UNIVERSITE PAUL CEZANNE IUP Management International
et Ingénierie de L'Export, Mémoire de Master
2 Stratégies Industrielles et Commerciales
Internationales Année universitaire 2007/2008
Etudiant: Cheikh Mbengue Directeur de mémoire
: M. Paul Djondang
LA DIMENSION CULTURELLE DANS L'ELABORATION ET LA
MISE EN OEUVRE DES STRATEGIES D'INTERNATIONALISATION
DE L'ENTREPRISE
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Sommaire
Introduction
Première partie : le concept
d'internationalisation de l'entreprise I. Le processus
d'internationalisation de l'entreprise
II. Les différentes stratégies
d'internationalisation 1. La stratégie internationale
2. La stratégie multinationale
3. La stratégie globale
4. La stratégie transnationale
Deuxième partie : convergence ou divergence entre
l'analyse stratégique et l'analyse culturelle
I. Quelle place pour la culture dans l'analyse
stratégique?
a. Les racines culturelles de la stratégie
b. Des modèles culturels de stratégie
II. Les différentes orientations culturelles des
organisations
1. Le modèle ethnocentrique
2. Le modèle polycentrique
3. Le modèle régiocentrique
4. Le modèle géocentrique
Troisième partie: la dimension culturelle dans
l'élaboration d'une stratégie d'internationalisation:
l'adaptation les éléments du marketing mix aux marches
locaux
I. La stratégie de produit
international
II. La stratégie de communication
internationale
1. L'élaboration d'une stratégie de communication
internationale
2. La mise en oeuvre de la stratégie de communication
internationale
3. La dimension culturelle de la consommation
4. Culture et communication commerciale Quatrième
partie : la gestion internationale des ressources humaines et la
négociation internationale
I. La gestion internationale des ressources humaines
1. La dimension culturelle de la gestion internationale des
ressources humaines
2. Expatrier ou recruter au niveau local II. L'impact de la
culture dans la négociation internationale
1. Les caractéristiques et les enjeux de la
négociation internationale
2. Les facteurs de succès à la négociation
internationale
3. L'approche de la dimension culturelle dans la
négociation internationale
4. La nature de la culture
5. Comment la culture influe sur la négociation
6. Les acteurs de la négociation
7. La structure de la négociation
8. La stratégie de la négociation
9. Le processus de la négociation
10. Le résultat
Conclusion
Table des matières
Introduction 5
Première partie : le concept d'internationalisation de
l'entreprise 7
I. Le processus d'internationalisation de l'entreprise 7
II. Les différentes stratégies
d'internationalisation 10
1. La stratégie internationale 10
La stratégie multinationale 10
La stratégie
globale 11
La stratégie transnationale 12
Deuxième partie : convergence ou divergence entre
l'analyse strategique et l'analyse culturelle
13
III. Quelle place pour la culture dans l'analyse
stratégique ? 13
1. Les racines culturelles de la stratégie 14
2. Des modèles culturels de stratégie 15
IV. Les différentes orientations culturelles des
organisations 16
1. Le modèle
ethnocentrique 17
4.Le modèle régiocentrique 18
2. Le modèle polycentrique 19
3. Le modèle
géocentrique 21
Troisième partie : la dimension culturelle dans
l'elaboration d'une strategie d'internationalisation : l'adaptation les
elements du marketing mix aux marches locaux 24
I. La stratégie de produit international 25
II. La stratégie de communication internationale 27
1. L'élaboration d'une stratégie de communication
internationale 28
2. La mise en oeuvre de la stratégie de communication
internationale 31
3.La dimension culturelle de la
consommation 32
4.Culture et communication commerciale 33
Quatrième partie : la gestion internationale des
ressources humaines et la negociation internationale 35
I. La gestion internationale des ressources humaines 35
1. La dimension culturelle de la gestion internationale des
ressources humaines 36
2. Expatrier ou recruter au niveau local 37
II. L'impact de la culture dans la négociation
internationale 40
1. Les caractéristiques et les enjeux de la
négociation internationale 41
2. Les facteurs de succès de la négociation
internationale 43
3. L'approche de la dimension culturelle dans la
négociation 43
4. La stratégie de la négociation 47
5. Le processus de la négociation 48
6. Le résultat 50
Conclusion 52
Annexes 52
Annexe 1: Pyramide des besoins de Maslow 53
Annexe 2 : Quelques définitions des termes de
l'interculturel 54
Annexe 3 : Les dimensions culturelles de Gert
Hofstede 58
Annexe 4: Les 7 dimensions culturelles de Fons
Trompenaars 59
Annexe 5 : L'internationalisation de l'entreprise 60
Bibliographie
Introduction
La globalisation de l'économie mondiale a permis
l'ouverture des frontières, le raccourcissement des distances et la
mobilité des biens et services grâce à l'essor des
nouvelles technologies de l'information et de la communication. Cette ouverture
des frontières invite à l'embrassement des cultures. Quels que
soit la taille ou le niveau d'engagement à l'international, le
développement international de l'entreprise devient une
nécessité que les mutations de l'environnement économique
mondiale ont progressivement mis à jour. Les entraves aux
échanges de biens et services ont sensiblement diminué
grâce à la globalisation des économies et des
marchés. L'ouverture internationale devient inéluctable
même pour les entreprises qui étaient jusque là
protégées contre la concurrence étrangère.
Par conséquent, les approches traditionnelles du
commerce international et du marketing international s'élargissent.
Elles ne se limitent plus à la conquête des marchés
extérieurs mais se tournent plutôt vers l'internationalisation de
l'entreprise et de ses différentes fonctions. Le management
international ou l'interculturel prend tout son sens est devient l'une des
fonctions de l'entreprise les plus importantes.
L'objectif de ce mémoire est d'essayer d'analyser la
dimension culturelle dans l'internationalisation des entreprises. Cela revient
à se poser et répondre aux questions suivantes : quel est
l'impact de la culture dans l'internationalisation de l'entreprise ? Quel est
l'impact de la culture dans le monde des affaires ? Quelle est la place de la
culture dans le choix de la stratégie d'internationalisation d'une
entreprise ? En quoi la « sensibilité culturelle » constitue
t-elle un facteur clé de succès dans l'internationalisation des
entreprises ?
Pour répondre à ces questions nous allons nous
organiser en quatre parties. Tout d'abord nous allons faire un flash back en
essayant d'énumérer les différentes étapes
d'internationalisation, de l'opération d'exportation à
l'implantation de filiales à l'étranger. Dans cette partie nous
allons également évoquer les raisons qui poussent les entreprises
à s'internationaliser ainsi que les enjeux d'une telle décision.
Dans la deuxième partie, la relation entre la stratégie et la
culture sera éclairée afin de mieux cerner les origines et
l'évolution de la considération des deux termes. Autrement dit en
quoi la culture influe t-elle sur l'adoption d'une stratégie
d'internationalisation ? La dimension culturelle dans l'élaboration et
la mise en oeuvre de la stratégie d'internationalisation, notamment
l'adaptation des différents éléments du marketing mix,
feront l'objet de la troisième partie. Ici, il est question de mettre en
évidence le rôle du marketing international dans le
développement de politiques de produit et de communication pour les
produits destinés aux marchés étrangers. Autrement dit,
l'adaptation des produits et de la communication aux spécificités
locales. Enfin, la quatrième partie nous permettra d'aborder la
dimension culturelle dans la négociation. Nous allons essayer de
répondre aux questions de savoir en quoi la culture influe t-elle dans
la négociation internationale ? , pourquoi des collaborateurs de
cultures différentes négocient-ils différemment ?
PREMIERE PARTIE : LE CONCEPT D'INTERNATIONALISATION DE
L'ENTREPRISE
Quelles sont les motivations des entreprises à
s'internationaliser? Existe-t-il un cheminement progressif leur permettant de
passer d'une orientation et de structures purement nationales ou même
régionales, à une orientation et à des structures plus
internationales voire multinationales? Et quels « déclencheurs
» les poussent à passer d'un stade d'internationalisation à
l'autre ? Pour répondre à ces questions, il convient de voir le
processus
d'internationalisation de l'entreprise ainsi que les
différentes stratégies adoptées par les entreprises pour
se développer à l'international.
I. Le processus
d'internationalisation de l'entreprise
L'internationalisation de entreprise comporte plusieurs aspects. C'est
un processus temporel mais dynamique qui a pour objectif l'introduction de
l'entreprise sur des marchés étrangers, le plus souvent
éloignés et différents culturellement,
économiquement et juridiquement de ceux du marché national de
l'entreprise.
Comment l'entreprise doit s'internationaliser? Dans quel pays
aller? Doit-on acquérir une entreprise locale ou démarrer et
partir de zéro ? Doit-on évoluer avec un partenaire locale ou non
? La réponse à chacune de ces questions correspond à une
stratégie d'internationalisation de l'entreprise. Le choix de la
stratégie à adopter va être déterminée par la
structure de l'entreprise, sa taille et les ambitions des dirigeants. Une
entreprise de petite taille commence souvent à exporter et les grandes
entreprises ne se contentent pas d'exporter leurs produits, elles se lancent
dans des opérations plus grandes et plus prometteuses telles que
l'acquisition d'une entreprise locale ou l'établissement d'un joint
venture. Ces grandes entreprises adoptent des stratégies
d'internationalisation qui sont compatibles avec leurs structures.
Les politiques d'exportation font office de première
étape de développement international de l'entreprise. Dans ce
type de stratégie, l'entreprise qui démarre à
l'international adopte une politique d'exportation lui permettant de vendre ses
produits à l'étranger. Elle les fabrique sur le marché
intérieur et les exporte vers des marchés étrangers. Le
processus de production n'est en aucun cas modifié, les produits ne
subissent non plus aucune modification ni adaptation aux marchés
étrangers. Cette politique d'exportation peut être mise en oeuvre
en adoptant plusieurs méthodes :
L'exportation directe
L'exportation directe permet de vendre à
l'étranger sans pour autant faire recours à des
intermédiaires. L'entreprise n'aura pas donc besoin de participer
à des salons professionnels à l'étranger, de mobiliser une
force de vente à l'étranger via des agents commerciaux ou des
représentants salariés.
L'exportation indirecte
L'exportation indirecte requiert le recours à des
courtiers ou à des sociétés de commerce international,
à des partenariats constitués de groupement d'exportateurs et de
portage d'exportation.
La seconde étape dans le processus
d'internationalisation concerne le développement de réseaux de
distribution à l'étranger. A ce stade l'approvisionnement et la
production sont toujours effectués dans le pays d'origine. La
constitution de ces réseaux peut prendre différentes formes,
allant de la franchise internationale, aux licences étrangères
jusqu'à la création de succursales ou de filiales de distribution
(dans ces deux cas, les capitaux sont fournis par l'entreprise d'origine).
La troisième étape dans le processus
d'internationalisation correspond à l'investissement direct
étranger avec l'apparition des firmes multinationales. L'entreprise
multinationale produit et vend dans plusieurs pays. Les filiales ne sont pas
forcément rapprochées entre elles par de véritables liens
économiques, commerciaux ou industriels.
La quatrième étape correspond à la
rationalisation progressive des structures nationales et les ressources des
filiales étrangères pour une meilleure coordination des
activités de l'entreprise. On assiste alors à l'avènement
des firmes transnationales.
Etape 1 : opérations d'exportation:
l'entreprise étend son marché à d'autres pays en
maintenant la production dans son pays d'origine.
|
Etapes 2 : filiale ou réseau
d'entreprises : l'entreprise déplace une partie de ses opérations
à l'extérieur de son pays d'origine.
|
Etape 3 : opérations multinationales.
L'entreprise devient une entreprise multinationale avec des opérations
de production et de commercialisation dans différents pays. Les
décisions stratégiques sont prises au siége de
l'entreprise
|
Etape 4 : opérations transnationales
visant à concilier intégration globale et différenciation,
en essayant de tirer partie autant que possible des économies
d'échelle et de champ, tout en conservant des avantages distinctifs au
plan social
|
Etape 5 : opérations globales.
L'entreprise est appelée « globale» car elle n'est plus
identifiée à un pays d'origine, le siége central a une
fonction de contrôle et de coordination.
|
Les étapes du développement international des
entreprises : source, management interculturel, stratégie, organisation,
performance, olivier meier.
II. Les différentes
stratégies d'internationalisation
Dans leur processus d'internationalisation, les entreprises
adoptent différentes stratégies selon leur taille et leur
structure.
1. La stratégie internationale
L'entreprise internationale est une organisation dont le
centre de décision et le système de production et de
commercialisation se trouvent dans le pays d'origine et qui entend
étendre ses activités à d'autres pays. La logique de cette
stratégie veut que l'entreprise développe les compétences
et les connaissances qui permettent la gestion de l'entreprise au niveau
national puis procéder à leur transfert au niveau local dans les
unités à l'étranger. Il s'agit avant tout de s'appuyer sur
les ressources techniques, humaines et organisationnelles de la
société mère, en les valorisant et s'adaptant aux
différents marchés locaux. Ce type de configuration est
adapté aux entreprises souhaitant limiter leur internationalisation
à quelques pays et souhaitant limiter les coûts de structure et de
coordination. Les entreprises se situant au premier stade du processus
d'internationalisation adoptent souvent cette stratégie. Sont
concernées les entreprises récentes et les sociétés
de taille modeste comme les PME-PMI et les TPE souhaitant se développer
à l'international tout en réduisant les coûts à
l'internationalisation.
L'entreprise internationale doit avoir des connaissances
solides en interculturel pour mener à bien son projet
d'internationalisation. Les facteurs clés de succès dans ce type
d'organisation portent principalement sur la gestion des négociations
commerciales avec les entreprises étrangères. Dans l'entreprise
internationale, la connaissance de l'in terculturel se limite donc
principalement à la sphère commerciale et vise à
comprendre les valeurs et comportements de ses interlocuteurs dans le cadre de
relations entre un acheteur et un vendeur.
2. La stratégie multinationale
L'entreprise multinationale manifeste un engagement plus
déterminé au niveau international que l'entreprise
internationale. Elle localise ses opérations de production et de
commercialisation dans différents pays pour profiter du meilleur dans
chaque pays. Elle utilise l'investissement direct pour implanter des
unités de production locale ou de développement des contrats de
transfert de technologie avec des entreprises étrangères. Les
décisions stratégiques restent centralisées au
siége de l'entreprise alors que la gestion des acticités locales
est confiée aux unités locales. L'entreprise multinationale
adopte des stratégies multidomestiques pour mieux adapter sa politique
commerciale aux spécificités des marchés locaux. Les
opérations locales sont entreprises de façon à exploiter
les opportunités locales. Dans ce type d'organisation, les
activités commerciales sont différenciées et
adaptées au niveau local pour mieux satisfaire les besoins des clients
locaux. Les produits et ou services sont développés selon les
spécificités locales en
vu de répondre au mieux aux spécificités
de chaque marché local. La standardisation est bannie, chaque
marché ayant ses besoins différents de ceux des autres
marchés que l'entreprise se doit de satisfaire. Les marchés
potentiels pour l'entreprise multinationale sont ceux de taille importante ou
à forte croissance et où l'intensité concurrentielle est
moyenne ou faible. Les facteurs clés de succès pour une
entreprise multinationale sont la gestion des relations entre le siége
et ses filiales, le management des mutations internationales et au
positionnement et à l'image des différentes filiales au sein de
leur pays d'accueil respectifs. Le niveau de contrôle exercé sur
les filiales et le niveau d'autonomie des filiales et la gestion des
impatriés et expatriés déterminent le succès de
l'entreprise multinationale.
Le management interculturel de l'entreprise multinationale
doit être axé sur les questions relatives au mode de
fonctionnement des filiales, la gestion des ressources humaines et aux
politiques de communication.
3. La stratégie globale
L'entreprise globale ou mondiale adopte une stratégie
à vocation mondiale axée autour d'une politique de
standardisation et d'optimisation des ressources. Le monde est
considéré comme un seul marché. La stratégie repose
sur une présence commerciale et industrielle de l'entreprise à
l'échelle mondiale. Les offres proposées sont
standardisées avec un marketing indifférencié, une
coordination centralisée des activités et l'exploitation
d'interdépendances stratégiques. La recherche d'économies
d'échelle, le partage des coûts la coordination des flux et
l'intégration de la recherche, au plan mondial sont au coeur de la
stratégie globale. L'entreprise globale essaie de dépasser le
stade des différences culturelles en gérant au plan mondial
l'intégration des équipes et le développement des
activités. Elle est à la recherche d'une véritable
identité, ce qui constitue l'un des facteurs clés de
succès.
Ce type d'organisation est très minoritaire en
raison de la difficulté d'appliquer à l'échelle mondiale
un système de croissance universel fondé sur des critères
essentiellement technico-économiques. La question des différences
culturelles tend à être dépassée.
4. La stratégie transnationale
L'entreprise transnationale n'accorde pas une importance
capitale à l'attachement à son pays d'origine. Elle baigne dans
la mixité culturelle, ce qui explique son détachement au pays
d'origine. Elle tend à perdre son identité nationale. La
stratégie transnationale constitue une étape avancée dans
le processus d'internationalisation de l'entreprise dans la mesure où
elle permet à l'entreprise de concilier les forces de
l'intégration globale avec
les exigences d'adaptation aux spécificités
locales des marchés ciblés par l'entreprise. En quelque sorte
l'entreprise transnationale adopte une stratégie globale pour
développer un avantage concurrentiel au niveau mondial. L'objectif
principal visé par cette stratégie consiste à
bénéficier des avantages de coûts grâce à la
coordination générale des activités, tout en veillant
à une réactivité et flexibilité pour identifier et
exploiter des opportunités locales. Les facteurs clés de
succès de la stratégie tiennent à la capacité de
l'entreprise transnationale à coopérer avec les exigences
d'intégration et de différenciation, transformant ces
contradictions en une réalité opérationnelle.
Les implications pour les entreprises transnationales
consistent à identifier les zones possibles d'harmonisation aussi bien
au niveau de l'entreprise qu'au niveau des marchés, et les domaines
où les dimensions culturelle et relationnelle sont essentielles.
Le concept d'internationalisation est une
réalité, les différences culturelles en sont une autre.
Dans l'élaboration des stratégies d'internationalisation, la
question culturelle fait surface encore une fois, d'où la
nécessité de regarder de plus prés la relation entre la
stratégie et la culture pour savoir si les deux termes convergent ou
divergent.
DEUXIEME PARTIE: CONVERGENCE OU DIVERGENCE ENTRE
L'ANALYSE STRATEGIQUE ET L'ANALYSE CULTURELLE
« C'est un peu comme s 'il existait au sein des
organisations un ensemble de questions que certains désignent par le
terme de culture et d'autres par celui de stratégie ». Karl
Weick
Karl Weick, expert en management des organisations a
éclairé la relation complexe et confuse entre culture et
stratégie. Il s'est basé sur une expérience
réalisée avec des lecteurs. En leur proposant une série
d'affirmations et leur demandant de choisir comme premier mot de la phrase
entre « culture » et « stratégie », il s'est rendu
compte que dans les définitions courantes du terme stratégie, le
remplacement par le mot culture n'altérait en rien le sens du texte.
Cette expérience démontre la similarité entre
stratégie et culture.
Si la culture peut être définie comme un «
ensemble de solutions à des problèmes d'adaptation externe et
d'intégration interne », la stratégie permet aux
organisations d'évaluer leur environnement et leurs capacités et
sert en effet à réaliser une adaptation externe et d'effectuer
une intégration interne.
I. Quelle place pour la
culture dans l'analyse stratégique?
Pour répondre à cette question, il convient de
répondre un certain nombre de questions à savoir : dans quelle
mesure la culture nationale influe-t-elle sur la stratégie
adoptée ? En quoi différentes approches de la stratégie
reflètent-elles autant d'hypothèses culturelles sous-jacentes ?
Confrontés à des environnements commerciaux semblables, comment
les dirigeants de cultures différentes les perçoivent-ils et s'y
adaptent ? Comment l'impact de la culture se ressent-il non seulement quant aux
décisions prises (contenu), mais aussi à la façon d'y
parvenir (processus)? Et en quoi l'influence culturelle concerne t-elle
l'interaction entre contenu et processus stratégiques ? Pour
répondre à toutes ces questions, nous allons essayer d'identifier
ce qu'impliquent l'analyse concurrentielle, l'anticipation des mouvements
stratégiques de plusieurs concurrents nationaux, le rôle des
maisons mères et des filiales au moment d'appliquer une
stratégie, et la stratégie même d'internationalisation.
1. Les racines culturelles de la stratégie
Depuis fort longtemps, la stratégie n'a cessé de
susciter de l'intérêt pour les dirigeants des organisations et se
trouve exposée à un contexte belliqueux ou militaire. De
l'étymologie strategos (commandant de l'armée) du grec,
aux manoeuvres militaires décrites dans l'art de guerre[1] et
à celles, personnelles, du Prince[2] de Machiavel, les
stratégies sont pensées pour servir des intérêts
nationaux ou individuels. Dans le cadre d'une organisation, la stratégie
est conçue pour atteindre des objectifs.
Dans un contexte commercial, la notion de stratégie est
apparue dans les années 60, période pendant laquelle la
concurrence entre les organisations s'intensifie et les ressources se
raréfient. Pour centraliser et formaliser les décisions, les
organisations s'engagent dans des guerres de planification stratégique.
Par exemple, chez GE et Shell, l'opération stratégique a pris une
allure « sacro-sainte » devenant une sorte de rituel religieux. L'un
des anciens dirigeants de Shell explique que « les responsables
intéressés par ces systèmes de planification luttent en
permanence pour ne pas en arriver à une danse de la pluie ».
Les dirigeants doivent procéder à une analyse
stratégique de l'organisation afin d'évaluer ses forces et
faiblesses, ainsi que les opportunités et les menaces de l'environnement
(l'analyse SWOT). Les armes du management stratégique tel que la matrice
BCG constituent des outils d'aide aux décisions stratégiques
importantes comme la conquête de nouveaux marchés.
Plus tard, le modèle de Porter (les 5 forces de
Porter), s'appuyant sur l'économie industrielle permet de
synthétiser les facteurs influant sur la performance d'une entreprise
par 5 forces : l'intensité de la concurrence intersectorielle, le
pouvoir de négociation des fournisseurs, le pouvoir de
négociation des clients, la menace de potentiels entrants dans le
secteur et le menace de produits de substitution. Le poids des 5 forces permet
de déterminer la capacité des firmes en présence à
dégager un profit.
Les services de planification stratégique, rituels,
outils, modèles ne sont rien d'autre que des artéfacts culturels.
Les modes et les tendances ayant véhiculé des pratiques
managériales défendent certaines croyances et valeurs telles que
« la rationalité analytique ». Il faut toutefois bien saisir
les hypothèses sous-jacentes pour savoir si leur signification est la
même quelle que soit la culture qui les accueille. Pour cela, les
entreprises internationales doivent envisager des modèles
d'élaboration de stratégies plus ou moins viables dans tous les
contextes. D'où la nécessité de mettre au point des
stratégies au niveau tant local et mondial, de comprendre les
stratégies des maisons mères et des filiales et d'anticiper les
mouvements stratégiques des concurrents et partenaires locaux et
internationaux.
2. Des modèles culturels de stratégie
Les hypothèses culturelles relatives à
l'adaptation externe prennent toute leur importance en matière de
stratégie. L'objectif premier de la stratégie est d'adapter
l'organisation à son environnement. Les hypothèses concernant
l'intégration interne correspondent aux personnes qui participent
à la décision et à celle qui la prend finalement. Les
dirigeants de plusieurs pays envisagent l'incertitude et le contrôle
différemment.
Les scénarios suivants montrent comment la culture
influe sur l'élaboration de la stratégie.
Scénarios 1
Les responsables de pays nordiques et anglo-saxons
appréhendent l'environnement comme un univers moins incertain. Ils
pensent plutôt qu'il peut être analysé et connu. Cela
s'explique par leur score à la dimension culturelle (le rapport à
l'incertitude).Ils s'intéressent donc aux outils et aux techniques
d'analyse (prévisions et planifications), ils sont demandeurs de
rapports et d'études de marchés et font appel à des
experts du secteur pour obtenir des informations objectives. Après avoir
réuni toutes les données, ils croient en leur capacité
d'analyse et de prédiction de l'environnement, ce qui crée un
sentiment de contrôle. Les actions stratégiques sont donc
réalisées pour que les choses se produisent.
Scénarios 2
Les dirigeants des pays latins et asiatiques, ressentent
généralement une grande incertitude et un manque de
contrôle. C'est pourquoi ils se laissent guider par le courant et
s'adaptent: les informations recueillies via des canaux informels et des
connaissances personnelles, sont plus objectifs. Leur interprétation se
fait donc par d'intenses débats et conversations en tête à
tête, car ils considèrent que diverses perspectives, une
implication accrue et un plus grand partage des sonnées sont
indispensables pour comprendre le flou externe.
Les hypothèses sur l'adaptation externe (contrôle
et incertitude) et l'intégration interne (hiérarchie,
individualisme/collectivisme) génèrent des modèles
d'organisation et de réponse à l'environnement. Il convient
d'observer la façon dont les informations sont rassemblées,
interprétées et utilisées. Ce processus de recueil,
d'analyse et d'interprétation des informations est fortement
influencé par la culture, ce qui explique et détermine la
différence entre les cultures des entreprises. C'est ainsi que d'autres
sphères d'influence de la décision stratégique surgissent.
Le contexte national et supranational, ou environnement institutionnel, est en
partie à l'origine de diverses approches et donne forme aux cultures
d'entreprise et sectoriel, lesquelles conditionnent les stratégies
adoptées. Les orientations stratégiques des organisations sont
alors fortement influencées par la culture.
II. Les différentes
orientations culturelles des organisations
Pour répondre aux exigences de l'environnement du
commerce international devenu complexe grâce à la mondialisation
de l'économie, les entreprises internationales adoptent des orientations
culturelles compatibles avec la structure de leur organisation. La gestion des
relations entre la maison mère et les entités locales comporte
des enjeux importants. La distance physique et culturelle complexifie la
gestion des relations entre la maison mère et ses filiales. Tous les
domaines liés à la communication et au management sont
affectés par cette distance caractérisée par des
différences culturelles et organisationnelles. L'entreprise doit donc
faire face à la ces différences et mettre en place un
système qui soit capable de neutraliser les effets néfastes de la
confrontation entre les culturelles nationales et organisationnelles. Pour
répondre à ce type de difficultés, l'entreprise peut opter
pour différents modes d'organisation avec ses différentes
entités. Les implications de cette représentation de l'entreprise
internationale et de ses relations avec ses filiales étrangères
tournent au tour de la question de l'intégration mondiale et de ses
exigences en matière de différenciation[3].
Quatre modèles d'organisation ont été mis
en place. Chacun d'entre eux matérialise et représente une
position stratégique vis-à-vis de la culture
organisationnelle.
1. Le modèle ethnocentrique
Le modèle ethnocentrique favorise et privilégie
la culture d'origine de l'entreprise. Toutes les décisions concernant la
stratégie globale de l'entreprise sont centralisées à la
maison mère. Les valeurs de l'entreprise sont ensuite transmises aux
différentes entités locales. Les décisions
stratégiques de l'entreprise sont prises en mettant en avant
l'intérêt et les objectifs de la maison mère. Les standards
du pays d'origine sont pris comme référence dans
l'élaboration de la stratégie de développement de
l'entreprise. La conception et le développement des produits ou des
services de l'entreprise ethnocentrique répondent à des exigences
de standardisation. Ce modèle d'organisation met la maison mère
en avant qui exerce un contrôle permanant sur ses filiales qui disposent
de peu d'autonomie. Dans les organisations qui ont adopté ce
modèle, les managers de la maison mère sont souvent
expatriés pour assurer le contrôle au niveau local. Ce
système d'expatriation permet d'assurer le transfert des valeurs de la
maison mère à ses filiales. Seuls les postes de moindre
importance sont occupés par des managers locaux. La conformité
prime sur la diversité dans ces genres d'organisations où la
culture d'origine de l'entreprise est favorisée aux dépens de la
culture des marchés locaux. La recherche d'une image globale
cohérente et facilement identifiable est l'objectif principal de
l'entreprise. Elle se focalise sur le transfert de ce qui a marché par
expérience sur le marché national aux marchés locaux.
Ce modèle est compatible avec un environnement peu
évolutif où l'entreprise opère sur des marchés
semblables. Cependant, dés lors que l'entreprise évolue vers des
marchés très différents, ce modèle perd son
importance dans la mesure où le transfert du modèle unique de la
maison mère vers les entités locales ne suffit plus pour la
gestion de l'entreprise. La connaissance et la prise en compte des
spécifiés locales deviennent une nécessité pour le
développement de l'entreprise sur des marchés locaux très
différents.
Exemple[4]
Pendant très longtemps, le concept suédois
IKEA a été reproduit avec une faible adaptation sur les
différents marchés visés, y compris dans les domaines
commerciaux. Un élément essentiel de la réussite d 'IKEA
réside en effet dans l'intérêt universel des clients pour
ses produits et pour l'aménagement de ses magasins. La stratégie
du groupe a par conséquent essentiellement reposé sur une
globalisation des politiques et des méthodes, en limitant au strict
nécessaire les stratégies de différenciation locale.
Doté d'une culture forte, les postes clés d'IKEA ont eu tendance
à
être monopolisés par les Scandinaves et les
standards du pays d'origine ont été appliqués à
l'ensemble du personnel. De même les principales décisions
stratégiques étaient prises au siége puis transmises aux
différentes filiales (communication verticale). Cela permettait
d'imposer les critères fondamentaux de réussite de l'enseigne
à l'ensemble des pays et pour chaque format de magasin. Ce modèle
de développement demeure la marque de fabrique de l'entreprise.
Néanmoins, le développement de nouveaux marchés
(Etats-Unis, PECO, Asie) a fait apparaître des différences en
termes d'habitudes de consommation. IKEA a dû par conséquent se
résoudre à comprendre les comportements d'achats de ces pays.
Ceci a conduit l'enseigne à adapter quelque peu son modèle de
croissance pour faire face à ses nouvelles contraintes des
marchés.
Attitude siége-filiales
|
caractéristiques
|
Leadership organisationnel Prise de décision
Contrôle
Coordination
|
Le siége comme centre de l'autorité et des
décisions.
Contrôle exercé sur les filiales.
Développement de la culture commune de la maison mère.
|
Communication et flux d'information
|
Des siéges vers les filiales
|
Gestion des ressources humaines
|
Cadre de la maison mère aux postes clés
(centralisation)
|
Politique marketing et action commerciale
|
Stratégie de développement à partir des
standards du pays d'origine
|
Source : management interculturel, stratégie, performance,
organisation, Olivier Meier.
2. Le modèle polycentrique
Le modèle polycentrique est adopté par les
entreprises qui accordent une grande importance aux cultures des pays
étrangers dans lesquels elles opèrent. La politique
d'internationalisation des ces entreprises est définie en fonction des
cultures locales. L'objectif visé est d'être au plus prés
des réalités locales. Le modèle polycentrique accorde une
grande autonomie aux filiales dans leur organisation. Chaque filiale est
considérée comme une entreprise locale, nationale et distincte,
disposant d'une réelle influence dans les décisions concernant la
gestion des activités du groupe. La gestion des ressources humaines est
localisée. Les managers locaux sont chargés d'assurer la
responsabilité des activités.
Le modèle polycentrique favorise l'initiative et
l'adaptation. Cependant, l'autonomie des filiales va à l'encontre de la
conformité de l'image du groupe et limite les synergies dans la mesure
où le sentiment d'appartenance à un même groupe n'est pas
très fort.
Attitude siége-filiales
|
caractéristiques
|
Leadership organisationnel Prise de décision
Contrôle
Coordination
|
Forte autonomie de décision accordée aux
filiales
Préservation des cultures
organisationnelles et nationales des entités.
|
Communication et flux d'information
|
Flux limité entre le siége et ses filiales
|
Gestion des ressources humaines
|
Cadres locaux aux postes clés
(délégation)
|
Politique marketing et action commerciale
|
Adaptation de la politique marketing et
commerciale aux spécificités locales.
|
Source : management interculturel, stratégie, performance,
organisation, Olivier Meier.
3. Le modèle régiocentrique
Le modèle régiocentrique vise à
positionner l'entreprise entre la stratégie globale et la
stratégie locale. Il tente de positionner l'entreprise au juste milieu
entre le global et le local. C'est la glocalisation[5]. Le
régiocentrisme est un modèle qui tend à organiser les
activités de l'entreprise selon des espaces ou marchés
relativement homogènes culturellement et économiquement afin de
bénéficier des économies d'échelle, sans pour
autant négliger la réalité des cultures. Il
reconnaît l'impossibilité d'ignorer les cultures, mais admet qu'il
est possible de rapprocher dans un même espace des cultures similaires
partageant les caractéristiques. Ce modèle a pour objectif de
diviser le monde en zones (Europe, Amérique du Nord, Asie du Sud-est,
Afrique de l'Ouest, etc.). Les pays sont alors regroupés selon leurs
similarités culturelles. L'activité économique est ensuite
organisée autour de cette base régionale.
Exemple de modèle
régiocentrique[6]
Ce modèle d'organisation est pratiqué par le
groupe Pinault-Printemps-Redoute, afin de concilier des logiques
d'économies d'échelle et les opportunités
stratégiques de grandes régions économiques comme
l'Europe. Le groupe entend en effet gérer les relations entre le
siége et les filiales à l'intérieur de zones
géographiques délimitées. Cette organisation du management
sur une base régionale constitue en effet un relais majeur dans la
politique du groupe qui cherche à la fois à maîtriser ses
coûts d'organisation, tout en étant ouvert aux
particularités locales et culturelles de ces différentes
régions.
Des siéges régionaux servent de relais entre la
maison mère et les filiales. Le groupe cherche à créer des
synergies entre les filiales d'une même région ou zone
géographique. L'objectif est de créer une culture de
proximité.
Attitude siége-filiales
|
caractéristiques
|
Leadership organisationnel Prise de décision
Contrôle
Coordination
|
Fort pouvoir des siéges régionaux, avec
incitation pour contribution aux performances économiques de la
région.
|
Communication et flux d'information
|
Flux généralement issus des siéges
régionaux ou des pays concernés.
|
Gestion des ressources humaines
|
Cadres de la région aux postes clés
|
Politique marketing et action commerciale
|
Stratégies de développement à partir des
synergies entre pays de la même zone géographique.
|
L'un des avantages principaux du modèle
régiocentrique est le fait qu'il permet à l'entreprise de rester
une organisation supranationale tout en veillant au respect des
différences culturelles au sein des groupes de pays. Cependant la
délimitation des régions demeure une difficulté dans la
mesure où les pays limitrophes ne sont pas forcément similaires
culturellement. Une erreur de découpage peut entraîner des
problèmes de communication et de marketing.
4. Le modèle géocentrique
Le modèle géocentrique positionne l'entreprise
sur un marché mondial où siéges et filiales jouent le
même rôle dans les processus de décisions
stratégiques. La logique hiérarchique perd son importance au
profit d'une logique de réseau de filiales.
Exemple de modèle
géocentrique[7]
Des groupes comme Accor, Axa ou Danone sont
représentatifs d'une culture régiocentrique marquée par un
mode de communication en réseau dans lequel le siége n'est qu'un
élément du processus (approche transversale). Dans ce type de
structures, le siége et les filiales collaborent et cherchent à
développer des indicateurs à la fois mondiaux et locaux. Ces
entreprises se trouvent souvent dans un double processus, alliant
intégration mondiale (coordination et harmonisation des
activités) et différenciation locale (réponses aux
exigences locales).
Le modèle géocentrique est souvent adopté
par des entreprises qui ont atteint un certain niveau de développement
international élevé. Le succès de l'entreprise à
l'international fait en sorte que les orientations stratégiques en
matière de gestion des ressources humaines ne se limitent pas au niveau
national. Par conséquent, la nationalité n'est pas un
critère déterminant en matière de recrutement et
d'affectation des cadres aux postes de direction. La question de l'origine
culturelle tend à être dépassée dans ces genres de
structures. Par conséquent, l'expression et la compétence
déterminent la distribution des responsabilités au sein de
l'organisation sans tenir compte de l'origine ou la culture des postulants.
C'est dans cette perspective que l'expatriation se fait en double sens (du
siége vers les filiales et des filiales vers le siége).
Attitude siége-filiales
|
caractéristiques
|
Leadership organisationnel Prise de décision
Contrôle
Coordination
|
Système global de prise de décisions avec
collaboration étroite entre siége et filiales. Mise en place
d'indicateurs à la fois globaux et locaux
Développement d'une «culture groupe» au plan
mondial.
|
Communication et flux d'information
|
Flux bidirectionnels entre le siége et ses filiales
|
Gestion des ressources humaines
|
Cadres recrutés en fonction de leur
expérience et compétence sans prise en compte de la
nationalité
|
Politique marketing et action commerciale
|
Stratégies de développement au niveau mondial,
avec création d'interdépendances fortes entre le siége et
ses filiales
|
Tableau comparatif des relations
siége-filiales
Ethnocentrisme
|
Polycentrisme
|
Régioncentrisme
|
Géocentrisme
|
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|
|
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Typologie Critères
|
|
|
|
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Identité organisationnelle
|
Entreprise à forte culture nationale avec
un pouvoir central fort
|
Organisation multidomestique autour de la nationalité des
pays d'accueil (pouvoir central limité)
|
Organisation multipolaire autour de grandes zones
géographiques homogènes (siéges régionaux)
|
Entreprise mondiale de proximité (collaboration
siégefiliales)
|
Gestion des ressources humaines
|
Communication descendante avec fortes directives en provenance du
siége central
|
fort degré d'autonomie au niveau des filiales.
Diversité des situations et faible communication entre les
entités.
|
Interdépendance stratégique au plan
régional avec flux de communication élevé entre
siéges régionaux et filiales.
|
Interdépendance stratégique au plan mondial avec
flux de communication importants entre filiales et au niveau des relations
siégefiliales.
|
Système
Evaluation Contrôle
|
Indicateurs de performances et de contrôle fixés
par le siége du pays d'origine. Contrôle des activités
exercé par les cadres et responsables de la maison mère.
|
Indicateurs déterminés localement, en fonction
des
besoins et des particularismes locaux. Contrôle des
activités exercé par les cadres de chaque pays.
|
Indicateurs définis régionalement par grandes zones
géographiques. Contrôle des
activités exercé par des responsables
régionaux.
|
Indicateurs globaux élaborés à partir des
contraintes
nationales et transnationales. Contrôle des
activités exercé en fonction des exigences requises
hors considération des origines nationales.
|
Les orientations organisationnelles des entreprises
déterminent leur stratégie de développement international
et met la lumière sur leur sensibilité culturelle dans
l'élaboration de leurs stratégies d'internationalisation.
TROISIEME PARTIE : LA DIMENSION CULTURELLE DANS
L'ELABORATION D'UNE STRATEGIE D'INTERNATIONALISATION : L'ADAPTATION LES
ELEMENTS DU MARKETING MIX AUX MARCHES LOCAUX
Dans cette partie nous allons aborder la question centrale du
sujet à savoir la dimension culturelle dans l'élaboration
d'une stratégie d'internationalisation. Une fois l'entreprise
s'engage à étendre ses activités
sur des marchés étrangers, elle doit, si elle
prend compte et au sérieux les cultures locales, adapter sa politique
commerciale. En effet, l'adaptation intervient depuis la conception des
produits destinés aux marchés étrangers jusqu'à
leur distribution au niveau local. Autrement dit les produits doivent
répondre à des besoins spécifiques, locaux. Dans cette
perspective, des produits standardisés ne conviennent pas étant
donné qu'ils ne tiennent pas compte des spécificités
locales. Le couple produit/marché doit donc être
étudié de très prés pour atteindre les
consommateurs de ce marché. L'acceptabilité du produit par le
marché destiné doit attirer l'attention des dirigeants. Est-ce
que le produit correspond aux exigences du marché local ? Est-ce qu'il
répond aux besoins spécifiques des consommateurs locaux ? Sur
quoi repose son acceptation et son adoption par les consommateurs ciblés
? Telles sont des questions que les dirigeants doivent trouver des
réponses pour la réussite de leurs opérations
internationales. L'adaptation physique et culturelle des produits permet
d'éviter ou de surmonter la résistance à l'acceptation des
produits. La question de la qualité du produit doit aussi être
bien étudiée, mais du point de vue des consommateurs locaux.
Là, il est question d'essayer de comprendre comment les consommateurs
locaux définissent la qualité d'un produit. Pour trouver une
réponse adéquate à cette question il convient
d'étudier les besoins des consommateurs pour pouvoir y apporter la
réponse appropriée. La pyramide des besoins de Maslov (voir
annexe) est un outil adapté pour mesurer les besoins des individus. Une
attention capitale doit être accordée à l'impact du pays
d'origine sur l'image du produit. Les gens ont tendance à associer les
produits offerts par une entreprise à l'image du pays d'origine de
l'entreprise. De ce fait une mauvaise image temporelle ou passagère du
pays d'origine peuvent impacter les produits de l'entreprise. L'exemple du
boycott des produits américains pour contester contre la politique
étrangère des Etats-Unis est parlant. Une adaptation du produit
ne suffit pas. Il faut également adopter une politique de communication
adaptée pour faciliter et accompagner l'acceptation et l'adoption du
produit. Nous avons fait le choix de nous focaliser uniquement sur deux
éléments du marketing mix (le produit et la communication) que
nous jugeons plus sensibles aux différences culturelles.
I. La stratégie de
produit international
Concevoir et développer un produit pour un
marché étranger se révèle être une
tâche complexe qui demande beaucoup d'efforts, d'implications et
d'ouverture de la part de l'entreprise qui s'internationalise. Les responsables
chargés de développer le produit destiné aux
marchés étrangers doivent
mettre de côté leur culture le temps de concevoir
le produit pour ne pas courir le risque d'en être influencé.
Le plus souvent, l'entreprise qui prend en compte les
différences culturelles locales, opte l'adaptation comme
stratégie de produit international. La relation entre un produit est une
culture est très étroite et spécifique. Pour comprendre la
complexité entre la standardisation et l'adaptation d'un produit, il
convient de comprendre l'influence de la culture dans l'appréciation
d'un produit par un consommateur. Le choix d'un produit par un client est
fortement influencé par sa culture. La valeur perçue, la
qualité, le design, tous ces attributs du produit sont sous l'influence
d'une appréciation et d'une interprétation culturelle. Un
même produit va être perçu différemment d'une culture
à une autre. L'entreprise doit alors dépasser le stade où
le produit est considéré comme un objet physique. Il est plus que
ça, c'est un ensemble de satisfaction et d'utilité perçues
par le client à l'achat du produit. La forme du produit, son goût,
sa couleur, son odeur et sa texture sont des attributs qui ne laisse point le
client indifférent d'autant plus que son instinct culture va agir
à chaque étape d'appréciation du produit sur chacun de ses
attributs. Le mode de fonctionnement du produit, son emballage, le label, la
garantie, l'offre de service du fabricant, du distributeur, la confiance et le
prestige de la marque du fabricant, sont tout aussi des facteurs clés
qui déterminent le succès ou l'échec d'un produit sur un
marché étranger. L'aspect physique et les fonctions primaires ne
permettent donc pas le succès d'un produit sur un marché
étranger sans un effort d'adaptation, dans la plupart des cas. La
satisfaction que procure un produit est fonction des valeurs et des coutumes
d'un pays. Dans d'autres termes, un produit est constitué par l'ensemble
des satisfactions physiques et psychologiques qu'il procure au consommateur.
Les attributs physiques d'un produit servent en général à
la conception des fonctions primaires qui ne tiennent pas compte de la
différence des culturelle.
Exemple
La fonction primaire d'une voiture est d'assurer à
son propriétaire le déplacement d'un point A à un point B.
les attributs physiques ou la fonction primaire d'une voiture est
généralement la même dans toutes les cultures, se
déplacer. Seulement quelques attributs physiques d'un produit vont faire
l'objet d'un changement d'une culture à une autre. Cependant, une
voiture comporte un ensemble d'aspects psychologiques qui procurent la
satisfaction du consommateur. Dans une culture spécifique, d'autres
aspects physiques comme la couleur, la taille, le design, la marque et le prix,
ne peuvent pas être considérés comme la fonction primaire
d'une voiture (déplacement d'un point A à un point B), mais sont
une valeur ajoutée à la satisfaction du client.
La signification et la valeur imputées aux attributs
psychologiques d'un produit peut varier d'une culture à une autre et
sont considérées comme positives ou négatives. Pour
procurer le maximum de satisfaction au client et créer en même
temps des attributs positifs au lieu d'attributs négatifs,
l'adaptation des attributs « non physiques » devient
nécessaire pour les produits destinés à des marchés
étrangers.
Par exemple, coca-cola, reconnu comme un produit global
conçu pour satisfaire un marché mondial, est confronté au
Japon à s'adapter aux spécificités locales. Le
régime étant mal vu au japon et associé à la
maladie, l'entreprise a été obligée de changer Diet Coke
à Coca light pour être en adéquation avec les coutumes
locales. L'idée était de mettre en évidence le maintien de
la forme au détriment de la perte de poids. Le sentiment
américain manifesté par la communauté musulmane à
l'encontre de la politique étrangère des Etats-Unis a
causé des problèmes à Coca-Cola qui a vu le marché
enhavi par des concurrents qui essayent de récupérer les clients
qui boycottent les produits Coca-Cola. Mecca Cola, Muslim Up, Arab Cola et Cola
Turka sont représentatifs pour les concurrents de coca-cola dans ce
segment. Mc Donald, elle a riposté aux mêmes problèmes en
proposant des menus adaptés aux consommateurs locaux. Son McArabia
sandwich est destiné aux consommateurs arabes et ou musulmans.
L'adaptation peut porter sur un ou tous les aspects
psychologiques du produit. Une étude approfondie des attributs du
produit montre à quel point la culture influence la perception de
l'individu pour un produit et la satisfaction attendue.
L'adoption de certains produits par les consommateurs peut
être affectée aussi bien par la conformité du concept du
produit qu'avec les normes, les valeurs et les codes de conduite que par ses
attributs physiques ou mécaniques. Il convient donc de déterminer
et d'essayer de comprendre quand, comment et dans quelle mesure le produit
vendu sera adopté par les consommateurs cibles.
Lors de l'analyse et le développement d'un produit pour
un nouveau marché, le degré d'adaptation requis dépend des
différences culturelles qui existent dans l'usage et la perception du
produit entre le marché d'origine et le nouveau marché. Le
degré d'adaptation dépendra donc de l'importance des
différences entre les deux cultures. Plus les deux marchés sont
éloignés culturellement, plus le degré d'adaptation va
être élevé.
Les problèmes d'adaptation d'un produit aux
marchés étrangers sont similaires à ceux rencontrés
lors de la conception et l'introduction d'un nouveau produit sur le
marché national. Les produits ne sont pas seulement
évalués selon leurs spécificités physiques.
Quelle est la signification, en dehors de son utilité
première, un produit a dans une autre culture ? Quand l'acceptation d'un
produit demande de la part du consommateur des changements d'habitudes de
consommation, de goût, d'idées ou de l'acquisition de nouveaux
goûts ou d'habitudes, l'accent
doit être mis sur l'adaptation pour surmonter la
résistance naturelle au changement.
Le premier pas à franchir dans l'adaptation d'un
produit à un nouveau marché consiste à mesurer le
degré de nouveauté du produit perçu par les consommateurs
du nouveau marché.
II. La stratégie de
communication internationale
L'élaboration d'une stratégie de communication
pour les marchés étrangers implique une bonne connaissance des
caractéristiques des marchés locaux qui affectent la promotion et
la publicité des produits. Les forces et les faiblesses de la promotion
des ventes et des relations publiques doivent être évaluées
afin que la communication se passe bien entre l'entreprise internationale et
ses clients étrangers. L'entreprise doit être à même
de savoir où et quand faut-il communiquer et comment changer ou adapter
une publicité pour atteindre le consommateur. Une bonne connaissance des
caractéristiques des marchés étrangers permet à
l'entreprise de mesurer l'influence des médias locaux et des
régulations gouvernementales.
1. L'élaboration d'une stratégie de
communication internationale
La communication avec les consommateurs du pays d'origine de
l'entreprise est relativement plus aisée que la communication avec les
consommateurs étrangers qui appartiennent à une culture
différente. Cette différence culturelle fait qu'ils ne
perçoivent pas le message lancer par l'entreprise de la même
façon. Une banale erreur dans la communication peut provoquer une
résistance voire un refus d'adoption du produit. L'entreprise
internationale doit alors être consciente de la diversité
culturelle dans les marchés sur lesquels elle opère. Les
problèmes associés à la communication dans les
marchés étrangers représentent un défi à
relever dans la publicité. La communication dans les marchés
internationaux s'avère difficile et compliquée parce que les
facteurs culturels déterminent la façon dont beaucoup de
phénomènes sont perçus et interprétés. Si la
perception du phénomène est différente entre deux
cultures, la perception d'un message va être différente,
d'où l'intérêt d'adapter chaque message à ses
destinateurs.
La connaissance et la maîtrise de la diversité
culture doivent être appliquées à chaque étape du
projet de communication internationale. L'existence de perceptions et
d'interprétations différentes d'une culture à une autre,
basée sur la différence des traditions et des héritages
rend difficile l'élaboration d'une stratégie de communication
destinée à des marchés étrangers. Tous
les éléments de la culture (les valeurs
culturelles, les rituels, les symboles, les croyances et le processus de
pensée) doivent être pris en compte pour une communication
effective et performante. Par exemple, des chercheurs en Hong Kong ont
révélé que le fromage est associé à
Yeung-Yen (étrangers) et est rejeté par quelques chinois.
En plus des différences culturelles entre les nations,
il existe des sous cultures dans une même culture qui doivent attirer
l'attention de l'entreprise. Les jeunes générations d'un pays
adoptent souvent une culture de consommation différente de celle des
adultes. La communication destinée à cette population de jeunes
doit être différente de celle utilisée pour atteindre les
plus âgés. De même, les populations urbaines n'ont pas les
mêmes habitudes de consommation que les populations rurales.
En dehors de ces différences, existe le problème
de changement des traditions. Les personnes sont souvent attachées
à leur culture jusqu'à un certain degré, mais sont
disposés à changer certains comportements. Il y a quelques temps,
il était inimaginable de vendre du café en Chine, les chinois
ayant attachés à leur culture de buveurs de thé.
Néanmoins, l'Américain Starbucks l'a osé et l'a
réussi avec succès. Son succès s'explique par une forte
campagne de communication auprès des chinois qui a fini par porter ses
fruits.
Un autre obstacle à franchir pour accéder aux
marchés étrangers demeure les limitations linguistiques. En
effet, la langue est l'un des barrières à franchir pour une bonne
communication dans les marchés étrangers à travers la
publicité. Ça implique l'existence de différentes langues
dans les pays ou au sein d'un même pays, de dialectes et la
subtilité propre à chaque langue ou même les
différences des accents. La langue est souvent considérée
comme un facteur de distinction et de fierté culturelle. Une mauvaise
prise en compte de la différence linguistique entre les pays a souvent
causé des problèmes de communication aux entreprises. Par
exemple, Chrysler Corporation s'est cassé la figure lors d'une campagne
de publicité en Espagne en traduisant de l'anglais « Dart is power
» en Espagnole. La traduction en Espagnole avait complètement
déformé le message, devenu incompréhensible. Les langues
causent d'innombrables problèmes de communication avec les consommateurs
étrangers. Les traductions littérales ne suffisent pas, elles
sont même à bannir. Il faut plutôt adopter une traduction
intelligente qui essaye de comprendre la signification du message dans l'autre
culture. Le contenu du message est alors plus important. Il ne faut pas se
contenter d'une simple traduction des mots. La communication est fortement
influencée par la diversité culturelle, ce qui provoque des
différences de compréhension et d'interprétation
même pour une simple phrase ou un simple concept.
L'entreprise qui s'internationalise peut adopter une
stratégie de communication standardisée ou adaptée. Une
adaptation de la communication aux marchés locaux suppose une prise en
compte plus fine des spécificités locales. Une standardisation de
la communication traduit la stratégie globale de l'entreprise qui voit
le monde comme un seul marché. En adoptant une stratégie de
communication standardisée, l'entreprise exprime sa volonté de
bâtir une image globale, reconnue de la même façon par tous
les consommateurs partout dans le monde.
Le choix de la stratégie de communication peut
être motivé par plusieurs facteurs. Lorsque le budget de
l'adaptation de la communication est conséquent, l'entreprise peut
procéder à une standardisation de la communication dans le but de
réduire son budget de communication. L'adaptation de la communication
semble être plus appropriée pour une adaptation aux
spécificités locales, mais la standardisation de la communication
comporte également des avantages liés à la division des
marchés par zones géographiques similaires culturellement
(standardisation par zones).
Une communication adaptée comporte plusieurs avantages.
Elle permet avant tout de répondre aux attentes culturelles. Une
stratégie de communication adapté répond mieux aux besoins
du client et facilite l'adoption du produit. Elle permet d'être plus
prêt du consommateur et facilite l'action et la réaction
grâce à l'effet de proximité. Une communication
adaptée suppose que chaque marché aura un message adapté
à ses consommateurs. Cependant une communication adaptée
présente des inconvénients à savoir le coût
très élevé qui permet une communication effective au
niveau local. La disparité des messages engendre un risque de
disparité de l'image de la maison mère. La différence dans
la communication défavorise la synergie entre les différents
marchés de l'entreprise.
La recherche d'une notoriété globale et d'une
image uniforme pousse les entreprises à standardiser leur communication.
Cette pratique permet la création et le renforcement d'une marque qui
soit reconnue pareille dans tous les marchés. Si la communication
adaptée demande un budget important, la communication
standardisée permet de réduire le budget consacré à
l'opération de communication (création et production des
messages). Cependant les différences culturelles rendent difficile la
mise en oeuvre d'une stratégie de communication standardisée
d'autant plus que les motivations de consommation varient d'une culture
à une autre pour un même produit. Un seul message destiné
à tous les marchés expose l'entreprise au risque de ne pas
atteindre ou toucher tous les consommateurs. Le message peut être trop
fort pour certains, trop faible pour d'autres voire vide pour d'autres. Le
message d'origine perd sa valeur.
Les outils de communication ne sont pas les mêmes ou
n'ayant pas le même niveau de développement dans tous les pays,
l'insuffisance ou l'inexistence d'infrastructures de communication
appropriées pour la diffusion du message peut être un réel
problème.
Pour pallier à ce dilemme de l'adaptation et de la
standardisation de la communication, certaines entreprises adoptent une
solution intermédiaire en standardisant l'axe et le concept de
communication et adaptent la création du message dans chaque
marché : c'est le concept de la « publicité à
positionnement standardisée ».[8]
Exemple
La publicité pour la Seat Ibiza à la fin des
années 80 pour les pays d'Europe illustre cette démarche. L'axe
retenu est celui du rapport amoureux existant entre l'homme et la voiture et de
la jalousie de la femme à l'égard de cette dernière. La
création a été adaptée à chaque pays car la
jalousie ne s'exprime pas de la même façon en Allemagne, en
France, en Italie ou en Grande Bretagne.
2. La mise en oeuvre de la stratégie de
communication internationale
La mise en oeuvre de la stratégie de communication
internationale, pour les entreprises internationales requiert ...
La communication commerciale vise à informer les
consommateurs sur le produit en vue de modifier leurs comportements d'achat.
Elle a donc pour objectif d'éduquer le consommateur pour lui
familiariser avec les produits de l'entreprise. L'efficacité de la
communication réside alors dans la bonne réception du message et
de son interprétation dans le bon sens, celui souhaité par
l'entreprise. La connaissance de la cible est primordiale pour une adaptation
pertinente de la communication. Elle permet de bien anticiper les attitudes et
les réactions du consommateur. L'environnement socioculturel du
consommateur détermine sa perception et l'interprétation du
message. Tout cela explique la nécessité d'appréhender les
spécificités culturelles des différents pays en vue de
détecter et de comprendre les sensibilités et les attentes. Si la
connaissance du consommateur est toujours importante, elle l'est encore
davantage dans les marchés étrangers éloignés
géographiquement et séparés de l'entreprise par des
barrières linguistiques et culturelles.
3. La dimension culturelle de la
consommation
La culture détermine et influence bon nombre des actions
de l'individu. Elle guide notre comportement et nos habitudes de
consommation. Pour
comprendre les comportements et les motivations d'achat, une
bonne appréhension des spécificités locales et culturelles
de la consommation est nécessaire.
Dans chaque pays, dans chaque localité les habitudes de
consommation sont définies tacitement par les coutumes et les
règles conventionnelles qui guident la façon de satisfaire les
besoins de consommation.
Exemple:
La consommation du boeuf était peu importante au Japon
en raison de la croyance qu'une bête qui travaillait ne pourrait
être mangée.
Les moments de consommation et la nature des produits
consommés déterminent les différences culturelles entre
les pays. L'incidence des différences culturelles se manifeste par une
association de la consommation à des codes de significations
symboliques. Dans chaque culture, la possession d'un bien correspond à
une connotation sociale. Cette connotation sociale des biens, différente
d'une culture à une autre, fait qu'une bonne connaissance des habitudes
permet à l'entreprise d'adapter sa communication. Un produit n'a donc
pas la même valeur sociale d'une culture à une autre. Les produits
domestiques, une fois vendus à l'étranger acquièrent un
certain exotisme qui peut changer leur valeur d'origine. Ce changement de
valeur requiert dans certain cas un changement de positionnement.
Exemple[9]
Ricard véhicule une image populaire en France mais
chic en Italie et en Allemagne.
La façon de percevoir un produit et
l'interprétation des messages étant influencées par la
culture, seule une communication adaptée convenablement peut changer la
donne. Une entreprise peut communiquer différemment sur un même
produit dans les différents marchés pour répondre aux
attentes de chaque consommateur. Elle peut mettre en avant le côté
esthétique dans un marché et la sécurité dans un
autre. C'est le cas de Citroën lors du lancement de Xsara en Europe.
L'image de sécurité a été privilégiée
Outre-Rhin et l'esthétique mis en avant en Espagne.
4. Culture et communication commerciale
Les comportements d'achat sont différents d'un pays
à un autre et sont fortement influencés par la culture. La
culture détermine par la même occasion les motivations d'achat
et la hiérarchisation des besoins à satisfaire
et le degré de dépendance des individus dans une
même culture. Il faudrait alors connaître et comprendre les
dimensions culturelles (voir annexe) de chacun des marchés de
l'entreprise. Dans une culture collectiviste la décision d'achat peut
impliquer certains membres du groupe ou de la famille car lors de la prise de
certaines décisions, une concertation des membres les plus influents de
la famille est nécessaire, dans certaines cultures. L'attitude face
à l'incertitude détermine également le comportement
d'achat. Dans les cultures où les gens ont peur de l'incertitude, le
rapport avec la sécurité est très important. Par
conséquent ils apprécieront les services après vente et
les garanties.
Les conditions d'efficacité d'une politique de
communication internationale dépendront alors du degré de
sensibilité par rapport aux spécificités locales. Les
messages destinés aux marchés locaux doivent être
adaptés en essayant de comprendre les complexités et les
significations des symboles utilisés par les populations locales dans
leur communication et leur rapport avec l'environnement. Le contexte culturel
doit par conséquent servir de référence et non pas le
contexte culturel du pays d'origine de l'entreprise.
Le message original pourrait être conçu en
référence au contexte culturel domestique. C'est-à-dire
que l'entreprise peut être influencé par la politique de
communication qui a été adoptée au niveau domestique et
qui a bien marché. Dans ce cas, les comportements d'achat et de
consommation ont été servis de base pour communiquer sur le
produit. Maintenant si ce même produit est destiné à des
marchés éloignés, le message doit être
re-conçu pour faciliter la réception et l'interprétation
du message au niveau local. Cette re-conception du message ne se limite pas
à une simple traduction du message original en langue
étrangère. Cela peut induire à des erreurs de
communication colossale qui peuvent déformer ou rendre
incompréhensible le message. La langue constitue alors le premier
élément de la culture qui peut faciliter ou rendre difficile la
communication commerciale internationale. Les subtilités de chaque
langue par rapport aux autres font qu'une simple phrase ou expression traduite
dans une autre langue perd toute sa valeur. La traduction a beau être
bien faite pour rendre le sens du texte, mais persiste la difficulté de
préserver « la force, l'impacte, l'originalité et le rythme
du texte ». Le message doit alors être re-conçu dans le
contexte culturel local tout en essayant de lui donner le sens
souhaité.
Exemple
Une campagne d'affichage de France Télécom
destinée aux visiteurs étrangers mettait en relief l'aspect
affectif du téléphone. Un travail d'adaptation a
été nécessaire pour traduire l'accroche (« le
téléphone c'est l'avion du coeur ») en Anglais. En Anglais,
l'expression « heart-to-heart « a
sauvegardé le contenu affectif. Le recours au mot
« line » et à ses connotations et au verbe « to fly
» a transcrit la métaphore utilisée. L'accroche est devenue:
« fly the heart-to-heart line ».
La mise en oeuvre d'une stratégie
d'internationalisation requiert des ressources qualifiées et
compétentes pour accomplir des missions internationales. La gestion
internationale des ressources humaines permet de mettre à la disposition
de l'entreprise cette ressource vitale pour son développement
international.
QUATRIEME PARTIE: LA GESTION INTERNATIONALE DES
RESSOURCES HUMAINES ET LA NEGOCIATION INTERNATIONALE
I. La gestion
internationale des ressources humaines
L'internationalisation de l'entreprise requiert qu'elle ait les
ressources humaines qualifiées et compétentes pour porter le
développement international de l'entreprise. Si la gestion des
ressources humaines au niveau national paraît relativement aisée,
au niveau international, elle l'est beaucoup moins du fait de la
diversité et l'interférence des cultures. La notion du travail,
la perception de la réussite, les ressources de motivation
diffèrent d'une culture à une autre.
L'entreprise qui s'internationalise est souvent
confrontée au dilemme d'envoyer du personnel à l'étranger
en faisant recours à l'expatriation ou de recruter au niveau local. Mais
chacun de ces choix engage l'entreprise.
Le recours à l'expatriation a des avantages dans la
mesure où les expatriés sont mieux placés pour
connaître la culture de l'entreprise. Cependant ils peuvent ne pas
disposer des connaissances et de la conscience culturelles nécessaires
pour la réussite de l'opération d'internationalisation de
l'entreprise.
Le recours à des managers locaux est désireux
dans la mesure où les locaux connaissent mieux la culture locale et sont
plus à même de faire adopter les produits de l'entreprise aux
consommateurs locaux. Néanmoins, du fait de la différence
culturelle entre la maison mère et la culture locale, il peut y avoir un
décalage.
Quel style de management utiliser pour que le style de
management de l'entreprise reste homogène malgré la
différence culturelle? Répondre à cette question est la
tâche souvent complexe des directions des ressources humaines dans
l'opération d'internationalisation de l'entreprise.
1. La dimension culturelle de la gestion internationale
des ressources humaines
« La gestion des ressources humaine est la mise en
pratique locale de la stratégie ». Responsable RH
Honeywell.
La culture est au coeur de la gestion internationale des
ressources humaines. La culture nationale influe sur le développement et
le transfert de pratiques de GRH comme la sélection, la socialisation,
la formation, l'évaluation de la performance, la
rémunération et le plan de carrière. Le contexte et la
culture du pays déterminent dans quelle mesure, la GRH peut-être
considérée comme stratégique ou globale. Par exemple, en
Europe, le gouvernement, les syndicats et les comités d'entreprises
interviennent davantage dans les pratiques de ressources qu'aux Etats-Unis. Par
conséquent, une entreprise européenne qui s'internationalise aux
Etats-Unis va être confrontée à la différence
culturelle de la gestion des ressources humaines.
La socialisation des nouveaux employés à la
culture de l'entreprise différence d'une culture à une autre et
est le théâtre de confrontation entre plusieurs cultures. La
démarche de socialisation permet aux nouveaux membres d'intégrer
la culture d'entreprise et d'assimiler les valeurs et les comportements
attendus. La transmission peut être rendue complexe à cause des
différences de comportement selon les cultures. C'est la raison pour
laquelle certaines pratiques de socialisation de sont pas parfois
appréciées dans d'autres cultures. De plus, leur mode de
transmission et de manifestation est indissociable au langage, d'où la
possibilité de frictions. Les distances hiérarchiques
étant différentes selon les cultures, les rapports entre les
employés et leurs dirigeants ne sont pas homogènes dans toutes
les entreprises.
De la même façon, lorsqu'il s'agit de
rémunération ou de récompenser les employés, les
différences culturelles jouent un rôle important et influencent la
décision. Le langage de l'argent est loin d'être universel,
contrairement à ce que l'on pourrait penser. La valeur accordée
aux différents types de récompenses varie selon la culture et
détermine dans quelle mesure la démarche doit être
individuelle ou collective.
La culture conditionne aussi le choix entre récompenses
pécuniaires ou matériels. En effet, la place accordée
à l'argent, au statut ou aux loisirs varie d'un pays à l'autre et
conditionne le potentiel de motivation. Par exemple en Suède, les
employés auraient préféré avoir du temps libre que
de bénéficier de primes. Dans cette culture, la philosophie
égalitaire fait que l'argent est moins motivant et que les gens
n'aspirent à se distinguer financièrement. Cela s'explique par le
fait que la Suède est un pays dont la dimension culturelle de
féminité est importante. La qualité de vie est plus
importante que l'argent dans cette culture.
Les motivations sont aussi influencées par la culture,
d'où la différence dans les ambitions et le plan de
carrière. Une étude menée dans plusieurs pays a
révélé ce que les dirigeants considèrent comme
nécessaire à la réussite professionnelle. Pour les
Américains, il s'agit de « l'allant et la compétence ».
le fait d'obtenir des résultats a remporté à 88% des
réponses, contre seulement 52% chez les dirigeants français. En
Allemagne, les aptitudes techniques sont considérées comme la
clé du succès.
Pour une bonne de la gestion des ressources humaines, les
entreprises multinationales doivent encore une fois développer une forte
sensibilité aux cultures locales. Recourir aux ressources humaines
locales pourrait-il aider les entreprises à franchir la barrière
culturelle ?
2. Expatrier ou recruter au niveau local
L'internationalisation des entreprises a eu pour effet
d'élargir le domaine de compétences et d'action de la direction
des ressources humaines. Les différences culturelles dans les
marchés étrangers font que l'entreprise, les recruteurs ne
peuvent plus se contenter de raisonner localement, ils doivent aussi prendre en
compte toutes les unités d'implantation des filiales. Il en va ainsi en
ce qui concerne le recrutement des collaborateurs, leur expatriation dans les
filiales étrangères ou encore la politique de formation, qu'il
faut adapter au contexte international.
Pour franchir encore une fois la barrière culturelle
entre les pays, les directeurs des ressources humaines se basent sur la
question du recrutement interne ou externe. La problématique du
recrutement à l'international est d'autant plus complexe que les
pratiques sont variées.
Le recrutement international est le fait de recruter une
personne dans le pays d'origine de l'entreprise pour l'envoyer travailler dans
une filiale étrangère, ce qui s'apparente à
l'expatriation. Le directeur des ressources humaines opère un arbitrage
entre le recrutement interne et le recrutement externe. Le recrutement interne
consiste à recruter un cadre de l'entreprise que l'on va expatrier. Le
recrutement externe peut revêtir deux formes : il s'agit soit de recruter
une personne du siége spécialement pour être
expatrié, soit de recruter une personne dans le pays
d'implantation. Dans les deux premier cas, il s'agit de personnes
expatriées, c'est-à-dire des personnes qui quittent
temporairement l'entreprise de son pays d'origine pour une affectation dans un
pays étranger avec une forte perspective de retour.
Le recrutement à international possède des
spécificités qu'une entreprise s doit de connaître.
L'entreprise doit définir clairement ce qu'elle veut réaliser
dans le pays d'implantation et avec quels moyens, avant même de lancer le
processus de recrutement.
Pour un recrutement interne, les qualités du candidat
devront être ceux, classiques, d'adaptabilité, de capacité
d'intégration, d'autonomie, d'esprit d'équipe et d'initiative, de
disponibilité, de rigueur, d'ouverture d'esprit, etc. Mais surtout la
maîtrise de la langue du pays ou au minimum l'Anglais, et sur des
préoccupations comme la nourriture ou le mode vie qui varie d'u pays
à un autre. L'avantage du cadre recruté à
l'intérieur de l'entreprise est qu'il la connaissance de la
société et une crédibilité auprès de sa
hiérarchie. Lorsque l'entreprise choisit de recruter directement
à l'étranger, il faudrait les candidats retenus
s'imprègnent de la culture de l'entreprise pour avoir un minimum de
connaissance de la maison mère.
Tableau comparatif entre recrutement direct et
indirect
|
|
Avantages
|
Inconvénients
|
Recrutement
|
|
Connaissance de
|
|
Choix de
|
interne
|
|
l'entreprise (culture, produits, techniques
|
|
candidats plus restreint en
|
|
|
Connaissance du
|
|
interne
|
|
|
candidat
appartenant à l'entreprise
|
|
Analyse des critères spécifiques à
|
|
|
Nouvelle voie pour la bourse de
l'emploi interne
|
|
l'international, en particulier celle de l'environnement
familial
|
Recrutement
|
|
Pour les entreprises
|
|
Connaissance
|
externe
|
|
n'ayant pas de vivier interne de candidats
expatriables
|
|
moins
immédiate de la société par le candidat,
temps
|
|
|
Mise en concurrence
|
|
d'adaptation
|
|
|
de candidats internes et externes
|
|
Compétences, savoir-faire et
|
Regard neuf et loyauté du
dynamique porté candidat
par un candidat méconnus par
externe l'entreprise
La notion de recrutement international est beaucoup plus large
que le recrutement interne ou externe. La mondialisation a changé la
donne. Si au début des années 80, la mode était surtout
à l'expatriation, l'internationalisation a permis de multiplier les
pratiques de recrutement international. Chaque entreprise adopte la
stratégie la mieux adaptée à sa structure
organisationnelle.
La tendance est de recruter au niveau local pour être au
plus près des consommateurs, les managers locaux appartenant à la
culture locale. Le coût de l'expatriation est également un facteur
qui freine le recours l'expatriation. En plus les résultats attendus ne
sont pas toujours au rendez- vous du fait des difficultés
rencontrés par les expatriés (choque culturel, éducation
des enfants, intégration et réintégration au retour). Les
entreprises tentent de limiter l'expatriation en faisant recours aux ressources
locales. Il s'agit là d'une démarche managériale entre
« contrôle et subsidiarité ». Les entreprises qui
s'internationalisent vers des pays proches culturellement ou historiquement,
comme France Télécom en Afrique, ont appris à
éviter une approche « coloniale » de l'internationalisation et
cherchent d'abord à s'intégrer dans l'univers économique,
culturel et social du pays d'accueil, à être proches des clients
et des partenaires locaux qui se sentiront mieux compris par des
salariés et des managers locaux.
Recruter des managers locaux est devenu un objectif en soi.
Cependant, le choix d'accorder sa confiance aux managers locaux ne correspond
pas systématiquement à une logique de baisse des coûts.
Si la culture influe sur le choix et le recrutement des
ressources humaines, elle a impact non négligeable sur la
négociation.
II. L'impact de la culture dans la
négociation
internationale
La question de la culture revient à toutes les
étapes de l'internationalisation de l'entreprise, tant la dimension
culturelle est incontournable. La culture définit les valeurs, les
comportements d'un peuple. Ces valeurs et ces comportements surgissent dans la
négociation. Il est donc crucial de connaître la culture des
collaborateurs étrangers avec qui on travaille. Il faut savoir
interpréter les comportements et même les gestes. Ceci passe
par
une compréhension des usages et des codes culturels qui
régissent la vie quotidienne d'un pays. Pour une négociation
réussie avec des collaborateurs étrangers, il faut savoir et
accepter que les systèmes de références ne sont pas les
mêmes dans tous les pays et qu'il faut prendre la peine et le temps de
les comprendre. Ce qui n'est pas offensant et humiliant dans notre culture peut
l'être sans aucune évidence dans une culture. Le
phénomène de « saving/losing face[10] » est
très manifeste dans les cultures asiatiques. Il importe pour le
négociateur de cerner les points sensibles pour l'autre partie. En plus
de la culture dans son sens habituel, il faut également apprendre
à connaître la « business culture » des pays avec qui
l'entreprise souhaite faire des affaires. Le « guanxi chinois
»[11] est l'exemple le plus parlant dans les « business culture
».
Exemple[12]
Alors que les Saoudiens, le fait de regarder droit dans
les yeux son partenaire traduit l'instauration d'un contrat direct et
continuel, il en va de la même façon dans d'autres cultures.
Ainsi, si les Anglo-Saxons regardent dans les yeux leurs interlocuteurs, ils
peuvent être gênés par l'instance d'un regard qu'ils jugent
trop intimistes dans le cadre de relations formelles. Inversement, nombre de
cultures africaines évitent le contact visuel en guise de respect. Les
américains et les canadiens peuvent interpréter ce geste comme un
signe de fourberie ou de malhonnêteté.
Il importe donc que les négociateurs apprennent
à comprendre les pratiques, les comportements et les langages des
cultures des collaborateurs pour améliorer leur sensibilité
culturelle et éviter de heurter la sensibilité culturelle de
collaborateurs étrangers.
Exemple[13]
Dans certains pays scandinaves et en Asie du sud-est, il
est d'usage d'écouter patiemment son interlocuteur, sans l'interrompre.
Ce comportement est considéré dans ces pays comme une marque
d'attention et de respect à l'égard de l'autre personne.
D'ailleurs, ces cultures accordent de la valeur au silence et aux pauses qui
permettent aux individus de mieux comprendre et intégrer les messages.
Les codes de communication américains sont de ce point de vue
très différents et peuvent entraîner de réelles
incompréhensions dans le cadre de réunions internationales. En
effet, les négociateurs américains auront tendance à
intervenir fréquemment dans la discussion, en cherchant à
accélérer le rythme des négociations, créant par
là même un sentiment de frustration et de rancoeur chez l'autre
partie.
1. Les caractéristiques et les enjeux de la
négociation internationale
La négociation commerciale internationale est une
situation dans laquelle les parties sont confrontées à des
divergences et des interdépendances. L'objectif premier de la
négociation est donc de trouver un terrain d'entente mutuellement
acceptable pour les parties. Aucune partie ne doit se sentir léser
d'où la nécessité de trouver une situation gagnant-gagnant
qui permettrait une collaboration fructueuse et durable. Il faut comprendre par
là que la situation gagnant-perdant est à éviter à
tout prix dans les négociations commerciales puisqu'elle favorise des
situations de frustration inconfortable pour la partie qui s'est sentie
léser. Afin de parvenir à un accord commercial favorable et
avantageux pour toutes les parties il convient d'étudier et de
comprendre les caractéristiques et les enjeux des relations commerciales
qui lient les parties. Cette étude permettra d'identifier les facteurs
de succès et d'échec de la négociation internationale.
Lambin 1998 identifie six éléments qui interviennent dans la
négociation internationale :
1) Le face-à-face : Il peut
être soit direct confrontant physiquement les parties ou indirect
impliquant des moyens de communication à distance. Dans tous les cas des
modalités de communication variées (verbales, écrites,
formelles, etc.) sont utilisées par les parties. Lors des
négociations face à face, les parties échanges, utilisent
des rites et des procédures qui sont fortement influencés par la
culture et par conséquent peuvent être différents d'une
culture à une autre. Les codes culturels et les usages commerciaux
étant différents d'un pays à un autre, (même s'il
existe une tendance à l'établissement d'un code standard des
usages commerciaux) les négociateurs internationaux doivent être
conscients de l'impact de la culture dans les relations commerciales
internationales. Si en chine et pour les chinois il est coutume d'accorder des
faveurs à ses collaborateurs ou futurs collaborateurs dans le but
d'établir des relations qui faciliteront les affaires, les cultures
occidentales considèrent cela comme une corruption et une pratique
déloyale. Le guanxi chinois et les pots de vins sont des pratiques
commerciales qui peuvent prêter à confusion et heurter la
sensibilité culturelle de la partie dont la « culture awareness
[14]» n'est pas très développée.
2) La perception d'un avantage réciproque
à contracter avec l'autre: dés lors que
les parties consentent à entamer une négociation, cela suppose
que chaque partie y voit son intérêt et espère en sortir
gagnante. Ceci traduit la situation gagnant-gagnant qui est l'essence
même de la négociation.
3) L'existence d'un conflit
d'intérêt entre les parties: quand
l'acheteur veut acheter à un prix relativement bas, alors que le vendeur
souhaite vendre ses produits à prix relativement élevé, il
y a conflit d'intérêt. C'est justement pour trouver une solution
à ce conflit qu'ils s'engagent à négocier.
4) La volonté de parvenir à une
solution mutuellement acceptable: cet engagement
à négocier laisse sous-entendre que chaque partie est prête
à faire des concessions pour trouver une solution gagnant-gagnant.
5) L'enclenchement d'un processus d'engagement
réciproque pour recherche un arrangement: les
concessions que chaque partie et prête à faire est fonction des
concessions que l'autre partie est prête à faire, ce qui se
traduit par une relation d'interdépendance entre les parties.
6) La mise en place d'un système
d'échanges et de mobilisation de ressources entre les
parties: pour parvenir à cet accord mutuel les
parties doivent s'investir aussi bien en ressources financière, humaine,
technique et logistique en vue d'honorer leur engagement à
négocier. La réussite de l'opération de négociation
internationale repose alors sur des points sur lesquels les interactions des
parties vont opérer.
2. Les facteurs de succès à la
négociation internationale
La négociation internationale est
caractérisée par des particularités des points sensibles
qui doivent attirer l'attention du négociateur international. Seule une
préparation soigneuse et une ouverture d'esprit qui éloigne tout
sentiment de supériorité de sa propre culture (culture biais),
permet au négociateur international de réussir cette tâche
complexe et difficile.
La préparation doit être rigoureuse sur le
contenu. Les objectifs doivent être fixés de façon clairs
et sans ambiguïté. Ils doivent être classés par ordre
de priorité pour faciliter de déroulement de la
négociation. Des objectifs bien définis, classés de
façon claire par ordre de priorité permettent au
négociateur de décider sur quels points céder et pas sur
d'autres. De ce fait, la positon du négociateur sera claire et ne sera
pas facilement influencée par celle de l'autre partie.
Alors qu'elle doit être rigoureuse sur le contenu, la
préparation doit être fine et approfondie sur les aspects
juridiques, économiques et relationnels. Le négociateur
international ne doit pas négliger ni n'ignorer aucun de ces aspects.
Une bonne connaissance du milieu des affaires et des pratiques coutumiers et
commerciales du pays de son collaborateur passe nécessairement par des
recherches sur le pays concerné dans la préparation de la
négociation.
3. L'approche de la dimension culturelle dans la
négociation internationale
Dans la pratique du commerce international, les situations de
négociations se multiplient davantage comme la vitesse de la concurrence
s'accélère. Bien se préparer pour la négociation
internationale devient alors une question de survie pour l'entreprise
internationale. Il convient alors de se poser et répondre un certain
nombre de questions. Dans quelles circonstances la culture nationale
devient-elle une variable explicative du processus de négociation ?
Comment décrire et comprendre son influence réelle ? Quelles sont
les conséquences de cette alchimie complexe ? Nous allons essayer de
répondre à ces questions en vue d'améliorer la
compréhension du phénomène de négociation
internationale, mais aussi de gagner en efficacité dans la conduite
même des négociations.
La mondialisation a vu l'ouverture des frontières qui a
favorisé l'approchement des populations grâce au raccourcissement
des distances rendu possible par le développement des nouvelles
technologies de l'information et de la communication. Ces échanges
multiples entre les nations se font dans la plupart du temps dans un
environnement interculturel. C'est la rencontre des cultures. Une
négociation intelligible ne serait alors impossible sans
appréhender le sens que les acteurs accordent à leurs
activités et saisir leurs perceptions de la situation et d'autrui.
Pour bien comprendre les événements qui
interviennent dans une négociation, il convient d'être ouvert
d'esprit d'être empathique. Chaque acteur introduit dans le jeu toute une
panoplie de particularités de la condition humaine, notamment sa
culture, avec son opacité, ses ambiguïtés et sa
complexité.
á La nature de la culture
L'une des définitions les plus pertinentes et
ingénieuses de la culture est celle proposée par Edouard Herriot
: « la culture, c'est tout ce qui reste lorsqu'on a tout oublié
». Paradoxale soit-elle, cette définition exprime les
caractéristiques les plus importantes de la culture. La culture est
avant tout une manière de penser et d'être avant d'être un
contenu. Par conséquent, la culture détermine notre façon
de penser, de se comporter et de réagir par rapport aux
événements de la vie. La définition proposée par
Gert Hofstede : « la culture est le logiciel d'exploitation du cerveau
» reflète cette réalité. Les individus agissent alors
en fonction de croyances et de valeurs fournies par leur culture. La culture
conditionne notre façon de penser. Si l'on en croit Alkoun, 1989, la
culture offre un cadre de compréhension et son rôle est de «
répondre aux questions avant même qu'elles ne soient posées
».
Dans les négociations comme dans les actions humaines,
la réflexion précède la réaction. Dans un
environnement interculturel, chaque culture génère des approches
cognitives très différentes. Par exemple, les Japonais partent
dans le contexte, alors que les américains s'engagent
immédiatement dans ce qui leur paraît le plus important,
c'est-à-dire l'interaction elle-même. L'approche intellectuelle du
chinois est de nature holiste et repose sur l'évidence empirique (Chen,
1999), tandis que le mode de pensée occidentale est analytique et se
fonde sur une logique abstraite. Face à un même problème,
les personnes issues de cultures différentes réagissent
différemment. Elles vont avoir une façon différente de
cadrer le problème, d'identifier la cause et d'envisager une solution.
La culture constitue la variable explicative de cette différence dans le
traitement des problèmes.
Hall (1976) distingue deux grandes catégories de
cultures, celles à contexte fort et celles à contexte faible.
Dans les cultures à contexte fort, le contenu du message dépend
fortement du contexte dans lequel il est délivré. Dans les
cultures à contexte faible, l'importance est accordée au message
et non pas au contexte. Les Chinois et les Japonais entrent dans la
catégorie de cultures à contexte fort, les occidentaux dans la
catégorie de cultures à contexte faible. Dans un contexte de
négociation, un oui prononcé par un japonais ne veut pas
forcément dire oui je suis d'accord, mais oui j'ai compris.
Les dimensions culturelles mises en évidence par
Hofstede peuvent aider à saisir le comportement du négociateur.
La distance hiérarchique conditionne les relations autour de la table de
négociation ; à l'instar du rapport à l'incertitude
lié à la capacité à supporter le stress, à
recourir aux documents écrits ; de l'individualisme qui définit
le rapport de la collectivité ; et enfin de la masculinité pour
exprimer l'ambition, le désir de réalisation.
Salacuse (1991) identifie dix facteurs caractérisant un
style de négociation, chacun situé sur un axe bipolaire : les
buts (contrats ou relation), l'attitude général
(gagnant-gagnant), le style personnel (formel ou informel), le mode de
communication (direct ou indirect), l'importance accordée au temps
(élevée ou faible, la forme de l'accord (spécifique ou
générale), le processus d'atteinte de l'accord (inductif ou
déductif), l'organisation de l'équipe de négociation (un
véritable leader ou la recherche permanente de consensus), la
capacité à prendre des risques (élevée ou
faible).
La culture nationale ou ethnique contribue à la
formation d'un « style national de négociation » avec
l'héritage de l'histoire et de l'influence du système politique.
Des cultures telles que la culture familiale, religieuse ou celle de
l'organisation peuvent également tenir un rôle important en
fournissant des normes de conduite, des symboles et des significations.
Elles
peuvent véhiculer des valeurs en opposition à
celles de la culture nationale, posant à l'individu un véritable
dilemme culturel. L'activité professionnelle du négociateur, sa
formation initiale génère aussi des cultures spécifiques.
Les managers, les ingénieurs, les commerciaux ont chacun leur
manière de penser la négociation et de traiter les
difficultés. Lang (1993) et Sjöstedt (2003) proposent des
observations significatives dans ce domaine. Par exemple, les ingénieurs
se conçoivent comme des constructeurs et porteurs de solutions aux
problèmes ; les juristes comme des défenseurs de la justice et de
l'équité ; les économistes comme planificateurs et
conseillers en matière de politique ; les élus comme
représentants de l'intérêt général.
Dans la même personne, normes et valeurs se combinent
pour entrer dans des formes relationnelles gouvernées par des «
tensions dialectiques » (Janosik, 1987). S'organise un véritable
management intérieur de ces tensions afin de parvenir à un
état d'équilibre toujours susceptible d'évoluer dans le
temps. Par exemple, Blaker (1977) met en évidence deux modes
contradictoires de résolution de conflit au sein de la culture
japonaise, la coopération fondée sur l'harmonie et
l'éthique guerrière. Ce sont les circonstances qui
déterminent laquelle de ces deux approches peut être
légitimement employée.
á Comment la culture influe sur la
négociation
Souvent l'influence de la culture sur l'action d'un
négociateur s'avère peu perceptible (Zartman), 1993). Cette
qualité subtile ne réduit en rien son importance mais l'inscrit
dans le registre des facteurs invisibles (Faure et Rubin), 1993). Il
apparaît indispensable d'organiser l'étude de l'impact de la
culture sur la négociation selon des catégories permettant
d'introduire un certain nombre d'évidence. L'appartenance à une
culture dominante tend souvent à renforcer l'insensibilité
culturelle et à dénier son importance. En fait, c'est par ses
manifestations extérieures que les effets de la culture sur les
différentes dimensions de la négociation peuvent être
saisis. En l'occurrence elle s'exprime par les acteurs, dans la structure de la
négociation, dans les stratégies, dans les processus et, enfin,
au regard des résultats.
á Les acteurs de la négociation
La culture est introduite dans les négociations par les
acteurs eux-mêmes. Elle conditionne la manière dont ceux-ci
conçoivent l'interaction. Est-ce par exemple une confrontation, un
exercice de la coopération mutuelle, un débat, un rituel à
accomplir ou bien encore une aventure humaine? Pour un Américain, la
négociation est d'abord une procédure d'échange tandis que
pour les Japonais c'est essentiellement une relation entre personne (Kiruma,
1980). La perception d'autrui varie également selon les
cultures à travers notamment les stéréotypes. Les
intentions perçues et les valeurs qui sous- tendent l'action de l'autre
sont interprétées à travers le filtre culturel.
L'interprétation même d'une situation a une dimension culturelle
ainsi que le souligne Triandis (1994) dans l'anecdote suivante. Pendant la
grosse chaleur de l'après-midi de l'été chinois «
deux Anglais transpiraient et suffoquaient en jouant une partie de tennis.
Lorsqu'ils eurent terminé, un de leurs amis chinois compatissant leur
demanda pourquoi ils ne recouraient pas à des serviteurs pour une
tâche aussi ardue ». Dans l'espoir de négociation, la valeur
symbolique des actes peut également faire sens et introduit de
l'irrationnel dans l'interaction.
Enfin, le négociateur introduit des valeurs et de
l'éthique dans l'interaction car la culture fixe la frontière
entre les comportements acceptables et ceux qui ne le sont pas. Cette
frontière varie d'une culture à l'autre et des moyens d'actions
tels que la menace, le mensonge, le fait accompli, la trahison ou la corruption
peuvent être ou ne pas être considérés comme
légitimes.
á La structure de la
négociation
Les composants structurels de la négociation tels que
le cadre juridique ou l'organisation dans laquelle se déroule le
processus sont des produits sociaux et culturels. Le nombre de personnes
composant chacune des parties est lié à des habitudes
culturelles. Par exemple dans les négociations commerciales en chine, la
partie étrangère dépasse rarement 3 à 5 personnes
tandis que la partie chinoise fait volontiers participer 15 à 30
personnes. La répartition du pouvoir peut être très
inégale et dans ce cas la culture tend à légitimer
certaines situations et à en invalider d'autres. Par exemple la position
hiérarchique, la possession de ressources, le statut, l'âge ont
dans certaines sociétés une influence primordiale. Ainsi en Chine
ou au Japon, c'est l'acheteur qui a la prééminence. On ne vend
pas à la Chine mais c'est la Chine qui achète aux
étrangers. Si le vendeur traite son interlocuteur comme égal, il
sera perçu ayant une attitude arrogante (Fang, 1999 ; Faure, 1999). Dans
l'ex-Union Soviétique, le Parti avait toujours raison. Dans les villages
africains, s'il y a discussion, c'est le plus âgé qui aura le
dernier mot.
4. La stratégie de la
négociation
L'action du négociateur vise à mettre en oeuvre
un ensemble de moyens destinés à parvenir à un but.
L'orientation générale donnée à l'action, autrement
dit l'organisation des tactiques, constitue la stratégie. Ici les choix
d'ordre stratégiques sont dictés soit par des
intérêts, soit par des valeurs qui elles-mêmes renvoient
à la culture. Dans certaines cultures, l'action est directe, le conflit
reconnu et accepté. Dans d'autres, le jeu est indirect, le
conflit toujours masqué et les problèmes sont
approchés de manière allusive ou oblique. Par exemple, les Russes
tendent à négocier à partir d'une situation de force
qu'ils font sentir par leur comportement, tandis que les Japonais
s'avèrent extrêmement réticents à s'engager dans un
mouvement de confrontation.
Les buts que s'assigne chacune des parties sont dans une
certaines mesure affectés par les cultures respectives. Par exemple, les
occidentaux sont préoccupés par l'équité et par le
respect des règles et des principes. Les Chinois sont beaucoup plus
soucieux de maintenir l'harmonie parmi les partenaires de la
négociation, de préserver la face de chacun plutôt que de
satisfaire à des règles et des principes abstraits. Ainsi les
règles peuvent n'avoir qu'une importance très secondaire. La
culture conditionne la manière de procéder pour parvenir à
un accord. Ainsi, la culture française ou allemande privilégie la
méthode déductive par laquelle on s'entend d'abord sur des
principes que l'on applique ensuite pour traiter chacun des points à
négocier. La culture américaine procède par une approche
inductive et avance de façon pragmatique au fur et à mesure des
difficultés rencontrés. L'approche séquentielle
américaine s'oppose également à l'approche japonaise, qui
consiste à saisir le problème de façon holiste
c'est-à-dire comme un système d'éléments
interconnectés qu'il faut traiter par une démarche d'ensemble.
5. Le processus de la négociation
La négociation est d'abord une interaction
c'est-à-dire un processus mettant en oeuvre des tactiques
destinées à échanger de l'information, créer des
options, diviser une ressource ou encore échanger des concessions. Tous
ces actes sont liés à des valeurs dans la mesure où ils
peuvent être légitimes dans une culture et proscrits dans une
autre. Il est par exemple des sociétés dans lesquelles les
exigences en matière de politesse l'emportent sur celles d'exactitude,
voire de vérité. Ainsi mentir peut être un acte moral.
Adler (1986) établit une liste de 15 tactiques considérées
dans la culture nord- américaine comme des « coups tordus ».
Cette liste n'aurait pas la moindre validité dans la culture chinoise.
On y trouve par exemple le fait de ne pas se regarder dans les yeux. En Chine,
un tel comportement n'est nullement le signe d'un affrontement psychologique
mais plutôt l'indication d'une attitude modeste et polie, fruit d'une
bonne éducation. Revenir sur des points antérieurement
traités est une pratique courante en Chine. Elle n'est pas le fruit d'un
calcul machiavélique mais plutôt l'élément
révélateur d'une conception différente de la
négociation. Dans un tel cas, l'accord n'est pas un aboutissement, mais
un jalon dans un processus beaucoup plus long qui est l'ensemble des relations
entre les parties.
La communication est un moyen essentiel au déroulement
du processus de négociation. Les différences culturelles peuvent
grandement affecter celle-ci notamment lorsque la communication est indirecte,
allusive, son contenu ambigu, le feed-back rare. La négociation devient
largement un exercice de décryptage. Il s'agit de donner la bonne
interprétation des signaux perçus. A la faveur d'une étude
de terrain sur des négociations américanojaponaises, Graham
(1993) observe que les Américains s'avèrent incapables de
décoder les expressions de leurs interlocuteurs et considèrent
à tort ces derniers comme impassibles. La signification à
attribuer à un sourire japonais ou chinois présente un niveau
considérable de difficulté, car il peut conduire à des
conclusions radicalement opposées : un masque qui entretient la
distance, un mur destiné à se protéger, un signe de joie
ou de colère, de certitude ou d'ignorance, de confiance ou de
méfiance, de satisfaction ou d'embarras.
Le rituel peut occuper une place importante dans certaines
cultures. Il s'agit là d'un acte formel porteur d'une signification
symbolique. Souvent considérés par les Occidentaux comme inutile
et vide de sens, il est en Chine le garant de la qualité de la relation.
C'est la capacité à accomplir convenablement les rituels qui
distingue le civilisé du barbare. Les actes rituels jalonnement le
processus de négociation : remise de cartes de visite à deux
mains en s'inclinant, cadeaux de bienvenue, banquets incluant discours et
toasts, règles de préséance dans les rencontres, formules
de politesse, recours à des symboles visuels, à des nombres
propitiatoires, cérémonies de signature de contrat.
La conception du temps influe sur le processus de
négociation. Dans la culture occidentale, le temps est perçu
comme une ressource rare dont il faut user avec parcimonie. En orient, il est
considéré comme une ressource quasi inépuisable, à
l'image de l'air que l'on respire. Ainsi la pression du temps, les
échéances n'auraient que peu d'effets sur le comportement du
négociateur de cette partie du monde. A un Occidental qui s'impatiente
de voir aboutir un projet de transfert de technologie, son interlocuteur
chinois lui répondit : « la Chine a vécu 5 000 ans sans
votre technologie, elle peut attendre quelques années de plus »
(Faure, 1999).
L'humour peut agir comme facilitateur dans la
négociation. Il peut contribuer utilement à la qualité de
la relation mais il passe parfois difficilement d'une culture à l'autre.
La différence entre l'ironie voltairienne et l'humour anglais n'est pas
que de l'ordre de nuance. Il s'agit de constructions d'une nature
différente.
6. Le résultat
Le produit ultime d'une négociation est fonction des
différents éléments qui la composent. L'influence de la
culture sur ces éléments se retrouvera dans le résultat.
Elle a aussi une influence plus directe en contribuant à définir,
voire à modifier la zone des accords possibles. Ce faisant elle
contribue à changer la valeur du jeu.
Sur la forme, il est des cultures où l'on ne signe un
accord que lorsque l'on s'est entendu sur chaque détail et que ceci a
été mis sur le papier de façon très précise,
tandis que dans d'autres cultures on se contentera de termes beaucoup plus
vagues. Ainsi un contrat de joint-venture en Chine dans l'optique occidentale
doit comporter plusieurs centaines de pages, alors que la partie chinoise
aurait volontiers recours à un simple formulaire à remplir d'une
demi douzaine de pages (Faure, 2000). Ce qui est compris implicitement dans
l'accord varie d'une culture à l'autre. Les occidentaux tendront
à l'évaluer en intégrant les coûts de transaction,
tels que le temps passé et les dépenses afférentes
à la négociation. Les Japonais considéreront le
degré de confiance mutuelle auquel on est parvenu et la qualité
de la relation comme des éléments importants dans l'accord.
Le sens accordé au contrat signé fait l'objet
d'interprétations très différentes. Dans certaines
cultures l'accord final est considéré comme gravé dans le
marbre et doit être observé à la lettre. Dans d'autres, le
texte écrit était sans doute valide le jour où il a
été signé puis les circonstances ayant changé, il
devient normal de le réexaminer. Ainsi en Chine la signature d'un
contrat ne clôt pas la négociation mais pose un jalon dans une
relation à beaucoup plus long terme. Parvenir à un accord
signifie pour les négociateurs avoir satisfait à une norme
d'équité. L'équité est en soi une norme
sociétale c'est-à-dire culturalisée et sa perception
différente d'une culture à l'autre. Les principes de justice
établissant l'équité s'expriment dans certaines cultures
par l'égalité soit des gains obtenus, soit des concessions
faites. Dans d'autres cultures, on valorisera davantage des gains
inégaux mais répartis en fonction des besoins des parties.
Lorsque l'accord a été signé, il s'agit de le mettre en
oeuvre. Dans la culture occidentale, cela se fait dans un cadre juridique
précis doté de mécanismes institutionnels, tels que
tribunaux et cours arbitrales. Dans d'autres cultures, ceci est perçu
comme une preuve flagrante de manque de confiance et dans tous les cas, on
préféra engager une négociation ou faire appel à
une médiation plutôt que d'aller en justice.
La négociation internationale est en soi une
exploration dans l'interculturel. Comme le souligne Hall, toute trajectoire
dans l'interculturel commence par la perte de ses propres repères. Cette
« longue marche » peut finir contre la « grande muraille
invisible », la culture de l'autre. Heureusement, la négociation
est souvent un processus long dans lequel le sentiment de s'être
perdu ne perdure pas indéfiniment, car les occasions
d'établir de nouveaux repères sont multiples. Cette
activité ambivalente conduit à l'acquisition de nouvelles
connaissances mais dans le même temps fait naître des doutes,
conséquences inévitables d'un itinéraire dans
l'interculturel. La négociation internationale rassemble les individus
dans leur diversité autour de la même table, du même tapis
ou sous la même tente. Elle propose davantage qu'une confrontation des
cultures en générant des combinaisons visant à l'atteinte
d'une certaine efficacité. De chaque côté, cultures
nationale et organisationnelle cimentent la cohésion interne, tandis que
les cultures professionnelles divisent. De part et d'autre de la table de
négociation, les cultures nationales et organisationnelles
séparent alors que les cultures professionnelles rapprochent.
Conclusion
Plus que jamais la concurrence n'a jamais était intense
et devient même planétaire. La prise en compte de la culture dans
le commerce international a de plus en plus de l'ampleur. Face à ce
phénomène d'internationalisation des activités de
l'entreprise dans un environnement interculturel, le facteur culturel occupe
une place prépondérante dans le développement
international de l'entreprise. Le contexte de l'économie mondiale oblige
dans une certaine mesure les entreprises de s'internationaliser vue l'ouverture
des frontières qui élargissement l'étendue des
marchés. Grâce au développement d'Internet, le client est
averti et peut acheter et être livré peu importe sa localisation
géographique. Dans cette perspective, les marchés sont devenus
globalisés, la concurrence planétaire. « La globalisation
culturelle » accompagne ce phénomène et place la culture au
coeur des préoccupations des dirigeants à tous les niveaux et
dans tout le processus de développement international de l'entreprise,
notamment au niveau du marketing, du management et même de la gestion. La
culture devient alors un facteur clé de succès dans le
développement l'internationalisation de l'entreprise. Le management
interculturel gagne en force et devient l'uns des fonctions clé de
l'entreprise internationale. Si le développement des nouvelles
technologies de l'information et de la communication permet la suppression des
frontières et le raccourcissement des distances, la culture reste une
barrière entre les nations.
Annexes
Annexe 1 : Pyramide des besoins de
Maslow
Annexe 2 : Quelques définitions des termes de
l'interculturel
Trompenaars et Charles Hampden-Turner ont développé
un modèle d'analyse culturelle à sept dimensions:
· universalisme / particularisme (Qu'est-ce qui est
le plus important, les règles ou les relations?)
Annexe 3 : Les dimensions culturelles de Gert
Hofstede
La distance hiérarchique : «
correspond au degré d'inégalité attendu et accepté
par les individus. La distribution inégale du pouvoir est l'essence
même des entreprises et des organisations »
L'autorité n'existe que si elle rencontre la soumission
et le pouvoir ne se maintient que s'ils satisfait un besoin de
dépendance. Selon les cultures, le subordonné accepte plus ou
moins, voire recherche cette autorité
>>>Distance hiérarchique élevée :
pays latins européens, Amérique du sud, pays arabes et Afrique
noire
Contrôle de l'incertitude: « la
manière dont les membres d'une société abordent
l'incertitude. Certaines cultures la favorisent, d'autres l'évitent : le
degré de tolérance qu'une culture peut accepter face à
l'inquiétude des évènements futurs ». Trois
composantes de l'incertitude sont relevées : le besoin de règles,
la stabilité, le stress
>>>Contrôle élevé de l'incertitude :
culture latine, japon
Individualisme vs Collectivisme : «
Degré d'indépendance et de liberté que peuvent revendiquer
les membres d'une société »
>>>Degré élevé d'individualisme :
les pays riches
Masculinité vs féminité :
« L'importance accordée aux valeurs de réussite et de
possession (valeurs masculines) et l'environnement social ou à
l'entraide (valeurs féminines) »
Plus les rôles sont différenciés, plus la
société montrera des traits masculins ; plus les rôles sont
interchangeables, plus les traits sont féminins
>>>Masculinité élevée : japon, pays
germanophones, pays caribéens d'Amérique latine, l'Italie ;
Féminité élevée : pays latins, Afrique noire, pays
scandinaves
Orientation à long terme vs Orientation à
court terme: « La manière dont les membres d'une
société acceptent le report de gratification de leurs besoins
matériels, sociaux et émotionnels »
>>>Orientation à long terme :
persévérance ; respect du rang ; sens de l'économie et du
déshonneur (Pays d'Asie, Brésil)
>>>Orientation à court terme : solidarité
; protection ; réciprocité des politesses ; faveurs et cadeaux ;
de respect de la tradition (Pakistan, Niger, Philippines, Canada,
Etats-Unis)
Annexe 4 : Les 7 dimensions culturelles de F.
Trompenaars
· individualisme / collectivisme (Est-ce que nous
fonctionnons dans un groupe ou en tant qu'individu?)
· neutralité / affectivité (Est-ce que
nous affichons nos émotions?)
· degré d'engagement (limite / diffus)
(Jusqu'à quel niveau devons nous nous impliquer vis-à-vis
d'une personne ou d'une situation?)
· statut attribué / statut acquis (Devons-nous
nous faire nos preuves pour acquérir un statut ou nous est-il
attribué par les autre?)
· orientation temporelle (Faisons-nous une seule chose
à la fois ou plusieurs en même temps?)
? orientation passé/présent/futur
? temps séquentiel / temps synchronique
· orientation interne ou externe (Contrôlons-nous
notre environnement ou devons-nous le subir?)
Annexe 5 : L'internationalisation de
l'entreprise
Bibliographie:
Exporter Pratique du commerce international 17e
édition, 2002
International marketing, Cateora Graham 13e
édition, 2007
S'internationaliser, stratégies et techniques, Anne
Deysine, Jacques Duboin, 1995 Commerce international guide pratique, Sylvie
Graumann-Yettou, 6e édition, 2005 Stratégies
commerciales et techniques internationales, Claude Nehmé, 1992
L'essentiel des stratégies d'internationalisation de
l'entreprise, Catherine Mercier-Suissa, Céline Bouveret-Rivat, 2007
Stratégique, Gerry Johnson, Kevan Scholes, Richard
Whittington, Frédéric Fréry, 7e édition, 2005.
Management interculturel, stratégie, organisation,
performance, Olivier Meier, Dunod, 2004 International organizational behavior,
Anne Marie Francesco, Barry Allen Gold, 2e édition, 2005
Strategor, équipe des professeurs du département et Politique
d'Entreprise du groupe HEC Paris, Dunod, Paris, 2005
Stratégies d'internationalisation, développement
international de l'entreprise, Jean-Paul Lemaire, 2e édition, 2003
[1] Sun-Tzu, 1988) The art of war
[2] Machiavelli, (1959), The Prince
[3] D'après Atamer et Calori (1999), les facteurs
influençant le degré d'autonomie d'une filiales (faible/forte) au
sein des groupes mondiaux sont le degré de turbulence de
l'environnement, l'importance des ressources locales de la filiale, les
degré de similitudes et de proximité des activités, et le
niveau des différences culturelles entre les entités.
[4] Source, management interculturel, stratégie,
performance, organisation, Olivier Meier
[5]C'est une combinaison de global et de local. C'est un concept
alliant les tendances globales aux réalités locales.
[6] Management interculturel, stratégie, performance,
organisation, Olivier Meier.
[7] Management interculturel, stratégie, performance,
organisation, Olivier Meier.
[8] Stratégie de publicité internationale, J.M.
Dercaudin Editions Liaisons
[9] EXPORTER, pratique du commerce international, 17°
édition
[10]
[12] Exemple cité dans le livre management interculturel,
Olivier Meier, page 132
[13] Exemple cité dans le livre management interculturel,
Olivier Meier, page 134
[14] Le niveau de sensibilité aux autres cultures. La
prise de conscience de la différence des cultures et la
nécessité d'accepter et d'intégrer ces
différences.
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