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MEMOIRE DE FIN D'ETUDES Présenté pour
l'obtention du diplôme de Master AGROBIOSCIENCES
Spécialisation : The Agro Food Chain Option :
Productions Territories and Sustainable Development
Elevage Pastoral en Ariège :
Vulnérabilité des animaux au pâturage, évolutions
des systèmes d'élevage, adaptations aux mesures
d'accompagnement du plan du réintroduction et de conservation de
l'ours brun (Ursus artos) dans les Pyrénées
françaises 2006-2009.
Par :
Eric Duplex ZOUKEKANG
Année de soutenance : 2008
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MEMOIRE DE FIN D'ETUDES Présenté pour
l'obtention du diplôme de Master AGROBIOSCIENCES
Spécialisation : The Agro Food Chain Option :
Productions Territories and Sustainable Development
Elevage Pastoral en Ariège :
Vulnérabilité des animaux au pâturage,
évolutions des systèmes d'élevage, adaptations aux
mesures d'accompagnement du plan du réintroduction et de conservation
de l'ours brun (Ursus artos) dans les
Pyrénées françaises 2006-2009.
Par :
Eric Duplex ZOUKEKANG
Mémoire préparé sous la direction de
: TERRIEUX Agnès
Présenté le : 27/06/2008
devant le Jury : Maîtres de Stage :
CHERVIN Christian HEMPTINNE Jean-Louis
ALLAIRE Gilles BESCHE-COMMENGE Bruno
Abstract
New social requirements for environmental concerns lead human
to put into reserve of biodiversity lands of low economic interest.
Historically, national governments are often hostile to pastoralists. In
Ariège, History and social structure bring a certain resistance to
sudden political changes. Here, livestock usually and it has become naturally
leave the farm area to summer pastures in early to mid June and returns from
mid September to early October. Individual holdings are of low flock seize,
weak perspectives and alternatives, economic precariousness. Summer farming is
the spearhead of the system not only as a tradition but due to its economic,
sanitation, feedstuff constitution importance. Workforce, working conditions
and economy are the most important factors explaining the resistance to change
in this production system. The system practiced brings about a certain capacity
of adaptation, but the devotion to allegation of a certain professional "pride"
is a stumbling block for the implementation of bear subsidies. Farmers can
practice husbandry in another way but, this way should come from them. Make the
best possible use of grass on rangeland to feed its flock and produce beautiful
lambs, minimizing trough feeding is the farmer's criterion of technical
excellence. With bear project, breeders want to know what future, rural
projects, and societal choices decisionmakers recommend for Pyrenees. They are
pessimistic on their future because life and human dynamics in Ariège
are now strongly dependent to pastoralism and they do not know if these
constitutive criteria of sustainable development have been taken into
consideration in the «wilding» approach.
In the economic context of pastoralism today, additional
charges are hardly appreciable. Since accompaniment measures provide only 50%
subsidy for the shepherd's charge when all the measures are not used and 80%
when they are all implemented, near to 99% of farmers for the pastoral
cohabitation investigated are just opportunists. They were using Patou dogs and
«tightguarding» practices before the beginning of Bear project. They
have joined parks to their functioning mode to have 80% compensation when
taking shepherd. For all farmers, accompaniment measures are applicable neither
everywhere nor at full-time, nor in all weathers; the pair Shepherd - Patou dog
reduces predation but it should not be presented as panacea. In order to make a
progress in the cohabitation process, authorities should come back, remove
frustration and conflicts of interest and put the price. We have to divide by
200 the number of sheep that summer to know the number of shepherds, cabins,
parks and Patou dogs necessary for effective herd protection.
Keywords : Pastoralism, stocking system,
Mountain Summer Pasture, Bear, Biodiversity, Preservation, Environment,
Sustainable Development.
i
Résumé
Les nouvelles exigences de la société en
matière de sécurité environnementale ont conduit l'homme
à mettre sous forme de réserves de biodiversité les
espaces à faibles intérêts économiques.
Historiquement, les gouvernements ont souvent été hostiles aux
pastoralistes. En Ariège, l'histoire et la structure sociale offrent une
certaine capacité de résistance à de brusques changements
politiques. Ici, le cheptel a pris l'habitude (ce qui est devenu naturel) de
quitter la ferme pour les pâturages d'été du début
à la mi-Juin pour redescendre de la mi-Septembre à début
Octobre. Les exploitations individuelles ont des effectifs réduits, les
perspectives et alternatives économiques sont faibles et
l'économie reste précaire. L'estivage est le fer de lance de ces
exploitations, non seulement comme une tradition, mais en raison de son fort
intérêt économique, sanitaire, stratégique et
technique. La main-d'oeuvre, les conditions de travail et l'économie
sont les principaux facteurs expliquant la résistance au changement dans
ce système de production. Le système pratiqué procure une
certaine capacité d'adaptation, mais l'attachement à une certaine
fierté professionnelle est une pierre d'achoppement pour la mise en
application des mesures d'accompagnements préconisées par le plan
ours. Les éleveurs peuvent élever autrement, mais cette nouvelle
façon doit absolument venir d'eux. Faire le meilleur usage possible de
l'herbe des pâturages pour nourrir son troupeau et, produire de beaux
agneaux en réduisant l'alimentation en bergerie est un critère
d'excellence technique ici. Avec le plan ours, les éleveurs veulent
savoir quel avenir, quels projets ruraux et choix de société les
décideurs veulent pour les Pyrénées. Ils sont pessimistes
sur leur avenir parce que la vie et la dynamique humaine dans l'Ariège
sont maintenant fortement dépendantes de l'élevage et qu'ils ne
savent pas si ces critères constitutifs du développement durable
ont été pris en compte dans le projet d'ensauvagement.
Dans le contexte économique du pastoralisme
aujourd'hui, les charges supplémentaires sont difficilement
appréciables. Puisque les mesures d'accompagnement ne garantissent que
50% de subvention pour la prise en charge du berger lorsqu'elles ne sont pas
toutes appliquées et 80% si toutes, près de 99% d'éleveurs
favorables à la cohabitation enquêtés ne sont que des
opportunistes ; ils pratiquaient déjà garde serrée avec un
chien Patou avant le lancement du plan ours. Ils ont joint les parcs à
leur mode de fonctionnement pour bénéficier de la subvention
maximale. Pour tous les agriculteurs, les mesures d'accompagnement ne sont
applicables ni partout, ni à plein temps, ni par tous les temps. La
paire Berger - Chien Patou réduit la prédation mais ne devrait
pas être présentée comme une panacée. Afin de faire
un progrès dans le processus de cohabitation, les autorités
devraient repartir de loin, ôter la frustration et les conflits
d'intérêts et mettre le prix. Il faut diviser le nombre de moutons
estivant par 200 pour avoir le nombre d'unités pastorales
nécessaire pour une protection efficace du troupeau.
Mots-clés : Pastoralisme, système d'élevage,
Estive, Ours, Biodiversité, Préservation, Environnement,
Développement Durable.
ii
Table des matières
Abstract i
Résumé ii
Table des matières Erreur ! Signet non
défini.
Liste des tableaux et figures Erreur ! Signet non
défini.
Liste de abréviations et des acronymes Erreur !
Signet non défini.
Remerciements Erreur ! Signet non
défini.
Introduction Erreur ! Signet non
défini.
Chapitre 1 : Présentation générale de
l'étude Erreur ! Signet non défini.
1.1 Contexte Erreur ! Signet non
défini.
1.1.1 Le milieu naturel des Pyrénées
Erreur ! Signet non défini.
1.1.2 Le milieu naturel de l'Ariège Erreur !
Signet non défini.
1.1.3 Le milieu culturel et humain de l'Ariège
Erreur ! Signet non défini.
1.1.4 Le milieu Agricole de l'Ariège Erreur !
Signet non défini.
1.1.4.1 Une gestion collective des ressources Erreur !
Signet non défini.
1.1.4.2 Un intérêt patrimonial reconnu
Erreur ! Signet non défini.
1.1.5 Rôle et objectifs du système d'élevage
Erreur ! Signet non défini.
1.1.5.1 Quelques définitions Erreur ! Signet non
défini.
1.1.5.2 Elevage pastoral : Historique et évolutions
Erreur ! Signet non défini.
1.1.5.3 Rôle et objectifs du pastoralisme Erreur !
Signet non défini.
1.1.6 L'élevage des herbivores valorise les parcours :
enjeux et difficultés autour des parcours Erreur ! Signet non
défini.
1.1.6.1 Menaces biophysiques sur les terres de pâture
Erreur ! Signet non défini.
1.1.6.2 Elevage, biodiversité, qualité des produits
et services des écosystèmesErreur ! Signet non
défini.
1.1.6.3 Intensité du pâturage, fertilité des
sols et réactions des plantesErreur ! Signet non
défini.
1.1.6.4 L'impact social sur le comportement des herbivores au
pâturageErreur ! Signet non défini.
1.1.6.5 Utilisation de la zone de pâture en fonction du
savoir-faire du berger, de la physiologie, du comportement de l'animal, de la
topographie et de la physiologie des plantesErreur ! Signet non
défini.
1.1.6.6 Les menaces sociales et économiques sur les terres
de parcoursErreur ! Signet non défini.
1.1.7 Moyens de production, mode de conduite, produits,
considérations sociales, techniques et
spatiales Erreur ! Signet non défini.
1.1.7.1 Etude des systèmes d'élevage :
exploitations, hommes et troupeaux en montagne Erreur ! Signet non
défini.
1.1.7.2 Etude du système de pâturage Erreur
! Signet non défini.
1.1.8 Le contexte de la prédation par L'ours brun
Erreur ! Signet non défini.
1.1.8.1 Considérations générales
Erreur ! Signet non défini.
1.1.8.2 Ecologie de l'ours brun Erreur ! Signet non
défini.
1.1.8.3 Structure sociale de l'ours Erreur ! Signet non
défini.
1.1.8.4 Cycle de vie de l'ours Erreur ! Signet non
défini.
1.1.8.5 Reproduction de l'ours Erreur ! Signet non
défini.
1.1.8.6 Ration alimentaire de l'ours Erreur ! Signet non
défini.
1.1.8.7 Conflit Homme - Ours ou Homme - Prédateur
Erreur ! Signet non défini.
1.1.8.8 Dynamique de l'expansion de l'ours dans les zones
d'élevageErreur ! Signet non défini.
1.1.8.9 Etendue des dommages liés à l'ours
Erreur ! Signet non défini.
1.2 Problématique Erreur ! Signet non
défini.
1.2.1 Question de recherche Erreur ! Signet non
défini.
1.2.2 Hypothèses de recherche Erreur ! Signet non
défini.
1.2.3 Objectifs d'étude Erreur ! Signet non
défini.
Chapitre 2 : Terrain d'étude et collecte de données
Erreur ! Signet non défini.
2.1 Terrain d'étude Erreur ! Signet non
défini.
2.1.1 Ariège-Pyrénées Erreur !
Signet non défini.
2.1.2 ASPAP Erreur ! Signet non
défini.
2.2 Collecte des données Erreur ! Signet non
défini.
2.2.1 Une approche bibliographique pour définir
l'état des travaux sur le sujetErreur ! Signet non
défini.
2.2.2 Enquêtes de terrain Erreur ! Signet non
défini.
2.2.3 Analyse des structures et des systèmes
d'élevage Erreur ! Signet non défini.
Chapitre 3 : Résultats et discussion Erreur !
Signet non défini.
3.1 Résultats Erreur ! Signet non
défini.
3.1.1 Caractéristiques générales de
l'élevage pastoral en Ariège. . . Erreur ! Signet non
défini.
3.1.2 Typologies du système d'élevage
Erreur ! Signet non défini. 3.1.2.1 Systèmes
de production en fonction de la mobilité du troupeauErreur !
Signet non défini.
3.1.2.2 Systèmes de production en fonction de la
localisation géographique de l'exploitation Erreur ! Signet non
défini.
3.1.2.3 Systèmes de production en fonction de la
diversification.Erreur ! Signet non défini. 3.1.3
Qu'est ce que l'estive en Ariège ? Erreur ! Signet non
défini.
3.1.4 Comment l'ours intervient-il dans ce milieu rural et
professionnel ?Erreur ! Signet non défini.
3.1.5 Quels sont les dommages de l'ours sur le pastoralisme ?
Erreur ! Signet non défini.
3.1.6 Comment l'écologie est-elle perçue dans
cette polémique ours ?Erreur ! Signet
non défini.
3.1.7 Dans ce contexte, l'ours est-il une espèce
parapluie ou une espèce emblématique ?
Erreur ! Signet non défini.
3.1.8 Quel est le coût de la réintroduction de
l'ours brun ? Erreur ! Signet non défini.
Conclusion Erreur ! Signet non défini.
Références Bibliographiques Erreur ! Signet
non défini.
Liste des tableaux et figures
Liste des figures Pages
Figure 1 : Cadre Macro-théorique du Pastoralisme a
Figure 2 : Valeurs qui délimitent l'espace des bonnes
pratiques a
Figure 3 : Dispersion géographique des éleveurs
enquêtés b
Figure 4 : Gestion du troupeau au cours d'une campagne de
production c
Figure 5 : Scénarios des relations entre Eleveurs,
Eleveurs-Bergers, Bergers et GPs 41
Liste des tableaux Pages
Tableau 1 : Argumentaire entre Pro Ours et opposants d
Liste de abréviations et des acronymes
AFP : Association Foncière Pastorale
ASPAP : Association pour la Sauvegarde du Patrimoine
d'Ariège-Pyrénées
CBD : Convention pour la Diversité Biologique
CNPN : Comité National pour la Protection de la Nature
DDAF : Direction Départementale de l'Agriculture et de la
Forêt
DIREN : Direction Régionale de l'Environnement
FAO (Food and Agricultural Organisation) : Organisation des
Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture
GP : Groupement Pastorale
GPL : Groupe Professionnel Local
MAE : Mesures Agro Environnementales ONF : Office National des
Forêts
PAC : Politique Agricole Commune
PHAE : Primes Herbagères Agri Environnementales
SAU : Surface Agricole Utile
SIG : Système d'Information Géographique SSF :
Surface Spécifique des Feuilles
STA : Surface Toujours en Herbe
TMSF : Taux en Matière Sèche des Feuilles UGB :
Unité Gros Bétail
UICN : Union Mondiale pour la Nature ou Union Internationale pour
la Conservation de la Nature
UP : Unité Pastorale
UTA : Unité du Travail Annuel
WWF (World Wide Fund for Nature): Fond Mondial pour la
Conservation de la Nature
ZI : Zone Intermédiaire
ZICO : Zone Importante pour la Conservation des Oiseaux
ZNIEFF : Zone Naturelle d'Intérêt Ecologique pour la
Flore et la Faune
Remerciements
Ce travail est le fruit des emprunts aux différents
travaux effectués sur ce sujet, de l'accueil
bénéficié de l'ASPAP, de la volonté
d'éleveurs, de bergers et de gestionnaires de groupements pastoraux
à répondre à mes nombreuses questions malgré le
manque de temps, des conseils et discussions avec des scientifiques de renom
dans ce domaine et enfin de l'encadrement académique reçue.
Respectant le dicton : « A tout Seigneur tout honneur », je trouve
l'occasion ici de dire de vive voix merci à tout ceux/celles dont
l'action à contribuer à finaliser ceci. Qu'ils trouvent ici, le
fruit de leurs efforts. Je veux ainsi dire un grand merci à :
Madame TERRIEUX Agnès pour tous les efforts consentis
à l'encadrement de ce travail et à la lecture et correction
d'innombrables essais.
Messieurs LACUBE Philippe, CARRIERE Claude, RALU Olivier,
BESCHE-COMMENGE Bruno et Madame BONIFACE Magali, pour leur chaleureux accueil
et orientations pour ce travail.
Messieurs ACAP Charles, DUBUC Gérard, MIROUZE
Jean-Pierre, FERRE Jean-Claude, BONCOURT Fabien, CHEVILLON Francis, GUILLET
Gilbert et toutes les autres personnes qui ont bien pu sacrifier de leur temps
de travail pour les entretiens.
Messieurs GARDE Laurent, LASSEUR Jacques, BOURBOUZE Alain,
HUGUENIN Johann, et Madame GIBON Annick pour les orientations bibliographiques
et leurs conseils pour la construction de ce travail.
Mes collègues avec qui on s'est régalé au
courant de l'année.
Les estives, les brebis, l'ours, le ministère de
l'écologie et du développement durable, qui ont su m'inspirer
pour la construction de ce sujet.
Ma famille entière sans qui je ne suis rien et avec je
suis tout.
La source de mon espérance et de la vie.
Introduction
Au cours des années 70 à 90, le nombre
d'exploitations agricoles, celui des animaux par troupeau, une intensification
fourragère, a augmenté de manière significative ainsi que
le développement des cultures de contre saison. L'évolution des
conditions du marché de la viande a également joué un
rôle important dans les options prises. Les années 80 rouvrent le
marché français de la viande aux importations à bas prix
qui affectent fortement l'élevage. Suite à la réforme de
la Politique Agricole Commune (PAC) en 1992, la spécialisation
géographique et l'augmentation croissante d'animaux par troupeau a
été intensifiée. Entre 1988 et 2000, la filière
d'élevage a entamé un processus de réduction du nombre
d'exploitations agricoles (perte de 62% des éleveurs de moutons et 1/3
brebis nourrices) et d'augmentation de plus en plus important du nombre
d'animaux par troupeau (Lasseur et Garde, 2007). Dans la zone centrale des
Pyrénées, les modifications de la gestion du troupeau ont
été organisées conformément à de nombreuses
tendances : amélioration des performances de reproduction, abandon de la
mixité dans les exploitations, diminution de la main d'oeuvre,
introduction de races à viande, spécialisation des produits et
restriction des périodes de vente1 (Gibon, 1996).
Tradition oblige ou en raison de la considération
actuelle : zone à "handicap naturel" (altitude, pente,
géomorphologie, couche de neige, type de sol, humidité, etc.), le
système d'élevage transhumant reste la principale utilisation des
terres et le moyen de subsistance en zone de montagne ariégeoise. C'est
probablement la manière la plus efficace économiquement
d'exploiter ces pâturages saisonniers. L'estive a été et
est encore un élément de l'agriculture en Ariège, ceci est
avant tout en rapport à la production de viande. L'estive a
été réglementée par les lois depuis des temps
immémoriaux. Selon l'ancienne loi pastorale, lorsqu'un agriculteur ne
tenait pas son troupeau en estive, il était accusé pour
pâturage illégal "vol d'herbe" et payait une taxe. C'est dans les
estives que la multitude des traditions de la petite transformation
laitière a survécu. L'Estive a aussi une longue tradition dans le
secteur du tourisme en Ariège ainsi que de nombreuses
opportunités de
1 Ces phénomènes, et plus récemment
l'essor de la vente d'agneaux légers sur l'Espagne ont poussé
à rechercher des mises bas d'automne précoces et très
groupées. Le marché des bovins s'est lui aussi
spécialisé. Les possibilités de vente de veaux de
boucherie ou de gros bovins auprès des bouchers locaux se sont petit
à petit érodées. En dehors de la vente de broutards, seule
est restée la possibilité de valoriser quelques jeunes veaux
très bien conformés (culards en particulier) auprès des
maquignons et des groupements. Une caractéristique commune aux diverses
évolutions évoquées est d'aboutir à une perte de
souplesse des systèmes d'élevage. En outre, parmi les
éleveurs qui se sont engagés le plus loin dans le processus
d'intensification, certains n'ont pas pu ou n'ont pas su maîtriser les
innovations adoptées, ce qui s'est traduit par une perte de
cohérence interne de leurs systèmes d'élevage (Gibon,
1996).
loisirs pour les milliers de visiteurs qui passent d'innombrables
heures chaque année dans le calme des milieux ouverts des prairies (B.
Besche-Commenge, 2008).
Le territoire de l'estive est très diversifié.
Dans ces domaines, le bétail paît sur une mosaïque de
végétation de qualité très variable. Il est donc
essentiel de déterminer le bon moment pour le déplacer à
des sites spécifiques et adaptés durant tout l'été.
En raison de la menace pour l'environnement des activités à forte
consommation d'énergie, les relations entre agriculture et environnement
sont généralement abordées sous l'angle de la limitation
des effets négatifs des pratiques agricoles, notamment concernant la
diffusion de polluants (Gibon, 1997). Ceci ne devrait concerner que les
exploitations en intensif/industriel à forte connotation
mécanique, phytosanitaire et autres ingrédients de la
rentabilité à outrance. Dans la région
méditerranéenne française, ce sont surtout les aspects
positifs des activités agricoles qui sont mis en relief, comme le
maintien de la biodiversité des parcours à travers le
pâturage. Les questions environnementales dans ces domaines et les
stratégies agricoles sont maintenant axées sur la
préservation de la biodiversité2 (Clergue et
al., 2005; Gibon, 1997).
La perte de la biodiversité est une question de
dimension sociale, économique, culturelle et écologique complexe.
Y faire face exige des solutions également complexes. Bien que ce soit
une politique globale de développement, les choix pour la gestion de
cette crise, requièrent une bonne compréhension du pourquoi et
comment la biodiversité est en train de changer, et une
intégration des connaissances de différentes disciplines. C'est
une tâche difficile, et pour le moment, les exemples d'une recherche
réussie ayant intégré pleinement plusieurs disciplines
sont rares. La perte de la biodiversité peut affecter les fonctions et
services des écosystèmes. Les fonctions d'un
écosystème montrent en général une relation
positive asymptotique avec l'augmentation de la biodiversité, ce qui
suggère que certaines espèces sont redondantes. Cependant, les
écosystèmes sont gérés et conservés pour des
fonctions multiples, qui nécessiteraient une plus grande
biodiversité (Hector et Bagchi, 2007).
L'agriculture ariégeoise est essentiellement le
pastoralisme mobile dont la technique, la pratique, le fonctionnement, le
rendement... s'excluent de la « norme » scientifique
documentée. Ce n'est pas pour autant une pratique « occulte »
mais un ensemble de pratiques dont la formulation arrêtée d'une
« norme technique » ne décrirait pas la campagne. On est loin
de la sagesse scientifique selon
2 Beaucoup de travail reste à faire dans la
caractérisation des habitats des différentes espèces
présentes et leur rôle dans le fonctionnement de
l'écosystème pour justifier la préservation
d'espèces en compétition ou conflit avec l'activité
humaine notamment le pastoralisme.
laquelle : « ce qui se conçoit bien
s'énonce clairement et les mots pour le dire arrivent aisément
» ; peut-être valable quand le troupeau est au siège de
l'exploitation, mais totalement invraisemblable quand il estive. On se retrouve
donc souvent tenté de se conformer à la science et de vouloir
résumer la technique d'élevage pastoral en Ariège à
sa conduite sur l'exploitation. Mais comment décrirait-on le
fonctionnement du tube digestif si la température interne n'était
pas 37°C ? Il faut bien tenir compte de l'estive qui représente
chaque année 3 mois de la vie d'une brebis et parfois jusqu'à 5
chez la vache. Comment détacher leurs interactions sur la suite du
processus ? Peut-être on peut, en modélisant, arriver à
normaliser l'élevage pastoral en Ariège. Mais il faudra que les
bêtes réagissent tout le temps comme dans le modèle, que
randonneurs et autres facteurs nouveaux (sangliers, vautours, marmottes...) ne
s'y invitent pas de temps à autre et que le berger puisse... non
seulement pouvoir intégrer la norme, mais se rendre compte que ça
marche ! Sinon la réaction du chien de Pavlov devient inattendue.
Cette étude s'inscrit dans une formation
orientée gestion du territoire pour une production durable. Ici, le
pastoralisme fonctionne depuis des lustres sans qu'officiellement, on est eu
vent de ses externalités négatives sur l'environnement puisque,
contrairement à ce qui se pratique ailleurs, peu de mécanisation
voire pas à certains endroits, peu de chimio-pratiques...
Néanmoins connaissant la phrase « magique » de la chaîne
trophique : « mange celui qui précède et est mangé
par celui qui suit » ; tout le monde trouvant de quoi manger signifiant :
milieu équilibré et fonctionnant normalement, on peut se dire
qu'introduire un prédateur dans un tel milieu nous indiquerait la
stabilité de son écosystème. Au nom du
développement durable quel pré-requis faudrait-il pour que le
social, l'économique ou l'environnemental ne se sente pas
déshérité ? Quelle démarche mettre en place pour
trouver la coopération des acteurs locaux indispensable au
développement durable ?
Le but de ce travail n'est pas de répondre à des
questions sur la durabilité de la réintroduction de l'ours dans
les Pyrénées ou de prendre position à propos de la
polémique ours. Mais il s'agit ici de souligner ce qui s'est
pratiqué jusqu'à présent comme technique pastorale en
Ariège et ce qui pourrait techniquement être une pierre
d'achoppement pour la mise en oeuvre des mesures d'accompagnement du plan ours
et donc de compromettre la cohabitation pastorale. Pour traiter ce sujet j'ai
choisi de garder à l'esprit les questions suivantes : Jusqu'à
présent, le pastoralisme étant sur des équilibres et
économies instables et fragiles; comment les nouvelles données
(mesures d'accompagnement du plan ours) pourront-elles améliorer ce
statut ? Quels dommages le pastoralisme traditionnel a créé ou
crée à l'environnement au sujet de la biodiversité ?
Quelle est la valeur de la biodiversité apportée par le
pastoralisme "moderne" proposé ? Quelles sont les fonctions
supplémentaires des écosystèmes montagnards avec les
nouvelles données et procédures ?
Chapitre 1 : Présentation générale
de l'étude
1.1 Contexte
Le processus de spécialisation que connaît le
monde aujourd'hui a entraîné une diminution du cheptel ovin
français depuis 25 ans. Cette diminution qui se poursuit affectant
toutefois, davantage le cheptel ovin allaitant que laitier n'est pas sans
conséquences sur la société, l'économie et
l'environnement. Ainsi, en 2005, le solde du commerce extérieur
français s'exprimait en valeur par un déficit de 455 millions
d'euros pour la seule filière ovine. La comparaison des données
économiques entre les exploitations ovines européennes
spécialisées avec un cheptel ovin allaitant, confirme, en valeur
moyenne, l'image que donne l'exploitation française : une exploitation
familiale avec des frais généraux et des amortissements
élevés, ce qui conduit à un revenu plus faible que celui
de ses principaux partenaires européens malgré des prix de vente
élevés et des charges spécifiques mesurées.
L'analyse des données françaises indique que le repli du cheptel
ovin sur les prairies naturelles, notamment les moins productives et les plus
défavorisées, s'inscrit dans un mouvement plus large (SIMON,
2007). L'élevage ovin allaitant compte des faiblesses ou des handicaps
:
- une image dévalorisée au sein de la profession
elle-même
- de très fortes exigences en travail
- une concurrence pour les surfaces disponibles et une forte
vulnérabilité aux grands prédateurs
- une très grande dépendance aux aides
- une inadéquation croissante entre les besoins
d'abattages et les zones de production - une absence de valorisation
élaborée des carcasses et un marché non segmenté
- une organisation insuffisante de la filière.
Mais cette production ne manque pas d'atouts :
- une plus faible mobilisation des capitaux que d'autres
productions
- une consommation de viande ovine qui reste soutenue
- une réelle capacité à s'adapter à
des situations très variées
- une grande richesse de son patrimoine
génétique
- une production économiquement viable lorsque les
conditions de production sont rationnelles
- une bonne image auprès du public.
Afin de rendre plus compréhensifs les résultats
de cette étude, je présenterai dans les paragraphes qui
suivent, le milieu naturel de l'Ariège, le système
d'élevage, son rôle et ses objectifs, ses moyens
de production, les considérations sociales, techniques et
spatiales, enfin, le contexte de la prédation par l'ours brun.
1.1.1 Le milieu naturel des Pyrénées
Dans le sud-ouest de l'Europe, les Pyrénées sont
un massif frontalier entre la France et l'Espagne. Le centre de cette
chaîne correspond à la partie montagneuse des trois
départements français (Hautes-Pyrénées,
Haute-Garonne et Ariège). Située à mi-chemin entre
l'Atlantique et la Méditerranée, la région
Midi-Pyrénées connaît des tendances climatiques
contrastées dont l'influence sur la flore et la faune n'est pas
négligeable. La végétation de type atlantico-montagnard
sur une grande partie, prend des caractéristiques plus
méditerranéennes sur la frange orientale de l'Ariège.
Prairies, forêts de hêtres et sapins en versant nord, de pins en
versant sud, landes, pelouses alpines, se succèdent en fonction de
l'altitude. Les riches sols de fond de vallées et les flancs de montagne
bien exposés ont donné lieu à l'agriculture intensive
tandis que les énormes prairies d'estives ont toujours été
exploitées par un pastoralisme divagant. Comme la majorité des
massifs, celui des Pyrénées se caractérise par un
héritage diversifié de conditions naturelles, économiques,
socio-culturelles, et démographiques (Buffière et Gibon,
1996).
1.1.2 Le milieu naturel de l'Ariège
Au Sud de Toulouse, l'Ariège3, terre de
plaines, de montagnes et de lacs, s'étend de la Garonne aux
Pyrénées (4 890 km2). D'après un paradoxe
pyrénéen, "la douceur est au Nord". De la Basse-Ariège,
tout au Nord, aux neiges d'Espagne et d'Andorre tout au Sud, on passe des
hivers doux et des étés chauds et secs à un climat rude,
froid, aux précipitations abondantes en parcourant tout un
éventail selon l'altitude et l'exposition4. La nature est
superbe, secrète, sauvage et l'ensoleillement généreux. La
diversité des paysages et l'authenticité de ses habitants font de
l'Ariège l'un des coins de France les plus pittoresques où les
découvertes ne manquent pas : grottes, villages, flore et faune
préservées. Les deux vallées du Couserans et de la Haute
Ariège correspondent à des zones de montagne du
département fortement marquées par la déprise agricole.
L'orientation principale des exploitations est l'élevage allaitant,
bovin ou ovin, conduit de façon extensive.
1.1.3 Le milieu culturel et humain de l'Ariège
La population de l'Ariège est certes faible et
décroissante5 (137.205 habitants en 1999) du fait
de l'exode rural massif (28 hab/km2), mais, a une bonne
structuration comparée aux autres départements (20%
âgés de moins de 19ans, 49% âgés de 20 à 59
ans et 31% âgés de 60 ans et
3
http://www.rfi.fr/lffr/articles/072/article_348.asp
4
http://www.departementsdefrance.fr/ariege/departement-ariege.html
5
http://www.departementsdefrance.fr/ariege/departement-ariege.html
plus6). De ces chiffres, il se dégage
clairement un réel potentiel de relève, reste que la motivation
accompagne cette jeunesse nombreuse. Les nombreuses fêtes et foires
calées au calendrier pastoral (la grande foire de Tarascon en Mai, les
nombreuses foires à bétail avant et après l'estive, la
fête de la transhumance en début Juin, et tous les rassemblement
le long des chemins de passage des troupeaux à la montée et la
descente de l'estive) témoignent de l'intérêt porté
à l'agriculture dans le département. Ainsi, l'Ariège comme
toute la chaîne pyrénéenne a été
occupée depuis très longtemps par l'homme dont les
activités agricoles ont façonné les habitudes, les
paysages et la culture pendant des millénaires7 (depuis le
néolithique).
1.1.4 Le milieu Agricole de l'Ariège
Avec une production d'environ 140 millions d'euros en 2003,
l'Ariège participe pour 3,7% à la
production agricole de la région
Midi-Pyrénées (4,1% pour les produits animaux ; 3,2% pour les
produits végétaux). Il compte aujourd'hui un peu moins de 3.000
exploitations agricoles, soit environ 5,2% du total régional. Le
résultat agricole moyen rapporté au nombre d'UTA8
s'est élevé en 2003 à 14.300 € contre 15.300 €
pour la région. L'élevage prédomine, avec une taille de
troupeaux, nettement supérieure à la moyenne régionale en
bovins viande, et nettement inférieure en ovins (DDAF de
l'Ariège, 2004). Tiraillés entre une logique économique
posée par des filières de production animale peu
concernées par les contraintes de mise en valeur du milieu et une
logique fondée sur l'utilisation maximale des ressources pastorales, les
éleveurs pyrénéens ont développé des
systèmes d'élevage diversifiés en fonction des
particularités locales de leur environnement économique et social
(Gibon, 1997).
1.1.4.1 Une gestion collective des ressources
Plus de 50% des unités pastorales (UP) sont
gérées collectivement par le biais de : groupement
pastoral (GP), Association Foncière Pastorale (AFP) et
les syndicats. Ainsi, 19.000 Unités Gros Bétail (UGB9)
constituées de 12.000 bovins, 40.000 ovins, 1.000 équins,
pâturent 75.000 ha pendant trois à cinq mois de l'année.
Elles sont gérées par 900 éleveurs (près de 40% de
tous les éleveurs de l'Ariège), 40 bergers, 191 UP et 66 GP
(SIG-Pyrénées, 2008).
1.1.4.2 Un intérêt patrimonial reconnu
En plus de leurs intérêts techniques et
économiques, les estives représentent un patrimoine
paysager, environnemental et architectural important. Presque
tous les pâturages d'altitude du territoire, recensés au cours
des inventaires sur le patrimoine naturel (ZNIEFF10,
ZICO11, etc.), avec
6 SIG-Pyrénées, 2008
7
http://www.chambres-junac.info/faune_flore_pyrenees/faune_flore_pyerenees.htm
8 UTA = unité de travail annuel (équivalent temps
complet)
9 1 UGB = 1 bovin = 7 ovins
10 Zone Naturelle d'Intérêt Ecologique
pour la Flore et la Faune
un fort intérêt écologique, reçoivent
90% (16.500 UGB) du bétail divagant de l'Ariège
(SIGPyrénées, 2008).
1.1.5 Rôle et objectifs du système
d'élevage
Nous ne saurons parler proprement des rôles et objectifs
ici sans rappeler quelques concepts essentiels qui les leurs confèrent
ou les renforcent.
1.1.5.1 Quelques définitions
La notion de développement durable est
apparue officiellement dans les discours politiques lors de la publication du
rapport Brundtland en 1987, préparé à la demande des
Nations Unies, en préalable de la Conférence de Rio de Janeiro en
1992 : « le développement durable est un
développement qui répond aux besoins du présent sans
compromettre la capacité des générations futures de
répondre à leurs propres besoins ». Cette notion a depuis
été appliquée à un grand nombre d'activités,
en particulier à l'agriculture et à l'élevage. Pour ce qui
nous concerne ici, La durabilité de l'élevage confère la
préservation de l'intégrité fonctionnelle des
systèmes socio-techniques. D'après Thompson (1997), il existe
deux grands types d'approches de la durabilité du développement :
l'approche « préservation des ressources » (resource
sufficiency) et l'approche « intégrité fonctionnelle »
(functionnal integrity). Bien sûr, la durabilité de
l'élevage en montagne exige en premier lieu que ses ressources soient
renouvelées, c'est-à-dire que les prairies pâturées
et les prés de fauche, principale ressource de l'élevage
pastoral, soient conservés en quantité et qualité et donc
ne s'enfrichent pas. Mais cette condition est à considérer en
réalité dans le cadre du renouvellement plus global des
systèmes d'élevage, au sens de la
régénération de leur capacité productive et de
leurs autres fonctions dans leur environnement. Il faut donc assurer avant tout
le renouvellement des facteurs de production : terre, travail et capital.
Au-delà de la prise en compte des trois dimensions de la
durabilité (écologique, sociale et économique), il faut
également s'intéresser à la cohérence du
système, assurer le renouvellement des relations, des interactions entre
les différents composants des systèmes d'élevage (Mottet,
2005).
L'Espace est à la fois facteur et
produit des activités agricoles (Deffontaines et Lardon, 1990). Il
existe donc une relation étroite entre la durabilité des
activités agricoles et celle des ressources naturelles qu'elles
utilisent ainsi que les paysages associés. La durabilité de
l'élevage en montagne relève donc à la fois de la
durabilité économique et sociale des exploitations et de la
durabilité écologique des ressources et des paysages.
11 Zone Importante pour la Conservation des Oiseaux
Le pastoralisme est l'utilisation du
pâturage extensif des parcours pour la production ; c'est l'un des
principaux systèmes de production de terres inhospitalières dans
le monde (Lasseur et Garde, 2007). C'est un système d'élevage
tout à fait original qui n'existe que par une étroite relation et
respect entre Hommes, Terres et Troupeaux. Il est aussi très
dépendant de variations climatiques. Il représente une forme
irremplaçable, économe en énergie fossile, pour le
développement et la gestion du milieu naturel. Selon la FAO (2002), le
pastoralisme n'est pas une relique, mais une activité moderne qui
s'intègre dans le contexte actuel de l'économie. Il a une
fonction socio- économique tout en maintenant une forme
d'activité dans des régions difficiles et en contribuant à
des productions.
Un parcours est d'abord un endroit où
le troupeau peut se déplacer relativement librement, même sans
aucune contrainte autre que la distance nécessaire à son
abreuvement12 (les animaux peuvent être totalement libre dans
un secteur vaste, bergerie ou non).
Est considérée comme pastorale
(selon la définition statistique de l'exploitation), une ferme utilisant
les pâturages collectifs (équivaut généralement
à la transhumance et l'utilisation des estives), si non, la
densité animale est inférieure à 2 (somme de UGB/ha
SAU13), et la portion de la Surface Toujours en Herbe (STH) moins
productive devrait atteindre 50% de la SAU, et la ferme devrait appartenir
à l'une des orientations suivantes : vache allaitante ou laitière
ou les deux, ovin/caprin, polyculture - élevage ou culture intensive -
élevage pastoral (Eychenne, 2003b et 2006).
La diversité biologique signifie la
variabilité des organismes vivants de toute origine y compris, entre
autres, les écosystèmes terrestres, marins et autres
écosystèmes aquatiques et les complexes écologiques dont
ils font partie. Cela comprend la diversité au sein des espèces
et entre espèces ainsi que celle des écosystèmes (CBD,
1992). On sait qu'il existe peu de données sur la répartition
géographique de la biodiversité, des ressources limitées
et le temps d'acquérir suffisamment de données. Ainsi, il est
nécessaire de faire des priorités avec les données
disponibles ou facilement collectables. Ainsi, différents substituts
pour la biodiversité ont été
utilisées/proposé pour fournir un raccourci pour l'identification
des zones importantes pour la conservation de la biodiversité (
http://www.ige.ch/faq/f1 2f.
shtm).
12 Mémento de l'Agronome, 2002
13 Surface Agricole Utile
Écosystème : Concept
défini par Tansley en 1935. Pour lui, il doit "tenir compte de facteurs
biotiques et en particulier de l'Homme". Une pâture peut détruire
un écosystème, mais elle favorise en même temps
l'émergence d'un nouvel écosystème
(écosystème pâturé), qui, le plus souvent doit
être entretenu ou conservé par l'intervention de l'homme, contre
les plantes nocives ou différents prédateurs. Même si
contrairement à Tansley, l'écosystème a souvent
été saisie dans un sens strictement naturaliste (Hubert, 2002 et
2004) aujourd'hui, il devrait être considérée par une
lecture topocentrique et non géométrique.
1.1.5.2 Elevage pastoral : Historique et évolutions
L'élevage pastoral s'appuie sur un groupe
d'itinéraires variable, en fonction de l'année, résultat
de distribution spatiale et temporelle d'une ressource fourragère
diversifiée et le plus souvent spontanée. La complexité de
l'activité de production est le résultat de l'existence et de
l'interaction des différents objectifs entre le gestionnaire
(éleveur, berger), la végétation et les animaux (Landais
et Balent, 1995 ; Hubert et al., 1993). Cet élevage
évolue de la forme sédentaire au nomadisme via la transhumance La
transhumance en Ariège implique la délocalisation de
l'élevage (vaches, moutons et chevaux) en haute montagne pour les mois
d'été. Ceci, non seulement parce que les fermes dans les plaines
sont trop petites pour supporter le troupeau toute l'année, mais aussi,
pour fumer les parcelles, entretenir les clôtures, constituer les stocks
de fourrage, faire le vide sanitaire des parcelles et des bergeries ou des
étables, et enfin, permettre à l'éleveur de souffler.
L'estivage débute fin Mai/début Juin, et se termine début
Octobre. Selon les études anthropologiques, ce système date
d'avant 1400 (Besche-Commenge, 2008). Jusque dans les années 1970 la
transhumance concernait principalement les vaches laitières, et la
fabrication du fromage était une activité importante. Dans
certaines régions, jusqu'à ce siècle, presque tous les
membres d'une famille décampaient en haute montagne avec leurs vaches,
vivant dans des cabanes rudimentaires faites de pierres. Ce système, qui
a évolué au Moyen Age, a duré dans le 20ème
siècle, mais a échoué sous la pression de
l'industrialisation concomitante avec le dépeuplement des campagnes
(B.Besche-Commenge, 2008 ; Fédération pastorale, 2007).
1.1.5.3 Rôle et objectifs du pastoralisme
L'élevage contribue, à travers le
pâturage, à la dynamique des territoires par le maintien des
milieux ouverts, intégrés dans une mosaïque associant zones
forestières cultivées. Cette contribution doit être
conciliée avec une dynamique de l'élevage permettant le maintien
de ses cohérences propres et sa durabilité comme système
d'élevage (Lasseur et Garde, 2007). Les parcours exploités par
les pasteurs ne peuvent le plus souvent, pas être utilisés par
l'agriculture conventionnelle. Ces terres offrent peu d'autres options que
l'élevage mobile pour leur utilisation efficace et durable.
Néanmoins, malgré sa longue histoire, sa réputation a
été peu flatteuse, ses praticiens marginalisés par les
cultivateurs sédentaires et les citadins (Roger Blench, 2001). Dans
certains secteurs de la
zone de montagne ariégeoise, c'est l'unique
façon de valoriser la terre. De nombreux auteurs ont mentionné
l'importance du pastoralisme dans la conservation de la nature, la production
de la biodiversité des espaces, l'entretien des plantes
herbacées, des milieux ouverts et des paysages, la prévention des
risques naturels, la gestion des sols et des effluents, la préservation
du patrimoine culturel, la limitation de l'exode rural, la
multifonctionnalité et de nombreuses externalités positives
(Castro et al., 2004 ; Huyghe et Lemaire, 2002; Hervieu, 2002 ;
Lasseur et Garde, 2007, Janet C., 2007; Hubert, 2002 ; Léger 1999). Tous
sont tout aussi conscients du double rôle de l'agriculture en montagne :
production alimentaire et externalités positives, sans que la fonction
proprement agricole doive se plier aux réquisitions de l'autre.
Toutefois, l'analyse de l'impact14 de l'élevage sur les
terres de parcours et donc sur le milieu ou l'environnement n'est pas
aisée. Cette analyse devrait s'articuler autour des grands
"thèmes d'impact" que sont l'occupation des sols, l'alimentation,
l'abreuvement, les déplacements, la fertilité, les productions
animales, la conduite et l'exploitation, et les politiques d'élevage.
Ces thèmes interagissent, sont interdépendants et
dépendent d'autres thèmes extérieurs à
l'élevage (Toutain et Carrière, 1995).
L'occupation des sols par les activités
d'élevage peut conduire à des impacts positifs (de type socio-
économique, et écologique), des impacts négatifs
(dégradation des terres de parcours, déforestation, perte de
biodiversité15). L'alimentation des herbivores domestiques
repose sur le prélèvement de matières
végétales ; cet acte élémentaire peut conduire
à des effets positifs sur l'environnement, lorsque le couvert
végétal est jugé "indésirable" (prévention
des incendies, lutte contre l'embroussaillement, dynamique des espèces
sous l'effet de la pâture, dissémination des semences par les
herbivores domestiques). Ce même prélèvement devient un
impact négatif lorsque son intensité remet en cause les
potentialités de renouvellement du couvert végétal : soit
directement en modifiant la composition, la structure ou la productivité
des peuplements végétaux ou en influençant leur dynamique
; soit indirectement en agissant sur les facteurs de la production primaire que
sont l'eau, le sol et l'air, ou encore par interaction passive avec les autres
consommateurs primaires. En ce qui concerne l'abreuvement, il est certain que
l'aménagement hydraulique du territoire, dans les zones sèches, a
eu d'importantes conséquences sur l'environnement sanitaire, social et
économique des populations humaines concernées (Toutain et
14 Cependant, on ne peut juger du caractère positif ou
négatif d'un impact sans faire référence à un point
de vue précis ou à un objectif. Un naturaliste, attaché
à la protection des espèces sauvages, aura une
appréciation d'un impact différente de celui de l'agronome,
cherchant à optimiser un système de production agricole.
15 A la suite de l'ouverture, pour
l'élevage, des zones à trypanosomoses en Afrique par exemple.
Ici, contrairement à la réintroduction de l'ours dans les
Pyrénées où l'ours vient récupérer une
partie du territoire dévolue à l'élevage, c'est
l'élevage qui récupère le territoire de la
tsé-tsé en tentant de l'exterminer.
Carrière, 1995). Dans de nombreux cas, les points d'eau
modernes, à vocation pastorale, sont récupérés, au
bout d'un certain temps, comme bases initiales d'implantation humaine, qui
bénéficient alors de ressources en eau de qualité. Par
contre, d'après Nicholson (1985) cité par Toutain et
Carrière (1995), les activités d'élevage polluent les
ressources en eau de surface par eutrophisation des mares temporaires ou
permanentes, pollution chimique, pollution microbienne ou parasitaire par des
agents pathogènes. Les impacts indirects envisagés ici portent
sur : la dégradation des sites d'abreuvement, les conséquences de
l'utilisation des sites d'abreuvement sur la flore et la faune
inféodées aux milieux humides ou aquatiques.
Quant aux déplacements, le piétinement favorise
: le tallage des graminées, la dissémination de nombreuses
plantes par fragmentation des souches ou des rhizomes, la dispersion des
semences (par adhésion sur le pelage ou sous les sabots) et leur
germination (par rupture des téguments pour les graines dures),
l'incorporation de la matière organique au sol, par fragmentation. A
contrario, le piétinement réduit : la biomasse sur pied en
brisant les chaumes desséchées, ce qui augmente la surface de sol
dénudé et favorise l'érosion, la photosynthèse des
plantes en déchirant et en écrasant les tissus foliaires, les
stocks semenciers des sols, par concassage des graines. Toutefois, la
mobilité des troupeaux est exploitée pour la commercialisation
des produits de l'élevage dans certains pays et constitue un facteur de
gestion et de conservation des parcours (Toutain et Carrière, op.
cit.). Concernant le transit des matières végétales
par le tube digestif des herbivores domestiques, il joue un rôle
important sur le cycle du carbone et des éléments trophiques, en
créant un "circuit court" pour le recyclage de ces
éléments dans le sol (Gachon et al., 1979 cités
par Toutain et Carrière, op. cit.). La fragmentation
opérée par la mastication des aliments est
complétée par la fermentation microbienne dont l'intensité
est nettement plus élevée que celle qui intervient au niveau du
sol (Landais et al., 1990). Les effets du pâturage nocturne, en
dehors des conséquences positives qu'il peut avoir sur la production
animale (Joblin, 1960 ; King, 1983 cités par Toutain et Carrière,
op. cit.), du fait de la diminution des dépenses
énergétiques liées à la thermorégulation, de
la plus grande teneur en eau des plantes pendant la nuit, et de l'accroissement
de la durée totale d'ingestion ne sont pas précisément
connues.
1.1.6 L'élevage des herbivores valorise les parcours
: enjeux et difficultés autour des parcours
L'article « La tragédie des communs »,
écrit par Garret Hardin en 1968, procure un cadre théorique dans
un discours déjà expérimenté par des hommes
politiques, des universitaires et des acteurs du développement. Cette
théorie souligne dans une façon malthusienne,
l'irrationalité économique du pastoralisme. Celui-ci ne serait
qu'une lutte pour les ressources et un pillage de l'environnement. L'argument
est qu'il est sans intérêt pour un agriculteur de limiter la
croissance de son troupeau sur
des pâturages où d'autres agriculteurs pourraient
le faire à sa place. De nombreux pays ont des politiques de
sédentarisation qui découlent tant sur des considérations
d'ordre politique qu'au sujet du bien être de ceux qu'ils souhaitent
installer. Toutefois, les gouvernements nationaux sont souvent hostiles aux
pasteurs (Nori, 2006).
Dans les zones de Causses ou de montagne et dans certaines
zones de coteaux, les cheptels ovin et bovin constituent un des meilleurs
atouts de valorisation de ces zones difficiles, voire le seul. A ce titre, le
maintien de l'élevage et des hommes sur la majeure partie du territoire
est essentiel pour conserver une activité économique structurante
du milieu rural. Mais, sous l'effet combiné de la démographie, de
la politique agricole commune et des conditions de travail difficiles, le
nombre d'éleveurs diminue, les cheptels s'agrandissent, le besoin de
nouvelles surfaces et la volonté d'abaisser les coûts de
production poussent à une « reconquête des parcours »,
disponibles et peu onéreux. Les années 90 voient ensuite le
développement de nouveaux enjeux du pâturage des parcours
liés à leurs contributions environnementales et
socio-territoriale : entretien du paysage, maintien de la biodiversité,
action de défense contre les incendies, faible consommation
d'intrants... (Léger, 1999; Loiseau et al., 1998; Dumont et Farruggia,
2007).
1.1.6.1 Menaces biophysiques sur les terres de pâture
Les éleveurs reconnaissent la nécessité
d'équilibrer l'augmentation de la productivité en station avec
les conditions des ressources naturelles. Cela implique la connaissance des
types de pâturages, la compréhension de la distribution de la
ressource et les modalités de pâturage, la gestion du niveau de la
réserve se basant sur les seuils de constitution de réserves
avant la destruction, la production fourragère et la capacité de
charge. Les éleveurs travaillent sur la base d'un temps variable au jour
le jour. Toutefois, le changement climatique est susceptible de poser un
défi à long terme pour le secteur pastoral (Robertson, 2002). Par
conséquent, les ressources pastorales sont
hétérogènes et dispersées dans l'espace
(fragmentées), liées aux saisons (temporaires),
différentes dans le temps (variables) et soumises au climat
irrégulier (imprévisibles). Globalement la productivité
nette des parcours est faible. Les populations animales et
végétales qu'ils peuvent soutenir fluctuent de manière
imprévisible. Ces facteurs bio-physiques affectent
l'hétérogénéité spatiale et la
variabilité temporelle des ressources. L'accès aux
différents écosystèmes pâturables dans la même
région permet la consommation des ressources entre les habitats
écologiques complémentaires et est donc vital pour assurer la
continuité de la productivité de l'élevage (Nori, 2006 ;
Garde, et al., 2007).
1.1.6.2 Elevage, biodiversité, qualité des
produits et services des écosystèmes
Malgré l'absence de justification scientifique absolue,
la préservation de la biodiversité est devenue une
préoccupation majeure de la société (Bornard et
al., 2004). La gestion de la biodiversité est d'un enjeu majeur
pour les exploitations agricoles et surtout pastorales du fait de l'ignorance
sur les
valeurs bromatologiques des différentes espèces
consommées et leurs rôles dans la satisfaction des besoins de
l'animal (entretien et production). Elle est de plus en plus
considérée non seulement comme un résultat de la gestion
parcellaire, mais également vis-à-vis des services qu'elle
fournit à l'activité d'élevage (Clergue et al.,
2005) : qualité des produits, valeur nutritive des fourrages,
adaptabilité d'utilisation des prairies, etc. Sa préservation est
maintenant explicitement prise en compte dans l'attribution de la nouvelle
Prime Herbagère Agro-Environnement (PHAE 2).
Dans les systèmes herbagers, de plus en plus de travaux
s'intéressent aux services rendus à l'élevage par la
diversité biologique, tant à l'échelle de la parcelle
qu'à celle de la totalité de l'exploitation (Swift et
al., 2004). Même si un bon niveau de diversité floristique
est incompatible avec une forte productivité à l'échelle
de la parcelle (Plantureux et al., 2005), les prairies
diversifiées présenteraient une plus grande stabilité de
leur valeur nutritive sur l'ensemble de la saison de pâturage que les
prairies peu diversifiées en raison de l'étalement des stades
phénologiques des espèces (Gibon et al., 1997). Par
ailleurs, différents travaux ont montré que la diversité
végétale stimulait l'ingestion des animaux au pâturage
(Meuret et Bruchou, 1994 ; Cortes et al., 2006). Enfin, la
diversité entre les parcelles est considérée comme un
atout à l'échelle de l'exploitation car elle offre plus de
souplesse, en particulier face aux aléas climatiques (Schlapfer et
al., 2002 ; Papy, 1999 et 2004 ; Perrot et Landais, 1993). L'action du
pâturage des herbivores sur la structure et la biodiversité des
prairies est le plus souvent liée à leur consommation. En
sélectionnant les espèces les plus appétibles, les animaux
exercent différentes pressions de défoliation sur les
espèces, qui pourrait menacer la survie de certains. Toutefois, ils
limitent aussi le développement des espèces très
compétitives pour la lumière et les éléments
nutritifs, ce qui permet la coexistence d'un plus grand nombre
d'espèces. De par leur piétinement, ils donnent aussi une
structure aux communautés végétales en créant des
ouvertures qui peuvent être peuplées par de nouvelles
espèces. Enfin, ils jouent un rôle dans la diffusion des semences
de certaines espèces (Fischer et al., 1996).
Les agneaux norvégiens sont généralement
abattus directement après avoir été conduits dans des
alpages naturels et la viande est donc considérée comme un
produit biologique. De nombreux consommateurs croient également que les
agneaux provenant de certaines zones sont supérieurs à d'autres
types d'agneaux. En montagne, les agneaux parcourent de longues distances et
leur conformation corporelle pourrait être différentes de celles
des agneaux confinés en cages dans les vallées. On ne sait pas si
les facteurs mentionnés affectent la qualité et la saveur de la
viande. Des expériences menées en Australie, Islande,
Grèce, Italie, Nouvelle-Zélande et Royaume-Uni ont fourni peu de
documents à ce sujet mais, témoigné d'effets significatifs
du type de pâturage et de la complémentation sur la
qualité, y compris la saveur de l'agneau (Adnoy T. et al.,
2005). La nature
des fourrages pourrait intervenir directement sur la
qualité du produit grâce à des molécules
présentes dans les plantes aromatiques (terpènes,
Sesquiterpenes), qu'on retrouve dans le fromage (Viallon et al.
1999).
Il est important de protéger les valeurs naturelles des
parcours en élevage pastoral afin de maintenir les principaux services
fournis par les écosystèmes, tels que la santé du sol et
de la végétation, la fourniture d'habitat, le captage de l'eau et
la filtration, la séquestration du carbone, les paysages... La
protection insuffisante de ces services fournis par les
écosystèmes ne garantira pas un pastoralisme productif
(Robertson, 2002).
1.1.6.3 Intensité du pâturage, fertilité des
sols et réactions des plantes
Dans les alpages, il est difficile de distinguer gradients de
nutriments et intensité de pâturage, les alpages les plus fertiles
étant aussi les plus pâturés (Gaucherand, 2005). Dans les
environnements « stressants » les limitations en eau ou en nutriments
sélectionnent les stratégies conservatrices (faible Surface
Spécifique des Feuilles (SSF) et Teneur en Matière Sèche
des Feuilles (TMSF), élevée) associées à une faible
appétence pour les animaux du fait de la résistance des feuilles
et de leur faible valeur nutritive. A l'opposé, ce sont les
stratégies exploitatrices (forte SSF et TMSF élevée) qui
sont favorisées dans les environnements riches en nutriments. Cependant
ces traits sont contrôlés par la fertilité du sol et ne
correspondent pas à une stratégie particulière des
espèces vis à vis du pâturage. L'interaction entre
intensité de pâturage et productivité du site gêne
l'identification des traits de réponse au broutage (Landsberg et
al., 1999 ; Pakeman, 2004 ; cités par Gaucherand, 2005). Certains
traits ressortent cependant de différentes études (Díaz
et al., 2001 ; McIntyre et Lavorel, 2001 ; cités par
Gaucherand, 2005) notamment des traits permettant aux espèces
d'éviter le broutage (port en rosette, petite taille, petites feuilles,
phénologie décalée) ou de le supporter (stratégie
rudérale, forme de vie annuelle ou, dans les milieux productifs, des
feuilles fines et une SSF élevée indiquant une vitesse de
croissance élevée). L'identification de traits ou de syndromes
spécifiquement liés au pâturage reste cependant difficile
car il existe de multiples stratégies d'évitement reposant sur
des combinaisons de traits différentes. En outre, d'autres facteurs
comme la fertilité, mais aussi la sécheresse ou la
compétition par exemple, peuvent s'avérer plus importants que la
résistance au pâturage pour la survie de la plante et de ce fait,
des traits liés aux conditions de milieu peuvent être
favorisés même s'ils sont considérés
défavorables à la plante en ce qui concerne strictement sa
résistance au pâturage (Briske 1999 ; cité par Gaucherand,
2005).
1.1.6.4 L'impact social sur le comportement des herbivores au
pâturage
Les herbivores se caractérisent entre autres par leur
grégarisme, qui est l'une des principales raisons de leur
domestication (Lécrivain, 2004). Chez les ongulés domestiques, le
regroupement social influence fortement le comportement au pâturage.
Les relations sociales au sein d'un groupe
influencent les stratégies individuelles pour les choix
alimentaires, l'exploitation des sites d'alimentation et la distribution
spatiale sur les parcours. La vie en groupe donne aux jeunes animaux les
modèles sociaux ; en premier lieu sa mère puis ses pairs et les
autres membres du groupe, ce qui contribue à apprendre les
préférences alimentaires suffisantes et les aversions. Cette
facilitation sociale est plus efficace que l'apprentissage individuel par
essai-erreur. La vie en groupe est également considérée
avantageuse pour les animaux, car ils peuvent utiliser les sites d'alimentation
découverts par les autres membres du groupe. La vie en groupe chez les
herbivores est une véritable stratégie contre la
prédation. Jarman (1974); cité par Dumont et Boissy (1999). La
structure sociale régule les relations qu'entretiennent les animaux
entre eux et assure le fonctionnement du groupe, la reproduction et
l'élevage des jeunes (Bouissou, 1992 ; cité par Dumont et Boissy,
op. cit.). A contrario, elle accroît la concurrence
alimentaire en raison de la diminution rapide de la disponibilité de la
ressource, affectant le plus les animaux affaiblis. Pacager en groupe peut
aussi forcer les individus à abandonner des sites qu'ils estiment
être de bonne qualité tout simplement parce que tous les autres
membres du groupe quittent ces sites. Arnold et Dudzinski (1978) cités
par Dumont et Boissy (1999), indiquent que des troupeaux d'ovins et de bovins
sont divisés en plusieurs sous-unités quand la ressource
disponible est faible.
1.1.6.5 Utilisation de la zone de pâture en fonction du
savoir-faire du berger, de la physiologie,
du comportement de l'animal, de la topographie et de la
physiologie des plantes
Parce qu'un régime alimentaire est constitué
lentement sur parcours, il est essentiel de prévoir un temps plus long
de pâturage. De 6 à 8 h sur les prairies ou les bons
pâturages, il atteint 8 à 12 h, sur les parcours et les
pâturages de montagne (Garde et al., 2006). Ce temps varie selon
la saison, les conditions météorologiques, le type de milieu,
l'état des animaux. Ce temps est divisé en séquences de
consommation aussi nombreuses que le milieu est pauvre et que les animaux
doivent changer très souvent le lieu où ils peuvent chômer
(Agreil et al., 2002 et 2004). Sur des journées chaudes
d'été, le temps de pâturage est décalé
à la nuit et la rumination dans la journée. Ceci ne signifie pas
outre mesure que les bêtes ne doivent pas être contraintes ou
qu'elles ne le sont pas en système de garde lâche. D'après
Landais et Deffontaines (1988), les bergers prévoient des circuits,
observent, analysent les situations et adaptent leurs déroulements de
façon à satisfaire au mieux les besoins du troupeau en exploitant
au mieux, de leur point de vue, les ressources pastorales sur
parcours16. Ils
16 Tu vois ces bêtes là tout au fond
de la dépression ; les premières isolées ? On pari que ce
sont les bêtes à G. en gros avec quelques unes de F. quand tu les
envoie ici chaque année c'est les mêmes qui y sont à ce
rythme ! Moi, ma gestion de la journée, à peu près
à cette heure si quand le temps est comme ça il ne faut pas que
les bêtes aient dépassé cette dépression et
allé de l'autre côté ; là bas, ça tire dans
le bois et les y ramasser il faut y arriver parce que là on ne sait pas
ce qu'elles y cherchent mais elles veulent bien y être même si
elles y marchent plus qu'elles n'y mangent. Donc à mon goût la
journée n'a pas été bien gérée et ça
c'est quelques minutes de retard de ce matin ; elles ont pris l'avance sur nous
(Conversation avec un berger sur son estive, Juin, 2008).
sont bien conscients de la gestion du milieu pour
éviter l'enfrichement des zones délaissées ou non
fréquemment fréquentées par leurs troupeaux. Concernant le
pâturage libre, Balent (1987), a montré qu'il freine
l'enfrichement des parcours de demie saison, mais ne l'empêche pas, en
raison des particularités du comportement des animaux en pâture
libre, qui concentrent leurs activités sur les zones les plus favorables
et délaissent les autres.
Les besoins alimentaires des animaux varient en fonction de
leur état physiologique. Ils sont évalués sur une
séquence de pâturage. Quand le type de végétation
d'un parc est connu, et par conséquent la pousse de l'herbe
caractérisée, l'étalement de la production et la
capacité de maintien sur pied, l'éleveur décide des
saisons d'utilisation, de la charge, de niveaux de valorisation et
d'intensités de pâturage (Garde et al., 2006). Les
comportements des ovins au pâturage sont propres à leur
espèce, liés à leur biologie, mais aussi à leur
contexte d'élevage, à leur expérience, au relief, à
la structure et la nature de la végétation et de la configuration
du terrain (Lécrivain, op. cit.). Sur le parcours en
général, les choix sont guidés par la morphologie des
plantes : les vaches préfèrent les feuilles que les tiges, les
organes jeunes et verts que les sénescents, durcis, lignifiés ou
même jaunes Garde, op. cit.). C'est pourquoi on constate une
assez grande variabilité des réponses comportementales.
Néanmoins, il existe des comportements typiques qui s'expriment
spontanément et régulièrement, y compris dans des
situations différentes. Ce sont ces comportements que les bergers
connaissent, prennent en compte et sur lesquels ils s'appuient pour conduire
leur troupeau quand ils gardent17. Ce sont des attitudes
individuelles des brebis, des rythmes, des comportements collectifs du troupeau
vis-à-vis des éléments du milieu ou des
congénères qui s'érigent en principes de base pour
conduire un troupeau (Lécrivain, op. cit.). L'ajustement de ces
composantes animales, végétales et du milieu forme le calendrier
de pâturage. Ce calendrier peut être envisagé comme un
enchaînement de séquences, et la séquence comme une suite
de parcs. Face aux aléas climatiques, l'éleveur prévoit
des sécurités par séquence ; elles donnent de la souplesse
dans l'exploitation des surfaces (Garde, op. cit.).
On confond trop souvent le gardiennage d'un troupeau et sa
surveillance. Or le premier remplit une fonction d'alimentation des
troupeaux, et le deuxième une fonction de protection. Le
gardiennage requiert la compétence du berger18.
Contrairement à ce que l'on peut imaginer, le travail de berger
17 Quand tu fais la virée comme et quand il
faut, tu remontes à la cabane et ne redescends que de temps en temps
voir si rien n'a perturbé l'orientation. Sinon tu peux être
tranquille qu'elles repassent par la cabane en fin de journée pour
coucher sur la crête en dessus de nous (Conversation avec un berger sur
son estive, Juin, 2008).
18 passionné, savoir « lire » un
territoire dédié au pâturage, avoir la sympathie pour les
brebis, la ponctualité pour sortir régulièrement le
troupeau, le calme pour le conduire sans stress, la patience pour le faire
manger au mieux à sa faim et à
n'est ni facile, ni tranquille, il communique de
manière subtile avec les brebis (Lécrivain, 2004). La
surveillance ne nécessite pas de savoir-faire particulier. La pratique
du gardiennage permet de valoriser un milieu complexe et
hétérogène tout en assurant une alimentation
complète aux animaux, par la réalisation de chaque circuit
quotidien et l'enchaînement des circuits tout au long d'une
séquence de pâturage. Il n'existe pas de «
pratiques/techniques » de garde, mais une variété de moyens
pour guider les animaux sur la base de critères comme le type de
ressources disponibles, les formes de relief, la capacité des animaux
à explorer un milieu plus ou moins boisé ou embroussaillé,
la visibilité aussi bien pour le berger que pour le chien de protection,
l'état physiologique des animaux, l'initiation des animaux, les niveaux
d'état corporel attendus par l'éleveur à la descente de
l'estive, le respect des contraintes liées à d'autres
utilisateurs... (Garde et al., 2006 ; Meuret, 1995 ; Garde et
al., 2007). Selon Landais et Deffontaines (1988), les bergers
possèdent de nombreuses connaissances relatives au comportement des
ovins dans différents contextes de pâturage, qu'ils mobilisent
sans cesse au cours de chaque circuit de pâturage. Grâce à
ce savoir-faire acquis, ils valorisent des espaces peu productifs, souvent
embroussaillés, marqués par une topographie complexe et difficile
à clôturer. C'est sans doute dans ce contexte que Lécrivain
(op. cit.) stipule que, puisque les pratiques de gardes sont
adaptées aux caractéristiques particulières des
différents types de milieu, rares sont les jeunes bergers qui
s'aventurent sans chercher à recevoir un maximum de conseils
auprès d'autres bergers expérimentés. Ces savoirs sont
basés sur une connaissance affinée du territoire et des animaux
qu'ils géreront19, savoirs acquis le plus
généralement de manière empirique.
son rythme en tenant compte de la composition du troupeau et
de l'expérience des animaux, et pour éduquer un chien pour la
garde, l'attention et la vigilance, l'observation, l'écoute, l'analyse
et une capacité de synthèse, la curiosité, le courage,
l'aptitude à adapter les circuits de garde face aux changements.
19 Tu vois ces bêtes là tout au fond
de la dépression ; les premières isolées ? On pari que ce
sont les bêtes à G. en gros avec quelques unes de F. quand tu les
envoie ici chaque année c'est les mêmes qui y sont à ce
rythme ! (...) Moi, ma gestion de la journée, à peu près
à cette heure si, quand le temps est comme ça, il ne faut pas que
les bêtes aient dépassé cette dépression et
allé de l'autre côté ; (...). On attend encore trois quarts
d'heure ou un heure et elles seront là où il faut appliquer la
virée (...). Ma gestion des bêtes, de la montagne et de l'estive
si tu veux, c'est qu'après avoir passé trois semaines à un
mois ici (bas de la montagne), que je monte en moyenne montagne avec les
bêtes bien soignées (pas de boiterie, pas d'abcès, pas de
plaies, pas trop de maigres...) car un peu plus haut la garde commence à
être un peu plus lâche et il ne faut pas qu'il y ait un facteur qui
perturbe le comportement et le fonctionnement naturel habituel des bêtes.
Plus on monte, plus le troupeau éclate et chaque escabot se constitue
jusqu'à ce que tout en haut (les rassembler toutes devienne vraiment une
nécessité d'intervention). Là haut il faut connaître
le comportement de chaque escabot par coeur pour arriver à les
contrôler toutes (Conversation avec un berger sur son estive. Juin,
2008).
1.1.6.6 Les menaces sociales et économiques sur les terres
de parcours
Les parcours sont continuellement en mutation rapide ce qui
affecte de nombreux pasteurs et
communautés locales. Le manque d'une population
permanente dans les zones pastorales conduit le plus souvent à la
réduction du nombre de services issus de l'élevage. Certaines
terres pastorales ne sont pas d'une taille suffisante et n'ont pas une
capacité de charge satisfaisante ou l'infrastructure nécessaire
pour une entreprise rentable. Les évolutions macro-économiques
récentes, le développement de résidences secondaires, et
les nouvelles formes de propriété foncière individuelle
rendent difficile l'utilisation de zones de pâturage pour les
agriculteurs (Anonyme, 2007b). Le problème majeur qui concerne tous les
groupes pastoraux est lié à leurs droits de
propriété foncière et l'influence croissante des groupes
non-pastoraux et d'intérêt externes sur les ressources (Nori, 2006
; Garde, et al., 2007). La fragmentation de la propriété
rend difficile l'accès à la terre. Les conventions
multi-annuelles de pâturage et les accords verbaux entre agriculteurs et
propriétaires ne garantissent pas la durabilité de l'exploitation
nécessaire à l'installation de clôtures et
équipements pastoraux coûteux (Anonyme, 2007a). En outre, les
relations avec d'autres utilisateurs (chasseurs, randonneurs, motos...) sont
parfois des relations très conflictuelles générant des
actes de vandalisme (destruction de clôtures, vols...).
1.1.7 Moyens de production, mode de conduite, produits,
considérations sociales, techniques et spatiales
La principale composante des parcours : l'herbe, existe pour
être pâturée, et au fil du temps elle
s'adapte avec, à la fois l'intensité et la
qualité du pâturage. Les conditions agro-écologiques et les
caractéristiques de la ressource pastorale sont variables et
imprévisibles. Ceci est déterminant dans la constitution des
moyens socio-économiques d'aide aux communautés
pastorales20. L'histoire évolutive à long terme des
écosystèmes prairiaux ainsi que l'histoire des derniers
siècles sont donc essentielles pour la compréhension de sa
réponse à la fois à la gestion et à de nouvelles
pressions sur elle. Les pasteurs traditionnels considèrent largement les
pâturages et les pluies comme un acquis et adaptent leur système
social et d'élevage pour tirer le meilleur profit possible. Ceci ne
saurait cependant être considéré comme une exploitation
minière du fait qu'ils sont conscients qu'il s'agit de leur profession
et qu'ils sont soucieux de transmettre ce patrimoine à leur
progéniture.
Parmi les 5 grandes zones de production d'herbivores de
France, la région Midi-Pyrénées se place largement en
tête avec 856.000 ovins ; 1,4 millions de bovins ; 37.930 chevaux. Pour
l'année 2000, le bétail pâturant du massif des
Pyrénées a été constitué par 60% des
exploitations (plus de 6.000 exploitations pastorales21) et le total
des surfaces fourragères, plus de 80% de la SAU individuelle.
20
http://www.landcoalition.org/pdf/pol_pastoral_dftf.pdf
21 Eychenne, 2006
Concernant le pastoralisme, 575.000 ha (un tiers de la
superficie du massif) ont été utilisés pour des estives
collectives et individuelles. Pour ces exploitations, les races locales sont
les plus utilisées. Chez les bovins, la Gasconne ; race rustique
prédomine (Gibon, 1999), ajoutée à quelques vaches de race
Casta ; l'usage de l'insémination artificielle (IA) est rare. Certains
élevages continuent de fonctionner sans taureau, comme il était
courant dans le passé. Dans certains cas, l'accouplement a lieu
uniquement pendant l'estivage dans le troupeau collectif avec taureau. Le
calendrier de mise bas oppose le vêlage de printemps (Mars ou Avril),
classique dans la région, au vêlage précoce (début
Janvier à mi-Février). Un premier objectif est de situer les
saillies à une période où la pousse de l'herbe permet aux
vaches de récupérer du poids au pâturage après un
hivernage qui a souvent tiré sur leurs réserves corporelles, ce
qui améliorera les résultats de fertilité. II s'agit
également d'obtenir des vêlages suffisamment précoces pour
pouvoir envoyer toutes les bêtes à l'estive dès le mois de
Juin (Gibon, op. cit.). Ainsi, dans la continuité des bovins,
l'utilisation de deux races locales ovines (Castillonnaise et Tarasconnaise),
de deux races équines (Mérens et Castillonnais) et du porc de
race Gascon respecte la Charte du Bureau des Ressources
Génétiques (BRG) dont l'un des objectifs est de maintenir in situ
l'exploitation et l'utilisation des races locales pour préserver le
potentiel génétique et les conditions dans lesquelles il a
été créé.
En fonction de divers critères, l'élevage de
montagne est constitué de plusieurs sous-systèmes ainsi que de
nombreux produits. Le "Broutard" reste le principal mode de gestion et de vente
d'animaux jeunes. Ceci est la résultante de différents objectifs
: économiser la ressource, réduire les charges de travail... En
raison de "l'économie" et de "l'autonomie", la gestion du troupeau dans
les années 70 était basée sur l'utilisation maximale des
atouts environnementaux. L'estive conditionne le fonctionnement de
l'exploitation de montagne parce qu'il fournit toute la ration alimentaire
pendant au moins trois mois de l'année. Le modèle de gestion de
l'estive est celui de l'agro-système qui exporte des
éléments à travers la production animale (viande, lait) et
transfert d'autres par les déjections.
En ce qui concerne la garde du troupeau, il y a
schématiquement, le gardiennage serré (également
appelé « bâton planté ») qui consiste à
tenir le troupeau regroupé sur des reliefs favorables (concaves ou
plats) en s'appuyant sur l'action des chiens de conduite (Garde et
al., 2006). Ceci permet de fractionner le pâturage dans un espace
précis afin de le rationner, de conduire le troupeau avec un chargement
instantané élevé (Lécrivain, 2004). L'action plus
impérative du berger en gardiennage serré peut par exemple
être, pousser le troupeau à mieux consommer une ressource
abondante non encore pâturée, fine ou grossière en
début d'été, si le relief s'y prête, aux moments
favorables de la journée (Garde et al., 2006). Le gardiennage
lâche consiste, le berger étant présent,
à laisser plus d'espace de déploiement au
troupeau afin qu'il se constitue une ration complète sur un espace plus
difficile, par son embroussaillement, son relief irrégulier, ou son
faible recouvrement herbacé ; la priorité du berger est alors de
conserver l'unité du troupeau, même dispersé, et
d'éviter qu'il « se coupe ». C'est par exemple la conduite la
plus adaptée en fin d'été, sur une ressource
dégradée par la période sèche estivale (Garde,
op. cit.). Ces résultats complètent ceux de
Lécrivain (op. cit.) pour qui le travail du berger en
gardiennage lâche consiste à donner une orientation au troupeau,
puis à le laisser choisir son « biais » et en acceptant, dans
une certaine mesure, les orientations prises par le troupeau. Avec l'aide de
son chien le berger contrôle seulement les limites qu'il juge
nécessaire de ne pas dépasser. Les limites de l'espace
prévu pour un circuit sont donc souples. En pratiquant ainsi, le berger
contrôle la localisation de l'impact du pâturage non pas à
l'échelle de la journée mais à l'échelle de
plusieurs journées de pâturage ou de plusieurs circuits. Il y a
des avantages et des inconvénients à cette pratique :
inconvénients puisque les bêtes peuvent ne pas être
là où l'on voudrait qu'elles soient ; avantages car elles
acquièrent une forte autonomie. A l'inverse de ce système
éclaté, un récent bilan scientifique des modes de garde
regroupés qui accompagnent le plan loup, semblables à ceux du
plan ours, vient de montrer combien le regroupement du bétail pouvait
être néfaste pour ces même milieux : piétinement
excessif d'un troupeau trop important en un même secteur, érosion
des zones de passage; à l'inverse, perte d'entretien de certains
quartiers escarpés, difficiles, où la
légèreté des petits escabots se faufile sans peine mais ou
l'armée lourde du troupeau ne le peut pas : trop de risques
(Besche-Commenge, 2008). Enfin, le gardiennage lâché-dirigé
consiste à orienter le troupeau, lui donner le « biais »,
ensuite le laisser dérouler son circuit de pâturage sur un espace
que les animaux connaissent bien. Le berger retourne voir son troupeau en fin
de journée et l'oriente vers une couchade libre ou
clôturée. Ce type de gardiennage est pratiqué sur des
quartiers favorables (ceux où « les bêtes se gardent toutes
seules »), lorsqu'il n'y a pas de risque de mélange de troupeau ou
d'incursion des animaux dans des champs, et préférentiellement en
automne, saison où les bêtes tendent spontanément à
descendre et non pas à monter.
Du fait d'un gardiennage permanent déjà assez
généralisé, la surcharge de travail que liée
à la garde de tous les lots représenterait un accroissement de
travail moyen de 4,5 mois par an et par exploitation pour un total moyen de 16
lots-mois au pâturage. C'est tout de même un tiers temps à
l'année à mobiliser en plus à production constante, et
à cumuler avec l'accroissement de travail nécessaire pour rentrer
les bêtes la nuit. Cette surcharge est très inégale selon
les exploitations, entre 2 et 12 mois par an (Garde, et al., 2006).
Animal
L'Homme, l'Animal et le Milieu Biophysique interagissent
pour créer un écosystème pâturé.
L'Homme, gère le milieu Abiotique, le milieu Biotique
et la Ressource Naturelle pour maintenir ou entretenir cet
écosystème pâturé en fonction des exigences
sociales, environnementales, politiques et économiques.
Ecosystème Pâturé
Ressources Naturelles
Environnement Biotique
Eleveur/ Berger
Environnement Abiotique
Pour les éleveurs et Bergers, sont
considérées comme bonnes pratiques, celles qui permettent au
troupeau de pâturer au maximum tout en assurant la durabilité de
la ressource Naturelle et en produisant de « Beaux » Broutards.
Laisser le troupeau pâturer au
maximum
Espace des bonnes pratiques
Produire de beaux agneaux
/veaux Broutards
Assurer la durabilité de la
ressource
Figure 1. Cadre Macro-théorique du Pastoralisme
Figure 2. Valeurs qui délimitent l'espace des bonnes
pratiques (Lasseur et al., 2007)
Lorsqu'on pose à un habitant et agriculteur de
l'Ariège la question : quels sont vos moyens de production ? La
réponse est le plus souvent : les bêtes, l'estive, le GP, l'AFP,
moi et quelques machines. Cela souligne le mélange de la gestion
individuelle et collective des unités de production, et leur relation ou
dépendance à l'estive. En effet le système pastoral
ariégeois se distingue par, son lien culturel et socio-économique
à l'estive. Ces estives s'échelonnent de 1.200 à
près de 3.200m d'altitude et couvrent environ 140.000 ha, le plus
souvent de mauvaise qualité. Ce sont des terrains de parcours avec
relativement peu d'équipements et de modalités techniques de
gestion, comparées aux Alpes et au Massif central par exemple. La
gestion de la zone intermédiaire22 est aujourd'hui, de plus
en plus rare et difficile en raison de l'invasion par des arbustes. La
montée pour l'estivage est courante du 20 Mai au 15 Juin et la descente
du 1er au 30 Octobre ; les bovins montant plus tôt et descendant plus
tard que les ovins du fait de leur faible vulnérabilité à
la prédation. Toutefois, en raison des techniques de gestion
individuelle, qui favorisent les montées précoces et les
descentes tardives, il n'est pas étonnant de voir que le bétail
quitte l'aire de l'exploitation début Mai pour ne redescendre qu'aux
premières chutes de neige. Les deux vallées de l'Ariège :
le Couserans et la Haute Ariège, correspondent aux zones de montagne les
plus touchées par la déprise agricole. Ici, la principale
orientation des exploitations est l'élevage allaitant, bovine ou ovine,
conduits en extensif. En résumé, selon la
fédération pastorale de l'Ariège (2007), le pastoralisme
en 2003-2004 concernait : 57 AFP (24.000 ha; 53.000 propriétaires
fonciers; 55.000 parcelles), 75 GP (280 unités pastorales; 124.000 ha;
853 éleveurs transhumants (387 éleveurs de vaches, 270
moutonniers, 185 éleveurs de chevaux et 11 chevriers avec 17.325 ;
50.681 ; 1.976 et 158 bêtes respectivement), 50 bergers, 23 missions
d'héliportage (30 tonnes de biens), 11 opérations de transport
par bâts (5 tonnes).
1.1.7.1 Etude des systèmes d'élevage :
exploitations, hommes et troupeaux en montagne
Le pastoralisme, système de production par lequel
l'homme, le bétail et le territoire interagissent (Eychenne, 2006 ;
Landais et Balent, 1995), produit un éco-agrosystème complexe
(voir schémas 1 et 2 ci-contre) où, savoir-faire traditionnel,
considérations économiques, techniques et sociopolitiques, sont
conjointement mis en jeu. Comme nous l'avons mentionné plus haut, c'est
une production originale mais dont la complexité résulte de
l'interaction et de l'existence de différents objectifs de gestion entre
: le gestionnaire (berger, éleveur, communauté rurale qui
réglemente la forme d'utilisation des terres communales et
privées); la végétation et les animaux (Landais et Balent,
op. cit.). Ici, la gestion et l'exploitation raisonnée des
ressources génétiques dans leur milieu naturel oblige souvent
à dépasser le seul cadre de l'espèce et de prendre en
compte le contexte /.../
22 Précédemment prés de fauche ou
terrain de pâture de fin de saison, aujourd'hui rassemblement de
plusieurs propriétés privées pour la pâture
collective, elle permet l'extension de la période d'estive
au sein des systèmes agricoles et environnementaux
(Besche-Commenge, 2008 ; Balent et al., 1998). C'est dans ce sens que
Lasseur (2008) considère la culture technique locale, et notamment sa
déclinaison en termes de bétail (système d'élevage
local) comme un « filtre » qui a conduit les agriculteurs à
interpréter les changements dans les conditions de production
définies au niveau macro-économique. Cette interprétation
permet de définir de nouvelles pratiques que ces agriculteurs seront
prêts à mettre en oeuvre. Le pâturage pour être
compris et utilisé pour la gestion de l'environnement, doit être
pris en compte dans des échelles spatiales et temporelles inhabituelles
pour les disciplines de l'agriculture et de l'élevage (Besche-Commenge,
2008 ; Balent op. cit.).
La gestion d'un troupeau tout au long d'une campagne est
décryptée par l'analyse fonctionnelle développée
par Guérin et Bellon (1990) qui repose sur quatre principes : adopter le
point de vue de l'éleveur, découper la campagne en
périodes (fonctions ou séquences) et identifier la
hiérarchie entre les périodes, expliquer le projet de
l'éleveur, comprendre le point de vue fonctionnel des ressources
fourragères (prélèvement, report sur pied, gestion de la
ressource, complémentarité entre ressources
hétérogènes, saisons-pratiques...). Ces périodes
sont interdépendantes à cause des relations causales dues au
déroulement des processus biologiques ou des pratiques, des relations de
gestion, qui étoffent une campagne. La particularité des
systèmes d'exploitations en Ariège est cette
généralisation du pastoralisme mobile tant pour les ovins/caprins
que pour les bovins et équins. Ce système est en partie le
résultat du peu d'alternatives offertes par le milieu montagnard dans
lequel la majorité de ces exploitations ont leur siège. Aussi,
l'héritage culturel et l'orientation des nombreux projets d'appui
à l'activité montagnarde (PHAE et autres MAE) ont conforté
les exploitants dans les techniques ancestrales courantes. Il y faut une
connaissance fine de la réalité, et des pratiques qui savent
s'adapter. C'est tout simplement « l'intelligence du milieu ». En
officialisant les accords de voisinage, en permettant au bétail une
liberté surveillée sur des terrains où juridiquement il
n'avait aucun droit à l'herbe, les chartes anciennes tenaient compte de
cette nécessaire souplesse dans la gestion du territoire et la conduite
de troupeaux non pas regroupés, mais dans l'individualisation de petits
escabots, troupeau commun ou garde individuelle (BescheCommenge, 2008). Les
pratiques pastorales ne sont pas restées insensibles aux diverses
modifications sociales, techniques, économiques et politiques. Le
Gardiennage était autrefois général, les troupeaux avaient
moins de bêtes, beaucoup d'éleveurs pratiquaient la traite en
estive...
1.1.7.2 Etude du système de pâturage
En montagne, l'excès de rochers, de petites
crêtes, et d'escarpements interrompt le pâturage continu. Les
brebis sont dispersées parce que c'est ainsi qu'elles trouvent l'herbe
qu'elles préfèrent. Sur ces petits récifs, il semble que
rien ne pousse alors que de très appétantes herbes sont
abondantes. Nous ne pouvons plus les voir toutes, et c'est à ce
moment-là qu'elles profitent!
(Entretien 1, 7 et 8, Mai 2008). Techniquement, il y a une
distance entre le berger et l'animal qui "permet" à l'animal de
s'arrêter. Donc, si le berger adresse au troupeau, toute la
journée le message : « allez de l'avant! » Il y aura
piétinement sans véritable consommation, mais celui-ci
s'épuise pour un travail négatif. En outre, l'animal au parcours
rumine dès que sa panse est pleine et ne peut consommer plus que sa
capacité d'ingestion. Pour Agreil et al. (2004) une brebis est
correctement nourrie sur parcours quand elle mélange les ligneux et les
herbacées dans sa ration ; ça c'est une brebis qui "organise son
temps avec sérénité". Une brebis inquiète ou
agitée en raison d'un sentiment d'insécurité et qui
interrompt fréquemment sa consommation afin de vérifier l'absence
de prédateurs n'est pas bien nourrie. Pas bien du point de vu
nutritionnel car elle se concentrera sur les espèces faciles à
couper. Pas bien aussi du point de vue de la gestion écologique, car il
y aura donc un impact disproportionné du pâturage (Garde et
al., 2006). Ces résultats confirment ceux de Lécrivain
(2004) qui souligne que les attitudes de crainte conduisent les brebis à
cesser de pâturer. Si cette situation se reproduit plusieurs fois au
cours d'un circuit, la durée de pâturage journalière est
considérablement réduite car il faut un long moment pour que les
brebis reprennent calmement et efficacement leur pâturage. Les brebis ont
une horloge interne qui rythme leurs activités ; elles expriment leur
sensibilité à la régularité des horaires. En
résumé, un troupeau agité se limiterait aux milieux
éclairés avec surpâturage. A l'inverse, un troupeau calme
se disperse facilement, les animaux consommant une large gamme de plantes.
1.1.8 Le contexte de la prédation par L'ours
brun
L'inaccessibilité des terres marginales a permis la
survie d'espèces éliminées en zone de forte densité
agricole. Par conséquent, il y a une pression sur les gouvernements de
déclarer ces régions comme zones protégées,
à la fois en raison de la pression du lobby de conservation et les
potentiels « revenus du tourisme ». Ces zones, qui étaient
jusqu'à lors les domaines des pasteurs sont de plus en plus
transformées en réserves de biodiversité. Ajouté
à ce désir de reconquête de la nature, les incertitudes sur
l'occupation des terres par l'activité pastorale rendent inefficaces les
revendications des éleveurs. Dans l'ère pré-moderne, la
prédation sur les troupeaux a été une préoccupation
majeure de la quasi-totalité des éleveurs et une demande
constante de la main d'oeuvre en élevage. L'expansion de l'agriculture
et la propagation des armes modernes au début du XXe
siècle ont largement éliminé les prédateurs dans
l'ensemble des écosystèmes. Toutefois, des modifications
extérieures ont des répercussions sur la perception de la
prédation et donc les attitudes à l'égard de
l'élimination des gros prédateurs. De nombreuses espèces,
comme les loups, les ours et le léopard des neiges, sont maintenant
considérées comme menacées et, par conséquent, font
l'objet des efforts de conservation plutôt que comme une nuisance
à éliminer (Göbel, 1997).
1.1.8.1 Considérations générales
Les grands prédateurs (Ours, Loups et Lynx) sont
aujourd'hui totalement protégés. Concernant l'ours, la convention
sur la diversité biologique (CBD), l'UICN, la Directive « Habitats
», la Convention de Berne, la Convention de Washington, les
résolutions du parlement européen (A2- 339/88, ABL C 69/201,
20.3.1989 ; A2-0154/94, ABL C 128/427, 09.05.1994, les Recommandations du
conseil de l'Europe (Recommandation n° 10, 1988 ; Recommandation n°
43, 1995), la Réglementation nationale (CNPN) interdisent toute
activité pouvant mettre en danger la vie de cette espèce
(Ministère de l'écologie, 2006). Du fait de ce statut de
protégé, les éleveurs ne peuvent que réclamer des
expertises pour que les dégâts sur leur exploitation (animal mort
ou blessé) soient imputés à l'ours. La difficulté
de résolution du « problème » ours en montagne vient du
fait que celui-ci est considéré comme espèce parapluie et
espèce emblématique (générateur de revenus à
travers le tourisme). Ceci veut dire que si avéré, l'ours
garantirait le plein fonctionnement des écosystèmes de montagne
et serait donc bénéfique à la fois au pastoralisme et
à la population riveraine. En d'autres termes, l'ours
améliorerait la biodiversité et la multifonctionnalité des
territoires de montagne donc s'associerait au pastoralisme pour rendre la
montagne plus productive et assurer une production plus durable. Sauf que dans
le contexte des Pyrénées, les éleveurs, ne voyant pas
immédiatement le bien fondé de l'ours mais son contraire, de part
ses interventions négatives sur leur survie, la méthode
essai-erreur ne peut les rassurer car c'est de leur avenir dont il est
question. Aussi, ils acceptent mal que les externalités négatives
sur l'environnement de l'agriculture intensive soient « ignorées
» et eux, avec une activité multifonctionnelle et productrice
d'externalité positives indexés.
La propriété de l'Etat sur laquelle est
fondée une certaine spécificité ariégeoise est
grevée de droits d'usage au profit des éleveurs des communes
usagères. Ces droits sont tout à la fois individuels (chaque
exploitant de la commune) et collectifs (l'ensemble des exploitants de la
commune). Ils équivalaient dans l'esprit de leurs prétendants
à un véritable droit de propriété. Par ailleurs,
ces vacants domaniaux ont été considérés de tous
temps comme des dépendances de la forêt de l'Etat, et, à ce
titre, sont soumis au régime forestier. C'est ainsi que les
prescriptions du Code Forestier relatives aux droits d'usage dans les bois de
l'Etat leur sont appliquées. Cette divergence de point de vue entre le
régime juridique et la nature physique de ces biens est certainement
à l'origine de nombreux conflits dans l'usage de ces fonds. Cela a
engendré depuis le XIIIe siècle un climat d'opposition
plus ou moins systématique entre l'Administration des Eaux et
Forêts d'une part, les éleveurs et les élus d'autre
part.
L'ours renforcerait la multifonctionnalité des
territoires de montagne, il génèrerait une activité
touristique, il produirait plus de biodiversité et donc
améliorerait les fonctions des écosystèmes de montagne et
par ricochet les services rendus au pastoralisme (à démontrer).
Le pastoralisme confère un statut multifonctionnel aux territoires de
montagne, il génère une activité touristique
(création des merveilleux paysages, ouverture des milieux...), il
produit la biodiversité et donc améliore les fonctions des
écosystèmes de montagne et par ricochet les services rendus
à l'ours. Ours et pastoralisme amélioreraient
simultanément leur existence si ces considérations étaient
avérées pour l'ours. Dans ce sens une cohabitation Ours -
Pastoralisme serait très productive !
La réintroduction de l'ours brun dans les
Pyrénées françaises (1996, 2006) modifie la perception
d'un élevage globalement favorable à l'environnement. La place
que l'on souhaite attribuer à cet élevage dans la protection des
espaces naturels est l'objet de prises de positions très
contrastées et la présence de l'ours engendre des modifications
de pratiques d'élevage susceptibles de remettre en cause la contribution
de l'élevage à la gestion des espaces « naturels ». Les
scientifiques concernés savent bien que les pertes sur les troupeaux
peuvent être beaucoup plus importantes. Mais sur le terrain, on
s'aperçoit que la tendance est de considérer que c'est
plutôt exceptionnellement. Implicitement, tout se passe comme s'il y
avait un objectif « d'innocenter » le prédateur, en mettant en
avant les chiens errants, et en cause les pratiques de l'éleveur, voire
sa bonne foi. Le risque d'attaque pèse sur le troupeau jour et nuit,
tout au long de la présence en estive. Les questions des pertes
indirectes et encore plus celles des animaux non retrouvés sont
cruciales (Garde, 2001). Se rapportant aux travaux de Garde (2006) sur le loup,
si l'ours n'est vraiment que le bouc émissaire des autres
difficultés de la profession ovine, c'est une perte de temps que de
travailler à la protection des troupeaux ; si à l'inverse, l'ours
est une question technique nouvelle appelant de gros efforts d'adaptation de la
part des éleveurs et des bergers, c'est une perte de temps que de
vouloir expliquer l'opposition des éleveurs par des
considérations historiques, psychologiques, voire mythiques. Au
début des années 1990, le dernier ours des Pyrénées
centrales disparaissait laissant seulement 7 à 8 individus du noyau
occidental. En 2005, la population d'ours brun des Pyrénées
était de 14 à 18 individus. Ce nombre, insuffisant pour sauver
l'espèce, un nouveau programme de renforcement a été mis
en oeuvre et 5 ours relâchés dans les Pyrénées
centrales en 2006 (Ferrus, 2007). Pour le Ministère de l'écologie
(2006) et Ferrus (2007), l'ours n'est pas seulement considéré
dans ce programme comme une espèce emblématique, mais aussi une
espèce parapluie qui offre de nombreuses retombées
économiques (tourisme) et écologiques (conservation de la
biodiversité).
1.1.8.2 Ecologie de l'ours brun
L'Ours bruns se trouve dans de nombreux biotopes, de la
périphérie des déserts à des forêts
de montagne et zones de glace. En Europe, l'ours brun est le plus souvent
trouvé dans les forêts de
montagne, en Sibérie, il réside principalement
dans les forêts tandis qu'en Amérique du Nord, ils
préfèrent la toundra, les prairies alpines et les côtes.
Les principales exigences de cette espèce sont des zones à forte
densité de couvert dans lequel ils peuvent s'abriter le jour
(Ministère de l'écologie, 2006).
1.1.8.3 Structure sociale de l'ours
Bien que le plus souvent solitaires, les ours se regroupent
parfois sur une zone importante de leur
ressource alimentaire et forment un groupe familial de «
pâture ». Dans ces cas, une hiérarchie de dominance
impliquant l'agression est établie. Même si c'est le mâle
adulte le plus costaud qui est le plus respecté, les animaux les plus
agressifs sont les femelles allaitantes.
1.1.8.4 Cycle de vie de l'ours
Les ours naissent vulnérables, étant aveugles, nus
et avec un poids de 340 à 680 grammes
seulement. Les oursons croissent rapidement pour atteindre 25
kg à 6 mois, et continuent à téter pendant 18 à 30
mois en mangeant une variété d'aliments. Les Oursons restent
généralement avec la mère jusqu'à la
troisième ou quatrième année de leur vie. Dans la nature,
l'ours brun peut atteindre 20 à 30 ans (Ministère de
l'écologie, op. cit.).
1.1.8.5 Reproduction de l'ours
Parfois, les mâles luttent avec les femmes avant
l'accouplement, et une fois qu'ils ont dominé, ils
ont tendance à les protéger de 1 à 3
semaines. L'Ours brun s'accouple de Mai à Juillet, et l'ourse a une
gestation de 180 à 266 jours. Les naissances ont lieu de Janvier
à Mars, alors que généralement la femelle est encore en
hibernation. Elle met bat généralement deux à trois
oursons avec un intervalle entre mises bas de 2 à 4 ans.
1.1.8.6 Ration alimentaire de l'ours
L'ours brun est omnivore et son régime alimentaire varie
avec la saison : de l'herbe et des pousses
au printemps aux baies et petits fruits en été,
noix et prunes en automne. Toute l'année il mange les racines, les
insectes, les mammifères, des reptiles, et bien sûr, le miel et le
bétail.
1.1.8.7 Conflit Homme - Ours ou Homme - Prédateur
L'ours est un problème par l'angoisse qu'il
génère, les menaces concrètes qu'il fait peser sur les
troupeaux, mais aussi pour une raison plus profonde : l'ours
est devenu le moyen, pour les « institutions et écologistes »,
de s'approprier la gestion d'un espace en lieu et place de ceux qui y
maintiennent une biodiversité agricole et ordinaire très riche,
à partir de races rustiques et de pratiques pastorales adaptées.
C'est effectivement d'un choix de civilisation23 qu'il s'agit :
continuer, en l'adaptant au nouveau millénaire, cette très
ancienne civilisation pastorale qui a construit à la fois des hommes,
des cheptels, des milieux.
23 Nous voulons savoir réellement quels choix
de société sont effectués avec l'ensauvagement de la
montagne (LACUBE Philippe, Entretien. Mai, 2008)
Les ours sont parfois connus pour leurs attaques sur le
bétail et les canalisations d'eau, leur incursion dans les vergers et
les ruchers, la fouille des poubelles et à l'occasion des
entrepôts de nourriture. L'homme est naturellement effrayé par ces
grands prédateurs et la première réaction est de les
attaquer ou les tirer. Toutefois, les attaques sur l'homme ne semblent pas
être le résultat d'un comportement prédateur, mais
plutôt un résultat de défense de ses petits ou d'une
carcasse contre l'homme. La présence d'un ours blessé est la
situation la plus dangereuse (Ministère de l'écologie, 2006 ;
Ferrus et WWF, 200824).
L'histoire de l'irréversible décadence d'un
peuple ougandais, les Iks, anéantis par la décision prise en 1962
par I'Etat colonial de consacrer leur territoire à la « protection
de la nature » en l'érigeant en parc national sans que la gestion
de ces ressources en ait été améliorée. Le destin
des Iks illustrait jusqu'à l`absurde la problématique
élémentaire des effets sociaux d'une politique de
préservation du milieu naturel décidée par un pouvoir
central sociologiquement et culturellement extérieur à la
société locale (Constantin, 2008).
L'analyse des conflits Homme - Prédateur est
encombrée par un ensemble de mythes entretenant une approche
émotionnelle dans toute une partie de l`opinion publique, en particulier
l`opinion euro-américaine invitée à faire pression sur les
décideurs nationaux et internationaux. Cette mythologie mêle
souvenirs d'enfance et quête du paradis perdu, de l'harmonie
oubliée entre l'Homme et la Nature, harmonie que romantisme et
aventurisme ont cru trouver dans ces confins du monde connu sur lesquels surfe
aujourd'hui avec talent Nicolas Hulot. L'honnête et sincère
téléspectateur euro-américain qui applaudit l'interdiction
de chasser l'éléphant après le bébé phoque
est aussi bouleversé devant le corps sans âge d'adolescents
sous-alimentés (...). En tout état de cause, imposer aux
indésirables les mesures indispensables pour rétablir et
entretenir les équilibres naturels définis à Washington,
Paris ou Gland (Suisse), (...), peut consister à obtenir leur
déguerpissement ; la politique de gestion des ressources naturelles a
aussi ses intégristes, inspirés par les grands humanistes dont
les « solutions finales » s'appuient sur des certitudes scientifiques
(Constantin, op. cit.).
1.1.8.8 Dynamique de l'expansion de l'ours dans les zones
d'élevage
Si les territoires occupés par le loup sont
précisément les mêmes que ceux mis en valeur par le
pastoralisme méditerranéen montagnard, et en particulier
concernant les ovins (Garde, 2002), ceux occupés par l'ours devraient
être beaucoup plus étendus en raison de leur alimentation et leur
aire de vie.
24
http://www.panda.org/about
wwf/what we do/species/problems/human animal conflict/human bears wolves
conflict.cfm
1.1.8.9 Etendue des dommages liés à l'ours
La prédation sur le bétail produit des dommages
directs et indirects à l'exploitation et augmente la charge de travail
du berger ou de l'éleveur. Ainsi, la présence de l'ours est
censée mettre en cause la durabilité du pastoralisme et la
présence des troupeaux en montagne. Ceci parce que la logique actuelle
de l'exploitation pastorale exige de plus en plus d'animaux par troupeau (cours
de viande en baisse constante), la limitation des charges
supplémentaires et la vente aux périodes ciblées.
L'ensemble des situations concernées par la prédation sur le
bétail donne lieu à une crise sociale aiguë (MAUZ, 2002)
liées aux difficultés techniques ainsi qu'aux stratégies
de déni du rôle des prédateurs dans ces difficultés,
véhiculées par ses défenseurs (Garde, 2000). Malgré
les efforts des éleveurs de se défendre contre l'arrivée
des prédateurs, les systèmes de protection classiques ont de
nombreuses limites, et ne sauraient constituer une solution durable pour la
cohabitation. Les contraintes de la prédation, en plus des faibles
revenus de l'élevage, découragent l'installation des jeunes
agriculteurs (Anonyme, 2007a).
La conséquence ultérieure de la présence
de grands prédateurs est l'abandon des activités
d'élevage, en montagne comme en fond de vallée. Sont
concernés, en premier lieu, les petits propriétaires
d'exploitations agropastorales familiales de montagne. Ils se sentent dans
l'impossibilité et l'incapacité totales de gérer cette
situation nouvelle et difficile, qui compromet le maintien d'une double
activité (en montagne comme en fond de vallée). De plus, cela met
en péril tout le travail de soutien aux éleveurs. Les effets
concomitants de toutes les modifications de la conduite des troupeaux sont de
nature à provoquer l'apparition d'un transfert dangereux de
fertilité depuis les secteurs les plus éloignés jusqu'aux
parcs de nuit de protection placés à côté des
bergeries, ainsi qu'un appauvrissement progressif des sommets des aires
pâturables à proximité des cols et des crêtes
(Dubost, 1981 ; Sato, 1982 ; Cugno, 2002 ; Garde et al., 2006). La
totalité des déjections animales déchargées pendant
la nuit sera alors accumulée de façon excessive à
l'intérieur des enclos, créant ainsi une situation difficile
à gérer, aux répercussions négatives, aussi bien du
point de vue écologique qu'agronomique (Lombardi, 1997 cité par
Cugno, 2002 ; Garde et al., 2006).
En péril, la nature et la vie sur Terre sont
actuellement victimes d'un mode de société. Le système
capitaliste, largement dominant dans le monde occidental, connaît une
extension planétaire : la mondialisation. L'agriculture intensive a
généré trop d 'externalités négatives
à l'environnement. Aujourd'hui, la « fabrique » d'une nouvelle
agriculture qui a débouché sur le concept de
multifonctionnalité des exploitations est beaucoup plus portée
par des systèmes extensifs. Les grands prédateurs (loup, ours...)
espèces parapluie et/ou clé de voûte de la majorité
des écosystèmes du nord de la planète, mettent-ils en
lumière ce rejet de la nature (Moriamé, 2004) ou sont-ils
victimes de la « perfection des moyens et la confusion des fins » de
ce siècle ? Aujourd'hui,
ce n'est peut-être plus la peur qui pousse à
éliminer le prédateur. L'intérêt économique
qui accompagne l'élevage, le profit et, plus généralement,
la croissance économique, sont devenus les objectifs majeurs de
l'humanité. Aux dépens de la nature, malheureusement, et de
l'homme, finalement. Tout devient marchandise, ce qui n'est pas
nécessairement scandaleux : tout travail mérite salaire et
créer la beauté d'un paysage ou d'un bâtiment est un
même travail ... restent à déterminer les valeurs et les
équivalences! Pour la valeur paysage, c'est presque mission impossible
à lire les travaux des économistes : comment fixer un
équivalent monétaire aux paysages, quelle cotation, quel CAC 40,
quels actionnaires, quelle loi de l'offre et de la demande ?
1.1 Problématique
Les arguments d'ordre techniques et économiques actuels
de l'élevage pastoral, la représentation que les éleveurs
pastoraux ont de leur savoir-faire et de l'estive, n'offrent pas une
sécurité pour la cohabitation pastorale. Par conséquent,
du fait de la vulnérabilité des animaux au pâturage
liée à la prédation par l'ours dans un système
d'élevage en équilibre instable et fragile,
l'anxiété pour l'avenir entraîne des considérations
uniquement négatives du prédateur et menace sa survie. Dans ce
contexte, parler de maximisation de la production, de durabilité et de
biodiversité en rapport au prédateur génère
beaucoup de malentendus. Aussi, les acteurs ruraux ne retrouvant pas la
préservation des « acquis » culturels, sociaux et techniques
de leur élevage pastoral acceptent mal la préservation de l'ours
brun en l'installant confortablement dans « leurs » estives et zones
de montagne.
Nous avons réalisé une étude sur la
compatibilité de l'application des mesures d'accompagnement du plan ours
avec les configurations techniques, sociales, culturelles et économiques
du système pastoral en Ariège et principalement sa
répercussion sur la conduite dans les estives et donc la perturbation du
fonctionnement général. Nous présenterons les principaux
enjeux des relations élevage - environnement et ours - environnement,
les transformations des élevages en lien à la présence de
l'ours dans les résultats. Nous discuterons ensuite si possible les
conséquences de ces modifications et l'accompagnement des
transformations de ces élevages pour assurer leur
pérennité et leur contribution à la gestion des
espaces.
1.1.1 Question de recherche
Pour ce travail, considérant les aspects biophysiques,
biologiques et physiologiques liés au milieu, à la ressource et
au bétail, les aspects socio-professionnels et technico-culturels
liés au pastoralisme et enfin les aspects pratiques
préconisées par le plan ours lié à la conservation,
notre recherche s'est articulée autour de la question suivante : L'usage
fait des estives en Ariège est-il compatible avec la mise en pratique
des mesures d'accompagnement du plan de réintroduction de l'ours brun
dans les
Pyrénées françaises ? Pour répondre
à cette question, nous avons formulé des hypothèses pour
l'orientation de nos investigations.
1.1.2 Hypothèses de recherche
Trois hypothèses majeures découlent de nos
objectifs pour répondre à la question formulée. Il s'agit
de :
1. La présence de l'ours brun induit des
réorganisations du système d'exploitation non rentable pour
l'élevage pastoral.
2. Le système pratiqué permet une certaine
capacité d'adaptation.
3. La diversification des exploitations est une réponse
à leur sensibilité et une mesure alternative.
1.1.3 Objectifs d'étude
Nous avions voulu initialement traiter de la
vulnérabilité de tous les animaux au pâturage mais en nous
rendant compte à la suite des entretiens que les bovins, équins
et caprins25 étaient moins concernés, nous avons
trouvé plus judicieux de recentrer nos propos sur les ovins
principalement. L'objectif de ce travail est de s'informer et de comprendre le
fonctionnement du système agraire en Ariège, d'analyser le
système d'élevage d'un point de vue zootechnique,
économique et socioculturel et d'interpréter comment l'ours brun
et ses mesures d'accompagnement influencent tout cela. Cela permettra de
vérifier si toute modification sans tenir compte de ces historiques
sociotechniques et, des données topographiques est de nature
zoohygiénique et préjudiciable pour la durabilité du
système ou non. Enfin, ce travail vise à déterminer les
alternatives et les perspectives de l'élevage pastoral en Ariège
dans ce contexte particulier.
25 L'élevage caprin ici étant pour la
production de fromage, la conduite est moins extensive et moins
dépendante de l'estive ou tout au moins, la garde est plus serrée
; les animaux devant être traits en fin de journée.
Chapitre 2 : Terrain d'étude et collecte de
données
2.1 Terrain d'étude
2.1.1 Ariège-Pyrénées
Le choix du département de l'Ariège pour traiter
de cette question élevage - grand prédateur n'est pas fortuit. De
toute la chaîne des Pyrénées, c'est le département
le plus touché par la prédation sur les troupeaux et où,
s'est installée la majorité des ours du massif (
http://www.pyreneespireneus.com/Ours_des_Pyrenees.htm).
C'est donc en Ariège qu'on recense le plus d'opposants à la
réintroduction. Peut-être de par leur souvenir au succès
lors de la « guerre des demoiselles26 », mais, surtout par
leur tradition pastorale dont le véritable produit reste le broutard,
fruit d'une bonne estive. Le slogan du département a été
longtemps "Terre Courage". La nature sauvage de l'Ariège dans les
Pyrénées centrales a influé sur ses habitants. Pour les
randonneurs et les touristes, le département offre une grande
variété de paysages, la flore et la faune sont très
riches. L'Ariège est un département plutôt rural avec de
nombreux villages et hameaux et de petites villes. Les communes d'estive
où l'ours a déjà sévi et celles voisines ont
été choisies pour l'enquête de terrain en priorisant les
exploitations ovines, plus vulnérables à la prédation.
2.1.2 ASPAP
Une observation n'étant faite qu'à partir d'un
point préalablement choisi, je me suis fait « protecteur »
du troupeau d'où le choix de l'ASPAP comme porte d'entrée. Ceci
est dû en partie à ma formation de zootechnicien dont la
fonction première est la production de nourriture (viande).
26 Nous sommes en 1829, la population de
l'Ariège ne cesse d'augmenter et les paysans s'appauvrissent. Ignorant
de ces réalités et soucieux de reconstituer la forêt
dévastée par des siècles d'exploitation, Charles X
décide de reprendre aux communes le sol domanial en instaurant une
nouvelle administration forestière. Depuis le Moyen-Age, le Couserans et
les hautes vallées de l'Ariège, reculés, vivent en quasi
autarcie. La forêt, ce qu'elle offre, assure la survie de la population
qui la considère comme son bien propre. Les paysans des vallées
de la Bellongue, de Bethmale, du Biros mais aussi de Massat, s'insurgent et
"les Demoiselles" font leur apparition. Déguisés en femmes avec
de longue chemises blanches, des foulards ou des perruques, le visage noirci ou
caché, les hommes attaquent, souvent la nuit, les grands
propriétaires, les gardes forestiers et gendarmes, les maîtres de
forges et les charbonniers. Inorganisés et sans conscience politique,
les paysans conduisent cette "guerre" avec peu d'armes. Pourtant sous l'aspect
"carnavalesque" de cet événement, "les Demoiselles" vont
installer une atmosphère de peur qui inclinera le pouvoir à
instaurer des mesures d'amnistie et assouplir les lois de cette administration
forestière. Ce conflit, intense de 1829 à 1832, s'étendra
jusqu'en 1872 (
http://www.ariege.com/histoire/gdd.html).
Aussi, je me suis dit que 95% d'exploitants ne peuvent pas
être contre la réintroduction juste pour qu'on sache qu'ils
existent mais qu'il y a probablement une logique dans leurs
réclamations.
L'association pour la Sauvegarde du Patrimoine
d'Ariège-Pyrénées (ASPAP) a été
créée le 12 Janvier 2006, en rapport au plan de
réintroduction de l'ours brun 2006-2009. Après sa
création, l'association est rapidement devenue le porte-parole des
éleveurs contre la réintroduction (au moins 90% des
éleveurs en Ariège). Parce que 2006 a été
l'année du lancement du plan ours, l'ASPAP a connu un ordre du jour
très chargé : 10 Mars, manifestation publique à Toulouse,
1er Avril, premier lâcher et manifestation devant la mairie d'Arbas, 28
Avril, 2e lâcher, 4 Mai, suspension temporaire (48 h) des lâchers,
6 Mai, manifestation publique à Luchon, 13 Mai, manifestation publique
à Bagnères de Bigorre et à Arbas. Depuis l'interruption
des lâchers, l'association est en train d'évaluer le plan et ses
dommages au pastoralisme, d'informer ses adhérents (près de 2.000
membres) au sujet de comment se comporter dans des situations très
diverses.
2.2 Collecte des données
Une trame d'enquête sur la gestion
technico-économique et socio-culturelle de l'exploitation a
été conçue à la suite bibliographique. Bien que
n'adaptée en partie aux éleveurs pro-ours, elle a inspiré
les entretiens avec ces derniers. Voulant éviter les réponses du
genre : Je n'ai pas encore été prédaté et ne sais
quels dommages l'ours crée au système ; Je n'ai pas encore
réfléchi sur les alternatives au contraintes liées
à l'ours ; Je ne saurai mettre en application les mesures de protection
alors que mon troupeau ne souffre pas de prédation..., j'ai
réalisé un premier entretien avec les responsables de l'ASPAP
pour cibler les communes à fort enjeu lié à la
prédation ainsi que les éleveurs qui ont subi les
dégâts d'ours sur leurs exploitations et ceux avoisinants. Ceci
m'a permis de choisir mes interlocuteurs compte tenu des aspects
matériels et temporels de ce stage.
2.2.1 Une approche bibliographique pour définir
l'état des travaux sur le sujet
La documentation sur le système d'élevage
pastoral est aussi « difficile » à trouver que le
système est complexe à gérer. Il est fréquemment
rencontré des données sur le nomadisme et la transhumance en
milieux tropicaux, et dans d'autres pays du Sud où la logique de
fonctionnement de l'exploitation n'est pas tout à fait la même que
dans les pays du Nord. La plupart du temps, le système tel qu'il est
présenté fait allusion à la technique d'il y a 500
à 600 ans. Concernant le pastoralisme dans les Pyrénées,
les archives montrent que, dans les années 1400 à 1500, le
rassemblement des animaux se faisait seulement à la maison le soir.
Elles montrent, cependant quoi éviter dans ce système : les
bergers envahi avaient légalement le droit de saisir le bétail
jusqu'à paiement d'une pénalité. Ce système a
demeuré en « escabot » entre l'an 1500 et 1900, pas de
véritables troupeaux, moins de 150 animaux à la charge d'un
berger. C'est une forme de pâturage, à
la fois fragmenté mais couvrant l'ensemble du
territoire, très ancienne (plus d'un demi-millénaire), qui a
véritablement "créé" l'éco-agrosystème que
sont les montagnes Pyrénéennes et la richesse de leur
végétation jusqu'à haute altitude. Introduire des
changements, par d'autres moyens de garder les bêtes détruirait la
façon dont cet environnement a été établi et
maintenu (...) voire détruirait cet environnement (B. Besche-Commenge,
2008). Toutefois, s'il s'avérait nécessaire de changer les
pratiques pour favoriser la cohabitation pastorale, il faudrait au
préalable former et accompagner les exploitants sur cette nouvelle
façon sous peine de transformer cohabitation pastorale en exclusion
pastorale.
2.2.2 Enquêtes de terrain
L'Ariège étant divisé en trois
arrondissements et, seuls deux véritablement concernés par les
problématiques ours (Foix et Saint-Girons), j 'ai
sélectionné quelques exploitants de ces arrondissements en plus
de quelques éleveurs des communes de Melles (commune de la Haute Garonne
ayant mis en place les mesures d'accompagnement suite à la
prédation excessive) et d'Arbas (commune de la Haute Garonne
théâtre du premier lâcher). Du fait de la limitation du
temps et des moyens, les entretiens semi conversationnels se sont
déroulés par téléphone, au domicile de l'exploitant
ou sur l'exploitation. Lors de ces entretiens, le fait de ne pas prendre parti
a dû limiter les réponses des exploitants au point où j 'ai
dû prendre le même parti que celui enquêté à
chaque fois pour que celui-ci soit plus confiant. Ceci a ses avantages et ses
inconvénients. L'avantage étant que l'exploitant se «
lâche » complètement dans les réponses qui confortent
sa position. L'inconvénient est qu'une question ou remarque à
l'opposé de leurs champs d'intérêts génère le
plus souvent une réponse très courte, avec des propos du genre :
vous-même vous savez que... et là vous êtes impuissant de
dire je n'en sais rien (pour rester cohérent).
Les approches compréhensives des pratiques
développées dans le domaine de la socioanthropologie montrent que
le sens de ces pratiques est ambigu et non donné a priori. La
collecte d'informations directement ou par l'intermédiaire
d'enquêtes sur la réalisation physique d'une pratique (ici
l'élevage) ne conduit pas à identifier la signification des
choses. Mais il est possible d'obtenir le sens, à travers l'analyse de
ce que les pratiquants disent. Cette signification peut être
déduite de la description des agriculteurs, car en eux, « ils ne
disent pas la vérité des choses, mais la vérité de
leur relation aux choses » (Darré, 1999). Ainsi, afin de
caractériser le sens de la diversité et la transformation des
pratiques paysannes, il est important de recenser les concepts dans leurs
actions/mouvements et de ne pas isoler les concepts d'un agriculteur dans sa
position sociale (...). Afin d'avoir des points de vue, des alternatives aux
contraintes et des perspectives de production diversifiés, j'ai
interrogé les éleveurs de plateau, de montagne, de haute
montagne, de coteaux, ceux pour et ceux contre la cohabitation pastorale avec
la préférence à l'élevage ovin qui est plus
sensible
St Girons
Soueix
Note: Pas d'Estive dans les villes soulignées
= Le Pays Couserans
= Le Pays des Pyrénées Cathares
= Le Pays des Portes d'Ariège-Pyrénées = Le
Pays de Foix Haute Ariège
+ = Sor
++ = Barjac
= Larcat = Verdun
= Ascou
= Les Cabannes
Figure 3 Dispersion géographique des
éleveurs enquêtés
(adapté de la carte des villages de
l'Ariège. Préfecture de l'Ariège)
à la prédation. Même si dans la
réalité, plus de 90% des éleveurs sont opposés
à la cohabitation, j'ai interrogé 7 éleveurs contre la
cohabitation, 6 éleveurs en faveur, 2 bergers et 2 gestionnaires de
GP.
2.2.3 Analyse des structures et des systèmes
d'élevage
J'ai pensé que le statut juridique de l'exploitation
aurait une certaine influence sur les systèmes de
production et par conséquent amoindrir la
vulnérabilité des troupeaux. J'ai ensuite recueilli des
informations sur l'agriculture, l'élevage, la reproduction et le
système fourrager. Afin d'avoir un large spectre de situations, j'ai
enquêté avec un échantillon dispersé les
éleveurs des deux arrondissements concernés directement par la
prédation (voir figure 3 ci-contre).
Chapitre 3 : Résultats et discussion
3.1 Résultats
3.1.1 Caractéristiques générales de
l'élevage pastoral en Ariège
En Ariège, l'élevage pastoral est la combinaison
de pratiques individuelles et collectives, les pratiques collectives
étant le centre de prise de décision. Ceci est en accord avec les
travaux de Darré (1999) qui stipulent que, dans le domaine de la
socio-anthropologie, les pratiques sont considérées comme des
construits sociaux. Ainsi, un groupe professionnel local27 (GPL),
met au point un ensemble de références orientant comment chacun
des membres de ce groupe voit la réalité et considère ses
actions. Ici, en raison des "handicaps naturels28", les
éleveurs ont des troupeaux de petite taille et ont diversifié
leurs exploitations. Ils pratiquent la transhumance29, la monte et
le pâturage libres, investissent moins, avec pour produit le "Broutard"
et les agneaux "légers et inachevés". En raison de l'hiver et sa
couche de neige, ils doivent constituer des réserves fourragères
pour au moins trois mois de l'année pour l'alimentation à l'auge.
Contrairement à la tradition ancestrale selon laquelle la gestion
individuelle était la règle, et 100 bêtes par troupeau d'un
même éleveur une exception, aujourd'hui, l'exception de l'effectif
a été multipliée par 10 et la gestion collective est
devenue la règle. Ceci est dû au vieillissement de la population,
à l'exode rural et donc la baisse de la main d'oeuvre, à la
stabilisation des prix des produits depuis une trentaine d'année mais
l'augmentation des intrants, à la nécessité de se
réunir pour être à la fois une force de revendication et de
propositions. Néanmoins, les bêtes sont toujours en liberté
soit dans les parcs près de l'exploitation ou dans des quartiers de la
zone intermédiaire ou de l'estive. L'activité d'élevage
est sous le contrôle du syndicat d'éleveurs, du GP, des AFP, de la
fédération pastorale, du conseil général et de la
commune/mairie. Même si, pour des agronomes et zootechniciens, l'ensemble
des références du pastoralisme sont non standard, le
résultat de ce système de production est satisfaisant compte tenu
du ratio input/output. Quoi qu'il en soit, si le système n'était
pas durable, il n'aurait pas intéressé autant de personnes et de
civilisation dans tout ce "monde économique". En Ariège, la
manière dont les agriculteurs organisent leur travail agricole sur
une
27 Groupe d'individus engagés dans la
même activité, dans un milieu proche.
28 Ceci est une conception actuelle par ce que dans
le passé, quand l'agriculture était encore traditionnelle, les
terres de plaines et de plateau étaient moins fertiles que celles de
montagne. Grâce à la mécanisation et les fertilisants, la
montagne est aujourd'hui considérée comme handicapée (B.
Besche-Commenge, 2008. communication personnelle).
29 C'est une contrainte par définition,
toutefois nous sommes totalement libres et avons le libre arbitre pour
gérer cette contrainte et au demeurant la gérons même
parfaitement. Mais la présence de l'ours est une contrainte permanente
et imprévisible (Madeleine Maylin, 2006. manifestation publique à
Arbas)
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Vente de Broutards
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Vente agn. Légers
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Janvier
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Février
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Mars
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Avril Mai
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Juin
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Jullet
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Août Septembre
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Octobre
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Novembre
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Décembre
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Agnelage de
rattrap.
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Phases Physiologiques
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LACTATION + ENTRETIEN ENTRETIEN + GESTATION + LACTATION
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ENTRETIEN + LACTATION
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Périodes de
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Lutte
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lutte et sevrage
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Lutte
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Sevrage
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Lieux
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Bergerie + Parcours
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Parccours
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Zone interm.
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Zone intermediaire
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Ration
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PRES DE FAUCHE OU
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PRES DE FAUCHE OU
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Essentielle FOIN A VOLONTE OU PARCOURS ESTIVE
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PARCOURS
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PARCOURS
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Figure 4 Gestion du troupeau au cours d'une campagne de
production
base quotidienne prend en compte les caractéristiques
du climat. Les connaissances locales sur le climat et ses variations dans le
temps et l'espace, et les techniques de prévision sont des
éléments essentiels pour la survie de ces éleveurs. La
valeur « liberté » du troupeau se réfère
à une valeur économique, technique et une logique sanitaire
mesurées. En bref, dans cet élevage « libre » les
fondamentaux de la zoohygiène semblent être respectés et la
rentabilité assurée. Faire autrement nécessite une
étude approfondie et comparative du système actuel d'avec celui
préconisé à court, moyen et long terme.
En résumé, l'élevage pastoral est conduit
par des chefs d'exploitation âgés de 45 à 60 ans, beaucoup
d'entre eux ignorent s'il y aura une succession par leur progéniture
même s'ils le souhaitent. Ils élèvent des races locales
(Tarasconnais et Castillonnais pour les ovins, Gascon pour les bovins et les
porcs, Mérens pour les chevaux). Ils gardent peu d'animaux par troupeau
(150 à 500 ovins, 50 à 150 bovins) parce que, même si
l'herbe est abondante en estive, ils tiennent compte de la capacité de
charge des surfaces de leur exploitation et leur niveau d'autonomie
fourragère. Ils pratiquent un système de gestion collective sur
les estives et/ou sur les zones intermédiaires qui dictent les pratiques
sur « l'exploitation » individuelle. Ils sont dans une situation de
précarité économique (leur revenu constitué de 50
à 80% des subventions) et de déprise humaine (moins de 15%
certitude pour la succession) et ont des exploitations diversifiées.
L'activité d'élevage, influencée par les
règles30 du GP, alterne entre le siège de
l'exploitation, la zone intermédiaire et l'estive avec une lutte et un
pâturage libres. Pour l'agnelage d'automne, les agneaux sont
sevrés au bout de deux mois d'allaitement et vendus comme des "agneaux
légers" ou engraissés pour être des "agneaux finis" par les
agriculteurs de coteaux. Pour l'agnelage de printemps, les agneaux se
sèvrent naturellement et sont vendus comme "Broutard" à la
descente de l'estive (voir le schéma 3 ci-contre). Les agriculteurs
considèrent le fumier, le travail animal, les agneaux, les veaux, la
laine, le paysage et la biodiversité31 comme produits de leur
activité. Dans ce système, les performances de reproduction
observées sont : 0,95-1 agneau sevré par brebis par an et 1 veau
par vache et par an ; 100-120% prolificité ; âge au premier
agnelage 15-18 mois et 3 ans pour le premier vêlage; l'âge à
la réforme 6 ans pour les brebis et plus de 13 ans pour les vaches. Ces
performances sont bonnes, compte tenu du rapport investissement/produits
d'autres systèmes de production. En bref, il peut être
considéré comme avantage de ce système : la qualité
des produits, le rendement (même si la fécondité et la
prolificité sont faibles), l'installation facile de l'exploitation et la
qualité environnementale des
30 Quand on ne monte pas de mâle sur une estive,
il y a généralement deux périodes de lutte ciblées
printemps et automne ; quand le mâle monte la lutte dure de Mai à
Octobre voire décembre pour certains.
31 A noter qu'ici la biodiversité est vue sous
l'angle de l'intérêt de celui qui l'évoque
pratiques. En revanche, les faiblesses du système sont :
la fragilité et l'instabilité (pas de flexibilité, pas
d'alternatives ou moins), beaucoup de temps de travail.
3.1.2 Typologies du système d'élevage
Avant les enquêtes, j'ai pensé à la situation
géographique et le statut de prédation comme principaux
facteurs de diversification. Faisant les enquêtes je me
suis rendu compte que l'origine de l'éleveur, le statut juridique de
l'exploitation, le nombre d'activités et de produits et la
présence d'AFP étaient d'autres potentiels facteurs de
diversification. Enfin, les enquêtes ont révélé que,
où que la ferme soit située, quel que soit son statut juridique,
quelle que soit l'origine de l'éleveur (étranger,
néoruraux ou non), le milieu et le système de gestion
collective32 faisaient évoluer rapidement les pensées
et agissements. En définitive, la présence d'AFP et le nombre
d'activités et produits de l'exploitation ont été les
seuls facteurs de diversification. Le statut de prédation (avoir subi
des prédations ou non) régule les comportements en rapport
à la cohabitation pastorale.
3.1.2.1 Systèmes de production en fonction de la
mobilité du troupeau
L'itinéraire du troupeau au cours d'une campagne a
donné lieu à un certain nombre de sous-
systèmes. Nous avons noté que, pour les
agriculteurs sans zone intermédiaire ni AFP à proximité de
leur exploitation, le troupeau se déplace comme suit : Exploitation -
estive - exploitation. Cela renforce leur opposition à la cohabitation
et réduit leurs alternatives de production et perspectives. En plus de
cela, l'absence de diversification est renforcée par l'état civil
de l'exploitant (les célibataires ayant les exploitations les moins
diversifiées), les quotas et le nombre d'agriculteurs dans le village.
Pour les éleveurs bénéficiant d'une zone
intermédiaire ou ayant une AFP, le mouvement du troupeau est :
Exploitation - ZI - estive - ZI - exploitation, avec la ZI fournissant
jusqu'à 1/4 du total de temps de pâturage de l'année. Cette
ZI donne relativement droit à un certain niveau d'alternatives et de
perspectives, même si les terres de montagne sont la plupart du temps non
adaptées pour la mécanisation. En résumé, en
fonction de la mobilité, on distingue les exploitations sans ZI ni AFP,
celles avec AFP et sans ZI, celles sans AFP et avec ZI et enfin celles avec AFP
et ZI.
3.1.2.2 Systèmes de production en fonction de la
localisation géographique de l'exploitation
En raison des différentes pentes en plateau, coteaux et
montagne, il y a relativement plus de
parcelles mécanisées ou mécanisables sur
les coteaux et plateaux que dans les exploitations de montagne. Cela donne lieu
à une diversification de produits ("agneaux légers", "agneaux
finis", veaux et boeuf, foie gras, saucisse de porc, jambon) et de productions
(ovins, bovins, volaille, porcins) pour l'exploitation. Donc en fonction de la
topographie, les exploitations de plateau, les
32 Ceci est considéré ici comme la seule
bonne façon de gérer l'exploitation et garder les bêtes et
la plus durale
exploitations de coteaux et les exploitations de montagne (avec
haute montagne, moyenne montagne et montagne comme sous variations) se
distinguent par leurs différences d'alternatives.
3.1.2.3 Systèmes de production en fonction de la
diversification
Pour Perrot et Landais, (1993), la diversification des
exploitations agricoles était autrefois vue comme un obstacle au
développement de l'agriculture selon le modèle productiviste de
l'après guerre. Elle est aujourd'hui considérée comme une
richesse garante d'une capacité d'adaptation et parfois même un
réel objectif à atteindre. Conformément aux conclusions
faites par Eychenne (2003a) à travers l'analyse de l'évolution de
l'agriculture des trente dernières années (AGRESTE, RA, 2000)
pour qui, en grande difficulté, l'agriculture ne peut survivre que
grâce aux subventions et le développement de la
multi-activité, près de 99% des exploitations agricoles de la
zone de montagne de l'Ariège sont diversifiées. Cela est dû
à l'extrême précarité économique et
l'équilibre fragile de ces exploitations33. En plus d'autres
contraintes biophysiques, la contrainte administrative est une contrainte qui
est souvent négligée (Entretien 1, 3, Mai, 2008). En raison des
quotas, qui donnent droit à la PHAE, certaines exploitations ne peuvent
pas garder plusieurs espèces en particulier les exploitations
ovines34. En règle générale, nous avons
remarqué que les exploitations ovines se diversifient avec la production
bovine, porcine et équine ; font des gîtes d'étapes, des
activités forestières, d'agro-tourisme et ont des
activités salariales.
3.1.3 Qu'est ce que l'estive en Ariège ?
La réponse à cette question n'est ni une phrase,
ni un court métrage, ni un moyen métrage mais, un long
métrage qui met en scène, de nombreux acteurs parmi lesquels les
animaux (bétail et chiens). Dans l'ensemble de la chaîne des
Pyrénées, l'estive est une culture, une tradition/coutume (foires
à bétail, fête de la transhumance), le joyau ou la
représentation d'une identité professionnelle. L'estive est
également une période de l'année (de Juin à
Septembre) au cours de laquelle les bergers sont en activité, les
entreprises d'héliportage et de transport par bâts sont
prestataires de services aux exploitations agricoles. Elle est aussi un milieu
géographique : de la montagne (au moins 1200m d'altitude) à la
haute montagne (jusqu'à 3200m d'altitude) avec des conditions
environnementales spéciales (flore et faune). L'estive est plus encore,
une phase dans le cycle de production qui permet le vide sanitaire de
l'exploitation (le seul possible dans l'année), constitue une phase
d'alimentation particulière (la moins chère, la plus riche et
spéciale), permet la constitution des réserves alimentaires pour
l'année, l'entretien des clôture et diverses maintenances et
réparations. Pour la plupart des éleveurs, l'estive demeure un
maillon essentiel de la chaîne fourragère et s'inscrit dans le
33 Ici, nous sommes bien sûre sur des
équilibres, mais des équilibres très fragiles qui peuvent
être rompus très rapidement. Suite à un problème de
santé, une épidémie, tout peut basculer très vite
voire chavirer (Entretien 1. Mai 2008)
34 Avec un quota ovin de 350 et plus, il est difficile
d'y associer les bovins (Entretien 3. Mai 2008)
prolongement de l'exploitation. Etant donné qu'il
s'agit de la terre de toute façon, c'est une propriété
domaniale, communale ou privée où les éleveurs ont le
droit de faire paître gratuitement leur bétail ou avec des frais
d'admissions variables. Pour certains agriculteurs, c'est d'abord et avant tout
pour les vacances35 et le « repos ou la détente »
de leurs bêtes. Pour d'autres, l'estive n'est ni seulement l'extension de
leur ferme, ni un lieu de pâturage temporaire mais, une portion ou
parcelle de leur exploitation qui respecte le modèle de pâturage
tournant du système Ariégeois. En résumé, l'estive
est tout ce qui vient d'être élucidé en même temps,
c'est un tout au milieu duquel il y a une certaine richesse (et je dirai
même une richesse tout court), le mouvement, la vie, mais surtout la
perte de vie pour certains animaux, des troubles de fonctionnement, de la
frustration, l'anxiété et la peur36. Les
éleveurs semblent ainsi définir l'estive de façon unanime
dans leurs langages, mais quand on examine plus en profondeur les
considérations, on voit des contradictions. Pour tous, l'estive est
obligatoire parce que c'est économique, il permet « d'atteindre
» l'autonomie alimentaire et de faire un produit : le "Broutard". Le
nombre d'utilisateurs est actuellement en baisse parce que les éleveurs
ne sont pas nombreux et certains sont à la retraite. Certaines
contradictions comme : Nous pouvons arrêter l'estivage à cause de
l'ours et de la prédation ; Produire le "Broutard" nécessite que
l'animal soit "tranquille" ; Avec l'ours, nous perdons une partie de la
montagne et les animaux descendent en mauvais état corporel ; En
montagne les animaux ne font qu'à leur tête... sont quelques-unes
des points de divergences entre pro-ours et opposants à la
cohabitation.
3.1.4 Comment l'ours intervient-il dans ce milieu rural et
professionnel ?
La psychose ours en milieu rural n'est pas seulement
présente chez ceux dont les animaux sont attaqués par cet animal
sauvage. Parce que l'activité d'élevage ou le pastoralisme
précisément crée un environnement ouvert et de merveilleux
paysages, maintient la vie de nombreuses familles, beaucoup de groupes
professionnels et non professionnels, sont engagés dans cette situation
soit par l'effet des médias, soit par des expériences
vécues ou par les conflits d'intérêt.
En examinant les dires de ceux concernés par le
problème ours il semble que pour soutenir leur position par rapport
à l'ours, les éleveurs usent de plus d'arguments non techniques
(la coutume, le patrimoine, la frustration...) que d'arguments techniques (la
mortalité, la reproduction, le vide sanitaire...). Dans chaque
situation, les exploitants réclament avec force la biodiversité,
l'état
35 Nous envoyons les bêtes là haut
pour qu'elles prennent leurs vacances et non pour les mettre en prison. Par ce
que quand elles ne sont pas gênées ou stressées, c'est
alors qu'elles profitent, elles s'engraissent par ce que là haut, il y a
une flore spéciale et seules les bêtes savent où la trouver
(Entretien 1 et 6. Mai 2008).
36 L'estive est aussi l'ours, cette chose dont la
présence nous a été imposée par ceux qui pensent
que l'élevage en montagne marche comme du papier à music. A
l'approche de l'estive, on n'arrête plus de penser à comment sera
le résultat à la descente (Entretien 1 et 3. Mai 2008).
Tableau 1. Argumentaire entre Pro Ours et
opposants
Possessione l
Pro ours
Chacun doit trouver une place
Nous n'avons aucun stress car nos bêtes sont
protégées; nous sommes préent et très proches
d'eux. Nous avons une très forte relation aux bêtes.
Opposants à l'ours
l'estive est notre patrimoine, notre territoire; l'ours d'oit
être cantonné.
|
la présence de l'ours induit beaucoup de stress.
bientôt nous n'allons plus monter et il n'y aura plus d'estivage si
ça continue ainsi. Nous avons une forte relation aux bêtes et ne
tolérons pas les voir étranglées par l'ours.
Frustration
Econom ique
Aucune frustration car le savoir-faire du berger est
valorisé. Nous devons nous interroger sur certaines pratiques.
Les subventions sont onnes. C'est vrai que nous vivons une
certaine précarité économique mais elle n'est pas
justifiée par la prédation qui existait déjà et
aujourd'hui avec les chiens errants.
Nous avons été mis devant les faits accomplis;
notre savoir-faire est renié; ils pensent qu'ils doivent nous donner des
leçons sur comment faire notre métier.
les mesures d'accompagnement sont onéreuses à
mettre en place. Nous ne supportons pas les charges supplémentaire non
profitables dans notre contexte de précarité économique;
nous vivotons déjà.
Social
L'ours n'est pas partout; il y a toujours moyens de faire des
randonnées. Avec l'ours, les bergers sont biens traités et
payés.
Nous ne sommes plus en sécurité à la
montagne. Avec cette situation, nous avons perdu l'espoir de succession. Avec
l'ours, les conditions de travail du berger sont très dures.
Environnemental
Sanitaire
L'ours améliore la biodiversité
Les bêtes sont bien soignées, moins de
problèmes sanitaires et de mortalités.
L'ours détruit la biodiversité.
Avec la contention et les parcs de nuit les animaux
développent le pietrin et la mortalité s'accroit.
Reproduction
C'est vrai que quand l'ours intervient, on peut se soucier de la
reproduction suite aux avortements mais ce n'est pas le cas.
ous avons beaucoup d'avortement embryonnaires donc perte de
proctions. Certaines bêtes sont entretenues pour rien.
Alimentation
Puisque les bêtes sont bien traitées, elles sont en
bon état corporel à la descente de l'estive.
Les parcs de contention et de nuit ne limitent pas la
prédation sans le Berger et le Patou mais permettent une meilleure
gestion du pâturage. Clôtures électriques plus Patou
limittent et même éliminent la prédation. Le Berger
élimine la prédation quand il est présent et voir de loin.
Ramasser les animaux pour la compensation ne pose aucun problème.
L'ours perturbe le calendrier de pâture du berger, le
comportement des bêtes et l'exploitation du pâturage.
Les parcs de contention et de nuit exposent les bêtes sans
limiter la prédation. Ils empêchent l'exploitation
raisonnée des parcours par les animaux. Les parcs électriques, le
chien Patou sont d'une influence sinon nulle mais du moins moindre sur la
prédation. Le ramassage des bêtes pour la compensation le travail
du berger et de l'éleveur et stresse l'animal.
corporel des animaux, leur santé, la perte et leur
avenir (voir tableau 1 ci-contre). Quelle que soit la position, la raison est
plus socio-économique que environnementale. Même si la gestion
d'un territoire ne peut être satisfaite par de simples mécanismes
de régulation (Beuret, 1998), le conflit actuel pour et avec l'ours est
due aux autorités qui ont oublié que la prise de décision
suit deux rationalités : une rationalité substantive
(intelligence motivée par l'intérêt personnel pour
l'optimisation) et la rationalité procédurale (intelligence
systémique). En effet, l'examen de la définition des fonctions et
des compétences, la délimitation du système et les modes
de considération, est essentiel pour éviter les
incompréhensions. Dans ce travail, il apparaît que pour les
éleveurs, produire est leur fonction fondamentale et non gardien des
terres. Parallèlement, bien garder les bêtes est leur
impératif moral et non travailler la terre. De même, les droits
d'utilisation (pas toujours gratuit) et les droits de propriété
fournissent une plus grande légitimité que celle du
prédateur. Enfin, un bon travail avec une certaine qualité de vie
et de produits, en plus du libre arbitre et de
l'indépendance37, sont les modes de considérations
supérieures. Par conséquent, la réconciliation suppose
d'avoir un accord sur un principe équivalent permettant de comparer les
points de vue de chacun, qui devrait servir comme principe supérieur
commun. Dans le cas présent, les contrats territoriaux entre les
agriculteurs et la collectivité mettent en scène les actions des
acteurs utilisant différents principes de légitimité sur
leur avenir professionnel et la biodiversité. Pour ces deux produits non
commercialisables, la biodiversité produit des interactions entre
"offreurs" et "demandeurs" et entre "offreurs" d'un côté et
"demandeurs" de l'autre.
Dans le but d'évaluer les évolutions du projet
de réintroduction de l'ours ou du pastoralisme, il est nécessaire
de répondre aux questions suivantes : Comment les éleveurs
intègrent ou ont intégré la présence de l'ours dans
leur système d'élevage ? Quelles sont les évolutions
depuis le lancement du plan ours ? Les mesures d'accompagnement induisent-elles
des évolutions de pratiques ou rémunèrent-elles ce que les
éleveurs avaient l'habitude de faire ? Connaissant les opposants dans ce
domaine du patrimoine et du territoire, nous pouvons également
rechercher une réponse aux questions suivantes : Quels sont les
principes supérieurs communs ici ? Un terrain d'entente peut-il
être trouvé sur la base du choix consensuel de l'un de ces
principes ou par le biais d'un arbitrage ? Considérant que l'avenir
professionnel, la culture d'estivage, l'autonomie alimentaire, la
tranquillité des bêtes et leur état corporel, la
frustration et la précarité économique sont des
préoccupations, que la biodiversité fait allusion ici à la
seule notion de l'espèce pour les acteurs, je propose :
37 L'Indépendance : une autonomie
réclamée vis-à-vis de l'environnement local, naturel et
humain, mais une subordination acceptée vis-à-vis des partenaires
professionnels ; valeur dont la modernisation a restreint le pouvoir de
décision des agriculteurs et qui ne s'applique aux même choses
(Beuret, 1998).
> Un rétablissement impératif de la confiance
des éleveurs qui conduira à des contrats et
règlementations ;
> Une Mise sur pied du processus d'information pour
informer les acteurs de ce qu'est la biodiversité dans le sens le plus
large du mot et pourquoi et comment la préserver, les services rendus
par elle en retour ;
> Une définition des conventions :
V' Convention professionnelle ou convention de qualification pour
fixer les normes sociotechniques
V' Convention d'effort ou de sacrifice pour fixer le point de
référence
V' Convention d'aide pour encourager résultats
V' Convention de Produits pour évaluer les
résultats
> Une conception de la méthode d'évaluation afin
de maximiser la cohérence interne et externe des conventions.
Si nous pouvons schématiser les scénarios qui
conduisent à la prise de décision de ceux qui sont engagés
dans cette polémique ours, il est plus difficile de faire la
différence entre la vraie justification et le conflit
d'intérêts. Néanmoins, l'ours a, à la fois
divisé et réuni les pyrénéens sur tout le massif.
En règle générale, on estime que le pastoralisme concerne
ou compose avec, d'un côté les éleveurs et de l'autre les
bergers. Cette étude a révélé que, entre
éleveurs et bergers il y a un groupe spécial38 connu
sous le nom d'éleveurs-bergers39. A l'issu des enquêtes
réalisées pour ce travail, les éleveurs-bergers ont
été les plus nombreux à réclamer la cohabitation
pastorale. Cela peut être dû au faible effectif de leurs troupeaux
ou de leur souvenir douloureux40 en tant que bergers. Ici le point
de vue du berger a été très proche41 de celui
de son employeur (GP). Cependant, cela ne signifie pas qu'un éleveur, un
éleveur-berger ou un berger travaillerons toujours avec des
38 A cause de leur point de vue sur la cohabitation
pastorale et les raisons de leurs choix (ils sont beaucoup plus pro- ours).
Toutefois, en examinant leur effectif et les conditions qu'ils suggèrent
être nécessaires pour l'efficacité de la cohabitation
pastorale, on rapproche un peu leur propos à ceux d'éleveurs
Africains concernant le conflit gros et petits éleveurs autour du droit
d'usage des puits pastoraux. En effet comment justifier que l'on reconnaisse
que cohabitation efficace signifie petits troupeaux, beaucoup de bergers, gros
investissements (Patou, parc électrique et parcs de nuit), que le
bétail se vend au prix d'il y a trente ans, que le prix des intrants par
contre ait été multiplié par 5 si ce n'est plus, que la
valeur ajoutée du produit labellisé ours ne permette pas de
sortir de la précarité économique... et que l'on
évoque qu'une cohabitation efficace est possible dans les conditions de
mise en route du plan ours ?
39 Eleveur ayant généralement un
troupeau de petite taille et qui garde les bêtes de tous ou partie des
éleveurs de son GP pendant l'estive sous forme de travail salarial.
40 Travail sans contrat, sans règlementation
salariale, conditions de travail rudes...
41 Avec 5% de GP pro-ours, beaucoup de bergers se
réclament plutôt protecteurs de bêtes et donc opposants
à l'ours de peur de manquer du travail les prochaines saisons s'ils
arrêtaient de travailler pour le GP pro.
structures du même point de vue même s'il aimerait
que ce soit ainsi. Parce que, dans l'ensemble du massif des
Pyrénées, plus de 90% des agriculteurs sont des opposants et
l'ours n'est pas présent partout, les scénarios des relations
entre éleveurs, éleveurs-bergers, bergers et GP en fonction du
point de vue de chacun sont représentés par le schéma 4
ci-dessous.
= Travail sous condition qu'aucun GP opposant ne se situe
à proximité (presque impossible)
= Travail sous condition qu'aucun GP opposant ne se situe
à proximité pas de présence d'ours dans l'estive
3
4
= Travail sous condition qu'aucun GP opposant ne se situe
à proximité (presque impossible)
2
1
GP pro
= Travail sans aucune condition ni hésitation
= Travail sous condition qu'aucun GP opposant ne se situe
à proximité
2
1
3
Eleveurs pro
Eleveurs opposants Eleveurs-Bergers pro Eleveurs-Bergers
opposants
Bergers pro
Bergers opposants
4
4
GP opposant
Figure 5 Scénarios des relations entre Eleveurs,
Eleveurs-Bergers, Bergers et GPs
Avec les résultats de ce travail, le problème
ours, est sans surprise assez similaire à celui du loup (Canis
lupus) dans les Alpes comme l'ont mentionné Benhammou et Salvador
(2003). Selon eux, les positions au sein de chaque groupe ne sont pas
monolithiques. Il n'y a pas d'un côté un monde agricole contre la
cohabitation avec les prédateurs et de l'autre les écologistes
idéalisant prenant l'ours comme le symbole suprême de
biodiversité. Même si on peut constater que le fait que tous les
éleveurs ne s'opposent pas frontalement à l'ours (ils veulent
juste qu'il ne leur cause pas de dégâts, et ne veulent pas vivre
dans la crainte qu'il apparaisse à tout moment), donne espoir à
la cohabitation, il ne faut pas se voiler les yeux; la présence de
l'ours est totalement négative pour l'élevage traditionnel. Il
mettra fin à cet élevage extensif des races autochtones tel que
pratiqué actuellement puisqu'il oblige à enfermer les bêtes
dans des parcs, et fait perdre tout espoir à la jeunesse. Ceci peut
toutefois être remédié puisqu'en Afrique le pastoralisme
plus mobile et divagant cohabite avec lions, panthères et autres fauves
bien plus costauds! Mais sans diaboliser ni sacraliser le prédateur, il
faut situer chaque chose dans sont contexte social, culturel, technique,
économique, politique, anthropologique et ethnologique.
Au sein de la profession agricole, certains agriculteurs et
professionnels dont l'activité est en lien avec l'agriculture luttent
pour améliorer le statut de l'éleveur établissant un
partenariat avec les acteurs de l'environnement motivés par la
cohabitation. Rejoignant l'idée de Benhammou et Salvador (op.
cit.) selon laquelle, les éleveurs devraient être conscient
que le problème du prédateur pourrait s'amplifier s'ils
s'enferment sur des discours radicaux et techniquement sans valeur pour la
situation présente, je pense que les professionnels
agricoles ne devraient plus trop attendre pour définir « leurs
» conditions de cohabitation. Dans ce sens, la recherche de solutions
techniques sans conforter l'ours dans son fauteuil de prédateur
protégé, ni sans oublier qu'une espèce parapluie
améliore les services d'un écosystème, devrait être
mise en place par les organismes porte paroles de la profession. En revanche il
est clair que les « solutions techniques » proposées par les
institutions pour la cohabitation n'ont jamais été testées
auparavant et n'incluent pas une assistance à la fois face à la
frustration sociale, qu'aux situations inattendues. Le ministère de
l'agriculture est presque absent et même hésitent et
réticent à fournir des efforts aux questions délicates. La
communication des autorités pour ce sujet ours dans les
Pyrénées montre plus une stratégie de communication
inefficace que l'opacité volontaire.
3.1.5 Quels sont les dommages de l'ours sur le pastoralisme ?
Les dommages liés à l'ours sont à la fois
d'ordre social (psychologique, peur, haine et intolérance),
économique (perte d'animaux, baisse de fertilité, plus de
traitements...) technique (perte d'espace, modification des circuits de
pâturage, mauvaise constitution des réserves ...). La situation
sociale du pastoralisme en Ariège aujourd'hui est la peur des jeunes
pour l'installation et par conséquent la déprise humaine. Les
agriculteurs sont menacés par téléphone ou des lettres
anonymes, certains se sont installés ailleurs. Concernant
l'économie, le profit d'une campagne étant lié à un
bon estivage, une mauvaise saison d'été équivaut à
une perte d'argent. Cela est compréhensible parce que moins de ventes,
moins de rentrées. En outre, plus de prédation, plus de stress et
moins d'engraissement42 et donc des performances de reproduction
médiocres ou faibles. Aussi, plus de prédation, implique plus de
présence d'éleveurs en montagne et moins de travail sur
l'exploitation (entretien des clôtures, fauche), plus de « ramassage
» de bêtes et plus de problèmes de santé à la
descente de l'estive. Le plus gros problème de la prédation est
technique. Ceci n'est pas à prendre pour argent comptant puisque les
éleveurs laitiers rassemblent fréquemment tout leur effectif sans
pour autant crier à la parasitologie ni à la perturbation de
leurs circuits de pâturage. C'est jusque que l'application des mesures du
plan ours n'est pas généralisable et qu'il faut encore un peu de
temps pour que le système pastoral tel que pratiqué actuellement
puisse s'adapter à elles. Lorsque beaucoup de bêtes meurent, ceci
est nuisible pour l'auto renouvellement du troupeau, car pour les remplacer,
l'éleveur doit acheter les agnelles qui ne peuvent pas produire
immédiatement et qui lui coûteront pour leur entretien; certaines
mourraient même avant l'agnelage. Ceci est coûteux en terme de
gestion parce que les nouveaux arrivants vont la plupart du temps se constituer
en un sous- troupeau jusqu'à ce qu'ils aient confiance en leur nouvelle
famille. C'est à la fin un problème sur le comportement animal
(mouvement, modes de pâturage, temps de repos). Malgré les
déclarations
42 Parfois l'agneau est tellement maigre qu'il est
conservé pour la prochaine estive
des moutonniers concernant les dégâts et
difficultés de leur profession liés à l'ours on peut se
demander pourquoi ils se maintiennent dans cette production ciblée. Mais
Lasseur et Garde (2007) mentionnent dans leurs travaux que ce maintien
résulte d'un défaut d'alternatives de reconversion.
3.1.6 Comment l'écologie est-elle perçue dans
cette polémique ours ?
Il apparaît ici que ni le ministère de
l'écologie à travers la Direction Régionale de
l'Environnement (DIREN), ni les scientifiques impliqués dans ce projet
n'évoquent l'écologie dans son sens large, du moins en rapport
à ce qui est mentionné dans les documents d'étude du
projet de ce plan. Cela peut être la raison pour laquelle les
agriculteurs ne parlent que d'espèces comme gain ou perte de
biodiversité liée au plan ours. Pourtant, il semble que le plan
de réintroduction de l'ours ait été initié pour des
préoccupations environnementales. Cependant, les indicateurs
environnementaux parmi lesquels les indicateurs écologiques
utilisés pour communiquer les informations sur les
écosystèmes et l'impact des activités humaines à
des groupes tels que le public ou les décideurs politiques ne figurent
pas dans les documents du projet. Il est vrai que cela est plus facile à
penser qu'à mettre en oeuvre comme le démontrent Giradin et
al., (1999) pour qui il est souvent difficile et même impossible de
caractériser le fonctionnement d'un système complexe, comme un
éco-agrosystème, au moyen de mesures directes. La taille du
système, la complexité des interactions existantes, ou la
difficulté et le coût des mesures nécessaires sont souvent
écrasant. Mais pour ceux qui ont pris l'habitude de vivre « dans le
respect de leur environnement », il est nécessaire de savoir ce qui
est attendu et ce qui leur est reproché. Comment les pratiques agricoles
actuelles affectent la valeur de la biodiversité et étendent cet
effet négatif sur des habitats non agricoles ? Comment peuvent
être atténuées les effets préjudiciables ? Comment
leurs actions passées ont été et qu'est ce qui pourrait
donner de meilleurs résultats ? Quels sont les intérêts
écologiques mis en reliefs ? Quels sont les indicateurs et
l'échelle d'applicabilité ? Quel est le rôle de la
biodiversité dans le maintien des fonctions spécifiques de
l'écosystème (par exemple les cycles biogéochimiques) ?
Quels sont les processus de développement et de suivi afin de
déterminer si les problèmes s'aggravent, si une action est
souhaitable ou nécessaire ? Comment mesurer les besoins et les
performances des programmes et politiques publiques ? Comment quantifier les
services des écosystèmes et quels éléments de
l'écosystème sont indispensables pour offrir des services de
qualité ? Quels sont les coûts, les avantages, la
répartition et le rapport coût/efficacité ? Quels sont les
avantages de la réintroduction de l'ours brun pour la
biodiversité comparés au maintien du pastoralisme traditionnel ?
Quels critères devraient être utilisés pour
déterminer le moment d'intervenir pour faire face à la
polémique ours ? Quelles sont les conséquences écologiques
de "l'ensauvagement" comme stratégie de conservation à long terme
? Ni le mécanisme opératoire du projet ours, ni la connaissance
scientifique à jour ne peuvent fournir des réponses à ces
questions.
3.1.7 Dans ce contexte, l'ours est-il une espèce parapluie
ou une espèce emblématique ?
Une espèce parapluie est une espèce qui est
considérée comme en voie de disparition ou menacée ;
grande et exige un vaste habitat. Sa biologie est bien connue, elle est
facilement observée/observable ou échantillonnée ;
migratrice et a une longue durée de vie (Cluff et Paquet, 2003). Ainsi,
par la protection de sa zone de vie (très vaste), d'autres
espèces sont par ricochet protégées.
L'ours a en général besoin de beaucoup d'espaces
boisés afin de prospérer. Vous pouvez donc imaginer qu'il existe
plusieurs espèces sous le « parapluie » de l'ours brun dans
les Pyrénées. Donc, en protégeant l'ours brun dans les
Pyrénées, ces autres espèces sous son « parapluie
», seront également protégées. Sauf qu'en date
d'aujourd'hui, nous ne savons pas quelles sont ces espèces ? Quelles
sont les caractéristiques de leurs différents habitats et leurs
fonctions sur le fonctionnement des écosystèmes
pyrénéens ? Quelle a été l'évolution de ces
espèces avec le pastoralisme seul ? Quelle sera leur évolution
avec la cohabitation pastorale ? Ainsi, se penchant sur la définition et
le contexte des Pyrénées, l'ours brun n'est pas
considérée de façon appropriée comme espèce
parapluie sur la chaîne pyrénéenne, même si son
régime alimentaire et ses habitudes migratoires poussent à penser
qu'il aurait un impact significatif sur la structure des communautés
végétales à travers la dispersion des fruits par exemple,
ou la préservation/protection de certaines espèces par
l'exclusion du pastoralisme. Le vrai problème ici semble être que
les décideurs trouvent plus de services rendus à «
l'environnement » par les écosystèmes forestiers que les
écosystèmes prairiaux. Mais quel est le coût de la
restructuration sociale inhérente à l'abandon du pastoralisme en
Ariège et à la reconversion ? La population locale est-elle
préparée ou du moins consentante ? Y aura-t-il durabilité
dans ce processus ? En effet, le plan Mansholt43 (1980), stipule que
la moitié de tous les chefs d'exploitations agricoles n'ont souvent pas
la formation leur permettant de s'adapter facilement aux conditions sociales et
économiques changeantes. De même, leurs exploitations ont un
faible potentiel de production et une absence, dans de nombreux cas,
d'alternatives ou d'activités économiques d'appoint. En outre, la
gestion d'une espèce parapluie ne fonctionne pas toujours comme les
scientifiques le pensent. A titre d'exemple, en Californie, un certain insecte,
espèce parapluie vivait très bien. Mais après le lancement
d'un programme de protection de cet insecte il a diminué en nombre. Ce
qui s'est passé, c'est que certains développements ont
été autorisés dans le milieu de vie de cette
espèce, en gardant uniquement à l'esprit de la protéger.
Il est donc souvent mieux de préserver les terres plutôt qu'une
espèce en particulier44. Si effectivement l'ours peut
43
http://www.ena.lu/mce.cfm
44
http://www.ecofloridamag.com/askeditor
umbrella species.htm
produire une manne touristique capable de faire oublier «
économiquement » (puisque c'est de ça qu'il est question) le
pastoralisme en Ariège, l'affluence des touristes ne veut-elle pas dire
structures d'accueil et désenclavement ? On reproduira probablement tout
simplement l'hospice de France dans sa configuration actuelle en Ariège.
Lambeck R. (1996) estime qu'il est difficile de justifier la concentration sur
une espèce dans un écosystème sans savoir son rôle
dans le fonctionnement dudit écosystème. Des doutes subsistent
quant à l'étendue de la protection accordée à
l'espèce dans le cadre de son "parapluie" qui est difficile à
évaluer et supposé plutôt que prouvé. L'approche
basée sur une seule espèce est souvent critiquée en raison
de l'immense coût de la conservation. De toutes les façons, comme
le précise Janet C. (2007) la légitimité du choix d'une
espèce retenue, la relation entre la préservation de cette
espèce et la capacité à agir sur la biodiversité en
général sont en question. Dans le cas particulier de la
restauration et de la préservation de l'ours et des relations entre
cette préservation et les activités d'élevage pastoral, le
niveau d'incomplétude des connaissances rend la question difficile
à traiter.
3.1.8 Quel est le coût de la réintroduction de
l'ours brun ?
Pour 2006, le budget global prévisionnel du plan ours a
été de 2,26 millions d'euros avec 580.000 € pour les
indemnisations et les subventions aux éleveurs. Dans ce budget, il n'est
mentionné nulle part la valeur d'un ours acheté en
Slovénie, ni les charges relatives à la transaction (frais de
mission, entretien véhicules...), sauf si ce coût est compris dans
les 384.000 € de dépenses engagées la rubrique
dépenses des Opérations techniques et scientifiques
spécifiques au renforcement. Cela peut vouloir montrer que pour 2,26
millions d'euros engagés par le contribuable européen, seulement
384.000 € a été consacré à l'ours qu'on
prétend défendre et 580.000 € au pastoralisme qu'on veut
forcer à accepter l'ours. En d'autres termes, moins de la moitié
pour les véritables concernés et le reste... on se
précipiterait à conclure que dans cette polémique, Ours et
Pastoralisme sont tous victimes ; de qui ? Pour 2006, ce montant a-t-il
été suffisant ? Ce que l'on sait, c'est qu'en 2007, il y a eu 79
expertises suite aux situations incriminant l'ours avec 350/361 dommages
imputés à l'ours parmi lesquels : 295 pour les ovins, 25 pour les
bovins, 9 pour les chevaux, 23 pour les ruches et 2 classés autres
(ASPAP, 2008). Si nous considérons que seulement dans l'Ariège
346.000 ha sont concernés par le pastoralisme et que, pour
protéger les animaux et les ruches quatre fils électriques sont
nécessaires, même si seulement un fil et deux sont utilisés
pour garder les chevaux et les bovins respectivement. Partant, il est
légitime de se demander quels sont/seront les bénéfices du
plan ours et leurs externalités positives à long terme sur la
biodiversité comparés à ce que le pastoralisme produit
aujourd'hui ? Comment les partager ? Quel est le coût de la formation des
agriculteurs à faire autre chose que l'élevage ou d'élever
autrement ? Quel est le coût de cette restructuration sociale ? Parce que
la réponse à ces questions ne peut être trouvée par
les résultats de
ce travail, ces questions sont donc les sujets de
réflexion et les axes de travail pour progresser dans ce projet en
faveur de la cohabitation à l'avenir.
Ces multiples questions ne sont pas de nature ou n'ont pas
pour but de fermer la réflexion sur la cohabitation pastorale. Bien au
contraire, prenant en compte les travaux de Aubin (1991), selon qui Un
organisme vivant modifie le milieu dans lequel il vit, et s'adapte aux
modifications exogènes de ce milieu, suivant ainsi un « sentier de
viabilité » le long duquel il n'y a ni équilibre, ni
optimum, autres qu'instantanés nous espérons plutôt que les
conditions nécessaires pour une cohabitation durable soient
trouvées. Les travaux actuels sur la dynamique des systèmes
tendant à montrer que l'équilibre est un concept ancré
dans les esprits mais qu'il n'existe guère d'équilibre
qu'instantané dans la nature comme dans l'économie, nous nous
alignons à la suite de Weber et al. (1990) et Pavé
(1994) pour penser qu'un développement viable à long terme
(durable) revient à envisager de gérer au mieux, sur la base
d'objectifs de très long terme, des interactions entre des sources
différentes de variabilité, économique, naturelle et
sociale.
Il ressort de ces entretiens avec quelques acteurs du milieu
rural que ce n'est pas tant l'ours (l'animal en lui-même) qui fait
problème45 en montagne, mais le statut qu'on lui a
attribué et les considérations des personnes et autorités
extérieures concernant l'activité pastorale. Cela confirme les
conclusions du plan Mansholt (1980) qui stipulent que dans un ensemble
très complexe de problèmes sociaux, financiers et
économiques, auxquels s'ajoutent des problèmes humains
très délicats où interviennent de nombreux facteurs
psychologiques, on ne saurait aboutir à des résultats par
quelques recettes simplistes. Plutôt que de s'appuyer sur des
dispositions législatives et réglementaires rigides, il faut, au
contraire offrir aux acteurs un large éventail de possibilités
nouvelles leur permettant de déterminer librement leur propre initiative
pour leur avenir.
45 Si décroissance générale, oui
à l'ours sinon, non ! (Entretien 8. Mai, 2008) propos qui suit
l'idée de Daniel Bensaïd
(2003), selon qui la Terre souffre avant tout des «
conséquences de l'économie de profit et de la croissance à
tout prix et à court terme» . ; on se plaint qu l'élevage ne
vit que des subventions comme si avec l'ours on a l'intention de réduire
les dépenses des contribuables pourtant avec toutes ces subventions, je
gagne moins que le SMIG tandis que qu'un viticulteur de Bordeaux se paye une
maison à Toulouse et un agriculteur un jet privé où est
l'équité et la logique ? (Entretien 7 et 11. Mai, 2008) ; on
pouvait vivre sans trop de soucis avec l'ours si on avait le droit de se
défendre. A partir du moment où il protégé et que
ses actes sont applaudis et nos pratiques reniées, il devient lourd
à supporter (Entretien 5, 14. Mai, 2008)
Conclusion
L'estive n'est pas seulement symbolique dans le fonctionnement
des élevages de montagne mais le poumon (économique,
assainissement, reproduction) de leur existence, qui contribue à
maintenir un tissu rural vivant ; c'est l'identité territoriale du
berger. Pour les éleveurs ariégeois, la mobilité pastorale
n'est pas simplement une technique avec laquelle ils s'approprient les
ressources ; c'est la source même de leur succès dans le contexte
agricole actuel. Les animaux et les hommes ont progressivement pris l'habitude
de leur environnement et du rythme de vie pratiqué à cet
égard. Ici, la logique de garde est l'adaptation du savoir-faire du
berger aux habitudes animales et à leurs comportements spontanés,
aux conditions biophysiques du milieu, aux objectifs des éleveurs. Elle
est aussi fonction du point de vue du berger à propos de l'entretien de
l'espace, de l'optimisation et de la maximisation de l'utilisation de la
ressource naturelle... Donc, il n'existe pas de norme absolue pour le choix
d'un bon parcours. Ce qui rend le bétail des éleveurs de
certaines régions prospérer pourrait être
préjudiciable à celui des éleveurs d'autres
régions. Ainsi, le choix doit toujours être fait,
conformément à ce dont les animaux sont devenus habitués.
En définitive, les bergers ont une connaissance intime sur les
régions qui leur sont familiers. Aujourd'hui, il est très
difficile de distinguer clairement le savoir-faire de la connaissance. En
Ariège les éleveurs et les bergers ont le plus souvent une
formation agricole de base, mais les conditions du milieu les obligent à
utiliser seulement leur savoir-faire dans la pratique de leur travail. Par
conséquent introduire de nouvelles données techniques suppose
qu'une réhabilitation ait été faite en amont. Par
ailleurs, la façon dont les moutonniers envisagent les pratiques qu'ils
mettent en oeuvre en référence à l'idée qu'ils ont
de leur travail, dépend de leur expérience et des interactions
sociales au sein des groupes professionnels locaux. Pour que les
éleveurs soient plus coopérants aux résolutions
liées aux questions environnementales par un changement de leurs
pratiques, la transformation de leurs connaissances et savoir-faire doit
s'opérer au sein des associations locales en rapport aux attentes et aux
conditions du milieu.
Dans le contexte économique du pastoralisme
aujourd'hui, des frais supplémentaires sont difficilement supportables.
Puisque les mesures d'accompagnements préconisent seulement 50% de
subvention pour la prise en charge du berger lorsque toutes les mesures ne sont
pas mises en place et 80% quand elles le sont toutes, près de 99% des
éleveurs pro-ours enquêtés sont juste des
opportunistes46 parce qu'ils utilisaient
déjà chien Patou et garde serrée dans leur pratique. Ils y
ont inclus les parcs pour bénéficier au maximum de la subvention
lors de l'engagement d'un berger. Pour tous les éleveurs, les mesures
d'accompagnement ne sont applicables ni partout, ni à plein temps, ni
par tous les temps. Le couple Berger - chien Patou réduit la
prédation, mais il ne devrait pas être présenté
comme une panacée pour les problèmes du pastoralisme. Rien n'a
changé dans les exploitations et les systèmes, même la
diversification des exploitations était courante avant le lancement du
plan ours. Afin d'avancer dans le processus de cohabitation, les
autorités devraient revenir en arrière, éliminer la
frustration et les conflits d'intérêts et mettre le
prix47. Pour que le projet soit efficace, il faille diviser par 200
le nombre de moutons qui estivent pour avoir le nombre de bergers, de cabanes,
des parcs et chiens Patou nécessaires. Le système pratiqué
aujourd'hui a fortement évolué s'adaptant aux évolutions
socio-économiques et techniques. De plus, le milieu offre une certaine
capacité d'adaptation, mais l'allégation à une certaine
fierté professionnelle est une pierre d'achoppement pour la mise en
oeuvre des mesures d'accompagnement même si le plan ours présente
le pastoralisme et ses problèmes en tranches de saucisson. Les
agriculteurs peuvent élever autrement, mais ils doivent y penser et le
concevoir eux-mêmes.
Il a peut-être été pensé qu'avec le
retour de l'ours, les éleveurs devraient passer d'un raisonnement
quantitatif à un raisonnement qualitatif. Cela vaut-il la peine dans le
contexte actuel où la variation du prix du marché des intrants
est à l'opposé de celui des produits ? Certains éleveurs
ont fait un produit labellisé, mais son prix a très vite atteint
un prix plafond alors qu'ils étaient encore économiquement
très précaires, gagnant la plus part de temps moins que le
salaire minimum garanti (SMIG). Aujourd'hui, les propos sont assez unanimes
chez les éleveurs : J'aimerais que ça continue après moi,
j'aimerais transmettre mais ne conseille pas ma progéniture de
s'installer. Il semble exister peu d'alternatives aux contraintes actuelles.
Certains éleveurs souhaitent actuellement faire connaître leur
travail et les conditions de sa pratique, afin que toutes les décisions
à leur sujet prennent en compte les contextes du milieu. Peu ou pas
d'éleveurs pensent agrandir l'exploitation. Un certain nombre d'entre
eux pensent qu'ils devraient d'abord rendre stable l'exploitation et la
maintenir à son état de fonctionnement actuel. Pour les
éleveurs ovins, la fromagerie, l'élevage
46 Q : Etant une minorité pro-ours dans une
zone fortement opposante reconnaissez-vous avoir raison dans votre choix et
vous sentez-vous en sécurité ? R : Il ne faut pas mélanger
les choses, j'applique les mesures d'accompagnements mais ne me définis
pas pro-ours ; ça c'est autre chose. Je pense d'abord à mes
bêtes ; j'espère encore pouvoir arriver à les garder et
arriver à transmettre (Entretien 8, 11, 14. Mai, 2008).
Q : Avec l'ours qu'est ce qui a changé dans votre
système de conduite ? R : Peut-être les parcs quoique... l'ours
n'est pas chez moi donc je ne les ai vraiment pas testé même s'ils
existent (Entretien 7, 8, 9. Mai, 2008)
47 Protéger l'environnement coûte cher.
Ne rien faire coûtera beaucoup plus cher (Kofi Annan).
bovin, les cultures
céréalières48 (coup dur pour l'environnement!)
et l'abandon sont leurs seules perspectives imaginables. Ils sont d'accords aux
modèles conceptuels mais avec les composantes locales et des
partenariats. Ils exigent de s'informer auprès des leaders et
gestionnaires en observant voire reconnaissant les succès de leurs
pratiques et actions présentes. Ils sont farouchement opposés aux
modèles préconçus (contrats kit clés en main)
prédisant le comportement du système.
Peut-être la réintroduction de l'ours sera
à court terme bénéfique à la biodiversité et
le pastoralisme, mais pour le moment, il est difficile de suggérer quoi
que ce soit. Seuls les bergers ont bénéficié de quelque
chose de ce projet ; était-ce là l'objectif ? L'avenir du
pastoralisme dépendra fortement des décisions politiques prises
par les gouvernements. Il est improbable de voir une extension significative
des pâturages fermés, les conditions d'existence des pastoralistes
deviendront de plus en plus difficiles puisque agriculteurs et lobbys de
conservation exproprient les terres de pâture. Travailler avec les
pasteurs, et comprendre de façon plus sympathique leurs systèmes
de production, pourrait servir à la fois à protéger leurs
modes de vie et renforcer leur capacité de production sur des terres
marginales et à favoriser la cohabitation d'avec l'ours. L'introduction
de la variabilité, de l'incertitude et de
l'irréversibilité dans les dynamiques des systèmes,
conduit à poser la question du développement en termes de gestion
des interactions entre des variabilités économiques et sociales
et des variabilités naturelles, tant dans l'espace que dans le temps.
48 Pour ceux dont l'âge permet encore d'aller
s'installer ailleurs et pour qui l'agriculture demeure une passion et offre une
certaine qualité de vie.
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