INTRODUCTION
La corruption constitue un mal endémique dont on
relève les manifestations à toutes les époques et dans
tous les pays du monde. Elle existe quel que soit le niveau économique
des pays et quel que soit le régime politique ou le niveau de
rémunération des fonctionnaires. Il est donc inadmissible de
penser que la corruption est seulement le problème des pays pauvres et
que les pays riches y échappent. Il s'agit, en effet, d'un
phénomène dont l'ampleur et le développement constituent
une cause légitime d'inquiétude pour les Etats vu son coût
économique et social et ses atteintes aux principes de la
démocratie.
Toutefois, ce phénomène de corruption
devance les législateurs puisqu'il revêt des formes tellement
diverses qui rendent son appréhension difficile. De plus, les poursuites
diligentées sur ce genre d'affaires révèlent souvent
l'existence de véritables réseaux mafieux permettant la
dissimulation des faits de corruption. En effet, La mondialisation
récente de l'économie et le développement anarchique des
pays du tiers monde ont ouvert de nouveaux domaines aux manoeuvres
corruptrices, notamment en matière de travaux publics, d'exploitation
des matières premières et de fourniture d'armements
militaires.
Cette « incapacité » des
législateurs d'encadrer juridiquement s'explique aussi par le fait que
la corruption ne constitue pas jusqu'à maintenant, aux yeux des
citoyens, une menace suffisamment grave contre la vie puisqu'elle ne
lèse que des intérêts impersonnels. D'un autre coté,
le coût élevé que représenteraient la poursuite et
la sanction des faits de corruption contribue à ne pas inciter les
pouvoirs publics à s'investir pleinement dans la lutte contre la
corruption.
On peut se demander ainsi, face à cette
situation, si les législateurs ont pu cerner cette évolution et
si les textes en vigueur permettent de lutter efficacement contre la
corruption ?
Avant de répondre à cette question, il
convient de définir au préalable la notion de corruption, (I) de
retracer l'historique de cette infraction notamment dans le droit
français et le droit tunisien, (II) de dégager
l'intérêt de l'étude de cette question (III).
I- La définition de la notion de
corruption :
Ouvrons d'abord un dictionnaire, par exemple le petit
Larousse, et nous observons que le mot « corruption »
possède trois sens. A savoir : 1) Pourrissement ; 2) Fait
d'être corrompu, dépravé ou perverti ; 3) Action de
corrompre quelqu'un en le soudoyant pour qu'il agisse contre son devoir ;
fait d'être corrompu. Signalons que le mot français
« corruption » vient du mot latin
« corruptio » qui signifie altération,
séduction ou tentative de débauche. Ce mot dérivant du
verbe « corrumpo, corrumpere » qui a les sens
suivant : 1) détruire, anéantir ; 2) Gâter,
détériorer, physiquement ou moralement. Ainsi, la corruption
apparaît comme « un germe de mort, physique ou moral1(*) ».
Dans le langage courant ainsi que dans la terminologie
juridique, la corruption est l'agissement par lequel une personne investie
d'une fonction déterminée, publique ou privée, sollicite
ou accepte un don, une offre ou une promesse en vue d'accomplir, retarder ou
omettre d'accomplir un acte entrant, d'une manière directe ou indirecte,
dans le cadre de ses fonctions. Selon d'autres, il s'agit d'une violation,
commise par le coupable, des devoirs de sa charge, en d'autres termes ;
une sorte d'abus de confiance2(*).
Cette définition n'a pas suffi à éviter
certaines difficultés qui peuvent apparaître quand il faut
distinguer la corruption de certaines infractions contre les particuliers qui
supposent, comme elle, une certaine pression morale ou une fraude à
titre d'exemple le chantage ou l'escroquerie. Ou même lorsqu'on ne veut
pas la confondre avec des agissements relevant du groupe d'infractions contre
l'administration publique comme la concussion ou le trafic d'influence. Il
apparaît donc nécessaire de tracer les frontières qui
séparent la corruption d'infractions différentes.
Il importe d'abord de bien distinguer la corruption de
l'escroquerie. Cette dernière suppose, dans la législation
française ainsi que tunisienne, que le coupable a fait usage d'un faux
nom ou d'une fausse qualité ou qu'il a employé des manoeuvres
frauduleuses, de façon à tromper la victime et à la
déterminer à remettre des fonds, des valeurs ou un bien
quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte
opérant obligation ou décharge. On remarque que contrairement
à la corruption, le coupable ne possède pas la qualité de
fonctionnaire dont il se prévaut faussement, ni le pouvoir d'agir qu'il
allègue ; il ne peut donc pas trafiquer d'une fonction à laquelle
il est en réalité étranger.
Ce critère de distinction ne permet pas d'éviter
d'une manière absolue la confusion entre les deux infractions. Prenant
l'exemple d'une sollicitation, émanant d'un fonctionnaire, qui
s'accompagne d'une véritable mise en scène tel qu'il est le cas
dans de nombreuses situations d'escroquerie. Quelle serait la qualification
retenue ?
Dans cette hypothèse, il s'agit d'un cumul réel
d'infractions, et les faits doivent être retenus sous leur expression
pénale la plus élevée3(*), celle de corruption.
S'agissant ensuite du chantage, cette infraction
suppose la menace de révélations ou l'imputation de faits de
nature à porter atteinte à l'honneur ou à la
réputation de la victime4(*). Or certains actes accomplis par des fonctionnaires
sont révélateurs de faits qui peuvent ruiner la réputation
de la personne qu'ils visent ; par exemple les procès-verbaux ou
les rapports de police constatant des infractions. Ainsi un fonctionnaire de
police peut se faire payer pour ne pas dresser un procès-verbal dans
lequel il constate une infraction : quelle serait la qualification retenue
à ce niveau, la corruption ou le chantage ?
Pour certains, la solution consiste à distinguer
selon que l'acte entrait ou non dans les attributions du coupable. Si la
réponse est par la positive, nul doute qu'on doive relever une
corruption. Si la réponse est par la négative, par exemple le
fonctionnaire de police prétendait constater une infraction imaginaire,
on ne peut plus parler d'acte de la fonction et c'est la qualification d
chantage qui doit être retenue.
Ce critère de distinction n'est pas toujours
fiable, surtout dans les systèmes juridiques qui considèrent la
contrainte comme étant un moyen générateur de la
corruption, à titre d'exemple ; le droit tunisien5(*).
S'agissant enfin des infractions contre
l'administration publique, on trouve la concussion et le trafic d'influence.
Concernant la concussion6(*), cette dernière partage avec la corruption le
même fondement juridique puisqu'il s'agit de l'interdiction faite aux
représentants de collectivités publiques de tirer profit
personnel des pouvoirs dont ils sont investis. Toutefois il existe un
critère de distinction entre les deux infractions qui réside dans
le titre auquel le fonctionnaire reçoit la rémunération
délictueuse. Ainsi, si il reçoit ou sollicite une
rémunération comme le prix d'un acte qu'il s'engage à
accomplir, retarder ou à ne pas accomplir et qui relève de sa
fonction, il commet une infraction de corruption. Si au contraire le coupable
a reçu des dons comme une chose prétendument due à titre
d'impôt, il y a concussion7(*). En d'autres termes ; dans la concussion, le
fonctionnaire est l'auteur de l'infraction et le particulier sa victime. Dans
la corruption, corrupteur et corrompu sont tous deux coupables.
En ce qui concerne le trafic d'influence8(*), les liens entre cette
infraction et la corruption sont étroits. En effet, ils ont presque les
mêmes éléments constitutifs sauf que le but des deux
infractions est différent. Dans la corruption, le fonctionnaire accepte
les dons en vue d'accomplir ou s'abstenir d'accomplir un acte de la fonction ou
un acte facilité par celle-ci, alors que dans le trafic d'influence le
but des manoeuvres délictueuses consiste essentiellement en ce que la
personne coupable abuse de son influence, réelle ou supposée, en
vue d'obtenir au profit de l'interlocuteur certaines faveurs, et cela
auprès d'autorités sur lesquelles doit s'exercer l'influence dont
il est trafiqué9(*).
Les frontières, qui séparent la
corruption d'infractions voisines, ainsi tracées, il convient donc de
rappeler l'historique de cette infraction.
II- L'historique de l'infraction de
corruption :
L'histoire révèle que la corruption est
un vieux fléau qui existait depuis les anciennes civilisations. Dans
le très ancien droit romain, la corruption et la concussion ont
été confondues et elles étaient englobées dans une
même et unique répression sévère. En effet, elles
étaient tenues pour des crimes si graves, surtout s'ils étaient
le fait de magistrats. Ces derniers pourraient encourir jusqu'à la peine
de mort10(*). De plus
à l'époque de Jules césar, le coupable était puni
d'une amende du quadruple des choses reçues11(*).
La société islamique a connu le
délit de corruption, ce qui a entraîné la définition
de cette infraction, la détermination de ses conditions ainsi que les
peines applicables. Dans ce sens, l'Imam El Ghazali l'a défini comme
« la dépense de l'argent dans le but d'un acte interdit ou
d'un devoir défini » et il ajoute « elle est ce que
les gens sont obligés de donner comme argent, dons, services et biens
sous formes de cadeaux avec bienveillance ou flatterie en sollicitant des
faveurs pour devenir partial. Ce qui signifie rendre l'illicite licite et le
licite illicite. Ainsi, la corruption peut survenir à propos d'un devoir
à accomplir ou à éviter et s'opère soit par la
contrainte, soit par complicité ou par un accord mutuel entre le
corrupteur et le corrompu pour la réalisation de leurs
intérêts personnels contraires aux intérêts de la
collectivité ».
Les jurisconsultes de la religion musulmane
étaient unanimes pour condamner la corruption, le corrupteur, le
corrompu et l'intermédiaire qui intervenait entre les deux. Ils
s'appuyaient pour la condamnation de la corruption sur des arguments issus de
la tradition ou fondés sur la raison.
Le Coran affirme : « ne dissipez
point vos richesses en dépenses inutiles entre vous, ne les portez pas
non plus aux juges dans le but de consumer injustement le bien
d'autrui 12(*)».
Certains exégètes se sont appuyés dans la condamnation de
la corruption sur cette citation du Coran : « ils prêtent
évidemment l'oreille aux mensonges, ils recherchent les mets
défendus13(*) ». Par les « mets
défendus » il faut entendre la corruption ou toute acquisition
prohibée.
Dans la tradition ( Le Hadith) le prophète
déclare : « Malédiction de Dieu sur le
corrupteur et le corrompu dans le jugement » et dans une autre
version « malédiction de Dieu sur le corrupteur, le corrompu
et l'intermédiaire qui intervient entre les deux ».
On raconte que « Amor Ibn
Abdelaziz14(*) »
avait refusé un cadeau proposé dans une occasion et lorsqu'on
lui disait que le prophète l'acceptait, il
répondait : « C'était un cadeau pour lui et
une corruption pour nous, parce qu'on voulait se rapprochait de sa
prophétie non pour son autorité. Or pour notre cas, on se
rapprochait de nous pour notre autorité ».
Amor Ibn Khattab15(*) a écrit à ses gouverneurs
« gardez-vous des cadeaux offerts ; c'est de la
corruption ».
La jurisprudence musulmane a défini les
éléments fondamentaux sur lesquels s'appuient ce délit.
Tout d'abord, le coupable devait être investi du pouvoir de diriger les
affaires des musulmans, de plus la corruption devait avoir pour but
l'accomplissement d'un service. Enfin elle insistait sur l'existence
nécessaire de l'intention coupable chez le corrupteur, en d'autres
termes, ce dernier devait être pleinement conscient qu'il faisait une
offre, qui devait être acceptée par le corrompu, dans l'intention
de corrompre. Ainsi si l'intention coupable faisait défaut, il n'y
aurait point de délit.
En France, le concept juridique de corruption n'est
vraiment devenu autonome qu'à partir du Code pénal de 1971,
étant auparavant confondu avec la concussion. Ce code avait prévu
des peines sévères allant jusqu'à la peine capitale de
l'époque, à savoir ; la peine de mort16(*).
Le Code pénal de 1810 a suivi l'exemple du
législateur révolutionnaire en maintenant la distinction entre la
corruption et la concussion. Cependant, dans ses dispositions primitives, il
punissait de la peine criminelle du carcan et d'une amende tout fonctionnaire
public ayant commis des faits de corruption.
Une importante évolution s'est produite depuis
1863, des lois successives ont profondément affecté les articles
de l'ancien Code pénal relatifs à la corruption17(*). Cette évolution
traduit un double courant de la politique criminelle française.
D'une part, il y a eu une extension de progressive de la
répression due à l'élargissement des incriminations de
corruption quant aux personnes visées et quant aux actes de la fonction
dont trafiquent ces personnes. Ceci s'explique par l'énorme
accroissement des modes d'intervention de la puissance publique dans la vie
contemporaine ainsi que le bouleversement des situations économiques
dû aux deux guerres mondiales18(*).
D'une autre part, il y a eu, suite à la loi du 16
mars 1943, une correctionnalisation de l'infraction de corruption puisqu'un
emprisonnement de dix ans s'est substitué à la dégradation
civique.
Sachant que les dispositions de droit
commun, relatives à la corruption, étaient groupées dans
l'ancien Code pénal en un ensemble unique, formé des articles 177
à 182. Ce bloc de textes a été décomposé
par le législateur en plusieurs morceaux distincts suite à
l'apparition du Nouveau Code pénal en 1992. L'un d'eux, concernant la
corruption des salariés des entreprises privées, a
été déplacé dans le Code du travail où il
figure sous le nouvel article L. 152-6. Les autres groupes ont
été dispersés dans le nouveau Code pénal. On trouve
dans l'article 432-11 l'incrimination de la corruption passive commise par des
personnes exerçant une fonction publique. L'article 433-1 est relatif,
quant à lui, à la répression de la corruption active
commise par des particuliers. L'article 434-9 est consacré, lui,
à la corruption, passive et active, des magistrats et autres personnes
intervenant dans l'exercice des fonctions juridictionnelles. Une
dernière variété de corruption, visée par l'article
441-8, concerne les personnes qui, dans l'exercice de leur profession,
établissent des attestations ou des certificats faisant état de
faits matériellement faux. Les autres ont leur place dans des codes
différents, par exemple la corruption en matière
d'élection, de douanes etc....
En Tunisie, le Code pénal tunisien de 1913
prévoit la corruption dans la deuxième section du
troisième chapitre du deuxième livre. Ce chapitre est
consacré aux infractions commises par les fonctionnaires publics ou
assimilés dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs
fonctions, on y trouve la corruption, la concussion, les détournements
commis par les dépositaires publics et l'abus d'autorité.
Les dispositions relatives à la corruption sont
prévues par les articles 83 à 94 CPT. Ces dispositions ont
été modifiées à deux reprises par le
législateur. Une première réforme de 1989, ayant une
portée générale, a supprimé la peine de travaux
forcés de tout le Code pénal et plus précisément
des articles 88 et 89 CPT relatifs à la corruption de magistrats. La
deuxième réforme est intervenue en 1998 suite à la loi
numéro 33-1998 du 23 mai 1998 relative à la lutte contre la
corruption19(*). C'est la
première réforme consacrée exclusivement à la
corruption depuis la promulgation du Code pénal en 1913.
Cette réforme avait deux objectifs, d'un
coté, elle a élargi les incriminations puisqu'elles
étaient limitées auparavant aux fonctionnaires publics et aux
magistrats. D'un autre coté, elle a aggravé les peines
applicables en cas de corruption. Ces modifications s'expliquent par le
nécessaire modernisation du droit pénal tunisien en
matière de corruption et par les exigences de la protection de la
fonction publique.
A noter que le droit pénal tunisien ainsi que le droit
pénal français, malgré les réformes successives,
n'ont pas rompu avec le droit antérieur puisqu'ils ont maintenu la
distinction classique entre corruption active et corruption passive. La
corruption passive est celle vue du coté du corrompu : c'est l'acte
par lequel celui-ci accepte ou sollicite un don ou une promesse pour accomplir
un acte de la fonction ou facilité par elle. Quant à la
corruption active vue du coté du corrupteur ; c'est l'acte par
lequel celui-ci obtient ou tente d'obtenir de la personne visée un acte
de sa fonction ou facilité par elle. Pourquoi cette
dualité ?
Il faut rappeler à ce niveau qu'il existe trois
systèmes possibles pour la répression de la corruption. On peut
d'abord considérer que, du corrupteur et du fonctionnaire corrompu, le
plus coupable des deux est le second qui méconnaît volontairement
ses devoirs de fidélité et de probité. Ainsi, le corrompu
doit être considéré comme l'auteur de l'infraction, le
corrupteur n'étant que son complice. L'inconvénient est ici en
cas de tentative de complicité, le corrupteur échappe à
la répression puisque dans les deux législations la
tentative de complicité est impunissable; c'est la rançon de
l'emprunt de criminalité20(*). Le deuxième système considère
le corrupteur et le corrompu comme coauteurs de la même infraction. Dans
ce système21(*)
l'infraction serait pleinement réalisée lorsque l'accord est
conclu entre les deux coauteurs, on peut aussi retarder la commission de
l'infraction jusqu'au moment de l'accomplissement de l'acte de la fonction.
Toutefois ce système demeure critiquable et on peut lui reprocher de ne
pas distinguer suffisamment entre l'un et l'autre des personnages, le corrompu
étant généralement plus blâmable que le corrupteur.
Pour éviter les inconvénients des deux premiers systèmes,
on a fait appel à un troisième système qui fait de la
corruption un complexe de deux infractions distinctes : la corruption
active imputable au corrupteur et la corruption passive imputable au corrompu.
C'est ce dernier système qui a été admis par plusieurs
législations à titre d'exemple ; le droit français,
tunisien et allemand.
III-L'intérêt de
l'étude :
En France, au cours des dernières années,
sont apparues des affaires scandaleuses qui ont secoué l'opinion
publique et dans lesquelles se trouvaient mêlés, des chefs
d'entreprises, des hommes d'affaires, des fonctionnaires appartenant à
diverses administrations de l'État ou des collectivités
publiques, et aussi des hommes politiques de tous niveaux, y compris des
ministres en exercice et des personnages placés très haut dans la
hiérarchie de la République22(*). En effet, Il n'est pas de jour où la presse
ne fasse état d'affaires de corruption imputées à ces
hauts placés, de plus, la gravité du mal est telle que toute la
« classe politique » est devenue suspecte aux yeux du public23(*).
En Tunisie, la corruption est à la fois connue et
statistiquement négligeable quant au nombre de procédures
traitées par la justice. En effet, la jurisprudence des tribunaux
répressifs tunisiens est restée muette sur plusieurs
interrogations de la doctrine. Cette dernière a élaboré,
forte malheureusement, peu de travaux relatifs à la question. Quant au
législateur tunisien, faut-il rappeler qu'il n'est intervenu qu'à
une seule reprise pour modifier les textes répressifs relatifs à
la corruption depuis la promulgation du Code pénal en 1913 ?
Ainsi, il serait utile d'étudier le droit tunisien à la
lumière du droit français qui est alimenté par une
jurisprudence assez dense et par un travail doctrinal intense en matière
de corruption.
Signalons enfin que La corruption ne sévit pas
seulement à l'intérieur des frontières nationales : elle
affecte aussi très gravement le commerce international et met en cause
des agents publics étrangers. On parle désormais de la corruption
internationale qui a entraîné la mise en place de moyens
juridiques propres à faciliter la lutte contre les manoeuvres
corruptrices tant au niveau mondial que sur le plan européen.
A l'échelle mondiale, l'Organisation des Nations Unies
a lancé un programme global de lutte contre la corruption pour inciter
les gouvernements des États membres à mettre sur pied des moyens
coordonnés d'action et à échanger toutes informations
utiles24(*).
A l'échelle européenne et plus
précisément au niveau de l'Union européenne deux
conventions ont été signées à Bruxelles afin de
lutter efficacement contre la corruption. Une première convention du 26
juillet 199525(*) incite
les États membres à punir le blanchiment des capitaux provenant
des fraudes ou de la corruption. La deuxième convention est du 26 mai
199726(*) oblige les
États de l'Union européenne à incriminer la corruption,
qu'elle porte ou non atteinte aux intérêts financiers des
Communautés européennes.
On remarque ainsi qu'il y a une volonté commune tendant
à l'harmonisation et l'unification des législations à
l'échelle internationale afin de permettre de cerner le
phénomène de corruption. Le droit français et le droit
tunisien tendent, notamment suite aux réformes citées
précédemment, à réaliser ces objectifs. En effet,
l'étude comparée de ces deux législations nous a
donné des renseignements fructueux sur l'infraction de corruption par
les rapprochements qu'elle provoque comme par les oppositions qu'elle souligne.
Elle a suscité également notre réflexion et nous a permis
de découvrir des aspects nouveaux, des constantes et des tendances qui
seraient sans doute imperceptibles à des observations isolées.
Ainsi, l'emploi de la méthode comparative peut nous
donner l'ambition, au-delà des différences qui distinguent les
deux pays, de dégager les traits communs aux deux législations.
Pour la mise en relief de ces traits communs, nous avons limité notre
étude, vu le nombre important des textes répressifs en la
matière, à la corruption passive et active des personnes
exerçant une fonction publique ainsi que les magistrats. D'autres
catégories de personnes pouvant être poursuivies pour des faits de
corruption ont été, pour des besoins de clarté et de
précision, traitées dans le cadre de ce travail.
Signalons enfin que, le but essentiel de ce travail est de
contribuer autant que possible à réaliser une synthèse de
l'infraction de corruption dans les deux législations afin de
déterminer les points de convergence et de divergence existant dans les
deux droits. Ainsi, la comparaison portera sur l'incrimination (Titre1) et sur
la répression (Titre 2).
PREMIERE PARTIE: COMPARAISON RELATIVE À
L'INCRIMINATION
Nous trouvons aussi bien dans la législation tunisienne
que la législation française les mêmes
éléments constitutifs, il faut citer d'abord la qualité de
la personne corrompue (Chapitre1) qui constitue une condition préalable
pour la constitution de l'infraction de corruption. Cette qualité est
prévue par un article distinct dans le Code pénal tunisien,
alors qu'elle est prévue par plusieurs articles du Code pénal
français. Vient ensuite l'ensemble des moyens qui
révèlent la corruption et qui sont de nature à lui donner
corps (Chapitre 2). Ce sont, en effet, les éléments
matériels de l'infraction.
Signalons que l'élément intentionnel n'a pas
été prévu par les deux législateurs dans les textes
relatifs à la corruption, d'ailleurs ils n'ont pas à le
mentionner puisqu'il résulte de deux dispositions
générales. La première est celle qui est prévue
par l'article 121-3 CPF, selon lequel « il n'y a point de crime ou
délit sans l'intention de le commettre ». La deuxième
est prévue par le Code pénal tunisien et plus
précisément par l'article 37 CPT selon
lequel « nul ne peut être puni que pour un fait accompli
intentionnellement ». Il s'agit, dans ces deux articles, de
l'intention frauduleuse qui, ici n'a pas d'existence autonome, car elle est
contenue implicitement dans la combinaison des autres
éléments.
CHAPITRE 1: LA QUALITE DU COUPABLE
Dans les deux législations le corrompu doit être
revêtu d'une qualité officielle. Il s'agit d'abord, des personnes
exerçant une fonction publique (Section1). Vient ensuite d'autres
personnes (Section2), pouvant être poursuivies pour des faits de
corruption, qui sont réprimées par des textes spéciaux,
par exemple les salariés.
SECTION 1: UNE PERSONNE EXERÇANT UNE FONCTION
PUBLIQUE
En France, les coupables du délit de corruption passive
étaient désignés par l'article 177 ACPF qui donnait une
énumération que les réformes successives du texte avaient
progressivement enrichi. Initialement cet article visait seulement la
corruption des fonctionnaires de l'ordre administratif ou judiciaire agents et
préposés des administrations publiques, c'est ce qui a
poussé les tribunaux à recourir à des définitions
souples et extensives qui ont entraîné les critiques d'une
doctrine attachée à la lettre du texte pénal.
Les tribunaux répressifs français ont ainsi
englobé dans la catégorie de fonctionnaires, les agents et
préposés des administrations publiques ainsi que tous les
membres de l'administration, quelle que soit leur place dans la
hiérarchie, dés lors qu'ils exerçaient, sous l'impulsion
et la surveillance de leurs supérieurs, des attributions de l'ordre
administratif ou judiciaire. On a donc pu appliquer les articles 177 et suivant
à tous les représentants de la hiérarchie administrative,
depuis le ministre jusqu'aux titulaires des postes les moins
élevés27(*).
Les efforts de la jurisprudence ont été renforcés par le
législateur qui a procédé à l'extension de la
liste des personnes susceptibles d'être corrompues par étapes
successives.
Le premier texte qui est venu compléter
l'incrimination à l'égard des fonctionnaires est celui de la loi
du 13 mai 1863. Il a ajouté aux administrateurs et juges, les arbitres
et les experts. En effet, l'arbitre est un véritable juge. L'expert,
quant à lui, prépare la décision judiciaire par l'opinion
qu'il exprime dans ses rapports. Le recours considérable à
l'arbitrage et le développement de l'expertise rendaient
nécessaires ces dispositions nouvelles.
Ensuite, l'extension a été faite aux
médecins par la loi du 9 mars 1928 puis aux chirurgiens, sages-femmes
par l'ordonnance du 8 février 1945. Ceci s'explique par le rôle
croissant des professions médicales en matière sociale.28(*)
Enfin, et surtout la loi du 16 mars 1943 qui a ajouté
les agents et préposés des administrations placées sous le
contrôle de la puissance publique et les citoyens chargés d'un
ministère de service public. Et la loi du 8 février 1945 qui a
ajouté les personnes investies d'un mandat électif. Ainsi, on
distingue à la lumière de ses solutions jurisprudentielles et
législatives trois hypothèses sous l'empire de l'ancien Code
pénal français.
- les personnes investies d `un mandat
électif :
Comme le précise la jurisprudence, les personnes
visées sont notamment les membres du parlement, des conseillers
généraux ou des conseillers municipaux.
- les fonctionnaires de l'ordre administratif et
judiciaire, agents et préposés des administrations
publiques :
Sont visés, à ce niveau, les membres du
gouvernement, les fonctionnaires des administrations fiscales29(*) départementales ou
communales 30(*), les
magistrats, les officiers ministériels lorsqu'ils concourent à
l'oeuvre de la justice. Il apparaît que la qualité de
fonctionnaire public doit être entendue largement et comprend tout
citoyen investie des prérogatives de puissance publique, d'un mandat
public qui contribue à la gestion des affaires publiques.
- les préposés et agents des administrations
placées sous le contrôle de la puissance publique :
Sous cette qualification, l'ancien Code pénal visait
par exemple les agents de la sécurité sociale31(*) ou encore le président
d'une chambre des métiers32(*) qui a selon la jurisprudence « la
qualité d'un agent d'une administration placée sous le
contrôle de la puissance publique ». On peut se demander si le
Nouveau Code pénal a maintenu cette distinction ?
Le nouveau Code pénal a limité le domaine
d'application de l'article 432-11 aux seules personnes exerçant une
fonction publique33(*);
plus précisément le texte ne concerne que les personnes
dépositaires de l'autorité publique, les personnes
chargées d'une mission de service public, et celles enfin qui sont
investies d'un mandat électif public. On entend par«
dépositaire de l'autorité publique
»la personne qui est titulaire d'un pouvoir de
décision et de contrainte sur les individus et les choses, pouvoir
qu'elle manifeste dans l'exercice des fonctions, permanentes ou
temporaires34(*), dont
elle est investie par délégation de la puissance publique.
À cet égard, il faut préciser que les personnes «
investies d'un mandat électif public »,
ajoutées sans doute pour plus de précision à
l'article 432-11, ne sont autres que les dépositaires de
l'autorité publique.
Quant à la personne chargée
d'une mission de service public, elle peut être
définie comme la personne qui, sans avoir reçu un pouvoir de
décision ou de commandement dérivant de l'exercice de
l'autorité publique, est chargée d'accomplir des actes ou
d'exercer une fonction dont la finalité est de satisfaire à un
intérêt général.
Le code pénal Tunisien tel que rédigé en
1913, à l'instar du droit pénal français, consacre une
définition extensive du fonctionnaire public dans la section
première du troisième chapitre du livre premier. Cette
définition reflète la tendance du législateur à
englober le plus grand nombre de personnes concernées. D'un autre
coté, le législateur avait prévu une définition
distincte de celle prévue par le droit administratif, qui insiste sur le
lien juridique entre le fonctionnaire public et l'Etat, puisque cette
qualité peut demeurer existante sur le plan pénal en dépit
des vices mettant en cause son existence sur le plan administratif35(*).
La définition de fonctionnaire public figurait dans
l'ancien article 82 du CPT prévoyait que « Sont
réputés fonctionnaires publics au regard du présent code,
tous nos sujets, qui, sous une dénomination et dans une mesure
quelconque, sont investis d'un mandat même temporaire,
rémunéré ou gratuit, dont l'exécution se lie
à un intérêt d'ordre public et qui, à ce titre,
concourent au service de l'État, des administrations publiques, des
communes ou même des établissements publics.
Sont assimilées aux fonctionnaires publics, les
personnes choisies par les particuliers ou délégués par la
justice en qualité d'experts, d'arbitres ou
d'interprètes »36(*).
L'étude de cet ancien article avant sa modification par
la loi du 23 mai 1998 démontre que deux critères étaient
prévues par le législateur pour déterminer la
qualité de fonctionnaire public, d'abord, il utilise les termes
« tous nos sujets », ensuite il ajoute qui « sont
investis d'un mandat ... dont l'exécution se lie à un
intérêt d'ordre public ».
Selon la doctrine, cette définition qui date de 1913
n'est plus compatible avec les exigences de la vie moderne et ce sur le plan
économique et social, surtout après l'apparition de nouvelles
catégories de personnes concernées par la corruption, autres que
les fonctionnaires et les magistrats, qui échappent à la
répression puisque la qualité de fonctionnaire public fait
défaut malgré le lien de causalité qui existe entre leurs
fonctions et le service public ou l'intérêt
général37(*). La même idée a été
reprise lors des débats parlementaires relatifs à l'adoption du
projet de loi concernant la modification de certaines dispositions du code
pénal relatives aux infractions de corruption et plus exactement dans la
réponse du gouvernement à la quatrième question :
« la définition prévue dans l'article 82 actuel du code
pénal n'est plus compatible avec le développement de la notion de
fonction publique et les modalités de direction des services
publics »38(*).
La loi n° 98-33 du 23 mai 1998 a modifié cet
article en supprimant les termes « tous nos sujets » ainsi
que les termes « d'un mandat ... dont l'exécution se lie
à un intérêt d'ordre public ». Toutefois, elle a
ajouté de nouvelles institutions juridiques telles que la
« personne dépositaire de l'autorité
publique » et la « personne participant à la gestion
d'un service public ». Le législateur tunisien, suite à
cette réforme, a instauré des institutions juridiques de droit
administratif afin d'englober leurs titulaires par les dispositions relatives
à la corruption et pour harmoniser les deux ordres (pénal et
administratif).
Ainsi, d'après la nouvelle rédaction de
l'article 82 du CPT « Est réputé fonctionnaire public
soumis aux dispositions de la présente loi, toute personne
dépositaire de l'autorité publique ou
exerçant des fonctions auprès de l'un des services de l'Etat ou
d'une collectivité locale ou d'un office ou d'un établissement
public ou d'une entreprise publique, ou exerçant des fonctions
auprès de toute autre personne participant à la gestion
d'un service public.
Est assimilé au fonctionnaire public toute personne
ayant la qualité d'officier public ou investie d'un mandat
électif de service ou désignée par la justice
pour accomplir une mission judiciaire »39(*).
On remarque à ce niveau que le législateur
tunisien, lors de la réforme des dispositions relatives aux infractions
de corruption, s'est inspiré de son homologue français en
utilisant les mêmes critères prévus par l'article 432-11 du
nouveau code pénal français à savoir ; une personne
« dépositaire de l'autorité publique »
ou « participant à la gestion d'un service
public ». Pour une partie de la doctrine tunisienne la réforme
de 1998 n'a pas apporté de grandes modifications à l'ancienne
rédaction puisque les termes « dépositaire de
l'autorité publique » et « participant à la
gestion d'un service public » étaient englobés par les
termes « ordre public » et « intérêt
général » qui sont la base des deux premiers40(*).
A notre sens, la nouvelle rédaction permet l'extension
et la clarification de la notion de fonctionnaire public ainsi qu'une meilleure
application des textes par les juridictions répressives, d'un autre
coté l'inspiration du législateur tunisien de son homologue
français n'est pas absolue puisque si les deux droits considèrent
que les personnes dépositaires de la l'autorité publique et les
personnes chargées d'une mission de service public comme fonctionnaires
publics (para1) il existe une divergence entre les deux systèmes
juridiques quant aux personnes investies d'un mandat électif (
para2).
PARA 1: Les éléments communs de
détermination de la qualité de fonctionnaire public
Les deux législations consacrent les mêmes
éléments pour déterminer la qualité de
fonctionnaire public aussi bien l'article 432-11 CPF que de l'article 82 CPT.
Ces articles permettent de constater que les personnes dépositaires de
l'autorité publique (A) ainsi que les personnes
chargées d'une mission de service public (B) sont
considérées comme des fonctionnaires publics.
A- une personne dépositaire de l'autorité
publique
D'après VITU, On entend par«
dépositaire de l'autorité publique
»la personne qui est titulaire d'un pouvoir de décision et
de contrainte sur les individus et les choses, pouvoir qu'elle manifeste dans
l'exercice des fonctions, permanentes ou temporaires, dont elle est investie
par délégation de la puissance publique41(*). En France, la doctrine
distingue quatre catégories de personnes dépositaires de
l'autorité publique.
La première est celle des représentants de
l'Etat et des collectivités territoriales. Elle comprend d'une part, le
président de la République, les
ministres, les secrétaires d'État et
sous-secrétaires d'Etat, les préfets et sous-préfets,
ainsi que les représentants de la France auprès d'organismes
internationaux ou auprès de pays Étrangers :
ambassadeurs, consuls42(*).
D'autre part, les personnes investies d'un mandat
électif public qui sont ajoutées « sans doute
pour plus de précision à l'article 432-11 » et qui ne
sont que des dépositaires de l'autorité publique43(*) .
Le deuxième groupe est celui des fonctionnaires de
l'ordre administratif et plus spécialement les représentants de
la force publique. L'article 432-11 CPF concerne les fonctionnaires de l'ordre
administratif seulement puisque les fonctionnaires de l'ordre judiciaires sont
prévus par l'article 434-9 CPF qui concerne les magistrats et
assimilés(jurés, experts ou arbitre) contrairement à
l'article 177 de l'ancien code qui englobait les fonctionnaires de l'ordre
administratif ou judiciaire. Ainsi L'article 432-11 pourra être
appliqué aux membres de l'enseignement44(*). Il concerne aussi les membres des administrations
fiscales, comme les fonctionnaires des douanes45(*). Sont également
concernés les fonctionnaires des services de police comme les
commissaires de police46(*) et aussi les fonctionnaires et agents des
préfectures, sous-préfectures et mairies.
Le troisième groupe ; celui des officiers
ministériels, comprend les intermédiaires ou mandataires des
particuliers qui ont le monopole de l'accomplissement, dans
l'intérêt des particuliers, des actes officiels, comme
l'huissier47(*).
Enfin, la quatrième et dernière catégorie
est celle des autres personnes exerçant des fonctions d'autorité,
mais qui n'ont pas la qualité de fonctionnaire. C'est le cas des
militaires et assimilés, les agents assermentés de la SNCF,
habilités à relever des infractions à la police des
chemins de fer, ainsi que les agents assermentés de la RATP, des
présidents et assesseurs des bureaux de vote etc....
En droit tunisien, on retrouve la même définition
prévue par la doctrine française, notamment celle du professeur
Vitu. Ainsi, est dépositaire de l`autorité publique toute
personne qui a un pouvoir de décision et de contrainte sur les individus
et qui a la possibilité de recourir à l'usage de la force
publique48(*).
La Constitution tunisienne, de son coté, distingue
trois autorités ; législative, judiciaire et
exécutive qui sont toutes des autorités publiques et tous ceux
qui leurs appartiennent sont considérés comme dépositaires
de l'autorité publique.
Toutefois, la notion d'autorité publique ne doit pas
être limitée au droit constitutionnel. Il suffit de revoir les
débats parlementaires49(*) de la loi du 23 mai 1998 pour déterminer la
notion de personne dépositaire de l'autorité
publique : « c'est une notion identique à celle
adoptée par le législateur français dans le nouveau Code
pénal...et elle concerne toutes les personnes qui exercent une fonction
d'autorité quelle que soit sa nature ; administrative,
juridictionnelle ou autre et quelle que soit le statut de la personne
(privé ou public). Il apparaît ainsi que les termes
« toute personne dépositaire de l'autorité
publique » ne se limitent pas aux agents de la fonction publique
prévus par la loi n°112 du 12 décembre 1983 mais ils
englobent d'autres agents tels que les militaires, les fonctionnaires de
police, les agents chargés de la protection du président de la
République et les magistrats50(*) ».
On remarque que les deux législateurs ont essayé
d'élargir la définition de fonctionnaire public afin de permettre
l'application des textes répressifs à des personnes titulaires de
fonctions ayant un lien avec le service public ou l'intérêt
général sans qu'elles aient la qualité de fonctionnaire
public.
B- Personnes chargées d'une mission de service
public
L'article 177 de l'ancien Code pénal visait, non les
personnes chargées d'une mission de service public, mais "les citoyens
chargés d'un ministère de service public", qui ont
été ajoutés par la loi du 16 mars 1943. Selon la
jurisprudence élaborée pour l'application de cet article, la
qualité de citoyen chargé d'un ministère de service public
désigne "les personnes investies dans une mesure quelconque d'une partie
de l'autorité publique, et non les personnes qui ne participent pas
à cette autorité, bien qu'un intérêt public
s'attache à leurs services51(*)". Comme l'observe le professeur André Vitu,
cette définition n'est pas pleinement satisfaisante puisque le
critère tiré de ce que les citoyens concernés sont
investis d'une partie de l'autorité publique ne permet pas de les
distinguer nettement des personnes dépositaires de l'autorité
publique. Avec le nouveau code pénal ces termes ont été
remplacés par la « personne chargée d'une
mission de service public », qui peut être
définie comme la personne qui, sans avoir reçu un pouvoir de
décision ou de commandement dérivant de l'exercice de
l'autorité publique, est chargée d'accomplir des actes ou
d'exercer une fonction dont la finalité est de satisfaire à un
intérêt général52(*).
Ainsi, contrairement à la personne dépositaire
de l'autorité publique, la personne chargée d'une mission de
service public n'a, ni un pouvoir qui lui est conféré en vertu
d'une délégation de la puissance publique, ni un pouvoir de
décision et de contrainte sur les individus et les choses. Toutefois,
cette personne est chargée d'exercer une fonction ou d'accomplir des
actes qui ont pour but de satisfaire à un intérêt
général. Parmi ces personnes, on citera : les syndics de
faillite, les séquestres, les gardiens de scellés, les
interprètes53(*),
un inspecteur principal de la RATP, intervenant dans l'octroi de travaux
à des entreprises54(*).
À cette liste, il faut ajouter les personnes qui font
partie de diverses commissions instituées officiellement et
chargées de donner des avis à l'autorité publique ou de
statuer elles-mêmes sur des demandes, des dossiers, des projets, qui
nécessitent des autorisations, des agréments ou des habilitations
officielles par exemple ; les membres des commissions régionales et
de la commission nationale des institutions sociales et médico-sociales,
les membres des commissions qui jouent un rôle central en matière
de bourse et de banque comme la Commission des opérations de
bourse(C.O.B).
Il faut préciser enfin que les préposés
et agents des administrations placées sous le contrôle de la
puissance publique, ajoutés par la loi du 16 mars 1943 à l'ancien
article 177 du ACP, peuvent être considérés comme des
personnes chargées d'une mission de service public. C'est le cas aussi
des membres des entreprises placées sous le contrôle de la
puissance publique par voie de réquisition. En effet, toutes ces
personnes morales, dont le statut se rapproche sensiblement de celui des
fonctionnaires publics, sont assimilées à ces derniers quant aux
obligations de fidélité et de probité.
L'étude de la jurisprudence récente
démontre que les tribunaux répressifs n'hésitent pas
à considérer une personne comme étant chargée
d'une mission de service public du moment qu'elle exerce une fonction ayant
pour finalité l'intérêt général. Ainsi, Un
ingénieur au Commissariat à l'énergie atomique, mis
à la disposition de l'Agence nationale de valorisation de la recherche,
qui avait notamment pour mission d'apporter son concours à un
délégué régional dans l'instruction des dossiers de
demande d'aide à l'innovation, a été
considéré par la chambre criminelle comme une personne
chargée d'une mission de service public, au sens des articles 432-11 et
432-12 du Code pénal, dès lors qu'il était chargé
d'accomplir des actes ayant pour but de satisfaire l'intérêt
général, peu importe qu'il ne dispose d'aucun pouvoir de
décision55(*). D'un
autre coté, des journalistes pigistes, employés par une
chaîne de service public de la communication audiovisuelle ont
été considérés comme ayant la qualité de
personnes chargées d'une mission de service public au sens de l'article
432-11 du Code pénal. En acceptant, des sommes d'argent des
organisateurs d'une course pédestre ayant bénéficié
de la diffusion de messages publicitaires, en exécution d'un pacte
intervenu avant la course, ces journalistes se sont rendus coupables de
corruption passive56(*).
On peut se demander si ces solutions sont identiques à celles
prévues par le législateur tunisien?
En droit tunisien ; l'article 82 nouveau du CPT
prévoit : « Est réputé fonctionnaire
public soumis aux dispositions de la présente loi, toute personne ....
exerçant des fonctions auprès de l'un des services de l'Etat ou
d'une collectivité locale ou d'un office ou d'un établissement
public ou d'une entreprise publique, ou exerçant des fonctions
auprès de toute autre personne participant à la gestion d'un
service public ». On remarque que cet article prévoit quelques
conditions qui permettent de parler d'une personne chargée de la gestion
d'un service public.
D'un coté, l'article 82 CPT fait
référence à « toute personne...exerçant
des fonctions auprès de l'un des services de l'Etat ou d'une
collectivité locale », cette condition est prévue par
le législateur en Tunisie à plusieurs reprises par des lois
extérieures au code pénal comme la loi relative au statut
général des personnels de l'Etat et des collectivités
locales et les établissements publics à caractère
administratif ainsi que d'autres textes spéciaux57(*). D'après ces textes
l'exercice des fonctions auprès de l'un des services d'Etat ou des
collectivités locales doit être permanent et non temporaire
contrairement au droit français qui est indifférent quant au
caractère permanent ou temporaire de l'exercice des fonctions.
D'un autre coté, il ajoute « toute
personne....exerçant des fonctions auprès... d'un
établissement public ou une entreprise publique, ou exerçant des
fonctions auprès de toute autre personne participant à la gestion
d'un service public ». Ainsi, la qualité de personne
chargée de la gestion d'un service public est reconnue à toute
personne auprès d'un établissement public à
caractère administratif ou à toute autre personne participant
à la gestion d'un service public c'est à dire les
établissements à caractère industriel et commercial.
Sont aussi considérées comme personnes
chargées da la gestion d'un service public les fonctionnaires
d' « entreprises publiques ». En règle
générale ces fonctionnaires sont soumis aux dispositions du code
pénal et non aux dispositions du statut général des
entreprises publiques du 5 août 1985 lorsqu'il s'agit de la
corruption.
La Cour de Cassation tunisienne, pour déterminer si la
personne est chargée de la gestion d'un service public ou non, utilise
le critère de l'intérêt général en
considérant qui il est la pierre angulaire du service public58(*). D'après cet
arrêt, la gestion d'un service public tend à la réalisation
d'un intérêt général ainsi les personnes
chargées d'une telle gestion qui cherchent la réalisation d'un
intérêt personnel contraire au premier porte atteinte à la
mission et à la probité. A ce niveau une question se pose ;
qu'est ce que l'intérêt général ?
Ni le législateur ni la doctrine n'ont
précisé cette notion, toutefois le rapprochement de celle-ci
avec des notions voisines permet sa délimitation. Parmi ces
notions ; celle d'ordre public et de service public qui sont à
leur tour sans définition unanime.
L'intérêt général est une
composante de l'ordre public59(*), ainsi, si la corruption porte atteinte à
l'intérêt général elle porte obligatoirement
atteinte à l'ordre public. D'un autre coté, depuis la
réforme du 23 mai 1998 l'article 82 CPT prévoit
expressément le « service public »qui a pour
objectif l'intérêt général. Cette réforme va
permettre désormais aux tribunaux de poursuivre de nouveaux sujets pour
des faits de corruption tels que les fonctionnaires d'établissements
publics non Etatiques qui gèrent un service public tendant à la
réalisation d'un intérêt général par exemple
les agents des établissements bancaires60(*).
PARA2: Une divergence quant aux personnes investies d'un
mandat électif
Contrairement au droit français(A), le
législateur tunisien ne considère pas les personnes investies
d'un mandat électif comme des fonctionnaires publiques mais comme des
assimilés(B).
A- Des fonctionnaires publics en droit
français
Il résultait de l'article 177 ACP que seuls les
représentants des pouvoirs administratifs ou du pouvoir judiciaire
étaient visés. Il fallait donc appliquer le texte non seulement
aux fonctionnaires proprement dits, c'est à dire aux
délégués directs de l'autorité publique pour
administrer ou juger, mais à tout ces auxiliaires, à tous les
employés des administrations publiques, c'est à dire ;
« toutes les personnes encadrées dans l'organisation
administrative ou judiciaire61(*) ». Une hésitation est apparue
concernant les membres des assemblées délibérantes, qui
ont reçu leur délégation de l'élection, qui ne sont
pas chargés d'administrer ou de juger, mais simplement de
délibérer et de voter. Ces derniers ne pouvant être
considérés comme des fonctionnaires de l'ordre administratif ou
judiciaire au point de vue de l'article 177.
La Cour de Cassation, quant à elle, n'a pas
hésité à étendre les dispositions de l'article 177
ACP à des membres du parlement et à des conseillers
généraux ou municipaux62(*), pourtant le texte visait seulement les personnes
qui disposaient du pouvoir d'administrer ou de juger, mais pas celles qui
disposaient d'un pouvoir de délibérer ou de voter. La solution de
la jurisprudence, sur ce point, était logique et conforme à la
politique pénale de la corruption puisque le pouvoir s'exprime par les
fonctions administratives et judiciaires ainsi que les fonctions
législatives ou délibérantes.
La difficulté a été levée par le
législateur qui a ajouté L'expression « personne (...)
investie d'un mandat électif» par l'ordonnance du 8 février
1945. Cette ordonnance a étendu l'application de l'article 177 ACP aux
élus.
Avec le nouveau code pénal, l'article 432-11 reprend
une expression très proche de celle ajoutée par l'ordonnance de
1945, il s'agit désormais de la « personne (...) investie d'un
mandat électif public ». Cette expression désigne non
seulement les membres du Sénat, de l'Assemblée nationale mais
aussi les personnes qui font partie des assemblées régionales,
départementales et communales. Il en irait de même pour ceux des
citoyens français qui sont membres élus du Parlement
européen63(*),
membres élus de certains établissements publics comme les
Chambres de commerce et d'industrie, les Chambres d'agriculture, les Chambres
des métiers, y compris le chef de l'Etat.
On remarque que cette troisième catégorie de
personne prévue par l'article 432-11 CPF est un doublon de la
première catégorie puisque les personnes investies d'un mandat
électif public ne sont que des dépositaires de l'autorité
publique. D'après le professeur Vitu ; les
personnes investies d'un mandat électif public sont «
ajoutées sans doute pour plus de précision à l'article
432-11 »64(*).
Une autre partie de la doctrine considère que cette troisième
catégorie est un défaut et elle reproche au législateur
que « sous couvert de précisions ... (il) dilue dans de la
prose filandreuse un concept qui pourrait tenir en quelques mots, soit une
personne, nommée ou élue, exerçant une fonction
publique65(*) ».
B- Des assimilés aux fonctionnaires publics en droit
tunisien
Le législateur tunisien a donné une
définition de l'assimilé au fonctionnaire public dans l'article
82 nouveau du code pénal ; aux termes de cet
article : « Est assimilé au fonctionnaire public
toute personne ayant la qualité d'officier public, ou investie d'un
mandat électif de service public ou désignée par la
justice pour accomplir une mission judiciaire ».
On remarque, en faisant la comparaison avec l'ancienne
rédaction, l'existence de différences entre les deux textes. En
effet ; l'article 82 CPT, avant la réforme du 23 mai 1998,
énumérait les assimilés aux fonctionnaires publics. Il
s'agissait des personnes choisies par les particuliers ou
délégués par la justice en qualité d'experts,
d'arbitres ou d'interprètes. Avec la nouvelle rédaction, le
législateur a supprimé l'énumération en posant des
critères qui permettent l'acquisition d'une telle qualité. Ceci
nous mène à dire que le législateur
français66(*),
ainsi que son homologue tunisien, avec les réformes récentes, ont
évité l'énumération et ils l'ont remplacée
par des textes larges qui peuvent s'adapter aux exigences de la
modernisation.
L'article 82 nouveau assimile la personne investie d'un mandat
électif de service public au fonctionnaire public. On remarque que le
législateur tunisien a repris la même expression utilisée
par la réforme du 8 février 1945 en France à savoir ;
« personne (...) investie d'un mandat électif». Toutefois il a
ajouté les termes « de service public ».
La personne investie d'un mandat électif de service
public est la personne qui n'a pas la qualité de fonctionnaire public
mais qui exerce une fonction publique par exemple les membres des
assemblées régionales et communales67(*) et les membres de
l'assemblée nationale. On constate ainsi, que la qualité
d'assimilé au fonctionnaire public est octroyée par toute
personne investie d'un mandat électif de service public et ce à
cause de la mission qu'elle exerce et qui a pour objet la réalisation
d'un intérêt général.
A ce niveau, une remarque doit être faite : comme
en droit français ; Les personnes investies d'un mandat électif
de service public sont des dépositaires de l'autorité publique.
On peut donc `` reprocher `` au législateur tunisien que cette
catégorie de personnes est un doublon de la catégorie des
personnes dépositaires de l'autorité publique et celle des
personnes participant à la gestion d'un service public à la fois.
La même explication du professeur Vitu peut être reprise ici ;
le législateur tunisien a ajouté cette catégorie pour plus
de précision et pour permettre aux tribunaux répressifs
d'atteindre des personnes exerçant des fonctions d'intérêt
général mais qui n'ont pas la qualité de fonctionnaire
public en les considérant comme des assimilés.
Enfin, il faut préciser que deux autres
catégories sont considérées comme des assimilés aux
fonctionnaires publics ; ce sont les personnes ayant la qualité
d'officier public, ou désignées par la justice pour accomplir une
mission judiciaire (article 82 alinéa2 CPT).
Les personnes ayant la qualité d'officier public sont
les notaires, les huissiers et les avocats en exercice non stagiaires.
Concernant les avocats, ils peuvent être considérés,
à notre sens, comme officiers publics puisque depuis la loi du 6
août 1992, modifiant le code des droits réels tunisien, la
rédaction des actes et conventions soumis à l'inscription sur le
livre foncier est désormais de leur compétence alors qu'elle se
limitait auparavant aux notaires et aux conservateurs de la
propriété foncière. Pour certains avocats, cette
idée n'est pas conforme au statut de la fonction d'avocat qui insiste
sur le caractère libéral de ce métier et la non
subordination des avocats à une structure administrative.
Quant aux personnes désignées par la justice
pour accomplir une mission judiciaire, ce sont les experts, les
interprètes assermentés68(*), les arbitres et les liquidateurs judiciaires.
En conclusion on remarque qu'il ne s'agit pas d'une
véritable divergence entre les deux législations mais d'une
simple différence quant à la qualité de la personne
investie d'un mandat électif. En effet, cette catégorie de
personne, en droit tunisien comme le droit français, est très
proche de la catégorie des personnes dépositaires de
l'autorité publique.
SECTION II : LES AUTRES PERSONNES AYANT LA QUALITE DU
COUPABLE
Notre étude va porter, à ce niveau, sur
certaines catégories de personnes ayant la qualité du coupable en
matière de corruption, à savoir ; les magistrats et
salariés (para 1) et les fonctionnaires étrangers (para 2).
PARA I : Les magistrats et les salariés
La corruption de magistrats est prévue par les deux
législations (A) contrairement à la corruption de salariés
qui n'est prévue que par le droit français (B).
A- Les magistrats
Dans l'ancien code pénal français, la corruption
des élus, des magistrats et des fonctionnaires relevait d'un ensemble
unique de dispositions pénales, à savoir ; les articles 177
et suivant. Avec l'apparition du code pénal de 1992, les
rédacteurs ont retiré les magistrats et les autres personnes
gravitant au sein de la chose judiciaire et ils ont inséré les
incriminations de la corruption active ou passive les concernant dans le
Chapitre IV, qui traite des "Atteintes à l'action de la justice" et,
plus précisément, à l'intérieur de la section 2
intitulée "Des entraves à l'exercice de la justice", où
elles sont l'objet de l'article 434-9. L'éclatement du
bloc primitif d'incriminations relatives à la corruption, imposé
par le Code pénal de 1992, n'a cependant pas détruit les liens
anciens qui existaient entre les différents textes qui étaient
prévus par le code napoléonien. En effet, les agissements
matériels caractéristiques de la corruption ainsi que le but
auquel tendent ces agissements se retrouvent identiques malgré
l'éclatement des textes.
En droit tunisien, comme dans l'ancien Code Pénal
français, la corruption des magistrats figure dans un ensemble unique de
dispositions répressives qui concerne les fonctionnaires et les
élus, à savoir l'article 83 et suivant du CPT
insérés dans le Chapitre III, qui traite "Des infractions
commises par les fonctionnaires publics ou assimilés dans l'exercice ou
à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions" et, plus
précisément, à l'intérieur de la section 2
intitulée" De la corruption " où elle est l'objet des articles
88, 89 et 90.
1- Magistrats coupables en droit
français
La corruption met en présence, d'un côté
un simple particulier et de l'autre un magistrat ou une personne
assimilée par l'article 434-9.
Dans la corruption active, le tiers prend l'initiative des
démarches délictueuses et il peut entraîner la
méconnaissance d'un magistrat ou d'une personne assimilée, en qui
l'État a mis sa confiance, des devoirs de sa fonction. Dans la
corruption passive, le tiers cède aux sollicitations émanant du
magistrat.
La qualité de tiers doit être reconnue à
toute personne qui n'appartient pas au groupe des magistrats et personnes
assimilées. Il importe peu que ce tiers soit fonctionnaire ou non,
justiciable ou non, ami ou parent intervenant pour autrui69(*). Ce tiers peut être
aussi une personne physique agissant en qualité d'organe ou de
représentant d'une personne morale et engageant alors sa propre
responsabilité pénale. Une précision doit être faite
à ce niveau; la responsabilité pénale de la personne
morale ne saurait être mise en cause par les agissements de son organe ou
de son représentant, car l'article 434-47 concernant la
responsabilité des personnes morales à l'occasion des divers
délits d'atteinte à l'action de la justice ne fait pas mention de
la corruption réprimée par l'article 434-9. Cette
difficulté a été levée par la loi n°2004-204
du 9 mars 2004, dite loi PERBEN II, qui a supprimé le principe de
spécialité quant aux infractions engageant la
responsabilité pénale des personnes morales. Désormais, la
responsabilité pénale de la personne morale peut être
engagée pour toutes les infractions commises par un organe ou un
représentant agissant pour son compte70(*).
L'article 434-9 énumère les personnes coupables
et entrant dans la catégorie de magistrat ou assimilé. D'abord,
il y a les magistrats et jurés, d'un coté le magistrat qui peut
être défini comme «toute personne qui, par profession, a pour
tâche d'assurer d'une façon permanente l'administration de la
justice au sein des juridictions judiciaires ou administratives, de droit
commun ou d'exception71(*) ». Le terme
« magistrat » doit être compris dans son sens le plus
large ; c'est à dire, les magistrats du siège et les
magistrats du parquet ainsi que les parlementaires élus pour
siéger à la Haute cour de justice ou à la Cour de Justice
de la République. D'un autre coté, l'article 434-9 prévoit
les jurés qui siègent à la Cour d'assises puisqu'ils se
prononcent sur la culpabilité des accusés et des peines qui leurs
sont applicables.
Ensuite, l'article 434-9 ajoute les personnes «
siégeant dans une formation juridictionnelle ». Il s'agit, en
effet, des personnes qui rendent des décisions revêtues de
l'autorité de la chose jugée mais qui n'ont pas la qualité
de professionnel, à titre d'exemple les membres des juridictions de
proximité créées par la loi n° 2002-1138 du 9
septembre 2002 dite « loi PERBEN I ».
Puis, la loi rajoute certains auxiliaires de la justice tels
que ; Les experts et les arbitres. Les experts, grâce aux rapports
qu'ils rédigent, exercent une très grande influence sur les
litiges même si les conclusions de ces rapports ne lient pas les juges
répressifs, d'où la nécessité de les
protéger de la corruption. Quant aux arbitres, qui ont le pouvoir de
trancher des litiges, ils doivent être protégés ou
réprimés pour les mêmes raisons que les experts en cas de
manoeuvres corruptrices.
Enfin, l'article 434-9 vise les personnes chargées par
l'autorité judiciaire de missions de conciliation ou de
médiation. En premier lieu, il `s agit des conciliateurs qui sont
chargés par l'autorité judiciaire d'intervenir dans les petits
litiges civils, commerciaux ou sociaux. En second lieu, il s'agit des
médiateurs qui sont désignés par le procureur de la
République afin de régler les conflits nés d'infractions
modestes, avant toute poursuite, et ils doivent être indépendants
des magistrats du Ministère Public ou de leurs subordonnés. Le
terme « médiation » concerne aussi la
médiation réparation prévue pour les mineurs et qui peut
être confiée à un médiateur à tous les
moments de la procédure72(*).
2-Magistrats coupables en Droit
tunisien
La corruption des magistrats est prévue
dans les articles 88, 89 et 90 du CPT. Une première remarque doit
être faite, tous ces articles, contrairement à l'article 434-9
CPF, n'énumèrent pas les personnes coupables mais ils utilisent
des termes généraux, on parle en effet du « ...
juge qui..., s'est laissé corrompre...( Article 88) » ,
« ....le juge corrompu...( Article 89) » ou
« Tout juge..(Article 90) ».
La qualité du juge doit être comprise dans son
sens le plus large. Sont ainsi concernés les magistrats des juridictions
de droit commun et des juridictions d'exception quelle que soit leur
formation ; collégiale ou à juge unique. Sont aussi
concernés les juges des juridictions d'instruction tel que le juge
d'instruction ou la chambre d'accusation. Sont enfin concernés les
magistrats du Ministère Public et leurs subordonnés à
titre d'exemple un membre du parquet peut être corrompu afin de ne pas
exercer les voies de recours contre un arrêt de clôture
d'information émanant des juridictions d'instruction ou contre un
arrêt des juridictions de jugement au profit ou au détriment du
prévenu73(*).
L'étude des articles 82 et suivant du CPT relatifs
à la corruption, démontre que le législateur a
prévu pour les juges un régime juridique dérogatoire
à celui des fonctionnaires publics.
Les juges peuvent être considérés comme
des fonctionnaires publics conformément aux exigences de l'article 82
CPT puisqu'ils sont dépositaires de l'autorité publique et plus
précisément ils sont dépositaires de l'autorité
judiciaire mais ils obéissent à un régime spécial.
Cette idée est confirmée par le statut général des
personnels de l'Etat qui dispose dans son article premier que « le
présent statut ne s'applique pas aux magistrats74(*) ».Ce régime
dérogatoire s'explique par l'importance de l'autorité judiciaire
qui est la gardienne des libertés individuelles. Ainsi, une gestion
malhonnête de la fonction judiciaire par les juges portera atteinte
à ces libertés.
Cependant ce régime spécial ne s'applique que
pour la corruption de juge saisi d'une affaire pénale et cette limite
peut être déduite de l'article 88 CPT qui décide :
« Est puni de vingt ans d'emprisonnement, le juge qui, à
l'occasion d'une infraction susceptible d'entraîner pour son auteur
l'emprisonnement à vie ou la peine de mort, s'est laissé
corrompre, soit en faveur, soit au préjudice de
l'inculpé » et de l'article 89 CPT qui ajoute « Est
puni le juge corrompu de la même peine prononcée contre le
prévenu par l'effet de la corruption, à condition que la peine
prononcée envers ce juge ne soit inférieure à dix ans
d'emprisonnement ». On peut déduire de ces deux articles que
le juge saisi d'une affaire civile ou commerciale ne se voit pas appliquer les
articles 88 et suivant relatifs à la corruption des magistrats mais les
articles relatifs aux fonctionnaires publics, c'est à dire, les articles
83 CPT et suivant.
A notre sens, il est regrettable que le législateur
tunisien ait posé cette limite et qu `il aurait dû
généraliser, avec la réforme du 23 mai 1998,
l'application des articles 88 CPT et suivant à tous les cas de
corruption de juges même s'ils sont saisis d'affaires civiles ou
commerciales. Il serait préférable que notre législateur
utilise des termes tels que prévus par l'article 434-9 CPF qui puni tout
magistrat qui sollicite ou agrée des avantages quelconques
« pour l'accomplissement ou l'abstention d'un acte de sa
fonction » sans faire la distinction entre les affaires
pénales et les autres affaires de nature différente dont le juge
peut être saisi.
Une autre remarque doit être faite, contrairement
à l'article 434-9 du CPF qui énumère les magistrats et
assimilés qui peuvent faire l'objet de poursuite sur la base dudit
article, le code pénal tunisien limite l'application des articles 88 et
suivant aux seuls magistrats cités ci-dessus. Quant aux autres personnes
qui portent leur concours à l'action de la justice sans avoir la
qualité de magistrat, elles sont considérées comme des
assimilés aux fonctionnaires publics conformément aux exigences
du deuxième alinéa de l'article 82 CPT qui dispose :
« Est assimilé au fonctionnaire public toute personne ayant la
qualité d'officier public, ou investie d'un mandat électif de
service public ou désignée par la justice pour accomplir une
mission judiciaire ». Les personnes désignées par la
justice pour accomplir une mission judiciaire sont à titre
d'exemple ; les experts, les arbitres les liquidateurs judiciaires, les
syndics en matière de faillite etc....Il est fort regrettable, à
notre sens, que ces personnes ne se voient pas appliquer les dispositions
prévues pour les magistrats, qui se caractérisent par
l'aggravation des peines, et se voient appliquer des peines moins
sévères en dépit du rôle important dans l'action de
la justice.
Une autre divergence, relative aux interprètes, existe
entre les deux droits, ces derniers sont considérés comme des
personnes désignées par la justice pour accomplir une mission
judiciaire en droit pénal tunisien alors que le législateur
français a omis de les mentionner dans l'article 434-9 CPF à
coté des experts, arbitres et autres personnes assimilées aux
magistrats. « Cet oubli légal n'a qu'une importance
réduite75(*) ». En effet, dans un arrêt rendu
pour l'application de l'article 177 du Code pénal de 1810, les
interprètes étaient rangés dans la catégorie des
fonctionnaires76(*).
D'après le professeur Vitu cette solution peut être
réutilisée de nos jours en considérant les
interprètes comme des personnes investies d'une mission de service
public conformément à l'article 432-11 CPF77(*).
B- Les salariés
Dans sa rédaction primitive, le Code pénal
napoléonien ignorait la corruption des salariés et plus
précisément les rémunérations occultes
versées par les fournisseurs aux employés des maisons de commerce
et des entreprises industrielles avec lesquelles ils sont en relation
d'affaires, tandis qu'il réprimait la corruption des fonctionnaires.
Cette lacune avait été largement exploitée, surtout depuis
la première guerre mondiale. Il faut bien reconnaître que, dans
beaucoup d'entreprises, le « pot de vin » était
devenu d'un usage constant et régulier. Les employés
chargés d'acheter les marchandises, ou de les réceptionner,
touchaient d'un fournisseur une rémunération secrète pour
les favoriser ou pour évincer ses concurrents78(*). Il a paru donc
nécessaire de créer une incrimination contre de tels agissements,
tel a été l'objet de la loi du 16 février 1919 qui a
été modifiée par la loi du 8 février 1945.
Des deux personnages qui apparaissent dans tout pacte de
corruption il y a le tiers coupable de corruption active qui ne mérite
pas une explication particulière puisque il peut être quiconque.
Par contre, la personne corrompue mérite quelques explications.
L'article 177 ACP, tel que modifié par la loi du 16
février 1919 et la loi du 8 février 1945, visait
« tout commis, employé ou préposé
salarié ou rémunéré sous une forme
quelconque ». Cet article a donné lieu à deux
interprétations différentes, l'une est large et l'autre et
restrictive. La conception large considère comme salarié toute
personne unie à une entreprise privée ou à un particulier.
Elle a été proposée par une partie de la doctrine et
admise79(*). Certains
arrêts de la cour de cassation l'ont admise80(*). D'après cette
doctrine l'énumération de l'ancien article 177 visait toute
personne unie à une entreprise privée ou à un particulier,
« quelle que fût la nature du lien qu'il y attachait :
contrat du travail ou d'apprentissage ou contrat de mandat ou tout autre lien
contractuel... ». La seule condition était l'existence de la
rémunération sous une forme quelconque ; car les mots
« rémunérés sous une forme
quelconque » ne figuraient pas dans le projet gouvernemental. Ils
auraient été ajoutés expressément par la chambre
des députés pour inclure dans les prévisions
légales les salariés, mais aussi les administrateurs et
gérants de société81(*).
La conception large a été critiquée par
les partisans de la conception restrictive qui considérait que
l'énumération légale désignait seulement les
personnes liées à l'employeur par un contrat de travail,
c'est-à-dire celles qui se trouvaient placées à son
égard dans un état de subordination juridique plus ou moins
étroit tels que ; le manoeuvre, l'ouvrier spécialisé,
l'employé de bureau etc. ... ce qui excluait l'application de
l'article 177 à la personne liée par un contrat d'une autre
nature à l'entreprise, et notamment ceux qui sont des mandataires ou des
administrateurs de sociétés : il s'agit alors de dirigeants, et
non de salariés82(*). Cette conception se fonde sur les termes
mêmes employés par l'article 177 ACP « commis,
employés ou préposés ».
Avec l'apparition du nouveau Code pénal les
dispositions relatives à la corruption de salariés figurent
désormais dans le code du travail et plus précisément dans
l'article L152-6. Cet article, pour clarifier la situation, parle
de « tout directeur ou salarié » ce qui a fait
naître un débat sur la portée à donner au terme de
directeur. Faut il donner à ce terme le sens de dirigeant afin
d'étendre la portée de cet article aux administrateurs,
présidents ou directeurs généraux de
sociétés qui sont « véritablement les
maîtres des entreprises et sont placés à la tête de
la hiérarchie83(*) ». Le libellé même de cet
article impose de répondre par la négative. Il parle, en effet,
du fait, « pour un directeur... de solliciter... à l'insu et sans
l'autorisation de son employeur... des dons... ».
Le mot directeur a donc le sens d'un subordonné, car
il est soumis à l'employeur qui pourrait lui refuser ou lui donner
l'autorisation de recevoir des dons... ». Le professeur Vitu en
conclut que « la chambre criminelle ne devrait pas persister
dans la position qu'elle avait adoptée... 84(*)».
Il faut préciser enfin que l'article L 152-6 du Code du
travail n'est pas applicable à tous les salariés qui se trouvent
dans une situation de subordination juridique vis-à-vis des employeurs.
Sont, en effet, exclus tous les salariés des administrations
privées placées sous le contrôle des établissements
publics par exemple ; la chambre de commerce et d'industrie ainsi que les
officiers publics qui relèvent de l'article 432-11 CPF puisque ils sont
des personnes chargées d'une mission de servie public. Toutefois les
employés des entreprises nationalisées, comme la S.N.C.F, E.D.F
etc...., sont considérés comme des salariés relevant de
l'article L 152-6 du Code du travail puisque ces entreprises sont des
entreprises privées.
En droit tunisien, contrairement au droit français,
aucune incrimination n'est prévue par le législateur pour la
corruption des salariés que ce soit dans le code pénal ou dans
d'autres textes législatifs notamment le Code du travail tunisien. Ceci
peut s'expliquer, à notre sens, par des raisons historiques puisque la
Tunisie n'a pas connu, pendant la Première Guerre mondiale, les abus qui
étaient commis en France par des employés du commerce et de
l'industrie qui acceptaient des pots-de-vin pour favoriser certains acheteurs
ou fournisseurs au détriment de concurrents.
D'après une partie de la doctrine85(*), la réforme du 23 mai
1998, a instauré implicitement la corruption de salariés dans
l'article 82 CPT relatif à la définition de fonctionnaire public
qui prévoit « est réputé fonctionnaire
public....toute personne ... exerçant des fonctions auprès de
toute autre personne participant à la gestion d'un service
public ». En effet, les termes « auprès de toute
autre personne » sont utilisés, selon cette conception, par le
législateur pour désigner les salariés des entreprises
privées.
Nous pensons que cette interprétation est extensive et
contraire à l'intention de l'auteur de la réforme de 1998 puisque
rien dans le projet de loi, ni dans les discussions parlementaires ou dans le
circulaire du Premier Ministre tunisien, ne fait allusion à la
responsabilité pénale des salariés pour des faits de
corruption. De plus l'article 82 CPT est relatif à la définition
du fonctionnaire public et assimilé et non celle des salariés
d'entreprises privées.
A notre sens, le législateur tunisien aurait dû
créer une nouvelle incrimination relative à la corruption des
salariés d'entreprises privées dans le code du travail tunisien,
lors de la réforme du 23 mai 1998, surtout avec la montée de la
privatisation des établissements publics qui est de plus en plus
fréquente de nos jours en Tunisie. Cette privatisation entraîne,
en effet, l'impunité des employés appartenant aux entreprises
devenues privées puisqu'ils ne sont plus considérés comme
fonctionnaires publics mais comme des salariés qui échappent
à l'application des dispositions du Code pénal relatives
à la corruption.
PARA II : Les fonctionnaires étrangers
En France, la lutte contre la corruption se heurte à
de nombreuses difficultés. Les enquêtes et les instructions
préparatoires sont longues et délicates et ce à cause de
la clandestinité des faits de corruption ou l'intervention des pouvoirs
politiques. Les méfaits de la corruption ne se limitent pas à
l'échelle nationale mais ils affectent tous les autres Etats. Cette
situation s'explique par la mondialisation récente de l'économie
et par la modernisation des moyens de transport, de production et
d'exploitation.
Jusqu'à une époque récente, le droit
pénal français incriminait seulement la corruption active et
passive des fonctionnaires ou des magistrats français relevant des
institutions administratives ou judiciaires françaises et la corruption
des salariés dans les entreprises privées mais il n'incriminait
pas les atteintes aux intérêts des Etats étrangers. Le
professeur Vitu, en 1960, prévoyait que « le
développement des organisations internationales, dont les fonctionnaires
sont chargés de missions temporaires en France ou même sont
implantés d'une façon permanente dans notre pays, conduira un
jour ou l'autre, à élargir les termes de
l'énumération de l'article 177du code pénal(l'ancien
code), pour y englober ces représentants étrangers86(*) ».
En effet, la mondialisation des rapports économiques et
l'importance croissante des organismes communautaires dans la construction de
l'Europe ne permettaient plus d'ignorer plus longtemps les dangers des
pratiques corruptrices mettant en cause des fonctionnaires communautaires ou
des agents publics étrangers87(*).
Ceci a poussé l'Organisation des Nations Unies
à lancer récemment un programme global de lutte contre la
corruption pour inciter les gouvernements des États membres à
mettre sur pied des moyens coordonnés d'action et à
échanger toutes informations utiles88(*).
Au niveau international plusieurs initiatives ont
été prises pour lutter contre le phénomène de
corruption, dont les principales sont trois conventions qui ont organisé
la protection des intérêts financiers des communautés
européennes et la lutte contre la corruption internationale à
l'intérieur ou à l'extérieur de l'Union européenne.
La première convention du 26 juillet 1995(dite convention PIF), est
signée à Bruxelles et complétée par trois
protocoles, assure la protection des intérêts financiers des
Communautés européennes contre les comportements de fraude et les
actes de corruption de fonctionnaires nationaux et internationaux dans la
mesure où ces comportements portent atteinte à ces
intérêts ; elle incite en outre les États membres de
l'Union européenne à punir le blanchiment des capitaux provenant
des fraudes ou de la corruption et à envisager, à cet
égard, la responsabilité pénale des personnes morales. La
seconde est signée à Bruxelles le 26 mai 1997 et elle oblige
les États de l'Union européenne à incriminer la
corruption, qu'elle porte ou non atteinte aux intérêts financiers
des Communautés européennes. Ces deux conventions posent le
principe de l'assimilation, qui oblige les signataires à incriminer et
à punir la corruption des fonctionnaires communautaires ou des agents
d'un autre État dans les mêmes conditions que la corruption des
fonctionnaires nationaux89(*).
Enfin, la troisième convention est relative à
la lutte contre la corruption d'agents publics étrangers dans les
transactions commerciales internationales, elle a été
adoptée le 17 décembre 1997 à paris par l'Organisation de
coopération et de développement économique.
Pour satisfaire à ces engagements internationaux le
Gouvernement français a présenté un projet de loi dans
lequel il entendait appliquer strictement le principe d'assimilation et
étendre la répression aux acteurs internationaux de la
corruption, ce projet est devenu la loi n° 2000-595 du 30 juin 2000. La
loi nouvelle ajoute au Code pénal, dans le Titre III du Livre IV, un
Chapitre V intitulé "Des atteintes à l'administration publique
des Communautés européennes, des États membres de l'Union
européenne, des autres États étrangers et des
organisations internationales publiques". Ce chapitre est composé des
articles 435-1 à 435-6.
Dans les articles 435-1 et 435-2, pris pour l'application de
la Convention de Bruxelles du 26 mai 1997 relative à la lutte contre la
corruption dans le cadre des Communautés européennes ou des
États membres de l'Union européenne, une même et unique
énumération désigne différentes personnes
appartenant toutes au cadre communautaire européen ou fonctionnaires
d'États membres de l'Union européenne(A). Au contraire, les
articles 435-3 et 435-4, traduction de la Convention de Paris du
17décembre 1997 sur la lutte contre la corruption dans les transactions
commerciales internationales, concernent uniquement des personnes
dépendant d'organisations internationales autres que les institutions
communautaires européennes ou d'États étrangers à
l'Union européenne(B).
Une remarque doit être faite à ce niveau. D'un
coté, aucune initiative du gouvernement tunisien n'a tendu à la
répression de la corruption en dehors du territoire national. D `un
autre coté, aucunes des conventions précitées n'a
été ratifiée par la Tunisie. Cette situation peut
s'expliquer, à notre sens, par le fait que la Tunisie, n'appartient pas
à une union dont l'importance est semblable à celle de l'Union
européenne. Toutefois, cette position gouvernementale demeure
regrettable puisque la Tunisie, comme tout autre Etat dans le monde, est
concernée par la mondialisation. De plus, les méfaits de la
corruption portent forcément atteinte à ses intérêts
d'où la nécessité de prêter attention à cette
infraction en dehors des frontières nationales.
A-les personnes relevant du cadre communautaire
européen
Les personnes susceptibles d'être impliquées dans
des manoeuvres de corruption sont prévues par les articles 435-1 et
435-2 CPF. Selon l'ordre retenu dans ces articles, il s'agit :
- Des fonctionnaires communautaires :
Conformément à la définition qu'en donne l'article 1er-b
de la Convention du 26 mai 199790(*), deux catégories de personnes sont
visées cumulativement par l'expression unique de
« fonctionnaire communautaire »; d'abord, toute personne
qui a la qualité de fonctionnaire ou d'agent engagé par contrat
au sens du statut des fonctionnaires des Communautés européennes
ou du régime applicable aux autres agents des Communautés
européennes. Ces personnes sont recrutées directement par les
organes compétents de ces Communautés ; elles relèvent de
la Cour de justice en cas de litige concernant leur situation administrative.
Ensuite, toute personne mise à la disposition des Communautés
européennes par les États membres ou par tout organisme public ou
privé et qui exerce des fonctions équivalentes à celles
des fonctionnaires ou autres agents des Communautés. Par son statut
administratif, elle continue à relever de son corps d'origine. - Les
fonctionnaires nationaux d'autres États membres de l'Union
européenne : les articles 435-1 et 435-2 ne donnent pas de
définition précise de cette catégorie. Faut il appliquer
les critères du droit interne français ? Ou au contraire,
faut il se retourner aux critères imposés par le droit interne du
fonctionnaire en cause ? L'article 1er-c de la Convention
du 26 mai 1997 semble imposé la deuxième solution, ainsi, , lors
d'une poursuite menée en France du chef de corruption passive ou active
et mettant par exemple en cause un fonctionnaire italien, le juge
français devra interroger la loi italienne pour savoir si, en
application de sa loi nationale, l'intéressé a ou non la
qualité de fonctionnaire91(*).
- Les membres de la Commission des Communautés
européennes : Cette commission comprend des membres ayant la
nationalité des États membres de l'Union européenne et
elle a pour rôle de présenter au Conseil des propositions ou
projets d'actes communautaires et met en oeuvre l'application des
décisions de ce Conseil ; en particulier, elle arrêté la
réglementation nécessaire à la mise en oeuvre de ces
décisions par les États membres. La protection de cette
commission de la corruption de ses membres s'explique par l'importance du
rôle de celle-ci au sein de l'Union européenne.
- Les membres du Parlement européen : les
députés de ce parlement sont élus pour cinq ans, au
suffrage universel direct, par les ressortissants des États membres de
l'Union, selon des modalités électorales propres à chaque
État. Le rôle de ce parlement consiste à
l'élaboration du budget communautaire, à son adoption et à
son exécution, ainsi qu' à l'élaboration des
décisions prises par le Conseil des ministres ou par la Commission.
Comme pour les membres de la Commission des Communautés
européennes, c'est l'importance du rôle du parlement
européen qui explique l'extension de l'application des articles 435-1 et
435-2 CPF aux députés.
- Les Membres de la Cour de justice des Communautés
européennes : cette juridiction a pour fonction
d'interpréter et d'appliquer les Traités qui ont fondé et
développé l'Union européenne. Les raisons qui ont
poussé le législateur français à incriminer la
corruption des magistrats français expliquent la protection de la
fonction de membre de la Cour de justice des Communautés contre toute
manoeuvre de corruption.
- Les membres de la Cour des comptes des Communautés
européennes : Cette cour a pour rôle de contrôler les
comptes des Communautés et des organes créés par les
institutions européennes. Son rôle est fondamental pour
détecter les cas de malversation ou de corruption ; encore faut-il
qu'aucun de ses membres ne puisse être suspecté de solliciter ou
d'accepter des promesses, des dons ou des avantages constitutifs de
corruption92(*).
Ce qui change à ce niveau, par rapport au droit
interne, c'est la qualité de la personne corrompue puisque les articles
visent soit le fonctionnaire communautaire, soit le fonctionnaire d'un autre
Etat membre de l'Union européenne, soit le membre des institutions des
communautés. A coté de ces initiatives au niveau
européen, la lutte contre la corruption à l'échelle
internationale apparaît comme « une exigence de sauvegarde de
nos nations face à la prolifération de cette criminalité
nouvelle qui doit être ici rapprochée de la criminalité
organisée93(*) ». Toutefois, le législateur
français a limité la répression à la corruption
active des agents publics étrangers dans les transactions commerciales
internationales.
B- les personnes ne relevant pas du cadre communautaire
européen
Cette catégorie de personnes est visée par les
articles 435-3 et 435-4 CPF qui sont pris pour l'application de la Convention
de Paris du 17 décembre 1997. Ces deux articles ont une portée
limitée par rapport aux articles 435-1 et 435-2 CPF relatifs aux
personnes relevant du cadre communautaire européen puisque ils ne
concernent que la corruption active commise soit envers des personnes
étrangères exerçant une fonction publique, soit envers des
personnes étrangères investies d'une fonction juridictionnelle ou
d'une fonction voisine. De plus ils ne s'appliquent qu'à la corruption
qui se produit dans les relations commerciales internationales.
L'article 435-3 CPF est relatif à la corruption active
des personnes ayant la qualité d'agent public étranger, quant
à l'article 435-5 CPF il est relatif à la corruption active des
magistrats étrangers et assimilés.
S'agissant, d'abord, de l'article 435-3 CPF qui
définit l'agent public étranger comme étant la personne
dépositaire de l'autorité publique, ou chargée d'une
mission de service public, ou investie d'un mandat électif public. Trois
remarques doivent être faite à ce niveau :
La première est relative à la terminologie
employée par le législateur, ce dernier a utilisé les
mêmes termes employés dans un assez grand nombre de dispositions
du Code pénal actuel et notamment dans les articles 432-11 et 433-1
réprimant la corruption d'agents publics français. Ainsi, la
définition prévue en droit interne par la doctrine94(*) pour les personnes
dépositaires de l'autorité publique, ou chargées d'une
mission de service public, ou investies d'un mandat électif public est
valable pour expliciter la portée de l'article 435-3 CPF.
La deuxième est relative à la comparaison de ces
agents avec ceux du droit interne et plus précisément les
personnes visées par les articles 432-11 et 433-1 CPF. En effet, les
personnes visées par l'article 435-3 CPF doivent être
chargées ou investies de leurs fonctions dans un pays étranger
autre que l'un des États membres de l'Union européenne ou au sein
d'une organisation internationale publique autre que celles des
Communautés européennes.
La troisième remarque concerne la comparaison des
conventions qui ont inspiré le législateur français lors
de la réforme du 30juin 2000. On constate, en effet, que tandis que la
« Convention du 26 mai 1997 concernant la corruption commise dans
l'orbite communautaire renvoie à la législation de chaque
État membre de l'Union européenne le soin de déterminer
à qui doit être reconnue la qualité de "fonctionnaire
national", la Convention OCDE du 17 décembre 1997 relative à la
corruption à l'occasion du commerce international précise qui a
la qualité d'agent public étranger au sens de cette Convention
95(*) ».
l'article premier de celle-ci définit l'agent public étranger
comme étant la « personne qui détient un mandat
législatif, administratif ou judiciaire dans un pays étranger,
qu'elle ait été nommée ou élue, toute personne
exerçant une fonction publique dans un pays étranger, y compris
dans une entreprise ou un organisme publics et tout fonctionnaire ou agent
d'une organisation internationale publique96(*) ». D'après le professeur Vitu, la
définition de l'agent public prévue dans la dite convention a
été reprise par le législateur français
« D'une façon plus synthétique », mais en
omettant de mentionner les personnes investies d'un mandat judiciaire. Cet
oubli s'explique par l'article 435-4 CPF qui est réservé à
cette catégorie de personnes.
L'article 435-4 CPF mentionne le magistrat, le juré ou
toute personne siégeant dans une formation juridictionnelle, l'arbitre
ou l'expert nommé soit par une juridiction soit par les parties, et la
personne chargée par l'autorité judiciaire d'une mission de
conciliation ou de médiation. On remarque que le législateur
français a repris la même énumération prévue
par l'article 434-9 CPF relatif à la corruption d'un magistrat
français, la seule différence réside dans l'appartenance
des magistrats visés par l'article 435-4 CPF à un État
étranger autre qu'un État membre de l'Union européenne ou
à une organisation internationale publique autre que l'une des
institutions des Communautés européennes.
On remarque aussi que la définition donnée par
cette disposition nouvelle est extrêmement détaillée, alors
que l'article 1er de la Convention du 17 décembre 1997 évoque
seulement la personne investie d'un "mandat judiciaire".
En conclusion, nous pensons qu'il est regrettable que les
articles 435-3 et 435-4 CPF ne répriment que la corruption active et
qu'ils ne s'appliquent qu'à la corruption se produisant dans les
relations commerciales internationales. Ainsi par exemple un Espagnol (personne
relevant de la communauté européenne) corrompt à Paris un
fonctionnaire tunisien (personne ne relevant pas de la
communauté européenne) : le premier est punissable mais pas
le second alors que c'est souvent l'auteur de la corruption passive qui est le
plus coupable. Selon une partie de la doctrine ; c'est une lacune du droit
national français qui est « la conséquence
d'engagements internationaux97(*) ».
La qualité du coupable ainsi déterminée,
il convient donc de préciser les éléments matériels
de l'infraction.
CHAPITRE II : LES ELEMENTS MATERIELS
Les éléments matériels de la corruption
nécessitent, une activité matérielle délictueuse
(Section1), émanant soit du corrupteur soit du corrompu,
désignée par la doctrine par les termes « manoeuvres
corruptrices ». Ces manoeuvres ont un pour but (Section2) l'obtention
de l'accomplissement ou l'abstention d'accomplir un acte de la fonction ou
d'un acte facilité par la fonction.
SECTION I : L'ACTVITE MATERIELLE
DELICTUEUSE
L'étude de l'activité délictueuse
mérite de préciser son aspect en premier temps(para1), pour
pouvoir déterminer ces moyens générateurs (para2). Nous
apporterons, enfin, quelques explications sur des problèmes de droit
pénal de fond (para3).
PARA I : L'aspect de l'activité
délictueuse
Pour mieux déterminer l'aspect de l'activité
délictueuse, il serait préférable de distinguer entre la
corruption passive (A) et la corruption active (B).
A - L'aspect de l'activité
délictueuse dans la corruption passive
Deux verbes servent à désigner, en droit
français et tunisien, l'attitude reprochée à la personne
investie d'une fonction publique et qui verse dans la corruption passive ;
le coupable sollicite ou agrée des dons, des présents ou autres
avantages. Cependant, une divergence existe entre les deux
législations ; si elles considèrent toutes les deux
l'agrément comme élément constitutif de l'infraction (1),
il en est autrement pour la sollicitation qui est considérée
comme circonstance aggravante en droit tunisien (2).
1- L'agrément : Un
élément constitutif dans les deux législations
Le terme « agrément » désigne
l'acceptation et la réception à la fois. D'abord,
l'acceptation ; c'est le fait pour le corrompu d'accepter les offres qui
lui sont faites par le corrupteur. Ensuite, la réception ; c'est le
fait de recevoir les dons promis.
En droit français, le terme «
agrément » apparaît à plusieurs reprises dans les
textes relatifs à la corruption passive , ainsi, l'article 432-11 CPF,
relatif à la corruption passive commise par des personnes
exerçant une fonction publique, dispose « Est puni... le
fait...d'agréer .. ». L'article 434-9 CPF relatif à la
corruption de magistrats emploi le même terme, il prévoit en
effet « le fait pour un
magistrat...d'agréer... ». Enfin, les articles 435-1CPF et
suivant relatifs à la corruption passive dans le cadre de la
communauté européenne reprennent la même formule
employée par les deux articles précédents. On remarque que
la notion d'agrément n'existe pas dans les articles 435-3 CPF et
suivants puisque ils sont relatifs à la corruption active, et non
passive, des personnes relevant d'Etats étrangers autres que les Etats
membres de l'Union européenne.
L'agrément est, tout simplement, l'exécution de
l'accord de volontés qui s'est formé entre le corrupteur et le
corrompu. Toutefois, une remarque doit être fait sur cet accord, le
délit est consommé au moment où les consentements
s'échangent entre le corrupteur et le corrompu. Ainsi, il importe peu
que la personne corrompue renonce à l'exécution de l'accord
intervenu ou si elle restitue les choses qu'elle avait reçues pour prix
de sa corruption.
Les articles précités ne se limitent pas
à la notion d'agrément mais ils ajoutent que celui-ci doit
être formulé « sans droit ». Cette exigence,
imposée par les textes répressifs, est vivement critiquée
par la doctrine, pour le professeur Vitu : « Le
législateur aurait été mieux inspiré de ne pas
faire mention d'un agrément formulé ''sans droit''98(*) » puisque il laisse
penser que l'agrément d'un avantage quelconque pour accomplir un acte de
la fonction peut être licite alors que tout agrément, lorsque il
est commis par une personne exerçant une fonction publique, est par
nature illicite.
Cette exigence peut s'expliquer, comme le souligne le
professeur Vitu, pour la corruption de salariés puisque
l'agrément doit se produire à l'insu de l'employeur pour que le
délit soit consommé. Ainsi, l'employeur ne peut donc pas invoquer
une violation de l'obligation de fidélité que le salarié
doit respecter, s'il a eu connaissance de la remise d'une
rémunération et y a consenti99(*).
A notre sens, l'expression ''sans droit'', comme c'est le cas
de l'expression ''des personnes investies d'un mandat électif public'',
a été ajoutée sans doute pour plus de
précision, , aux articles 432-11, 434-9 et 435-1 CPF et ne pas
être considérée comme un défaut affectant le
délit de corruption100(*).
En droit tunisien, la corruption passive se fonde aussi sur la
notion d'agrément. L'article 83 CPT relatif à la corruption
passive des fonctionnaires publics ou assimilés dispose :
« Toute personne ayant la qualité de fonctionnaire public ou
assimilé...., qui aura agréé....est punie.. ».
L'article 85 CPT utilise, quant à lui, les termes suivant :
« Si le fonctionnaire public ou assimilé a
accepté... ». Enfin il l'article 94 CPT prévoit que
« dans tous les cas de corruption, les choses données ou
reçues sont confisquées au profit de l'État ».
On remarque que le législateur tunisien, comme son homologue
français, fait usage de la notion d'agrément même s'il
emploie l'expression d'acceptation ou réception qui reste très
liée à la première puisque par l'acceptation il faut
entendre ; le fait pour le corrompu d'accepter les offres proposées
par le corrupteur et par la réception ; le fait de recevoir les
dons promis.
D'après la doctrine tunisienne, l'agrément est
l'acceptation du corrompu de l'offre du corrupteur qui a pour but
l'accomplissement d'un acte de la fonction101(*). Toutefois, l'agrément doit être
formulé d'une manière libre et intentionnelle pour pouvoir parler
de corruption. De plus, il importe peu que la réception des choses
promises s'est réalisée ou non, ou que le fonctionnaire public
ou assimilé renonce à l'exécution de l'accord intervenu
puisque l'infraction est consommée lors de l'échange de
volontés entre le corrupteur et le corrompu102(*).
Le législateur tunisien a exigé, comme son
homologue français, que l'agrément soit formulé ''sans
droit'' et ce dans l'article 83CPT qui dispose : « Toute
personne.... qui aura agréé, sans droit... ».
Cependant, cette exigence n'est pas prévue dans tous les articles
relatifs à la corruption passive, tel qu'il est le cas en droit
français, mais elle se limite à cet article.
Les mêmes critiques qui ont été
formulées plus haut concernant cette expression demeurent valables
à ce niveau, toutefois nous pensons qu'elle a été
ajoutée par le législateur pour plus de précision.
En conclusion, on remarque que de grandes similitudes existent
entre les deux droits quant à l'agrément comme étant un
élément constitutif de l'infraction mais ces similitudes font
défaut en ce qui concerne la sollicitation puisqu'elle est
considérée comme une circonstance aggravante en droit
tunisien.
2-La sollicitation : Une circonstance
aggravante en droit tunisien
Dans le cadre de la corruption passive en France,
l'élément matériel est la sollicitation ou
l'agrément d'offres ou promesses, des dons, des présents ou
d'avantages quelconques, le tout sans droit.
La sollicitation implique une démarche du corrompu qui
joue ainsi un rôle actif. Ce dernier invite son interlocuteur, d'une
façon directe ou par des moyens détournés, à
comprendre qu'il doit « payer » pour obtenir l'accomplissement ou le
non-accomplissement de l'acte de la fonction ou de l'acte facilité par
elle103(*).
La sollicitation est prévue, à plusieurs
reprises, dans les textes relatifs à la corruption passive, ainsi,
l'article 432-11 CPF, relatif à la corruption passive commise par des
personnes exerçant une fonction publique, dispose « Est
puni... le fait...de solliciter .. ». L'article 434-9 CPF relatif
à la corruption de magistrats emploi le même terme, il
prévoit en effet « le fait pour un magistrat...de
solliciter... ». Enfin, les articles 435-1CPF et suivant relatifs
à la corruption passive dans le cadre de la communauté
européenne reprennent la même formule employée par les deux
articles précédents.
La simple sollicitation d'avantages quelconques suffit
à caractériser le délit de corruption passive, qui est
consommé dès l'émission de celle-ci. Il est donc sans
importance que la sollicitation n'ait eu aucun effet sur la personne
visée, ou encore que l'avantage promis n'ait finalement pas
été versé104(*). On remarque à ce niveau que la sollicitation
comme l'agrément entraînent la consommation du délit.
La sollicitation, tel qu'il est le cas de l'agrément,
doit être formulée '' sans droit''. Cette
expression peut être l'objet des critiques faites
précédemment. On rappelle à ce niveau que nous pensons
que cette expression a été ajoutée pour plus de
précision.
En droit tunisien, la sollicitation et l'agrément ne
figurent pas dans le même article. L'agrément est prévu par
l'article 83 CPT alors que la sollicitation est prévue par l'article 84
CPT. Il faut cependant préciser que le législateur n'a pas
utilisé ce terme d'une manière explicite, telle qu il est le cas
dans la législation française, mais il fait usage de l'expression
suivante ''Si le fonctionnaire public ou assimilé a provoqué des
offres ou promesses, la remise de dons ou présents...''. La provocation
doit être entendue comme étant la prise d'initiative par la
personne exerçant une fonction publique qui invite son interlocuteur
à comprendre qu'il doit céder à ses sollicitations.
Cette démarche du fonctionnaire ou assimilé fait
l'objet d'un article indépendant, contrairement au code pénal
français qui prévoit l'agrément et la sollicitation dans
le même texte. L'article 84 CPT dispose en effet : «
Si le fonctionnaire public ou assimilé a provoqué la corruption,
la peine prévue à l'article 83 de ce code sera portée au
double ». Sachant que l'article 83 puni de dix ans d'emprisonnement
l'agrément du fonctionnaire public des offres qui lui sont faites, cette
peine sera portée à vingt ans d'emprisonnement si c'est ce
dernier qui avait pris l'initiative.
On remarque ainsi, que le législateur tunisien
considère que la sollicitation est plus grave que l'agrément et
qu'elle mérite une peine plus lourde. A notre sens, cette distinction
est inutile puisque la sollicitation et l'agrément portent atteinte
à la même valeur sociale à savoir le devoir de
probité.
Il faut préciser que le législateur tunisien
n'utilise pas l'expression de sollicitation dans les autres textes relatifs
à la corruption à titre d'exemple l'article 88 CPT relatif aux
magistrats dispose : « le juge qui.... s'est laissé
corrompre... est puni ». On remarque que le législateur
utilise l'expression'' s'est laissé corrompre'' qui porte à
croire, à première vue, que le texte ne concerne que la
corruption active. A notre sens, cet article concerne la corruption passive et
active, même si il ne précise pas si le juge joue un rôle
actif ou passif dans la démarche. D'où la dite expression peut
englober la sollicitation et l'agrément. Cette idée peut se
confirmer par la lecture du texte arabe (qui a été mal traduit),
ayant la primauté en cas de discordances entre les deux versions, qui
prévoit la corruption dans ses deux formes passive et active.
A noter enfin, que la simple sollicitation d'avantages
quelconques suffit à caractériser le délit de corruption
passive Il est donc sans importance, que la sollicitation n'ait eu aucun effet
sur la personne visée ou encore que l'avantage promis n'ait finalement
pas été versé.
B- L'aspect de l'activité
délictueuse dans la corruption active
L'activité par laquelle l'auteur d'une corruption
active intervient auprès d'une personne investie d'une fonction
officielle est désignée différemment par les deux
législations. Il s'agit de la proposition et l'acquiescement aux
sollicitations en droit français(1) et de la persuasion et la contrainte
en droit tunisien(2).
1-La proposition et l'acquiescement aux
sollicitations en droit français
L'article 433-1 CPF utilise deux termes différents pour
désigner l'activité par laquelle l'auteur d'une corruption
active intervient auprès d'une personne exerçant une fonction
publique. Le corrupteur propose des offres, présents ou avantages
quelconques, en cas où c'est lui qui a pris l'initiative des
conversations illicites, ou bien, si c'est le corrompu qui a commencé la
démarche délictueuse, l'article précise que la personne
privée cède aux entreprises de son interlocuteur.
Ces deux termes sont utilisés par le législateur
à plusieurs reprises dans les textes relatifs à la corruption
active, ainsi on les retrouve dans l'article 434-9 CPF, relatif à la
corruption active et passive des magistrats et assimilés, qui
prévoit : « le fait, à tout moment, de
céder aux sollicitations d'une personne visée à
l'alinéa précédent, ou de proposer des offres, des
promesses, des dons.... ». L'article 435-2 CPF relatif à la
corruption active des fonctionnaires relevant du cadre de la communauté
européenne et les articles 435-3 et 435-4 CPF relatifs à la
corruption active de fonctionnaires et de magistrats ne relevant pas du cadre
de l'Union européenne utilisent, eux aussi, les mêmes termes
employés par l'article433-1CPF.
Comme le mot "solliciter", le verbe "proposer" désigne
une démarche positive du corrupteur qui cherche à obtenir
l'accord du fonctionnaire ; il importe peu que cette démarche
réussisse ou échoue : le délit de corruption active est
pleinement consommé dès que se met en route la manoeuvre
délictueuse105(*).
Quant à l'expression "céder aux
sollicitations" du fonctionnaire corrompu, elle désigne l'accord par
lequel le tiers accepte d'entrer dans les vues de son interlocuteur : cet
accord suffit à constituer ce tiers en état de délit,
même si par la suite le fonctionnaire corrompu renonce à accomplir
l'acte promis, il s'agit, en effet, d'un repentir tardif qui n'a aucun effet
positif pour le fonctionnaire.
On remarque que, dans le cadre de la corruption active, il
s'agit cette fois de la proposition des mêmes avantages que ceux
prévus au titre de la corruption passive et que le législateur a
cru bon d'ajouter également pour la corruption active l'expression
''sans droit'' en ce qui concerne les fonctionnaires, les agents publics
européens et les agents publics étrangers. Et on retrouve sans
surprise les mêmes critiques que celles exposées
précédemment au sujet de la corruption passive.
2-La persuasion et la contrainte en droit
tunisien
La persuasion et la contrainte constituent l'aspect de
l'activité délictueuse dans la corruption active en droit
tunisien. L'article 91 CPT dispose dans son alinéa premier :
« Est punie de cinq ans d'emprisonnement et de cinq mille dinars
d'amende, toute personne qui aura corrompu ou tenté de corrompre par des
dons ou promesse de dons, ou présents ou avantages de quelque nature que
ce soit l'une des personnes visées a l'
article 82
(nouveau) du présent code... ». Et il ajoute dans le
dernier alinéa : « La peine sera portée au double
si les personnes visées à l'article 82 (nouveau) ont
été contraintes à accomplir les actes
précités par voies de fait ou menaces exercées sur elles
personnellement ou sur l'un des membres de leur famille ».
On remarque que le premier alinéa est relatif à
la corruption active par persuasion, même si le texte n'utilise pas cette
expression mais il utilise les termes '' qui aura corrompu ou tenté de
corrompre''. La notion de persuasion a été mentionnée par
le gouvernement, lors des travaux préparatoires, à l'occasion
d'une question posée par la commission des lois relative à la
signification de l'expression « qui aura corrompu ».
Dans sa réponse, le gouvernement avait précisé que cette
expression désignait la situation d'une personne privée qui
essaye de persuader un fonctionnaire public d'agréer les offres
proposées106(*).
Signalons que cette notion de persuasion est très
proche de la notion de proposition, admise en France, et qu'elle peut
être considérée, à notre sens, comme une composante
de celle-ci. On ne peut pas parler, en effet, de persuasion si elle n'est pas
précéder de proposition.
Une autre remarque s'impose à ce niveau : aucune
mention du verbe « céder aux sollicitations »
n'existe dans le texte relatif à la corruption active dans le code
pénal tunisien, toutefois on peut se référer à
l'article 84 CPT, qui prévoit la sollicitation des offres par le
fonctionnaire public, pour dire que le législateur tunisien a
prévu l'acquiescement de la personne privée aux sollicitations
d'une manière implicite.
Le dernier alinéa de l'article 91 CPT prévoit la
contrainte comme verbe désignant l'activité par laquelle l'auteur
d'une corruption active intervient auprès d'une personne
exerçant une fonction publique. Le législateur précise que
la contrainte peut se réaliser « par voies de fait ou menaces
exercées sur elles (les personnes ayant la qualité de
fonctionnaire public ou assimilé) personnellement ou sur l'un des
membres de leur famille ».
La contrainte, comme moyen de corruption active prévue
par le législateur, est critiquée par une très grande
partie de la doctrine qui pense qu'il est insoutenable de considérer le
fonctionnaire public comme étant corrompu en cas de contrainte. Ce
courant fait valoir un autre argument ; les articles 125 à 130 CPT
relatifs aux outrages et violences à fonctionnaire public et
assimilé107(*).
D'un autre coté, l'admission de la contrainte comme
moyen de corruption active peut entraîner une difficulté quant
à la qualification des faits et quant au domaine d'application des
textes répressifs prévus par le Code pénal, à titre
d'exemple l'article 116 CPT dispose : « est puni de
l'emprisonnement pendant six mois et d'une amende de 200 francs, quiconque
exerce ou menace d'exercer des violences pour résister à un
fonctionnaire agissant dans l'exercice régulier de ses fonctions ou
à toute personne légalement requise d'assister ledit
fonctionnaire. Il est de même quiconque exerce ou menace d'exercer des
violences pour le contraindre à faire ou à ne pas faire un acte
de ses fonctions ».
Signalons enfin, que la contrainte par voies de fait ou de
menaces existait auparavant dans l'ancien Code pénal français
dans le cadre de la corruption de personne exerçant une fonction
publique et la corruption active de salariés mais le nouveau code
pénal a purgé la corruption de la violence en créant une
section intitulée « des menaces et actes d'intimidation
commis contre les personnes exerçant une fonction publique ».
D'un autre coté, l'article L. 152-6 du code de travail108(*), relatif désormais
à la corruption de salariés, a fait disparaître la mention
de ces moyens de violence, qui sont par nature étrangers au concept de
corruption109(*).
Toutefois, l'article 441-8 CPF concernant l'établissement d'attestations
de certificats faux mentionne encore les voies de fait et les menaces comme
moyen de corruption active.
A notre sens, il serait préférable que le
législateur tunisien s'inspire du droit français et abandonne la
contrainte comme moyen de corruption active. Nous pensons que ce moyen devrait
être remplacé par ''l'acquiescement aux sollicitations'' qui ne
figure pas d'une manière explicite dans l'article 91 CPT.
Para II : les moyens générateurs
de la corruption
Le nouveau code pénal français et le code
pénal tunisien déterminent les moyens générateurs
de la corruption qui constituent les manoeuvres imputées aux
délinquants. L'étude de ces moyens conduit à distinguer
deux problèmes relatifs, respectivement, à la nature de la chose
offerte ou agréée (A), et à l'antériorité de
ces moyens par rapport à l'acte, l'abstention ou l'intervention (B).
L'étude de ces deux problèmes nous permettra de déterminer
les points de convergences et de divergences entre les deux
législations.
A- La nature de la chose offerte ou
agréée
Les textes répressifs du code pénal, qui visent
la corruption active et passive, désignent les choses offertes,
proposées, sollicitées ou agréées par une
énumération très large. Il s'agit, en effet, de
solliciter, proposer ou agréer « des offres, des
promesses, des dons, des présents ou des avantages
quelconques ». Volontairement large, ces termes de la loi appellent
une interprétation extensive ainsi le législateur vise d'abord la
remise de choses matérielles : l'argent liquide110(*), les billets à ordre,
chèques ou versement dissimulés sous une opération
bancaire111(*), les
objets précieux112(*) etc. il vise ensuite les versements indirects qui
consistent en l'acquittement des dettes de la personne corrompue113(*), par exemple.
Le législateur vise enfin tout avantage quelconque.
S'agissant de l'assouvissement d'une haine, la cour de cassation décide
qu'il ne s'agit que d'un avantage purement subjectif114(*). l'avantage quelconque doit
être objectif. Une décision antérieure de la juridiction
pour mineurs de Sarreuguemines avait adopté la solution
opposée115(*).
L'article 432-11 CPF se prête à cette solution extensive.
Constituent des avantages quelconques une démarche que
le corrupteur s'engage à effectuer, les relations sexuelles que
proposent le corrupteur, par exemple, « lorsque une jeune fille,
surprise en flagrant délit à la pudeur offre au gendarme d'avoir
des relations sexuelles avec lui pour qu'il renonce à constater le
délit116(*) ».
A notre avis, aujourd'hui les relations sexuelles constituent
un moyen générateur de la corruption et ce malgré la
décision de la Cour de cassation du 14 novembre 1975
précitée, car l'article 432-11 CPF parle explicitement
d'avantages quelconques117(*).
On remarque que, la formule légale traduit la
volonté du législateur d'exclure le cas où le coupable a
agi sur simples prières ou sur des recommandations, des
prévisions qui entrent dans les incriminations. Il faut qu'il y ait pour
la corruption un enrichissement. Ce qui signifie que si le corrompu ne tire pas
d'argent ou un avantage quelconque de son intervention, l'infraction ne sera
pas consommée. Toutefois, peu importe qu'il n'y ait pas eu un
enrichissement personnel.
La spécificité de la corruption des
salariés par rapport à celle des fonctionnaires réside
dans la possibilité pour l'employeur d'autoriser la
rémunération. Pour la corruption de salariés le
caractère secret de la rémunération est une composante
indispensable.
Le caractère secret de la rémunération
met en péril les intérêts de l'employeur. La
rémunération secrète étant dangereuse, le
caractère suffit en lui même pour caractériser
l'activité délictueuse. Il n'est pas nécessaire que les
agissements du salariés causent un dommage à l'employeur. Ce
point de vue s'explique et semble devoir être celui que le
législateur a voulu faire prévaloir. En effet, les mots
« que cet acte lui causât un préjudice »
furent retirer lors des travaux parlementaires. L'employeur n'est pas donc tenu
d'apporter la preuve d'un préjudice qu'il aurait subi. Cependant,
lorsqu'il a eu connaissance de la remise de la rémunération et y
a consenti, l'employeur ne peut pas invoquer la violation de l'obligation de
fidélité que le salarié doit respecter.
La preuve de la connaissance et du consentement de l'employeur
est délicate en particulier quant il a eu connaissance de la remise par
voies détournées et n'a pas protesté118(*). Le consentement de
l'employeur est présumé dans les cas de
rémunération postérieure que sont les pourboires.
Cependant, lorsque les moyens générateurs de l'activité
délictueuse ont précédé l'acte, l'abstention ou
l'intervention du corrompu, il faut considérer qu'il y a eu
rémunération corruptrice.
En droit tunisien, le législateur utilise des termes
très proches de ceux employés par son homologue français.
Il s'agit en effet, "des dons ou promesse de dons, ou présents ou
avantages de quelque nature que ce soit" pour la corruption active et "des
dons, promesses, présents ou avantages de quelque nature que ce soit"
pour la corruption passive.
Il faut signaler que les termes "promesse de dons" et
"avantages de quelque nature que ce soit" ont été ajoutées
par la réforme du 23 mai 1998. L'expression "promesses de dons" a
nécessité une clarification de la part du gouvernement suite
à la demande de la commission des lois, d'après le gouvernement
cette expression a été ajoutée pour incriminer la
réception des dons promis après l'accomplissement de l'acte. A
notre sens, il n'a y a pas une différence entre les promesses
prévues pour la corruption passive et les promesses de dons
prévues pour la corruption active. Le législateur aurait dû
utiliser l'expression de "promesse" pour les deux formes de corruption.
Quant aux mots "avantages de quelque nature que ce soit" ont
été ajoutés pour élargir le champ d'application des
textes. Ainsi la chose offerte peut consister, non seulement en de l'argent ou
en des objets matériels mais aussi, plus généralement, en
tout avantage quelconque, matériel, intellectuel ou social, pour le
coupable ou pour toute autre personne.
Enfin, la réforme du 23 mai 1998 a abandonné le
terme" offres", qui existait dans les textes anciens. Nous pensons que cet
abandon n'entraînerait pas un vide législatif puisque cette notion
peut être englobée par celle "avantages de quelque nature que ce
soit".
En conclusion, les deux législations
énumèrent les mêmes moyens générateurs de
corruption ainsi les juridictions tunisiennes peuvent s'inspirer de la
jurisprudence des tribunaux français puisque les décisions
judiciaires publiées sont, sur ce point, peu nombreuses voire
inexistantes.
B- l'antériorité du comportement
délictueux par rapport à l'acte de la fonction
Suite à la réforme du 30 juin 2000 en France,
l'exigence de l'antériorité de la sollicitation ou de
l'agrément par rapport à l'acte de la fonction, qui n'a jamais
été prévue par le droit pénal tunisien (2), a
été abandonnée par la législateur français
(1).
1- L'abandon d'une règle classique du droit
pénal français de la corruption
D'après une règle classique du « droit
pénal de la corruption119(*) », il faut que la sollicitation ou
l'agrément soit antérieur par rapport à l'acte ou
l'abstention. Ainsi, la seule existence d'offres qui précédent
l'acte de la fonction ou l'abstention suffit pour caractériser
l'infraction.
La condition de l'antériorité est imposée
par les libellés même des articles 432-11, 434-9 et 433-1 CPF et
L. 152-6 Code du travail, etc. Ces textes établissent l'ordre de
succession des différentes étapes de la corruption. Et ainsi
puni tout d'abord le fait de solliciter ou d'agréer des offres...pour,
seulement après, faire ou s'abstenir de faire l'acte de sa fonction.
La Cour de cassation exige la preuve de
l'antériorité de la convention entre le corrupteur et le corrompu
à l'acte qu'elle rémunère. L'acceptation d'un cadeau, par
un fonctionnaire est peut être moralement ou disciplinairement
condamnable ; mais ce n'est pas la corruption en l'absence de convention
antérieure. Ce problème ne se pose pas lorsque les sommes
demandées ou agrées sont versées effectivement avant la
réalisation du but recherché120(*).
Ce point de vue est différent de celui adopté
par certaines législations étrangères tels que le droit
italien et allemand qui ne connaissent pas la règle de
l'antériorité. Ie droit allemand procède à une
répression unique. Les dons rémunérations de l `acte
accompli et ceux de paiement d'acte à venir sont réprimés
par une infraction unique121(*). En Italie le droit distingue entre deux cas. La
rémunération a posteriori est moins sévèrement
punie122(*). Cette
distinction est fondée sur l'idée que la gravité des faits
est moindre que dans la corruption antérieure à l'acte123(*).
La solution adoptée par le législateur
français a été critiquée par le professeur
DELMAS-SAINT-HILAIRE124(*). Il trouve que ce principe
d'antériorité comporte des conséquences paradoxales
puisqu'il permet de punir le fonctionnaire qui a sollicité ou
agrée une rémunération mais qui s'est abstenu de
réaliser l'acte proposé ou retardé, alors qu'il permet
l'impunité du fonctionnaire qui commence par accomplir l'acte
délictueux et à réclamer ou accepter la
rémunération par la suite.
Le professeur Vitu, quant à lui remarque que cette
critique est juste et trouve les remarques du professeur DELMAS-SAINT-HILAIRE
pertinentes. Mais elles ne seraient pas conformes au libellé de
l'article 432-11 CPF : « Est puni...le fait...de solliciter
ou d'agréer...des offres, des promesses...pour accomplir ou s'abstenir
d'accomplir...125(*) ».
La jurisprudence a entrepris de corriger l'impunité
que pouvait entraîner l'ingéniosité des délinquants
qui procéderaient à des rémunérations successives
postérieures au pacte du corrupteur. Elle a retenu un critère
fondé sur le nombre des rémunérations. Elle distingue deux
situations.
D'un coté, il y a un acte unique ; elle
décide qu'il s'agit d'un cadeau et non d'une rémunération
corruptrice. D'un autre coté, il y a une succession de cadeaux. Dans ce
cas elle décide que le caractère d'antériorité de
la rémunération reçue résulte suffisamment du fait
qu'elle a été consentie de façon régulière
et en quelque sorte permanente, de telle manière qu'elle a
nécessairement déterminé le corrompu à accomplir un
acte de son emploi126(*). Le concert frauduleux peut intervenir
ultérieurement à l'occasion d'affaires nouvelles.
La jurisprudence n'a pas choisi la solution d'isoler chaque
acte. Elle décide qu'il y a corruption, car les relations se sont
nouées entre le fonctionnaire et le particulier. Les dons,
rémunérations d'actes passés, peuvent avoir pour but de
faciliter les services futurs ainsi, le contexte douteux des cadeaux
reçus leur imprime aisément un caractère délictueux
et le délit de corruption est alors constitué127(*).
Conscients, de la difficulté pour les magistrats de
rapporter la preuve du pacte préalable, quelques députés
se sont mobilisés, au printemps 2000, pour faire adopter par le
Parlement un amendement qui devrait faciliter les poursuites des faits de
corruption. Cette initiative a été adopté par la loi du 30
juin 2000 qui a précisé dans les articles 432-11, 433-1 et 434-9
CPF que la sollicitation ou l'agrément peut
intervenir « à tout moment128(*) ».
Désormais, les infractions de corruption active ou passive sont
constituées quel que soit le moment où le corrupteur a
proposé son offre ou son don et quel que soit le moment où le
corrompu l'accepté ou sollicité.
Malheureusement, le législateur n'a pas cru
nécessaire ou plutôt il n'a pas réalisé qu'il
était nécessaire de modifier en conséquence la
rédaction de la suite des textes129(*). Ceux-ci disent désormais
ceci : « la sollicitation ou l'agrément des
avantages se fait à tout moment pour accomplir ou s'abstenir d'accomplir
un acte de la fonction ». On remarque ainsi, que la lettre de la loi
continue de maintenir l'exigence de l'antériorité du pacte de
corruption.
Certains auteurs ont proposé de libeller les articles
en question d'une autre manière et
écrire : « le fait par un fonctionnaire
communautaire... de solliciter ou d'agréer, sans droit... des offres...
pour accomplir ou s'abstenir d'accomplir ou pour avoir accompli ou s'être
abstenu d'accomplir un acte de sa fonction... 130(*)».
Certains commentateurs, en se fiant, au ratio legis, ont
écrit que la réforme entraîne la disparition de l'exigence
de l'antériorité du pacte de corruption et que l'intention du
législateur ressort clairement des travaux parlementaires131(*).
A notre sens, il ne faut pas interpréter les articles
relatifs à la corruption suite à la réforme du 30 juin
2000 d'une manière littérale mais il faut procéder
à une interprétation téléologique, donnant la
primauté à l'intention du législateur et non à la
lettre de la loi. Une telle interprétation permettrait de dire que
l'exigence de l'antériorité du pacte de corruption a
été abandonnée.
2- L'absence de l'exigence de
l'antériorité en droit tunisien
L'article 83 nouveau CPT
prévoit : « Toute personne...... qui aura
agréé,....Pour accomplir un acte lié à sa
fonction,... ou pour faciliter l'accomplissement d'un acte.... ou pour
s'abstenir d'accomplir un acte de sa fonction,...est puni de dix ans
d'emprisonnement et d'une amende double de la valeur des présents
reçus ou des promesses agréées, sans qu'elle puisse
être inférieure à dix mille dinars ».
L'article 91 nouveau CPT dispose, quant à lui ;
« Est punie de cinq ans d'emprisonnement.... toute personne qui aura
corrompu ou tenté de corrompre... en vue d'accomplir un acte lié
à sa l'onction,...ou de faciliter l'accomplissement d'un acte lié
a sa fonction, ou de s'abstenir d'accomplir un acte qu'il est de son devoir de
faire ».
Ces deux articles indiquent bien que doivent se
succéder, dans cet ordre, la sollicitation ou l'agrément et
l'acte à accomplir et non l'inverse.
Ces deux textes, s'ils sont lus d'une manière
isolée des autres textes relatifs à la corruption, mènent
à penser que seules les manoeuvres qui ont pour but le marché de
la fonction sont réprimées tandis qu'ils laissent impunies les
rémunérations données a posteriori tel qu'il a
été le cas en France avant la réforme du 30 juin 2000.
Désireux d'éviter une telle lacune, le
législateur tunisien a prévu une incrimination spéciale
relative à la rémunération a posteriori dans l'article 85
nouveau CPT qui dispose : « Si le fonctionnaire public ou
assimilé a accepté des dons,.... en récompense d'actes
qu'il a accomplis... ou d'un acte qu'il s'est abstenu de
faire... ».
Signalons que cette incrimination existait depuis la
promulgation du Code pénal tunisien en 1913 et que seule la peine,
prévue dans cet article, a été modifiée par la
réforme du 23 mai 1998. Elle est portée, en effet, d'une
année d'emprisonnement à cinq ans.
Une autre remarque doit être faite à ce niveau.
La solution prévue par le législateur tunisien est identique
à celle prévue par le législateur italien puisqu'il fait
la distinction entre la rémunération postérieure à
l'acte de la fonction et la rémunération antérieure
à cet acte. Les deux moments de rémunération font l'objet
d'articles distincts.
D'un autre coté, le législateur tunisien puni
moins sévèrement la rémunération a posteriori que
la rémunération antérieure. La première est punie
de cinq ans d'emprisonnement alors que la deuxième est punie de dix ans
d'emprisonnement.
La distinction relative aux peines applicables est
fondée sur l'idée que la gravité des faits est moindre que
dans la corruption antérieure à l'acte132(*).
A notre sens, il serait préférable que le
législateur tunisien réprime par une infraction unique les dons
rémunérateurs de l'acte accompli et ceux de l'acte à
venir, tel qu'il est le cas en droit allemand et en droit français
suite à la réforme du 30 juin 2000133(*), puisque la gravité
des faits est identique quel que soit le moment, postérieure ou
antérieure, de la rémunération par rapport à
l'acte.
Para III : problèmes relatifs à
l'activité délictueuse
Deux problèmes peuvent être soulevés
à ce niveau ; la tentative de corruption (A), l'interposition d'une
tierce personne (B).
A - la tentative
L'étude des deux législations démontre
l'inutilité de la notion de tentative en droit français (1) et
l'existence d'une tentative de corruption active en droit tunisien (2).
1- l'inutilité de la notion de tentative en
droit français
Avant la loi de 1943, il y avait des difficultés pour
la répression de la tentative de corruption. La cause en était
l'incapacité de la doctrine à préciser exactement le
moment de consommation de l'infraction. La doctrine était
divisée.
Selon un premier courant, on plaçait la consommation de
l'infraction dans la conclusion du marché illicite, la tentative de
corruption passive n'avait qu'un domaine fort restreint et ne se concevait
guère que dans le cas où le fonctionnaire avait sollicité
des offres ou des présents. Un désistement volontaire du coupable
ne pouvait donc intervenir efficacement qu'à ce stade du trafic de la
fonction ; se produisant après l'accord illicite entre corrupteur et
corrompu, il était tardif et donc inopérant134(*).
Selon un deuxième courant, la consommation de
l'infraction était rattachée à l'exécution du
marché illicite. Le fonctionnaire corrompu pouvait encore se
désister et s'abstenir de l'acte pour l'accomplissement duquel il avait
été payé, échappant ainsi à toute
répression135(*).
Ces difficultés ont disparu en deux temps. D'abord,
avec la loi du 16 mars 1943 qui a décidé qu'en matière de
corruption passive le délit est considéré consommé
non seulement par la conclusion du marché illicite, mais même par
la simple sollicitation des dons ou promesses. Par conséquent, Il n'y
avait donc plus place pour la tentative punissable ni pour le
désistement volontaire.
Ensuite, l'ordonnance du 8 février 1945 a fait
disparaître, à son tour, la notion de tentative en matière
de corruption active en englobant dans le délit consommé, non
seulement les propositions ou promesses faites au fonctionnaire et
acceptées par lui, ou l'accord sur les sollicitations
émanées de ce fonctionnaire, mais aussi la simple offre de dons
ou présents. Il n'y avait donc plus place, à ce niveau aussi,
pour la tentative punissable ni pour un désistement volontaire.
Les nouveaux textes ont conservé la solution de
1943-1945. En effet, ils décident que le délit est
immédiatement et pleinement consommé dés que la personne
titulaire d'une fonction à solliciter, directement ou indirectement la
remise d'une rémunération ou d'un avantage quelconque et
décident pour la corruption active que le délit est
également pleinement consommé dés que un particulier
propose des offres à la personne titulaire de la fonction.
Il ne faut donc pas s'étonner du mutisme de l'article
432-11 et l'article 433-1 CPF au sujet de la tentative : une allusion
faite à cette notion serait « inutile, et même
erronée136(*) ».
2- l'existence d'une tentative de corruption active en
droit tunisien
Le législateur tunisien prévoit la tentative
dans les articles relatifs à la corruption active. Ainsi, l'article 91
CPT dispose : « Est punie de cinq ans d'emprisonnement et
de cinq mille dinars d'amende, toute personne qui aura corrompu ou
tenté de corrompre... ».
D'un autre coté, l'article 92 CPT, relatif d'une
manière exclusive à la tentative, dispose : « Si
la tentative de corruption n'a eu aucun effet, les autres
seront punis d'un an d'emprisonnement et de mille dinars d'amende.
Si la tentative de voies de fait ou menaces
n'a eu aucun effet, les auteurs seront punis de deux ans d'emprisonnement et de
deux mille dinars d'amende ».
L'étude de ces deux articles peut laisser comprendre,
à prime abord, qu'il existe une contradiction entre ces deux textes.
D'un coté, l'article 91 CPT réprime la personne qui tente de
corrompre par la persuasion un fonctionnaire public et le puni de cinq ans
d'emprisonnement. D'un autre coté l'article 92 CPT incrimine, à
son tour, la corruption active qui n'a eu aucun effet et puni d'un an
d'emprisonnement seulement. Comment peut-on expliquer cette contradiction
apparente ? Et quels sont les critères de distinction entre les
deux textes ?
L'article 91 CPT incrimine la tentative de corruption active
d'un fonctionnaire public dans laquelle un marché illicite a
été conclu entre le corrupteur et corrompu en vue d'accomplir un
acte de la fonction, toutefois l'exécution de ce pacte n'a pas abouti
pour des raisons indépendantes de la volonté des auteurs. Cet
article englobe aussi le cas du fonctionnaire qui accepte les dons
proposés mais se désiste à accomplir l'accord.
Dans ces deux cas il y a eu atteinte à la fonction
publique puisque les offres ont été acceptées par le
fonctionnaire public. Cet article laisse penser que la consommation de
l'infraction est conditionnée par l'exécution du marché
illicite.
L'article 92 CPT alinéa premier prévoit, quant
à lui, la tentative qui n'a eu aucun effet ou en d'autres termes ;
la tentative manquée parce que les propositions faites au fonctionnaire
public n'ont pas été acceptées par ce dernier. On remarque
dans ce cas que l'atteinte à la fonction publique est unilatérale
puisqu'elle émane seulement du corrupteur. C'est pour cette raison que
la peine prévue est moins sévère que celle prévue
dans l'article 91 CPT.
Ainsi, le critère de distinction entre les deux textes
est l'acceptation ou non du fonctionnaire des dons proposés. En cas
où il y a eu agrément les peines applicables sont plus lourdes
puisqu'il y a eu atteinte effective à la fonction publique.
Reste enfin l'alinéa deux de l'article 92 CPT qui
dispose : « Si la tentative de voies de fait ou menaces n'a eu
aucun effet, les auteurs seront punis de deux ans d'emprisonnement et de deux
milles dinars d'amende ». Dans ce cas il ne s'agit pas de tentative
de corruption active qui n'a pas eu effets mais d'une tentative de voies de
fait ou de menaces dépourvue d'effets en d'autres termes ; Une
tentative de porter atteinte à l'intégrité physique ou
morale du fonctionnaire public.
En résumé, on peut constater qu'en droit
tunisien, la tentative n'existe pas en matière de corruption passive
puisque l'infraction est réputée consommée par la simple
sollicitation ou l'agrément des offres par le fonctionnaire public ou
assimilé. Cette solution existe depuis la promulgation du Code
pénal tunisien en 1913 alors qu'elle n'est apparue en France
qu'après la loi de 1943. Toutefois, la tentative existe en
matière de corruption active puisque la consommation de l'infraction est
placée dans l'exécution du pacte de corruption. D'où un
désistement volontaire du corrupteur ne peut intervenir efficacement
qu'avant ce stade de l'infraction et s'il se produit après
l'exécution du marché illicite il serait dépourvu
d'effets137(*). On peut
dire que le législateur tunisien consacre l'idée retenue par une
partie de la doctrine en France138(*) et selon laquelle l'infraction est consommée
au moment de l'exécution du marché illicite.
A notre sens, il serait préférable que le
législateur tunisien abandonne l'utilisation de la notion de tentative
en matière de corruption active, tel qu'il est le cas en France
depuis l'ordonnance du 8 février 1945. Il suffit qu'il considère
l'infraction consommée au moment de la proposition des offres et non
lors de la conclusion du marché illicite ou son exécution.
B- L'interposition d'une tierce
personne
Malgré la distinction des deux législations
entre la corruption active et la corruption passive, la solution prévue
pour l'interposition d'une tierce personne n'est pas identique. En effet, si
elle est considérée comme étant une complicité en
droit français (1) elle fait l'objet d'une infraction autonome en droit
tunisien (2).
1- Une complicité en droit pénal
français
Le droit pénal français a choisi la solution qui
fait du corrupteur l'auteur d'un délit distinct. Il établit deux
chefs principaux, constitutifs de délits distincts, l'un pour le
corrompu, l'autre pour le corrupteur. Ce système a pour
conséquences, entre autres, que l'acte corrupteur n'est pas un acte de
complicité. Le corrupteur est puni non comme le complice de la
corruption passive mais comme l'auteur principal de la corruption active.
Il en résulte l'indépendance des traitements
juridiques de chaque agent du délit. Chaque activité a pour
auteur principal un agent indépendant ; le corrompu dans la
corruption passive et le corrupteur dans la corruption active. Ces deux
délits sont parfaitement autonomes et il faut exclure toute idée
de complicité entre l'agent actif et l'agent passif139(*).
En réalité, l'exclusion de la notion de
complicité n'est pas absolue puisqu'elle peut être applicable aux
tiers, mêlés aux manoeuvres corruptrices, et dont l'intervention a
préparé ou facilité le trafic de la fonction ou de
l'emploi140(*).
Ainsi, un tiers peut être poursuivi comme complice selon
le droit commun des articles 121-6 et 121-7 CPF. La participation du complice
peut prendre plusieurs formes : intervenir pour mettre en rapport deux
partenaires ou servir de d'intermédiaire dans les transactions entre le
corrupteur et le corrompu. Il peut s'agir de celui qui fournit au corrupteur
les moyens de la corruption, par exemple la remise de l'argent liquide
destiné à corrompre.
Les cas de complicité sont loin d'être rares.
Mais il y a très peu de décisions judiciaires141(*). En 1882 la Chambre
criminelle de la Cour de cassation a eu à se prononcer pour la femme
d'un gardien de prison, qui recevait des lettres et de l'argent destiné
aux détenus et les remettait à son mari, qui s'était
laissé corrompre par ces détenus142(*).
Dans l'affaire du scandale du panama un certain BLONDIN avait
été convaincu de la complicité pour avoir aidé ou
assisté le Ministre BAIHAUT dans les actes ayant préparés
ou facilités sa corruption143(*). Ou encore le cas de l'avocat condamné le 9
novembre 1995 par la Chambre criminelle de la cour de cassation. Il avait
élaboré, pour le compte du corrupteur, le montage financier qui
devait masquer le versement des commissions occultes prévues par le
pacte corrupteur. C'est une complicité par instructions d'après
la décision de la Cour de cassation qui relève par ailleurs
que : « si le délit de corruption est consommé
dés la conclusion du pacte entre le corrupteur et le corrompu, il se
renouvelle à chaque acte d'exécution du pacte. Il s'ensuit que
l'aide ou l'assistance en connaissance de cause de ces actes d'exécution
constitue la complicité du délit144(*) ».
2- Une infraction autonome en droit pénal
tunisien
L'article 91 alinéa 2 CPT dispose :
«. Cette peine est applicable à toute personne ayant servi
d'intermédiaire entre le corrupteur et le
corrompu ». L'article 93 CPT prévoit, de son coté,
« Est absous le corrupteur ou l'intermédiaire
qui, avant toute poursuite, révèle volontairement le fait de
corruption et, en même temps, en rapporte la
preuve ». Ainsi, l'interposition d'une personne entre l'agent
actif et passif constitue une infraction autonome punie de la même peine
prévue pour la corruption active par persuasion à savoir ;
cinq ans d'emprisonnement et cinq mille dinars d'amende.
Le code pénal ne précise pas les
éléments constitutifs de l'interposition mais il prévoit
seulement la peine applicable. En l'absence d'une telle précision, la
Cour de cassation tunisienne 145(*) a déterminé en 1982 les
éléments constitutifs de l'interposition en matière de
corruption, elle relève par ailleurs que :
«... l'intermédiaire est une troisième personne dont le
rôle se limite dans la mise en relation du corrupteur et corrompu
d'où il est nécessaire, pour qu'il y ait une interposition, la
présence de trois parties ; corrupteur, corrompu et
intermédiaire... ».
Ainsi, l'intermédiaire est la personne qui porte de
l'aide ou de l'assistance au corrupteur ou au corrompu afin de faciliter la
réalisation de la corruption active ou passive.
D'un autre coté, l'intermédiaire doit porter son
concours en connaissance de cause, c'est à dire, d'une manière
intentionnelle tout en sachant les conséquences de son acte, à
défaut il ne peut pas voir sa responsabilité pénale
engagée146(*).
On remarque que les exigences de la jurisprudence et de la
doctrine sont très proche de celles prévues pour la
complicité à savoir ; la nécessité de l'aide
ou l'assistance aux auteurs avant la consommation de l'infraction ainsi que
l'intention coupable. Toutefois l'intermédiaire n'est pas puni en tant
que complice puisque il est l'auteur d'une infraction autonome et il est puni
de cinq ans d'emprisonnement quelle que soit la forme de la corruption (passive
ou active).
Signalons que, si la personne qui a servi
d'intermédiaire entre le corrupteur et le corrompu était
considéré en droit tunisien comme complice, elle serait punie de
dix ans voire vingt ans d'emprisonnement si elle est complice de l'auteur de la
corruption passive147(*)
et de cinq ans d'emprisonnement si elle est complice de l'auteur de la
corruption active puisque c'est le système d'emprunt de
pénalité qui est consacré par le législateur
tunisien.
En conclusion, contrairement à son homologue
français, le législateur tunisien ne considère pas la
personne qui a servi d'intermédiaire comme complice malgré la
distinction des deux législations entre la corruption active et la
corruption passive. La solution retenue en droit tunisien est identique
à celle consacré en droit égyptien qui ne prévoit
pas les deux formes de corruption et considère cette dernière
comme étant une infraction unique.
Cette différence du droit tunisien et égyptien,
par rapport au droit français, semble s'expliquer par le droit musulman.
En effet, ce droit, en se fondant sur un Hadith du prophète148(*), établi une
distinction entre le corrupteur, corrompu et l'intermédiaire. D'ailleurs
les rédacteurs des Codes tunisiens, au début du vingtième
siècle sous le protectorat, ont tenu compte de certains principes
juridiques du droit musulman.
SECTION II : LE BUT DES MANOEUVRES CORRUPTRICES
La corruption a pour but l'obtention de l'accomplissement ou
de l'abstention d'un acte de la fonction ou d'un acte facilité par la
fonction. La comparaison portera sur le but des manoeuvres corruptrices en
droit français (para 1) et en droit tunisien (para 2).
PARA I : Le but des manoeuvres corruptrices en
droit français
Le but de la corruption est l'obtention de l'accomplissement
ou de l'abstention d'un acte de la fonction. Il faut qu'il y ait entre le don
ou la promesse et l'acte ou l'abstention qu'il rémunère un lien
de causalité direct et certain. La cour de cassation décide que
la preuve ou le constat que l'abstention est le résultat d'une promesse
ne suffit pas. Il faut constater que ce résultat était le but
recherché149(*).
Les textes de répression de la corruption distinguent deux sortes
d'actes : les actes propres à la fonction (A) et les actes
facilités par la fonction (B).
A- Accomplissement ou abstention d'actes de la
fonction
Le but recherché par les délinquants peut
être l'accomplissement d'un acte de la fonction ou l'abstention d'un tel
acte. Cet acte peut se traduire par l'accomplissement d'un acte positif, tel
l'abattement sur les revenus imposables consenti par un inspecteur des
impôts150(*), mais
aussi par une simple abstention ; ce sera le cas, pour la personne
habilitée, de ne pas dresser le procès-verbal de l'infraction
constatée151(*).
C'est une condition qui doit être remplie pour qu'il y ait corruption. La
sollicitation et l'agrément ne sont punissables que si le but est
l'accomplissement ou l'abstention d'actes de la fonction.
Peu importe que l'acte accompli ou non accompli soit juste
ou injuste. L'article 432-11 du Code pénal est muet sur ce point. Mais
la solution de l'article 177 ancien, qui incriminait indifféremment
l'acte juste et l'acte injuste, reste valable. L'acte juste est celui que la
fonction impose au corrompu. L'acte injuste est l'acte interdit par la
fonction152(*).
Le code pénal conçoit largement la notion de
l'acte de la fonction. L'article 432-11 contient, comme l'a déjà
écrit le professeur VITU, une « disposition
générale, sanctionnant pénalement toute violation
rémunérée des devoirs d'obéissance, de
probité, de discrétion et de
fidélité... »153(*) de la fonction.
La jurisprudence interprète largement cette notion.
Elle comprend les actes résultant des dispositions légales et
réglementaires qui organisent l'emploi, mais aussi, plus largement, tous
les actes imposés par la discipline de la fonction ;
même s'ils résultent seulement de la
« déontologie informulée » mais
« certaine » et non de textes154(*). Les actes ou abstentions de
la fonction sont donc ceux qui figurent dans les attributions expresses du
titulaire de la charge, mais aussi ceux dont les devoirs de sa charge lui font
l'obligation de s'abstenir.
Cette définition englobe, d'une part, les actes de la
compétence personnelle du corrompu et les actes de compétence
concurrente qu'il accomplis en concours avec d'autres, mais encore les actes
à la préparation desquels il participe, sans pouvoir les
accomplir lui-même. Elle englobe aussi les abstentions aux devoirs de sa
charge. Il n'est pas nécessaire que l'acte accompli soit de sa
compétence exclusive. S'il a accepté de trafiquer de la
compétence qu'il ne détient pas seul, il y a corruption. Car il
trafique de sa part dans le pouvoir collectif. C'est déjà le cas
pour les élus.
Peu importe la part active ou négative que le corrompu
pouvait prendre dans la décision finale. En effet, la loi punit le
marché du service sans tenir aucun compte de son exécution.
Il n'est pas, non plus, nécessaire que le corrompu
accomplisse lui-même l'acte dont il trafique. Il suffit qu'il entre dans
ses attributions. Ainsi, lorsque le fonctionnaire est compétent pour
préparer l'accomplissement de l'acte trafiqué par des actes
préalables, des rapports ou mise au point de dossiers etc., il pourra
être justiciable de l'infraction de corruption. C'est le cas d'un chef de
service au ravitaillement général qui, pour recevoir une
ristourne sur les bénéfices, avait menacé le gérant
d'une centrale laitière de lui faire retirer sa gérance s'il
n'avait pas sa ristourne. Il alléguait son pouvoir de prendre des avis
administratifs et prétendait que ses avis pouvaient avoir une influence
décisive sur la situation du gérant155(*).
Dans la pratique les cas d'abstention de l'acte de la fonction
sont plus faciles à prouver156(*). L'abstention du titulaire de la fonction constitue
une présomption de corruption. Si l'enquête révèle
l'existence de la remise des dons ou « cadeaux » il y
aurait certainement délit. Les exemples jurisprudentiels ne manquent
pas. Ils sont très nombreux157(*).
La définition des attributions du corrompu telle que
conçue par le droit français exclut néanmoins les actes
totalement étrangers aux attributions du titulaire de la fonction ou
concernant des faits imaginaires. Dans ce cas il n'y a pas corruption. Cette
solution est imposée par le Code pénal (articles 432-11) et
l'article L. 152-6 du Code du travail qui parlent d'« acte de sa
fonction, de sa mission ». La doctrine élaborée sous
l'empire de l'ancien article 177 du Code pénal admettait cette solution.
Mais au début du XIXe siècle, il y avait de graves
difficultés en jurisprudence. La solution de l'article 177 sur la
définition de l'acte de la fonction était discutée en
jurisprudence158(*).
Constitue également le délit le fait de
rechercher l'accomplissement ou l'abstention d'actes facilités par la
fonction.
B- Accomplissement ou abstention d'actes
facilités par la fonction
Jusqu'en 1943, le trafic des actes facilités par la
fonction était impuni. Pour y remédier, la jurisprudence avait
élargi la notion d'acte de la fonction qu'elle étendait aux actes
ne figurant pas dans les attributions propres du corrompu. Dans l'affaire
« Bonny », elle confondait le trafic d'influence à
la corruption portant sur un acte facilité par la fonction et
décidait qu'il y avait trafic d'influence159(*).
Cette confusion a disparu avec la loi du 16 mars 1943 qui,
modifiant l'article 177 al. 3 de l'ancien Code pénal, incriminait
spécialement le trafic des actes facilités par la fonction.
En outre, il convient de distinguer ces actes des actes
interdits par la fonction. L'acte interdit est possible du fait de la fonction
même alors que l'acte facilité par la fonction est
aléatoire.
Le corrompu qui fournit des renseignements, dont
l'accès lui est autorisé, accomplit un acte de son emploi (acte
interdit par la fonction). Celui qui donne des renseignements auxquels il n'a
point normalement accès, mais profite de sa situation pour consulter les
dossiers accomplit un acte facilité par sa fonction. Il est difficile
d'imaginer l'abstention acte facilité par la fonction dans la
pratique. Les exemples concrets de la jurisprudence concernent exclusivement
les actes positifs, dont l'accomplissement est rendu facile par l'emploi
exercé.
C'est le cas de l'espionnage industriel qui peut être
réalisé par l'intermédiaire d'un employé
« inférieur », par exemple un concierge ou un
employé de ménage, « à qui l'on demande des
renseignements commerciaux qu'il n'est pas dans leurs fonctions de
détenir ou d'utiliser, mais qu'ils ont pu être amenés
à connaître fortuitement »160(*).
La jurisprudence antérieure à l'ordonnance de
1945 étendait les pénalités de la corruption à ces
agissements en les qualifiants d'actes de la fonction.
Cette distinction importante sous l'ancien Code pénal
devait être faite de façon précise ; les
pénalités étaient plus sévères pour les
actes de la fonction. Le nouveau Code pénal l'a abandonnée. Il
énonce des peines identiques pour les deux catégories
d'actes161(*) .
Toutefois, il demeure un intérêt juridique
à continuer de définir ce qu'est un acte facilité par la
fonction. Cet intérêt réside dans la
nécessité de savoir, le principe de la légalité des
délits et des peines l'exigeant, jusqu'où peut s'étendre
l'incrimination de corruption passive, et où commence la zone
d'impunité.
Para 2 : Le but des manoeuvres corruptrices en
droit tunisien
Le législateur tunisien a élargi le but des
manoeuvres corruptrices avec la loi du 23 mai 1998. En effet, l'ancien article
83 CPT prévoyait ce but en disposant : «... pour faire un
acte de sa fonction, même juste, mais non sujet à
salaire... », alors que le nouvel article
dispose : « ... soit pour accomplir un acte lié
à sa fonction, même juste, mais non sujet à contrepartie ou
pour faciliter l'accomplissement d'un acte en rapport avec les attributions de
sa fonction, ou pour s'abstenir d'accomplir un acte de sa fonction, auquel il
est tenu...».
On remarque que le but des manoeuvres corruptrices se limitait
auparavant à l'accomplissement d'un acte de la fonction (A) alors que,
suite à cette réforme, il a été élargi pour
comprendre, l'accomplissement des actes facilités par la fonction et
l'abstention d'accomplir un acte de la fonction (B).
A- l'accomplissement d'un acte de la
fonction
L'article 83 CPT( nouveau) prévoit que les dons ou les
promesses étaient agrées, ou sollicités en vue d'
« accomplir un acte lié à sa fonction, même
juste, mais non sujet à contrepartie ».
Ainsi, ce sont les actes positifs accomplis par le
fonctionnaire public ou assimilé dans l'exercice de la fonction qui sont
prévus par cet article.
Les actes de la fonction sont les actes de la
compétence personnelle du corrompu. Toutefois, il n'est pas
nécessaire que l'acte accompli soit de sa compétence exclusive
puisque les actes de compétence concurrente qu'il a accomplis en
concours avec d'autres, ainsi que les actes à la préparation
desquels il participe, sans pouvoir les accomplir lui-même font partie
des actes de la fonction.
Peu importe que l'acte accompli soit juste ou injuste.
L'article 83 CPT prévoit expressément ce point par l'emploi des
termes « même juste, mais non sujet à contre
partie ». Il y a, cependant, une exception puisque l'accomplissement
d'un acte juste lié à la fonction nécessitant une
contrepartie, imposée par les lois ou les règlements, ne
constitue pas une infraction de corruption. A titre d'exemple, certains
fonctionnaires publics ne peuvent accomplir les actes liés à la
fonction qu'à la condition qu'une contrepartie soit versée au
trésor public162(*), dans ce cas il s'agit pas de corruption.
On remarque que l'article 432-11 CPF est muet sur ce point,
contrairement à la solution de l'article 177 ancien qui incriminait
indifféremment l'acte juste et l'acte injuste.
Il n'est pas, non plus, nécessaire que le corrompu
accomplisse lui-même l'acte dont il trafique. Il suffit qu'il entre dans
ses attributions. Ainsi, lorsque le fonctionnaire est compétent pour
préparer l'accomplissement de l'acte trafiqué par des actes
préalables, des rapports ou mise au point de dossiers etc., il pourra
être justiciable de l'infraction de corruption163(*).
Signalons enfin que le fonctionnaire public peut se voir
poursuivi pour l'accomplissement d'un acte qui est étranger à sa
compétence du moment qu'il a fait croire au corrupteur qu'il est
compétent164(*).
Cette solution admise par la jurisprudence tunisienne est différente de
celle consacrée par les tribunaux français165(*). A notre sens, la position
de la jurisprudence tunisienne, sur ce point, est critiquable puisque la
qualification exacte est celle de l'escroquerie.
En conclusion, il n'y a pas de grandes divergences entre les
deux législations quant à l'accomplissement de la fonction.
Cependant, si l'abstention d'accomplir un acte de la fonction et les actes
facilités par la fonction figurent dans la législation
française, avant la promulgation du nouveau Code pénal, ils ne
figurent en droit pénal tunisien que depuis la réforme du 23 mai
1998.
B- Les nouveaux buts prévus par la
réforme de 1998
La loi du 23 mai 1998 a modifié l'article 83 CPT qui
prévoit deux nouveaux buts des manoeuvres corruptrices. Cet article
prévoit d'abord l'agrément du corrompu des dons afin de
« faciliter l'accomplissement d'un acte en rapport avec les
attributions de sa fonction ». D'après certains
auteurs166(*), ce but a
été ajouté afin de combler le vide législatif qui
existait auparavant. Deus remarques doivent être faite à ce
niveau :
D'un coté, seul l'accomplissement d'un acte
facilité par la fonction est réprimé par cet article, par
contre l'abstention d'accomplir un acte facilité par la fonction n'est
pas répréhensible. Nous pensons qu'il serait
préférable que le législateur tunisien la rajoute à
l'article 83 CPT tel qu'il est le cas dans l'article 432-11 CPF.
D'un autre coté, la jurisprudence tunisienne n'a pas
encore eu l'occasion d'appliquer le texte nouveau sur ce point, mais nous
pensons qu'elle peut s'inspirer des solutions élaborées par la
jurisprudence française.
L'article 83 CPT prévoit aussi le cas du fonctionnaire
public qui agrée des dons pour « s'abstenir d'accomplir un
acte de sa fonction, auquel il est tenu.. ». Cette phrase a
été introduite dans cet article, par la réforme de 1998,
pour les mêmes raisons citées auparavant, à savoir ;
le comblement du vide législatif existant.
Toutefois, le législateur a prévu une limite, en
effet, l'abstention doit concerner l'accomplissement d'un acte de la fonction
auquel il est tenu. Ainsi, l'abstention d'accomplir un acte de la fonction,
auquel il n'est pas tenu, ne constitue pas une infraction de corruption.
Concernant les actes de la fonction auxquels le fonctionnaire
public n'est pas tenu de les accomplir, il s'agit en fait des actes pour
lesquels il dispose d'une marge d'appréciation quant à leur
accomplissement ou non. Par contre, pour les actes de la fonction dont il a
l'obligation de les accomplir, il ne dispose d'aucune marge
d'appréciation.
Une telle distinction n'existe pas dans le Code pénal
français qui réprime l'abstention d'accomplir un acte de la
fonction, de la mission ou du mandat.
En pratique, la Cour de cassation tunisienne a
condamné un officier de police qui a reçu une somme d'argent afin
de s'abstenir de dresser un procès verbal à l'occasion d'une
infraction au Code de la route167(*), ainsi qu'un agent de la douane qui a fermé
les yeux sur les agissements frauduleux d'un voyageur en contrepartie d'une
somme d'argent168(*).
Signalons enfin que, contrairement à la
législation française l'abstention d'accomplir un acte
facilité par la fonction n'est pas réprimée par l'article
83 CPT, ce qui est, à notre sens, regrettable.
DEUXIEME PARTIE : COMPARAISON RELATIVE À
LA REPRESSION
Signalons tout d'abord, qu'en France, à
côté des moyens proprement répressifs mis en place dans le
Code pénal, il existe d'autres procédés destinés
à la prévention. Ces procédés imposent des
contrôles plus stricts et une transparence plus grande dans les
principaux secteurs de la vie politique, administrative et économique.
En effet, un cortège de lois ayant pour objet d'introduire une plus
grande transparence dans divers secteurs169(*). Le texte le plus important est la loi n°
93-122 du 29 janvier 1993170(*) relative à la prévention de la
corruption et à la transparence de la vie économique et des
procédures publiques. Cette loi modifie les règles sur le
financement des campagnes électorales et des partis et
créée d'autre part un service central de prévention de la
corruption, chargé de centraliser les renseignements nécessaires
à la détection et à la prévention des faits de
corruption et de trafic d'influence, de concussion et d'ingérence.
De tels procédés de prévention n'existent
pas encore en Tunisie. Ainsi, la comparaison entre les deux législations
sera limitée à la répression.
L'étude de la répression se dédouble. Il
faut, en effet, étudier le droit de forme en premier lieu pour
étudier ensuite le droit de fond. Ainsi la comparaison portera sur la
procédure (chapitre 1er) puis sur les peines (chapitre
2).
CHAPITRE PREMIER : COMPARAISON DE LA
PROCEDURE
La comparaison de la procédure implique l'étude
de l'engagement de la poursuite
(Section 1) et les difficultés de mise en ouvre de
celle-ci (section 2).
SECTION PREMIERE : L'ENGAGEMENT DE LA POURSUITE
L'étude de l'engagement de la procédure
nécessite la détermination des parties compétentes (para
1) pour engager celle-ci en matière de corruption et la
détermination des juridictions compétentes (para 2).
PARA 1 : Les parties compétentes pour
engager les poursuites
Normalement, il appartient au Ministère public de
déclencher l'action publique(A), toutefois, d'autres parties disposent
de ce pouvoir (B).
A-Le Ministère public
L'article 40 al 1 du CPPF dispose : « Le
procureur de la république reçoit les plaintes et les
dénonciations et apprécie la suite à leur
donner ». Ainsi, le parquet apprécie l'opportunité de
poursuivre ou non les faits dénoncés. Toutefois en pratique
plusieurs dénonciations abusives voir mensongères apparaissent
à l'approche d'élections, en particulier pour des
élections locales. Il appartient donc au parquet de prendre en
considération cette pratique et d'agir en fonction.
En matière de corruption, comme pour toutes
infractions, le parquet est dominé par le principe de
l'opportunité des poursuites qui lui permet de choisir entre le
déclenchement des poursuites ou le classement sans suite. Mais vu la
clandestinité des faits de la corruption et la difficulté de les
prouver171(*), il est
important que le parquet poursuive dés lors qu'une dénonciation
s'avère fondée. On remarque ainsi que le parquet,qui
reçoit les plaintes et les dénonciations, est la partie
principale ayant le pouvoir d'engager une poursuite pour des faits de
corruption.
En droit tunisien, le législateur tunisien s'est
inspiré du législateur français en ce qui concerne les
fonctions du ministère public. En effet, l'article 20 CPPT
dispose « le ministère public met en mouvement et exerce
l'action publique ». De plus l'article 30 du CPPT
dispose : «Le procureur de la république apprécie
la suite à donner aux plaintes et dénonciations qu'il
reçoit ou qui lui sont transmises ».
Ainsi, c'est le ministère public qui engage la
poursuite et il est, à son tour,régi par le principe de
l'opportunité des poursuites et les faits de corruption sont
portés à sa connaissance par le biais des dénonciations et
des plaintes.
On remarque, qu'en droit français comme en droit
tunisien, c'est le parquet, qui reçoit les plaintes et les
dénonciations et qu'il lui appartient d'engager ou non une poursuite.
Mais y a-t-il d'autres parties qui peuvent engager les poursuites ?
B-Les autres parties pouvant engager la poursuite
On a vu que les faits de corruption sont portés
à la connaissance du ministère public par le biais des plaintes
et des dénonciations. En effet, la plainte n'est qu'une forme
particulière de dénonciation ;C'est la dénonciation
faite par la victime.
La notion de victime en matière de corruption
soulève deux types de difficultés, La première tend
à s'interroger s'il existe vraiment une victime de la corruption ?
La deuxième tend, une fois l'existence d'une victime
démontrée, à déterminer quelles sont les personnes
admises à agir ?
1-Y a-t-il une victime de la
corruption?
D'après l'article 2CPPF,la victime est la personne qui
a personnellement souffert d'un dommage directement causé par une
infraction et elle a la possibilité de se constituer partie civile en
vue de réparation. En matière de corruption le préjudice
n'est pas forcément détecté par la victime vu la
clandestinité de cette infraction et de ses effets, en plus dans la
majorité des cas le préjudice n'est pas subi par une personne
bien déterminée mais par un groupe abstrait de personnes. A titre
d'exemple, un représentant d'une collectivité territoriale peut
conclure un pacte de corruption avec une entreprise à l'occasion d'un
marché public ; le coût de la corruption sera supporté
par les contribuables. Ceux-ci subissent un préjudice certain mais
indétectable172(*).
En Tunisie, l'article 2CPPT concernant l'action publique
dispose « elle (l'action publique) peut également
être mise en mouvement par la partie lésée ». On
remarque que la victime de l'infraction de corruption peut engager la poursuite
en se constituant partie civile, mais la pratique a prouvé l'ignorance
de la partie lésée dans la plupart des cas, l'existence du
préjudice subi pour les mêmes raisons précitées.
En plus, la doctrine s'est posée la question
suivante ; Peut-on considérer le corrupteur ou le corrompu comme
victime de la corruption ayant le pouvoir d'engager l'action publique en se
constituant partie civile ?
En France, la Chambre criminelle admet l'action civile de la
personne qui a participé au délit à condition qu'elle
n'ait pas provoqué le délit et qu'elle ne soit pas complice.
Toutefois, elle rejette l'action de la personne qui, de mauvaise fois a remis
de l'argent à l'auteur principal du délit en vue d'obtenir une
décision favorable173(*). En conclusion la chambre criminelle rejette
l'action de la victime indigne.
En droit tunisien cette possibilité est prévue
d'une manière implicite. En effet, le corrupteur ou
l'intermédiaire peut dénoncer l'acte de corruption, avant toute
poursuite, en vue d'échapper à la répression
conformément à l'article 93 CPT. Et d'après la Cour de
cassation, ils peuvent se constituer partie civile dans le cas où ils
sont de bonne foi174(*).
Cette possibilité n'est ouverte qu'au corrupteur et
à l'intermédiaire, en d'autres termes, la possibilité de
dénonciation n'est pas ouverte à l'auteur de la corruption
passive.
Ainsi, on remarque que le corrupteur peut se voir
acquérir le statut de victime en cas de dénonciation et engager
une poursuite conformément à l'article2CPPT.
L'existence d'une victime de la corruption ainsi
démontrée, une autre question se pose ; Quelles sont les
personnes admises pour engager les poursuites ?
2-Les personnes admises à
agir
En Tunisie, en plus de la possibilité de
déclencher les poursuites par le corrupteur ou l'intermédiaire,
certaines lois spéciales tel que la loi n°83-112 promulguée
le 12 décembre1983175(*) prévoient que « si la faute commise
constitue un délit ou un crime et surtout dans le cas de corruption
passive, il faut informer le ministère public
immédiatement ». On remarque que ce texte reprend les
mêmes termes de l'article 40 CPPF alinéa 2 qui
dispose : « Toute autorité constituée, tout
officier public ou fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions,
acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit est tenu d'en donner
avis sans délai au procureur de la République et de transmettre
à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes
qui y sont relatifs ».
Ce texte vise l'administration en générale qui
se voit dans l'obligation d'informer le ministère public en vue de
mettre en mouvement l'action publique et ce en cas de préjudice subi
suite à une corruption passive. Ceci s'explique par la
nécessité de transparence de la fonction publique qui touche
à l'ordre public et l'intérêt général.
Cette loi spéciale pose expressément la
même obligation aux agents de la douane, en d'autres termes
l'administration générale de la douane se voit dans l'obligation
de déclencher l'action publique, en se constituant partie civile, en cas
de préjudice subi suite à la corruption passive.
D'autres lois spéciales prévoient la
possibilité pour certains ministères de déclencher
l'action publique en se constituant partie civile, tel que le ministère
de l'intérieur représenté par le Ministre de
l'intérieur, en effet, ce dernier peut engager une poursuite en cas de
corruption dans le cadre de son ministère. Cette prérogative est
prévue aussi pour le ministre de la justice.
En France, si la jurisprudence admet l'existence d'une action
civile elle restreint la notion de victime de la corruption en faisant
application réduite de l'article 2CPPF.Il serait
préférable de citer quelques victimes des faits de
corruption :
D'abord, concernant les collectivités
territoriales ; Les infractions de corruption commises par un
fonctionnaire territorial ou par un élu de la collectivité
territoriale sont de nature à causer un préjudice à
celle-ci d'où elles sont admises à se constituer partie
civile.
Ensuite, concernant l'administration qui emploie l'auteur des
faits, dépendant directement de l'Etat. La chambre criminelle
décide qu'elle peut se constituer partie civile contre un de ses
fonctionnaires corrompus mais seulement en cas de préjudice moral
résultant de l'atteinte à sa réputation176(*).
Puis, concernant l'employeur privé ; Rien ne fait
obstacle, lorsqu'un salarié est corrompu, à ce que son employeur
se constitue partie civile puisqu'il subit un préjudice certain et
personnel. Mais la question qui se pose est si cette action est possible
lorsque le salarié est corrupteur ?
Le salarié peut causer un préjudice
matériel à l'entreprise puisqu'elle peut être
déclarée civilement responsable des faits commis par son
employé. De plus, les faits de l'employé corrupteur
entraînent la responsabilité pénale du dirigeant et peuvent
entraîner la responsabilité pénale de la personne morale.
Nous pensons donc que l'employeur peut subir un préjudice personnel et
direct dont il pourra demander réparation devant les juridictions
répressives en se constituant partie civile177(*).
Enfin, en ce qui concerne l'intervenant au
délit ; La chambre criminelle de la cour de cassation admet
l'action civile de la personne qui a participé au délit lorsqu'il
est établi qu'elle n'a pas provoqué le délit et qu'elle
n'est pas complice178(*).
On remarque que la jurisprudence française et le
législateur tunisien permettent à l'intermédiaire et
à l'intervenant aux faits de corruption de se constituer partie civile
tout en imposant des conditions qui rendent le recours à cette
possibilité très limité au niveau de la pratique puisque
la constitution de partie civile, dans ce cas, impose la bonne foi de
l'intermédiaire ou de l'intervenant.
PARA2 : Les juridictions compétentes
Les juridictions du droit commun sont exclusivement
compétentes en matière de corruption(A), toutefois des
juridictions d'exception peuvent reconnaître des infractions de
corruption dans des cas prévus par la loi(B).
A-Les juridictions du droit commun
En France comme en Tunisie, la compétence des
juridictions du droit commun est fixée selon la gravité des faits
poursuivis et leurs qualifications de crimes, délits ou de
contraventions.
En Tunisie, l'article 27 CPPT dispose :
« La cour criminelle est seule compétente pour connaître
des crimes » . L'article 122 CPPT,de son coté,
précise que sont qualifiées de crimes, les infractions que
les lois punissent de mort, ou d'emprisonnement pendant plus de cinq
ans .
Le même article ajoute que sont qualifiés de
délits ; Les infractions que les lois punissent de
l'emprisonnement d'une durée supérieure à quinze jours et
ne dépassant pas cinq années et une amende de soixante dinars(40
euros). Quant aux juridictions compétentes e matière de
délits, l'article 124 CPPT ajoute que le tribunal de première
instance et plus précisément la chambre correctionnelle
connaît en premier ressort de tous les délits à l'exception
de ceux qui sont de la compétence du juge cantonal à
savoir ; les délits punis d'une peine d'emprisonnement
n'excédant pas une année.
Sachant que pour l'infraction de corruption, en Tunisie, le
législateur a prévu des peines privatives de liberté dont
la durée varie selon les cas, ce qui entraîne la
compétence des différents tribunaux.
En France, on retrouve la même distinction entre crimes,
délits et contraventions. Cette ressemblance n`est pas le fait du
hasard mais elle s'explique par la tendance du législateur tunisien
à s'inspirer de la législation et de la politique pénale
française.
Cette ressemblance n'est pas absolue, en effet, l'article131-1
CPF relatif aux crimes prévoit une durée minimale de dix ans de
réclusion criminelle pour ce type d'infractions, contrairement au droit
tunisien qui prévoit une durée minimale de cinq ans.
D'un autre coté, l'article 131-3 CPF et suivant
relatifs aux délits prévoient une durée maximale de dix
ans d'emprisonnement pour ce type d'infractions, contrairement au droit
tunisien qui prévoit une durée maximale de cinq ans.
Il faut savoir que depuis la promulgation de la loi du 16
mars 1943,le caractère criminel a été enlevé
à l'infraction de corruption en droit pénal français, en
d'autres termes, il y a eu une correctionnalisation de celle-ci. On parle
dés lors du délit de corruption, ce qui a pour effet la
compétence exclusive du tribunal correctionnel. Mais cette loi et le
nouveau code ont laissé une circonstance aggravante laissant un
caractère criminel à la corruption ; C'est le cas de
l'article 434-9 CPF relatif aux magistrats ou assimilés coupables de
corruption passive au bénéfice ou au détriment d'une
personne faisant l'objet de poursuites criminelles, la peine principale est la
réclusion criminelle de quinze ans, ce qui entraîne la
compétence de la cour d'assises.
Nous étudierions à ce niveau la
compétence des différents tribunaux.
1-les tribunaux compétents pour juger
l'infraction de corruption qualifiée de crime
a- la cour criminelle
En Tunisie, c'est la cour criminelle, située dans
chaque tribunal de grande instance, qui est compétente pour juger les
crimes ; infractions punies d'une peine privative de liberté ne
pouvant être inférieure à cinq ans. Ainsi, la cour
criminelle est compétente pour les cas des articles 83 CPT relatif au
fonctionnaire public ou assimilé qui, soit personnellement, soit par
intermédiaire, pour lui-même ou pour autrui, agrée des
offres ou promesses ou reçoit des dons ou présents pour accomplir
un acte de sa fonction, même juste, mais non sujet à salaire,
puis, l'article 84 CPT relatif au fonctionnaire public ou assimilé qui
a provoqué ces offres, promesses ou la remise de dons ou
présents. Dans ces cas la peine d'emprisonnement est de dix ans dans le
premier cas et vingt ans dans le second.
D'un autre coté, la cour criminelle est
compétente aussi pour la corruption passive des magistrats prévue
dans les articles 88 et 89 CPT qui prévoient une peine d'emprisonnement
de dix ans(89 CPT) et de vingt ans(88 CPT).
Enfin, la Cour criminelle est compétente en cas de
corruption active des fonctionnaires publics accompagnée de contrainte
ou de tentative de contrainte par voies de fait ou menaces punie de dix ans
d'emprisonnement, conformément à l'article 91 CPT.
Signalons que, après la réforme du 23 mai 1998,
la cour criminelle est devenue compétente pour la majorité des
infractions en matière de corruption. Cette compétence
élargie s'explique par l'aggravation des peines suite à ladite
réforme.
b- La cour d'assises
En France, la loi du 16 mars 1943 a eu pour principal effet la
correctionnalisation de la corruption. Toutefois, cette loi ainsi que le
nouveau Code pénal ont laissé le caractère criminel
à celle-ci dans l'hypothèse prévue dans l'article 434-9
CPF.
Cet article, dans son troisième alinéa dispose
que lorsqu'un magistrat est coupable de corruption passive au
bénéfice ou au détriment d'une personne faisant l'objet de
poursuites criminelles, les peines principales encourues sont la
réclusion criminelle de quinze ans. On remarque que l'infraction de
corruption, dans ce cas, est qualifiée de crime relevant de la
compétence de la cour d'assises conformément à l'article
231CPPF.
En faisant la comparaison entre les deux législations,
on remarque que la cour d'assises n'est compétente que dans un seul cas
de corruption, par contre la cour criminelle est compétente dans la
majorité des cas. Ceci s'explique par la tendance du législateur
tunisien à aggraver la répression de la corruption puisque les
infractions sont qualifiées de crimes en Tunisie si elles sont punies
d'une peine privative de liberté supérieure à cinq ans.
2-La Chambre correctionnelle et le tribunal
correctionnel (délits)
a-La Chambre correctionnelle
En Tunisie, la chambre correctionnelle est compétente
en matière de délits (article124CPPT). Ainsi, est du ressort de
la dite chambre, la corruption active prévue dans l'article 91 CPT
alinéa 1er qui dispose : « Est punie de
cinq ans d'emprisonnement et de cinq mille dinars d'amende, toute personne qui
aura corrompu ou tenté de corrompre par des dons ou promesses de dons,
présents ou avantages de quelque nature que ce soit l'une des personnes
visées à l'article 82 du présent code(fonctionnaire public
ou assimilé)...» ce même article ajoute que les mêmes
peines sont applicables à toute personne ayant servi
d'intermédiaire entre le corrupteur et le corrompu. Ainsi, c'est la
chambre correctionnelle qui est compétente dans ce cas.
Un autre délit qui est apparu avec la réforme
du 23 Mai 1998 et qui est de la compétence de la chambre
correctionnelle, il s'agit du délit d'octroyer à autrui un
avantage injustifié par un acte contraire aux dispositions
législatives et réglementaires ayant pour objet de garantir la
liberté de participation et l'égalité des chances dans
les marchés passés prévu par l'article 87 bis CPT.
La peine prévue pour ce délit est de cinq ans
d'emprisonnement alors qu'en France il est puni de deux ans conformément
à l'article 432-14 CPF. A notre sens, les peines prévues dans les
deux législations ne sont pas compatibles avec la gravité des
faits reprochés.
Enfin, la chambre correctionnelle est aussi compétente
pour le délit prévu dans l'article 85 CPT qui dispose :
« Si le fonctionnaire public ou assimilé a
accepté des dons ou présents en récompense de ce qu'il a
fait ou de ce qu'il n'a pas fait, il est puni de l'emprisonnement pendant cinq
ans et d'une amende de cinq mille dinars ».
Ce délit est constitué une fois le fonctionnaire
a accepté des dons ou présents après l'accomplissement ou
non de l'acte de la fonction, ce qui le distingue du cas prévu à
l'article 83 CPT relatif à l'acceptation des dons avant
l'accomplissement de l'acte.
L'article 85 CPT prévoit une peine de cinq ans
d'emprisonnement suite à la loi du 23 mai 1998 au lieu d'un an
d'emprisonnement avant la promulgation de la dite loi, ce qui affirme la
politique répressive suivie en Tunisie en matière de
corruption.
b-Le Tribunal correctionnel
En France, c'est le tribunal correctionnel qui est
compétent en matière de délits et ce dernier est
compétent pour tous les délits de corruption depuis la
correctionnalisation de cette infraction par la loi du 16 mars 1943, à
l'exception de l'article 434-9 CPF, précédemment
étudié, qui prévoit la réclusion criminelle de
quinze ans ce qui implique la compétence de la cour d'assises.
On remarque qu'en France le tribunal correctionnel a une
compétence exclusive en matière de corruption contrairement
à la chambre correctionnelle en Tunisie qui n'a qu'une compétence
limitée à des cas bien déterminés.
3-le Tribunal cantonal en Tunisie (délits
prévus par la loi)
Nous avons précisé que le tribunal cantonal en
Tunisie connaît en dernier ressort des contraventions et connaît
en premier ressort des délits punis d'une peine d'emprisonnement
n'excédant pas une année ou d'une peine d'amende
n'excédant pas mille dinars(700 euros) par application de l'article 123
CPPT.
Par conséquent, ce tribunal est saisi en cas de
tentative de corruption qui n'a eu aucun effet conformément à
l'article 92 CPT nouveau qui prévoit une peine d'emprisonnement d'un an
et une amende de mille dinars.
En pratique, les tribunaux n'appliquent pas les peines
prévues d'une manière stricte en cas de tentative. Cette
position de la jurisprudence tunisienne est regrettable parce que, à
notre sens, la tentative de corruption représente les mêmes
dangers que la corruption elle-même.
Si on procède à une comparaison avec l'ancienne
rédaction de l'article 92 CPT, on constate que le tribunal cantonal
était compétent dans deux cas ;d'un coté, pour la
tentative de voies de fait ou de menaces et d'un autre coté pour la
tentative de corruption qui n'ont eu aucun effet. Avec la réforme
précédemment cité le législateur a supprimé
la tentative de voies de fait ou de menaces de la compétence du tribunal
cantonal.
On remarque qu'en France, le tribunal de police, qui a presque
le même rôle que le tribunal cantonal, n'est pas compétent
en matière de corruption mais cette incompétence s'explique par
l'impossibilité, pour celui-ci, de prononcer des peines privatives de
libertés : peines indispensables pour l'infraction de
corruption.
En conclusion, les juridictions de droit commun ont un
rôle très important et une compétence exclusive en
matière de corruption.
4- Les dérogations aux règles de
compétence
En France, les juridictions normalement compétentes
peuvent se voir dessaisies suite à la création de juridictions
spécialisées(a) et l'existence de règles permettant une
dérogation à la compétence territoriale(b).
a-La création de juridictions
spécialisées
Devant la montée de la délinquance d'affaires
dites « en col blanc », une loi n°75-701 du 6
août 1975 a ajouté au livre VI du CPPF un titre XIII
intitulé: "De la poursuite, de l'instruction et du jugement des
infractions en matière économique et financière". Cette
loi a institué des juridictions spécialisées pour les
infractions en matière économique et financière.
Désormais, dans chaque ressort de cour d'appel, un ou plusieurs
tribunaux de grande instance comportant des magistrats
spécialisés qui sont compétents pour l'instruction et le
jugement de ces infractions et de celles leur étant connexes.
Ces infractions sont prévues par l'article 704 CPPF et
on remarque que la liste de cet article ne vise que les délits.
L'article 704 CPPF a été modifié par la
loi du 1er décembre 1994 qui a ajouté la corruption et le trafic
d'influence, sous leurs deux formes active et passive, dans la longue liste des
infractions qui peuvent être déférées aux tribunaux
de grande instance spécialisés pour la poursuite, l'instruction
et le jugement des infractions commises en matière économique et
financière.
La loi de 1er décembre 1994179(*) a porté, en outre,
deux autres modifications importantes. D'un coté, elle a instauré
dans l'article 705 CPPF le procédé technique d'une
« compétence territoriale concurrente » entre la
juridiction correctionnelle de droit commun et la juridiction
spécialisée. Cette expression a deux sens. Elle veut d'abord dire
que les magistrats spécialisés ont une compétence
supplémentaire, s'ajoutant à celle qu'ils ont déjà
en application des règles en application des règles du droit
commun. Elle veut dire, ensuite, que ces magistrats n'ont qu'une
compétence facultative : il faut, en effet, que ces affaires soient
d'une grande complexité pour qu'elles soient attribuées à
ces magistrats180(*).
D'un autre coté, ladite loi a modifié les
règles de saisine de ces juridictions. Auparavant, la loi du 6
août 1975 chargeait le président de la chambre d'accusation du
pouvoir d'attribuer les affaires à la juridiction
spécialisée, sur requête du procureur de la
République ou du juge d'instruction. . Avec la réforme de 1994,
qu'il s'agisse d'une procédure suivie sur information ou en
enquête préliminaire, le procureur de la République peut
saisir la juridiction spécialisée. C'est le procureur
général près la cour d'appel où la juridiction
spécialisée a son siège, qui prend la décision.
S'il s'agit d'une procédure d'information, le juge d'instruction saisit
son collègue compétent.
Il faut signaler, d'un autre coté, l'apport de la loi
du 30 juin 2000 qui a élargie la liste des infractions relevant de la
compétence des juridictions spécialisées prévue par
l'article 704 CPPF. En effet, la loi ajoute les cas de corruption active et
passive des seuls fonctionnaires communautaires ( articles 435-1 et 435-2
CPF)181(*). De plus ces
deux infractions, depuis ladite loi, figurent dans la liste des infractions
donnant aux tribunaux français une compétence universelle
conformément à l'article 689-8 CPPF182(*).
D'après certains auteurs, ces juridictions
spécialisées n'ont pas vraiment montré leur
efficacité sur le plan pratique, faute de disposer en leur sein de
suffisamment de magistrats véritablement
spécialisés183(*). C'est pour cette raison que, la loi du 9 mars
2004184(*) a
amélioré sensiblement le traitement des infractions
économiques et financières en étendant la
compétence des juridictions spécialisées ainsi que le
statut des assistants spécialisés185(*).
Cette loi a modifié l'article 704 CPPF qui dispose,
désormais : « la compétence territoriale d'un
tribunal de grande instance peut être également étendue au
ressort de plusieurs cours d'appel pour l'enquête, la poursuite,
l'instruction et s'il s'agit de délits, le jugement de ces infractions,
dans les affaires qui sont ou apparaîtraient d'une très grande
complexité, en raison notamment du grand nombre d'auteurs, de complices
ou de victimes où du ressort géographique sur lequel elles
s'étendent ».
Ainsi, les juridictions spécialisées ont, suite
à la réforme du 9 mars 2004, une compétence
interrégionale puisqu'elle est étendue au ressort de plusieurs
cours d'appel.
En Tunisie une telle spécialisation n'est pas
prévue par le Code de procédure pénale, ce qui est,
à notre sens, regrettable vu la complexité et la
clandestinité des faits de corruption.
b-la dérogation à la compétence
territoriale
Deux dérogations aux règles de compétence
territoriale peuvent être mentionnées à ce niveau, la
Première est relative aux élus locaux la
deuxième concerne les fonctionnaires étrangers qui ne
relèvent pas du cadre de la communauté européenne.
S'agissant des élus locaux, une loi du 18 juillet 1974
a modifié l'article 681 CPPF, il s'agissait d'une dérogation aux
règles de compétence territoriale permettant que les élus
locaux soient automatiquement poursuivis ou jugés devant une juridiction
se situant en dehors de leur circonscription. Cette règle avait pour but
principal de garantir l'impartialité de la juridiction en évitant
les risque de pressions sur les juridictions locales.
Cette loi a prévu une procédure complexe de
nature à retarder les investigations. De plus la mauvaise
rédaction du texte conduisait à des annulations de
procédure qui ont choqué l'opinion publique. Ainsi le
législateur a décidé de supprimer ce texte, par la loi du
4 janvier 1993, afin de préserver le respect de l'égalité
de traitement des justiciables. Désormais, les élus
relèvent de plein droit des juridictions territorialement
compétentes, sauf s'ils demandent un dépaysement du dossier par
la procédure de renvoi dans l'intérêt d'une bonne
administration de la justice prévue par l'article 665 CPPF. Le
dépaysement ne peut être ordonné que sur requête du
procureur général prés la Cour de cassation ou du
procureur général prés la cour d'appel dans lequel se
trouve la juridiction saisie186(*). Dans ce cas le renvoi est ordonné par la
Chambre criminelle.
Afin d'éviter une telle requête de
dessaisissement auprès de la Cour de cassation, la loi du 9 mars 2004 a
ajouté un nouvel alinéa à l'article 43 CPPF qui
dispose : « Lorsque le procureur de la République est
saisi de faits mettant en cause, comme auteur ou comme victime, une personne
dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une
mission de service public qui est habituellement, de par ses fonctions ou sa
mission, en relation avec les magistrats ou fonctionnaires de la juridiction,
le procureur général peut...transmettre la procédure au
procureur de la République du tribunal de grande instance le plus proche
du ressort de la cour d'appel. Cette juridiction est alors territorialement
compétente pour connaître l'affaire... ».
On remarque ainsi, que cette nouvelle procédure est
plus rapide que la précédente puisqu'elle permet à une
juridiction impartiale de connaître des affaires mettant en cause les
personnes citées précédemment sans exiger une
requête en dessaisissement auprès de la Cour de
cassation187(*).
Quant aux agents publics et les magistrats étrangers
ne relevant pas du cadre de l'Union européenne188(*). La loi du 30 juin 2000 a
prévu dans un nouvel article 706-1 CPPF que pour la poursuite,
l'instruction et le jugement de faits de corruption active concernant ces
personnes, le procureur de la République, le juge d'instruction et le
tribunal correctionnel de Paris exercent une compétence concurrente
à celle qui résulte des règles normales de la
compétence territoriale.
On remarque qu'il y a eu une concentration189(*), entre les mains du tribunal
de grande instance de paris, des affaires de corruption internationale à
l'imitation de ce qui a été prévu par l'article 706-17
CPPF pour les faits de terrorisme.
En Tunisie, on ne trouve pas une dérogation à la
compétence territoriale ni en faveur des élus locaux ni en faveur
de certains fonctionnaires. Ils relèvent de plein droit des juridictions
territorialement compétentes, et ceci s'explique par le souci de
respecter le principe d'égalité.
B-Les juridictions d'exception
Deux juridictions feront l'objet de la comparaison à ce
niveau, il s'agit des juridictions compétentes pour connaître des
infractions commises par des hommes politiques (1) et des juridictions
militaires (2).
1-Les hommes politiques
Certaines personnalités politiques sont justiciables de
juridiction d'exception. Il s'agit de la Haute Cour de justice pour le
président de la République et la cour de justice de la
République pour les Ministres en France (a) et de la Haute Cour pour les
membres du gouvernement en Tunisie (b).
a-les juridictions d'exception compétentes
en France
S'agissant d'abord du président de la
République, l'article 68 de la Constitution stipule :
« Le président de la République n'est responsable des
actes accomplis dans l'exercice de ses fonctions qu'en cas de haute trahison.
Il ne peut être mis en accusation que par les deux assemblées
statuant par un vote identique au scrutin public et à la majorité
absolue des membres les composant. Il est jugé par la Haute Cour de
justice ».
La doctrine a débattu sur l'interprétation de
cet article à cause de son libellé qui n'est ni clair ni
précis. Certains, considéraient que les deux phrases formaient un
tout indivisible ; avançaient que le Président de la
République n'était justiciable de la Haute Cour de justice qu'en
cas de haute trahison, et était justiciable des juridictions de droit
commun pour tous les actes détachables ou antérieurs à
l'exercice des fonctions. D'autres considéraient que les deux phrases
étaient dissociables, soutenaient que la seconde phrase consacrait un
privilège de juridiction au profit du chef de l'Etat.
En application de la seconde interprétation, toutes les
infractions, y compris les faits de corruption, commises par le chef de
l'Etat seraient de la compétence de la Haute Cour de justice.
La mise en cause de l'actuel Président de la
République, Jacques Chirac a donné de l'importance à ces
interprétations. En effet, la question a été
tranchée en deux temps. La première fois par le Conseil
constitutionnel dans une décision du 22 janvier 1999190(*)portant sur la
conformité à la Constitution de la convention de Rome du 18
juillet 1998 portant statut de la Cour pénale internationale. Dans cette
décision le conseil reconnaît au président un
privilège de juridiction en considérant qu' « au
surplus, pendant la durée de ses fonctions sa responsabilité
pénale ne peut être mise en cause que devant la Haute cour de
justice ».
Cette interprétation du conseil constitutionnel a
été modifiée par l`assemblée
plénière191(*) de la Cour de cassation lorsqu'elle a eu à se
prononcer sur la possibilité d'entendre le président de la
République comme témoin. Elle décide que ce dernier ne
peut être ni poursuivi, ni jugé pendant toute la durée de
son mandat et elle ajoute que la prescription de l'action publique est
suspendue pendant toute la durée du mandat. Il bénéficie,
dés lors, d'une inviolabilité temporaire et non plus d'un
privilège de juridiction.
On remarque ainsi que les faits de corruption ne peuvent pas
être réprimés pendant la durée du mandat par la
Haute Cour de justice et qu'ils sont de la compétence des juridictions
de droit commun lorsque ce mandat arrive à terme.
Quant aux Ministres, depuis la loi constitutionnelle du 27
juillet 1993, les membres du gouvernement sont jugés par la Cour de
justice de la République et non plus par la Haute cour de justice. La
procédure suivie devant cette juridiction est relativement lourde et
complexe.
En effet, la personne qui se prétend
lésée doit impérativement porter plainte auprès de
la commission des requêtes. Cette commission a le pouvoir de classer
sans suite ou de transmettre le dossier au procureur général
prés la Cour de cassation, en d'autres termes, elle a un pouvoir de
filtrage. Une commission d'instruction est saisie pour instruire in rem et in
personam puisque l'instruction dans ce cas ne concerne que le Ministre mis en
cause et non ces complices ou ses coauteurs. Il faut enfin signaler qu'aucune
constitution de partie civile n'est admise devant cette juridiction192(*).
Suite à cette réforme constitutionnelle
l'article 68-1de la constitution prévoit que la cour est
compétente pour les actes accomplis par des Ministres dans l'exercice
des fonctions et qualifiés de crimes ou délits au moment
où ils étaient commis.
Avant l'arrêt de la Cour de cassation du 26 juin
1995193(*) relatif
à l'affaire Carignon, la jurisprudence ne faisait pas la distinction
entre les actes accomplis dans l'exercice de la fonction et les actes accomplis
à l'occasion de l'exercice des fonctions. Ce qui avait pour
conséquences que les ministres soupçonnés étaient
justiciables de cette juridiction d'exception.
Lors de l'arrêt Carignon, la Cour de cassation a
précisé que « les actes commis par un ministre dans
l'exercice de ses fonctions sont ceux qui ont un rapport direct avec la
conduite des affaires de l'Etat relevant de ces attributions, à
l'exclusion des comportement concernant la vie privée ou les mandats
électifs locaux ».
Désormais la Cour de cassation, dans des affaires
mettant des Ministres en cause pour des faits de corruption194(*), considère que les
actes accomplis dans l'exercice des fonctions ne comprennent pas les actes
accomplis à l'occasion de l'exercice des fonctions mais ils recouvrent
seulement ceux ayant un rapport direct avec la conduite des affaires de l'Etat.
Par conséquent, les faits de corruption ne
relèvent plus de la compétence de la Cour de justice de la
République à moins qu'ils n'aient un rapport direct avec la
conduite des affaires de l'Etat.
S'agissant enfin des parlementaires, ils relèvent des
juridictions de droit commun et non pas d'une juridiction d'exception.
Toutefois, les poursuites ne pouvaient être engagées, auparavant,
qu'avec l'autorisation de l'assemblée dont relevait le parlementaire
pendant les sessions ou avec l'autorisation du bureau de cette assemblée
hors session. Ce régime d'inviolabilité a été
modifié par la loi constitutionnelle du 4 août 1995195(*). Désormais, sont
seules soumises à autorisation du bureau de l'assemblée les
mesures privatives ou restrictives de liberté hors le cas de flagrant
délit ou de condamnation définitive.
b-La Haute Cour en Tunisie
Il existe une seule juridiction d'exception relative aux
hommes politiques en Tunisie. Il s'agit de la Haute Cour prévue par
l'article 68 de la Constitution tunisienne qui dispose que celle-ci est
compétente pour juger les membres du gouvernement en cas de haute
trahison. La compétence de la Haute Cour a été
déterminée par la loi du 1 avril 1970196(*) qui reprend dans son article
premier les mêmes termes de la Constitution mais elle ajoute dans son
article 2 une définition de la haute trahison. Il s'agit en effet d'
« ... actes accomplis dans l'exercice des fonctions et
qualifiés de crimes ou délits au moment où ils
étaient commis et qui portent atteinte à la réputation de
l'Etat ».
A notre sens cet article, dans sa version française, a
été mal traduit puisqu'il laisse croire que les actes accomplis
dans l'exercice des fonctions sont ceux ayant un rapport direct avec la
conduite des affaires de l'Etat alors que le texte arabe prévoit la
compétence de la Haute Cour lorsque la personne, ayant la qualité
de Ministre, commet des actes qualifiés de crimes ou délits.
Ainsi, la Haute Cour a une compétence exclusive pour
juger les membres du gouvernement contrairement à la Cour de justice de
la République en France qui n'a qu'une compétence concurrente
à celle des tribunaux répressifs.
Par conséquent, cette juridiction d'exception
tunisienne est compétente pour juger les faits de corruption, qu'ils
aient un rapport direct avec la conduite des affaires de l'Etat ou non, du
moment qu'ils sont commis par des Ministres.
Quant au président de la République, l'article
41 de la Constitution197(*) dispose que : « Le
Président de la République bénéficie d'une
immunité juridictionnelle durant l'exercice de ses fonctions. Il
bénéficie aussi de cette immunité juridictionnelle
après la fin de l'exercice de ses fonctions en ce qui concerne les actes
qu'il a accomplis à l'occasion de l'exercice de ses
fonctions ». Ainsi, aucune poursuite n'est possible contre le chef de
l'Etat.
Quant aux parlementaires, ils relèvent des juridictions
de droit commun et non pas d'une juridiction d'exception. Toutefois, ils
bénéficient d'un régime d'inviolabilité puisque les
poursuites ne peuvent être engagées qu'avec l'autorisation de
l'assemblée dont relève le parlementaire pendant les sessions ou
avec l'autorisation du bureau de cette assemblée hors session. On
remarque à ce niveau que c'est le même régime
d'inviolabilité qui existait en France avant la réforme
constitutionnelle du 4 août 1995.
2-Le Tribunal militaire
S'agissant de la législation française. Une
distinction, relative aux juridictions militaires compétentes, est faite
entre le temps de paix et le temps de guerre.
En temps de paix, les infractions militaires et les
infractions de droit commun commises par les militaires agissant dans le
service sont en principe jugées par les juridictions de droit commun
conformément à l'article 697-1 CPP tel que modifié par la
loi du 21 juillet 1982. Cependant, il existe encore des juridictions militaires
en temps de paix, par exemple les tribunaux aux armées qui
opèrent à l'étranger et qui connaissent des infractions de
toute nature, y compris la corruption, commises par les militaires ou les
personnes à leur suite, ainsi que des infractions contre les forces
armées françaises ou contre leurs établissements198(*).
En cas d'état de siège ou d'urgence
déclaré, les infractions de toute nature, y compris la
corruption, commises par les militaires et les infractions contre les forces
armées sont de la compétence des tribunaux territoriaux des
forces armées qui sont établies sur le territoire
nationale199(*).
En temps de guerre, la compétence est celle des
tribunaux territoriaux des forces armées qui connaissent des infractions
commises par les militaires ainsi que des crimes ou délits contre les
intérêts fondamentaux de la nation et des infractions qui leur
sont connexes200(*).
En Tunisie, c'est le tribunal militaire qui est
compétent pour connaître de certaines infractions commises par des
militaires. L'organisation et la compétence de cette juridiction sont
prévues par le décret du 10 janvier 1957201(*).
Aucun article de ce décret ne prévoit
expressément les faits de corruption comme étant un infraction
relevant de la compétence du Tribunal militaire. Cependant l'article 5
dudit décret dispose que ce tribunal est compétent pour
connaître des infractions commises contre les intérêts de
l'armée.
On peut imaginer qu'un militaire sollicite ou agrée
des offres en vue d'accomplir des actes qui sont contraires aux
intérêts de l'armée. Rien ne s'oppose, dans ce cas,
à ce que le tribunal militaire soit compétent pour
connaître des faits de corruption commis par un militaire.
SECTION 2 : LES PROBLEMES RELATIFS A LA MISE EN OEUVRE DE
LA POURSUITE
La clandestinité des faits de corruption, comme on l'a
déjà évoqué, a pour principal effet ; La
difficulté de prouver ces faits, par conséquent, l'infraction
demeure impunie (para1). A cette difficulté de la preuve vient s'ajouter
la prescription qui peut être à son tour un obstacle à la
répression (para2).
PARA 1 : La clandestinité des faits de
corruption et la difficulté de preuve
L'appréhension des faits de corruption
nécessite une spécialisation puisque l'infraction est
dissimulée dans des données comptables apparemment
régulières, quant aux auteurs sont cachés par des
sociétés écrans. Il faut alors que les enquêteurs
soient spécialisés et formés pour la recherche de tout ce
qui est licite. Cette spécialisation si elle existe dans la
législation française(A), elle fait défaut en droit
tunisien(B).
A-La spécialisation dans la recherche des
preuves en France
La spécialisation dans la découverte des faits
de corruption ne se limite pas aux juridictions de jugement, en effet, elle
existe dans toutes les phases de la procédure, c'est à dire,
enquête, poursuite, instruction et jugement.
La spécialisation des organes de l'enquête ne
concerne pas uniquement les faits de corruption mais toutes les infractions en
matière économique et financière
énumérées par l'article 704 CPPF. D'autre part, la
spécialisation concerne les services de police et de gendarmerie:
La direction centrale de la police judiciaire, dont les agents
peuvent effectuer des enquêtes sur l'ensemble du territoire, comporte
deux divisions spécialisées. La division dite des infractions au
droit des affaires, chargée de la répression des infractions aux
lois sur les sociétés, de fraude fiscale et de la corruption. La
deuxième est; l'office central pour la répression de la grande
délinquance financière qui traite les infractions à
caractère économique, commercial et financier liée
à la criminalité organisée.
Quant aux juridictions spécialisées, la loi du
6 août 1975202(*)
modifiée par la loi du 1 février 1994 précédemment
citée, a institué dans chaque ressort de cour d'appel, un ou
plusieurs tribunaux de grande instance comportant des magistrats
spécialisés et compétents pour l'instruction et le
jugement de ces infractions et de celles leur étant connexes. La saisine
de ces juridictions peut intervenir dés les premiers
éléments de l'enquête; Il apparaît ainsi un parquet
spécialisé. Ainsi, les juridictions spécialisées
peuvent voir leur compétence élargie pour englober toutes les
phases de la procédure.
Ces juridictions spécialisées ont vu leur
efficacité renforcée du fait de la création des assistants
spécialisés203(*), dont le statut a été
amélioré par la loi du 9 mars 2004 dite loi Perben 2, il s'agit
de personnes ayant acquis, au cours de leur parcours professionnel, des
compétences en matière économique et financière,
à titre d'exemple des agents des impôts, des douanes etc. Ces
assistants spécialisés suivent une formation obligatoire
préalable à leur entrée en fonction. Ils peuvent
dorénavant assister les juges d'instruction ou les officiers de police
judiciaire agissant sur commission rogatoire dans tous les actes
d'information, ainsi que les magistrats du Ministère public dans
l'exercice de l'action publique.
En conclusion, les juridictions spécialisées
ont une compétence supplémentaire, puisqu'elle vient s'ajouter
à la compétence de la juridiction d'origine qui reste saisie et
elle est facultative puisque la juridiction ne sera saisie que si l'affaire
apparaît d'une grande complexité au magistrat originellement
compétent.
B-L'absence de la spécialisation dans la recherche
des preuves en Tunisie
En Tunisie, si on analyse les articles relatifs à la
corruption, on remarque que le législateur n'a pas précisé
un moyen de preuve bien déterminé à appliquer en cas de
faits de corruption. Ainsi ce sont les règles générales
prévues dans les articles 150 CPPT et suivant qui sont applicables.
La preuve des faits de corruption est l'un des
problèmes majeurs qu'un juge peut rencontrer, ceci s'explique par la
clandestinité de ces faits et la prudence des auteurs d'une telle
infraction. La difficulté de prouver la corruption a pour regrettable
conséquence de faire obstacle à la répression surtout si
la sollicitation porte sur un objet qui n'a qu'un intérêt
moral.
Ainsi, la facilité de preuve des faits de corruption
dépend de la nature des intérêts reçus par l'auteur
de l'infraction et de la nature de la corruption, en d'autres termes, passive
ou active.
Si l'avantage prévu dans le pacte de corruption est
une promesse ou une recommandation, il serait difficile de prouver cette
infraction. Les juges, de leur coté, pour dépasser une telle
difficulté se réfère aux présomptions de fait
recueillies par les magistrats instructeurs, à titres d'exemple, les
dépenses d'un fonctionnaire public qui ne correspondent pas à ses
ressources, toutefois ils sont tenus de motiver leurs décisions. Il
faut préciser que la motivation de la décision est obligatoire et
cette obligation est due à une jurisprudence constante.
D'un autre coté, la tâche du juge, dans la
recherche de la vérité, est facilitée par le rôle du
juge d'instruction, sachant qu'en Tunisie l'instruction est obligatoire en
matière de crimes et facultative en matière de délits,
d'où l'instruction est obligatoire pour les cas de corruption passive
prévus par les articles 83 et 84 CPT et dans le cas de corruption active
prévu par l'article 94 CPT, mais elle reste facultative dans les autres
cas puisqu'ils sont qualifiés de délits.
A son tour, le juge d'instruction voit son rôle
facilité par l'information menée par l'administration à
laquelle appartient le fonctionnaire public, en effet, l'administration ouvre
une information administrative à l'encontre de ce dernier afin
d'accumuler les preuves relatives à la corruption.
A la clôture de cette information administrative, le
supérieur hiérarchique de l'administration décide, soit le
classement sans suite, soit la prononciation d'une peine administrative.
L'information administrative permet au juge d'instruction
d'être éclairé sur les faits, toutefois, en cas de
prononciation d'une peine disciplinaire par le supérieur
hiérarchique de l'administration, cette décision ne lie pas le
juge d'instruction quant à la suite qu'il va donner à
l'information judiciaire qu'il a ouvert.
Lors de l'instruction judiciaire le juge d'instruction
procède à tous les actes nécessaires pour la
manifestation de la vérité tels que l'audition des
témoins, des perquisitions, des expertises, toutefois, l'instruction
reste facultative dans les cas où l'infraction de corruption est
qualifiée de délit conformément à l'article 47
CPPT qui dispose : « l'instruction préparatoire est
obligatoire en matière de crime ; sauf dispositions
spéciales, elle est facultative en matière de délit et de
contravention. » et rien dans le code n'exige une instruction
obligatoire au cas où la corruption constitue un délit . On
remarque que l'article 47 CPPT reprend les mêmes termes de l'article 79
CPPF concernant les cas dans lesquels l'instruction préparatoire est
obligatoire.
Il est regrettable, à notre sens, que l'instruction ne
soit pas obligatoire dans tous les cas de corruption vu la gravité de
cette infraction qui porte atteinte à la transparence de la fonction
publique. D'autre part, il serait préférable que le
législateur tunisien s'inspire de son homologue français et
crée des juridictions d'enquête, d'instruction et de jugement
spécialisées.
PARA 2 :La prescription de l'action
publique
L'écoulement du temps entraîne la prescription de
l'action publique de sorte que l'auteur échappe à la
répression et ne peut être poursuivi. Le mécanisme de
prescription existe en France et en Tunisie et se justifie par l'idée
qu'au bout d'un certain temps, mieux vaut oublier l'infraction que raviver le
souvenir. De plus, l'écoulement du temps entraîne la perte des
preuves et multiplie le risque d'erreur judiciaire.
Malgré les justifications de la prescription, une
hostilité croissante envers celle-ci émane des juges ainsi que
des législateurs et qui se fonde sur le refus d'impunité de
l'auteur de l'infraction. Cette hostilité est plus importante lorsqu'il
s'agit d'infractions d'affaires qui se caractérisent par la
clandestinité qui rend leur découverte dans un délai de
trois ans inacceptable204(*).
Ainsi la prescription apparaît comme un obstacle
à la poursuite, toutefois la jurisprudence française,
contrairement à la jurisprudence tunisienne, a essayé de trouver
un moyen pour surmonter cet obstacle en retardant le point de départ du
délai de prescription(B).
A noter, que si le délai de prescription est
fixé à trois ans depuis la correctionnalisation de la corruption
suite à la loi de 1943 en France, ce délai est variable en
Tunisie selon que l'infraction est qualifiée de crime ou de délit
(A).
A-Les délais de prescription
Selon, l'article 8 CPPF « En matière de
délit, la prescription de l'action publique est de trois années
révolues » et l'article 7 CPPF ajoute que le point de
départ de celle-ci est le jour de la commission de l'infraction.
Ainsi, le délit de corruption se prescrit par trois
années révolues à compter du jour de sa commission.
En Tunisie, l'infraction de corruption est qualifiée
dans certains cas de crime et dans d'autres cas de délit, ceci a pour
principal effet de varier le délai de prescription de l'action
publique selon la qualification de la dite infraction. L'article 5 CPPT
dispose « Sauf dispositions spéciales de la loi,
l'action publique qui résulte d'un crime se prescrit par dix
années révolues, celle qui résulte d'un délit par
trois années révolues.. et ce à compter du jour où
l'infraction a été commise... ».
Ainsi, est qualifié de délit de corruption, dont
le délai de prescription est de trois années
révolues ; la corruption active prévue dans l'article 91 CPT
alinéa 1er qui dispose : « Est punie de
cinq ans d'emprisonnement et de cinq mille dinars d'amende, toute personne qui
aura corrompu ou tenté de corrompre par des dons ou promesses de dons,
ou présents ou avantages de quelque nature que ce soit l'une des
personnes visées à l'article 82 du présent
code(fonctionnaire public).. ». Ensuite, le délit d'octroyer
à autrui un avantage injustifié par un acte contraire aux
dispositions législatives et réglementaires ayant pour objet de
garantir la liberté de participation et l'égalité des
chances dans les marchés passés, prévu par l'article 87
bis CPT, et enfin, le délit prévu dans l'article 85 CPT relatif
au fonctionnaire qui accepte des dons ou présents après
l'accomplissement ou non de l'acte de la fonction.
D'autre part, le délai de prescription est porté
à dix années révolues dans le cas où l'infraction
de corruption est qualifiée de crime, à titre d'exemple ;
les cas des articles 83 CPT relatif au fonctionnaire public ou
assimilé qui, soit personnellement, soit par intermédiaire, pour
lui-même ou pour autrui, agrée des offres ou promesses ou
reçoit des dons ou présents pour faire un acte de sa fonction,
même juste, mais non sujet à salaire, puis, l'article 84 CPT
relatif au fonctionnaire public ou assimilé qui a provoqué ces
offres ou promesses ou la remise de dons ou présents.
Ensuite, la corruption passive des magistrats prévue
dans les articles 88 et 89 CP et enfin, le cas de corruption active des
fonctionnaires publics accompagné de contrainte ou de tentative de
contrainte par voies de fait ou menaces, conformément à l'article
91 CPT.
On a déjà vu que le délit de corruption
en France comme en Tunisie se prescrit par trois années, ce délai
s'est avéré en pratique comme obstacle à la
répression d'où des solutions ont été
trouvées par la jurisprudence française.
B-le retardement du point de départ du
délai de prescription par la jurisprudence
La Cour de cassation française, malgré l'absence
de textes, soucieuse de retarder le plus possible le point de départ du
délai de prescription, a élaboré et
développé une jurisprudence ne faisant pas courir le délai
de prescription de certaines infractions instantanées du jour de leur
consommation. Deux formes d'infractions instantanées sont
concernées par cette jurisprudence celles qui s'exécutent sous
forme de remises successives de fonds ou d'actes réitérés,
et celles qui sont occultes ou s'accompagnent de manoeuvres de dissimulation
qui les rendent difficile à découvrir205(*).
S'agissant d'abord des infractions s'accompagnant de
manoeuvres de dissimulation, l'exemple type est celui de l'abus de biens
sociaux. En effet à raison de la nature occulte de ce délit, un
délai de prescription de trois ans à compter du jour de sa
consommation n'aurait pas permis, dans la plupart des cas, d'exercer des
poursuites contre son auteur qui aurait ainsi bénéficié
d'une impunité inacceptable. C'est pourquoi la Cour de cassation s'est
efforcée de retarder le point de départ de la prescription. Cette
jurisprudence a connu une évolution qui s'est déroulée en
trois phases.
Dans un premier temps la Cour de cassation a retardé le
point de départ de la prescription triennale au jour où le
délit est apparu et a pu être constaté, c'est à dire
au jour de la découverte206(*).
Dans un deuxième temps la Cour de cassation a
précisé que le point de départ de la prescription
triennale doit être fixé au jour où le délit est
apparu et a pu être constaté dans des conditions permettant
l'exercice de l'action publique, en d'autres termes, par les seules personnes
habilitées à mettre cette action en mouvement : les victimes et
le ministère public207(*).
Enfin la chambre criminelle s'est fondée sur les
dispositions du Code de commerce pour décider que le délai de
prescription de l'action publique du chef d'abus de biens sociaux ne commence
à courir, sauf dissimulation, qu'à compter de la
présentation des comptes annuels par lesquels les dépenses
litigieuses sont mises indûment à la charge de la
société208(*).
S'agissant ensuite des infractions instantanées qui
s'exécutent sous forme de remises successives de fonds ou d'actes
réitérés, on peut citer l'escroquerie, le trafic
d'influence, le délit de prise illégale d'intérêt et
le délit de corruption209(*). Concernant ce dernier délit, il est admis,
depuis la réforme de 1943, qu'il est pleinement consommé,
dès que le fonctionnaire a sollicité des dons, des
présents ou des promesses ou dès que le corrupteur a
formulé des propositions illicites.
Or c'est ce point de départ retardé du
délai de prescription qui a posé un problème. La
difficulté apparaît spécialement dans le cas d'un pacte
délictueux remontant à plus de trois années, mais dont
l'exécution échelonnée se poursuit actuellement :
l'activité présente du corrupteur et du corrompu
n'échappe-t-elle pas à l'action publique, au prétexte que
l'accord initial est maintenant hors d'atteinte de la loi
pénale210(*) ?
Pour empêcher l'accomplissement éventuel de la
prescription, la Cour de cassation a décidé que si le
délit de corruption est une infraction instantanée,
consommée dès la conclusion du pacte de corruption entre le
corrupteur et le corrompu, il se renouvelle à chaque acte
d'exécution dudit pacte. Cette solution a été reprise par
plusieurs arrêtes qui utilisent la même formule, à
savoir :« Des délits successifs se sont renouvelés
aussi longtemps qu'a existé le concert frauduleux »211(*).
D'après le professeur Vitu Cette solution ne contredit
nullement l'affirmation, toujours exacte, que la corruption de personnes
chargées d'une fonction publique est une infraction instantanée.
Il ajoute que le législateur « attache équivalemment la
qualification de corruption consommée à la sollicitation d'une
rémunération, à l'acceptation d'offres ou de promesses, et
à la réception de dons ou de présents : ces divers
moments, qui peuvent être séparés dans le temps par des
intervalles plus ou moins longs, caractérisent tous identiquement
l'accomplissement de la corruption; à chaque manifestation de la
volonté coupable, le délit se manifeste à nouveau
complètement212(*) ».
A notre sens, deux remarques doivent être faites
à ce niveau. La première est relative au législateur
tunisien qui ne retarde pas le point de départ des infractions
instantanées. Cette solution respecte certes la règle de
l'interprétation stricte de la loi mais elle a pour inconvénient
d'empêcher la répression des faits de corruption.
La deuxième est destinée aux deux
législateurs, il est temps, en effet, que les délais de
prescription soient allongés afin d'éviter qu'ils soient un
obstacle à la répression. Nous proposons que ce délai soit
porté à cinq ans en matière de délit et à
quinze ans en matière de crime.
CHAPITRE II : LA COMPARAISON DES PEINES
La majorité des droits positifs classifient les peines
en peines principales et peines complémentaires, c'est le cas du droit
tunisien et le droit français. A ces deux peines viennent s'ajouter
d'autres peines, à titre d'exemple ; les peines accessoires, qui ne
figurent plus dans le nouveau code pénal français, ensuite les
peines alternatives et parfois et dans certaines législations des peines
disciplinaires. Ainsi, la comparaison portera sur les peines principales
(section 1) et les autres peines (section 2) à savoir ;
complémentaires, accessoires et disciplinaires.
SECTION I : LES PEINES PRINCIPALES
Aujourd'hui comme hier, en France, les peines principales sont
essentiellement la privation de liberté et l'amende. A ces deux peines
principales s'ajoute, en Tunisie, la peine de mort, qui a été
abolie en droit français, et le travail d'intérêt
général. En matière de corruption, en France comme en
Tunisie, les peines principales appliquées sont ; les peines
privatives de liberté (para 1) et l'amende (para2).
PARA I : Les peines privatives de
liberté
Si, en France, l'infraction de corruption est qualifiée
de délit depuis sa correctionnalisation en 1943, cette qualification
n'est pas, tout le temps, retenue en Tunisie puisque l'infraction peut
être qualifiée de crime ou de délit selon les peines
prévues et qui peuvent être criminelles ou délictuelles.
Ainsi, seront étudiée les peines correctionnelles (A) et les
réclusions criminelles (B).
A-Les peines correctionnelles
En Tunisie, la chambre correctionnelle est compétente
en matière de délits (article124CPPT). Ainsi, est du ressort de
la dite chambre toutes les infractions de corruption qui sont punies d'une
peine privative de liberté ne dépassant pas cinq ans
d'emprisonnement. A titre d'exemple ; la corruption active prévue
dans l'article 91 CPT alinéa 1er qui
dispose : « est punie de cinq ans d'emprisonnement .....,
toute personne qui aura corrompue ou tenté de corrompre par des dons ou
promesses de dons, ou présents ou avantages de quelque nature que ce
soit l'une des personnes visées à l'article 82 du présent
code(fonctionnaire public).. » et cet article ajoute que les
mêmes peines sont applicables à toute personne ayant servi
d'intermédiaire entre le corrupteur et le corrompu.
Une peine correctionnelle de cinq ans d'emprisonnement est
prévue pour le délit d'octroyer à autrui un avantage
injustifié par un acte contraire aux dispositions législatives et
réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté de
participation et l'égalité des chances dans les marchés
passés prévu par l'article 87 bis CPT.
A notre sens, la peine prévue pour ce délit
n'est pas compatible avec la gravité des faits reprochés.
Enfin, le délit prévu dans l'article 85 CPT qui
dispose : « . Si le fonctionnaire public ou assimilé
a accepté des dons, promesses, présents ou avantages de quelque
nature que ce soit en récompense d'actes qu'il a accomplis...est puni de
cinq ans de cinq ans d'emprisonnement... ».
Ce délit est constitué une fois le fonctionnaire
a accepté des dons ou présents après l'accomplissement ou
non de l'acte de la fonction, ce qui le distingue du cas prévu à
l'article 83 CPT relatif à l'acceptation des dons avant
l'accomplissement de l'acte.
L'article 85 CPT prévoit une peine de cinq ans
d'emprisonnement depuis la loi du 23 mai 1998 au lieu d'un an avant la
promulgation de la dite loi, ce qui affirme la politique répressive
suivie en Tunisie en matière de corruption.
En France, depuis la correctionnalisation de la corruption
par la loi du 16 mars 1943, le législateur prévoit dans tous les
cas de corruption une peine d'emprisonnement de dix ans, à l'exception
de l'article 434-9 CPF qui prévoit la réclusion criminelle de
quinze ans.
B-Les réclusions criminelles
La loi du 16 mars 1943 avait enlevé à la
corruption de fonctionnaires le caractère de crime qu'elle
possédait. Cependant cette loi avait laissé le caractère
criminel à deux hypothèses de corruption. Il s'agit dans le
premier cas de la corruption ayant pour objet un fait criminel comportant une
peine plus forte que l'emprisonnement, par exemple la corruption tendant
à la commission d'un faux en écritures publiques. Le
deuxième cas est celui de la corruption passive commise par des juges ou
des jurés à l'occasion de justice rendue en matière
criminelle. Ce sont les hypothèses qui étaient prévues
dans les articles 180,182 ACP. Mais en pratique, ce texte n'a pas reçu
d'application.
L'article 434-9 NCP n'a laissé subsister, qu'une seule
de ces causes d'aggravation des peines. En effet, lorsqu'un magistrat est
coupable de corruption passive au bénéfice ou au détriment
d'une personne faisant l'objet de poursuites criminelles ; la peine
principale encourue est la réclusion criminelle de quinze ans. Deux
différences séparent cette circonstance aggravante de celle
à laquelle elle a succédé : d'une part le juré
n'est plus mentionné ; d'autre part, sont visés non seulement les
juges siégeant à la cour d'assises, mais aussi tous ceux qui,
à un moment ou à un autre, sont mêlés à la
poursuite ou à l'instruction d'une affaire criminelle : membres du
parquet, juge d'instruction, juge des libertés et de la
détention, membres de la chambre d'accusation213(*).
Cette sévérité s'explique par la
gravité des faits reprochés aux magistrats, et les
conséquences désastreuses, que peut entraîner un tel pacte
entre les parties, sur la liberté des individus et le maintien de
l'ordre public.
Il faut souligner la notable simplification du système
actuel, qui ne fait plus varier, contrairement au droit
antérieur214(*),
la répression selon que l'accomplissement ou l'abstention porte sur un
acte facilité par la fonction ou un acte de la fonction.
En Tunisie, il n'y a pas eu une correctionnalisation de
l'infraction de corruption, au contraire, le législateur tunisien a
aggravé la durée des peines privatives de liberté avec la
réforme du 23 mai 1998. Il faut signaler d'abord, qu'en Tunisie, la
distinction entre réclusions criminelles et emprisonnement n'existe pas
puisque toutes les peines privatives de liberté, en matière
criminelle ou délictuelle sont appelées ; des peines
d'emprisonnement.
Sachant qu'en droit tunisien les infractions punies d'une
peine d'emprisonnement supérieure à cinq ans sont
qualifiées de crimes, on remarque que le caractère criminel de la
dite infraction est plus fréquent dans la législation tunisienne
par rapport au droit français qui limite ce caractère au seul cas
de corruption passive des magistrats. Il convient, donc, d'étudier les
cas où la corruption est punie d'une peine d'emprisonnement
criminelle.
Il faut signaler que même si les crimes sont punis, en
Tunisie, d'une peine d'emprisonnement ne pouvant être inférieure
à cinq ans, le législateur tunisien a prévu deux paliers
qui sont loin du minimum prévu (5 ans).
Le palier supérieur, soit vingt ans d'emprisonnement,
concerne le fonctionnaire public ou assimilé qui a provoqué la
corruption prévue par l'article 84 CPT et la corruption passive de
magistrat prévue par l'article 88 CPT qui
dispose : « est puni de vingt ans d'emprisonnement, le
juge, qui à l'occasion d'une infraction susceptible d'entraîner
pour son auteur l'emprisonnement à vie ou la peine de mort, soit en
faveur, soit au préjudice de l'inculpé » .
On remarque que dans les deux législations il y a une
aggravation des peines privatives de liberté lorsque l'auteur de
l'infraction a la qualité de magistrat. De plus, en Tunisie,
contrairement à la législation française, on parle
toujours de « l'inculpé » au lieu du «
mis en examen » malgré l'atteinte grave à la
présomption d'innocence.
Le deuxième palier, est de dix ans d'emprisonnement,
concerne la corruption passive de fonctionnaire public ou assimilé
prévue par l'article 83 CPT alors que la peine prévue pour ce
crime, avant la réforme de mai 1998, était de cinq ans
d'emprisonnement. Est puni de dix ans d'emprisonnement la corruption active de
fonctionnaire public ou assimilé accompagnée de contrainte par
voies de fait ou menaces exercées sur eux personnellement ou sur l'un
des membres de leur famille conformément au dernier paragraphe de
l'article 91 CPT.
On remarque que, pour ce second palier, même si
l'infraction est qualifiée de crime en Tunisie, la durée des
peines privatives de liberté est la même qu'en droit positif
français qui qualifie l'infraction de délit. Ainsi, il y a une
divergence, entre les deux droits, quant à la qualification de
l'infraction et une convergence quant à la durée des peines
privatives de liberté.
PARA II : L'amende
Les législateurs utilisent l'amende comme une peine
qui vient s'ajouter à la peine privative de liberté à
titre de peine principale. Ils décident, soit d'imposer au juge de les
prononcer l'une et l'autre, soit lui donner le choix entre les deux. Toutefois,
il existe deux techniques relatives à l'application de l'amende ;
la première est la technique des amendes proportionnelles (A) et la
seconde est celle des amendes fixes (B). ainsi, la comparaison relative
à l'amende portera sur la technique utilisée par les
législateurs en matière de corruption.
A- les amendes proportionnelles
En France, dans l'ancien système, pour la corruption de
fonctionnaire, l'amende pouvait être double de la valeur des promesses
agréées ou des choses reçues ou demandées. Cette
technique de l'amende proportionnelle a été abandonnée
par le nouveau code pénal qui prévoit des amendes fixes.
En Tunisie, le législateur, par la réforme du 23
mai 1998, a augmenté le taux des amendes, en plus il a insisté
sur l'obligation qu'elles soient appliquées par les juges lors de la
prononciation de la peine privative de liberté.
Ainsi, l'amende minimum est de mille dinars (700euros), au
lieu de mille francs au sein des anciennes dispositions. Et de vingt mille
dinars, pour le taux maximal.
A noter, qu'en Tunisie, malgré la réforme, le
législateur utilise la technique des amendes proportionnelles et la
technique des amendes fixes, contrairement au législateur
français qui s'est limité à la dernière
seulement.
La technique des amendes proportionnelles est utilisée
à deux reprises dans le cadre de la corruption, d'abord on la trouve
pour la corruption passive de fonctionnaire public ou assimilé (
article 83 CPT) et dans le cas où la corruption passive est due à
la provocation du fonctionnaire public ou de l'assimilé (84 CPT).
A ce niveau se pose le problème de la nature des choses
agréées ou sollicitées, si elles ont une valeur non
matérielle à titre d'exemple ; un rapport sexuel, il serait
impossible d'appliquer la technique des amendes proportionnelles. On peut
penser à l'article 82 CPT qui dispose : « Sans qu'elle
puisse être inférieure à dix milles dinars ( sept milles
euros) ». Ainsi, dans ce cas c'est le minimum prévue par
la loi qui sera applicable.
Concernant l'application des amendes, le juge est tenu de les
appliquer depuis la loi du 23 mai 1998, alors qu'il avait le choix quant
à leur application auparavant ce qui prouve la politique
répressive suivie par le législateur tunisien en matière
de corruption.
B-Les amendes fixes
Le nouveau code pénal 1994 a remplacé la
technique des amendes proportionnelles par des amendes fixes215(*). Désormais, il y a
quatre nouveaux paliers ; Le palier supérieur est de (225000 euros
) qui correspond à la réclusion criminelle de quinze ans pour la
corruption passive des magistrats prévue à l'article 434-9 CPF.
Vient ensuite le palier de (150 000 euros) et il accompagne
systématiquement la peine de dix ans d'emprisonnement. Puis, le palier
de ( 75 000 euros) est jumelé avec la peine de cinq ans d'emprisonnement
et enfin, le palier inférieur de (30 000 euros) qui va de pair avec la
peine de deux ans d'emprisonnement.
Pour certains auteurs, la technique des amendes fixes
adoptée par le législateur est regrettable et ils demandent
l'application de l'ancienne technique des amendes proportionnelles216(*).
En Tunisie, le législateur fait appel aux deux
techniques, il utilise d'une part les amendes proportionnelles et d'autre part
les amendes fixes. Il existe, comme c'est le cas en France, quatre paliers. Le
premier palier est de dix milles dinars qui correspond à la corruption
active de fonctionnaire public en vue d'accomplir un acte lié à
sa fonction mais non sujet à contrepartie accompagnée de
contrainte par voies de fait ou de menaces.
Le deuxième palier est de cinq milles dinars qui
correspond à la corruption active de fonctionnaire public ou
assimilé prévue par l'article 85 CPT, ainsi que la corruption
active de fonctionnaire public en vue d'accomplir un acte lié à
sa fonction, même juste, mais non sujet à contrepartie, ou de
faciliter l'accomplissement d'un acte lié à sa fonction, ou de
s'abstenir d'accomplir un acte qu'il est de son devoir de faire. L'amende est
appliquée, dans ce cas, pour la tentative et elle est prononcée
à l'encontre de l'intermédiaire.
Le troisième palier est de deux milles dinars et il
est prévu pour la tentative de voies de fait ou menaces qui n'a eu aucun
effet. Le dernier palier est de mille dinars d'amende et il correspond à
la tentative de corruption qui n'a eu aucun effet.
On remarque qu'en droit tunisien, contrairement au droit
français, la tentative est punissable, de plus aucune peine d'amende
n'est prévue pour la corruption active ou passive des magistrats, ces
derniers ne risquent que l'emprisonnement comme peine principale, ce qui est
regrettable, à notre sens, vu la gravité des faits qui leur sont
reprochés.
SECTION II : LES AUTRES PEINES
Sous l'empire du code de 1810, on parlait des peines
principales, complémentaires et accessoires. Les peines accessoires
s'ajoutent automatiquement à la peine principale et elles n'ont pas
à être prononcées expressément par le juge.
Après la promulgation du nouveau code pénal il convient de
parler des peines principales, alternatives et
complémentaires217(*).
En principe, les peines accessoires ou automatiques ont
disparu avec le nouveau code pénal et ce par application de l'article
132-17 qui dispose : « aucune peine ne peut être
appliquée si la juridiction ne l'a pas expressément
prononcée ».
En Tunisie, la distinction est faite entre peines principales
et peines complémentaires. A noter, que le législateur tunisien
s'il utilise le terme « complémentaire » dans
le texte arabe, il le traduit dans le texte français
de « peines accessoires ». Cette faute de traduction
doit être, à notre sens, modifiée vu la différence
qui existe entre les peines complémentaires et les peines accessoires en
droit comparé, à titre d'exemple, le droit français.
Les peines complémentaires, en Tunisie, sont
prévues dans l'article 5 CPT et certaines d'entre elles sont reprises
dans les dispositions relatives à la corruption dans les articles 83 CPT
et suivant. Il s'agit de la confiscation et l'interdiction d'exercer les
fonctions publiques.
En France, des peines complémentaires viennent
s'ajouter aux peines principales. Ces peines sont indiquées par
l'article 432-17 CPF.
A noter que malgré la disparition des peines
accessoires celles-ci subsistent en matière de corruption dans deux cas.
Ainsi, seront étudiées ; les peines complémentaires(
para 1) et les peines accessoires(para2).
PARA I : Les peines
complémentaires
L'article 432-17 CPF prévoit les peines
complémentaires applicables en matière de corruption, on commence
par l'interdiction des droits civils, civiques et de famille, puis on a
l'interdiction d'exercer une fonction publique ou d'exercer l'activité
professionnelle ou sociale, ensuite la confiscation et enfin l'affichage ou la
diffusion de la décision prononcée. Cette dernière peine
est prévue en droit tunisien comme peine complémentaire, en
effet, l'article 5 CPT parle de `'la publication, par extraits, de certains
jugements''.
En Tunisie, les peines complémentaires sont
prévues dans l'article 5 CPT et deux d'entre elles sont reprises dans
le cadre de la corruption ; la confiscation et l'interdiction d'exercer
une fonction publique.
Ainsi, la comparaison portera sur l'interdiction d'exercer une
fonction publique(A) et la confiscation(B).
A-L'interdiction d'exercer une fonction
publique
L'interdiction d'exercer une fonction publique ou d'exercer
l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à
l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise,
prévue par l'article 432-17 CPF peut être définitive ou
pour une durée de cinq ans. Elle existe pour la corruption passive et
active des fonctionnaires nationaux mais limitée à cinq ans, elle
est prévue pour la corruption passive et active des fonctionnaires
européens et pour la corruption d'agents publics étrangers mais
limitée à cinq ans et enfin pour la corruption active ou passive
aux fins d'obtenir de faux certificats. En revanche, cette interdiction
disparaît dans le cas de la corruption active ou passive de magistrat
(art 434-44 CPF) et pour la corruption de salarié (art l 152-6 C
Travail).
Selon certains auteurs ;'' il est vraiment insensé
de laisser officier un juge corrompu,...il peut paraître regrettable de
ne pouvoir leur interdire l'exercice d'une activité professionnelle
218(*)''.
En Tunisie, l'interdiction d'exercer des activités
professionnelles est prévue dans l'article 83 CPT, relatif à la
corruption passive de fonctionnaire, qui ajoute l'interdiction de gérer
les services publics et de les représenter. Cette interdiction ne
s'applique qu'aux personnes ayant la qualité de fonctionnaire public ou
assimilé, d'où le corrupteur et l'intermédiaire
échappent à la répression, ce qui est, à notre
sens, regrettable puisque l'auteur de la corruption active ou
l'intermédiaire peuvent avoir la qualité de fonctionnaire public
mais ils ne se voient pas appliquer cette peine complémentaire.
On remarque que si cette peine fait seulement défaut
pour la corruption active et passive de magistrat et la corruption de
salarié en France, elle fait défaut, de prime abord, dans tous
les cas de corruption en Tunisie excepté la corruption passive de
fonctionnaire public. Cet oubli a été évité par le
législateur tunisien.
En effet, l'article 115 CPT dispose que « dans
tous les cas prévus dans le présent chapitre, le tribunal pourra
faire application des peines accessoires, ou l'une d'entre elles,
édictées par l'article 5 CPT ». Sachant que le chapitre
mentionné ci-dessus est relatif aux infractions commises par les
fonctionnaires publics ou assimilés dans l'exercice ou à
l'occasion de l'exercice de la fonction, dont fait partie la corruption. Quant
à l'article 5 CPT il énumère les peines
complémentaires parmi lesquelles on trouve l'interdiction d'exercer une
fonction publique.
On remarque que cet article s'applique pour tous les cas de
corruption et l'interdiction d'exercer une fonction publique n'est plus
limitée au seul cas de corruption passive de fonctionnaire prévue
par l'article 83 CPT.
En conclusion, l'interdiction d'exercer une fonction
publique si elle est limitée à des délits de corruption
bien déterminés en France, elle peut être appliquée
par les juridictions tunisiennes pour tous les cas de corruption.
B-La confiscation
D'après l'article 94 CPT `' dans tous les cas de
corruption, les choses données ou reçues sont confisquées
au profit de l'Etat''.
Cet article parle des `'choses données ou
reçues `', c'est à dire un bénéfice ayant une
valeur matérielle. Cette interprétation n'est pas admise par
toute la doctrine, certains auteurs pensent que la confiscation doit porter sur
toutes les choses données ou reçues quelle que soit leur
nature219(*).
On remarque que la confiscation est une peine obligatoire qui
doit être prononcée à chaque fois que la culpabilité
des auteurs est établie et qu'elle doit être faite au profit de
l'Etat.
En cas de perte ou de cession des choses reçues c'est
la valeur de celles-ci qui sera confisquée conformément à
l'article 29 CPT220(*),
mais on voit mal comment sera déterminée la valeur d'un
bénéfice moral tel qu'un rapport sexuel ?
En France, l'article 432-17 CPF prévoit ; La
confiscation, au profit du Trésor, des sommes ou des objets
irrégulièrement reçus par l'auteur de l'infraction,
à l'exception des objets susceptibles de restitution.
La confiscation a posé un certain nombre de
problèmes auxquels la jurisprudence, sous l'empire de l'ancien Code
pénal, a apporté des solutions qui gardent leur valeur pour
l'application des textes actuels.
D'abord, la confiscation ne peut être prononcée
que si la culpabilité du corrupteur ou celle du corrompu est retenue,
cependant à cause de l'indépendance des infractions de corruption
passive et de corruption active, il suffit de la culpabilité d'un seul
pour justifier la mesure. Ainsi si le corrupteur échappait aux
poursuites ou était acquitté, la confiscation devrait cependant
être prononcée et le corrupteur serait sans droit pour
réclamer les choses livrées221(*).
Ensuite, la confiscation ne peut porter que sur les choses
livrées ou leur valeur ; elle ne peut donc être
ordonnée si les choses ont été seulement
promises222(*).
Enfin, c'est la chose elle-même que l'on doit
confisquer, mais si cette chose ne se retrouve plus en nature on en confisque
l'équivalent en valeur223(*).
Deux remarques doivent être faites à ce niveau,
la première est relative à toutes les peines
complémentaires, par contre la deuxième elle est exclusivement
réservée à la confiscation..
Toutes les peines complémentaires
précitées sont des peines facultatives laissées par
conséquent à l'entière discrétion de la
juridiction puisque l'article 432-17 CPF dispose que « Dans tous les
prévus par le présent chapitre, peuvent être
prononcées, à titre complémentaires les peines
suivantes... ».
A notre sens, il est regrettable, du moins pour la
confiscation, qu'elles soient facultatives pour le juge. Il serait
préférable que le législateur français impose aux
juges répressifs d'ordonner la confiscation dans tous les cas de
corruption tel qu'il est le cas dans la législation tunisienne.
On remarque, en second lieu, que la peine
complémentaire de confiscation est prévue dans tous les cas de
corruption à l'exception de la corruption de salarié, or dans
toute forme de corruption il est utile d'enlever au corrompu ou au corrupteur
le bénéfice de son marché illicite.
Il serait préférable, donc, de
généraliser cette peine complémentaire à toutes les
infractions de corruption tel qu'il est le cas dans le Code pénal
tunisien.
PARA II : Les peines accessoires ;
subsistent-elles encore ?
On a déjà vu que les peines accessoires sont
abrogées par le nouveau code pénal. Cependant, deux peines
accessoires subsistent malgré leur condamnation en 1994(A).Ces peines
applicables d'une manière automatique n'existent pas dans la
législation tunisienne, mais elles sont remplacées par des peines
disciplinaires qui sont prononcées par l'administration à
laquelle appartient le fonctionnaire public(B)
A-Les peines accessoires
La décision du conseil constitutionnel du 15 mars
1999224(*) a
estimé contraire au principe de nécessité les peines
automatiques, dites aussi peines accessoires. Toutefois, il y a deux peines qui
ne sont pas touchées par cette fameuse décision.
La première de ces peines est l'interdiction d'exercer
une profession commerciale ou industrielle attachée à une peine
criminelle par exemple la corruption criminelle des magistrats prévue
dans l'article 434-9 alinéa 3 CPF. Attachée, d'autre part,
à une condamnation d'au moins trois mois fermes d'emprisonnement pour de
nombreux délits correctionnels ce qui inclut les délits de
corruption à l'exception de ceux d'agents publics communautaires ou
étrangers. Cette interdiction est d'une durée minimale de cinq
ans.
La deuxième peine accessoire résulte de
l'article L.7 du code électoral dû à la loi du 20 janvier
1995225(*). Ce texte
prive du droit d'être inscrit sur la liste électorale pendant un
délai de cinq ans à compter de la date à laquelle la
condamnation est devenue définitive. Mais cette peine n'est pas
applicable en cas de corruption active ou passive de magistrat. On trouve une
peine complémentaire en droit tunisien, applicable en matière de
corruption, prévue par l'article 5 CPT qui se rapproche de cette peine
accessoire; il s'agit de l'interdiction d'exercer le droit de vote.
On remarque que plusieurs peines complémentaires ou
accessoires ne sont pas applicables lorsqu'il s'agit de la corruption de
magistrats, ce qui représente, à notre sens, une lacune du droit
positif français.
B-Les peines disciplinaires
D'après l'article 51 de la loi relative à la
fonction publique de 1983 les peines disciplinaires sont prononcées par
le dirigeant de l'administration à laquelle appartient le fonctionnaire
public. Il existe deux types de peines ; d'abord les peines disciplinaires
de premier degré, il s'agit de l'avertissement et le blâme.
Ensuite, les peines disciplinaires de second degré, il s'agit de la
rétrogradation, la mutation obligatoire, le renvoi temporaire pour une
durée maximale de trois mois avec suspension du versement du salaire et
le renvoi définitif.
A noter que depuis une réforme de 1997226(*) le dirigeant de
l'administration peut déléguer le pouvoir de prononcer des
sanctions disciplinaires à certains substituts.
De plus, l'administration doit s'abstenir de prononcer une
peine disciplinaire si au même moment une action publique est
engagée devant les juridictions de droit commun et ce jusqu'à ce
qu'un jugement définitif soit prononcé par celles-ci. En cas de
décision de condamnation prononcée par le juge du droit commun,
celle-ci est imposée à l'administration qui doit en tenir compte
lors de la prononciation d'une peine disciplinaire. D'un autre coté, en
cas de décision d'acquittement prononcée par les juridictions du
droit commun, l'administration n'est pas obligée d'en tenir en compte
lors de la prononciation d'une peine disciplinaire. Cette solution est le fruit
de la jurisprudence du tribunal administratif qui est unanime sur ce
point227(*).
PARA III : L'inapplication de la peine : une
particularité en Tunisie
L'article 93 CPT dispose : «Est absous le corrupteur
ou l'intermédiaire qui, avant toute poursuite, révèle
volontairement le fait de corruption et, en même temps, en rapporte la
preuve ». Le législateur a gardé le contenu de cet
article sans le modifier même après la réforme du 23 mai
1998 et on remarque qu'il ne concerne que le corrupteur et
l'intermédiaire.
Cet article constitue une exception à la politique
répressive adoptée par le législateur tunisien, en effet,
vu la difficulté de découvrir les faits de corruption et de les
réprimer, le législateur a exonéré le corrupteur ou
l'intermédiaire des peines s'ils permettent la découverte et la
preuve de ces faits.
Le législateur a limité l'inapplication des
peines dans le cas de dénonciation d'où il faut étudier
ses conditions(A) et ses effets(B).
A-Les conditions de la dénonciation
Par la dénonciation, le législateur veut dire,
l'information des autorités compétentes de la commission de
l'infraction et de ses auteurs. A noter que la simple narration des faits n'a
aucune valeur puisque l'article 93 CPT exige explicitement que le
dénonciateur « en rapporte la preuve ».
Ainsi, ce dernier est tenu d'informer les autorités de tous les
détails, relatifs à l'infraction, qui permettent de la prouver et
de préciser le rôle de chacun des auteurs228(*).
Signalons que la dénonciation se limite à la
corruption passive, même si le texte français dispose
« le fait de corruption » sans préciser s'il s'agit
de la corruption passive ou active, puisque le texte arabe, de son coté,
évoque explicitement la corruption passive, et par application des
dispositions du code de procédure civile et commerciale c'est le texte
arabe qui a la primauté sur le texte français qui n'a qu'une
valeur indicative. Ainsi, l'auteur d'une tentative de corruption active, qui
n'a pas eu d'effet, n'est pas exempt de peine s'il dénonce les faits
parce que le but de cette disposition est la découverte du fonctionnaire
public corrompue afin de protéger la fonction publique.
D'un autre coté, il faut que la dénonciation
soit faite avant la découverte de l'infraction par les autorités
compétentes et l'arrestation des auteurs et l'ouverture d'une
information contre eux conformément à la version française
de l'article 93 CPTqui dispose « avant toute poursuite ». A
noter, que la version arabe exige, de son coté, que la
dénonciation soit faite avant tout jugement. On remarque ainsi que La
version française est plus conforme à la notion de
dénonciation qui, par la logique, doit être faite avant la phase
de jugement et la découverte de l'infraction. D'où la
nécessité de modifier la version arabe de cet article et de la
rendre conforme à la version française.
En droit comparé, certains législations ont
prévu la dénonciation comme moyen d'exemption de peines,
à titre d'exemple le droit égyptien. Ainsi l'article 108 du Code
pénal égyptien dispose : « Est absous le
corrupteur ou l'intermédiaire qui, avant tout jugement,
révèle volontairement le fait de corruption ou
l'avoue ». On remarque que cet article prévoit la
dénonciation et l'aveu qui peuvent être faits à tout moment
et même après la poursuite. A notre sens, cette disposition permet
l'impunité du corrupteur ou de l'intermédiaire puisqu'ils peuvent
échapper à la répression, si les faits de corruption sont
découverts par les autorités compétentes, en les
avouant229(*).
B-Les effets de la
dénonciation
D'après l'article 93 CPT : «Est absous le
corrupteur ou l'intermédiaire ». Ainsi l'exemption de la peine
ne concerne que le corrupteur et l'intermédiaire, par contre elle ne
concerne pas le corrompu. L'inapplication de la peine doit être
obligatoirement prononcer d'office par le juge dans sa décision, et le
corrupteur ou l'intermédiaire peut l'évoquer à n'importe
quelle phase de la procédure.
D'un autre coté le corrupteur ou l'intermédiaire
est absous à condition que le fonctionnaire corrompu ait accepté
les dons ou promesses qui lui sont offerts. Ainsi, en cas de refus
d'acceptation des dons, la dénonciation n'a aucun effet. En plus, seul
le dénonciateur, le corrupteur ou l'intermédiaire,
bénéficiera de l'inapplication de la peine et elle ne sera pas
accordée aux deux. A notre sens, il paraît inadmissible que le
corrupteur soit absous, si c'est lui qui dénonce les faits de
corruption, et l'intermédiaire, qui a un rôle moins important que
le premier, soit puni.
Enfin, on a vu que le corrompu n'est pas absous, et que
l'exemption de la peine ne concerne que le corrupteur et
l'intermédiaire. C'est pour cette raison que certains juristes tunisiens
ont proposé au législateur d'exonérer le corrompu de la
peine une fois qu'il a rompu le pacte et a rendu les dons qu'il a
acceptés de son plein grée avant d'accomplir ce qui lui a
été demandé et surtout avant toute poursuite.
Signalons enfin que le législateur français ne
prévoit pas ce procédé en matière de corruption, ce
qui est à notre sens regrettable. Nous pensons qu'il aurait pu, et
même dû, le faire suite à la loi du 9 mars 2004 qui a
institué un grand nombre d'exemptions et de réduction de peine
concernant certaines infractions en cas de dénonciation. Le texte de
principe est l'article 132-78 CPT qui prévoit une indulgence à
deux niveaux. D'une part, en cas de tentative d'un crime ou d'un délit,
le participant est exempt de peine si en ayant averti l'autorité
administrative ou judiciaire, il a permis d'éviter la réalisation
de l'infraction et, le cas échéant, d'identifier les auteurs et
complices. D'une autre part, le cas d'infraction consommée, la
durée de la peine privative de liberté encourue par le
participant est réduite à moitié si, ayant averti les
autorités compétentes, il a permis de faire cesser l'infraction,
d'éviter que l'infraction ne produise un dommage ou d'identifier les
autres auteurs ou complices.
Cette technique concerne plusieurs infractions.230(*) Toutefois, le délit
de corruption n'en fait pas partie ce qui est fort regrettable puisqu'une telle
technique permettrait d'atteindre des faits de corruption dissimulés ou
clandestins.
CONCLUSION
En conclusion ; on remarque que les deux
législations font de la corruption un complexe de deux infractions
distinctes : la corruption passive et active, la première imputable
à la personne corrompue, la seconde au corrupteur. Toutefois, si ces
deux infractions sont punies des mêmes peines en droit pénal
français, il en est autrement en droit pénal tunisien qui puni
plus sévèrement la corruption passive puisqu'elle est
considérée plus grave que la corruption active. De plus, il y a
eu une correctionnalisation de l'infraction de corruption en France depuis la
loi de 1943, alors qu'en Tunisie, suite à la réforme de 1998, la
majorité des infractions de corruption sont désormais
qualifiées de crimes.
D'un autre coté, si la corruption passive se consomme,
dans les deux législations, par la simple sollicitation ou
l'agrément des dons, les solutions ne sont pas identiques en ce qui
concerne la corruption active. En effet, cette dernière est
réputée consommée en France par la simple proposition
d'offres ou par le fait de céder aux sollicitations du corrompu, alors
qu'en Tunisie pour que l'infraction soit consommée il faut
l'exécution du marché illicite entre le corrupteur et le corrompu
à défaut on ne peut parler que de tentative de corruption
active.
On peut remarquer aussi que le législateur
français devance son homologue tunisien par le fait d'incriminer la
corruption des salariés et des fonctionnaires étrangers, par la
création de juridictions spécialisées compétentes
en matière économique et financière et par l'utilisation
de procédés destinés à prévenir les
dévoiements possibles et la conclusion d'opérations suspectes
tels que le service central de prévention de la corruption,
chargé de centraliser les renseignements nécessaires à la
détection et à la prévention des faits de corruption.
La jurisprudence française devance, elle aussi, celle
des tribunaux répressifs tunisiens, il suffit de rappeler sa position en
ce qui concerne le point de départ du délai de prescription, en
matière de corruption, qui a été retardé au jour de
l'exécution du pacte illicite.
Il serait donc préférable que le
législateur tunisien intervienne pour mettre à pied
d'égalité la corruption passive et la corruption active et
d'élargir ces incriminations afin d'englober de nouvelles
catégories de personnes tels que les salariés. Quant au droit
pénal de forme une juridiction spécialisée en
matière économique et financière serait la bienvenue.
En France, il est regrettable que le législateur du 9
mars 2004 n'ait pas inséré le délit de corruption dans la
liste des infractions de criminalité organisée, prévue par
l'article 706-73 CPPF. Ces infractions obéissent à des
règles procédurales fortement dérogatoires au droit commun
permettant une meilleure répression. Il serait donc
préférable qu'elle soit ajoutée à cette liste lors
de la prochaine réforme.
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* 1 W. Jeandidier, Du
délit de corruption et des défauts qui l'affectent JCP G 2002, I,
166.
* 2 A. Chauveau et F.
Hélie ;Théorie du Code pénal, t. II, Marchal et
Billard, 5 éd. 1872, n° 833.
* 3 Pradel- J ; droit
pénal général éd Cujas 2002-2003.
* 4 A. Vitu ; J-CL
Pén art 432-11 n°16.
* 5 Voir infra ;
L'aspect de l'activité délictueuse dans la corruption active.
* 6 Voir article 95 CPT et
suivant. Et l'article 432-10 CPF.
* 7 R. Garraud, Traité
théorique et pratique du droit pénal français, Sirey, t.
IV : 3e éd., n° 1500.
* 8 Contrairement au droit
français où le trafic d'influence est prévu par le
même article relatif à la corruption, le Code pénal
tunisien le prévoit dans un article distinct.
* 9 Pour plus de
précisions, Voir A- Vitu J-Cl Pén art 432-11 N°122.
* 10 La Loi des XII Tables.
Voir notamment H.Arfa mémoire de fin d'études à l'E.N.M
« corruption active et passive »95-96 p9.
* 11 A. Chauveau et F.
Hélie, Théorie du Code pénal, t. II, Marchal et Billard, 5
éd. 1872, t. II, n° 831.
* 12 La vache verset 184. Le
Coran : traduit par Sadok Mazigh.
* 13 La table servie verset 46.
Le Coran : traduit par Sadok Mazigh.
* 14 Khalife musulman connu
sous le nom du « Juste ».
* 15 Khalife musulman et
disciple du prophète Mahomet.
* 16 Cette peine était
applicable aux membres de la législature.
* 17 . Dans l'ordre
chronologique ;les lois des 13 mai 1863, 9 mars 1928, 16 mai 1943 et
l'ordonnance du 8 février 1945.
* 18 Voir en ce sens A-
Vitu ; J-CL Pén art 432-11n° 38 et suivant.
* 19 Voir annexes :
tableau de comparaison entre les anciennes et les nouvelles dispositions du
Code pénal relatives à la corruption suite à la
réforme du 23 mai 1998.
* 20 Vitu A, J-Cl Pén
art 432-11 n°26 et suivant.
Voir notamment l'article 32 CPT relatif à la
complicité ; qui consacre le système d'emprunt de
criminalité et de pénalité.
* 21 C'est la solution que
préconisait R. Garraud « Traité théorique
et pratique du droit pénal français » t. IV »
: Sirey, 3e éd., n° 1518 s.
* 22 Vitu A, J-Cl Pén
art 432-11 n°1 et suivant.
* 23 Ibid
* 24 Transparency
International ; rapport mondial sur la corruption 2003. Thème
spécial : l'accés à l'information, éd
Karthla.
* 25 JOCE n° C 316, 27
nov. 1995, p. 49.
* 26 JOCE n° C 195, 25
juin 1997, p. 1.
* 27 A. VITU,
Les préoccupations actuelles de la politique criminelle
française dans la répression de la corruption, in Les principaux
aspects de la politique criminelle moderne : Recueil d'études à
la mémoire de H. Donnedieu de Vabres, 1960, p. 134 s.
* 28 ibid
* 29 cass crim 26
décembre 1929 bull crim n° 287
* 30 cass crim 7 juillet 1949
bull crim n° 229
* 31 cass crim 21 janvier 1959
bull crim n°59
* 32 cass crim 8 mars 1966 bull
crim n°83
* 33 Vitu J-Cl Pénal,
Art 432-11 n°55
* 34 Ibid
* 35 Mahmoud nejib hosni
« manuel de droit des peines » partie
spéciale ; infractions contre l'intérêt public p 17
* 36 Voir annexe tableau de
comparaison des dispositions relatives à la corruption suite à
la réforme du 23 Mai 1998
* 37 kmakem ridah , les
infractions de corruption telles que modifiées par la nouvelle loi,
revue de jurisprudence et de législation juin 1998 p 11
* 38 journal officiel de la
République Tunisienne n° 29, 6 mai 1998 ; débats
parlementaires p5
* 39 La loi n° 98-33 du 23
mai 1998
* 40 kaldi hejer ;
mémoire de fin d'étude à l'ENM
1998-1999 ; « les nouvelles dispositions
législatives en matière de corruption ».
* 41 Vitu J-Cl Pénal,
Art 432-11 n°55
* 42 Voir GATTEGNO Dr
Pén Spé, Paris, Dalloz 1995 n°600 p312
* 43 voir infra « une
divergence quant aux personnes investies d'un mandat électif
public ».
* 44 , Cass. crim., 16 oct.
1985 : Gaz. Pal. 1986, 1, p. 152, concernant un étudiant qui avait
tenté, sans succès, de corrompre un professeur des
Facultés de droit afin d'obtenir de lui une note satisfaisante à
un examen de DEUG
* 45 Cass. crim., 26
déc. 1919 : Bull. crim., n° 287.
* 46 Cass. crim., 22
févr. 1855 : Bull. crim., n° 54.
* 47 Cass. crim., 8 juill.
1813 : S. 1813, 1, p. 391 L'ancien article 177 avait été
appliqué à un huissier, chargé de l'exécution d'une
contrainte par corps
* 48 Hafedh Ben Saleh :
l'unité de service p 6
* 49 débats
parlementaires relatifs à la loi du 23 mai 1998.
* 50 les magistrats sont
considérés comme dépositaires de l'autorité
publique conformément à l'article 82 CPT mais le
législateur a prévu des textes spéciaux concernant la
corruption de magistrats (voir art 88 et 89 CPT)
* 51 Frédéric
Desportes ; J-Cl Pén : DISCRIMINATIONS PAR DES PERSONNES
EXERÇANT UNE FONCTION PUBLIQUE
* 52 Vitu ; J-CL
Pén art 432-11 N°57
* 53 Cass. crim., 11 mai 1876 :
Bull. crim., n° 117
* 54 Cass. crim., 2 avr. 1998
note Marc Seconds Recueil Dalloz 1999, Sommaires commentés p. 158.
* 55 Cass. crim., 27
févr. 2002 : Bull. crim., n° 48.
* 56 Cass. crim., 19 mars 2003
note Marc Seconds Recueil Dalloz 2004, Sommaires commentés p 315.
* 57 Article 17 de la loi
N°112 du 12 déc 1983 relative au statut général des
personnels de l'Etat et des collectivités locales et les
établissements public à caractère administratif.
* 58 cass crim pén
N°1925 du 7 oct 1977 B.C.Cass 1977 p156.
* 59 Hafedh Ben Salah ;
cour de droit administratif 2éme année droit 1994/1995.
* 60Auparavant la cour de
cassation ne considérait pas les fonctionnaires d'établissements
bancaires non Etatiques comme fonctionnaires publiques aux termes de l'ancien
art 82 CPT. selon la cour de cassation, dans arrêt du
7-9-1961 « la société tunisienne de banque est une
personne morale soumise à des lois spéciales d'où ces
fonctionnaires ne peuvent être considérés comme
fonctionnaires publics ou assimilés conformément à
l'article 82 CPT ».
* 61 R. GARRAUD,
Traité théorique et pratique du droit pénal
français t. IV : Sirey, 3e éd., n°1522 s
* 62 A. VITU,
Les préoccupations actuelles de la politique criminelle
française dans la répression de la corruption, in Les principaux
aspects de la politique criminelle moderne : Recueil d'études à
la mémoire de H. Donnedieu de Vabres, 1960, p. 134 s.
- la jurisprudence n'avait pas hésité à
étendre l'ancien article 177 à des élus : ainsi un membre
du conseil municipal de Paris (Cass. crim., 29 mai 1886 : Bull. crim., n°
19 )et pour des membres du Sénat ou de la Chambre des
députés (Cass. crim., 24 févr. 1893 : Bull. crim., n°
49)
* 63 A.Vitu ; J-CL
Pén 432-11 n°61.
* 64 ibid
* 65 W. Jeandidier, Du
délit de corruption et des défauts qui l'affectent. JCP G 2002,
I, 166
* 66 Voir art 177 ACP
* 67 Takari Bechir ;
« institutions administratives et droit administratif ».
Cour de 2me année Droit.1995/ 1996
* 68 voir article 14 de la loi
n°80 de 1994 relative à l'organisation de la fonction
d'interprète assermentés : « l'interprète
assermenté est considéré comme assimilé au
fonctionnaire public conformément à l'article 82 du CP et lui
sont applicables les articles83 et suivant du même code ».
* 69 A Vitu, J-CL Pén
art 434-9 ; CORRUPTION DES AUTORITÉS JUDICIAIRES n°5.
* 70 la loi n°2004-204 du
9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la
criminalité ; article 54.
* 71 A-Vitu op cit
* 72 Pradel Jean, manuel de
procédure pénale 11émé éd 2002 /2003
p491
* 73 Arfa Hichem
« corruption active et passive » mémoire de fin
d'étude à l'E.N.M 1995/1996
* 74 Article premier de la loi
N°112 du 12 déc 1983 relative au statut général des
personnels de l'Etat et des collectivités locales et les
établissements public à caractère administratif
* 75A Vitu, J-CL Pén art
434-9 ; corruption des autorités judiciaires n°11.
* 76 Cass. crim., 11 mai 1876 :
Bull. crim., n° 117.
* 77A Vitu, J-CL Pén art
434-9, op cit
* 78 Garraud ,
Traité théorique et pratique du droit pénal
français Tome 4, 3eme éd, n°1524.
* 79 E Garçon, code
pénal annoté 2° éd. Art 177-178, n°151 et s.
* 80 Cass. crim., 25 mars 1929
: Bull. crim., n° 107.
* 81 J.O Ch dép ,16 oct
1918 p2687 cité par VITU J-CL Pén art 432-11
* 82 R. Merle et A. Vitu,
Traité de droit criminel, Droit pénal spécial, par A. Vitu
: Cujas, 1982, n° 1151.
* 83 VITU J-CL Pén art
432-11fasc 20.
* 84 Ibid concernant l'adoption
de la jurisprudence de la conception large.
* 85 Kaldi hejer mémoire
de fin d'étude à l'E.N.M 1998 /1999 p23.
* 86 André Vitu,
, Les préoccupations actuelles de la politique criminelle
française dans la répression de la corruption, in Les principaux
aspects de la politique criminelle moderne : Recueil d'études
à la mémoire de H. Donnedieu de Vabres, 1960, p137.
* 87 André Vitu J-Cl
Pén Art. 435-1 à 435-6 :DES ATTEINTES À
L'ADMINISTRATION PUBLIQUE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES, DES
ÉTATS MEMBRES DE L'UNION EUROPÉENNE, DES AUTRES ÉTATS
ÉTRANGERS ET DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES PUBLIQUES, n°2.
* 88 Voir le rapport mondial
sur la corruption 2003 ; thème spécial : L'accès
à l'information. Transparency international
* 89 Vitu,. J-Cl Pén
Art. 435-1 à 435-6 .
* 90 la Convention du 26 mai
1997 ;JOCE n° C 195, 25 juin 1997, p. 1
* 91 Exemple cité par
André Vitu, J-Cl Pén Art. 435-1 à 435-6 :DES
ATTEINTES À L'ADMINISTRATION PUBLIQUE DES COMMUNAUTÉS
EUROPÉENNES, DES ÉTATS MEMBRES DE L'UNION EUROPÉENNE, DES
AUTRES ÉTATS ÉTRANGERS ET DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES
PUBLIQUES,n°15.
* 92 Ibid.
* 93
frédérique Chopin ; l'adaptation de la lutte contre la
corruption en droit français à l'espace économique
européen et international. : Rev. pénit. 2002 p55.
* 94 André Vitu, J-Cl
Pén art 432-11 et 433-1CP.
* 95 par André Vitu,
J-Cl Pén Art. 435-1 à 435-6 :DES ATTEINTES À
L'ADMINISTRATION PUBLIQUE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES, DES
ÉTATS MEMBRES DE L'UNION EUROPÉENNE, DES AUTRES ÉTATS
ÉTRANGERS ET DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES PUBLIQUES,n°17.
* 96 Article premier Conv.
OCDE, 17 déc. 1997 : JO 29 sept. 2000.
* 97 W. Jeandidier, Du
délit de corruption et des défauts qui l'affectent, JCP G 2002,
I, 166.
* 98 En ce sens, Vitu J-Cl
Pénal, Art 432-11 n°87.
* 99 Vitu J-Cl Pén Fasc.
20: corruption de salariés n° 23.
* 100 W. Jeandidier, Du
délit de corruption et des défauts qui l'affectent JCP G 2002, I,
166.
* 101 Bacem Lahmer, la
corruption et les réponses de la politique criminelle p 59.
* 102 Ahmed fathi Sourour,
manuel de droit des peines, partie spécial ; des atteintes à
l'intérêt général p54.
* 103 En ce sens, Vitu J-Cl
Pénal, Art 432-11 n°83.
* 104 Cass. crim., 9 nov. 1995
: D. 1996, inf. rap. p. 1, 3 cité par Vitu.
* 105 A Vitu, corruption
active et trafic d'influence commis par des particuliers. J-Cl Pén art
433-1 n°16.
* 106 Travaux
préparatoires , op cit .
Kmamkem Ridha ; la portée de la réforme du 23
mai 1998 en matière de corruption p 29.
* 107 Les articles 125
à 130 CPT sont prévus dans une section intitulée :
« outrages et violences à fonctionnaire public ou
assimilé ».
* 108 Lors de la mise au
point du Nouveau Code pénal, il apparut peu logique de maintenir le lien
formel qui unissait jusqu'alors la corruption des fonctionnaires et la
corruption des salariés, et de placer la seconde avec la première
parmi les dispositions concernant les atteintes à l'autorité de
l'État (C. pén., Livre IV, Titre III nouveau).Par son article
236, la loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 relative à
l'entrée en vigueur du nouveau code (dite couramment "Loi d'adaptation")
inséra dans le Code du travail, au Livre Ier, Titre V, chapitre II, une
nouvelle section VI, intitulée "Corruption", et constituée d'un
texte unique, l'article L. 152-6, réprimant la corruption des
salariés.
* 109 Vitu J-Cl Pén
Fasc. 20: corruption de salariés n° 7.
* 110 Voir cass. crim., 30
juin 1955 : Bull. crim., n°330, D. 1955, p. 655 - 17 nov 1955 : Bull.
crim., n°494 - 6 févr. 1969 : Bull. crim., n°67 ; Rev. sc.
crim. 1969, p.871, obs. A. VITU - 23 janv. 1973 : Bull. crim., n°29 ; JCP
1973 éd. G, IV, p.93 ; D. 1973, inf. rap. p.36 , Rev. sc. crim. 1973,
p.684, obs. A. VITU -CA Paris, 14 janv. 1988 : Rev. sc. crim. 1989, p.123, obs.
P.BOUZAT..., cités par VITU, J - CL, Pénal, Art. 432 - 11,
n°87, p.16.
* 111 Cass. crim., 5 janv.
1933 : Gaz. Pal. 1933, 1, p.411 - 22 avr. 1937. Gaz. Pal. 1937, 2, p.272,
cités par VITU, J - CL, Pénal, Art. 432 - 11, n°87,
p.16.
* 112 Cass. crim., 7 janv.
1808 : Bull. crim., n°3, cités par VITU, J - CL, Pénal,
Art. 432 - 11, n°87, p.16.
* 113 Le paiement d'une
nite de tailleur, cass. crim., 7 sept. 1935, 2, p.694 - la réception
d'un pourcentage sur certains bénéfices escomptés par le
corrupteur cass. crim., 14 janv. 1949 : Bull. crim., n°9, JCP 1949,
éd. G, II, 4866, note A. COLOMBINI, D. 1949, p.96..., cités par
VITU, J - CL, Pénal, Art. 432 - 11, n°88, p.16.
* 114 Un fonctionnaire de
ponts et chaussées menaçait un entrepreneur de l'exclure de tous
les marchés publics des ponts et chaussées à moins qu'il
licencie un salarié que le fonctionnaire avait désigné.
Voir Cass. crim., 14 nov. 1975 : Bull. crim., n°356, JCP 1978, éd.
G, IV, p.28, D. 1978, inf. rap., p.139 : Gaz. Pal. 1978, 2, somm, p.295 ; Rev.
sc. crim. 1978, p.623, obs. A. VITU. Par ailleurs, il semble que la promesse de
relations sexuelles qu'un fonctionnaire exige pour prix de sa corruption soit
considérée par le Professeur André VITU comme un avantage
subjectif, entendu la manière dont il en parle. En effet, il en parle
aussitôt après avoir parlé de l'assouvissement d'une haine
dans la rubrique " avantage subjectif " (VITU, J - CL, Pénal, Art. 432
- 11, n°89, p.16.).
* 115 Trib. enfants
Sarreguemines, 11 mai 1967 : JCP 1968, éd. G, II, 15359, note P. A.
SIGALAS ; Rev. sc. crim. 1968, p.329, obs. A.VITU, cités par VITU, J -
CL, Pénal, Art. 432 - 11, n°89, p.16.
* 116 Trib. enfants
Sarreguemines, 11 mai 1967, préc
* 117 Le droit italien entend
par chose offerte tout avantage matériel, intellectuel ou social, il
désigne la chose offerte ou sollicitée du terme, trés
vague, d' "utilité" (J-CL, Pénal, Art. 177 à 183,
n°82, p.14).
* 118 Voir sur ces
difficultés VITU André, J-CL, Pénal, art 432 - 11, fasc.
20, Op. cit., n°31, p.6.
* 119 Formule utilisée
par Vitu A, J-CL Pén, art 432-11 n°93.
* 120 Cass crim 13 déc
1972 bull crim n°391 cité par Vitu A.
* 121 Vitu A, J-CL Pén,
art 432-11 n°93.
* 122 Code pénal
Italien art 318.
* 123 Vitu A, J-CL Pén,
art 432-11 n°93.
* 124 Voir ses observations
dans Rev.sc. crim 1987, p 685.
* 125 Vitu A, J-CL
Pén, art 432-11 n°93.
* 126 Cass. crim., 6
févr. 1968 : Bull. crim., n° 37 cité par Vitu.
* 127
DELMAS-SAINT-HILAIRE ; Rev.sc. crim 1987, p 685
* 128 cette adjonction a
été combattue par le gouvernement qui estimait d'une part que
cette disposition était contraire à la conception traditionnelle
française de la corruption et d'autre part que les actes de
rémunération a posteriori pouvaient toujours être
poursuivis sous le chef d'abus de biens sociaux pour le corrupteur etde recel
d'abus de biens sociaux pour le corrompu.
* 129 Voir, W. Jeandidier,
Du délit de corruption et des défauts qui l'affectent JCP G 2002,
I, 166.
* 130 Proposition
d'André Vitu.
* 131 Voir par exemple,
Véron, corruption, trafic d'influence, prise illégale
d'intérêts, favoritisme : R J com, nov, 2001 p38.
* 132 Jondi Abdelmalek ;
encyclopédie pénale Tome IV p 13.
* 133 La peine est la
même quel que soit le moment de la rémunération, à
savoir dix ans d'emprisonnement(voir art 432-11).
* 134 GARRAUD.R, Traité
théorique et pratique du droit pénal français t. IV :
Sirey, 3e éd., n° 1518 s.
* 135Cette est partagée
par Blanche, Chauveau et F. Hélie .
* 136 Vitu A, J-CL
Pén, art 432-11 n°144.
* 137 Kmamkem Ridha ; la
portée de la réforme du 23 mai 1998 en matière de
corruption p 60.
* 138 Blanche,
Hélie..
* 139 Jondi Abdelmalek ;
encyclopédie pénale Tome IV p16.
* 140 Cass. Crim. 16 nov. 1844
: Bull. crim., n° 376 ; S. 1845, 1, p. 39. cité par Vitu, J-CL art
432-11 n° 147.
* 141 Ibid.
* 142 Cass. crim., 21
févr. 1882 : Bull. crim., n° 52 ; S. 1884, 1, p. 351 cité
par Vitu J-CL art 432-11 n° 147.
* 143 C. assises Seine, 21
mars 1893 : Gaz. trib. 22 mars 1893 cité par Vitu J-CL art 432-11
n° 147.
* 144 Cass. crim., 9 nov. 1995
: Bull. crim., n° 346 ; D. 1996, somm., p. 259, obs. J. Pradel ; JCP G
1996, IV, 513.
* 145 Cass crim n°6398 du
17 mars 1982 Bull C. Cass 1982 p 131.
* 146 Jondi Abdelmalek ;
encyclopédie pénale Tome IV p18.
* 147 La corruption passive
est punie de vingt ans d'emprisonnement si le fonctionnaire public l'a
provoquée et de dix ans d'emprisonnement si il a agrée les
offres proposées.
* 148 Voir introduction.
* 149 Cass. crim., 21 nov.
1972, Bull. crim., n° 350, cité par VITU, J -CL, Pénal, Art
432-11, fasc. 20, n° 34, p. 6.
* 150 Crim. 28 mars 1955,
Bull, n° 181, cité par VITU, J -CL, Pénal, Art 432-11,
n° 101, p. 18.
* 151 Crim. 10 juin 1948, S.
1948, I, 117, note M ROUSSELET et M PATIN - 6 fév. 1968, Bull, n°
37, cités par VITU, J -CL, Pénal, Art 432-11, n° 101, p.
18.
* 152 La définition
positive des actes de la fonction comprend, d'autre part, les actes dont les
devoirs de la fonction font au titulaire l'obligation de s'abstenir : voir
Cass. crim , 20 janv. 1927 ; D. H. 1927, p.151 ; Gaz. Pal. 1927, p.
602 sur la corruption d'un employé de commerce qui vendait à des
maisons qui n'était pas en relations d'affaires avec son employeur et
avec des constats anormalement avantageux, malgré une interdiction de
son patron
* 153 VITU (A), J- CL.,
Pénal, art. 432-11, n° 100, p. 18.
* 154 Ibid. formules
empruntées au Professeur VITU. Voir aussi Cass. crim., 6 févr.
1968, préc.
* 155 Cass. crim, 14 janv.
1949 préc. Comp. Crim, 19, juill. 1951 (J- CL, Pénal,
art. 432-11, n° 105, p. 19).
* 156 VITU (A), J- CL,
Pénal, art 432-1, p. 18.
* 157 Cass. crim. 28 mars 1955
préc. ; Cass. crim., 13 déc. 1945 : JCP 1946, éd
G, IV, p. 17- 10 juin 1948 : Bull. crim, n° 154, JCP 1948, éd.
G, II, 4433, Cf VITU (A), J- CL, Pénal, art. 432-11, n°
101, p.18.
* 158 Voir pour cette
discussion : VITU, J- CL, Pénal, art 432-11, Op. cit.,
n° 111, p. 19.
* 159 Affaire du planton qui
travaillait au Ministère du travail. Une fois dans le bureau d'un chef
de service absent, il avait apposé sur des certificats d'embauchage de
deux ouvriers italiens le cachet et le visa réglementaires (Cass. crim,
4 mai 1935, cité par VITU, J- CL, Pénal, art 432-11, op.
cit., n° 113, p. 20).
* 160 VITU (A.), J- CL,
Pénal, art. 432-11 fasc. 20, n° 38, p. 7.
* 161 Pour les illustrations
jurisprudentielles nombreuses des deux notions, Voir VITU (A.). J- CL,
Pénal, art. 432-11, n° 116, p. 20, et art. 432-11 fasc. 20, n°
143 et 144, pp 7 et 8.
* 162 Cette contrepartie peut
prendre la forme d'un versement d'espèce, d'un chèque, d'un
mandat postal ou d'un achat de timbres fiscaux. En général, il
s'agit de sommes symboliques.
* 163 Un greffier qui accepte
des dons afin de permettre l'ajournement d'une affaire en cours.
* 164 Cass crim du 27 octobre
1995 Bull C. cass 1995 p98.
* 165 Voir « le but
des manoeuvres corruptrices en droit français »
* 166 Kmakehem Ridha ;
la portée de la réforme du 23 mai 1998 en matière de
corruption p21.
* 167 Cass crim n°73507
du 16 avril 1999.
* 168 Cass crim n°84618
du 20 mai 2000.
* 169 Pour plus de
précisions ; Voir VITU J-Cl Pén art 432-11 CPF n°
49.
* 170 la loi n° 93-122 du
29 janvier 1993, JCP 1993, III, 65957.
* 171 Monié
stéphanie ; Corruption et procédure pénale,
mémoire DEA Sc Crim UT1 sous la direction de M. marc Second 2001/2002 p
16.
* 172 L'infraction de
corruption était considérée comme étant une
infraction d'intérêt général dés la
début du XX eme siècle. Cette théorie a été
critiqué par la doctrine(J. pradel procédure pénal Cujas
2002/2003 n° 291 et s) ainsi que la chambre criminelle dans un arrêt
du 1déc 1992 a considéré que « si le
délit de corruption passive institué par l'article 177 du code
pénal l'a été principalement en vue de
l'intérêt général, il tend également à
la protection des particuliers qui peuvent...subir un préjudice direct
et personnel dont ils sont fondés à obtenir réparation
devant les juridictions pénales ». Voir notamment, Cass.
crim., 1er déc. 1992 : Dr. pén. 1993, comm. n° 126, obs. M.
Véron).
* 173 Cass Crim 1er
déc 1992COSTA, Dr pén 1992comm.126, obs M
véron.(1er espèce )et cass crim 7 fév 2001
Bull crim n°38(2eme espèce).
* 174 Cass crim n°4322 du
7 jan 1983 bull Cour de cass tunisienne p56.
* 175 loi n°112
promulguée le 12 décembre1983 .JORT 13 déc 1983 relative
au statut de fonctionnaires publics.
* 176 Cass crim 18 déc
1996, J.C.P 1997 IV 926.
* 177 Nous partageons la
même idée avancée par Monié S ; corruption et
procédure pénale, mémoire DEA Sc Crim UT1.
* 178 Cass. crim., 1er
déc. 1992 op Cit.
* 179 Alain Blanchot J-Cl
Procédure Pénale art 704 à 706 CPPF ; les
juridictions spécialisées en matière économique et
financière.
* 180 J. Pradel
procédure pénal Cujas 2002/2003 n°124.
* 181 Vitu A ; J-Cl
Pén 435-1CPF et suivant n°37.
* 182 les infractions que
répriment les articles 435-1 à 435-4 CPF sont fréquemment
marquées par un ou plusieurs éléments
d'extranéité. Or, les règles ordinaires du droit
pénal international, où prédominent les principes de
territorialité et de personnalité, seraient souvent insuffisantes
pour les atteindre et les réprimer. Il fallait donc parer à la
difficulté en faisant appel au principe de compétence
universelle. Voir Vitu A ; J-Cl Pén 435-1CPF et s.
* 183J Pradel ibid.
* 184 article 21 de la loi
2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions
de la criminalité( JO 10 mars 2004 p4567).
* 185 Voir article 706 CPPF
tel que modifié par la loi du 9 mars 2004.
* 186 Voir pour plus de
précision. J Pradel manuel de procédure pénale éd
2002/2003 n°121
* 187 F. Le Gunehec. JCP
éd gén , n° 14 du 31 mars 2004 p598.Voir notamment
l'article 125 de la loi du 9 mars 2004.
* 188 Il s'agit des personnes
visées par les articles 435-3 et 435-4 CPF.
* 189 Vitu A ; J-Cl
Pén 435-1CPF et suivant n°39.
* 190 Conseil Constit, 22 jan
1999 Dalloz 1999 p 285.
* 191 Cass ass plé 10
oct 2001 dalloz 2002 p 237.
* 192 Règle
générale relative à toutes les juridictions
d'exception.
* 193 Cass crim 26 juin 1995,
bull crim n° 235 , J.C.P 1995-IV-2380.
* 194 L'affaire Noir 6
fév 1997, bull n° 48 dalloz 1997 p 334 note J F Renucci. /Affaire
Elf 16 fév 2000 dalloz 2001 p 660 note V Buck.
* 195 Loi constitutionnelle
n° 95-680 du 4 août 1995.
* 196 La loi n°10-1970 du
1 avril 1970relative à la Haute Cour.
* 197 Cet article a
été modifié par la loi constitutionnelle n°51-2002,
du 1er juin 2002.
* 198 Voir article 59 et
suivant du Code de la justice militaire.
* 199 Voir article 700 CPPF et
article 68 C.J.M.
* 200 Voir article 701 CPP et
article 68 CJM.
* 201 JORT du 11 janvier 1957
p 50 et s.
* 202 Cette loi a
été modifiée à plusieurs reprises notamment par la
loi du 30 juin 2000 et la loi du 9 mars 2004.
* 203 Les assistants
spécialisés sont crées par la loi n°98-546 du 2
juillet 1998.suite à la réforme du 9 mars 2004 de nouvelles
attributions leurs sont confiées Voir article 21 de la loi.
* 204 J-F Renucci ;
infractions d'affaires et prescription de l'action publique. Dalloz 1997 Chron
p 23.
* 205 Bernard Challe; J-Cl
Art. 7 à 9/Fasc. unique: ACTION PUBLIQUE - Prescription n°29.
* 206 un arrêt du 7
décembre 1967,Bull. crim., n° 321 ; D. 1968, jurispr. p. 617.
* 207 un arrêt du 10
août 1981 (Bull. crim., n° 244 ; Rev. soc. 1983, p. 368, note
Bouloc).
* 208 arrêt du 5 mai
1997, Bull. crim., n° 159 ; Rev. soc. 1997, p. 127, note Bouloc. - J.
Larguier et P. Conte, Droit pénal des affaires : 10e éd., A.
Colin, 2001, n° 379 s.
* 209 Pour plus de
précision concernant ces infraction, voir Bernard Challe; J-Cl Art. 7
à 9/Fasc. unique: ACTION PUBLIQUE - Prescription n°30et s.
* 210 Vitu, J-Cl Pén
art 432-11 du code pénal n°151.
* 211 Cass. crim., 6
févr. 1969 : Bull. crim., n° 67 ; Rev. sc. crim. 1969, p. 871, obs.
A. Vitu. - 9 nov. 1995 : Bull. crim., n° 346. - 27 oct. 1997 : Bull.
crim., n° 352 ; Dr. pén 1998, comm. 16, note M. Véron ;
Petites affiches 1997, n° 134, p. 23, note Ducouloux-Favard. Cité
par B Challes.
* 212 Vitu,J.-Cl. Pénal
Code, Art. 432-11, Fasc. 10, n°, 154 et Art. 433-1 et 433-2, n° 48 et
49).
* 213 Vitu A, J-Cl Pén
art 434-9 CPF n°18
* 214 Les peines
portées étaient moins fortes quand la corruption tendait à
l'accomplissement d'un acte facilité par la fonction. Vitu,J.-Cl.
Pénal Code, Art. 432-11 n°118.
* 215 Dans l'ancien
système, pour la corruption de fonctionnaire, l'amende pouvait
être double de la valeur des promesses agréées ou des
choses reçues ou demandées. Voir art 177 al 1er
ACP.
* 216 W. Jeandidier, Du
délit de corruption et des défauts qui l'affectent JCP G 2002, I,
166.
* 217 Pradel J, manuel de
droit pénal général éd 2002/2003. n°571 et
suivant.
* 218 W. Jeandidier, Du
délit de corruption et des défauts qui l'affectent JCP G 2002, I,
166
* 219 Ahmed Fathi Srour ;
manuel droit des peines, op cit p 146.
* 220 L'article 29 CPT
dispose : « si les objets dont il ordonne la confiscation
n'ont pas été saisis et ne sont pas remis, le jugement en
détermine la valeur pour l'application de la contrainte par
corps »
* 221 Cass. crim., 10
août 1854 : Bull. crim., n° 254 ; DP 1854, 5, p. 200. cite par Vitu
J-Cl Pén art432-11n°144.
* 222 Cette idée est
soutenue par R. GARRAUD, Traité théorique et pratique du droit
pénal français t. IV : Sirey, 3e éd., n° 1518 s.
* 223 pour plus de
précisions. Voir A Vitu op cit n°146.
* 224 Cons const
Décision du 15 mars 1999 ; JO 21 nov 1999, Dalloz 2000 somm p 116,
obs Roujou de Boubée.
* 225 Cité par W.
Jeandidier, Du délit de corruption et des défauts qui l'affectent
JCP G 2002, I, 166.
* 226 Loi n° 83-1997 du
20 décembre 1997. JORT du 22 décembre 1997 p 15.
* 227 Arrêt du tribunal
administratif n°621 du 27 oct 1981 ; bull du trib adm de 1981 p
283.
Arrêt du tribunal administratif n°202 du 27
décembre1978 ; bull adm de 1978 p 237.
* 228 Mohamed Elhessine
Echebbi « l'exemption de peine en matière
pénale » mémoire de fin d'étude DEA sciences
criminelles, Faculté de droit et de sciences politiques de Tunis
1997/1998 p 93.
* 229 Cette idée n'est
pas partagée par Jondi Abdel malek qui pense que le plus important,
à ce niveau, est la répression du fonctionnaire corrompue et non
celle du corrupteur ou de l'intermédiaire.
* 230 Pradel J, vers un
« aggiornamento » des réponses de la
procédure pénale à la criminalité, Apports de la
loi N°2004-204 du 9 mars 2004 dite loi perben II. JCP, éd
géné N°20 du 12 mai 2004 p 881et sui vant.
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