IV- La religion :
Avant la Révolution, << l'imprimerie angevine est
marquée essentiellement par la production de livres à
caractère religieux [...]. En fait, l'écrasante majorité
des ouvrages religieux est constituée de livres de liturgie et
pastorale, ainsi que de dévotion, le plus souvent à l'usage du
diocèse d'Angers >>315. Si la religion
devient moins importante que la politique dans les textes angevins dès
l'année 1787, Mame montre la reconnaissance qu'il doit à l'Eglise
pour la quantité de livres qu'elle lui fait imprimer et vendre. Ainsi,
le vendredi 13 juillet, dans sa rubrique << Livres à vendre chez
le sieur Mame >>, insérée à la fin des Affiches
d'Angers, il fait la publicité d'un livre qu'il vend, Le grand
paroissien Fran çais-Latin, (...). Il annonce ensuite que ce livre
est à vendre chez lui, montre la reconnaissance qu'il doit à
l'Eglise pour les ventes qu'elle lui permet et dresse une liste succincte de
différents ouvrages qu'il a imprimés pour elle.
D'après les enquêtes menées après
la période révolutionnaire316, on peut noter que Pavie
imprime et vend essentiellement des << ouvrages de dévotion et de
prière >>. Pourtant, en 1787, il imprime uniquement les textes
n° 8317 et 11318, qui sont plutôt
des ouvrages scientifiques, puisqu'ils traitent respectivement de
l'éducation et des accouchements. De plus, il s'implique très
tôt dans la Révolution, puisque, dès 1788, il ne publie
qu'un livre qui présente l'avancement des idées politiques et des
travaux de réflexion sur la réforme de l'Etat Français
(texte n° 12319). Mais, Mame imprime aussi des
ouvrages à caractère religieux, comme le texte n°
9320. Il est effectivement << Imprimeur de Mgr
l'Evêque >> et, en 1787, publie 3 documents à
caractère religieux (imprimés n° 2321, 5322 et
9), contre 2 en 1788 (textes n° 15323
et 18324).
Les textes concernant la religion ne sont plus les mêmes
à partir de 1790 et de la constitution civile du clergé :
contrairement à ceux qui étaient publiés avant la
Révolution, un faible nombre de ceux-ci le sont par l'Eglise (voir
l'annexe 2) : ce sont plutôt des textes législatifs concernant
l'Eglise, des opinions sur son devenir, ... La Révolution, apportant une
certaine libération de l'individu face à la religion, place la
République dans un processus de
315 DAUDIER, Matthieu, Op. Cit.
316 ADML, 1 L 938.
317 Traité d'éducation civile, morale et
religieuse de l'homme (...), Pavie, 1787.
318 L'art des accouchements, propre aux instructions
élémentaires des élèves en chirurgie...,
Pavie, 1787.
319 Arrêté de l'ordre des avocats (...) ayant
pour titre : Mémoire pour le rétablissement des états
particuliers de la province, Pavie, 1788.
320 Sujets tirés de l'histoire sainte, Mame,
1787.
321 Deo opt. max. Conclusiones philosophicae, Mame,
1787.
322 Paroissien, Mame, 1787.
323 Christo domino contritos corde sananti quaestio
theologica, Mame, 1788.
324 Pocessional, Mame, 1788.
laïcisation. Ainsi, le document n° 738325
est rédigé comme une déclaration au pape que l'âge
de la naïveté de la population française est passé et
que la croyance en l'Eglise catholique n'est plus possible. De plus, on se
méfie fortement des prêtres et de l'influence qu'ils ont sur la
population du fait de leur proximité de celle-ci. C'est pourquoi
l'imprimé n° 213326 est un ensemble de mesures prises
pour contraindre les prêtres à prêter serment à la
République le plus rapidement possible, sous peine de destitution. Ceux
qui refusent de prêter ce serment sont désormais
considérés comme réfractaires.
En premier lieu, les documents envoyés par l'Eglise aux
administrateurs révèlent généralement des
différends entre celle-ci et les instances gouvernementales. Ainsi, en
1789, le document n° 44327 a pour but de contester les
revendications retenues pour le clergé d'Anjou, du fait qu'elles ont
été rédigées à la hâte et par des
personnes qui n'avaient aucune légitimité pour le faire, si ce
n'est d'être avocats. Ils contestent donc le fait que ce soient des
personnes appartenant à un parti différent du leur qui aient
rédigé ces doléances. Ensuite, le département fait
publier les décisions qu'il prend pour le maintien de l'ordre : il
s'assure du contrôle des prêtres insermentés à se
rendre dans la maison du petit séminaire (texte n°
211328) et réglemente la nomination des vicaires (document
n° 212329).
Ainsi, la religion subit la conséquence de
l'arrivée en masse des textes à caractère politique dans
les impressions angevines de livres : seuls 27 textes concernant la religion
sont imprimés durant la période révolutionnaire, soit 3,49
% de la production totale, sachant qu'aucun document de cette catégorie
n'est imprimé entre 1794 et 1798. Si l'Eglise tente de s'immiscer dans
le débat public au début de la Révolution, elle perd
rapidement toute illusion et réalise que son influence est
appelée à diminuer en raison de la libération des
esprits.
325 Le conseil exécutif provisoire de la
République française, au prince-évêque de Rome,
Mame, s.d.
326 Arrêté du directoire du département
de Mayenne et Loire. Séance du premier mars 1792, Mame, 1792.
327 Précis des réclamations, (...) faites par
le chapitre de l'église d'Angers, Mame, 1789.
328 Arrêté du directoire du département
de Mayenne et Loire. Séance du 18 juin 1792, Mame, 1792.
329 Arrêté du directoire du département
de Mayenne et Loire. Séance du 24 février 1792, Mame,
1792.
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