CONCLUSION GENERALE
Cette étude a exploité l'un des aspects d'un
précédent travail, dans lequel des relevés floristiques
avaient été réalisés dans les terroirs villageois
et les espaces forestiers de Dialakoto et de Laboya.
L'objectif principal, tel que indiqué dans la
problématique, était de faire une articulation entre deux
espaces, les ressources ligneuses qu'ils contiennent et leurs potentiels.
Aussi, les résultats obtenus ont permis de vérifier les
hypothèses concernant les potentiels de production et de cueillette de
chaque espace et de chaque espèce fruitière, et la performance
des deux modes de prélèvement à Dialakoto et de Laboya.
En ce qui concerne les potentiels de production et de
cueillette de chaque espace, nous avons remarqué que:
- Au niveau des périmètres agraires des terroirs
villageois, la représentativité des espèces
fruitières, est moyenne car seules Borassus aethiopum, Vitex
madiensis et Parkia biglobosa y sont présentes, parmi les
six espèces ciblées. Par conséquent, l'abondance relative
de ses espèces est également très faible. Toutefois, le
terroir villageois de Laboya est mieux pourvu en potentiel de production que
celui de Dialakoto qui ne dispose que de deux espèces, car Borassus
y est absente.
- Au niveau des sites d'exploitation des espaces forestiers,
qui abritent l'ensemble des six espèces ciblées, les
espèces fruitières sont en revanche beaucoup plus abondantes.
Cependant, ici aussi, nous avons noté que les sites de Laboya qui
renferment la totalité des espèces ciblées, sont
également beaucoup mieux pourvus en potentiel forestier que ceux de
Dialakoto qui n'abritent que Vitex et Detarium.
Ces différences entre les terroirs villageois et les
espaces forestiers de Dialakoto et de Laboya, s'expliquent sans doute par deux
raisons:
- d'une part, par le fait que le terroir de Dialakoto est plus
ancien, plus peuplé et donc beaucoup plus anthropisé, que celui
de Laboya;
- d'autre part, par le fait que le village de Laboya,
installée au niveau de la zone tampon du Parc, bénéficie
de la présence de formations forestières beaucoup plus
productives.
En ce qui concerne les potentiels de chaque espèce,
nous avons constaté que Vitex madiensis, avec plus de 45% des
effectifs fruitiers, est beaucoup plus abondante. Elle est suivie loin
derrière par Detarium microcarpum et Borassus aethiopum
qui totalisent respectivement 22,7 et 21% des potentiels
inventoriés. Les autres espèces sont très faiblement
représentées; Saba senegalensis et Parinari
macrophylla enregistrent moins de 5% des effectifs, tandis que Parkia
biglobosa ne dispose que 2% des potentiels.
Concernant, la distribution des autres espèces non
fruitières, nous constatons que les six espèces fruitières
étudiées, sont littéralement <<noyées>>
dans la masse. En effet, les autres espèces sont largement
prédominantes au niveau de tous les inventaires, avec des rapports
toujours supérieurs à 50% des effectifs ligneux.
Ainsi l'analyse comparative de l'inventaire numérique
des individus ligneux au niveau de ces deux espaces a clairement établi
la meilleure performance de la cueillette forestière au niveau des sites
d'exploitation sur la production fruitière dans les
périmètres agraires des terroirs villageois.
Toutefois, signalons que ces deux espaces, ainsi
délimités, sont en compétition dans un milieu exigu en
continuelle et profonde mutation. C'est ainsi que les dynamiques spatiales
actuelles déterminent fortement les pratiques socioéconomiques et
environnementales au niveau de la <<poche de Dialakoto>>. Les
perturbations anthropiques sur le milieu, aussi bien dans les terroirs
villageois que dans les espaces forestiers, aboutissent à la
régression progressive du potentiel ligneux. Cette tendance à la
<< terroirisation >> progressive de cette périphérie
nord du PNNK est largement traduite par l'extension des bananeraies le long de
la Gambie, au détriment des formations boisées abritant les sites
d'exploitations.
Actuellement, la gestion de la périphérie du
PNNK constitue un enjeu majeur pour les autorités compétentes qui
sont écartelées entre le souci de conservation de la
biodiversité et celui de la satisfaction des besoins des populations
périphériques. En effet, le PNNK, qui est pour la
communauté internationale un capital écologique à
préserver, constitue en revanche pour les populations riveraines un
îlot abritant des ressources considérables inutilisées.
Dans le but d'atténuer les frustrations des populations
périphériques, qui ne comprennent, ni ne cautionnent ' la
préservation de milieux naturels figés dans leur état
primitif, tels des musées en plein air 51 , le
Sénégal a initié un certains nombres de mesures.
C'est dans ce cadre qu'ont été
expérimentés deux concepts novateurs, les Espaces Naturels
Communautaires (ENC) et les Réserves Naturels Communautaires (RNC), qui
visent à intégrer pleinement les populations riveraines dans la
gestion et l'aménagement des espaces forestiers
protégés52.
De la même manière, le professeur Cheikh BA, dans
son article cité en avant propos, invitait à faire ' un
effort de dépassement des concepts d'exploitation ou de con quête
de la nature vers ceux d'utilisation et d'aménagement de l 'espace
53.
Cependant ce qui est généralement
constaté, c'est que la ressource est exploitée sans
ménagement, tant qu'elle est abondante et parait inépuisable.
Mais dès qu'elle commence à manquer, elle fait l'objet de
convoitises, puis de contrôle; alors là apparaît les soucis
plus ou moins collectifs de sa gestion rationnelle et durable.
En évidence, c'est cette logique, propre à toute
l'humanité, qui fait dire au professeur Paul NDIAYE qu'en
réalité ' on exploite la ressource et on gère la
pénurie .
51 MORAN-DEVILLER, J. (1987) -Le droit de l'environnement - in
Que sais - Je? PUF, p.65.
52 Ces concepts ont été présentés par
le Sénégal au cours du Congrès Mondiale sur les Parcs
à Durban, (Afrique du Sud), en Septembre 2003.
53 BA, C. (1988)- ibidem, p.12.
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