, au
nom de la protection des Congolais d'origine Rwandaise, les
Banyarwanda et les Banyamulenge en l'occurrence, le
Général Laurent Nkunda et le Colonel Jules Mutebutsi, à la
tête de 4000 hommes, ont marché sur Bukavu en fin Mai 2004.
Le Rwanda fera preuve d'une duplicité
particulière, réfutant officiellement toute déclaration
faisant état de son soutien au Général Nkunda, mais
apportant dans les faits son appui à ce Général rebelle.
Stephanie Wolters (2007:04) fait état de cette duplicité dans le
rapport de l'Institute for Security Studies de 2007 dont elle est l'auteur en
affirmant: « It is relatively easy to identify instances of
logistical support provided by Rwanda to Nkunda and his associates over the
past three years: permitting them to recruit in Congolese refugee camps on
Rwandan territory, allowing Nkunda and his men to travel back and forth between
Rwanda and the eastern DRC, and providing safe heaven to those who have fallen
foul of Congolese law ». Cet état de choses fait
d'aide et d'assistance en sous-main accordées aux groupes rebelles
opérant en RDC perdurera et, malgré une forte pression
internationale, Laurent Nkunda, à la tête de son Congrès
National pour la Défense du Peuple (CNDP), commettra de multiples
exactions dans le Kivu jusqu'en 2008.
Ainsi, En janvier 2006, les troupes de Nkunda affrontent les
troupes régulières congolaises, toutes accusées de crimes
de guerre par la
MONUC. D'autres affrontements
se déroulent en août 2006 aux environs de
Sake. La MONUC,
cependant, refuse d'ordonner l'arrestation de Nkunda lorsqu'un
mandat d'arrêt
international est lancé contre lui, arguant que Laurent Nkunda ne
représente pas une menace pour les populations locales. Jusqu'en juin
2006 cependant, le
Conseil
de sécurité des Nations unies impose des mesures de
restriction à Nkunda. Au cours des premier et deuxième
tours de l'
élection
présidentielle Congolaise de 2006, Nkunda déclare qu'il
respectera le résultat des urnes. Le
25 novembre, soit un
jour avant que la
Cour
Suprême de la République Démocratique du Congo confirme
la victoire de
Joseph Kabila au
second tour de l'élection présidentielle, les forces de Nkunda
lancent une offensive majeure contre la 11e brigade des troupes
gouvernementales à
Sake, affrontant
également des troupes de la
MONUC. L'attaque pourrait ne
pas être liée au résultat de l'élection, mais
plutôt au « massacre d'un Tutsi proche de l'un des commandants
du groupe. » Les Nations Unies appellent le Gouvernement à
négocier avec Nkunda, et le Ministre de l'Intérieur, le
Général
Denis Kalume, est
envoyé dans l'Est du pays pour entamer des négociations. Au début 2007, le Gouvernement régulier tente de
diminuer la menace que constitue la présence de Laurent Nkunda en
essayant d'intégrer davantage ses troupes au sein des
FARDC, l'armée
nationale, au cours d'un processus appelé brassage. Mais, cette
stratégie de phagocytose est sans succès et produira meme le
résultat inverse car, il apparaît qu'à partir d'Août
2007, Nkunda contrôle cinq brigades plutôt que deux. Le
24 juillet
2007, le responsable des
Casques Bleus,
Jean-Marie
Guehenno déclare que « les forces de M. Nkunda sont la
seule menace sérieuse contre la stabilité dans la RD
Congo. »21(*)
Fin 2007, l'instabilité au
Nord-Kivu, largement
attribuée aux affrontements entre les troupes de Nkunda et les milices
hutues, est à l'origine
du déplacement de plus de 160 000 personnes. Les agences des
Nations Unies annoncent que davantage de combats seraient à l'origine du
déplacement supplémentaire de 280 000 personnes dans les six
mois à venir. Nkunda garde le contrôle de plusieurs unités,
qui continuent à lui obéir après l'échec des
négociations. La BBC déclare que Nkunda reçoit de l'aide
du Rwanda22(*).
À la fin août, Nkunda retire ses hommes des
brigades mixtes Nkunda/
FARDC et commence à
attaquer les troupes gouvernementales qu'il accusait d'aider les
milices hutues à
assaillir les milliers de Tutsi présents dans le Kivu. Les forces des
Nations Unies considèrent, comme les troupes gouvernementales, Nkunda et
sa milice comme des «bandits».
Début septembre, les forces de Nkunda assiègent
une position gouvernementale au Masisi, et les hélicoptères de la
MONUC transportent des soldats gouvernementaux pour évacuer la ville. Le
5 septembre
2007, après l'annonce
par les forces des FARDC de la mort de 80 hommes de Nkunda suite à un
raid mené par un hélicoptère
Mil Mi-24, Nkunda appelle
le Gouvernement à revenir vers les termes d'un accord de paix. En
septembre, les hommes de Nkunda vident une dizaine d'écoles secondaires
et quatre écoles primaires, où ils enrôlent de force des
enfants-soldats. Selon
les Nations Unies, les filles furent emmenées comme esclaves sexuelles,
les garçons comme soldats. Le Gouvernement impose le
15 octobre
2007 une date limite au
désarmement des troupes de Nkunda. Cette limite passe sans
réaction, et le 17 octobre, le Président
Joseph Kabila ordonne
à ses troupes de se préparer à la maîtrise des
troupes de Nkunda par la force. Les troupes du Gouvernement marchent vers la
position principale de Nkunda c'est-à-dire
Kichanga.
Des milliers de civils fuient les combats entre les troupes de Nkunda et les
Mai-Mai pro-gouvernementaux
de
Bunagana
vers
Rutshuru. Au début
Novembre 2007, les troupes de Nkunda s'emparent de la ville de
Nyanzale,
à environ 100 km au nord de
Goma. Trois des villages des
environs sont également pris, et les positions de l'armée
gouvernementale abandonnées. Au début décembre, Une
offensive gouvernementale menée par la 82e brigade reprend la
localité de
Mushake
et la route qui la traversait. Ceci suit l'annonce par la
MONUC que celle-ci
était prête à fournir de l'appui aux offensives
gouvernementales. Lors d'une conférence régionale à
Addis-Abeba, les
États-Unis, le
Burundi, le
Rwanda et l'
Ouganda s'engagent à
soutenir les forces gouvernementales et non pas les «forces
négatives». Nkunda reprend cependant Mushake le
10 décembre,
ainsi que la localité de
Karuba.
Avec l'ampleur des revers subis par l'armée gouvernementale en
2007, des doutes se font quant
à sa capacité opérationnelle et à la
fidélité de ses dirigeants en place, incapables de
résister avec 20 000 hommes aux 4 000 miliciens de Nkunda. Les
pertes gouvernementales subies au cours de la
bataille
de Mushake sont considérables : Sur environ 6 000 hommes
engagés, 2 600 militaires ont été tués et 600
blessés23(*). Le
matériel saisi par les rebelles est également
impressionnant : 6 tonnes de
munitions, dont des
munitions d'hélicoptères, 45 blindés, 20
lance-roquettes,
15 000 caisses de
grenades, 6 000
caisses de
fusil militaire
FAL, ainsi que 15 missiles
sol-air. C'est la plus importante défaite de l'armée
gouvernementale depuis la
bataille
de Pweto en novembre 2000. La fiabilité de certaines troupes de la
MONUC est également mise en cause.
Nkunda annonce le
14 décembre
qu'il est ouvert à des pourparlers de paix.
Les partisans
de Nkunda décident de participer aux négociations, mais quittent
la
conférence de
Goma le
10 janvier
2008, après la tentative
d'arrestation de l'un d'entre eux. Ils reviennent cependant à la table
des négociations. Les pourparlers se déroulent jusqu'au
21 janvier
2008, et un Accord est presque
trouvé le
21 janvier
2008. Il est finalement
reporté au
23 janvier malgré
des discussions liées aux cas de crimes de guerre. Le Traité de
paix est finalement signé le 23 janvier, et inclut une
déclaration de cesser-le-feu immédiat, un retrait du Nord-Kivu
des troupes de Nkunda, le retour au village de milliers de civils, et
l'immunité des forces de Nkunda. Ni les
Forces
Démocratiques pour la Libération du Rwanda ni le Gouvernement
du
Rwanda n'ont pris part aux
discussions, ce qui pourrait hypothéquer la valeur de l'accord. En mai
2008, l'accord de paix tient toujours, mais n'a pas empêché des
combats entre FARDC et FDLR, et les civils continuent à être
victimes d'atrocités. Le
28 octobre, la ville de
Rutshuru est menacée
par les rebelles.
Goma est également
assiégée
et attaquée, ce qui motive une intervention d'
hélicoptères
de la
MONUC contre les rebelles. La
ville est cependant abandonnée par les troupes gouvernementales le
29 octobre.
Suite à un retournement surprise
d'alliance, les Gouvernements Rwandais et Démo-Congolais lancent une
opération militaire combinée le 22 janvier 2009 menant à
l'arrestation de
Laurent Nkunda au
Rwanda le même jour au soir.
En dernière analyse, il convient de noter que le
conflit en RDC reste un conflit singulier à plus d'un titre :
Premièrement c'est une guerre intra-étatique, ce
qui en fait une guerre qui s'éloigne de la nomenclature de la guerre
conventionnelle envisagée par la théorie de la guerre et le droit
international applicable en la matière. Mais en même temps c'est
une guerre internationale en ce sens qu'elle a connu l'implication, par milices
locales et armées gouvernementales interposées, de près
de neuf pays africains différents qui se sont affrontés sur le
sol Démo-Congolais.
Deuxièmement, du fait de l'étendue du territoire
et des coûts qu'impliquerait le déploiement total d'une
armée régulière, le conflit Démo-Congolais n'a pas
été une guerre de grandes batailles et de
lignes de fronts
clairement définies, mais fut une guerre de positionnement autour des
points stratégiques tels les ports et aéroports, les routes
importantes et les points d'exploitation des minéraux précieux et
des essences rares du Congo oriental.
Troisièmement, cette guerre est très
marquée par le facteur économique. En effet, l'engagement de la
plupart des protagonistes de cette guerre fut motivé par l'ambition de
faire main basse sur les nombreuses richesses du sous-sol
Démo-Congolais. Le
Rapport final du Groupe
d'experts sur l'exploitation illégale des ressources naturelles et
autres formes de richesses de la République Démocratique du Congo
publié par l'ONU en 200224(*) fait ainsi état de l'implication, au plus
haut niveau, de la RDC elle-même, du Rwanda, de l'Ouganda et du Zimbabwe
dans le pillage des ressources minières de la RDC.
Quatrièmement cette guerre est
caractérisée par un coût humain énorme eut
égard aux nombreuses pertes civiles, aux multiples cas de viols, aux
atrocités de tous genres commises par tous les protagonistes au conflit.
On dénombre ainsi près de 3.300.000 morts selon International
Rescue Commitee25(*)et
3.400.000 déplacés internes. La RDC est l'un des pays ayant le
plus grand nombre d'enfants soldats soit 15.000 à 30.000 selon plusieurs
sources, les plus jeunes étant âgés d'à peine 8 ans.
Selon des associations des droits de la femme, d'octobre 2002 à
février 2003, 5.000 cas de viol ont été
perpétrés dans la zone d'Uvira, soit 40 cas par jour.
Paragraphe 2 : Le conflit Burundais
Le conflit Burundais, tout comme le génocide du Rwanda
voisin, résulte de la manipulation par la puissance coloniale et les
gouvernements post-coloniaux, du facteur ethnique dans le cadre d'une politique
de gestion hégémonique et démagogique du pays. C'est que
l'histoire coloniale du Burundi, comme celle de l'Afrique en
général, est faite de la manipulation et de la création de
différences entre les peuples, là où elles sont le moins
apparentes, voire inexistantes26(*).
Historiquement, le peuple Barundi, composé des
Bahutu, des Batutsi et des Batwa se reconnaissait
dans une communauté de langue, le Kirundi, qui véhicule un riche
patrimoine culturel commun, la même sagesse et la même vision du
monde. Avant la colonisation, les Barundi avaient une
communauté de religion. Ils croyaient à un être
supérieur «Imana» créateur, dispensateur de
vie, maître du monde et de tous les êtres qui s'y trouvent. Ils
célébraient le culte du Kiranga avec la cohésion
caractéristique de tous ceux qui partagent une même
religion27(*). Il aurait
donc été probant, lorsqu'on sait que Bahutu,
Batutsi et Batwa ont une même culture et qu'une ethnie
s'identifie entre autre par sa culture et sa tradition, de convenir que l'usage
du terme "ethnie" pour distinguer ces identités est inadéquat.
Mais, les colons belges qui arrivèrent au Burundi en 1919 et qui furent
émerveillés par l'organisation de la monarchie en conclurent
à l'existence d'une race ou une ethnie supérieure qui ne pouvait
être faite que pour diriger les autres. Ils projetèrent donc sur
les tutsis le fantasme d'origine hamite qui participa à façonner
l'imaginaire différentiel des ethnies. La première
conséquence de cette classification fut la partialité dans
l'accès à l'éducation de plus de tutsis que d'hutus,
créant ainsi la première différenciation sociale entre les
élites. L'arme de la division ethnique fut également
utilisée et de façon déterminante par les colons contre
les leaders nationalistes, afin de mater les velléités
indépendantistes qui se manifestèrent dans les décennies
50 et 60 tant au Burundi qu'au Rwanda et au Congo voisins. De même, une
partie de l'élite post-indépendance au Burundi fit un usage
récurrent de l'arme du « diviser pour
régner » comme moyen d'accès et de conservation du
pouvoir. La conséquence la plus catastrophique de l'usage de ce mode de
domination fut la radicalisation de la haine qui aboutit au massacre des Hutus
en 1973 et à celui des Tutsis en Octobre 1993, date constituant le
point de départ du conflit objet de notre étude.
Les négociations entreprises en vue de résoudre
la crise ont abouti aux Accords de paix du 28 août 2000. Ces Accords
prévoyaient un Gouvernement de transition avec deux présidents,
l'un issu du FRODEBU (parti à majorité hutu) et l'autre de
l'UPRONA (parti à majorité tutsi). Le Gouvernement de transition
avait pour mission de rédiger une nouvelle Constitution avec les
factions rebelles, et d'organiser de nouvelles élections
démocratiques. Mais, le
7 juillet 2003, les
Forces
Nationales de Libération (FNL), mouvement rebelle
Hutu, lancent une attaque sur
Bujumbura. Les combats
avec les forces gouvernementales, qui durent une semaine, sont
extrêmement violents, faisant plus de 200 morts, et marquent une nouvelle
escalade dans la
guerre civile du
Burundi.
Le
16 novembre 2003,
réunis à
Dar es Salaam en
Tanzanie, des dirigeants
africains de la région donnent trois mois aux
Forces
Nationales de Libération (FNL) pour entamer des discussions de paix
avec les autorités du
Burundi. Les rebelles
Hutus rejettent l'ultimatum, et
multiplient les attaques contre plusieurs quartiers de
Bujumbura.
Le
5 janvier 2004, les
rebelles
hutus Burundais des
Forces
Nationales de Libération (FNL), dernier mouvement en guerre contre
le Gouvernement de transition du
Burundi, acceptent de
négocier avec le Président Burundais
Domitien
Ndayizeye, mettant ainsi un point final à près d'une
décennie de violences. Au cours de la même année, une
nouvelle Constitution est rédigée collégialement avec
l'UPRONA, le FRODEBU et le CNDD-FDD. Cette Constitution prévoit un
Gouvernement ouvert à toutes les composantes ethniques. Il comprend
au plus 60% de ministres et vice-ministres hutus et au plus 40% de ministres et
vice-ministres tutsis. . Il est précisé que ce gouvernement
doit inclure un minimum de 30% de femmes. Le Ministre de la Défense et
le Ministre de l'Intérieur doivent être d'une ethnie
différente. L'article 164 de la nouvelle Constitution stipule que
« l'Assemblée nationale est composée d'au moins
cent Députés à raison de 60% de hutu et de 40% de tutsi, y
compris un minimum de 30% de femmes élues au suffrage universel direct,
et de trois députés issus de l'ethnie Twa (Pygmées)
cooptés conformément au code électoral ».
Le 1er Alinéa du même Article précise que
« si les résultats des votes ne reflètent pas les
pourcentages susvisés, il sera procédé au redressement des
déséquilibres par cooptation ». Malgré
l'appel de certains politiciens à boycotter cette nouvelle Constitution,
elle a été adoptée par référendum populaire
à plus de 90% de « OUI » le 28 mars 2005 et est
ainsi entrée en vigueur.
Paragraphe 3 : Le conflit Angolais
La guerre qu'a connue l'Angola est de loin la plus ancienne et
la plus longue de toutes les guerres d'Afrique centrale. Elle trouve son
origine dans les revendications indépendantistes formulées dans
ce pays dès les années 50 et a pour acte déclencheur
l'attaque, le 4 février 1961, de la prison de Luanda afin d'en
libérer les prisonniers politiques, et le massacre de près de
2000 colons portugais qui s'en suivra. Les représailles de
l'armée portugaise font 10 000 victimes dans la communauté noire
et des centaines de milliers d'Angolais doivent fuir vers le
Congo-Léopoldville. Les revendications nationalistes angolaises sont
portées par trois groupes armés à savoir :
· Le Mouvement populaire pour la libération de
l'Angola (MPLA) d'Agostinho Neto ;
· Le Front National pour la Libération de l'Angola
(FNLA) d'Holden Roberto soutenu par le Congo de Mobutu, la Chine, Israël,
la France, la Roumanie ;
· L'Union Nationale pour l'Indépendance Totale de
l'Angola (UNITA) de Jonas Savimbi expression de l'ethnie Mbundu soutenue par
les États-Unis.
En guise de représailles, le Portugal impose un service
militaire et envoie des centaines de milliers soldats pour tenir l'Angola. Le
25 avril 1974, un groupe de capitaines de l'armée portugaise renverse le
régime dictatorial de Marcello Caetano au Portugal. Malgré les
tentatives du nouveau pouvoir colonial d'établir une transition
pacifique marquée par un partage du pouvoir, les troupes des trois
mouvements indépendantistes commencent à se battre les unes
contre les autres pour le contrôle de la capitale. La ville sombre alors
dans l'émeute et les pillages. En très peu de temps, le MPLA
prend possession de la capitale Luanda et défait le FNLA mais ne
parvient pas à éliminer l'UNITA. A partir des années 70,
le pays s'enfonce dans une guerre civile aux apparences ethniques, mais dont
les contours épousent la confrontation bipolaire post guerre froide.
Dès lors, le conflit oppose d'une part le Mouvement Populaire de
Libération de l'Angola (MPLA ou Movimento Popular de
Liberação de Angola), fédérant les métis et
les citadins soutenus par l'Union soviétique et Cuba, et d'autre part,
l'Union pour l'Indépendance Totale de l'Angola (UNITA ou União
Nacional para la Independencia Total de Angola), un mouvement regroupant
surtout les Ovimbundus (40% de la population) et appuyé par les
Occidentaux (États-Unis et Royaume-Uni) et l'Afrique du Sud. En 1979,
Augusto Neto décède et Edouardo Dos Santos lui succède
à la tête du MPLA. La guerre civile continue avec un peu moins de
vigueur. En 1991, les accords de Bicesse aboutissent à un cessez-le feu
et à l'organisation d'élections générales
supervisées par les Nations Unies. Le MPLA remporte 49% des suffrages
contre 40% pour l'UNITA. Jonas Savimbi, leader historique de l'UNITA,
dénonce des fraudes et reprend les armes, cette fois sans plus aucun
soutien international.
En 1997, un Gouvernement d'union nationale est formé
avec Jonas Savimbi, mais les combats reprennent après que Savimbi
eût dénoncé, selon lui, le manquement du MPLA à ses
obligations et, le 28 août 1997, le Conseil de Sécurité des
Nations unies impose des sanctions contre l'UNITA.
L'année 1998 constitue un revirement important dans
l'évolution de cette guerre et marque, dans le cadre de notre
étude, le point de départ de la séquence conflictuelle qui
aura retenu notre attention. En effet au mois de Décembre 1998, le MPLA
tente alors le coup de grâce et déclenche une offensive militaire
massive contre le quartier général de L'UNITA et ses principaux
bastions. Les opérations se soldent par un succès
général malgré la fuite de Savimbi.
Le 22 février 2002, Jonas Savimbi, est finalement
abattu lors d'un assaut de l'armée gouvernementale et le 4 avril de la
même année, un nouvel accord de cessez-le-feu est signé
mettant fin officiellement à 27 ans d'un conflit sanglant (1975 -
2002)28(*).
Paragraphe 4 : La crise centrafricaine de 1996 à 2003
La crise centrafricaine de 1996 à 2003 a pour fondement
des revendications ethnico- corporatistes ayant fait l'objet d'une
récupération politique. En effet, l'élection
d'Ange-Félix Patassé à la présidence de la
République Centrafricaine en 1993 n'a fait que reproduire la trajectoire
politique habituelle en Afrique, par laquelle des groupes sociaux
définis principalement sur une base ethnique ou régionale se
succèdent au pouvoir (Zongola, 2003 : 03).
La première manifestation de cette crise est la
mutinerie du 18 au 22 avril 1996 au Camp Kassaï à Bangui.
Même si la raison avouée de cette mutinerie est le retard dans le
paiement des arriérés de solde des soldats, il faut y lire la
grogne des soldats d'origine Yokoma, l'ethnie de l'ancien président
Kolingba qui jouissaient, du fait de leur appartenance ethnique, d'un
traitement de faveur au sein de l'armée et qui sont
délaissés par le président Patassé. Ce dernier
leur préfère des soldats de sa propre tribu, les Saras, à
qui il octroie toutes sorte d'avantages. La mutinerie prit fin à la
suite d'un accord entre les mutins et les autorités du pays relatif au
règlement du problème des soldes impayés.
Les revendications des soldats n'ayant pas été
prises en compte, on assistera, un mois plus tard, c'est-à-dire le 18
Mai 1996, à une nouvelle mutinerie. Comme la première, cette
mutinerie est, en toute vraisemblance, liée à
l'irrésolution du problème des soldes et à celui de la
discrimination dont les soldats Yakomas se sentaient victimes. Mais, aux
revendications d'ordre corporatiste est venue s'ajouter une dimension
politique, les mutins et une grande partie de l'opposition réclamant la
démission du président Patassé. Contrairement à la
première, cette mutinerie sera plus dévastatrice causant
notamment des centaines de morts même parmi les civils et la destruction
de plusieurs entreprises économiques. La mutinerie prit fin le 5 juin
1996, suite à l'adoption d'un protocole d'accord politique (PAP)
prévoyant, entre autres, une loi d'amnistie générale pour
les mutins, la formation d'un gouvernement d'union nationale et un programme
minimum commun (PMC) de gouvernement. Malgré quelques marques de bonne
foi de la part du Président Patassé, perceptibles notamment dans
la nomination de Jean Paul Ngoupandé au poste de Premier Ministre et la
tenue des Etats Généraux de la Défense Nationale (EGDN) du
19 août au 9 septembre 1996, la situation ne s'améliore pas
à cause des réticences de certains barons du régime
Patassé déterminés à sauvegarder leurs
privilèges.
Cet atavisme dans la négociation et le processus de
sortie de la crise sera à l'origine d'une troisième mutinerie le
15 novembre 1996. Cette mutinerie sera caractérisée par une
généralisation et une radicalisation de l'ethnicisation
marquée par la constitution de blocs sur une base ethnique tant au sein
de l'armée qu'au milieu de la population elle-même. Suivant leurs
régions d'origine, les résidents de Bangui se regroupent en deux
zones antagonistes et font recours aux langues ethniques pour communiquer en
lieu et place du Sango, la langue nationale. L'armée elle-même est
divisée entre « loyalistes » et
« mutins ». Cette scission au sein de la population et de
l'armée perdurera jusqu'à la signature le 25 janvier 1997, des
«Accords de Bangui», signature qui marque en outre la fin de
la troisième mutinerie des FACA et constituaient un préalable
à la tenue des Conférences de Réconciliation Nationale
(CRN).
Mais, une fois politisée, la grogne des militaires
deviendra un conflit ouvert sur le partage du pouvoir entre le régime
Patassé et l'ensemble de l'opposition politique. Car les mutineries ne
furent qu'une manifestation, quoique brutale, de la crise de l'Etat en
général et de la résistance des détenteurs du
pouvoir à la démocratisation en particulier. (Zongola,
2003 :5). Le président Patassé et son entourage se sont en
effet rendus coupables du blocage du processus de réconciliation
nationale depuis les mutineries de 1996-1997. Qu'il s'agisse du partage du
pouvoir, du processus électoral, ou de la restructuration des forces
armées, le pouvoir usait de toutes sortes d'astuces pour rendre vains
les gains réalisés par l'opposition dans les négociations
sous la médiation internationale. Cet état de chose a rendu le
terrain propice à une nouvelle rébellion, celle du
Général François Bozizé qui, à la faveur du
coup d'Etat du 15 mars 2003 prendra le pouvoir à Bangui. Mais ce
changement à la tête de l'Etat a-t-il suffit pour apporter une
solution définitive à l'insécurité en
Centrafrique ? Quel fut l'impact de ce changement dans la
résurgence de groupes rebelles dans ce pays ?
Paragraphe 5 : La rébellion centrafricaine de 2003 à
2008
La crise que traverse actuellement la RCA s'entend dans le
double sens d'une continuité et d'une rupture d'avec l'atmosphère
politique qui a précédé le gouvernement Bozizé.
Les faits sont simples. Arrivé au pouvoir en 2003
à la suite d'un coup d'Etat, le Général Bozizé
avait pour leitmotiv la lutte contre la pauvreté et la pratique d'une
démocratie participative ayant pour fondement les recommandations des
Conseils de Réconciliation Nationale (CRN). Cependant, dans la pratique,
malgré une volonté affirmée de changement, on
constate la persistance des fléaux décriés depuis
l'époque de l'ancien chef d'Etat Ange-Félix Patassé et qui
ont causé la décrépitude du tissu socio-économique
centrafricain et le blocage du débat démocratique. En sommes, les
changements à la tête de l'Etat n'ont pas été suivis
d'une amélioration de la situation Socio- économique et
même politique du Pays. La pauvreté et le chômage restent
perceptibles et continuent à jouer leur rôle de facteur incitateur
de crise et d'instabilité nationale. Les revendications
socio-économiques sont à la base de plusieurs revendications
actuelles de l'opposition centrafricaine, qu'elle soit armée ou non.
Cette crise est aussi marquée par un changement de
rôle et la résurgence du phénomène de
criminalité transfrontalière. En ce qui concerne les rôles,
on observe une alternance entre les groupes au pouvoir et l'opposition, les
rebelles d'hier étant devenus les décideurs d'aujourd'hui et vis
versa. Les barons du régime Patassé qui ont fui avec leur patron
sont entrés en rébellion et se sont pour la plupart
expatriés dans l'espoir de revenir d'une façon ou d'une autre au
pouvoir.
La résurgence du phénomène de la
criminalité transfrontalière constitue un des traits
caractéristiques de cette crise. La criminalité
transfrontalière est ici le fait des zaraguinas, ces groupes
d'individus qui, selon les occasions, se constituent en rebelles ou en
coupeurs de route, se servant dans le deux cas de la frontière comme
zone de retranchement. En d'autres termes, les opposants au régime
Bozizé se sont retranchés au Soudan, d'où ils partent
pour couper les routes notamment dans le Nord de la Centrafrique. Cet
état de chose a pour conséquence immédiate de faire
prévaloir un climat d'insécurité permanente fortement
préjudiciable à la reconstruction nationale et au projet de
construction de l'identité sécuritaire de la sous-région,
quand on sait que la présence de ces groupes est très souvent un
motif de discorde entre les Etats de la zone.
Il faut au surplus préciser que la situation
d'insécurité dont souffre la Centrafrique actuellement est une
répercussion de la guerre qui sévit au darfour. En effet, cette
crise a, par les différents flux de personnes et d'ALPC qu'elle
génère, tendance à s'exporter vers le Tchad et la
Centrafrique qui sont des pays limitrophes et qui constituent en fait la ligne
de front où s'opposent les différentes ambitions et
intérêts qui s'opposent au Darfour29(*).
La conséquence de cette combinaison de faits est
qu'à partir de 2005, plusieurs villes du nord de la RCA à
l'instar de Tiringulu, de Birao et de Gbadolite tomberont entre les mains des
rebellions qui, autre fait nouveau, opèrent parfois en coalition. Parmi
les groupes rebelles on peut citer entre autres : l'Union des Forces
Démocratiques pour le Rassemblement (UFDR), Le Mouvement des
Libérateurs Centrafricains pour la Justice (MLCJ), le Front
Démocratique du Peuple Centrafricain (FDPC), l'Armée Populaire
pour la Restauration de la Démocratie (APRD). Tous ces groupes
opèrent dans un dessein avoué, celui de prendre le pouvoir par
les armes à partir de leurs bases du nord.
Paragraphe 6 : Le conflit du Pool au Congo
La crise qu'a connu la département du Pool dans le
sud-est du Congo reste atypique par les acteurs, les méthodes et les
motivations qui l'on portée. En effet, en plus des revendications
d'ordre socio-économique et pseudo-identitaire rencontrées dans
la plupart des rébellions d'Afrique centrale, on retrouve au centre de
ce conflit un facteur mystico-religieux très important.
Tout commence en 1997 lorsque le Révérend
Pasteur Ntumi, de son vrai nom Frédéric Bitsamou dit avoir une
révélation de Dieu qui lui ordonne de se réfugier dans le
Pool et de préparer les jeunes à se défendre contre une
invasion militaire. Il convainc plusieurs rebelles ninjas auparavant
ralliés à
Bernard
Kolélas, son entourage composé pour la plupart des anciens
fous qu'il a soigné30(*), et des jeunes désoeuvrés,
réputés être des toxicomanes, à se rallier à
sa cause. A la tête du Conseil National de la Résistance (CNR),
l'armée ainsi constituée, Ntumi lancera l'attaque du 18
décembre 1998 contre les forces gouvernementales. De victoire en
victoire, la guérilla du Pasteur Ntumi va se constituer un
véritable arsenal d'armes et munitions issues des armes restées
en circulation depuis les combats de 1995-97, des armes obtenues dans le cadre
du Trafic de drogue, et enfin, celles prises sur les policiers défaits
lors des combats.
L'ambition de l'homme de Dieu est très
claire : Libérer le Pool et s'en servir comme base arrière
dans la quête du pouvoir de Brazzaville.
Mais, la barbarie et la cruauté des ses méthodes
vont finir par jeter l'opprobre sur ses ambitions et une partie de son
armée de Ninjas désertera pour Brazzaville,
espérant être récupérée par le gouvernement.
Entre 2004 et 2007 le Président Sassou Nguesso fera un
ensemble de concessions dont l'objectif sera de se rallier le Pasteur. Ainsi,
en 2004 le Président Sassou lui propose un poste de
Député qu'il refuse. A la longue, en 2005, l'armée
déloge les Ninjas de la résidence octroyée
à Ntumi par le Président Sassou à Brazzaville.
Assiégés par l'armée, 300 Ninjas sont contraints
à repartir à pied dans le Pool. Au cours de la même
année, certains miliciens ninjas quittent le Pasteur pour se rallier
à leur ancien chef Kolélas rentré au pays. En Mai 2007,
le président Denis Sassou Nguesso nomme Ntumi
« Délégué Général
chargé de la promotion des valeurs de paix et de la réparation
des séquelles de guerres ». Le 6 Juin 2007, Ntumi fait une
sortie triomphale devant le Premier Ministre, des membres du gouvernement,
Bernard Kolélas et la communauté internationale à
l'occasion de la concertation citoyenne des ressortissants du Pool. Mais sa
prise de fonction, arrêtée pour le 10 Septembre avorte à
cause de la présence inquiétante des hélicoptères
de guerre de l'armée gouvernementale au dessus de la ville. Il retourne
dans son fief où il dit être en attente d'une prochaine
décision le concernant.
Le dialogue initié entre le gouvernement et la
rébellion du Pool aura été d'un impact décisif dans
la décrispation de la situation et l'ouverture qui mènera plus
tard à la dissolution, le 09 Juin 2008 à Kinkala, chef-lieu du
Pool, de la branche armée du CNR par le Pasteur Ntumi lui-même.
Paragraphe 7 : La
rébellion Tchadienne
L'histoire politique de la république Tchadienne
semble être l'une des plus tumultueuse d'Afrique centrale, marquée
qu'elle est par la récurrence des rébellions et la
fréquence des coups d'Etats. En fait, à l'exception de
François Tombalbaye, le premier Président de cet Etat, tous ses
dirigeants ont employé la voie des armes pour parvenir au pouvoir.
Devenu République autonome en 1958, le Tchad accéda à
l'indépendance le 11 août 1960, sous la présidence de
François Tombalbaye qui est assassiné en 1975. Après
l'assassinat de Tombalbaye, le pouvoir échoit au général
Félix Malloum, lui-même renversé par Goukouni Oueddei
à la suite de la première bataille de Ndjamena en 1979. En 1980,
la seconde bataille de Ndjamena permit à Goukouni Oueddei
d'évincer son rival, Hissène Habré. En 1982, Goukouni
Oueddei est renversé à son tour par Hissène Habré.
En 1990, Hissène Habré fut chassé du
pouvoir par Idriss Déby Itno. L'arrivée au pouvoir du MPS
(Mouvement Patriotique du Salut), d'Idriss Déby va inaugurer un nouveau
cycle de la vie politique tchadienne. Il annonce très rapidement la
nécessité de rompre avec les vieilles habitudes des partis
uniques et des seigneurs de guerre, prend des mesures de libéralisation,
dissout la Direction de la Documentation et de la Sécurité (DDS),
la police politique crée par son prédécesseur
Hissène Habré et crée une commission d'enquête sur
les crimes de ce dernier. Il annonce la rédaction d'une nouvelle
constitution et fait formellement adopter le multipartisme en octobre 1991.
Toutes ces mesures ne suffiront pourtant pas à
dégriser l'atmosphère politique : dans les faits, les
pouvoirs du président restent immenses et inégalés et on
assiste à un foisonnement de groupes d'opposition armée dont les
plus représentatifs sont l'Union des Forces pour la Démocratie et
le Développement(UFDD) de Mohamad Nourri, le Rassemblement des Forces
pour le Changement (RFC) de Timan Erdimi et de son frère, tous deux
d'ethnie Zaghawa étant neveux d'Idriss Déby, le Front Uni pour
le Changement (FUC) et l'UFDD-fondamentale dirigée par Makaye. En fait,
le déséquilibre dans la répartition des pouvoirs et la
duplicité dans la pratique démocratique ne sont pas les seuls
facteurs explicatifs de l'instabilité qui prévaut au Tchad car,
elle est renforcée par la prégnance d'une corruption abyssale, de
la pauvreté, du favoritisme et du néo-patrimonialisme. Une autre
raison de l'instabilité tchadienne est à rechercher dans
l'antagonisme avec le soudan voisin qui se traduit par une guerre par
procuration, que se livrent ces deux pays. Ainsi, Le Tchad soutiendrait les
rebelles au régime de Khartoum, alors que le Soudan servirait de base
arrière aux opposants d'Idriss Déby. Dans cette guerre non
conventionnelle, le Tchad semble bénéficier du soutien de la
France, des Etats-Unis et de la Libye, face au Soudan soutenu par l'Iran et la
Chine.
Malgré quelques initiatives qui, du reste, ne tendent
qu'à assurer la sécurité des réfugiés dans
la zone frontalière Tchad/Soudan/RCA, l'instabilité reste
prégnante au Tchad et appelle encore une intervention opportune du
COPAX.
Paragraphe 8 : La crise Santoméenne de Juillet 2003
Le coup d'Etat qu'a connu la presqu'île de Sao Tome et
Principe n'est pas très différend de ceux qui ont traversé
le reste de la sous-région. Il est mu par les mêmes
considérations et par le même type d'acteurs.
A l'origine de ce coup d'Etat, on retrouve l'extrême
pauvreté de la majorité de la population et la prégnance
de malversations visant à fausser le jeu politique. En fait, Sao
Tomé et Principe, une ancienne colonie portugaise d'environ 140 000
habitants, est constituée de plusieurs îles situées au
large de l'Afrique de l'Ouest dépendant essentiellement de l'aide
internationale et de l'agriculture, et où le revenu moyen est de 280
dollars par an31(*). Comme
on peut le voir, le pays croule sous une misère prégnante. Mais,
en face de cette misère extrême, on trouve aussi une richesse
extrême, détenue par une poignée de personnes qui
conservent le pouvoir. Au surplus, il est fait état de quelques
malversations visant à bloquer ou détourner le fonctionnement des
institutions démocratiques. Enfin, la découverte de nombreux
gisements pétroliers dans ce pays a eu pour effet d'aiguiser les
appétits des nationaux partisans de la méthode forte, et des
états voisins qui entrevoient ici une cause de projection dans cette
presqu'île. En effet, de grandes compagnies pétrolières,
dont Exxon Mobil et Royal Dut Shell, tout comme le Nigeria,
s'intéressent à l'exploitation de cette zone. Dans les fait, on
observe une cassure politique entre le pouvoir et le peuple, cassure
accentuée par les facteurs socio-économiques
énoncés plus haut. A titre d'illustration, le Président,
Fradique de Menezes, a dissout en janvier 2003 le Parlement, en raison d'un
désaccord sur le droit de négocier des contrats d'exploitation
avec les compagnies pétrolières. Le Parlement a repris ensuite
ses activités, mais une nouvelle querelle a éclaté
après que le Président eut affirmé avoir utilisé,
pour sa campagne, de l'argent que lui aurait versé une compagnie
pétrolière.
Dans le cours de l'année 2003, le pouvoir en place
devra faire face à plusieurs incidents, des émeutes qui
constituent en fait des manifestations de la grogne et du mécontentement
des populations. Le mouvement d'humeur atteint son paroxysme le 16 juillet
2003, lorsque, profitant de l'absence du Président Fradique de Menezes
en visite privée au Nigeria, des putschistes, dirigés par le Chef
du Centre d'Instruction Militaire de Sao Tomé, le Major Fernando Pereira
connu sous le nom de « Cobo », ont pris le pouvoir
sans effusion de sang certes, mais de façon antidémocratique. Le
plaisir de cette junte sera de très courte durée car elle tombera
sous le coup de la critique internationale et sous la pression des institutions
internationales, avec en première place l'action en diplomatie
préventive de la DAPD du COPAX, ce qui finira par aboutir à une
restauration de la légalité constitutionnelle.
SECTION C : ANALYSE DE LA STRUCTURE DES CONFLITS EN AFRIQUE
CENTRALE
Après avoir, grâce à la
présentation sommaire que dessus, circonscrit le cadre, le contexte et
les étapes des situations interpellant notre attention, nous envisageons
dans cette section procéder à une identification des
différents éléments qui structurent les conflits en
Afrique Centrale. L'identification et la maîtrise de ces facteurs nous
ont semblé fondamentales en ceci qu'elles fournissent une grille de
lecture plus efficiente et rendent plus saisissables les aspects profonds de la
polémologie en Afrique centrale. En d'autres termes, nous essayerons ici
de ressortir les considérations fondamentales qui suscitent et portent
les conflits dans notre sous-région afin de pouvoir entrevoir les canaux
éventuels de l'action ou de l'intervention du COPAX.
Analysant la conflictualité de l'Afrique subsaharienne,
Michel Kounou démontre qu'elle est le fait, non seulement de facteurs
internes à l'Afrique et aux Etats en conflit, mais résulte aussi
des implications et des projections externes aux Etats africains
Reconnaissant la pertinence de cette recension des
éléments structurateurs des conflits, nous l'adaptons aux
différentes crises que nous avons recensées, les regroupant au
sein de deux grandes catégories à savoir les
considérations endogènes et les considérations
exogènes des conflits en Afrique centrale.
Paragraphe 1 : Les considérations endogènes des
conflits en Afrique centrale
Nous rangerons sous cette rubrique tous les facteurs qui ont
leurs origines à l'intérieur des zones en conflits
a) Les considérations historiques et culturelles
L'élément culturel occupe une place
particulière dans la polémologie de l'Afrique centrale. Il est
perceptible dans six des huit conflits qu'a connus la sous-région. En
effet, la plupart des crises qui se sont déroulées dans cette
zone ont été portées ou renforcées par la fibre
identitaire.
Des auteurs tels Kounou (2001) Tshiyembe (2003) et Eteki
Mboumoua (2001) s'accordent à penser que cet état de chose est le
résultat d'un tracé frontalier irréaliste
hérité de la colonisation et qui n'a pas tenu compte des
identités et des particularités culturelles. Du fait de ce
tracé, des nations, des familles ont été arbitrairement
divisées tandis que des cultures hétérogènes
étaient condamnées à une cohabitation
forcée. C'est de ce tracé hasardeux que résulte
l'hétérogèneïté des Etats africains, l'enjeu
étant maintenant, pour ces Etats, de parvenir à la construction
d'une véritable nation calquée sur les limites de l'Etat. La
situation sécuritaire de l'Etat dans ces conditions se situe dans un
continuum qui va de la déconstruction de l'Etat par l'exacerbation des
différences et des clivages, à la construction nationale sur la
base de la promotion de l'unité et de la cohésion au sein de
l'Etat. Cette affirmation est d'autant plus fondée que
« la plupart des guerres de frontières s'avèrent
attribuables à un tracé colonial subversif, contestable et
contesté; et non d'abord à une animosité
supposément bestiale entre peuples africains » (Kounou,
2001 :237).
L'action insidieuse du pouvoir colonial et des acteurs
post-coloniaux ne s'est pas limitée à un tracé frontalier
fantaisiste. Elle est aussi perceptible dans la création, la
manipulation et l'exacerbation de
l'hétérogèneïté ainsi construite dans
l'optique de la conservation du pouvoir ou du renversement du pouvoir en place.
Ainsi explique-t-on le fait que des peuples ayant un passé commun et
partageant des pratiques séculaires en viennent, sous l'instigation
d'acteurs politiques peu scrupuleux, à rechercher leur extinction
mutuelle. Ainsi, la guerre au Rwanda et au Burundi a opposé les peuples
Hutu et Tutsi qui cohabitent pourtant harmonieusement dans les deux Etats
depuis des millénaires32(*); et au-delà des cas Rwandais et Burundais, de
telles motivations ont porté les conflits de la RDC, de la RCA, du Pool
au Congo et la rébellion tchadienne.
Dans une optique de prévention structurelle, la
solution aux menaces d'ordre historique et culturel consisterait selon Ayissi
A. (2001), Eteki Mboumoua (2001), Mwayila Tshiyembe (2003) en la promotion, au
sein de la société, de valeurs de tolérance, de
communautarisme, consolidant le « vouloir vivre
ensemble », aboutissant à la naissance d'une nation
nouvelle, d'une nation arc-en-ciel, riche de ses différences mais forte
de son unité. Nous pensons, en accord avec le préambule de l'Acte
Constitutif de l'UNESCO que : « les guerres et les conflits
prennent naissance dans l'esprit des hommes, c'est dans l'esprit des hommes que
doivent être élevées les défenses de la
paix »
b) Les considérations politiques
L'histoire politique de l'Afrique est traversée par
plusieurs cas de recours à la violence comme mode d'interaction
politique avec l'autre. Dans ces contextes, « la guerre est un
acte politique, elle surgit d'une situation politique et résulte d'un
motif politique » (Aron, 1962 : 35). Ceci veut dire que
toute crise, toute guerre, résulte de l'incompatibilité des
conceptions, des méthodes et de mécanismes de répartition
et d'exercice du pouvoir, conduisant les belligérants à
rechercher à imposer leur conception par la violence ou la
contrainte.
Il faut cependant préciser que cet état de chose
relève d'une perception erronée de la relation politique, qui
fait du conflit un mode normal du débat politique. L'adversaire
politique ou, du moins, l'opposant dans ce contexte est
appréhendé comme un ennemi à détruire. Cette
perception qui du reste n'est pas spécifique à l'Afrique noire,
trouve sa justification théorique dans les thèses de Simmel G.
(1995 : 19) pour qui le conflit est « l'une des formes de
socialisation les plus actives» et dans les travaux de Karl Schmitt
pour qui l'ennemi est un catégorie normale et même fondamentale de
l'univers politique. En Afrique centrale et dans la période 2000-2008,
cette tendance à la criminalisation de la politique sera perceptible
dans six (Congo, Tchad, RCA, Burundi, RDC et Angola) des huit conflits qui y
seront répertoriés. D'où la conclusion de Mwayila
Tshiyembe (2003 : 10) selon laquelle « la violence
politique est la variable structurelle de la conflictualité qui
ensanglante l'Afrique médiane »
Le recours à la violence comme mode d'accession au
pouvoir est tributaire non seulement des considérations
unilatéralistes et hégémonistes constitutives de
l'imaginaire de la chefferie dans certaines cultures mais aussi de la
prééminence de pratiques telles l'imposition du parti unique, le
recours à la police politique et la restriction des libertés
individuelles. De telles pratiques qui compromettent le dialogue social, seul
exutoire des antagonismes inhérents à toute
société, ne permettent pas d'envisager une alternative
d'expression politique autre que la violence, la révolte et la
rébellion. Dans cette logique, la récurrence de conflits
apparaît être inversement proportionnelle au degré de
participation et d'alternance dans la sphère décisionnelle. En
d'autres termes, plus on participe à l'administration de l'Etat, moins
on a de raisons de se rebeller. Bien plus, des pratiques telles la confiscation
du pouvoir par des procédés non-démocratiques, l'exclusion
d'un groupe des instances décisionnelles, la corruption et le
favoritisme résultent en une marginalisation latente ou manifeste qui ne
laisse aux victimes que l'alternative d'une revendication violente et donc
conflictuelle. Le Pr. Zongola-Ntalaja (2003 :02) analysant la dynamique
des conflits en Afrique centrale fait de la conflictualité dans cette
zone « la conséquence inéluctable de la
résistance des dirigeants autoritaires au processus de
démocratisation dans une conjoncture de crise politique et
économique ». Et Ropivia (2001 :153) de
renchérir : « la pacification de l'Afrique
centrale dépend d'abord de la capacité de ses Etats à agir
sur les deux éléments importants que sont la démocratie et
la décentralisation administrative. ». C'est dire que le
remède à ce niveau consisterait en une pratique
démocratique saine basée sur le respect des droit et
libertés fondamentaux et marquée par la reconnaissance des
spécificités et la pratique d'une gestion participative et
concertée du patrimoine national. Que dire alors de l'influence des
considérations socio-économiques dans la structuration des
guerres ?
c) Les considérations socio-économiques
Fondamentalement, la recherche, l'acquisition et la
conservation des ressources constituent les motivations principales des
guerres. On entre en guerre parce que la société se retrouve dans
un état de déliquescence marqué par la
désuétude des institutions et du tissu
économico-industriel devenu incapable de créer et garantir le
bien être social ou alors d'endiguer la pauvreté, le chômage
et l'inflation. Le recours à la violence dans ce cas est une
révolte contre la rudesse des conditions de vie et est la manifestation
des espoirs portés dans un changement éventuel qui apporterait
une amélioration des conditions de vie. S'il ne fait plus l'ombre
d'aucun doute que les suffrages dans les démocraties occidentales sont
fonction des réalisations socio-économiques des candidats en
lice, alors on devrait comprendre que la persistance d'une pauvreté
extrême dans des sociétés en plus marquées par
l'obstruction des canaux démocratiques du dialogue social, mène
au recours à la violence comme mode de réaction contre la
pauvreté. La Commission Carnegie
(1997 :24) pense dans cette suite que la
généralisation rapide de la pauvreté, comme on a pu le
voir en Somalie au début des années 90, entraîne des
risques accrus de guerres civiles, de terrorisme et de désastre
humanitaire. En d'autres termes, la pauvreté, le
sous-développement ou tout simplement la prévarication
constituent des facteurs aggravateurs de l'instabilité et constituent un
prétexte de choix pour des initiatives polémogènes. Ateba
I. (2001 :79-83) renforce cet avis lorsqu'il affirme : « Le
phénomène de la pauvreté conduit à des situations
où se perdent toutes les valeurs. L'homme qui a faim, n'est pas un homme
libre, un homme susceptible de réfléchir sereinement et
objectivement, et la plupart des remous sociaux que les pays africains ont
connus relevaient de ce phénomène ». Il devient donc
possible, considérant que les pays de l'Afrique centrale sont
classés parmi les plus pauvres de la planète, avec les indices de
développement humain de 0,664 pour la Guinée Equatoriale ; 0,653
pour le Gabon ; 0,639 pour Sao Tomé et Principe ; 0,502 pour le Congo ;
0,499 pour le Cameroun ; 0,377 pour l'Angola ; 0,376 pour le Tchad ; 0,376 pour
la RDC ; 0,363 pour la RCA ; et 0,337 pour le Burundi33(*), de conclure que les
considérations socio-économiques ne sont pas
étrangères à l'éclosion des conflits dans cette
sous-région à cette époque. La stratégie
préventive dans ce contexte consisterait en la promotion d'un
développement centré sur l'amélioration des conditions de
vie de la majorité de la population dans le cadre d'une gestion
participative des ressources nationales.
Dans un deuxième mouvement, les multiples richesses du
sous-sol de l'Afrique Centrale sont à l'origine de bien des conflits qui
traversent cette sous-région. En effet, le contraste existant entre la
dégradation sociale et étatique et la présence de
multiples ressources minièeres halieutiques et forestières encore
non exploitées, constitue une des motivations majeures des acteurs des
conflits en Afrique centrale. Dans ces cas, la guerre est un prétexte et
ne fait que créer les conditions d'une exploitation illégale et
désordonnée des ressources nationales. Le cas de la guerre en
RDC est particulièrement illustratif en la matière. Braeckman C.
(2003:180) commentant une homélie de Monseigneur Bakila affirme :
« En termes crus, il avait osé identifier les causes des
multiples conflits qui ravagent le Congo : L'attrait qu'exercent les
ressources d'un pays qui est sans doute l'un des derniers far west de la
planète ». Le r
apport final du Groupe
d'experts de l'ONU sur l'exploitation illégale des ressources naturelles
et autres formes de richesse de la République Démocratique du
Congo publié en 2002, illustre de manière
univoque la participation des différents pays impliqués dans
cette guerre à des pillages des ressources du sous-sol
Démo-Congolais. La recrudescence de la rébellion Tchadienne et la
crise Santoméenne qui éclatent juste aux moments où ces
pays commencent à tirer les bénéfices de la manne
pétrolière sont aussi des illustrations de cette idée.
Mais, ici encore, il convient de relever que ces pillages ne
sont pas seulement le fait des acteurs nationaux. En fait, dans bien des
conflits portés par ces considérations, les auteurs finaux du
pillage sont étrangers à la zone en guerre. Il s'agit très
souvent, comme on le verra dans la section suivante, d'Etats voisins ou alors
de Puissances mondiales qui se projettent dans cette zone. Comme solution
à cet état de chose, la Commission Carnegie suggère que
les sociétés s'attellent à satisfaire les trois besoins
fondamentaux de sécurité, de bien-être et de justice de
leurs peuples et à leur donner l'opportunité d'améliorer
leur condition autrement que par la violence, quel que soit le mode de
gouvernement qu'elles choisissent et la voie qu'elles suivent pour y parvenir.
La satisfaction de ces besoins permet non seulement aux peuples de vivre des
vies meilleures, mais elle réduit également les motifs et les
risques de conflits meurtriers.
Paragraphe 2 : Les facteurs exogènes des conflits en Afrique
centrale
a) Les considérations géopolitiques
La géopolitique s'intéresse à
l'étude des représentations conflictuelles à propos des
territoires et à la construction de la légitimité.
Le facteur géopolitique fait partie de ceux qui
permettent au mieux d'expliquer la polémologie de l'Afrique centrale. Ce
facteur amène à constater que la plupart des crises qu'a connues
l'Afrique centrale entre 2000 et 2008 sont des crises intra-étatiques.
L'Afrique centrale reste, ce faisant, en phase avec l'évolution
polémologique propre aux périodes de guerre froide et post guerre
froide qui fait état de l'extinction des conflits inter
étatiques du fait du risque de réaction en chaîne incluant
au final le recours à l'arme nucléaire par les principales
puissances bipolaires. Van Creveld (1998 : 16) pense de ce fait que
« s'il est possible en effet que les guerres
conventionnelles d'envergure telles que connues aujourd'hui par les grandes
puissances militaires semblent en passe de s'éteindre, la guerre
elle-même telle qu'en elle-même se porte mieux que jamais et
s'apprête à entrer dans une ère nouvelle ».
En fait, on observe une recrudescence de groupes armés nationaux,
très souvent issus de la militarisation des partis politiques ou de la
société civile, portant des revendications politiques et
s'imposant comme acteur sur la scène politique. A l'exception de la
guerre de RDC qui a connu l'implication très mitigée des
armées Rwandaise et Ougandaise, toutes les crises qu'a connu l'Afrique
centrale mettent en scène des acteurs ou des groupes d'acteurs nationaux
engagés dans des revendications propres à la gestion interne de
l'Etat. Nous pensons ici que l'un des moyens de garantir la stabilité de
la sous-région consisterait à accorder une attention
particulière à ces groupes, aux conditions de leur naissance et
de leur maintien.
Un autre aspect géopolitique qui, cette fois ci, serait
imputable à la fin de la guerre froide est le fait que la plupart de ces
guerres sont menées par des rébellions armées
abritées, financées et soutenues par des Etats voisins et
antagonistes. C'est ici aussi qu'il faut relever le fait qu'il existe des
collusions entre l'avènement de ces groupes rebelles et les
phénomènes de circulation des ALPC et de criminalité
transfrontalière à l'instar de celui des coupeurs de route. En
fait, ces groupes de coupeurs de routes qui alimentent et
bénéficient du trafic des ALPC sont très souvent
composés de mercenaires ou de soldats déserteurs ou vaincus qui
se livrent à ces activités criminelles, non seulement pour
assurer leur subsistance, mais aussi et très souvent pour
déstabiliser le pouvoir en place dans l'optique de leur retour en force.
On comprend donc que les troupes restées fidèles au
Président déchu Ange Félix Patassé se soient
retirées sur un terrain allié, le Soudan, d'où elles
partent soit pour couper des routes, soit pour mener des actions de
guérilla.
Cet état de chose s'expliquerait par le fait que la
balkanisation ou alors le containment qui interdisait à des
pays du camp opposé de s'immiscer dans les affaires intérieures
d'un Etat du camp adverse sous peine de s'attirer les foudres de ce camp ait
disparu avec la fin de la chute du mur de Berlin. Ainsi, même si les
Etats voisins évitent d'engager leur responsabilité en
déployant leurs armées régulières, ils s'appuient
sur ces groupes acquis à leur cause pour poursuivre leur projet
expansionniste. Le moins qu'on puisse dire, c'est que c'est groupes sont
devenus de véritables sources d'insécurité pour la
sous-région dans son ensemble. Nous constatons ainsi pour le cas
d'espèce qu'à l'exception de la guerre du Pool et du coup d'Etat
de Sao Tomé, toutes les crises d'Afrique centrale retenues dans le cadre
de notre analyse sont portées par des groupes rebelles
bénéficiant de l'appui de pays voisins antagonistes. Cet aspect
est d'autant plus marquant que ces Etats antagonistes qui alimentent des
rebellions chez leurs voisins sont parfois des Etats-membres de la même
sous région, à savoir, la CEEAC. On peut citer le soutien
apporté par le Rwanda et le Burundi à la rébellion de
RDC, le soutien d'Ydriss Déby en faveur de la rébellion de
Bozize en RCA (Cf. Zongola, 2003).
Mieux que toutes les autres considérations, la prise en
compte des raisons géopolitiques appelle à une gestion
concertée des problématiques et donc à la construction
d'une identité sécuritaire sous-régionale. La solution
efficace ici consisterait en une approche conjointe de la lutte contre ces
phénomènes dans le cadre du COPAX qui à une
compétence régionale en la matière. Un bel exemple du
succès des initiatives communes en la matière est la tripartite
Cameroun-Tchad-RCA ayant permis la constitution de patrouilles mixtes couvrant
la zone frontalière de part et d'autre et permettant de juguler le
phénomène des coupeurs de route dans la zone
frontalière.
b) Les considérations géostratégiques
La géostratégie part de l'analyse du rôle
des acteurs dans l'espace, de la réflexion de leurs appareils
politico-militaires et diplomatiques, pour expliquer les différentes
configurations observables sur l'échiquier international. Or, parlant
des conflits d'Afrique centrale, il est opportun de relever qu'ils ne
connaissent pas que des implications des acteurs de la Sous-Région
CEEAC. On constate en effet, une grande implication d'Etats issus des
sous-régions voisines et même l'implication de puissances
mondiales. A ce titre, nous pensons que la géostratégie peut
apporter un éclairage nouveau sur les considérations et les
motivations qui portent les conflits en Afrique centrale.
Pour le Pr. Zongola (2003 : 15), les conflits en Afrique
centrale relèvent d'un type nouveau. Ce sont des « guerres des
ressources », dont les objectifs sont à la fois
économiques et politiques, et qui rassemble des acteurs internes et
externes, y compris les réseaux criminels internationaux. En effet, le
contraste de cette Afrique centrale très pauvre dans les fait mais
virtuellement très riche par ses ressources suscite des antagonismes
entre certains acteurs internationaux qui y entrevoient des
intérêts quelconques.
Les conflits d'Afrique Centrale apparaissent comme
résultant de la confrontation de puissances dans l'optique de
l'acquisition ou de la préservation de leurs intérêts
particuliers. C'est ce qu'il faut lire dans cette déclaration de Kounou
(2001 :242) : « la dernière
caractéristique importante des guerres africaines postérieures
à l'effondrement du soviétisme est qu'elles seront
marquées sous le sceau de la rivalité entre les Etats-Unis et la
France pour le contrôle stratégique du continent ».
Ainsi peut-on expliquer les évolutions et le dénouement de la
guerre d'Angola comme la manifestation des querelles idéologiques entre
les puissances bipolaires. Plus près encore, on peut relever
l'implication de multinationales dans le trafic de minerais précieux et
notamment du Coltan durant la guerre de RDC. Dans la même logique, la
recrudescence de la rébellion en RCA et au Tchad peut s'expliquer par
les antagonismes existants entre l'occident (la France et les Etats-Unis) qui
sont des partenaires économiques de ces pays, et l'Iran et la Chine,
concurrents géostratégiques de l'occident, et alliés du
Soudan.
Ici encore, une approche concertée au sein des
instances sous-régionales devrait permettre une meilleure
représentativité de la sous-région et dissuader par
l'éventualité d'une réplique sous-régionale et d'un
recours aux voies de sanctions prévues par le Droit et la pratique
internationale.
SECTION D : APERCU DES ACTIONS ET INTERVENTIONS DU COPAX34(*)
Après que nous ayons identifié les conflits et
que nous en ayons analysé la quintessence, nous envisageons, dans cette
section, évaluer la sensibilité du COPAX vis-à-vis de ces
situations. Comment ces crises sont elles appréhendées par le
COPAX ? Quelles sont les dispositions prises et les actions menées
par ce dernier ?
Paragraphe 1 : Au
plan institutionnel : La mise en place des institutions.
Préalablement à l'analyse du déploiement
du COPAX sur le terrain, il semble nécessaire de passer en revue les
étapes fondamentales qui ont marqué son institutionnalisation. A
ce propos, notons que la CEEAC à été crée le 18
octobre 1983 par les Etats-membres de l'Union Douanière des Etats de
l'Afrique Centrale (l'UDEAC) et les Etats-membres de la Communauté
Économique des Pays des Grands Lacs (CEPGL) ainsi que Sao Tomé et
Principe. L'Angola a rejoint le groupe en 1999 après avoir
été observateur pendant 16 ans, et en fin 2007, le Rwanda a
définitivement quitté la communauté.
La CEEAC avait à l'origine pour mandat la promotion du
dialogue politique dans la région, la création d'une union
douanière ainsi que l'établissement de politiques sectorielles
communes.
En effet, originellement confinée à des missions
d'ordre économique, la CEEAC, comprenant l'apport important d'un climat
de sécurité dans le processus de développement
économique, incorporera dans son champ d'intervention d'un volet
sécuritaire. Ainsi, en Février 1999, lors de la conférence
au sommet du Comité Consultatif permanent pour les questions de
sécurité en Afrique centrale, les Etats membres ont
décidé de créer une organisation chargée de la
promotion, de la maintenance et de la consolidation de la paix et de la
sécurité en Afrique Centrale.
Cette organisation baptisée « Conseil
pour la Paix et la Sécurité en Afrique Centrale
(COPAX) » verra le jour le 24 Février 2000 suite à
la ratification du protocole y relatif et aura la responsabilité de
développer des capacités de maintien de la paix et de
prévention des conflits en Afrique Centrale.
Au plan institutionnel, de 2000 à 2007 il sera
procédé à un ensemble de recrutements en vue de doter les
instances créées en personnels qualifiés qui en assurent
le fonctionnement effectif. Ainsi :
· En octobre 2003, la réunion des chefs
d'Etat-major tenue à Brazzaville abouti à la création
d'une brigade de maintien de la paix qui peut intervenir en zones
d'instabilité.
· De septembre à novembre 2006, un Bureau
chargé de la gestion du projet, a été recruté
après Appel d'Offre
· En Décembre 2006, le MARAC a reçu une
dotation en logistique d'information et de communication
· De juillet 2006 à mars 2007, les cadres du MARAC
et de la Direction des Actions Politiques et Diplomatiques ont
été recrutés. Il s'agit du Directeur du MARAC, du
Directeur des Actions Politiques et Diplomatiques du Chef du Bureau
d'observation et de collecte d'information du MARAC, de l'Expert en Technologie
de l'Information et de la Communication du MARAC.
· En 2007, l'Etat-major Régional est effectivement
installé dans son siège provisoire de Libreville en
République Gabonaise et les Officiers devant armer cette structure, ont
pris leurs fonctions.
· Le 15 février 2007, le Projet d'Appui en
matière de Paix et Sécurité a démarré avec
l'arrivée de 2 Consultants constituant la Cellule de Gestion du Projet.
· En mai 2007, deux sessions de formation interne ont
été organisées à l'intention du personnel du MARAC
nouvellement recruté en vue de leur familiarisation avec les
systèmes d'Alerte Précoce existant (CEDEAO, IGAD, UA).
· En 2008, il est procédé à
l'identification des priorités géographiques et
thématiques de l'observation du MARAC, à l'identification de
correspondants décentralisés et à l'organisation de leurs
interactions avec le Secrétariat Général de la CEEAC.
Au cours de ce processus d'institutionnalisation, le COPAX a
bénéficié des apports de plusieurs instances
tutélaires et partenaires.
Ainsi, il a reçu une assistance technique de court
terme, c'est-à-dire 6 mois, de l'Union Européenne afin de
parvenir à une définition des Termes de référence
d'un projet d'appui aux capacités de la CEEAC en matière de
prévention des conflits et a bénéficié de la
Mobilisation d'un budget de cent millions (100.000.000) de francs CFA pour
financer des travaux d'aménagement des bureaux du MARAC.
Enfin, en mars 2007, a eu lieu la signature de la Convention
de financement entre l'Union Européenne et l'Union Africaine portant sur
une tranche de financement de 7,5 millions d'euros au titre de la
Facilité de paix pour l'Afrique dont une dotation de 464,000 euros est
affectée au MARAC.
Les actions du COPAX ont aussi porté, dans le cadre de
la rationalisation des CER en Afrique, sur l'implication et la participation
du COPAX aux activités de l'Union Africaine. On peut dans cette rubrique
citer la Participation à l'exécution des activités de la
feuille de route de l'Union Africaine consistant pour l'essentiel en la mise en
place de la Force Africaine d'Intervention Rapide et la participation aux
travaux du Comité Consultatif Permanent des Nations Unies sur les
Questions de Paix et de Sécurité en Afrique Centrale.
Ainsi qu'on peut le comprendre, tout le dispositif
institutionnel du COPAX n'est pas encore en place. Mais, devrait-on,
considérant l'urgence et l'importance de la demande en matière de
sécurité, attendre que ce dispositif soit complètement
posé pour espérer une prise en charge efficace de la
problématique sécuritaire en Afrique centrale? Ne faudrait-il
pas, pour les mêmes raisons hâter le processus
d'opérationnalisation du COPAX ?
Paragraphe 2 : Au plan opérationnel : Les actions
menées
Bien que n'étant encore qu'au stade de gestation depuis
plus de huit ans, le COPAX compte déjà néanmoins à
son actif quelques actions louables qu'il convient de recenser ici.
Dans ce registre nous pouvons classer la tenue entre 2000 et
2008 de sept sessions de la Commission de Défense et de
Sécurité (CDS), la dernière en date ayant eu lieu entre
fin Août et début Septembre 2007 à Malabo.
On peut aussi mettre à l'actif du COPAX la
participation à un ensemble des programmes en concertation avec des
instances partenaires et tutélaires. Les efforts
développés par les Etats-membres de la CEEAC, en relation avec
l'Union Africaine et la Communauté internationale ont porté sur :
o L'organisation au Gabon d'un exercice régional de
maintien de l'ordre, baptisé " Gabon 2000 ", dans le but
d'augmenter les capacités des Etats-membres de la CEEAC dans les champs
du maintien de la paix et de la prévention des conflits. Cet exercice
représentait une application directe du concept français RECAMP
(Renforcement des Capacités Africaines de Maintien de la Paix) ;
o Dans le cadre du même programme, on peut aussi citer
la co-organisation de l'exercice "SAWA 2006" dans le cadre du 5ème Cycle
RECAMP ;
o L'organisation en Novembre 2007 au Tchad de l'exercice
Bar-Al-Ghazal impliquant la participation de 1600 hommes et qui constitue en
fait les premières grandes manoeuvres de la FOMAC ;
o Dans le cadre des activités de médiation et de
prévention des conflits, le COPAX a joué un rôle primordial
dans la restauration de la légalité constitutionnelle à
Sao Tome et Principe suite au coup d'état survenu dans la
presqu'île en juillet 2003.
o Dans la même rubrique, il faut citer la contribution
à la sécurisation des élections en République
Démocratique du Congo qui s'est traduite par les actions suivantes :
§ L'installation d'un Ambassadeur, Représentant
Spécial du Secrétaire Général de la CEEAC avec un
Observatoire à Kinshasa ;
§ Le montage d'un Groupement Tactique Interarmées
(GTIA) en « On Call » avec quatre (04) Etats cadres : Angola,
Cameroun, Congo et Gabon pour contribuer à sécuriser Kinshasa en
coopération avec l'EUFOR et la MONUC ;
§ L'envoi d'une mission d'Observation électorale
de la CEEAC, conduite par un ancien Chef d'Etat.
o La réalisation en 2008 du projet MICOPAX de
transfert de compétences de la FOMUC à la FOMAC en ce qui
concerne le maintien de la paix en république Centrafricaine.
Comme on peut aisément s'en rendre compte, le gros des
initiatives du COPAX porte plus sur l'institutionnalisation du système
que sur son déploiement effectif, ce qui, à notre sens,
témoigne déjà de la capacité
d'institutionnalisation tout autant que de la faiblesse opérationnelle
du COPAX.
En dernière analyse, il apparaît que l'Afrique
centrale est traversée par plusieurs situations appelant l'intervention
du COPAX. Ces crises sont structurées par des facteurs dont l'origine
est identifiable tant au sein de la sous-région qu'à
l'étranger. Quelques-unes de ces crises ont
bénéficié des interventions du COPAX mais le nombre de
crises n'ayant pas bénéficié d'une intervention du COPAX
reste supérieur. Peut-on, au regard de ce qui précède,
parvenir à une analyse de la capacité de réaction et
d'intervention du COPAX ?
CHAPITRE III : ENDOSCOPIE DU
RENDEMENT INSUFFISANT DE L'INSTRUMENT DE PREVENTION DES CONFLITS
![]()
L'objectif de ce chapitre est de procéder à une
tentative d'explication de la faiblesse du système en se servant de la
grille systémique qui est au centre de notre recherche et de la grille
stratégique qui nous est paru être un palliatif aux limites de
l'approche systémique.
Dans un deuxième mouvement, nous essayerons de
déceler les conséquences de la faiblesse du système sur
son environnement en général, et sur le processus
d'intégration sous régionale en particulier.
Le but ultime de ce chapitre est de nous permettre de
répondre à la question de savoir si le système de
prévention des conflits a effectivement joué un rôle
quelconque dans la dynamique de construction de l'identité
sous-régionale de l'Afrique centrale.
SECTION A : EVALUATION DE L'EFFICACITE DU COPAX : UN
RENDEMENT ENCORE INSUFFISANT
Après avoir identifié les situations appelant
une réaction du COPAX et les actions menées par celui-ci, il
devient possible de juger de l'efficacité de cette institution. Dans
cette perspective, il semble que l'efficacité du COPAX peut être
déduite d'une analyse synthétique mettant en parallèle
quantitativement et qualitativement, les sollicitations de l'environnement et
les réactions du système face à ces sollicitations. Nous
espérons, en d'autres termes, dans cette section, parvenir à une
lisibilité de l'efficacité du COPAX grâce à un
rapport simple entre la somme des situations appelant une intervention du
système de prévention des conflits et la quantité mais
aussi la qualité des actions et interventions du COPAX,
envisagées ici sous l'angle de l'apport définitif dans la
résolution des crises.
Paragraphe 1 : Evaluation au plan quantitatif
Au plan quantitatif, nous partons sur la base de huit crises
majeures identifiées au sein de la CEEAC entre les années 2000 et
2008 qui constitueront notre échantillon d'analyse. Selon les textes
fondamentaux du COPAX, notamment les articles 4 et 5 du Protocole relatif au
COPAX, il est de la compétence et même de la responsabilité
de celui-ci de mettre en oeuvre des initiatives afin de permettre une
résolution efficace des crises survenant dans la sous-région. En
d'autres termes, face aux huit crises enregistrées, le COPAX aurait du
opposer au moins huit initiatives visant la résolution de ces crises.
Or, de ces huit crises, cinq sont parvenues à une
normalisation marquée notamment par l'arrêt des actes de violence
et la restauration du dialogue social. Il s'agit en l'occurrence des conflits
angolais, burundais, congolais, de Sao Tome et de la guerre civile
centrafricaine de 1996 à 2003. Mais, des crises recensées, deux
sont allées jusqu'à leur aboutissement péjoratif à
savoir la conclusion de la crise par la victoire militaire de l'une des
factions en conflit. Tel fut le cas de la guerre en Angola et de la guerre
civile centrafricaine de 1996 à 2003. Les trois autres cas ont, pour
leur part, connu une conclusion plus décente marquée notamment
par une atténuation des clivages, par l'initiation d'un dialogue et la
cession de concessions entre les principaux belligérants, marquant ainsi
le retour à un état de paix sociale contrôlable. Ce fut le
cas avec la crise du Pool au Congo, avec le différend consécutif
au putsch du 16 Juillet 2003 à Sao Tome et avec la guerre civile du
Burundi.
Trois des crises sécuritaires recensées ne se
sont pas résorbées, du moins jusqu'en fin de l'année 2008.
Il s'agit en l'occurrence de la guerre Démo-Congolaise principalement
dans la région du Kivu, de l'insécurité au Tchad et en
RCA.
Ainsi, sur huit crises qu'a connu la sous-région,
seules trois à savoir la Crise centrafricaine, la crise en RDC et les
putschs Santoméen ont bénéficié d'une intervention
du COPAX et la conclusion qui s'impose alors est celle de la faiblesse du COPAX
démontrée par un taux de participation de 37,5 % dans la
résolution des crises ayant traversé l'Afrique centrale dans la
période 2000-2008. Qu'en sera-t-il de l'évaluation qualitative
des interventions du COPAX ?
Paragraphe 2 : Evaluation au plan qualitatif
De prime abord, précisons que l'évaluation au
plan qualitatif ne porte pas sur la qualité perçue dans le sens
de l'adéquation des missions, mais visera à mettre en exergue
l'apport des interventions du COPAX dans le processus général de
résolution des conflits en Afrique centrale.
Dans cette perspective, notons de prime abord que les actions
du COPAX portent plus sur la mise en oeuvre du dispositif que sur le
déploiement effectif de cette structure dans la sous-région. On
note en effet que, à l'exception des trois actions menées au plan
opérationnel, toutes les autres actions portent soit sur le recrutement
du personnel, sur la formation et le perfectionnement de ce personnel, sur la
mise en place des cadres institutionnels ou sur la recherche de financements,
ceci dans le but ultime de rendre le COPAX effectif.
Ce constat nous donne l'occasion de lever une équivoque
qui partirait de la question de savoir s'il n'est pas incongru de vouloir
analyser l'efficacité d'une structure encore virtuelle, étant
donné que toutes ses instances ne sont pas encore
opérationnelles ? Le fait est que, jusqu'en 2007, le MARAC n'est
pas encore pleinement opérationnel et certaines de ses instances ne sont
pas encore pourvues du personnel chargé de l'animer. Il s'agit en
l'occurrence du Directeur du MARAC, du Chef du Bureau d'observation et de
collecte d'information du MARAC, de l'Expert en Technologie de l'Information et
de la Communication du MARAC qui ont tous été recrutés
entre juillet 2006 et mars 2007. Il en va de même de la Direction des
Actions Politiques et Diplomatiques dont le Directeur n'est nommé qu'en
2007.
La perspective de répondre à cette question,
loin d'appauvrir le débat, nous permet d'étendre notre
évaluation qualitative sur le processus même de mise en place du
système. Il est en effet intriguant et même suspect que, huit ans
après sa création, le COPAX ne soit pas encore doté de
tous les moyens structurels et infrastructurels devant matérialiser et
animer son existence. On est particulièrement intrigué par le
contraste existant entre la précision, la finesse et la rapidité
mise en oeuvre dans la conception textuelle du COPAX, et le peu d'entrain mis
à doter et équiper le COPAX des ressources matérielles et
humaines devant l'animer, ce d'autant plus que la sous région doit
faire face à de multiples crises qui appellent l'intervention efficace
du COPAX.
En guise de réponse à cette question, nous
estimons que l'efficacité du système ne devrait pas être
déduite seulement de son déploiement opérationnel
marqué par des actions de terrains, elle devrait aussi être
envisagée sur la base de l'observation de son processus
d'institutionnalisation, c'est-à-dire de sa capacité à
passer efficacement du stade de l'existence textuelle à celui de la
présence effective et pratique sur le terrain. Et, sur ce point force
est de constater une faiblesse du processus d'institutionnalisation du COPAX
caractérisé par une très longue mise en place du
système qui s'étale, pour le cas d'espèce, sur une
période de plus de huit ans.
Sur un autre volet, il apparaît que des actions
recensées, seules trois constituent des esquisses de solutions face
à l'insécurité à laquelle la sous-région
fait face. Il s'agit de la contribution à la sécurisation des
élections en République Démocratique du Congo, de
l'important rôle de médiation joué dans le cadre de la
restauration de la légalité constitutionnelle à Sao
Tomé & Principe et du projet MICOPAX de transfert de
compétence de la FOMUC à la FOMAC en ce qui concerne le maintien
de la paix en république Centrafricaine.
Notons cependant que des trois actions envisagées, une,
à savoir la contribution à la sécurisation des
élections en République Démocratique du Congo, laisse
entrevoir une approche assez complète incluant le volet diplomatie
préventive marqué par l'installation d'un Ambassadeur,
Représentant Spécial du Secrétaire Général
de la CEEAC avec un Observatoire à Kinshasa, la prévention
structurelle marquée par l'envoi d'une mission d'observation
électorale de la CEEAC, conduite par un ancien Chef d'Etat, et la
prévention opérationnelle marquée par Le montage d'un
Groupement Tactique Interarmées (GTIA) en « On Call »
pour sécuriser Kinshasa. Une approche aussi complète
démontre en fait la capacité institutionnelle du COPAX à
agir efficacement dans la sous-région et bien que le succès
de l'opération ne puisse être objectivement imputable seulement
à la CEEAC, il n'est pas moins vrai que son apport à
été déterminant dans la conclusion heureuse des
élections en RDC.
En somme, la CEEAC est un concept viable mais demeure
minée par des maux de divers ordres. (Awoumou, 2005 :11). Et, en ce
qui concerne l'action du COPAX, force est de convenir, au-delà d'un
potentiel d'action considérable, d'une faiblesse réelle
marquée par une faible implication quantitative et qualitative dans la
gestion des crises qui traversent l'Afrique centrale dans l'intervalle
2000-2008. Mais quelles peuvent en être les raisons ?
SECTION B : LES RAISONS DE LA FAIBLESSE DU SYSTEME : ENTRE
CAPACITES POTENTIELLES ET ABSENTEISME OPERATIONNEL
Après avoir convenu de la faiblesse du COPAX qui est
déduite de l'insuffisance de son rendement, il est de bonne facture de
rechercher les raisons fondamentales de cette faiblesse et d'entrevoir ses
conséquences sur la sous-région. Ainsi que nous l'avons
précisé dans notre chapitre liminaire, nous nous servirons de la
grille de lecture systémique dans notre tentative de parvenir à
une compréhension suffisante de notre problématique.
Paragraphe 1 : Les raisons fournies par l'approche
systémique
Ayant déjà présenté, au chapitre
premier, le contenu de l'approche systémique et
l'opérationnalisation que nous comptions en faire dans le cadre de notre
recherche, notons juste, à titre de précision, que l'analyse
systémique se présente comme un modèle d'analyse dont
l'objectif principal est de fournir les outils et les moyens permettant de
répondre à la question de savoir « comment un
système politique quelconque peut persister, dans un monde soit stable,
soit en changement ? » (Easton, 1974 : 16). Elle
envisage comme catégories principales d'analyse, un système
perçu comme « l'ensemble des interactions par lesquelles
les objets de valeurs sont répartis par voie d'autorité dans une
société » (idem : 23) et un environnement
avec lequel le système communique par le moyens de demandes et soutiens
ou d'inputs, et d'actions et décisions du système ou
outputs. Selon cette approche, le maintien du système est
fonction de la nature et de la récurrence des flux qui relient le
système à son environnement.
Ici, nous nous contenterons d'envisager les
irrégularités et les dysfonctionnements, au sens
systémique, du COPAX qui pourraient en expliquer la faiblesse. Et,
partant de ces considérations de base, nous aurons pour variable
explicative la nature des inputs entrants dans le COPAX, la nature des
outputs et enfin la nature de la courbe de rétroaction. Dans
cette perspective, nous-nous appuierons sans cesse sur le principe que
« c'est le fait qu'il existe un tel flux continu d'effets et
d'informations entre le système et son environnement qui explique la
capacité d'un système politique à persister même
dans un monde en proie à des changements et à des fluctuations
violentes.» (Easton D. 1974 : 32)
a) La faiblesse déduite de l'analyse des inputs :
Des soutiens en qualité et en quantité insuffisantes
Les inputs sont constitués de tous les
apports, exigences, demandes ou soutiens qui partent de l'environnement vers le
système. Les inputs constituent donc la matière
première à partir de laquelle les outputs sont
constitués.
En ce qui concerne les inputs, nous notons
déjà un contraste énorme entre la multiplicité des
demandes de l'environnement appelant à une intervention efficace du
COPAX et la faiblesse des moyens en termes de soutiens fournis au
système pour lui permettre de mener à bien ses missions. En
effet, pour garantir l'efficacité du COPAX, il aurait été
adéquat, selon le modèle systémique, de fournir en appui
des demandes, les moyens suffisants permettant d'apporter des réponses
appropriées aux demandes suscitées. Nous pensons donc
déjà, à ce niveau, que la simple disproportion entre les
demandes et les soutiens est déjà une explication suffisante de
la faiblesse du COPAX.
Notre attention est ensuite attirée par la nature des
quelques soutiens qui constituent l'apport de l'environnement au bon
fonctionnement du système. En ce qui concerne le COPAX, on peut
identifier comme soutien les ressources juridiques, humaines et
matérielles mises à la disposition du COPAX par l'environnement
dans la période 2000-2008.
Le premier soutien que reçoit le COPAX est le Droit
c'est-à-dire l'ensemble des dispositions juridiques qui en marquent la
naissance, qui autorisent et encadrent son fonctionnement. A ce niveau, le
COPAX peut se vanter d'être doté d'une structure juridique assez
complète qui encadre son processus d'intervention en partant de la
collecte des données au déploiement proprement dit.
La nature des apports en personnel et en matériel
consentis soit par la CEEAC elle-même, soit par les Etats-membres, est
aussi explicative de la faiblesse relative du COPAX. Pour être efficace,
le COPAX a besoin de compter sur des moyens humains et matériels de
premier choix, des moyens qui soient à la dimension de la grandeur et de
la complexité des problématiques auxquelles le système de
prévention des conflits de l'Afrique centrale doit faire face. La
pratique nous dévoile autre chose. On note en effet que certains postes
clés du COPAX sont restés, jusqu'en 2008, sans dotation en agents
de conception et d'exécution supposés animer la structure. Notre
avis ici est que la capacité du COPAX est à l'image des dotations
en ressources humaines dont elle a fait l'objet, c'est-à-dire pas du
tout suffisante
Dans la même rubrique et, concernant le traitement du
personnel, on aboutit à peu près à la même
conclusion. En effet, la liquidation des salaires des fonctionnaires
étant elle aussi fonction du taux de cotisation des Etats-membres, il
est très fréquent que ces derniers ne soient pas payés
à temps et que le personnel continue à réclamer des
arriérés de paiement. Quand on connaît l'importance de la
rétribution dans la motivation des employés, on peut
aisément envisager la faiblesse du COPAX comme résultant d'un
rendement minimum de l'institution qui, dans ce cas, se retrouve animée
par un personnel démotivé et en proie à toutes sortes
d'influences pouvant, dans l'exercice de leurs fonctions, les détourner
de leurs objectifs premiers et avoir un impact négatif sur le rendement
général du COPAX.
En ce qui concerne les ressources financières, retenons
que le budget de fonctionnement du Secrétariat général est
arrêté annuellement par la Conférence des Chefs d'Etat. Le
budget 2004 par exemple s'élevait à 4,6 milliards de FCFA, dont
1,5 milliard pour le COPAX, Le budget est alimenté selon la clé
de contribution suivante: 15% pour chacun des Etats membres les mieux nantis
(Angola, Cameroun, Congo, Gabon et RDC) et 4,167% pour chacun des six autres.
Le bilan financier de la CEEAC est cependant caractérisé par
l'accumulation d'arriérés de contribution des Etats au budget.
Répartition des arriérés de
paiement des cotisations statutaires des Etats-membres de la CEEAC au 30 Juin
2004
|
Etats Membres
|
Arriérés
1985-1997
|
Arriérés
1998-2002
|
Arriérés
2003
|
TOTAL CUMULE
1985-2003
|
Situation Exercice 2004
|
Contribution 2004
|
Non encore Payé
|
1
|
Rép. D'Angola
|
|
|
|
|
690 120 737
|
430 683 311
|
2
|
Rép. Du Burundi
|
|
248 445 526
|
84 992 239
|
333 437 765
|
191 700 205
|
191 700 205
|
3
|
Rép.du Cameroun
|
7 399 920
|
278 012 203
|
155 172 059
|
441 384 182
|
690 120 737
|
690 120 737
|
4
|
Rép. Centrafricaine
|
55 493 020
|
310 605 442
|
84 992 239
|
451 090 701
|
191 700 205
|
191 700 205
|
5
|
Rép. Du Congo
|
277 186 688
|
68 012 203
|
972 059
|
346 170 950
|
690 120 737
|
690 120 737
|
6
|
Rép. Démo. Congo
|
622 437 010
|
|
262 298 435
|
1 278 965 465
|
690 120 737
|
546 640 454
|
7
|
Rép. Gabonaise
|
|
|
147 281 748
|
147 281 748
|
690 120 737
|
690 120 737
|
8
|
Rép. De Guinée Eq
|
|
77 225 615
|
84 992 239
|
162 217 851
|
191 700 205
|
191 700 205
|
9
|
Rép. Du Rwanda
|
48 328 754
|
98 072 746
|
84 992 239
|
231 399 739
|
191 700 205
|
191 700 205
|
10
|
Rép. Sao Tomé & P.
|
94 256 710
|
254 046 442
|
84 992 239
|
433 295 391
|
191 700 205
|
165 099 113
|
11
|
Rép. Du Tchad
|
99 661 074
|
268 935 442
|
84 992 239
|
453 588 755
|
191 700 205
|
191 700 205
|
|
TOTAL
|
1 204 763 176
|
1 997 585 636
|
1 076 477 735
|
4 278 826 547
|
4 600 804 915
|
4 171 286 114
|
Ces arriérés s'élevaient au 30 juin 2004
à près de 4,2 milliards de FCFA35(*). Même s'ils reflètent une
légère amélioration en termes de recouvrement de 0.7
milliard comparativement aux 4,9 milliards de FCFA d'arriérés
accumulés au 31, décembre 2003. La tendance lourde reste donc
celle de faiblesse de l'esprit communautaire, illustrée notamment par
les retards souvent observés dans le paiement des contributions
communautaires par les Etats, retard qui ont pour conséquence la
faiblesse des capacités de l'institution communautaire.
Dans l'optique de sécuriser le financement de la CEEAC,
La Décision n°05/CEEAC/CCEG/X/02 du 17 juin 2002 prévoyait
l'instauration à partir de 2004 d'une contribution Communautaire
d'intégration (CCI) au sein de la CEEAC dont l'assiette serait
constituée par les produits originaires des pays tiers importés
par les Etats-membres pour mise à consommation. Le taux de la CCI est de
0.4% et, la CEEAC ne disposant pas d'une estimation précise du montant
des importations en provenance de pays tiers, a néanmoins estimé
à environ 17 milliards de FCFA le montant des recettes que pouvait
générer la CCI en 2004. Afin de s'assurer du paiement effectif
des contributions, il a été décidé qu'en cas de
retard de paiement des contributions constaté 30 jours francs
après le terme de chaque trimestre, les Banques centrales ou nationales
des Etats-membres sont autorisées à débiter d'office le
compte du Trésor public du montant dû en faveur du
Secrétariat Général de la CEEAC. Au 31 juillet 2004, les
conventions de compte CCI/CEEAC ont été signées avec le
Gabon, le Congo et Sao Tome & Principe. La signature de ces conventions est
une condition du don. Cependant, en attendant que toutes les dispositions
préalables à la mise en oeuvre de la CCI/CEEAC soient effectives,
le budget continuera d'être souscrit sur la base de la clé de
répartition en vigueur en 2003. Entre-temps, Le COPAX, pour fonctionner
doit compter sur les cotisations du reste incertaines des Etats-membres ou sur
les apports conditionnés des bailleurs de fonds nationaux et
internationaux, tous apports dont la disponibilité en quantité et
en qualité n'est pas toujours garantie.
Le système de prévention des conflits devrait,
dans la même quête, pouvoir compter sur la disponibilité
d'équipements pouvant lui permettre d'agir et de se déployer
rentablement. Or, en termes d'équipements, en 2004, la CEEAC ne dispose
que d'un bâtiment qu'elle a acquis sur ressources propres en 2003 qui lui
sert de siège, et d'un autre bâtiment qui abrite le MARAC mis
à sa disposition par l'Etat Gabonais dans le cadre du COPAX. La
même année, le bâtiment qui abrite le MARAC ne dispose que
de deux ordinateurs, d'une imprimante et d'un photocopieur36(*). Que peut-on attendre d'un
équipement aussi léger ? Comment escompter, avec des
infrastructures aussi modestes, un fonctionnement efficace du MARAC qui est
pourtant censé collecter traiter et répertorier les informations
sur l'état de sécurité et de stabilité de toute
l'Afrique centrale ? L'importance et la délicatesse de la mission
dévolue au MARAC ne commandait-elle pas de le doter, dès la
création, d'infrastructures de pointe afin d'en garantir le bon
fonctionnement? Il faudra, en guise de réponse à cette question,
attendre l'année 2007 pour voir le MARAC doté
d'équipements d'information et de communication adéquats. De
toute évidence et, en nous basant sur le rapport établit par le
Fonds Africain de Développement en 2004, il apparaît notoire de
conclure, dans la période 2000-2008, au sous-équipement ou, du
moins, au mauvais équipement du COPAX qui contraste
sévèrement avec la grandeur et la délicatesse de la
mission confiée à cette instance. Une fois de plus, on peut voir
que le système de prévention des conflits est faible parce qu'il
reçoit de faibles soutiens de l'environnement.
En résumé, la faiblesse du COPAX dans la
période 2000-2008 peut s'expliquer par la modicité des apports en
ressources matérielles, humaines et financières consentis par ses
bailleurs. Narcisse Mouelle Kombi (1999: 214), pense dans ce sens que
« les défaillances et les carences en matière de
contributions au budget communautaire figurent parmi les principales causes de
l'échec de l'intégration régionale en Afrique centrale
». En d'autres termes, le fonctionnement du COPAX est à
l'image de la nature des soutiens presque insignifiants qu'il reçoit de
l'environnement.
b) La faiblesse déduite de l'analyse des
outputs : Des outputs inadaptés en nombre et en substance
Dans une approche systémique, les outputs
constituent aussi par leur nature, des variables explicatives de
l'efficacité du système. De prime abord, relevons que, en
application de l'Article 04 alinéa a) du Protocole relatif au COPAX, ce
dernier est, sans préjudice des attributions du Conseil de
Sécurité de l'ONU et du mécanisme de l'Union Africaine en
ce qui est de la prévention des conflits en Afrique, chargé de
prévenir gérer et régler les conflits en Afrique centrale.
De ce qui précède, il ressort que le COPAX a non seulement la
faculté mais aussi la responsabilité de mettre en oeuvre toutes
mesures utiles pour éviter la survenue des conflits, résoudre les
conflits déclarés et consolider la paix et la
sécurité dans la sous-région Afrique centrale.
Le bon fonctionnement du COPAX devrait être
déduit caeteri paribus, de l'équilibre
établi entre les sollicitations de l'environnement et les
réponses du système aux sollicitations de l'environnement.
De façon prosaïque, l'identification de huit
crises dans la sous-région devrait appeler la mise sur pied d'au moins
huit projets différents chargé de gérer ces questions.
Dans les faits cependant, nous n'avons identifié que :
· Les initiatives visant la contribution à la
sécurisation des élections en République
Démocratique du Congo,
· Le projet MICOPAX prévoyant le transfert de
compétence de la FOMUC à la FOMAC en ce qui concerne le maintien
de la paix en République Centrafricaine,
· Et l'action en diplomatie préventive ayant
concouru au rétablissement de la légalité
constitutionnelle à Sao Tome et Principe
Certes, cette limitation des cas et des domaines
d'intervention du COPAX pourrait résulter d'un travail de filtrage
effectué par les gatekeepers, mais, force est de
reconnaître que tel n'est pas le cas ici, étant donné que
ces huit crises étaient déjà portées à
l'attention de la CDS, l'exigence de bon fonctionnement du système
laissait plutôt présager une réponse de celui-ci. Tandis
que l'absence de réponse signifie que les questions
soulevées n'ont pas connu de traitement à l'intérieur du
COPAX et sont restées bloquées dans un des compartiments de la
black box, comme dans un labyrinthe sans plus pouvoir en sortir.
C'est, à notre sens, la raison pour laquelle les crises en Angola, au
Burundi, en RCA avant 2003, au Tchad et au Congo non pas connu une implication
du COPAX que ce soit au niveau de la diplomatie préventive ou à
celui de l'action directe sur les faits.
A coté d'une insuffisance des réponses du
système face aux sollicitations de l'environnement, on perçoit
aussi une certaine inadéquation des outputs du système. En effet,
bien des outputs du système sortent de celui-ci dans une forme qui ne
permet pas leur applicabilité immédiate, ce qui a pour effet de
mettre tout le système en état de latence et de revigorer les
attentes et les demandes de l'environnement. A titre d'exemple et s'agissant du
processus d'institutionnalisation évoquée plus haut, la logique
voudrait que l'institutionnalisation de ce cadre s'accompagne
immédiatement de son application sur le terrain. Or, l'on relève
pour le déplorer que ces constructions juridiques, pour la plupart,
restent envisagées de lege ferranda et non de lege
lata et marquent ainsi une trop longue transition entre l'édiction
des Actes et Décisions et leur entrée en application, beaucoup
plus en une période où le COPAX est plus que par le passé
sollicité par l'environnement.
c) Analyse de l'efficacité en fonction de l'impact sur
l'environnement : une quasi permanence du feedback loop
La courbe de rétroaction constitue la variable
explicative de l'impact de l'action du système sur son environnement. En
fait, la courbe de rétroaction rend compte du fait que le
problème de sécurité identifié dans l'environnement
n'est pas résolu et nécessité soit un nouveau traitement
soit un traitement plus approprié ici
Selon Louis Sylvain-Goma (Général)37(*), le Secrétaire
Général de La CEEAC, « parmi les grands
défis que la Communauté Economique des Etats de l'Afrique
Centrale se doit de relever, figure la création d'un environnement
marqué par la promotion de la paix, de la sécurité et de
la stabilité, nécessaires au développement durable de nos
Etats et de notre espace communautaire. » Le Secrétaire
Général reconnaît ainsi en substance l'une des conditions
de l'efficacité de tout système et, en l'occurrence du COPAX.
Ainsi, les outputs auxquels l'environnement accorde une bonne
réception sont assimilés par ce dernier et provoquent de ce fait
une amélioration de celui-ci. Par contre, les outputs mal
digérés par l'environnement retournent au système suivant
la courbe de rétroaction et sous la forme de nouvelles demandes.
Pour le cas d'espèce, nous avons identifiés
trois cas d'intervention sur huit escomptés. Certes, l'apport dans la
sécurisation des élections en République
Démocratique du Congo fut positif et même louable mais, le fait
que la situation sécuritaire dans ce pays, tout comme en RCA, soit
encore instable rend compte d'un traitement insuffisant de la question
générale de la paix et de la sécurité. En d'autres
termes, même dans ces deux cas, beaucoup reste à faire et le
besoin d'une intervention du COPAX reste très vif. Du moins c'est ce
qui ressort de cette affirmation de Louis Sylvain-Goma (Op. cit.) selon
laquelle il persiste encore de fortes inquiétudes pour l'Est de la
République Démocratique du Congo, et pour les effets de la
situation du Darfour, sur la République du Tchad et la République
Centrafricaine. Ainsi, dans les deux cas recensés, on note une
rétroaction qui dénote du traitement inadéquat de la
question et de la persistance des demandes de l'environnement et donc, de
l'inefficacité du COPAX.
En conclusion, l'analyse des inputs, des
outputs et de la courbe de rétroaction laisse apparaitre une
explication certaine de la faiblesse du COPAX.
Mais, étant donné que l'approche
systémique, fidèle au concept de la black box qui la
structure, ne permet pas une lecture suffisante du fonctionnement interne du
système, nous nous sommes posé la question de savoir s'il
suffira d'observer le système de l'extérieur pour parvenir
à une compréhension suffisante de son fonctionnement ?
Suffit-il d'envisager la décision comme étant uniquement le
résultat des demandes et des soutiens émises par
l'environnement ? N'est-il pas de facteurs internes au système qui
pourraient en influencer le comportement ?
Ces interrogations sont en fait une invitation à
éviter de tomber dans une vision trop cybernétique du
système de prévention des conflits. En effet, il nous semble
opportun, en même temps que nous analysons le fonctionnement du
système, d'essayer de percevoir les dialectiques auxquelles sont sujets
les acteurs au sein de ce système, dialectiques qui ont une incidence
considérables sur le processus décisionnel dans son ensemble.
L'approche stratégique nous aidera à parvenir à cette fin.
Paragraphe 2 : Les raisons fournies par l'approche
stratégique
Les exigences d'une explication suffisante nous convient
à parvenir à une compréhension du fonctionnement interne
du système et, particulièrement, des logiques et des enjeux des
acteurs internes du système, qui constituent des paramètres
très importants de notre quête. Aussi, nous proposons-nous, de
compléter l'analyse systémique par l'approche stratégique
développée par Michel Crozier et Erhard Friedberg.
a) Le contenu de l'analyse stratégique
Dans le cadre de cette approche, nous partirons de
l'identification d'une organisation en l'occurrence le COPAX composée de
plusieurs Etats dont les jeux de coopération sont organisés par
les textes organiques et normatifs. Seulement, nous garderons présent
à l'esprit que l'action résultant de la coopération des
différents Etats n'est pas uniquement conditionnée par les normes
de coopération établies. Elle est aussi sujette aux
différentes contraintes de « l'action
organisée » de prévention des conflits.
En effet, « les acteurs individuels ou
collectifs [...] ne peuvent jamais être réduits à des
fonctions abstraites et désincarnées. Ce sont des acteurs
à part entière qui, à l'intérieur des contraintes
souvent très lourdes que leur impose « le
système », disposent d'une marge de liberté
qu'ils utilisent de façon stratégique dans leurs interactions
avec les autres ». (Crozier et Friedberg, 1977 : 29-30.).
C'est donc dire que, dans les jeux de coopération, les
acteurs identifient des enjeux en fonction de leurs intérêts. Or,
la définition même de ces enjeux est tributaire d'une
rationalité limitée, résultant d'un raisonnement
séquentiel c'est-à-dire partiel et partial. Les acteurs
cherchent sans cesse, en se servant des éléments d'incertitude
dont ils prétendent avoir la maîtrise, à orienter les
actions du COPAX dans un sens qui leur garantisse l'acquisition ou la
conservation d'une position de pouvoir au sein de l'organisation.
Abordées sous cet angle, il apparaît
compréhensible que les actions du COPAX ne soient pas seulement le
reflet des résolutions et accords pris en séance, mais portent
la marque des contraintes spécifiques que tel ou tel acteur fait peser
sur ses capacités d'action. C'est ainsi que les Etats et même les
agents fonctionnaires du COPAX peuvent être portés à
éviter, à s'opposer ou alors à faciliter le
déploiement du système de prévention des conflits selon
ce qu'ils espèrent en tirer en termes de gain.
Le recours à cette approche nous permettra de parvenir
à une explication du fonctionnement interne du système en partant
des acteurs, de leurs jeux de rôles et de leurs enjeux, pour parvenir
à une explication rationnelle du fonctionnement du COPAX. Nous
procèderons donc, à chaque cas, à une identification des
jeux et enjeux en présence, à une analyse du rapport entre les
objectifs institutionnels fixés et les résultats obtenus, pour
pouvoir identifier, dans ces résultats, la part de contrainte
exercée par les acteurs du système.
L'observation de la structure du COPAX laisse entrevoir en son
sein, la présence de deux catégories précises d'acteurs
à savoir, les acteurs collectifs que sont les Etats-membres et les
acteurs individuels que sont les fonctionnaires et employés du COPAX. A
chaque type d'acteur appartiennent des jeux et des enjeux qui leurs sont
propres.
La stratégie des Etats : La poursuite de
l'intérêt national au détriment de l'efficacité du
COPAX
Pour ce qui est des Etats, la coopération au sein du
COPAX se fait dans des cadres et des objectifs fixés conjointement et
qui s'imposent à ceux-ci. Cependant, au-delà de l'aspect
prédéfini de ce cadre de coopération, il est
évident qu'il « n'y a pas de système social
entièrement réglé ou contrôlé. Les acteurs
individuels ou collectifs qui les composent ne peuvent jamais être
réduits à des fonctions abstraites et
désincarnées » (Crozier et Friedberg, 1977 :
29). Les Etats dans les jeux de coopération disposent donc, à
proximité du cadre relationnel prédéfini, d'une marge de
manoeuvre à laquelle ils font recours pour promouvoir leur enjeu
principal à savoir l'intérêt national. Trois cas de figures
peuvent nous permettre d'illustrer notre propos :
Premièrement, citons l'attitude du Gabon qui, dans le
cadre de sa politique extérieure sous-régionale, n'adhère
pas au projet d'intégration selon le modèle supranational, lui
préfère les rapports de coopération intergouvernementale,
et dont toute l'action diplomatique dans la sous-région vise à
s'assurer que le processus d'intégration ne dépasse pas le seuil
de la coopération intergouvernementale. Cette position explique les
nombreuses entraves posées systématiquement à
l'égard des initiatives communautaires notamment la libre circulation,
le droit d'établissement et les faibles contributions au financement de
la CEEAC (Awoumou, 2005 : 07).
Comme deuxième exemple, citons le Cameroun qui dans son
option de diplomatie apaisée préfère une action
évitant tout engagement direct dans les problématiques
sécuritaires sous-régionales, préfère une
diplomatie faite de dialogue basée sur les acquis du Droit International
et qui évite tout engagement militaire précoce. Cette position
explique les réticences du Cameroun à s'engager dans toutes les
situations appelant une intervention militaire tel que ce fut le cas en RCA.
Au titre du troisième exemple, on peut expliquer
l'implication du Rwanda et du Burundi dans la situation
d'insécurité qui prévaut dans les Kivu comme
résultant des stratégies de prédation de ces derniers,
mais aussi du souci de maintenir le conflit hors de leurs frontières.
(Braeckman 2003 : 281). Au sein du système, cette tentative de
détournement des objectifs du COPAX s'est traduite par des
réticences de ces deux pays à s'engager dans le processus de
résolution de la crise en RDC (Braeckman op.cit). En tout état de
cause, on a là un cas patent de stratégie d'acteurs allant
clairement à l'encontre des principes de l'action organisée du
COPAX. La quête de cet intérêt national au sein des
structures du COPAX, marque d'un détournement et d'une appropriation des
éléments d'incertitude par les Etats, est souvent
renforcée par les querelles de leadership existant entre certains Etats
de la sous région.
Toujours dans la rubrique de l'instrumentalisation des cadres
d'action du COPAX, force est de noter l'existence, au sein du corpus juridique
du COPAX, d'une ambiguïté qui a, dans le passé,
justifié la passivité de certains Etats face au drame qui se
vivait au sein de la sous-région. Cette ambiguïté porte sur
les principes d'action qui guident les interventions du COPAX dans les crises
internes des Etats de la sous-région.
En effet, l'Article 3 alinéa (b) et (d) du Protocole
relatif au COPAX reconnaît explicitement comme principe directeur de
l'action du COPAX, la non-ingérence dans les affaires internes des Etats
et le respect de la souveraineté des Etats, tandis que l'Article 4 du
même Acte précise la compétence du COPAX à
gérer toute situation d'insécurité dans la
sous-région. Mais comment peut-on prévenir, régler et
gérer des conflits qui sont presque tous intra étatiques sans
commettre par là même un acte d'ingérence dans les affaires
internes d'un Etat ? Quand on considère au surplus que ces crises
constituent les menaces les plus graves et les plus récurrentes que
rencontre actuellement l'Afrique centrale, on est plus porté à
penser que le mieux aurait été d'en faire une des raisons
fondamentales d'une intervention rapide. Il faut penser que cette contradiction
peut avoir été la cause du désengagement de certains
Etats-membres dans la résolution de crises qui traversent la
sous-région. Retenons en somme que l'ambiguïté des principes
juridiques d'action du COPAX, parce qu'elle ne permet pas de cerner avec
exactitude le fondement et les moyens d'action du système, peut
constituer une opportunité de détournement des acteurs de leurs
fonctions et de leurs obligations premières dans le système.
Notons cependant que cette incongruité juridique ne suffit pas à
elle seule à justifier l'indécision et le manque d'engagement
dont le COPAX fait montre.
La stratégie potentielle des individus :
La quête des avantages individuels
Considérant les stratégies d'appropriation par
les individus, nous nous limiterons, faute de preuves qui en démontrent
la prégnance, à préciser l'éventualité de
son influence sur les décisions et les actions du COPAX. En effet, la
possibilité pour les Etats d'influencer les actions du COPAX est
à l'image de celle que les fonctionnaires qui en sont le bras
séculier, ont de les détourner dans un sens qui leur est
favorable plutôt que dans celui prévu par les normes qui
régissent le système. L'enjeu dans ce cas réside dans
quelques avantages tels une promotion, des gratifications ou l'accès
à une position d'influence, que l'acteur individuel escompte tirer de
ces transactions. Dans ce sens, le succès des actions du système
résulte aussi de l'influence qu'ont les acteurs individuels, principaux
agents du système, sur le cours des actions et des
évènements. De façon pratique, quand on sait que le
succès de plusieurs OMP a été compromis par l'indiscipline
et les déviances de certains agents qui ont profité de leur
position pour faire main basse sur des richesses ou pour poser des actes
répréhensibles, même au plan de la Loi, alors il semble
judicieux de proposer cette grille de lecture à titre préventif
afin de prémunir le COPAX de ce genre de déviances qui en
saperaient la crédibilité.
Au bout du compte, il faut conclure que la quête de
l'intérêt national apparaît comme la variable explicative
permettant, selon la méthode stratégique, d'expliquer les
détournements et appropriations des actions du COPAX à des fins
particulières, détournement qui aboutissent dans certains cas
à l'inefficacité du COPAX du fait de l'insuffisance et de
l'inadéquation de certains de ces processus. En termes plus simples,
l'une des raisons de la faiblesse du COPAX est la poursuite par les
Etats-membres, même au sein de l'institution, de leurs
intérêts nationaux respectifs. Que dire des conséquences de
la faiblesse du COPAX sur la sous-région en général et sur
le processus d'intégration en particulier ?
SECTION C : LES
CONSEQUENCES DANS LA SOUS-REGION
En dépit de quelques cas encourageants et d'un
potentiel considérable, force est de reconnaître que l'action du
COPAX dans la sous région Afrique centrale pendant la période
2000-2008 a été insuffisante du fait de la passivité ou
même de l'abstentionnisme coupable dont cette structure a fait montre
pendant que l'Afrique centrale était traversée, par divers
conflits d'une nature et d'une violence particulièrement
inquiétante. Le fait est que, la passivité du système de
prévention des conflits a fait le lit d'un climat d'instabilité
au sein de la sous-région qui, en retour, a largement freiné le
processus d'intégration sous régionale.
Paragraphe 1 : La persistance de l'insécurité dans la
sous-région: Conséquence immédiate de la faiblesse du
COPAX
Malgré les efforts de le CEEAC, l'Afrique centrale
reste traversée par des courants belligènes qui en fragilisent la
construction identitaire.
Un tour d'horizon de la situation sécuritaire nous
amène à constater que :
a. La crise en RDC n'est pas complètement
résorbée et on perçoit encore derrière certains
mouvements rebelles la manipulation de certains Etats voisins.
b. La situation en RCA continue à inquiéter.
Elle inquiète même un peu plus, eu égard aux craintes
d'exportation de l'insécurité Darfouroise dans ce pays.
c. Au Tchad, la situation n'est pas plus reluisante. Les
groupes rebelles sont toujours présents et eux aussi continuent à
bénéficier de la situation d'insécurité qui
prévaut au Soudan.
Certes, on peut constater une baisse de presque de
moitié du nombre de crises en Afrique centrale, mais la question
pertinente est celle de savoir quel est l'apport du COPAX dans cette diminution
des conflits ? Cette accalmie sécuritaire n'est-elle pas
plutôt le résultat de certaines pressions de puissances
internationales qui, préalablement à leurs installations dans le
marché très prometteur des ressources nouvellement
identifiées en Afrique centrale, souhaitent un rétablissement de
la sécurité ? On sait par exemple que le regain
d'intérêt des Etats-Unis pour le golfe de Guinée dont 07
des 08 pays sont membres de la CEEAC, est justifié par la
découverte du statut d'oil/diamond heartland (Awoumou,
2005 :02)38(*) de
cette zone et se manifeste par une implication directe de cet Etat dans la
gestion et la résolution des différentes menaces à la
sécurité dans la sous-région, notamment à travers
l'installation d'une base militaire US à Sao Tome et Principe (Awoumou,
2005 :03)
En fait, s'il l'on ne peut pas dire que le mérite de
cette accalmie revient uniquement au COPAX, on n'est pas non plus en moyen de
dire que le COPAX n'y est strictement pour rien. Le COPAX s'est investi dans la
résolution de certains des conflits que connaît la
sous-région et qui ont, de ce fait, connu une évolution positive
comme ce fut le cas dans la sécurisation des élections en RDC.
Notons cependant qu'en face de la demande, l'offre des services de paix et
sécurité du COPAX en terme de pacification reste minime,
insuffisante et presque insignifiante.
Dans un autre sens, une des conditions de la
pérennité d'un Etat est son aptitude à créer
imposer et maintenir un climat de sécurité à
l'intérieur de ses frontières. En se déclarant seul
détenteur de tous les moyens de la force même physique, l'Etat
s'attribue, selon la conception hobbesienne du pouvoir, un Droit et en
même temps un devoir, celui de veiller à la persistance d'un
climat de cohésion sociale suffisamment acceptable. Le même
raisonnement s'applique au système de prévention des conflits de
l'Afrique centrale. En effet, si par les textes statutaires du COPAX, il lui
est conféré la responsabilité de
« prévenir gérer et régler les
conflits » dans la sous-région39(*), alors il ne serait pas
inexact de conclure que la persistance d'une crise même minime dans la
sous-région résulte aussi, au-delà des conditions qui ont
favorisé son avènement, d'un véritable déni de
compétence par le COPAX. En sommes, la responsabilité du COPAX
dans la persistance de l'insécurité qui traverse l'Afrique
centrale résulte de sa faible implication dans la gestion des crises
auxquelles la zone fait face.
Paragraphe 2 : L'évanescence de l'identité
sous-régionale: Conséquence indirecte de la faiblesse du COPAX
De l'avis de Ropivia (2001:152), « la
dialectique entre les deux phénomènes de l'intégration et
de la stabilité politique est qu'ils peuvent se réguler
mutuellement, en ce sens que la stabilité politique favorise le
processus d'intégration régionale qui est lui-même pour la
région un facteur de stabilité politique». En d'autres
termes, sécurité et intégration sont deux notions proches
qui entretiennent entre elles des rapports d'influence réciproques. De
même qu'un climat de sécurité est un facilitateur du
processus d'intégration, de même des avancées dans le
processus d'intégration permettent de créer et garantir un climat
de paix et de sécurité sous-régionale. Or, il
apparaît que l'action du COPAX devrait avoir des répercussions sur
le processus d'intégration en Afrique centrale, processus qu'il pourrait
amplifier et renforcer dans le cas d'un fonctionnement efficace ou, processus
qu'il gênerait dans l'alternative d'un mauvais fonctionnement.
La démonstration en sens inverse de cette logique nous
est fournie par la CEEAC dans la période 1992-1998. En fait, cette
période qui est marquée par l'éclatement et l'aggravation
de crises et de conflits sévères à l'intérieur de
la majorité de ses Etats-membres ainsi qu'on a pu le constater au
Burundi et au Rwanda en 1993 et en 1994, dans la République du Congo
entre 1992 et 1994, puis entre 1998 et 1999, et en République
Démocratique du Congo à partir de 1996, a aussi été
celle de l'entrée du processus d'intégration dans un état
souvent qualifié d'hibernation. (Meyer. A, 2006 : 220).
C'est cet état de chose qui a motivé la déclaration selon
laquelle « dans la conflictualité globale quasi
permanente de l'Afrique sub-saharienne post-apartheid, l'Afrique centrale se
distingue des autres grandes régions par le fait qu'elle constitue le
seul espace où le processus de construction communautaire est
miné par de nombreuses guerres civiles qui ont donné à bon
nombre d'Etats la physionomie d'une déliquescence avancée et
à l'intégration régionale celle d'une grave
paralysie.» (Ropivia, 2001:143)
Dans les faits, le COPAX a, de façon très
timide, oeuvré pour la sécurisation de la sous-région et,
comme on peut l'imaginer, son action sur le processus d'intégration
sous-régionale est restée presque imperceptible.
Dans le même ordre d'idées on note la persistance
de certaines projections d'Etats tels l'Afrique du Sud, le Nigeria, la Libye
attirés par le potentiel minier de la sous-région et mus par
l'ambition de se poser en leader de la région Afrique au sein des
instances internationales.
Au sein même de la CEEAC, on perçoit encore des
antagonismes, des querelles de leadership et de positionnement entre acteurs
politiques sous-régionaux engagés dans la quête d'une
position de leadership sous-régional, querelles portant notamment sur la
gestion des questions sécuritaires.
Enfin, on note l'extraversion de certains Etats de la
sous-région qui font preuve d'une duplicité géopolitique
préjudiciable au processus d'intégration en adhérant
à plusieurs regroupements sous-régionaux différents. Tel
est le cas de la RDC et de l'Angola qui militent en même temps au sein de
la CEEAC et de la SADC.
Dans la même logique, il ne serait pas incongru
d'expliquer le départ du Rwanda de la Communauté en 2007 comme
étant le résultat du rôle néfaste joué dans
la polémologie de l'Afrique centrale notamment dans l'instigation de la
guerre dans les Kivus en RDC. A défaut de pouvoir apporter une
réponse sans équivoque à ces préoccupations,
notons, dans la perspective d'une réponse positive, que cette
alternative, en même temps qu'elle confirmerait le lien prévention
des conflits/intégration, nous donnerait une preuve suffisante de la
faiblesse de l'apport du COPAX dans le processus d'intégration.
Après observation du tableau ainsi dépeint,
force est de convenir que la question de la prévention des conflits en
Afrique centrale, en étant un point fédérateur des
ambitions des Etats de la sous-région, constitue déjà un
motif visible d'intégration et y participe. Seulement, il demeure que
cette intégration des volontés peine à se traduire par une
implication active et actante dans le cadre d'une approche concertée de
la prévention et de la gestion des conflits. Après près de
huit années de vie gestative, l'action du COPAX dans le processus
d'intégration sous-régionale reste encore mitigée et bien
que le COPAX continue à fédérer les voeux de paix et de
sécurité en Afrique centrale CEEAC, il ne demeure pas moins vrai
qu'il ne le fait pas encore pleinement dans les actes.
Nous retiendrons donc que le COPAX, par sa création et
sa mise en place, a été un motif d'intégration des
initiatives. Seulement, étant donné sa faiblesse relative en tant
qu'instance de prévention et de gestion des conflits dans la
sous-région, le COPAX n'agit encore que très faiblement sur la
situation sécuritaire de l'Afrique centrale, et ne peut pas encore
prétendre, jusque là, avoir eu une influence décisive sur
le processus d'intégration dans la sous-région Afrique centrale.
En dernière analyse, disons que la faiblesse du COPAX
est expliquée par des facteurs de divers ordres, facteurs rendus
perceptibles par l'analyse systémique complétée par
l'approche stratégique. Ainsi, la faiblesse établie du COPAX
s'explique par la faiblesse et l'inadéquation des soutiens qu'il
reçoit de l'environnement et par le l'inadaptabilité qualitative
et quantitative des outputs du système, inadaptabilité
traduite aussi par une quasi-permanence de la courbe de rétroaction. En
y regardant plus clair, c'est-à-dire à l'intérieur
même du COPAX, on comprend, grâce à l'approche
stratégique, que la faiblesse du COPAX s'explique par les
différentes influences des Etats-membres auxquelles l'action du COPAX
est sujette. Tout comme les causes, les conséquences de la faiblesse du
COPAX sont assez déplorables et consistent en une persistance de
l'insécurité dans la sous-région et en une influence
presque imperceptible sur le processus d'intégration
sous-régionale. Mais, cette faiblesse ne nous semble-t-elle pas
être la faiblesse d'un temps ? Devrait-on pour autant occulter les
dispositions potentielles du COPAX, qui du reste, sont considérable dans
la gestion des crises sécuritaires dans la sous-région ?
Doit-on pour autant oublier tout rêve de construction et de
rentabilisation de l'identité sécuritaire de la CEEAC ?
N'existe-il pas des voies et moyens d'une rentabilisation par la
rationalisation du COPAX ?
CHAPITRE IV : PERSPECTIVES
DE LA RATIONALISATION DU SYSTEME DE PREVENTION DES CONFLITS : POUR UN
MEILEUR APPORT SUR LE PROCESSUS D'INTEGRATION
![]()
« La prévention des conflits
meurtriers est possible. Le problème n'est pas que nous ne savons rien
de la violence à grande échelle qui se prépare, mais que
souvent nous ne faisons rien ».
Commission Carnegie sur la Prévention des
Conflits Meurtriers (1997), La prévention
des conflits meurtriers : Résumé du rapport final,
Carnegie Corporation de New York, p 03
Le constat de la faiblesse du COPAX ne devrait pas constituer
pour nous un point final. Bien au contraire, c'est ce constat qui appelle une
contribution de notre part dans le sens d'une amélioration quantitative
et qualitative du rendement du COPAX. Aussi, après avoir
redécouvert la faiblesse du COPAX à partir de l'analyse de sa
réactivité face aux sollicitations de son environnement,
après en avoir envisagé les causes et les conséquences, il
nous a semblé de bon ton d'envisager les voies et moyens de
remédier à cette situation très peu reluisante et par
anticipation d'entrevoir les gains escomptés de cette rationalisation au
niveau de l'Afrique en général et de l'Afrique centrale en
particulier.
SECTION A : LA
RATIONALISATION : POUR UN RENFORCEMENT DES CAPACITES DU
COPAX
Plus que par le passé, le besoin pour l'Afrique
centrale de présenter un visage uni est perceptible. Il faut même
penser que le temps de l'Afrique centrale est
désormais compté. La paix, la stabilité et
l'intégration régionale se présentent dorénavant
comme des conditionnalités du développement (Awoumou,
2005 :11). En effet, la découverte de nouvelles ressources
minière et la persistance de situations menaçant la
stabilité de la sous-région, sont autant d'interpellation
à un rajustement de la structure du système de prévention
des conflits afin de le rendre plus efficace ou du moins afin de renforcer son
impact sur le processus d'intégration de l'Afrique centrale. Pour ce
faire, et partant de la recension des différentes raisons de la
faiblesse du COPAX, deux axes d'attaques nous semblent particulièrement
pertinents à savoir les ajustements au plan structurel et au plan
géopolitique.
Paragraphe 1 : La
rationalisation au plan structurel
Considérant que la paix en
Afrique centrale ne pourrait être consolidée que par un processus
de construction communautaire rénové qui favoriserait notamment
l'exploitation commune de certaines richesses ainsi que l'harmonisation de
certaines politiques sectorielles (Ropivia, 2001: 144), nous envisagerons dans
cette section les différents réajustements au sein de la
structure même du COPAX, qui pourraient susciter une amélioration
de son rendement.
a) Le statut : Le passage de l'inter gouvernementalisme
au supranationalisme
La quasi-totalité des théories qui encadrent
notre perception de l'intégration s'accordent à la concevoir
comme un transfert de compétences, dans la gestion de certaines
questions, des Etats à une structure supranationale via une étape
intergouvernementale. Ainsi, qu'il s'agisse de l'approche fonctionnaliste,
néofonctionnaliste ou transactionnaliste, le processus
d'intégration est envisagé comme un processus pendant lequel les
Etats se dessaisissent de la gestion de certaines matières au profit
d'une instance communautaire dotée de meilleurs moyens et censée
parvenir à une gestion plus efficace de la problématique en
question.
En faisant ce rappel de nos balises théoriques, nous
voulons mettre l'accent sur un point dont la prise en compte pourrait
effectivement permettre de parvenir à une amélioration du
rendement du COPAX et partant de la CEEAC. Ce point, c'est le passage d'un
schéma communautaire intergouvernemental à un schéma
supranational par l'attribution, le renforcement et même l'autonomisation
des compétences des instances communautaires.
Au sein de la CEEAC, ainsi que nous le rappelle Mvie Meka
(2007 :59),« la Conférence des Chefs d'Etat et de
Gouvernement apparaît comme l'institution souveraine dans laquelle se
concentrent tous les pouvoirs essentiels et importants du groupement
économique régional. Située en haut de la pyramide
institutionnelle, la conférence constitue la véritable et seule
instance de policy making power ». En fait, ainsi que nous le
rappelle Angela Meyer (2006 : 227), la performance du COPAX est
entravée par le fait que la position centrale et dominante de la
Conférence des Chefs d'Etat et des représentants directs des
Etats membres limite dans les deux cas le poids et les capacités de
contrôle des organes communautaires.
Effectivement, selon les Articles 08 et 09 du protocole
relatif au COPAX, il apparaît que la Conférence des Chefs d'Etat
est la seule instance décisionnelle du COPAX, tandis que le
Secrétariat Général en tant qu'instance de gestion
permanente du COPAX n'a qu'un rôle d'exécution. En fait, le
déséquilibre de pouvoir entre la Conférence des Chefs
d'Etat et le Secrétariat Général crée un contexte
propice à une coopération intergouvernementale qui fait du plan
d'action du COPAX le résultat d'un consensus sur les
préoccupations des différents Etats au lieu d'en faire
l'aboutissement d'un esprit de sécurité communautaire promu par
le COPAX. La pratique nous démontre effectivement que les Etats-membres
ont, à plusieurs occasions, fait preuve de duplicité
vis-à-vis de l'esprit communautaire. Bien plus, l'on relève
encore au sein des Etats, la prégnance de facteurs politiques et
économiques négatifs qui ont considérablement
freiné le processus d'intégration en Afrique centrale. Il s'agit
du manque de volonté politique des dirigeants africains, facteur
aggravé en Afrique centrale par les conflits internes et externes qui
ont non seulement provoqué l'insécurité et détruit
des infrastructures, mais ont aussi instauré un climat de
méfiance peu propice à la coopération dans la
sous-région40(*).
De ce qui précède, il découle que l'un
des moyens de renforcer la célérité et l'efficacité
de l'action du COPAX consiste à le soustraire de la dépendance de
la volonté des Etats-membres pour en faire une instance directement
responsable du maintien de la paix dans la sous-région et à
même de se saisir de toute question appelant son action ou son
intervention. L'idéal voudrait même que les actions et les
décisions du COPAX puissent s'imposer aux Etats-membres dans la
perspective d'une paix durable. Ceci revient, en d'autres termes, à
suggérer de faire du COPAX une instance autonome, dépendante
certes de la CEEAC mais à même d'initier et de mener certaines
actions sans avoir, au préalable à recevoir l'avis favorable de
la Conférence des Chefs d'Etats qui, du reste, ne se réunit
qu'une fois par an. Dans ce cas, la dépendance du COPAX serait
marquée par le contrôle à posteriori qu'exerceraient non
seulement les représentations des Etats, mais aussi les
représentants directs des populations de la sous-région, à
travers un parlement sous-régional par exemple. En somme, une des voies
de renforcement des capacités du COPAX consiste à le soustraire
de son mode de fonctionnement marqué par un intergouvernementalisme
préjudiciable, pour lui conférer un statut d'organe supranational
à même de développer une dynamique propre, d'agir plus
efficacement et plus rapidement lorsque de besoin.
b) Les ressources : pertinence, régularité
et consistance des apports de l'environnement
Une autre voie de renforcement de la capacité du COPAX
réside dans une amélioration des ressources allouées au
bon fonctionnement du COPAX en particulier, et de la CEEAC en
général. En effet, le caractère largement embryonnaire des
institutions communautaires est d'autant plus renforcé que ces
dernières ne disposent pas de moyens financiers propres, mais
dépendent en grande partie des contributions versées par les
Etats membres (Meyer, 2006 : 231). Or, selon l'analyse systémique,
le rendement du système est à l'image de la qualité et de
la quantité des soutiens, notamment des apports financiers
matériels et en personnels alloués au fonctionnement du
système.
Ainsi, à la suite de l'identification de
l'irrégularité et de l'inconsistance des ressources
allouées au fonctionnement du COPAX comme étant une des causes de
la faiblesse de l'institution, force est de préconiser, dans la
perspective d'une plus grande rentabilisation du système, une
régularisation quantitative et qualitative des cotisations
sensées couvrir les frais de fonctionnement du COPAX. Dans ce sillage,
l'option pertinente consisterait à mettre sur pied un système de
financement autonome de la CEEAC par des contributions directes issues des
populations en alternative des apports statutaires de chaque Etat-membre. Le
Projet de mise sur pied du système de financement par des Contribution
Communautaire d'Intégration (CCI) apparaît à cet effet
d'une très grande pertinence, et l'approche idoine consisterait donc
à en accélérer et à en faciliter la mise en
application au sein de la sous-région.
A coté des ressources financières, les
ressources humaines elles aussi constituent un paramètre très
important dans l'amélioration de la rentabilité d'une structure.
En effet, il est admis que la pertinence et l'efficacité des actions
d'une organisation dépendent aussi des compétences et de
l'expertise des agents commis à cette tache. Dans ce sillage et,
concernant le COPAX force est de noter, ainsi qu'on l'a observé dans
notre Chapitre II, qu'un accent particulier est mis sur le recrutement de
personnes qualifiées pour animer certaines instances vitales du COPAX.
La stratégie adéquate dans ce cas consisterait, tout en
conservant les acquis, à aller aussi loin que possible dans la voie de
la capacitation du personnel du COPAX.
Un autre point à ne pas négliger est celui des
équipements du COPAX. Notons à ce niveau que la technologie
constitue un élément essentiel dans la quête de
succès des entreprises contemporaines. A l'ère de la
mondialisation et des nombreux flux qu'elle implique, à l'ère de
la vulgarisation des nouvelles technologies de l'information et de la
communication, considérant le poids actuel de la technologie dans la
conduite des opération militaires en particulier et de toute
stratégie en général, force est de suggérer que le
COPAX soit équipé de matériels technologiques de pointe
qui puissent lui conférer un avantage sur toutes le menaces
identifiables dans la sous région. Nous voulons parler dans cette suite,
de la qualité des équipements logistiques de structures telles le
MARAC qui devraient être doté d'un matériel de
dernière génération pour permettre une collecte et un
traitement efficace de l'information. Nous voulons aussi parler de la
logistique de la FOMAC dont la qualité technologique des
équipements constitue un gage certain de son succès dans toutes
les situations appelant son intervention. Etant donné la
diversité et la complexité des missions auxquelles cette Force
doit faire face, il semble évident que le renforcement des
capacités et la dotation d'un équipement de pointe
améliorerait substantiellement son rendement.
Paragraphe 2 : Au plan
géopolitique : l'avènement d'une puissance motrice
Selon le Pr. Ntuda (2004: 10) « les raisons de
la faiblesse de la CEEAC ne tiennent pas seulement à la persistance de
l'inadéquation des missions de la CEEAC avec les ressources mises
à sa disposition ; mais elles tiennent fondamentalement à
une série de facteurs qui vont de l'éclatement, depuis la fin de
la guerre froide, de la sous-région en plusieurs morceaux, à la
prolifération des conflits due à l'absence d'un véritable
leader. ». Dans cette péricope, l'auteur énonce
que l'émergence d'un leader géopolitique aurait un effet
amplificateur sur le processus d'intégration en général,
et sur celui de construction de l'identité sécuritaire
sous-régionale en particulier. Plusieurs opinions militent en faveur de
cette thèse.
Ainsi, Ropivia (2001 :144) pense qu'au-delà de
l'apparence d'un conflit frontalier, le différent au sujet de la
presqu'île de Bakassi constitue une menace indirecte de la CEDEAO et
surtout du Nigeria sur la CEEAC considérée comme un espace vide
en matière de construction communautaire, sans Etat- pivot concurrent.
Awoumou, (2005: 06) pour sa part, pense que « le
golfe de guinée souffre de l'absence d'une puissance motrice et
mobilisatrice pouvant s'imposer comme le leader incontesté, de par sa
capacité d'influence voire de nuisance, aussi bien au sein qu'en dehors
de ladite zone, apte à s'opposer aux convoitises que suscite la
sous-région »
De l'avis de ces différents auteurs, tous experts de la
question, l'Afrique centrale souffre de l'absence en son sein d'un leader
déclaré qui puisse porter le processus d'intégration.
Selon cette logique, le processus d'intégration de l'Afrique centrale
serait plus efficace s'il était soutenu par une puissance motrice locale
qui démontrerait d'une capacité d'influence et de nuisance
suffisante pour contrecarrer les projections des Etats et des
sous-régions voisines. Trois candidatures sont avancées pour
jouer ce rôle de premier plan en l'occurrence, le Couple Cameroun/Tchad,
le couple Gabon Congo et l'Angola. Dans chaque cas, nous essayerons de peser le
pour et le contre de chaque candidature.
a) Couple Gabon/Congo
Le couple Gabon/Congo est né de la volonté
Gabonaise de se poser en tant que leader sous-régional, mais aussi de la
conscience de l'insuffisance de ses seuls atouts pour parvenir à une
telle quête. En effet, « la tactique du Gabon ces
dernières années a consisté à s'associer au Congo
en vue de s'imposer comme moteur de la CEEAC et de la CEMAC. »
(Awoumou, 2005 : 07). La force de ce couple repose sur le fait qu'il se
fonde sur une entente séculaire renforcée par des liens
personnels et une coopération bilatérale conviviale. Il existe en
fait une certaine communauté socio-historique entre ces deux pays. Le
Gabon a été une province historique du Congo et plusieurs de
leurs composantes ethniques à l'instar des Kotas, des
Mbédés, des Nzebis, des Punus, des Tékés et des
Vilis, restent culturellement très liées. Au delà de
l'alliance matrimoniale qui lie les deux Chefs d'Etat, le Président
Bongo étant le gendre du Président Sassou Nguesso, on note une
très forte sympathie entre les classes dirigeantes sur la base d'une
camaraderie entretenue depuis les bancs des salles de classes, et même
parfois sur la base de relations fraternelles du fait du cousinage existant
entre ces dirigeants. Ce couple est une belle démonstration du potentiel
de cohésion, d'harmonie et de communion pouvant exister entre des Etats
de la sous-région.
Mais, au-delà du dynamisme et de la
détermination de ce couple, il faut noter que cette candidature est
dévaluée par certains facteurs qu'il faut préciser aussi
ici.
Le premier facteur défavorable au couple Gabon/Congo
est leur faiblesse démographique, la population cumulée des deux
pays s'élève à seulement 5 000 000 d'habitants contre
123 933 000 habitants41(*) que compte toute la CEEAC. De plus la densité
au km2 de ces deux pays est seulement de 8 habitants au
km2 contre 54,1 pour toute la CEEAC. A la vue de cela, on comprend
que le gros défaut du couple Gabon/Congo est celui de la
représentativité sociodémographique. Ainsi, la
volonté et la détermination sont certes des atouts mais, ces
atouts à eux seul ne sont pas suffisants pour garantir le succès
du leadership géopolitique du couple Gabon/Congo. Que dire du couple
Cameroun/Tchad ?
b) Couple Cameroun/Tchad
A l'opposé du couple Gabon/Congo, le couple
Cameroun/Tchad repose sur une assise sociodémographique plus forte. En
effet, la population de ces deux pays s'élève à 25
millions d'habitants, ce qui représente 20,17 % de la population totale
de la sous-région dont la densité est de 29 habitants au
km2.
En plus de cet avantage démographique, les relations
entre les deux pays reposent sur « un engagement politique
appuyé » (Awoumou, 2005: 8) et sont plus productives en
termes de réalisations. On peut en effet mettre à l'actif de
cette alliance :
· L'effectivité de la libre circulation des
biens et des personnes entre les deux pays ;
· Une coopération scolaire et universitaire
fructueuse ;
· Le raccordement du réseau électrique
Tchadien au barrage hydroélectrique de la Lagdo au Cameroun ;
· Le bitumage de la route
Ngaoundéré-Touboro/Moundou
· La réalisation du pipeline Tchad/Cameroun
permettant l'évacuation du pétrole Tchadien par le port
camerounais de Kribi assorti de l'utilisation du tracé de ce pipeline
pour l'inclusion du Tchad dans le projet international de câbles
sous-marins de télécommunication.
On le voit, le dynamisme de ce couple se traduit moins par la
sympathie et la filiation que par des réalisations, ce qui le place dans
une position confortable dans la course au leadership sous-régional. En
effet, la valeur de la candidature de ce couple est renforcée par le
fait qu'il nous donne déjà un bel exemple d'une
coopération pragmatique, d'une intégration très
avancée.
Mais à l'opposé du couple
précédent, on peut reprocher à ce couple d'être
constitué sur une base trop pragmatique. En effet, les
réalisations de ce couple semblent plus mues par les
intérêts respectifs de chaque Etat que par un esprit
communautariste.
c) Angola
Après la longue période d'inactivisme
sous-régional du fait de la guerre de 27 ans qui a déchiré
ce pays, l'Angola se pose de plus en plus comme un interlocuteur valable de
certaines puissances continentales et de ce fait comme un représentant
efficace de sa sous-région.
A son avantage, l'Angola compte ses énormes richesses
pétrolières et diamantifères, mais aussi et surtout une
armée de 135 000 hommes bien équipés et aguerris par 27
années de guerre, ce qui en fait une force de dissuasion non
négligeable. Fort de ces atouts, l'Angola a déjà
démontré sa capacité à contrecarrer les projections
de l'Afrique australe dans notre sous-région notamment en jouant un
rôle déterminant dans la résolution de la crise
Démo-congolaise42(*). Relativement à la problématique de la
prévention et de la gestion des conflits en Afrique centrale, l'Angola
est à notre sens, doté de plusieurs atouts tels sa
capacité militaire qui lui permettraient de jouer valablement le
rôle de gendarme de la sous-région.
Mais, la candidature Angolaise reste contrariée par les
énormes sollicitations sociopolitiques auxquelles le régime
actuel doit faire face. En effet, la guerre a laissé dans ce pays
d'énormes et profondes séquelles qui menacent le processus de
reconstruction nationale. C'est donc dire que la capacité réelle
de l'Angola dans la sous-région dépend d'abord de sa
capacité à se reconstruire.
SECTION B : ANALYSE
PROSPECTIVE : LES GAINS ATTENDUS DE LA RATIONALISATION DU COPAX SUR LE
PROCESSUS D'INTEGRATION
Cette présentation des différents axes
d'amélioration du COPAX serait, à notre sens incomplète si
elle ne contenait pas une illustration même à titre de projection,
de ce que serait la CEEAC, dans le cas d'un fonctionnement correct. Nous
pensons même, dans la perspective d'une amélioration du rendement
du COPAX, que l'idéal voudrait qu'on se fixe des objectifs au
départ sur la base desquels il serait possible de procéder
à mi ou fin parcours, à l'évaluation du degré
d'avancement et de réalisation des activités de rationalisation
programmées.
Afin que notre analyse prospective ne soit pas
réductible à une construction chimérique et même
idéaliste, nous l'appuierons sur les théories envisagées
comme cadres conceptuels du processus de l'intégration. Grâce aux
lumières fournies par ces approches nous envisagerons les
résultats d'un bon fonctionnement du COPAX au plan sécuritaire,
économico-fonctionnel, et enfin, au plan culturel.
Paragraphe 1 : Au plan sécuritaire : La pacification de
toute la sous-région
Le constat de la concomitance entre la recrudescence des
guerres en Afrique centrale et le fléchissement du processus
d'intégration dans la même zone nous a mené, ainsi qu'on la
précisé plus haut, à conclure de l'étroite liaison
qui existe entre ces deux notions. En d'autres termes, il semble
évident, soit que les Etats traversés par les guerres ne trouvent
pas les moyens de participer au projet de construction de l'identité
sous-régionale qui leur parait, du reste, de moindre importance dans
leur contexte, soit que l'absence d'une identité sous-régionale
forte favorise l'avènement de facteurs incitateurs de conflits.
L'approche fonctionnaliste, et plus tard l'approche
néo-fonctionnaliste, identifient des questions telle
l'insécurités transfrontalière et sous-régionales
comme sortant du cadre des capacités des Etats et constituant un point
de départ du processus d'intégration parce que la perspective de
leur gestion efficace appelle forcement la mise en communs, par les Etats, de
leurs moyens et de leurs ressources en la matière. Ainsi, l'ampleur des
préoccupations sécuritaires, dont la résolution
dépasse en large partie le cadre et les capacités nationales,
persuaderait les Etats qu'une paix durable serait atteinte plus facilement
grâce à la coopération que par le chemin de l'opposition et
de la contrainte réciproque (Meyer, 2006 :275)
Poursuivant dans la même lancée, nous sommes
d'avis que l'intégration, en même temps qu'elle constitue le point
de départ et le moyen idoine de la gestion de la problématique
sécuritaire, en est aussi un des acquis. En termes plus clairs, s'il est
vrai qu'on s'intègre pour mieux gérer le problème de
l'insécurité, alors il n'est pas moins vrai que
l'établissement d'un climat de stabilité ne ferait que renforcer
le processus d'intégration enclenché dans ce but.
Au sein de la CEEAC, nous l'avons vu, il persiste des menaces
telles la criminalité transfrontalière, l'extraversion des
mouvements de rébellion et la circulation incontrôlée des
ALPC. Toutes ces menaces créent un climat d'incertitude,
d'instabilité et d'insécurité qui empêche
particulièrement le rapprochement des hommes et donc limite le processus
d'intégration.
En particulier, le facteur de la criminalité
transfrontalière est assez perturbateur car, celle-ci sévit dans
des zones frontalières où précisément devrait se
ressentir la vigueur de l'intégration sous-régionale. Nous
pensons donc à ce propos, que l'efficacité du COPAX qui se
traduirait par une éradication de ce fléau susciterait un
véritable regain d'intérêt des populations pour les
relations internationales en général et sous-régionales en
particulier.
En ce qui concerne l'extraversion des mouvements de
rébellions, notons qu'en plus de créer de l'instabilité
dans les zones où ils se projettent, ces groupes constituent très
souvent la pomme de discorde qui sépare les Etats de la
sous-région. On ce rappelle à ce propos du refroidissement des
relations Tchado-centrafricaines à partir de l'année 2000 suite
aux accusations réciproques des deux Chefs d'Etat d'alors,
d'héberger et de soutenir les rebellions qui menacent leurs
régimes respectifs. Une telle problématique ne peut, en fait,
être efficacement résolue que dans le cadre d'une approche
consensuelle que permet justement le cadre d'intégration
sécuritaire qu'est le COPAX. En fait, la disparition des groupes
rebelles transfrontaliers parce qu'elle inhibe les sources de mésentente
en les chefs d'Etats sera d'un apport certains dans le réchauffement des
rapports entre Chefs d'Etats et dans le renforcement de l'intégration
sous-régionale en général. En conclusion, moins
d'insécurité signifie, pour la sous-région, plus de paix
à l'intérieur et entre les Etats et donc plus de chances de
renforcement du processus d'intégration.
Paragraphe 2 : Au plan économique et fonctionnel : une
meilleure gestion des ressources de la sous-région
En 1998, lors de la relance de ses activités,
les dirigeants de la CEEAC, conscient de l'impact de la paix et de la
sécurité sur le projet d'intégration économique,
ont incorporé un volet sécuritaire parmi les objectifs
fondamentaux de l'institution. Ici déjà on peut percevoir le fait
que le fonctionnement efficace du COPAX devrait être d'un apport
considérable dans le processus de l'intégration économique
en particulier et dans le développement économique de la
sous-région en général.
Plus que jamais, l'Afrique centrale et le monde sont
conscients des richesses du sous-sol de l'Afrique centrale. Plus que jamais
l'Afrique est confronté au risque de déstabilisation et blocage
du processus de construction de son identité culturelle par des
puissances qui voudraient faire main basse sur ce trésor et plus que par
le passé, l'Afrique centrale devrait présenter au monde un front
uni pour résoudre et prévenir les conjonctures défavorable
à la sécurité et promouvoir l'établissement de
relations marquées par la coopération et le partenariat comme
méthode idoine d'accès aux richesse du sous-sol de l'Afrique
centrale.
Le fonctionnement efficace du COPAX, en même temps qu'il
mettrait les ressources de la sous-région à l'abri des projets de
prédation de certains acteurs de l'univers des relations
internationales, créerait un cadre propice à un
développement intégral basé sur une exploitation et une
gestion concertée des ressources de la sous-région.
« En effet, capable de combler partiellement la faiblesse et les
carences des Etats sur le plan sécuritaire, une approche par la
sphère régionale pourrait faciliter la résolution d'une
partie des problèmes et des défis face auxquels une approche
unilatérale se montre largement insuffisante et
inappropriée » ( Meyer. A, 2006:376.). L'exemple
Tchado-Camerounais du Pipeline Doba/kribi constitue un bel exemple de la
capacité de concertation et d'intégration dans gestion des
ressources en Afrique centrale, et notre avis est qu'un fonctionnement optimal
du COPAX devrait susciter une démultiplication de tels projets.
Ainsi, en plus de permettre une gestion harmonieuse des
ressources de la sous-région, la pacification de celle-ci ouvre des
opportunités de partenariat qui constitueront des cadres d'une
rentabilisation optimale des ressources de la sous-région.
Paragraphe 3 : Au plan culturel : la consolidation de la paix
Selon la théorie transactionnaliste de
l'intégration, dans le projet d'intégration, l'accroissement des
communications entre les peuples aboutit à l'avènement d'une
communauté marquée par la normalisation de certaines perceptions,
conceptions, us et coutumes. Partant de cette thèse, nous pensons que
l'augmentation des flux de biens et personnes au sein de la sous-région,
aboutirait à la naissance d'une identité culturelle CEEAC. C'est
donc à un travail de construction ou, pour le moins de facilitation de
l'avènement d'une culture de paix que nous espérons parvenir
grâce à l'efficacité du COPAX.
En effet, comme nous l'avons vu dans le cadre de nos
précisions terminologiques, le domaine de la prévention des
conflits constitue un large spectre qui inclut d'une part la prévention
opérationnelle marquée par le déploiement des troupes de
la FOMAC, et d'autre part, la prévention structurelle ou
prévention par la consolidation de la paix, qui elle agit sur les causes
profondes des conflits. La Commission Carnegie (1997: 20) soutien dans ce sens
que la prévention structurelle s'appuie sur des stratégies comme
la mise en place de système juridiques internationaux, de
mécanismes de règlement des conflits et d'accords de
coopération ; la satisfaction des besoins essentiels des
gens en matière économique, sociale culturelle et
humanitaire.
Il est de notre avis en effet, que l'action du COPAX ne
devrait pas se limiter à arrêter les conflits mais devrait aussi
envisager les voies et moyens d'inhiber les causes profondes de ces conflits,
et promouvoir l'avènement d'une société de dialogue, de
compréhension et d'égalité de chances. Le renforcement des
capacités du COPAX envisagé dans notre analyse comme gage d'une
action efficace sur le processus d'intégration devrait, de toute
évidence, résulter aussi dans l'avènement d'une culture
centrafricaine de la paix, faite de tolérance de dialogue et de
communion entre les différents Etats et entre les populations de la
sous-région.
CONCLUSION
![]()
Arrivé au terme de notre analyse, force est de
repréciser les questions et évolutions qui en ont fait l'ossature
et ont meublé les débats.
Nous sommes partis de l'identification d'un contraste au sein
de la sous-région Afrique centrale qui résidait en ceci que la
sous-région qui est traversé par une conflictologie
particulièrement sévère est aussi
caractérisée par l'évanescence de son identité.
Notre attention était particulièrement attirée par le fait
que la période de recrudescence des conflits est aussi celle de la
rentrée en hibernation de la CEEAC notamment entre 1992-1998 et que la
période de relance des activités du COPAX coïncide avec la
prise de conscience de l'importance et de l'impact de la sécurité
sur le processus de construction identitaire sous-régionale et que cette
période soit aussi celle d'une diminution en nombre et en
intensité des conflits de la sous-région.
Partant de ce constat, nous avons supposé l'existence
d'un lien entre la prévention des conflits et l'intégration
sous-régionale en Afrique centrale. Nous supposions dans cette logique
que la multiplicité des guerres qui ont traversé la CEEAC aurait
été favorisée par la latence dans laquelle se trouvait le
processus d'intégration en général et le processus de
construction de l'identité sécuritaire régionale en
particulier. Conscient de l'impact qu'aurait le système de
prévention des conflits de la sous-région sur le processus
d'intégration, nous nous sommes posés la question de
départ de savoir quel a été pendant la période
200043(*)-2008 l'impact du
COPAX sur la dynamique d'intégration en Afrique centrale CEEAC.
Comme outils d'analyse, nous permettant de parvenir de
façon adéquate à une réponse à la question
sus-énoncée, nous avons opté pour l'approche
systémique conceptualisée par David Easton, à cause de son
aptitude à rendre lisible le fonctionnement des systèmes et
à cause de son adaptabilité à l'analyse du
phénomène d'intégration régionale. Dans la
perspective d'une compréhension suffisante du phénomène
nous nous proposions, le cas échéant, de compléter les
limites de l'approche systémique par l'approche stratégique
surtout en ce qui est de l'explication du fonctionnement interne du COPAX.
Avant d'embrasser l'analyse proprement dite et afin d'en
garantir la pertinence mais aussi la singularité, nous avons
estimé important de procéder à une revue de la
littérature et des théories en présence puis de
procéder à une précision du substratum théorique
qui encadrera notre analyse. De cette étape, il ressort que nous-nous
sommes limités à une définitions simple du conflit
perçu à la suite de Clausewitz (Von) (1832 : 37), comme une
confrontation violente entre plusieurs groupes sociaux marquée par le
recours à la force dans la perspective, pour chacun des groupes en
présence, d'imposer sa volonté à ses antagonistes.
A partir de cette définition nous avons défini
la prévention des conflits comme étant l'ensemble des
méthodes, des moyens imposant la résolution des conflits par une
voie autre que le recours et l'usage de la force et de la violence. Elle part
de la diplomatie préventive entendue comme l'influence sur les
principaux acteurs aux conflits à la prévention factuelle
constituée de toutes les mesures de prévention structurelle et
opérationnelle des conflits visant à prévenir, limiter ou
résorber les conflits dans la sous-région.
Par contre, nous concevions l'intégration comme
résultant de la convergence de plusieurs courants à savoir :
o Le courant culturel qui est tributaire de l'amplification
des échanges et des communications entre les individus et qui
mène à l'avènement d'une culture commune.
o Le courant fonctionnel caractérisé par la mise
en commun des moyens et des initiatives dans la gestion de certaines ressources
et de certaines initiatives techniques communes en vue d'une exploitation plus
rentable.
o Le courant sécuritaire caractérisé par
la mise en commun de moyens dans l'optique d'inhiber ou de maîtriser
toutes les menaces à la sécurité et à la
stabilité sous-régionale.
Pour nous donc, le processus d'intégration politique
résulte de la convergence de ces différents courants. Il peut
certes être porté par un seul de ces courants mais la convergence
de ces différents courants est un gage de la force et de
l'efficacité du processus d'intégration. Dans la même
logique nous pensons que le courant sécuritaire apparaît comme une
piste importante par laquelle pourrait être envisagé le processus
d'intégration devant mener à terme à une
intégration politique en Afrique centrale.
Après ces précisions d'ordre théorique
nous envisagions la problématique dans les faits. Ici, nous partions
d'une recension des différents conflits qui ont traversé la
sous-région pendant la période 2000-2008, cadre temporel de notre
analyse. A la suite de ce travail de recensement nous identifions huit
crises majeures dans la sous-région que nous avons placées au
centre de notre analyse à savoir, le conflit burundais, la guerre de RDC
d'après 1998, les crises centrafricaines de 1993 à 2003 et de
2003 à 2007, le putsch de Sao Tomé, le conflit du Pool au Congo
et la guerre d'Angola. Ayant revisité la genèse et les
évolutions de ces conflits, nous-nous sommes attardés sur les
considérations structurelles qui ont porté ces conflits et dont
la connaissance pourrait constituer un atout de poids dans le projet de
systématisation de la prévention des conflits en Afrique
centrale. Ainsi, nous identifions comme causes structurelles des conflits en
Afrique centrale, les considérants historico-culturel,
socio-économiques, politiques, géopolitiques et
géostratégiques. Après l'analyse des conflits, il a
été question pour nous de voir quelles ont été les
réactions du COPAX face à toutes ces crises qui appellent
pourtant son intervention.
Plus loin, nous avons procédé à une
évaluation des actions du COPAX. Ainsi, nous constations que les
réactions du COPAX étaient quantitativement insuffisantes
étant donné le grand écart entre le nombre des crises
majeures que nous avons recensé et le nombre des réactions du
COPAX. Sur le plan qualitatif, le constat de l'insuffisance s'impose eu
égard à l'apport limité de l'intervention du COPAX dans
le processus de résolution des crises dans lesquelles le COPAX s'est
investi. En somme, nous avons abouti à la conclusion que l'action du
COPAX est certes déjà perceptible mais qu'elle ne l'est pas
encore suffisamment pour influencer positivement le processus
d'intégration de la sous-région.
A partir de ce point, nous éprouvions un malaise
suscité par la sensation de l'incomplétude de nos travaux au cas
où ceux-ci n'arrivent pas non seulement à déceler les
causes de cette faiblesse du COPAX, mais aussi à en déterminer
les conséquences réelles dans la sous-région.
En ce qui concerne l'explication de la faiblesse du COPAX,
l'analyse systémique nous a permis de comprendre, au niveau des
inputs, qu'elle résulte d'abord du contraste entre les
nombreuses demandes de l'environnement et la faiblesse des soutiens
reçus par le COPAX et qui sont sensés le nourrir, ensuite de
l'inadéquation des outputs qui sortent du système dans
une forme qui ne garantit pas leur applicabilité directe dans
l'environnement, et enfin de la permanence et de la récurrence du
feedback loop qui illustre ainsi l'insatisfaction de l'environnement
et la conversion de presque tous les outputs du système en
nouveaux inputs. Parvenus à ces conclusions, nous avons
été contraints de nous rendre à l'évidence des
limites de l'approche systémique à permettre une explication de
la faiblesse du COPAX en partant d'une analyse du fonctionnement interne de ce
système. Nous savions en effet que le concept du black box qui
structure l'analyse systémique et qui fait du système une
donnée opaque à toute analyse ne nous permettait pas de parvenir
à une compréhension complète des insuffisances du COPAX.
Pour palier à cette insuffisance, nous avons fait recours à
l'approche systémique plus à même de mettre en
évidence les différentes contraintes de l'action
organisée44(*)
auxquelles le COPAX est assujetti. Grâce à
l'approche systémique nous comprenions, sur la base de l'analyse de
l'influence des acteurs individuels et collectifs sur l'action de toute
l'organisation, que la faiblesse du COPAX résulte aussi des contraintes
imposées à son action, non seulement par les Etats-membres qui
espèrent ainsi en détourner l'action à leur avantage
particulier, mais pourrait aussi résulter d'une instrumentalisation des
cadres relationnels du COPAX par les agents individus qui sont chargés
d'en assurer le fonctionnement.
Les conséquences de la faiblesse du COPAX pour leur
part sont de divers ordres. Il s'est en effet avéré que la
persistance de quelques poches d'insécurité dans la
sous-région apparaissait comme une conséquence immédiate
de la faiblesse du COPAX et que le faible degré d'intégration de
la CEEAC résulte aussi, bien que de façon indirecte, de la
faiblesse du système de prévention des conflits.
Ayant découvert la faiblesse, les causes et les
conséquence de la faiblesse du COPAX, nous nous sommes dit que nous ne
ferrions pas oeuvre utile si, ayant posée le diagnostic nous ne
proposions pas des esquisses de solutions, à la problématique
envisagée. En d'autres termes, après avoir identifié le
problème, il nous a semblé au plus impératif ou du moins
nécessaire de proposer des pistes de solutions au problème.
Ainsi, dans l'optique du renforcement du rendement du COPAX, nous avons
proposé au plan structurel le passage de l'intergouvernementalisme
caractérisé par une trop grande dépendance du COPAX
vis-à-vis du bon vouloir des Etats-membres, au supranationalisme
marqué par une autonomisation et un renforcement des capacités et
des prérogatives du COPAX. Dans la même veine mais au plan
géopolitique cette fois, il est apparu que le fonctionnement du COPAX
serait amplifié par l'avènement d'un Etat-leader ou d'un couple
d'Etats qui joueraient le rôle de moteur du processus
d'intégration de la sous-région particulièrement dans le
processus de construction de l'identité sécuritaire. Eu
égard à leurs différents atouts, nous envisagions comme
candidats potentiels les couples Gabon/Congo et Cameroun/Tchad puis, l'Etat
Angolais qui se présente aujourd'hui comme la puissance militaire
locale.
Toujours dans l'esprit de la rationalisation et afin de
permettre une évaluation du processus de rentabilisation du COPAX, nous
avons envisagé dans une ultime section, les gains à escompter
d'un fonctionnement régulier du COPAX. Ici, nous concluions qu'un
fonctionnement efficace du COPAX conduirait de prime abord à une
pacification de la sous-région, conséquence d'une gestion prompte
et efficace de la problématique sécuritaire dans cette
sous-région, mais aussi à un renforcement du processus
d'intégration économique marqué notamment par une
meilleure gestion des ressources communes de la sous-région et, enfin,
à l'avènement d'une culture de paix purement centrafricaine,
résultat de l'intériorisation par les acteurs politiques de la
prépondérance du mode de gestion pacifique des différents
sur le recours à la force.
REFERENCES
I/ OUVRAGES
- Ango Ela Paul (dir) (2001), La prévention des
conflits en Afrique centrale : prospective pour une culture de la paix,
Karthala, Paris.
- Aron Raymond (1962), Paix et guerre entre les
nations, Calman-levy, Paris
- Bach Daniel (1998), Régionalisation,
mondialisation et fragmentation en Afrique subsaharienne, Karthala,
Paris
- Balassa, Bela (1961) The theory of economic
integration, Irwin, Homewood, Illinois
- Bassey Ibok et Nhara. (dir) (1996), le système
d'alerte rapide de l'OUA sur les situations de conflit en Afrique,
Catseye, Addis Abeba.
- Blom Amélie et Charillon Frédéric
(2001), Théorie et concepts des relations internationales,
Hachette, Paris.
- Braeckman Colette (2003), Les nouveaux
prédateurs, Arthème Fayard, Paris
- Chautard Sophie (2002), L'indispensable des conflits du
20es, Studyrama, Levallois-Perret.
- Clausewitz (Von) Karl (1832) De la guerre,
édition de minuit, Paris.
- Creveld (Van) Martin (1998) La transformation de la
guerre, édition du rocher, Paris.
- Crozier Michel et Friedberg (1977) L'acteur et le
système, Seuil, Paris
- Durkheim Emile (1894) les règles de la
méthode sociologique
- Easton, David
a. (1965), A framework for political analysis,
Englewood cliffs, prentice-hall.
b. (1974), Analyse du système politique,
Armand Colin, Paris.
- Grawitz Madelaine (1999) Lexique des sciences
sociales, Dalloz, Paris.
- Hermet Guy et Al. (2001) Dictionnaire de la science
politique et des institutions politiques, Dalloz, Paris
- Legault Albert et Al. (dir) (2004), Les conflits dans le
monde, Presses de l'université de Laval, Québec
- Meyer Angela (2006), L'intégration
régionale et son influence sur la structure, la sécurité
et la stabilité d'Etats faibles. Thèse de Doctorat
- Mitrany David (1966) A working peace system,
Grandangle Books, Chicago
- Mutoy Mubiala (2003) Coopérer pour la paix en
Afrique Centrale, Institut des Nations Unies pour la Recherche sur le
Désarmement, Genève
- Mvie Meka Elie (2007) Architecture de la
sécurité et gouvernance démocratique dans la CEEAC,
Presses Universitaires d'Afrique, Yaoundé
- Mwayila Tshiyembe (2003), Géopolitique de la paix
en Afrique médiane, Harmattan, Paris
- Vullierme Jean-Louis (1989), Le concept de
système politique, PUF, Paris
II/ ARTICLES
- Ateba Isidore (2001) « La pauvreté comme
mécanisme amplificateur des tensions sociales » in La
prévention des conflits en Afrique centrale, Karthala, Paris, pp.
79-84
- Awoumou Côme Damien. (2007) « La mise en
oeuvre du mécanisme d'alerte rapide de l'Afrique centrale : Un
processus enfin lancé ? » in Enjeux, N° 33,
pp. 3-6
- Bedjaoui Mohammed. (2005) « Principes de base de
la diplomatie préventive » in La diplomatie
préventive, Nil, Paris, pp. 55-82
- Bussy (De) Marie-Elisabeth et Al. (1971)
« Approches théoriques de l'intégration
européenne » in Revue française de science
politique, Volume 21, N°3 pp. 615-653
- Chouala Yves Alexandre, « Puissance,
résolution des conflits et sécurité collective à
l'ère de l'union africaine : Théorie et
pratique. », in
www.diplomatie.gouv.fr/fr/IMG/pdf/19_288-306.pdf
- Constantin Francois (1972)
« l'intégration régionale en Afrique noire : Etat
des travaux » in Revue française de science politique
Volume 22, N° 5 :1074 -1110
- Cosme Nelson. (2001), « l'architecture de
paix et de sécurité en Afrique centrale », in La
prévention des conflits en Afrique centrale : prospective pour une
culture de la paix, Karthala, Paris, 303-307.
- Fouche Vincent et Jézéquel Jean-Hervé
(2004) « Conflits en Afrique subsaharienne, structuration et
faiblesse du nouvel interventionnisme » in Les conflits dans le
monde, Presses de l'université de Laval, Québec, pp.
155-165
- Eteki Mboumoua William (2001), « Eléments
d'une culture de la paix en Afrique centrale » in La
prévention des conflits en Afrique centrale : prospective pour une
culture de la paix, Karthala, Paris, 189-199.
- Kounou Michel (2001) « Les conflits armés
post-guerre froide en Afrique au sud du Sahara : Un essais de
caractérisation » in Revue Africaine d'Etudes Politiques
et Stratégiques, N°1 pp. 223-245
- Maurice Bertrand. (1997) « Vers une
stratégie de prévention des conflits ? » In
Politique étrangère, Volume 62, N° 1, pp. 111-123.
- Mouelle Kombi Narcisse (1999)
« L'Intégration régionale en Afrique centrale. Entre
interétatisme et supranationalisme ». In
L'intégration régionale en Afrique centrale. Bilan et
perspectives, Karthala, Paris pp. 205-229
- Ntuda Ebode Joseph-Vincent
a. (2004), « Géopolitique des régions
africaines : quel destin pour l'Afrique médiane
latine ? » in Diplomatie Magazine N° 11,
Novembre-Décembre, pp. 38-45
b. (2005) « La redistribution de la puissance en
Afrique médiane CEMAC: La nouvelle configuration des alliances
sous-régionales. » In Enjeux N° 22 Janvier-Mars,
pp. 34-37
- Ntuda Ebode Joseph-Vincent et Nsizoa Marcel (2001)
« Afrique et mondialisation ; Obstacle à l'insertion et
stratégie d'expansion : Un regard politologique » in
Revue Africaine d'Etudes Politiques et Stratégiques, N°1, pp
119-145
- Percheron Annick. (1971) « Les applications de
l'analyse systémique à des cas particuliers » in
Revue française de sociologie, Volume 12, N°1, pp
195-212
- Ropivia Marc-Louis
a. (1998), « Institutions déliquescentes et
espace éclaté. Quelle intégration régionale en
Afrique centrale ?» In Régionalisation, mondialisation et
fragmentation en Afrique subsaharienne, Karthala, Paris, pp 175-184
b. (2001), « l'Afrique centrale
embrasée : pour une géopolitique de pacification
régionale » In La prévention des conflits en
Afrique centrale : prospective pour une culture de la paix, Karthala,
Paris, pp 143-158
- Tardy Thierry. (2000) « Le bilan de dix
années d'opérations de maintien de la paix » in
politique Etrangère, Volume 65, N° 2, pp. 389-402
III/ RAPPORTS ET AUTRES
DOCUMENTS CONSULTÉS
- Allocution du Louis Sylvain-Goma (Général)
Secrétaire Général de la CEEAC lors de la 7eme
réunion ordinaire de la Commission de Défense et de
Sécurité (CDS) le 30 août 2007 à Malabo.
- Awoumou Côme Damien « Le Golfe de
Guinée face aux convoitises », Communication lors de
la 11ème Assemblée Générale du CODESRIA sur le
thème : Repenser le développement africain :
au-delà de l'impasse, les alternatives, 06-10 décembre 2005,
Maputo, Mozambique
- Fonds Africain de Développement (2004), Document
de stratégie d'assistance à l'intégration régionale
(DSAIR) pour l'Afrique centrale 2005-2009
- Fogue Alain (2007) « les questions
stratégiques », Séminaire de DEA/Master II sur le
thème : le déficit d'autonomie politique et
stratégique de l'Etat post colonial et les problèmes africains
actuels, Université de Yaoundé II.
- Nzongola-Ntalaja Georges, La dynamique des conflits en
Afrique centrale, Communication lors du 19ème
Congrès Mondial de l'Association Internationale de Science
Politique, Durban, 29 juin - 4 juillet 2003.
- Protocole relatif au Conseil de paix et de
sécurité en Afrique Centrale (COPAX)
- Fonds Africain de Développement, (2004), Rapport
d'évaluation du Projet d'appui institutionnel au Secrétariat
Général de la CEEAC.
- Commission Economique pour l'Afrique (2004), Etat de
l'intégration régionale en Afrique, Addis-Abeba
- Groupe d'Experts sur l'exploitation illégale des
ressources Naturelles et Autres Formes de Richesses de la RDC (2002),
Rapport Final, ONU in
http://www.grip.org/bdg/g2044.html
- PNUD (2003), Rapport mondial sur le développement
humain durable.
- Commission Carnegie (1997), la Prévention des
Conflits Meurtriers : Résumé du rapport final, Carnegie
Corporation, New York.
- Traité Instituant la Communauté des Etats de
l'Afrique Centrale CEEAC
- Wolters Stephanie (2007) «Trouble in Eastern DRC: The
Nkunda Factor, Situation Report, Institute for Security Studies
IV/ SITES ET MOTEURS DE
RECHERCHE CONSULTÉS
- www.ccpdc.org
- www.ceeac-eccas.org
- www.google.fr
- www.googlescholar.fr
- http://www.grip.org
- www.gutenberg.org
- www.issafrica.org
-
www.operationspaix.net
- www.persée.fr
- www.undp.org
- www.unidir.org
ANNEXES
ANNEXE 1 : CARTOGRAPHIE DES INDICES DE PAIX
DANS LE MONDE
![](La-prevention-des-conflits-dans-la-dynamique-de-lintegration-sous-regionale-en-Afrique-central10.png)
ANNEXE 2 : REPARTITION DES OMP EN AFRIQUE
1990-2004
![](La-prevention-des-conflits-dans-la-dynamique-de-lintegration-sous-regionale-en-Afrique-central11.png)
ANNEXE 3 : CARTE DES SOUS-REGIONS AFRICAINES
![](La-prevention-des-conflits-dans-la-dynamique-de-lintegration-sous-regionale-en-Afrique-central12.png)
ANNEXE 4 : CARTE DE LA CEEAC
![](La-prevention-des-conflits-dans-la-dynamique-de-lintegration-sous-regionale-en-Afrique-central13.png)
ANNEXE 5 : CARTE DES CONFLITS EN
AFRIQUE
![](La-prevention-des-conflits-dans-la-dynamique-de-lintegration-sous-regionale-en-Afrique-central14.png)
* 1 Source :
www.ceeac-eccas.org/index.php?rubrique=presentation&id=3
* 2 Source: Stockholm
International Peace Research Institute (2002) Year Book
* 3 Cf. : Cartographie
des indices de paix du SIPRI jointe en annexe et disponible sur
http://www.visionofhumanity.org/gpi/results/regional-split.php
* 4 Cf. Art 21 du protocole
relatif au COPAX
* 5 La Direction des Actions
Politiques et Diplomatiques résulte d'une adaptation qui visait à
prendre en compte l'importance de la diplomatie préventive dans le
processus de prévention et de gestion des conflits. Certes, elle n'a pas
été envisagée lors de la ratification du Protocole Relatif
au COPAX car, ce volet des missions du COPAX était plutôt
exécuté par des Commissions Ad-Hoc mises en place par la CCE qui
en fixait en outre le mandat conformément à l'Article 09 du
Protocole relatif au COPAX.
* 6 Du mot
« paix » en Grec et selon le Professeur Johan Galtung, un
des pères fondateurs de cette branche de la polémologie
* 7 Cf. Article 1er
du Traité Constitutif de la CEMAC signé le 16 mars 1994
* 8 Profil de la CEEAC
disponible sur
www.ceeac-eccas.org
* 9 Source : Profil de la
CEMAC disponible sur
www.cemac.cf/Drivers/dépliant-cemac.pdf
* 10 Commission Economique pour
l'Afrique (2004), l'état de l'intégration
régionale en Afrique, Addis-Abeba, pp 29-30
* 11 C'est l'équivalent
des ramifications chez Mitrany
* 12 Dans son article
« puissance, résolution des conflits et sécurité
collective a l'ère de l'union africaine : Théorie et
pratique » in
http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/IMG/pdf/19_288-306.pdf
* 13 Source :
www.ceeac-eccas.org
* 14 Estimation CEEAC 2006
* 15 Source :
www.ceeac-eccas.org/index.php?rubrique=presentation&id=3
* 16 Cf. Chapitre II du
Traité instituant la CEEAC
* 17 Source
www.wikipedia.org/wiki/Deuxi·me_guerre_du_Congo
* 18 Source: Source
www.wikipedia.org/wiki/Deuxi·me_guerre_du_Congo
* 19 Source
www.wikipedia.org/wiki/Deuxi·me_guerre_du_Congo
* 20 Les Etats-Unis estiment en
effet à partir de ce moment que le seul front devant retenir l'attention
internationale est celui de la lutte contre le terrorisme.
* 21Dans une interview à
la BBC disponible in
http://news.bbc.co.uk/2/hi/africa/6913498.stm
* 22 Dans son journal du 24
Août 2007 in
http://news.bbc.co.uk/2/hi/africa/6963206.stm
* 23 Source :
www.wikipédia.org/Guerre du
Kivu.htm
* 24 Source :
http://www.grip.org/bdg/g2044.html
* 25 Cité dans PNUD
(2004) Conflits armés en République Démocratique du
Congo, PNUD, Kinshasa 1, pp. 15
* 26 Source :
« Burundi guerre et paix » in Afrique XXI
Publié le samedi 7 septembre 2002
* 27 Source :
http://www.netpress.bi/hist/hstr.htm
* 28 Source :
www.wikipédia.fr/histoire-de-l'Angola
* 29 Sources :
http://www.journalchretien.net;
http://www.afriklive.com/Centrafrique-la-rebellion-du-MLCJ-reprend-les-armes_a4816.html
* 30 Au départ, le
pasteur Ntumi se présente comme un homme de Dieu qui prétend
soigner tout genre de maladie y compris la folie par les seuls moyens de la
prière.
* 31 Source : Estimation
CEEAC
* 32Source :
« Les origines du conflit politico ethnique au Burundi » in
http://www.netpress.bi/hist/hstr
* 33 Source: PNUD
(2003), Rapport mondial sur le
développement humain durable
* 34
Sources :
· Allocution du Général Louis
Sylvain-Goma Secrétaire Général de la CEEAC lors de la
7ème réunion ordinaire de la Commission de Défense et de
Sécurité (CDS) 30 août 2007 à Malabo.
· Site Internet :
www.ceeac-eccas.org
· Fonds Africain de Développement (2004),
Document de Stratégie d'Assistance à l'Intégration
Régionale (DSAIR) pour l'Afrique centrale 2005-2009
· Fonds Africain de Développement (2004),
Rapport d'évaluation du Projet d'Appui Institutionnel au
Secrétariat Général de la CEEAC
· Commission Economique pour l'Afrique/ Bureau
Sous-Régional de l'Afrique Centrale (2008), Séminaire de
formation sur les concepts et modes opératoires des instruments
d'intégration régionale en Afrique centrale,
« Module N° 05 sur l'état de mise en oeuvre de la
politique communautaire en matière de paix et
sécurité » Yaoundé, Novembre 2008
* 35 Source : Fonds
Africain de Développement (2004), Rapport d'évaluation du
Projet d'appui institutionnel au Secrétariat Général de la
CEEAC, pp. 63
* 36 Source : Fonds
Africain de Développement (2004), Rapport d'évaluation du Projet
d'appui institutionnel au Secrétariat Général de la CEEAC,
pp. 08
* 37 Dans son Allocution
lors de la 7eme réunion ordinaire de la Commission de Défense et
de Sécurité (CDS) le 30 août 2007 à Malabo.
* 38 Source :
http://www.codesria.org/Links/conferences/general_assembly11/papers/awoumou.pdf
* 39Article 4 Alinéa a)
du Protocole relatif au COPAX
* 40 De l'avis des Experts
du Fonds Africain pour le Développement dans leur Rapport
d'évaluation du Projet d'appui institutionnel au Secrétariat
Général de la CEEAC, Fonds Africain de Développement,
2004, p 4
* 41 Estimations CEEAC 2006
* 42 Un des Accords
décisifs marquant la résolution du conflit en RDC fut
signé à Luanda la capitale Angolaise
* 43 Le Protocole relatif au
COPAX ayant été ratifié le 24 février 2000 à
Malabo
* 44 Ici, les contraintes
auxquelles le COPAX est soumis dans son action
|