1.1.6 L'élevage des herbivores valorise les parcours
: enjeux et difficultés autour des parcours
L'article « La tragédie des communs »,
écrit par Garret Hardin en 1968, procure un cadre théorique dans
un discours déjà expérimenté par des hommes
politiques, des universitaires et des acteurs du développement. Cette
théorie souligne dans une façon malthusienne,
l'irrationalité économique du pastoralisme. Celui-ci ne serait
qu'une lutte pour les ressources et un pillage de l'environnement. L'argument
est qu'il est sans intérêt pour un agriculteur de limiter la
croissance de son troupeau sur
des pâturages où d'autres agriculteurs pourraient
le faire à sa place. De nombreux pays ont des politiques de
sédentarisation qui découlent tant sur des considérations
d'ordre politique qu'au sujet du bien être de ceux qu'ils souhaitent
installer. Toutefois, les gouvernements nationaux sont souvent hostiles aux
pasteurs (Nori, 2006).
Dans les zones de Causses ou de montagne et dans certaines
zones de coteaux, les cheptels ovin et bovin constituent un des meilleurs
atouts de valorisation de ces zones difficiles, voire le seul. A ce titre, le
maintien de l'élevage et des hommes sur la majeure partie du territoire
est essentiel pour conserver une activité économique structurante
du milieu rural. Mais, sous l'effet combiné de la démographie, de
la politique agricole commune et des conditions de travail difficiles, le
nombre d'éleveurs diminue, les cheptels s'agrandissent, le besoin de
nouvelles surfaces et la volonté d'abaisser les coûts de
production poussent à une « reconquête des parcours »,
disponibles et peu onéreux. Les années 90 voient ensuite le
développement de nouveaux enjeux du pâturage des parcours
liés à leurs contributions environnementales et
socio-territoriale : entretien du paysage, maintien de la biodiversité,
action de défense contre les incendies, faible consommation
d'intrants... (Léger, 1999; Loiseau et al., 1998; Dumont et Farruggia,
2007).
1.1.6.1 Menaces biophysiques sur les terres de pâture
Les éleveurs reconnaissent la nécessité
d'équilibrer l'augmentation de la productivité en station avec
les conditions des ressources naturelles. Cela implique la connaissance des
types de pâturages, la compréhension de la distribution de la
ressource et les modalités de pâturage, la gestion du niveau de la
réserve se basant sur les seuils de constitution de réserves
avant la destruction, la production fourragère et la capacité de
charge. Les éleveurs travaillent sur la base d'un temps variable au jour
le jour. Toutefois, le changement climatique est susceptible de poser un
défi à long terme pour le secteur pastoral (Robertson, 2002). Par
conséquent, les ressources pastorales sont
hétérogènes et dispersées dans l'espace
(fragmentées), liées aux saisons (temporaires),
différentes dans le temps (variables) et soumises au climat
irrégulier (imprévisibles). Globalement la productivité
nette des parcours est faible. Les populations animales et
végétales qu'ils peuvent soutenir fluctuent de manière
imprévisible. Ces facteurs bio-physiques affectent
l'hétérogénéité spatiale et la
variabilité temporelle des ressources. L'accès aux
différents écosystèmes pâturables dans la même
région permet la consommation des ressources entre les habitats
écologiques complémentaires et est donc vital pour assurer la
continuité de la productivité de l'élevage (Nori, 2006 ;
Garde, et al., 2007).
1.1.6.2 Elevage, biodiversité, qualité des
produits et services des écosystèmes
Malgré l'absence de justification scientifique absolue,
la préservation de la biodiversité est devenue une
préoccupation majeure de la société (Bornard et
al., 2004). La gestion de la biodiversité est d'un enjeu majeur
pour les exploitations agricoles et surtout pastorales du fait de l'ignorance
sur les
valeurs bromatologiques des différentes espèces
consommées et leurs rôles dans la satisfaction des besoins de
l'animal (entretien et production). Elle est de plus en plus
considérée non seulement comme un résultat de la gestion
parcellaire, mais également vis-à-vis des services qu'elle
fournit à l'activité d'élevage (Clergue et al.,
2005) : qualité des produits, valeur nutritive des fourrages,
adaptabilité d'utilisation des prairies, etc. Sa préservation est
maintenant explicitement prise en compte dans l'attribution de la nouvelle
Prime Herbagère Agro-Environnement (PHAE 2).
Dans les systèmes herbagers, de plus en plus de travaux
s'intéressent aux services rendus à l'élevage par la
diversité biologique, tant à l'échelle de la parcelle
qu'à celle de la totalité de l'exploitation (Swift et
al., 2004). Même si un bon niveau de diversité floristique
est incompatible avec une forte productivité à l'échelle
de la parcelle (Plantureux et al., 2005), les prairies
diversifiées présenteraient une plus grande stabilité de
leur valeur nutritive sur l'ensemble de la saison de pâturage que les
prairies peu diversifiées en raison de l'étalement des stades
phénologiques des espèces (Gibon et al., 1997). Par
ailleurs, différents travaux ont montré que la diversité
végétale stimulait l'ingestion des animaux au pâturage
(Meuret et Bruchou, 1994 ; Cortes et al., 2006). Enfin, la
diversité entre les parcelles est considérée comme un
atout à l'échelle de l'exploitation car elle offre plus de
souplesse, en particulier face aux aléas climatiques (Schlapfer et
al., 2002 ; Papy, 1999 et 2004 ; Perrot et Landais, 1993). L'action du
pâturage des herbivores sur la structure et la biodiversité des
prairies est le plus souvent liée à leur consommation. En
sélectionnant les espèces les plus appétibles, les animaux
exercent différentes pressions de défoliation sur les
espèces, qui pourrait menacer la survie de certains. Toutefois, ils
limitent aussi le développement des espèces très
compétitives pour la lumière et les éléments
nutritifs, ce qui permet la coexistence d'un plus grand nombre
d'espèces. De par leur piétinement, ils donnent aussi une
structure aux communautés végétales en créant des
ouvertures qui peuvent être peuplées par de nouvelles
espèces. Enfin, ils jouent un rôle dans la diffusion des semences
de certaines espèces (Fischer et al., 1996).
Les agneaux norvégiens sont généralement
abattus directement après avoir été conduits dans des
alpages naturels et la viande est donc considérée comme un
produit biologique. De nombreux consommateurs croient également que les
agneaux provenant de certaines zones sont supérieurs à d'autres
types d'agneaux. En montagne, les agneaux parcourent de longues distances et
leur conformation corporelle pourrait être différentes de celles
des agneaux confinés en cages dans les vallées. On ne sait pas si
les facteurs mentionnés affectent la qualité et la saveur de la
viande. Des expériences menées en Australie, Islande,
Grèce, Italie, Nouvelle-Zélande et Royaume-Uni ont fourni peu de
documents à ce sujet mais, témoigné d'effets significatifs
du type de pâturage et de la complémentation sur la
qualité, y compris la saveur de l'agneau (Adnoy T. et al.,
2005). La nature
des fourrages pourrait intervenir directement sur la
qualité du produit grâce à des molécules
présentes dans les plantes aromatiques (terpènes,
Sesquiterpenes), qu'on retrouve dans le fromage (Viallon et al.
1999).
Il est important de protéger les valeurs naturelles des
parcours en élevage pastoral afin de maintenir les principaux services
fournis par les écosystèmes, tels que la santé du sol et
de la végétation, la fourniture d'habitat, le captage de l'eau et
la filtration, la séquestration du carbone, les paysages... La
protection insuffisante de ces services fournis par les
écosystèmes ne garantira pas un pastoralisme productif
(Robertson, 2002).
1.1.6.3 Intensité du pâturage, fertilité des
sols et réactions des plantes
Dans les alpages, il est difficile de distinguer gradients de
nutriments et intensité de pâturage, les alpages les plus fertiles
étant aussi les plus pâturés (Gaucherand, 2005). Dans les
environnements « stressants » les limitations en eau ou en nutriments
sélectionnent les stratégies conservatrices (faible Surface
Spécifique des Feuilles (SSF) et Teneur en Matière Sèche
des Feuilles (TMSF), élevée) associées à une faible
appétence pour les animaux du fait de la résistance des feuilles
et de leur faible valeur nutritive. A l'opposé, ce sont les
stratégies exploitatrices (forte SSF et TMSF élevée) qui
sont favorisées dans les environnements riches en nutriments. Cependant
ces traits sont contrôlés par la fertilité du sol et ne
correspondent pas à une stratégie particulière des
espèces vis à vis du pâturage. L'interaction entre
intensité de pâturage et productivité du site gêne
l'identification des traits de réponse au broutage (Landsberg et
al., 1999 ; Pakeman, 2004 ; cités par Gaucherand, 2005). Certains
traits ressortent cependant de différentes études (Díaz
et al., 2001 ; McIntyre et Lavorel, 2001 ; cités par
Gaucherand, 2005) notamment des traits permettant aux espèces
d'éviter le broutage (port en rosette, petite taille, petites feuilles,
phénologie décalée) ou de le supporter (stratégie
rudérale, forme de vie annuelle ou, dans les milieux productifs, des
feuilles fines et une SSF élevée indiquant une vitesse de
croissance élevée). L'identification de traits ou de syndromes
spécifiquement liés au pâturage reste cependant difficile
car il existe de multiples stratégies d'évitement reposant sur
des combinaisons de traits différentes. En outre, d'autres facteurs
comme la fertilité, mais aussi la sécheresse ou la
compétition par exemple, peuvent s'avérer plus importants que la
résistance au pâturage pour la survie de la plante et de ce fait,
des traits liés aux conditions de milieu peuvent être
favorisés même s'ils sont considérés
défavorables à la plante en ce qui concerne strictement sa
résistance au pâturage (Briske 1999 ; cité par Gaucherand,
2005).
1.1.6.4 L'impact social sur le comportement des herbivores au
pâturage
Les herbivores se caractérisent entre autres par leur
grégarisme, qui est l'une des principales raisons de leur
domestication (Lécrivain, 2004). Chez les ongulés domestiques, le
regroupement social influence fortement le comportement au pâturage.
Les relations sociales au sein d'un groupe
influencent les stratégies individuelles pour les choix
alimentaires, l'exploitation des sites d'alimentation et la distribution
spatiale sur les parcours. La vie en groupe donne aux jeunes animaux les
modèles sociaux ; en premier lieu sa mère puis ses pairs et les
autres membres du groupe, ce qui contribue à apprendre les
préférences alimentaires suffisantes et les aversions. Cette
facilitation sociale est plus efficace que l'apprentissage individuel par
essai-erreur. La vie en groupe est également considérée
avantageuse pour les animaux, car ils peuvent utiliser les sites d'alimentation
découverts par les autres membres du groupe. La vie en groupe chez les
herbivores est une véritable stratégie contre la
prédation. Jarman (1974); cité par Dumont et Boissy (1999). La
structure sociale régule les relations qu'entretiennent les animaux
entre eux et assure le fonctionnement du groupe, la reproduction et
l'élevage des jeunes (Bouissou, 1992 ; cité par Dumont et Boissy,
op. cit.). A contrario, elle accroît la concurrence
alimentaire en raison de la diminution rapide de la disponibilité de la
ressource, affectant le plus les animaux affaiblis. Pacager en groupe peut
aussi forcer les individus à abandonner des sites qu'ils estiment
être de bonne qualité tout simplement parce que tous les autres
membres du groupe quittent ces sites. Arnold et Dudzinski (1978) cités
par Dumont et Boissy (1999), indiquent que des troupeaux d'ovins et de bovins
sont divisés en plusieurs sous-unités quand la ressource
disponible est faible.
1.1.6.5 Utilisation de la zone de pâture en fonction du
savoir-faire du berger, de la physiologie,
du comportement de l'animal, de la topographie et de la
physiologie des plantes
Parce qu'un régime alimentaire est constitué
lentement sur parcours, il est essentiel de prévoir un temps plus long
de pâturage. De 6 à 8 h sur les prairies ou les bons
pâturages, il atteint 8 à 12 h, sur les parcours et les
pâturages de montagne (Garde et al., 2006). Ce temps varie selon
la saison, les conditions météorologiques, le type de milieu,
l'état des animaux. Ce temps est divisé en séquences de
consommation aussi nombreuses que le milieu est pauvre et que les animaux
doivent changer très souvent le lieu où ils peuvent chômer
(Agreil et al., 2002 et 2004). Sur des journées chaudes
d'été, le temps de pâturage est décalé
à la nuit et la rumination dans la journée. Ceci ne signifie pas
outre mesure que les bêtes ne doivent pas être contraintes ou
qu'elles ne le sont pas en système de garde lâche. D'après
Landais et Deffontaines (1988), les bergers prévoient des circuits,
observent, analysent les situations et adaptent leurs déroulements de
façon à satisfaire au mieux les besoins du troupeau en exploitant
au mieux, de leur point de vue, les ressources pastorales sur
parcours16. Ils
16 Tu vois ces bêtes là tout au fond
de la dépression ; les premières isolées ? On pari que ce
sont les bêtes à G. en gros avec quelques unes de F. quand tu les
envoie ici chaque année c'est les mêmes qui y sont à ce
rythme ! Moi, ma gestion de la journée, à peu près
à cette heure si quand le temps est comme ça il ne faut pas que
les bêtes aient dépassé cette dépression et
allé de l'autre côté ; là bas, ça tire dans
le bois et les y ramasser il faut y arriver parce que là on ne sait pas
ce qu'elles y cherchent mais elles veulent bien y être même si
elles y marchent plus qu'elles n'y mangent. Donc à mon goût la
journée n'a pas été bien gérée et ça
c'est quelques minutes de retard de ce matin ; elles ont pris l'avance sur nous
(Conversation avec un berger sur son estive, Juin, 2008).
sont bien conscients de la gestion du milieu pour
éviter l'enfrichement des zones délaissées ou non
fréquemment fréquentées par leurs troupeaux. Concernant le
pâturage libre, Balent (1987), a montré qu'il freine
l'enfrichement des parcours de demie saison, mais ne l'empêche pas, en
raison des particularités du comportement des animaux en pâture
libre, qui concentrent leurs activités sur les zones les plus favorables
et délaissent les autres.
Les besoins alimentaires des animaux varient en fonction de
leur état physiologique. Ils sont évalués sur une
séquence de pâturage. Quand le type de végétation
d'un parc est connu, et par conséquent la pousse de l'herbe
caractérisée, l'étalement de la production et la
capacité de maintien sur pied, l'éleveur décide des
saisons d'utilisation, de la charge, de niveaux de valorisation et
d'intensités de pâturage (Garde et al., 2006). Les
comportements des ovins au pâturage sont propres à leur
espèce, liés à leur biologie, mais aussi à leur
contexte d'élevage, à leur expérience, au relief, à
la structure et la nature de la végétation et de la configuration
du terrain (Lécrivain, op. cit.). Sur le parcours en
général, les choix sont guidés par la morphologie des
plantes : les vaches préfèrent les feuilles que les tiges, les
organes jeunes et verts que les sénescents, durcis, lignifiés ou
même jaunes Garde, op. cit.). C'est pourquoi on constate une
assez grande variabilité des réponses comportementales.
Néanmoins, il existe des comportements typiques qui s'expriment
spontanément et régulièrement, y compris dans des
situations différentes. Ce sont ces comportements que les bergers
connaissent, prennent en compte et sur lesquels ils s'appuient pour conduire
leur troupeau quand ils gardent17. Ce sont des attitudes
individuelles des brebis, des rythmes, des comportements collectifs du troupeau
vis-à-vis des éléments du milieu ou des
congénères qui s'érigent en principes de base pour
conduire un troupeau (Lécrivain, op. cit.). L'ajustement de ces
composantes animales, végétales et du milieu forme le calendrier
de pâturage. Ce calendrier peut être envisagé comme un
enchaînement de séquences, et la séquence comme une suite
de parcs. Face aux aléas climatiques, l'éleveur prévoit
des sécurités par séquence ; elles donnent de la souplesse
dans l'exploitation des surfaces (Garde, op. cit.).
On confond trop souvent le gardiennage d'un troupeau et sa
surveillance. Or le premier remplit une fonction d'alimentation des
troupeaux, et le deuxième une fonction de protection. Le
gardiennage requiert la compétence du berger18.
Contrairement à ce que l'on peut imaginer, le travail de berger
17 Quand tu fais la virée comme et quand il
faut, tu remontes à la cabane et ne redescends que de temps en temps
voir si rien n'a perturbé l'orientation. Sinon tu peux être
tranquille qu'elles repassent par la cabane en fin de journée pour
coucher sur la crête en dessus de nous (Conversation avec un berger sur
son estive, Juin, 2008).
18 passionné, savoir « lire » un
territoire dédié au pâturage, avoir la sympathie pour les
brebis, la ponctualité pour sortir régulièrement le
troupeau, le calme pour le conduire sans stress, la patience pour le faire
manger au mieux à sa faim et à
n'est ni facile, ni tranquille, il communique de
manière subtile avec les brebis (Lécrivain, 2004). La
surveillance ne nécessite pas de savoir-faire particulier. La pratique
du gardiennage permet de valoriser un milieu complexe et
hétérogène tout en assurant une alimentation
complète aux animaux, par la réalisation de chaque circuit
quotidien et l'enchaînement des circuits tout au long d'une
séquence de pâturage. Il n'existe pas de «
pratiques/techniques » de garde, mais une variété de moyens
pour guider les animaux sur la base de critères comme le type de
ressources disponibles, les formes de relief, la capacité des animaux
à explorer un milieu plus ou moins boisé ou embroussaillé,
la visibilité aussi bien pour le berger que pour le chien de protection,
l'état physiologique des animaux, l'initiation des animaux, les niveaux
d'état corporel attendus par l'éleveur à la descente de
l'estive, le respect des contraintes liées à d'autres
utilisateurs... (Garde et al., 2006 ; Meuret, 1995 ; Garde et
al., 2007). Selon Landais et Deffontaines (1988), les bergers
possèdent de nombreuses connaissances relatives au comportement des
ovins dans différents contextes de pâturage, qu'ils mobilisent
sans cesse au cours de chaque circuit de pâturage. Grâce à
ce savoir-faire acquis, ils valorisent des espaces peu productifs, souvent
embroussaillés, marqués par une topographie complexe et difficile
à clôturer. C'est sans doute dans ce contexte que Lécrivain
(op. cit.) stipule que, puisque les pratiques de gardes sont
adaptées aux caractéristiques particulières des
différents types de milieu, rares sont les jeunes bergers qui
s'aventurent sans chercher à recevoir un maximum de conseils
auprès d'autres bergers expérimentés. Ces savoirs sont
basés sur une connaissance affinée du territoire et des animaux
qu'ils géreront19, savoirs acquis le plus
généralement de manière empirique.
son rythme en tenant compte de la composition du troupeau et
de l'expérience des animaux, et pour éduquer un chien pour la
garde, l'attention et la vigilance, l'observation, l'écoute, l'analyse
et une capacité de synthèse, la curiosité, le courage,
l'aptitude à adapter les circuits de garde face aux changements.
19 Tu vois ces bêtes là tout au fond
de la dépression ; les premières isolées ? On pari que ce
sont les bêtes à G. en gros avec quelques unes de F. quand tu les
envoie ici chaque année c'est les mêmes qui y sont à ce
rythme ! (...) Moi, ma gestion de la journée, à peu près
à cette heure si, quand le temps est comme ça, il ne faut pas que
les bêtes aient dépassé cette dépression et
allé de l'autre côté ; (...). On attend encore trois quarts
d'heure ou un heure et elles seront là où il faut appliquer la
virée (...). Ma gestion des bêtes, de la montagne et de l'estive
si tu veux, c'est qu'après avoir passé trois semaines à un
mois ici (bas de la montagne), que je monte en moyenne montagne avec les
bêtes bien soignées (pas de boiterie, pas d'abcès, pas de
plaies, pas trop de maigres...) car un peu plus haut la garde commence à
être un peu plus lâche et il ne faut pas qu'il y ait un facteur qui
perturbe le comportement et le fonctionnement naturel habituel des bêtes.
Plus on monte, plus le troupeau éclate et chaque escabot se constitue
jusqu'à ce que tout en haut (les rassembler toutes devienne vraiment une
nécessité d'intervention). Là haut il faut connaître
le comportement de chaque escabot par coeur pour arriver à les
contrôler toutes (Conversation avec un berger sur son estive. Juin,
2008).
1.1.6.6 Les menaces sociales et économiques sur les terres
de parcours
Les parcours sont continuellement en mutation rapide ce qui
affecte de nombreux pasteurs et
communautés locales. Le manque d'une population
permanente dans les zones pastorales conduit le plus souvent à la
réduction du nombre de services issus de l'élevage. Certaines
terres pastorales ne sont pas d'une taille suffisante et n'ont pas une
capacité de charge satisfaisante ou l'infrastructure nécessaire
pour une entreprise rentable. Les évolutions macro-économiques
récentes, le développement de résidences secondaires, et
les nouvelles formes de propriété foncière individuelle
rendent difficile l'utilisation de zones de pâturage pour les
agriculteurs (Anonyme, 2007b). Le problème majeur qui concerne tous les
groupes pastoraux est lié à leurs droits de
propriété foncière et l'influence croissante des groupes
non-pastoraux et d'intérêt externes sur les ressources (Nori, 2006
; Garde, et al., 2007). La fragmentation de la propriété
rend difficile l'accès à la terre. Les conventions
multi-annuelles de pâturage et les accords verbaux entre agriculteurs et
propriétaires ne garantissent pas la durabilité de l'exploitation
nécessaire à l'installation de clôtures et
équipements pastoraux coûteux (Anonyme, 2007a). En outre, les
relations avec d'autres utilisateurs (chasseurs, randonneurs, motos...) sont
parfois des relations très conflictuelles générant des
actes de vandalisme (destruction de clôtures, vols...).
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