Jean-Marie ABOGSO137(*) : «Le mémorandum de Bruxelles est une
imposture !»138(*)
L'association « DIASPORA CAMEROUNAISE POUR LA SOLIDARITE
» a bel et bien été au rassemblement qui a eu lieu à
Bruxelles les 9 et 10 décembre derniers139(*)...
Une délégation, constituée de deux membres : Monsieur
Bodiong et moi-même, s'est rendue à la conférence publique
du 9 décembre 2003. La salle, assez petite, était à
moitié vide. Nous n'avons vu aucun membre d'un parti politique
européen (à l'exception toutefois d'une personne qui vendait des
prospectus du Parti des Travailleurs de Belgique).
On dirait que vous
ne portez pas trop les organisateurs à coeur ? Je
connais assez-bien «libéral» qui organisait cette
conférence. Il est malheureusement difficile de penser, à la
lecture des prises de positions de ce groupe, qu'il ait d'autre objectif que de
ternir l'image du Cameroun. Je pense que sur ce point, très peu de gens
diraient le contraire. Monsieur Kapet de Bana est
président de «Ligue camerounaise des Droits de l'homme», et
à ce titre, il est installé à Paris ! Il avait
déjà écrit en 2002 un rapport très
déséquilibré sur la situation des droits de l'homme au
Cameroun. Je connaissais donc l'individu et ses idées. Il semblait
d'ailleurs se réjouir d'avoir pu cette année commanditer un
rapport encore plus négatif sur le Cameroun (Il n'a pas dit rigoureux).
La conférence s'est tout de même bien
passée. Quelles sont vos impressions sur les exposés des
différents intervenants ?
Une fois l'absence
du Prof. Abel Eyinga annoncée, on a donné la parole à
Madame Augusta EPANYA. Elle semblait très gênée par les
caractéristiques de l'assistance: réduite (entre vingt et trente
personnes) et très peu d'Européens (deux). Son texte de
propagande finira quand même par reconnaître que sous la
présidence du Président BIYA, les Camerounais se sont sentis plus
libres qu'avant. «Les années AHIDJO ou les années de
plomb... ». Maître MOMO est un magnifique
conteur. Il n'est pas cependant parvenu à faire croire à la salle
que le droit de propriété n'existait pas au Cameroun. Ses
exemples truffés d'incohérences et de documents photographiques
(contradictoires ou non authentifiés) vont parfois réussir
à émouvoir la salle mais jamais, malgré son sens du show,
il ne la convaincra de se soulever contre les institutions.
En se référant au Commandement Opérationnel
(Unité spéciale chargée de lutter contre le grand
banditisme) pour affirmer que l'Etat camerounais est un Etat répressif
qui terrorise la population, Maître MOMO fait preuve d'une
irresponsabilité notoire. Car, comment laisser croire à l'opinion
publique que combattre la grande criminalité, très intense alors,
était une atteinte aux droits de l'homme. Il y a eu des bavures, elles
ont été sanctionnées et des jugements ont
été prononcés. Pourquoi dès lors, s'évertuer
à prouver que ces bavures étaient couvertes par l'Etat ?
L'intervention du Professeur Kapet de Bana sera lyrique, elle n'a sans
doute pas changé depuis 1960. Nous replongerons pendant près
d'une heure dans le passé («Sauce KAPET»). Il aura alors
l'occasion de tenir des propos indignes vis à vis de nombreuses
institutions du pays. La salle le suivra, jusqu'au moment où il tentera
d'introniser monsieur Tene Sop comme héritier de la tradition
«upeciste». Le silence, assez lourd, le fera reculer sur le sujet.
Monsieur Kapet parlera alors de la recherche d'un candidat capable de gagner
les élections présidentielles. Ignorant de ce fait le candidat de
son parti dont les tracts étaient pourtant présents dans la
salle. Ce comportement finira par déstabiliser l'auditoire.
Nous ne parlerons pas ici de l'intervention de
Monsieur Tene Sop qui semble n'avoir pris la parole que pour conclure qu'il
n'avait rien à dire ! Le texte de Monsieur Abel
Eyinga, bien que discutable sur le fond, a donné un semblant de
sérieux à la conférence. Mais l'absence de l'auteur a
empêché tout débat sur ses affirmations.
La partie débat achèvera de transformer le désordre
ambiant en carnaval historique. En effet les questions que notre
association à posées, par mon entremise, ont suscité une
émotion caractéristique des groupes peu habitués à
la contradiction. Cette émotion fera passer à la trappe les
questions des militants qui voulaient des résolutions concrètes
après le «bavardage».
Avez-vous signé le mémorandum qui a
ponctué la conférence ? Nous ne pouvions pas
signer le mémorandum. D'abord parce que nous n'avons jamais
été associés à quelque concertation que ce soit
à ce sujet. D'autre part parce que les objectifs d'un tel document
n'étaient pas clairs.
Et pourquoi ? La
conférence n'a jamais abordé la question du texte du
mémorandum tant elle s'était déroulée, comme je le
disais tout à l'heure, de manière beaucoup trop chaotique.
C'est donc un groupe d'individus qui, sans concertation aucune avec la
Diaspora de Belgique, décide de présenter un texte au nom de
ladite Diaspora. Ce comportement n'est pas démocratique et nous,
Diaspora Camerounaise en Belgique, dénonçons ce coup de force.
Et sur le fond ? Ce mémorandum partisan est
surtout le fruit d'un groupe qui, sous le couvert des droits de l'homme,
prétend jouer un rôle politique au Cameroun. Il n'est donc pas
étonnant qu'il soit truffé d'inexactitudes. Il est bien dommage
que sur un sujet aussi important des personnes, vivant pour la plupart à
l'extérieur du pays, se livrent à de la démagogie.
Pourquoi réagir maintenant ? J'ai
pensé dans un premier temps qu'une conférence aussi mal
organisée soit sans importance. C'est par la suite lorsque j'ai vu la
désinformation qui s'organisait autour d'elle que j'ai
réalisé que je devais témoigner pour les
générations à venir. Bruxelles a été le
centre d'une imposture...
Une fois de plus, c'est grâce à Internet
que le ''diasporique'' J-M. Abogso a pu s'exprimer et de surcroît
diffuser son point de vue.
. L'étude du Collectif des
organisations démocratiques et patriotiques de la diaspora camerounaise
(CODE) et de la Diaspora camerounaise pour la solidarité comme
mouvements et associations des diasporas camerounaises de l'Occident, de la
France et de la Grande-Bretagne en particulier dégage les
différentes tendances politiques visibles à travers les
comportements des Camerounais de l'extérieur. En effet, la diaspora
camerounaise apparaît comme un groupe pluriel de par ses objectifs, ses
croyances, ses parcours, ses activités et ses modes d'actions.
La vie politique camerounaise en
terre diasporique, notamment en France et en Grande-Bretagne est la mise en
exergue à la fois de différentes cultures politiques
camerounaises et de différentes idéologies politiques
s'affrontant déjà au plan local. Il s'agit bien là, d'une
intégration différentielle des Camerounais de France et de
Grande-Bretagne dans le jeu politique national. C'est aussi des luttes
d'influence, des stratégies de positionnement, entre le parti de la
Majorité présidentielle et l'Opposition politique radicale.
* 137 Jean-Marie Abogso est le
président et porte -parole de la Diaspora camerounaise pour la
solidarité. Il est un Camerounais installé en Belgique.
* 138 Cette interview a
été publiée tel que tiré du site Web le 10 mai
2006.
* 139 Le rassemblement de
Bruxelles concernait en effet la rencontre des membres du CODE au siège
de l'Union européenne en Belgique à l'occasion de la
57ème journée internationale des droits de l'homme.
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