1.2. L'UD DU COMESA
1.2.1. Présentation du COMESA
Le COMESA, de l'anglais Common Market of Eastern and
Southern Africa, qui signifie en français Marché commun de
l'Afrique australe et orientale, est la plus importante organisation africaine
en terme d'intégration des économies d'états souverains,
avec un marché global de 380 millions de consommateurs et un PIB de 190
milliards US$.30 Il couvre une superficie totale de 12 millions de
km2.31
Le COMESA poursuit les objectifs suivants32 :
1) La réalisation d'une croissance et d'un
développement durables des Etats membres en favorisant un
développement plus équilibré et plus harmonieux de leurs
structures de production et de commercialisation ;
2) La promotion d'un développement conjoint dans tous
les domaines de l'activité économique et l'adoption conjointe de
politiques et programmes macroéconomiques en vue de relever les niveaux
de vie des populations et de favoriser des relations plus étroites entre
les Etats membres ;
3) La création d'un environnement propice aux
investissements étrangers, transfrontières et locaux, notamment
la promotion conjointe de la recherche et l'adaptation de la science et de la
technologie au développement ;
4) La promotion de la paix, de la sécurité et de
la stabilité parmi les Etats membres afin d'accroître le
développement économique dans la région ;
5) Le renforcement des relations entre le Marché commun
et le reste du monde ainsi que l'adoption de positions communes dans les forums
internationaux ;
6) La contribution à la mise en place, l'avancement et la
réalisation des objectifs de la Communauté économique
africaine.
30Les pays membres du COMESA, au nombre de 19
à ce jour sont : Burundi, Comores, Djibouti, Egypte, Erythrée,
Ethiopie, Kenya, Libye, Madagascar, Malawi, Maurice, Ouganda, République
Démocratique du Congo, Rwanda, Seychelles, Soudan, Swaziland, Zambie et
Zimbabwe. La République Sud africaine a un statut d'observateur.
31 Mabushi E., op.cit., p37.
32 Traité du COMESA, Article 3, p15
Les organes du COMESA sont33 :
1) La Conférence,
composée des Chefs d'Etat ou de Gouvernement des Etats membres ;
2) Le Conseil des ministres,
composé des ministres désignés par les Etats membres
respectifs ;
3) La cour de justice qui comprend une
chambre de première instance ainsi qu'une chambre d'appel ;
4) Le Comité des Gouverneurs des banques
centrales, composé des gouverneurs des autorités
monétaires désignées à cet effet par les Etats
membres ;
5) Le Comité
intergouvernemental, composé de secrétaires
généraux ou directeurs généraux des
ministères désignés à cet effet par les Etats
membres respectifs ;
6) Les comités techniques,
qui sont : le Comité des affaires administratives et budgétaires,
le Comité agricole, le Comité des systèmes globaux
d'information, le Comité énergétique, le Comité des
affaires financières et monétaires, le comité industriel,
le Comité du travail, des ressources humaines et des affaires sociales
et culturelles, le Comité juridique, le comité des ressources
naturelles et de l'environnement, le Comité du tourisme et de la faune
et la flore sauvages, le Comité du commerce et douanes et le
Comité des transports et communications. Les comités techniques
sont constitués de représentants désignés par les
Etats membres à cet effet ;
7) Le Secrétariat,
dirigé par un Secrétaire général nommé par
la conférence pour un mandat de cinq ans renouvelable pour une
période supplémentaire de cinq ans ;
8) Le Comité consultatif des
milieux d'affaires et d'autres groupes d'intérêt, composé
d'autant de représentants des milieux d'affaires et des autres groupes
d'intérêt des Etats membres, que le Comité consultatif
détermine. Ces représentants peuvent se faire accompagner
d'autant d'experts et conseillers que le comité consultatif le juge
nécessaire pour son bon fonctionnement.
Le COMESA reste un espace au développement
hétérogène en ce sens que son étendue renferme
d'énormes disparités naturelles et structurelles. Avec environ
2,5 millions de km2 chacun, le Soudan et la RDC comptent plus de
5000 fois la superficie des Seychelles, plus de 1000 fois celle de Maurice,
environs 90 fois la superficie des pays comme le Rwanda et le Burundi et plus
du double de celle de l'Ethiopie, de l'Egypte et de la Namibie. Trois pays
(Egypte, Ethiopie et RDC) comptent à eux seuls environs 50% de la
population totale du COMESA. Excepté l'Egypte, nouvellement admise et
deuxième performance économique du continent avec 85 milliards
US$ de PIB réel, quatre pays, le Soudan, le Kenya, l'Ouganda et
l'Ethiopie génèrent à eux seuls le 1/5 du PIB réel
du COMESA. Le taux de croissance annuel moyen est de 3 % sur la période
1991-2003 pour l'ensemble du COMESA.34
Tableau 2 : Indicateurs de base des pays du COMESA
(2003)
Rubrique
Pays
|
Population (millions)
|
5uperficie Densité (*000 km2) (pers./
km2)
|
Taux de Espérance PNB/h
Croissance de vie à la ($U52002)
population naissance
(années)
|
P1B réel*
|
Taux de
croissance P1B réel
1991-2003
|
Burundi
|
6,8
|
28
|
243
|
2,4
|
41
|
100
|
996
|
-0,8
|
Congo (RD)
|
52,8
|
2345
|
22
|
2,9
|
42
|
90
|
4980
|
-3,7
|
Comores
|
0,8
|
2,2
|
364
|
2,8
|
61
|
390
|
260
|
1,2
|
Djibouti
|
0,7
|
22
|
32
|
2,1
|
46
|
900
|
533
|
-0,1
|
Egypte
|
72
|
1001
|
72
|
2
|
69
|
1470
|
84808
|
4
|
Erythrée
|
|
4 118
|
34
|
2,7
|
53
|
180
|
673
|
5,5
|
Ethiopie
|
71
|
1130
|
63
|
2,5
|
46
|
100
|
7982
|
3,2
|
Kenya
|
32
|
583
|
55
|
1,5
|
44
|
360
|
10240
|
1,6
|
Madagascar
|
17
|
587
|
29
|
2,8
|
54
|
230
|
3872
|
1,6
|
Malawi
|
12
|
118
|
102
|
2
|
38
|
160
|
1787
|
3,1
|
Maurice
|
1,2
|
2
|
600
|
0,9
|
72
|
3900
|
6030
|
5
|
Rwanda
|
8
|
26
|
308
|
2,2
|
40
|
210
|
2507
|
3,9
|
Seychelles
|
0,8
|
0,3
|
2667
|
-
|
-
|
7050
|
610
|
2,6
|
Soudan
|
34
|
2506
|
14
|
2,1
|
56
|
380
|
12064
|
5,9
|
Swaziland
|
1
|
17
|
59
|
0,7
|
34
|
1240
|
1731
|
2,9
|
Ouganda
|
26
|
236
|
110
|
3,4
|
47
|
240
|
9330
|
6,5
|
Zambie
|
11
|
753
|
15
|
1,4
|
33
|
330
|
4512
|
1,6
|
Zimbabwe
|
13
|
391
|
33
|
0,4
|
33
|
530
|
5026
|
-2
|
Total
|
378,1
|
11937,5
|
|
|
|
|
171015
|
3,1
|
RSA
|
45
|
1221
|
37
|
0,4
|
46
|
2600
|
187116
|
2
|
Afrique
|
849,5
|
30061
|
28,2
|
2,2
|
51
|
650
|
653570
|
2,8
|
* : millions de $US aux prix constants du marché de 1995
Source : BAD, Rapport 2004, cité par Mabushi,
op.cit.
1.2.2. Réalisations du
COMESA35
Il s'agit ici de passer en revue les principales
réalisations atteintes à ce jour, soit après plus de 20
ans d'intégration.
Sur le plan de la
libéralisation, le COMESA est le premier groupement
d'intégration à former une Zone de Libre Echange. Celle-ci est
formée par 11 des 19 pays du COMESA.36 Néanmoins
nombre d'autres pays pourraient rapidement rejoindre la ZLE comme l'indique le
tableau 3 ci-dessous. Les pays qui connaissent un retard dans l'harmonisation
des politiques selon le rythme convenu avancent comme raison le problème
de recettes et de protection de leurs économies.
Tableau 3 : Situation de la libéralisation des
échanges au COMESA
Pays
|
Tarifs sur les produits
|
Burundi, Djibouti, Egypte, Kenya,
Madagascar, Malawi, Maurice, Rwanda,
Soudan, Zambie et Zimbabwe
|
Libre échange, pas de taxe ou charge à
effet équivalent sur tous les biens originaires de ces
pays
|
Comores, Erythrée et Ouganda
|
20 % du tarif NPF
|
Ethiopie
|
90% du tarif général (NPF)
|
Seychelles
|
Tarif général (NPF)
|
Namibie et Swaziland
|
Tarif général (NPF) jusqu'à expiration de la
dérogation, (initialement prévue pour 2004)
|
Angola et RDC
|
Tarif général (NPF).
|
Source : Secrétariat du COMESA,
cité par Mabushi
Sur le plan des échanges
intra-COMESA, notons qu'ils n'ont pas beaucoup progressé.
Leur part par rapport au commerce total des membres du COMESA était
évaluée à 5.65 % en 1982, à 5.19 en 1991, à
6.67 en 1998 et à 5 % en 200137. Par contre, les
échanges des pays membres avec le reste du monde ont connu un taux de
croissance annuel de 7.2 %.
35 Mabushi E., op.cit., pp.44-47
36 Les 11 pays sont : Burundi, Djibouti, Egypte,
Kenya, Madagascar, Malawi, Maurice, Rwanda, Soudan, Zambie et Zimbabwe. Ils
comptent une population avoisinant les 200 millions (plus de 50 % de la
population totale du COMESA), un PIB réel de $US 62 milliards ont ainsi
créé un vaste espace économique avec un énorme
potentiel d'investissement et de développement du commerce.
37 Les chiffres sont cependant à prendre avec
réserves en ce sens qu'ils proviennent de sources différentes.
Les statistiques commerciales officielles mettent encore du temps pour
être disponibles dans des sources fiables.
Pour le cas particulier de la RDC, les importations
originaires des pays membres du COMESA représentent seulement 6,5 % du
total des importations avec 8,1 % des droits de douane comme indiqués
dans le chapitre deuxième de ce travail, tableaux 8 et 9.
1.2.3. Les raisons de la faiblesse des
performances
« Dans l'ensemble, trois groupes de facteurs ont
été régulièrement identifiés comme
responsables des médiocres résultats (BAD, 2000). Le premier
groupe a trait aux facteurs politiques (insuffisances
en termes de volonté politique et de stabilité socio-politique
pour permettre la mise en place des programmes) ; le second groupe est celui
des facteurs ayant trait à la faiblesse institutionnelle
(déficiences dans l'élaboration des politiques et
la conduite des programmes) et le troisième groupe de
facteurs concerne ceux liés aux caractéristiques
structurelles des économies et des
régions.»38
1.2.4. L'Union douanière du
COMESA
Elle a été lancée depuis décembre
2008. Deux raisons ont présidé la mise en oeuvre de cette UD :
· Raison politique : la création de la
communauté économique continentale et de l'union
économique africaine qui passent d'abord par la création des CER
;
· Raison économique : le coût des
transactions commerciales transfrontières au sein d'une véritable
UD devrait être considérablement plus réduit qu'entre les
pays ne faisant pas partie d'une même UD, avec la résultante que
les producteurs devraient être plus compétitifs dans
l'environnement global.
Une UD suppose l'application, par tous les membres, d'un TEC,
et la libre circulation des biens et services entre les pays membres de l'UD
sans aucun obstacle interne. Les recettes douanières sont perçues
au point d'entrée de l'UD, pour être
ensuite distribuées aux pays membres de façon
équitable par les institutions chargées de l'administration de
l'UD. Une fois dans l'UD, aucun membre ne peut entretenir des accords
d'échanges préférentiels avec des pays tiers sans le
consentement des autres membres de l'union. Un accord d'échange
préférentiel entre un pays membre et un pays tiers, s'applique
sur tout l'ensemble de l'UD sur base de réciprocité.
39
Ce mécanisme ne pourrait avoir les mêmes effets
dans tous les pays membres du fait de
l'hétérogénéité de l'espace COMESA. Ce pose
alors la question de savoir à qui profiterait cette UD, ou en d'autres
termes, quels sont les gagnants et les perdants dans ce processus
d'intégration ? Des auteurs ont traité cette question à
deux niveaux : au niveau des pays pris globalement, et dans un pays, au niveau
des différentes catégories de population, ou au niveau des
différents branches d'activités.
Au niveau des pays, le problème se rapporte à la
taille des différentes économies. En effet, « les pays avec
une base industrielle encore embryonnaire considèrent que l'UD
profiterait aux pays plus industrialisés de façon
disproportionnée. Elle procurerait des bénéfices de loin
plus importants aux pays avec une base industrielle avancée comme le
Kenya, le Zimbabwe et Maurice, leur accordant des parts plus
élevées dans les échanges intra-régionaux.
La diversification de l'outil de production intérieur,
particulièrement chez les moins performants, devrait donc être une
condition nécessaire pour une intégration efficace.
Aussi l'UD pourrait également, chez les plus faibles,
provoquer la disparition de leurs industries, moins compétitives, et la
migration de l'investissement vers les pays plus industrialisés de
l'entité régionale, renforçant ainsi le
phénomène de polarisation (négative) de la structure
initiale du développement industriel. »40
A l'intérieur du pays, les effets de l'UD ne sont pas
non plus ressentis de la même manière partout. En effet, il a
été démontré que généralement, ce
sont les populations urbaines qui tirent le plus de profit de la
libéralisation du commerce ; les
39 Mark PEARSON, op.cit., p. 2
40 Mabushi E., op.cit., p.50.
populations rurales sont quant à elle à
l'écart de ce processus, et voient même leur niveau de vie se
dégrader, ceci du moins à court terme. Deux raisons principales
expliquent cette situation, à savoir : le caractère traditionnel
de l'agriculture pratiquée (qui consomme peu d'intrants importables et
est peu orientée vers l'exportation) et la faible consommation de
produits importables chez les ménages ruraux.41
Néanmoins le Traité du COMESA prévoit
quelques dispositions à cet effet, notamment dans ses articles 49, 60 et
61 .42 Il est reconnu, à un Etat, la possibilité
d'imposer des restrictions quantitatives ou équivalentes, ou des
interdictions sur des biens similaires provenant d'autres Etats membres, aux
seules fins de protection d'une industrie naissante, ou pour des
problèmes de balance des paiements. Ainsi, le Conseil ou le
Gouvernement du pays concerné, peut prendre des mesures
nécessaires afin de corriger les imperfections de l'UD.
41 Décaluwé, Fofana & Cockburn,
Impacts distributifs de la libéralisation du commerce extérieur
en Afrique de l'Ouest : le pari de la réduction de la pauvreté se
remporte en zones rurales, CIRPEE, Laval, p.1.
42 Article 49
2. Aux fins de protection d'une industrie naissante, tout
Etat membre peut, à condition qu'il ait pris toutes les mesures
nécessaires pour résoudre les problèmes de ladite
industrie, imposer, aux seules fins de protection de cette industrie naissante,
pendant une période spécifique à déterminer par le
Conseil, des restrictions quantitatives ou équivalentes ou des
interdictions sur des biens similaires provenant d'autres Etats membres :
pourvu que ces mesures soient appliquées sans discrimination et que
l'Etat membre concerné fournisse au Conseil la preuve qu'il a pris les
mesures suffisantes pour protéger cette industrie naissante.
3. Le Conseil détermine le critère de
définition d'une industrie naissante.
5. Nonobstant les dispositions du paragraphe 1 du
présent article, si un Etat membre connaît des problèmes de
balance de paiements résultants de l'application des dispositions du
présent chapitre, l'Etat membre, pourvu qu'il ait pris toutes les
mesures possibles en vue de résoudre les problèmes, peut imposer
dans le seul but de surmonter l'obstacle pour une période
spécifique déterminée par le Conseil, des restrictions
quantitatives ou autres ou des interdictions aux marchandises provenant des
autres Etats membres.
Article 60
1. Le conseil, sur recommandation du comité
intergouvernemental, détermine les mesures correctives à prendre
en faveur d'un Etat membre ayant souffert d'une perte substantielle de recettes
de droit à l'importation suite à l'application du présent
chapitre.
Article 61
1. Dans le cas d'une perturbation sérieuse de
l'économie d'un pays découlant de l'application des dispositions
du présent chapitre, l'Etat membre concerné peut, après
avoir informé le Secrétaire général et les autres
membres, prendre des mesures de sauvegarde nécessaires.
2. les mesures de sauvegarde prises conformément aux
dispositions du paragraphe 1 du présent article restent en vigueur
pendant une période d'une année et peuvent être
prolongées sur décision du conseil. Cependant, l'Etat membre
concerné doit fournir au Conseil la preuve qu'il a pris toutes les
mesures nécessaires et suffisantes pour surmonter ou corriger les
déséquilibres contre lesquels les mesures de sauvegarde sont
appliquées et sans discrimination.
3. le Conseil examine les méthodes et les effets de
l'application des mesures de sauvegarde existantes et prend la décision
appropriée.
Donc, comme nous venons de voir, un pays membres du COMESA
peut soit ne pas devenir membre de l'UD, soit bien qu'en étant membre,
maintenir un certain degré de protectionnisme à des fins de
sauvegarde d'une industrie naissante, mais seulement après avoir fournit
des preuves probants.
Voyons maintenant, dans le chapitre suivant l'état de
l'économie congolaise.
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