Université de Perpignan
VIA DOMITIA
Thème de recherche :
Tourisme, Patrimoine,
Identité et Territoire
Papier portant sur :
Les Déterminants de la
Mobilité
Professionnelle Vers le
Tourisme en Tunisie: Une étude
comparative dans le temps entre les années 60 et 2004
Noureddine
HADDAD
Doctorant en Tourismologie
à l'Université de PERPIGNION VIA
DOMITIA
Assistant contractuel à l'ESSEC
Tunis-Tunisie
Adresse : 18, rue yahia
TURKI Lafayette 1002 Tunis-Tunisie
noured2001@yahoo.fr
« Il faut bien que quelque chose change
pour que l'essentiel demeure »
G. di Lampedusa « Le Guépard »
Résumé :
Nous proposons d'examiner les déterminants de la
mobilité professionnelle vers le secteur de tourisme et
l'évolution du mode de la création de la richesse en Tunisie
pendant la période s'écoulant entre les années 60 et celle
de l'année 2004. Il s'agit, dans un premier temps, d'exposer, un constat
sur le phénomène de la mobilité professionnelle au
contexte Tunisien, centre d'intérêt de plusieurs études en
tourisme, grâce aux recensements et enquêtes qui ont
été faits. On peut cependant, relever, dans un deuxième
temps une revue de la littérature relative aux déterminants de la
mobilité professionnelle en théorie à travers une analyse
plus au moins profonde de l'encouragement touristique, de territoire, de la
culture et de l'identité caractérisants les sources de cette
mobilité. Ainsi, l'intérêt de ce papier, c'est de
démontrer l'importance relative de chaque déterminant dans cette
mobilité tout en se référant à notre constat du
cadre d'analyse et au positionnement par rapport à une revue de la
littérature traitant ce phénomène.
Toutefois, la mobilité professionnelle dépend
d'autres facteurs outre que ceux étudiés tout au long de ce
papier de recherche dont on va les considérer par hypothèse comme
neutres et qu'ils ne peuvent pas expliquer ce phénomène
socio-économique.
Mots clés :
Tourisme ; Territoire ; Tunisie, Culture ;
Identité ; Mobilité professionnelle ;
Déterminants.
Plan du papier
Introduction
1- Constat
2- Revue de la littérature
3- Hypothèses
5- Test des hypothèses et interprétation des
résultats
Conclusion générale et voies de recherches
Introduction
Le secteur de tourisme a connu en Tunisie une évolution
considérable d'une manière générale entre les
années 60 et 2004. Ainsi, pendant les années 60 le tourisme a
été considéré comme un secteur refuge et un choix
imposé. Toutefois, à la fin des années 60 et à
partir des années 70, ce secteur est devenu un peu rentable et un
choix délibéré par les investisseurs visionnaires de la
période qui étaient les agriculteurs et commerçants les
plus riches des régions. A partir des années 80, le secteur de
tourisme en Tunisie a commencé à être rentable et il est
devenu une opportunité certaine pour les bailleurs de fonds qui ont
lancé plusieurs projets touristiques dans l'hébergement, le
transport, l'artisanat, les centres de thalasso, etc. Cette mobilité
professionnelle des investisseurs vers le secteur touristique résulte
d'un état de nature favorable pour concrétiser leurs ambitions.
En 1990, le secteur de tourisme est devenu très concurrentiel avec
l'ouverture et la globalisation ce qui a motivé l'apparition de
plusieurs formules de partenariat et d'alliances stratégiques avec des
entreprises étrangères de différentes nationalités.
En effet, à partir de septembre 2001 et avril 2002 le tourisme est
devenu en Tunisie un secteur très fragile plutôt risqué
mais qui reste toujours un domaine de création de valeur
économique, sociale et institutionnelle pour les sociétés
d'accueil.
Cependant, à travers cet aperçu historique, la
mobilité professionnelle n'a jamais cessé dans le temps et dans
l'espace. En effet, les investisseurs de cette période ont
profité des opportunités offertes dont principalement
l'encouragement du secteur touristique, un territoire favorable, une culture et
une identité spécifiques au cadre d'accueil.
Ainsi, plusieurs questions se posent à ce niveau
d'analyse dont principalement quels sont les déterminants de cette
mobilité professionnelle entre les années 60 et 2004 ?
Et quelle est l'importance relative de l'encouragement touristique, du
territoire, de la culture et de l'identité dans cette
mobilité?
Dans ce cadre de recherche, nous avons tenté de
répondre à ces interrogations à travers une
méthodologie logique. Ainsi, pour répondre à notre
problématique posée, notre travail de recherche s'articulera
autour d'un constat du contexte tunisien depuis les années 60, d'une
revue de la littérature, une proposition des hypothèses
d'aboutissement et enfin l'exploitation de l'enquête et une
interprétation des résultats obtenus pour achever notre
étude avec une conclusion générale portant des voies de
recherches éventuelles.
1- Le constat
L'objet de cette étude résulte d'un constat d'un
phénomène socio-économique au contexte Tunisien
caractérisé par une mobilité professionnelle vers le
secteur de tourisme. Ce cadre d'analyse est un exemple représentatif des
pays du bassin Méditerranéen où le tourisme a
évolué à un rythme accéléré depuis
les années 60. A partir de cette période, plusieurs bailleurs de
fonds visionnaires ont été convaincus que « la
richesse, l'estime et la réalisation de soi sont plutôt
touristiques ». Ainsi, l'agriculture, les activités
industrielles, commerciales et autres ne sont plus les activités
à forte création de valeur économique, sociale et
institutionnelle.
En fait, la genèse du tourisme, son rayonnement et son
développement en Tunisie résulte d'un «territoire» qui
représente un « support stratégique» de
l'activité touristique (Christian BATAILLOU, 2007) et grâce
à une culture et une identité qui favorisent pour la rencontre de
nouvelles populations de différentes nationalités.
En effet, la majorité des agriculteurs,
commerçants et des petits industriels de la période des
années 60 ont profité de l'encouragement de l'Etat du secteur
touristique en créant leurs propres entreprises. Ces projets
touristiques offrent divers produits qui sont principalement
l'hébergement, le transport, centre de santé et de thalasso,
antiquité, etc.
Cependant, l'analyse des caractéristiques globales du
secteur en Tunisie sera articulée autour l'investissement dans le
secteur de tourisme qui a connu une tendance à la hausse entre les
années 1960 et 1995. Toutefois, l'investissement connaît une
évolution non régulière pendant les huit dernières
années.
En se référant au rapport de la (Banque
Mondiale, 2002 : 165) les investissements « privés
réalisés dans le secteur de tourisme sont suivis et
comptabilisés par l'O.N.T.T. (Direction de la promotion des
Investissements), aussi bien pour les investissements relatifs à des
unités d'hébergement que pour ceux portant sur des
activités d'animation touristique. La comparaison des montants avec le
nombre d'établissements d'hébergements nouveaux par an montre
bien que les nouveaux établissements ont été plus nombreux
entre 1990 et 2004 qu'entre 1962 et 1990. Il en résulte que le montant
des investissements privés réalisés a tendance à
augmenter pour la catégorie des établissements récents. De
même, les investissements consacrés à des
équipements de loisirs ont certainement été plus
importants au cours de la période 1990-2004 qu'au cours de la
période 1962-1990. Ainsi, on peut déduire que pendant cette
période il y avait une mobilité professionnelle des investisseurs
vers les projets touristiques.
Cependant, le constat de ce phénomène
socio-économique nous a permis de poser une question principale objet de
ce papier et relative aux déterminants qui sont derrières cette
mobilité professionnelle vers le secteur de tourisme en Tunisie ainsi
que l'importance relative de chaque facteur.
En effet, dans le cadre d'une démarche
hypothético-déductive, on a opté pour l'hypothèse
que les facteurs qui peuvent influencer sur la mobilité professionnelle
sont principalement l'encouragement du secteur touristique, le territoire,
la culture; et l'identité de la société tunisienne.
2- Revue de la littérature
A travers ce papier, on s'intéressera à une
revue de la littérature concernant les déterminants de la
mobilité professionnelle vers le secteur touristique. Ainsi, plusieurs
recherches en tourisme sont consacrées à
l'énumération et l'investigation des facteurs explicatifs de
cette mobilité dans le temps et dans l'espace. Par conséquent, la
mobilité professionnelle de l'agriculture et autres activités
commerciales et industrielles vers les activités touristiques
résulte d'une situation problématique, dans un contexte cadre
bien déterminé et une époque qui reflète le stade
d'évolution d'une telle région ou une économie toute
entière. La situation problématique s'explique par
l'émergence des besoins économiques, sociales et culturels chez
les investisseurs qui cherchent à concrétiser leurs enjeux,
relever leurs les défis et arbitrer devant les dilemmes
rencontrés. Ainsi, le triangle suivant récapitule les trois axes
de la mobilité professionnelle :
Situation
problématique
Mobilité professionnelle
Contexte
Stade d'évolution de l'économie
En effet, cette mobilité professionnelle vers les
projets touristiques est un « choix stratégique »
qui résulte d'une panoplie de facteurs qui se résument à
travers l'encouragement du secteur touristique, le territoire
caractérisant la société d'accueil, la culture et
l'identité spécifique qui font que ces investisseurs comptent
réaliser une rentabilité très élevée, estime
et réalisation de soi dans une courte période.
3-1- L'encouragement touristique et la mobilité
professionnelle vers le secteur du tourisme
La majorité des économies ont été
convaincues depuis longtemps qu'il est impératif d'encourager les
investissements touristiques grâce à la mise en place d'une
panoplie de mesures et des avantages. De ce fait, plusieurs politiques
d'encouragement ont été lancées dont principalement
l'octroi des crédits à des faibles toux d'intérêt,
les dégrèvements fiscaux et une législation adaptable au
nouveau contexte économique international.
En effet, le tourisme est devenu une activité
économique qui séduit tout le monde, y compris les
réticents d'hier. Par exemple en Asie, (Liliane Benalah et Myriam
Donsimoni, 1999 : 3) ont expliqué que « Les
autorités chinoises, pourtant hostiles à l'accueil des
étrangers, considèrent dorénavant que par rapport aux
autres secteurs tertiaires, le tourisme nécessite moins
d'investissements, pour un résultat économique
intéressant, notamment en matière d'emplois, contribuant ainsi
à l'amélioration du niveau de vie de la population ».
En effet, la majorité des pays asiatiques dont principalement le Japon,
Thaïlande, Vietnam et l'Indonésie concentrent leurs politiques
économiques sur le secteur de tourisme pour surmonter les défis
et atteindre les enjeux économiques et sociaux.
Selon l'(O.M.T, 1995) « la capacité d'attirer
un flux touristique permanent exige la conception d'un programme complet de
politiques, allant de la construction d'infrastructures pour le transport et
l'hébergement répondant à des normes internationales
acceptables, à la conservation et à la préservation des
sites constituant la principale attraction touristique, exige aussi une
politique de promotion et de commercialisation, la formation d'une
main-d'oeuvre de qualité, l'éducation de la population afin de
maintenir un environnement agréable ».
Ainsi, l'ONU a déclaré en 1963 que
« Le Tourisme peut apporter et apporte effectivement une contribution
vitale à la croissance économique des pays en voie de
développement ». En plus, (Emanuel de kadt,1979 : 38), a
précisé que « le tourisme peut créer d'abondants
emplois indirects, particulièrement dans l'agriculture, les industries
agro-alimentaires et les métiers artisanaux, dans les transports et la
distribution et dans une série d'industries légères
locales ».
Cependant, pour être compétitifs, les pays
d'accueil ont essayé d'augmenter leurs investissements dans la
construction d'infrastructures comme les aéroports, les voies
d'accès, l'énergie et l'approvisionnement en eau pour les
touristes malgré les coûts supportés. Par
conséquent, selon (Frederico Neto, 2003: 1)"Tourism is one of
largest and fastest growing in the wold. It is an increasingly important source
of income, employement and wealth in many countries. Its rapid expansion has,
however, had detrimental environmental (and socio-cultural) impacts in many
regions".
Ainsi, face aux encouragements des Etats, plusieurs projets
touristiques ont été lancés pour répondre à
la demande touristique qui ne cesse d'augmenter dans le temps et dans l'espace.
Ainsi, (G.CAZES, 1989 : 7) considère que
« Le tourisme est un phénomène nouveau qui n'a vraiment
émergé dans la réalité quotidienne que depuis moins
d'un demi-siècle. Mais il a connu une expansion et une
généralisation si rapides, dans la société comme un
élément banal et naturellement constitutif de cette vie
quotidienne ».
3-2- Le territoire et mobilité
professionnelle vers le secteur du tourisme
La mobilité professionnelle vers le secteur touristique
dans le temps et dans l'espace dépend d'un "territoire cadre". Ce
territoire est caractérisé par une culture, une identité
et une religion qui attirent les visiteurs et touristes qui cherchent
l'exotisme et l'originalité.
En effet, (Montesquieu et al, cité par Raymond Aron,
1967 : 49) a précisé que "Dans nombre de cas, Montesquieu
explique directement le tempérament des hommes, leur sensibilité,
leur manière d'être par le climat" qui leur pousse
évidement à changer de place en voyageant vers d'autres
sociétés tempérées qui offrent le plaisir
grâce à un climat favorable.
Cependant, (David LE BRETON,1999), a
évoqué dans son article "Anthropologie du Silence" que "La
compagne est davantage associée au silence dans les discours des
citations, mais par opposition au bruit généré par la
ville [...]. La modernité est l'avènement du bruit. Le seul
silence que nos sociétés connaissent est celui, provisoire, de la
panne, de la défaillance de la machine, de l'arrêt de la
transmission...".
En effet, un nombre assez important de touristes sont
intéressés par le tourisme de repos dans les milieux les plus
calmes qui offrent le silence et la paix. Par conséquent, le territoire
des pays d'accueils permet le développement du tourisme lorsque ce
dernier assure aux visiteurs un climat social, politique, et culturel
favorables.
Etant donné que « c'est la mer qui
façonne les bateaux », le territoire est en fait l'espace qui
forge la nature des relations entre les individus, leur mode de vie et le
degré d'ouverture vis-à-vis de l'autre. En effet, en se
référant à (Lévi-Strauss, cité par Denis
Retaillé, 1983) "Il faut une civilisation ouverte sur le monde par sa
situation «privilégiée », prête à
l'aventure de la circulation, pour que s'entame le processus d'échange
et de mutation liée à la confrontation. Alors que l'arrangement
des contraintes formerait les cultures et les civilisations
naturalisées, il n'y aurait histoire que par la coalition, volontaire ou
non, de cultures différentes".
De ce fait, en se référant à (Michel
Porter, 1992), on peut déduire que la diversité des territoires
dans l'espace peut être considérée comme « un
avantage concurrentiel » pour les sociétés qui ont des
spécificités culturelles, naturelles et politiques. Le tourisme
est en effet tributaire, dans une large mesure, de l'infrastructure
générale des transports (construction et entretien des routes,
des aéroports), de la protection des ressources naturelles, des
monuments, des paysages exceptionnels et des éléments qui,
souvent, constituent la plaque tournante des expériences
touristiques.
En effet, « ...Rural environments have been
attracting tourists and tourism for many years, due to their ability to fulfil
tourists' exceptions such as: tranquillity; beautiful landscapes; relaxation;
sports and adventure activities.... ». (Christaller, Page et al.
Cité par Yoel MANFELD& Aliza JONAS, 2006: 584)
Selon (Christian BATAILOU, 2007),"Le territoire, comme espace
structuré, structurant, porteur de la mémoire et de
l'identité de communautés, et sa relation avec l'individu,
touriste ou résident, sont au coeur d'une expérience touristique
qui peut se décliner sous un mode statique ou, le plus souvent,
dynamique (voyage, itinérance, nomadisme)".
Ainsi, le territoire est la « pierre
angulaire » de la société d'accueil qui permet aux
résidents de sculpter leur identité dans le temps et de fournir
aux touristes un différentiel par rapport à ce qu'ils portent
dans leur mémoire. En effet, (Christian BATAILLOU, 2007), a
expliqué que "Le «territoire» en tant que «support
stratégique» de l'activité touristique (pays d'accueil),
soumis en général à forte concurrence...".
3-3- La Culture et la mobilité professionnelle
vers le secteur du tourisme
Le territoire des pays d'accueil favorise
généralement l'émergence des nouveaux métiers et
domaines d'activités stratégiques. En effet, les traditions, les
coutumes et les croyances des sociétés sont
généralement des facteurs déterminants qui influencent sur
la mobilité professionnelle vers les activités touristiques.
En fait, C'est à (Taylor, 1871), anthropologue
britannique, que l'on doit la première définition du concept
ethnologique de culture « Culture ou civilisation, pris dans un sens
ethnologique le plus étendu, est ce tout complexe qui comprend la
connaissance, les croyances, l'art, la morale, le droit, les coutumes et les
autres capacités ou habitudes acquises par les l'homme en tant que
membre de la société ». Ainsi, la culture est une
composante qui détermine la mobilité professionnelle des
investisseurs vers les activités artisanales, d'hébergement, de
transport et de loisir pour valoriser le patrimoine national d'une part et
créer de la richesse d'autre part.
En effet, (Yani Herreman, 1998: 5) a précisé que
«...From an anthropological point of view, tourism is in itself a
cultural activity which can be directly connected with museums, the heritage
and sites...». Ainsi, ces éléments déterminent
dans plusieurs sociétés le développement des
activités touristiques pour valoriser le patrimoine culturel. En outre,
(Yani Herreman, 1998:7) a expliqué «This cultural system, like
tourism, has come about as a result of series of economics, technological and
social changes, which give it a common, universal language...». Par
conséquent, la majorité des pays ont été convaincus
depuis les années 60 que le secteur de tourisme est un facteur
clé de succès qui assure la rente la plus élevée
pour les investisseurs.
Cependant, la culture est un processus de programmation
mentale collective qui distingue les membres d'un groupe d'un autre et les
différences culturelles entre les groupes sont expliquées par les
concepts de symboles, héros, les rites et les valeurs partagées
au sein du groupe (Hofstede, 1980 et Gray, 1988, cité par
Shraddha.Verma). Ce processus de programmation mentale est un facteur
explicatif de la mobilité professionnelle des membres d'un groupe vers
le secteur de tourisme à travers la recherche de la valorisation de
l'artisanat qui attirent les visiteurs et touristes. Ainsi, (Frank Michel,
1998 : 26), a précisé que "L'exotisme multiplie les valeurs
plus qu'il ne les renverse, et c'est bien par le biais de l'exotisme qu'une
culture commence à prendre conscience qu'elle peut être
génératrice de doutes, apporte aussi sa moisson de
réponses sécurisantes. L'exotisme est à la fois
étonnement du nouveau, constat de l'altérité plus ou moins
radicale, et imaginaire de la différence...". Ces civilisations sont
différentes dans leurs apparitions mais qui ont plusieurs valeurs
communes dont principalement l'accomplissement, la solidarité,
l'équité et surtout la loyauté.
Ainsi, (European of Social Anthropologists, 2003: 377) ont
precise que «...A 'culture' can be understood as synonymous
with a 'people' or 'nation'; il represents and intergenerational community,
sharing a distinct history and language, a self-contained moral universe, a
unique way of life and athos, institutionally complete and ideally occupying a
home territory[...]. Groups have cultures uniquely suited to them, and their
members will only thrive when they remain true to the culture and developments
organic to it...». En effet, la culture est la tradition, les us, les
coutumes, les croyances, les spécificités, les
éléments différentiels. C'est un ensemble
d'éléments qui conditionnent le comportement d'un agent
économique, ce qui veut dire que cette culture va orienter l'action du
manager vers le secteur de tourisme. C'est pourquoi le même
problème ne peut pas avoir la même solution partout. Ainsi, selon
(M.FRIOUI, 2003) la culture est "tout ce qui reste lorsqu'on a
tout oublié, c'est tout ce qui manque lorsqu'on a tout appris".
En effet, le choix des activités touristiques comme
domaine d'activité résulte d'une composante culturelle qui
oriente les gens et les motive à changer de profession.
3-4- L'Identité et la mobilité
professionnelle vers le secteur du tourisme
Bien que le terme de l'identité est utilisé,
dans la vie quotidienne ainsi qu'en psychologie, il est souvent difficile de la
définir aisément. Ainsi, l'identité de la
société d'accueil favorise une mobilité professionnelle
vers le secteur de tourisme qui permet de rapprocher les gens, les pays de
différentes nationalités. Cette mobilité résulte
d'un ensemble des comportements des gens qui reflètent l'appartenance
à une identité caractérisée par des principes, des
normes sociales, d'un mémoire de l'histoire de la société
et de sa religion.
Selon Christian BATAILLOU, « Le touriste se
déplace dans le but d'expérimenter des «interactions
authentiques» avec d'autres individus qui lui permettent de
connaître leur vie quotidienne dans un contexte différent. De ce
fait, la conservation des attributs de certains groupes ethniques peut
s'expliquer dans le cadre de l'interaction avec les touristes. La
récupération de la mémoire qui est ainsi
opérée, mémoire de douleur, de souffrance, d'impuissance
mais aussi de solidarité, devient source d'identité, et par
là même souvent de résistance face à certaines
menaces de contrôle par des groupes sociaux dominants ».
En outre, (Christian BATAILLOU) a précisé que
« Les cultures locales sont les principales sources d'identité
personnelles, elles sont le coeur de l'identification primaire qui nous permet
d'accéder à d'autres paradigmes d'identification
secondaire ».
Plus précisément, (Smith, cité par
Dennison Nash, 1978: 133-152), a expliqué que: «A theory of
tourism ought to center on tourist and the culture that surrounds him. Further,
it ought to be broad enought to include the touristic metropole (s), the host
touristic satellites, and the contact and traditions between them».
En effet, « comme Cohen (1979) avant lui, Nash établit que ce
système touristique compte trois composantes qui doivent être
considérées à la fois individuellement et
conjointement : le visiteur et sa culture, le visité et sa culture,
les transactions s'effectuant entre ces deux parties » (Cohen et
Nash, cité par Michaud, 2001 : 15-33).
Ainsi, le secteur de l'artisanat représente
l'identité et les spécificités des régions. En
effet, perpétué d'une génération à une
autre, un métier d'artisanat se caractérise par ses
spécificités régionales et locales, puisque les artisans
utilisent souvent les matières premières et les ressources qui se
trouvent dans la région même. Certains touristes viennent
spécialement dans un pays donné pour découvrir sa
civilisation et son histoire, mais aussi pour acheter un produit d'artisanat
qui reste pour eux et pour longtemps un souvenir bien gravé. Ainsi,
(J.L. MAURER, F.MELLAH et J.P.RAPP, 1977 : 10) "Les pays de tiers-monde ne
sont plus seulement les pourvoyeurs en matière premières du monde
industrialisé mais également son réservoir d'exotisme et
son camp de vacances".
(Jean-Louis BARMA, 1999 : 103) a précisé
qu'une étude sur les avis partagés a fait démontrer que
par exemple en Irlande la personne interrogée a dis: « Je
trouve l'accueil formidable, les français chaleureux ». Ainsi,
les activités touristiques sont plutôt est un choix
délibéré qui résulte de l'identité de la
société d'accueil.
4- Les Hypothèses
Dans ce papier de recherche, on a essayé de suivre une
démarche hypothético-déductive permettant de
concevoir des résultats escomptés possibles objets de test et
d'une interprétation éventuelle. Ainsi, les hypothèses
posées au niveau de cette étude sont :
§ H1 : La mobilité professionnelle des
investisseurs vers le tourisme en Tunisie résulte uniquement de
l'encouragement du tourisme;
§ H2 : La mobilité professionnelle des
investisseurs vers le tourisme en Tunisie résulte uniquement d'un
territoire favorable;
§ H3 : La mobilité professionnelle des
investisseurs vers le tourisme en Tunisie résulte uniquement de la
culture de la société et;
§ H4 : La mobilité professionnelle des
investisseurs vers le tourisme en Tunisie résulte seulement de son
identité spécifique.
Cependant, à travers ce papier de recherche, notre
intérêt c'est de tester ces hypothèses grâce à
un questionnaire distribué auprès d'une population de 45
personnes qui ont investi dans les activités touristiques dont
principalement l'hôtellerie, le transport, les centres de thalasso et
l'artisanat.
5- Test des Hypothèses et Interprétation
des Résultats
L'échantillon est formé par des entrepreneurs
des entreprises par zones qui ont choisi d'investir dans des projets
touristiques tout en délaissant leurs anciennes activités
(agriculture, activités commerciales et industrielles, etc.). Ces
investisseurs ont essayé d'expliquer le phénomène de la
mobilité professionnelle pendant la période qui s'écoule
entre les années 60 et 2004.
Le tableau relatif à la population
enquêtée
Entrepreneurs par Zone touristique
|
En nombre
|
En %
|
Djerba
|
12
|
32,4
|
Hammamet-Sud
|
12
|
32,4
|
Tunis-Gammart
|
13
|
35,2
|
Total
|
37
|
100%
|
Source: résultats de
l'enquête
Dans cette partie du papier nous essayons d'analyser
l'importance relative de chacun des déterminants dans la mobilité
professionnelle vers le tourisme à travers les divers avis et
réponses collectées et récapitulées dans un tableau
de synthèse.
Le tableau des résultats relatifs aux réponses
collectées sur l'importance relative des déterminants de la
mobilité professionnelle selon la population enquêtée se
présente comme suit :
Les déterminants de La mobilité
professionnelle entre les années 60 et 2004
|
Résultats obtenus
|
L'encouragement touristique :
§ facilité de crédit ;
§ faible imposition ;
§ possibilité de partenariat ;
§ etc.
|
40.5%
|
Le territoire :
§ support stratégique ;
§ un avantage concurrentiel ;
§ une opportunité certaine ;
§ etc.
|
32.4%
|
La culture :
§ traditions ;
§ coutumes ;
§ valeurs partagées ;
§ etc.
|
16.2%
|
L'identité :
§ mémoire de la société ;
§ religion ;
§ Histoire ;
§ etc.
|
10.8%
|
TOTAL
|
100%
|
Source : résultat de
l'enquête
À travers le tableau ci-dessus présenté,
plusieurs interprétations peuvent être avancées pour
expliquer l'importance relative de ces déterminants sachant que nous
avons essayé d'étudier ces déterminants pour la
période s'écoulant entre les années 60 et 2004.
Ainsi, 40.5% de la population
enquêtée considèrent que l'encouragement touristique est le
principal déterminant de la mobilité professionnelle. En effet,
on constate que presque la moitié de la population enquêtée
ont changé leurs métiers pour investir dans secteur de tourisme
suite à l'encouragement touristique depuis les années 60. Par
conséquent, malgré les encouragements de l'Etat sur toute cette
période et ses tendances pour mobiliser la population vers ce domaine
touristique, il s'est avéré claire que celle mobilité
dépend d'autres facteurs. Toutefois, ce déterminant reste
important par rapport au rôle du territoire de la société
d'accueil. En effet, l'hypothèse H1 n'est pas validée.
Par contre, 32.4% de la population enquêtée
considèrent que le territoire tunisien est l'unique facteur
derrière cette mobilité professionnelle vers le secteur de
tourisme depuis les années 60. Ceci explique que ce facteur est un
élément déterminant qui mobilise les gens à changer
de métier dans le temps et dans l'espace et choisir les activités
touristiques. Ainsi, le territoire est « un support
stratégique » (BATAILLOU, 2007)) qui
favorise le développement du secteur touristique grâce à
une attraction des touristes. Par conséquent, l'hypothèse H2
n'est pas validée vu que le territoire ne constitue pas l'unique facteur
de la mobilité professionnelle vers le secteur de tourisme.
D'autre côté, 16.2% de la population
enquêtée considèrent que la culture est le principal
déterminant de cette mobilité professionnelle vu l'influence des
coutumes, traditions et des valeurs partagées sur le choix de
métier et domaine d'activité. Ainsi, une grande partie de la
population enquêtée a choisi des activités artisanales
depuis les années 60. Ceci démontre très bien que la
genèse de plusieurs projets touristiques dans les activités
artisanales n'est pas au hasard mais plutôt le résultat d'un
héritage des ancêtres. Ainsi, l'hypothèse H3 n'est pas
validée dans cette étude étant donné que la culture
seule ne peut pas expliquer cette mobilité professionnelle.
Finalement, uniquement 10.8% de la population
enquêtée considèrent que l'identité est le facteur
déterminant de cette mobilité professionnelle. Cette
identité est caractérisée principalement par la
mémoire de la société, sa religion et son histoire
sculptée à travers les différentes civilisations. Par
conséquent, on peut déduire que l'hypothèse H4 n'est pas
validée tout au long de cette étude socio-économique. En
outre, ce faible taux explique que l'identité de la
société tunisienne ne peut pas être la raison de cette
mobilité étant donné que l'histoire et la religion ne sont
pas toujours des éléments qui favorisent l'ouverture et
l'acceptation des autres populations étrangères. Toutefois, ce
facteur peut influencer sur le choix des activités touristiques dans le
but de garder les bonnes relations de voisinage avec l'étranger.
Cependant, la mobilité professionnelle dépend de
tous ces facteurs simultanément mais à degrés
différents. Ainsi, cette mobilité peut être
présenté à travers la relation suivante:
Mobilité Professionnelle = á Encouragement
touristique+â Territoire+ ä Culture+ë
Identité+åt
Conclusion et voies de recherche
Cette étude apporte des soutiens empiriques pour
envisager la mobilité professionnelle vers le secteur de tourisme comme
une conséquence de plusieurs déterminants. Ces
déterminants sont principalement l'encouragement touristique, le
territoire, la culture et l'identité. Cependant, cette étude
limite la validité de cette recherche et ouvre la voie à de
nouvelles perspectives. En fait, l'étude de la mobilité
professionnelle vers le secteur de tourisme pour toute la Tunisie
s'avère une tâche assez difficile et qui n'aboutit pas à
des résultats pertinents. En effet, une analyse à travers un
échantillon plus vaste au niveau des zones touristiques devrait donc
permettre d'améliorer la validité de cette recherche. Ainsi,
l'île de DJerba fera l'objet des prochaines études vu sa
spécificité territoriale, culturelle et identitaire.
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